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Nana - Lecteurs.com

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Puis, se mettant à rire, la gorge nue encore :– Seulement, qu’est-ce que tu me donnes ?Il l’avait saisie, il lui baisait les épaules, dans un élan de reconnaissance.Elle, très gaie, frémissante, se débattait, se renversait.– Ah ! je sais, cria-t-elle, excitée par ce jeu. Écoute ce que je veux pourma <strong>com</strong>mission… Le jour de ton mariage, tu m’apporteras l’étrenne deton innocence… Avant ta femme, entends-tu !– C’est ça ! c’est ça ! dit-il, riant plus fort qu’elle.Ce marché les amusa. Ils trouvaient l’histoire bien bonne.Justement, le lendemain, il y avait un dîner chez <strong>Nana</strong> ; d’ailleurs, ledîner habituel du jeudi, Muffat, Vandeuvres, les fils Hugon et Satin. Le<strong>com</strong>te arriva de bonne heure. Il avait besoin de quatre-vingt mille francspour débarrasser la jeune femme de deux ou trois créances et lui donnerune parure de saphirs dont elle mourait d’envie. Comme il venait déjàd’entamer fortement sa fortune, il cherchait un prêteur, n’osant encorevendre une propriété. Sur les conseils de <strong>Nana</strong> elle-même, ils s’était doncadressé à Labordette ; mais celui-ci, trouvant l’affaire trop lourde, avaitvoulu en parler au coiffeur Francis, qui, volontiers, s’occupait d’obligerses clientes. Le <strong>com</strong>te se mettait entre les mains de ces messieurs, par undésir formel de ne paraître en rien ; tous deux prenaient l’engagement degarder en portefeuille le billet de cent mille francs qu’il signerait ; et ilss’excusaient de ces vingt mille francs d’intérêt, ils criaient contre les gredinsd’usuriers, où ils avaient dû frapper, disaient-ils. Lorsque Muffat sefit annoncer, Francis achevait de coiffer <strong>Nana</strong>. Labordette se trouvaitaussi dans le cabinet, avec sa familiarité d’ami sans conséquence. Envoyant le <strong>com</strong>te, il posa discrètement un fort paquet de billets de banqueparmi les poudres et les pommades ; et le billet fut signé sur le marbre dela toilette. <strong>Nana</strong> voulait retenir Labordette à dîner ; il refusa, il promenaitun riche étranger dans Paris. Cependant, Muffat l’ayant pris à part pourle supplier de courir chez Becker, le joaillier, et de lui rapporter la parurede saphirs, dont il voulait faire le soir même une surprise à la jeunefemme, Labordette se chargea volontiers de la <strong>com</strong>mission. Une demiheureplus tard, Julien remettait l’écrin au <strong>com</strong>te, mystérieusement.Pendant le dîner, <strong>Nana</strong> fut nerveuse. La vue des quatre-vingt millefrancs l’avait agitée. Dire que toute cette monnaie allait passer à des fournisseurs! Ça la dégoûtait. Dès le potage, dans cette salle à manger superbe,éclairée du reflet de l’argenterie et des cristaux, elle tourna au sentiment,elle célébra les bonheurs de la pauvreté. Les hommes étaient enhabit, elle-même portait une robe de satin blanc brodé, tandis que Satin,plus modeste, en soie noire, avait simplement au cou un cœur d’or, un238

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