13.07.2015 Views

Nana - Lecteurs.com

Nana - Lecteurs.com

Nana - Lecteurs.com

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

entendait très mal, l’épaisseur des portières étouffait les bruits. Pourtant,il attrapait quelques mots prononcés par Philippe, des phrases dures oùsonnaient les mots d’enfant, de famille, d’honneur. Dans l’anxiété de ceque sa chérie allait répondre, son cœur battait, l’étourdissait d’un bourdonnementconfus. À coup sûr, elle lâcherait un « sale mufe ! » ou un« foutez-moi la paix, je suis chez moi ! ». Et rien ne venait, pas unsouffle ; <strong>Nana</strong> était <strong>com</strong>me morte, là-dedans. Bientôt même, la voix deson frère s’adoucit. Il ne <strong>com</strong>prenait plus, lorsqu’un murmure étrangeacheva de le stupéfier. C’était <strong>Nana</strong> qui sanglotait. Pendant un instant, ilfut en proie à des sentiments contraires, se sauver, tomber sur Philippe.Mais, juste à cette minute, Zoé entra dans la chambre, et il s’éloigna de laporte, honteux d’être surpris.Tranquillement, elle rangeait du linge dans une armoire ; tandis que,muet, immobile, il appuyait le front contre une vitre, dévoréd’incertitude. Elle demanda au bout d’un silence :– C’est votre frère qui est chez Madame ?– Oui, répondit l’enfant d’une voix étranglée.Il y eut un nouveau silence.– Et ça vous inquiète, n’est-ce pas, monsieur Georges ?– Oui, répéta-t-il avec la même difficulté souffrante.Zoé ne se pressait pas. Elle plia des dentelles, elle dit lentement :– Vous avez tort… Madame va arranger ça.Et ce fut tout, ils ne parlèrent plus. Mais elle ne quittait pas la chambre.Un grand quart d’heure encore, elle tourna, sans voir monterl’exaspération de l’enfant, qui blêmissait de contrainte et de doute. Il jetaitdes coups d’œil obliques sur le salon. Que pouvaient-ils faire, pendantsi longtemps ? Peut-être <strong>Nana</strong> pleurait-elle toujours ? L’autre brutaldevait lui avoir fichu des calottes. Aussi, lorsque Zoé s’en alla enfin,courut-il à la porte, collant de nouveau son oreille. Et il resta effaré, latête décidément perdue, car il entendait une brusque envolée de gaieté,des voix tendres qui chuchotaient, des rires étouffés de femme qu’onchatouille. D’ailleurs, presque aussitôt, <strong>Nana</strong> reconduisit Philippe jusqu’àl’escalier, avec un échange de paroles cordiales et familières.Quand Georges osa rentrer dans le salon, la jeune femme, debout devantla glace, se regardait.– Eh bien ? demanda-t-il, ahuri.– Eh bien, quoi ? dit-elle sans se retourner.Puis, négligemment :– Que disais-tu donc ? Il est très gentil, ton frère !– Alors, c’est arrangé ?230

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!