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Nana - Lecteurs.com

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– Arrivez donc, cria Fauchery, disparu depuis un moment ; on vousdemande.C’était, au fond du corridor, la loge de Clarisse et de Simonne, unepièce en longueur, sous les toits, mal faite, avec des pans coupés et desfuites de mur. Le jour venait d’en haut, par deux ouvertures profondes.Mais, à cette heure de nuit, des flammes de gaz éclairaient la loge, tapisséed’un papier à sept sous le rouleau, des fleurs roses courant sur untreillage vert. Côte à côte, deux planches servaient de toilette, desplanches garnies d’une toile cirée, noire d’eau répandue, et sous lesquellestraînaient des brocs de zinc bossués, des seaux pleins de rinçures,des cruches de grosse poterie jaune. Il y avait là un étalage d’articles debazar, tordus, salis par l’usage, des cuvettes ébréchées, des peignes decorne édentés, tout ce que la hâte et le sans-gêne de deux femmes sedéshabillant, se débarbouillant en <strong>com</strong>mun, laissent autour d’elles dedésordre, dans un lieu où elles ne font que passer et dont la saleté ne lestouche plus.– Arrivez donc, répéta Fauchery avec cette camaraderie des hommeschez les filles, c’est Clarisse qui veut vous embrasser.Muffat finit par entrer. Mais il resta surpris, en trouvant le marquis deChouard installé entre les deux toilettes, sur une chaise. Le marquiss’était retiré là. Il écartait les pieds, parce qu’un seau fuyait et laissaitcouler une mare blanchâtre. On le sentait à l’aise, connaissant les bonsendroits, ragaillardi dans cet étouffement de baignoire, dans cette tranquilleimpudeur de la femme, que ce coin de malpropreté rendait naturelleet <strong>com</strong>me élargie.– Est-ce que tu vas avec le vieux ? demanda Simonne à l’oreille deClarisse.– Plus souvent ! répondit celle-ci tout haut.L’habilleuse, une jeune fille très laide et très familière, en train d’aiderSimonne à mettre son manteau, se tordit de rire. Toutes trois se poussaient,balbutiaient des mots qui redoublaient leur gaieté.– Voyons, Clarisse, embrasse le monsieur, répéta Fauchery. Tu saisqu’il a le sac.Et, se tournant vers le <strong>com</strong>te :– Vous allez voir, elle est très gentille, elle va vous embrasser.Mais Clarisse était dégoûtée des hommes. Elle parla violemment dessalauds qui attendaient en bas, chez la concierge. D’ailleurs, elle étaitpressée de redescendre, on allait lui faire manquer sa dernière scène.Puis, <strong>com</strong>me Fauchery barrait la porte, elle posa deux baisers sur les favorisde Muffat, en disant :116

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