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Nana - Lecteurs.com

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alors sa fortune dans un coup de fièvre chaude. Ses chevaux et Lucy luiavaient mangé trois fermes, <strong>Nana</strong> allait d’une bouchée avaler son dernierchâteau, près d’Amiens ; et il avait <strong>com</strong>me une hâte de tout balayer, jusqu’auxdé<strong>com</strong>bres de la vieille tour bâtie par un Vandeuvres sous PhilippeAuguste, enragé d’un appétit de ruines, trouvant beau de laisserles derniers besants d’or de son blason aux mains de cette fille, que Parisdésirait. Lui aussi accepta les conditions de <strong>Nana</strong>, une liberté entière, destendresses à jours fixes, sans même avoir la naïveté passionnée d’exigerdes serments. Muffat ne se doutait de rien. Quant à Vandeuvres, il savaità coup sûr ; mais jamais il ne faisait la moindre allusion, il affectaitd’ignorer, avec son fin sourire de viveur sceptique, qui ne demande pasl’impossible, pourvu qu’il ait son heure et que Paris le sache.Dès lors, <strong>Nana</strong> eut réellement sa maison montée. Le personnel était<strong>com</strong>plet, à l’écurie, à l’office et dans la chambre de Madame. Zoé organisaittout, sortait des <strong>com</strong>plications les plus imprévues ; c’était machiné<strong>com</strong>me un théâtre, réglé <strong>com</strong>me une grande administration ; et cela fonctionnaitavec une précision telle, que, pendant les premiers mois, il n’yeut pas de heurts ni de détraquements. Seulement, Madame donnait tropde mal à Zoé, par des imprudences, des coups de tête, des bravadesfolles. Aussi la femme de chambre se relâchait-elle peu à peu, ayant remarquéd’ailleurs qu’elle tirait de plus gros profits des heures de gâchis,quand Madame avait fait une bêtise qu’il fallait réparer. Alors, les cadeauxpleuvaient, elle pêchait des louis dans l’eau trouble.Un matin, <strong>com</strong>me Muffat n’était pas encore sorti de la chambre, Zoéintroduisit un monsieur tout tremblant dans le cabinet de toilette, où <strong>Nana</strong>changeait de linge.– Tiens ! Zizi ! dit la jeune femme stupéfaite.C’était Georges, en effet. Mais, en la voyant en chemise, avec ses cheveuxd’or sur ses épaules nues, il s’était jeté à son cou, l’avait prise et labaisait partout. Elle se débattait, effrayée, étouffant sa voix, balbutiant :– Finis donc, il est là ! C’est stupide… Et vous, Zoé, êtes-vous folle ?Emmenez-le ! Gardez-le en bas, je vais tâcher de descendre.Zoé dut le pousser devant elle. En bas, dans la salle à manger, lorsque<strong>Nana</strong> put les rejoindre, elle les gronda tous les deux. Zoé pinçait leslèvres ; et elle se retira, l’air vexé, en disant qu’elle avait pensé faire plaisirà Madame. Georges regardait <strong>Nana</strong> avec un tel bonheur de la revoirque ses beaux yeux s’emplissaient de larmes. Maintenant, les mauvaisjours étaient passés, sa mère le croyait raisonnable et lui avait permis dequitter les Fondettes ; aussi, en débarquant à la gare, venait-il de prendreune voiture pour embrasser plus vite sa bonne chérie. Il parlait de vivre227

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