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Nana - Lecteurs.com

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– Je voudrais voir ça, par exemple ! Il a beau être lieutenant, Françoiste le flanquera à la porte, et raide !Puis, le petit revenant toujours sur son frère, elle finit par s’occuper dePhilippe. Au bout d’une semaine, elle le connut des pieds à la tête, trèsgrand, très fort, gai, un peu brutal ; et, avec ça, des détails intimes, despoils sur les bras, un signe à l’épaule. Si bien qu’un jour, toute pleine del’image de cet homme qu’elle devait jeter à la porte, elle s’écria :– Dis donc, Zizi, il ne vient pas, ton frère… C’est donc un lâcheur !Le lendemain, <strong>com</strong>me Georges se trouvait seul avec <strong>Nana</strong>, Françoismonta pour demander si Madame recevrait le lieutenant Philippe Hugon.Il devint tout pâle, il murmura :– Je m’en doutais, maman m’a parlé ce matin.Et il suppliait la jeune femme de faire répondre qu’elle ne pouvait recevoir.Mais elle se levait déjà, tout enflammée, en disant :– Pourquoi donc ? Il croirait que j’ai peur. Ah bien ! nous allons rire…François, laissez ce monsieur un quart d’heure dans le salon. Ensuite,vous me l’amènerez.Elle ne se rassit pas, elle marchait, fiévreuse, allant de la glace de lacheminée à un miroir de Venise, pendu au-dessus d’un coffret italien ; et,chaque fois, elle donnait un coup d’œil, essayait un sourire, tandis queGeorges, sans force sur un canapé, tremblait, à l’idée de la scène qui sepréparait. Tout en se promenant, elle lâchait des phrases courtes.– Ça le calmera, ce garçon, d’attendre un quart d’heure… Et puis, s’ilcroit venir chez une fille, le salon va l’épater… Oui, oui, regarde bientout, mon bonhomme. Ce n’est pas du toc, ça t’apprendra à respecter labourgeoise. Il n’y a encore que le respect, pour les hommes… Hein ? lequart d’heure est écoulé ? Non, à peine dix minutes. Oh ! nous avons letemps.Elle ne tenait pas en place. Au quart, elle renvoya Georges, en lui faisantjurer de ne pas écouter à la porte, car ce serait inconvenant, si les domestiquesle voyaient. Comme il passait dans la chambre, Zizi risquad’une voix étranglée :– Tu sais, c’est mon frère…– N’aie pas peur, dit-elle avec dignité, s’il est poli, je serai polie.François introduisait Philippe Hugon, qui était en redingote. D’abord,Georges traversa la chambre sur la pointe des pieds, pour obéir à la jeunefemme. Mais les voix le retinrent, hésitant, si plein d’angoisse, que sesjambes mollissaient. Il s’imaginait des catastrophes, des gifles, quelquechose d’abominable qui le fâcherait pour toujours avec <strong>Nana</strong>. Aussi neput-il résister au besoin de revenir coller son oreille contre la porte. Il229

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