Candolle, Alphonse de. Origine des plantes cultivées ... - EditAEFA

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13.07.2015 Views

MAÏS 317avant que l'homme se fût mis à le cultiver, on ne peut faire quedes conjectures. Je les énoncerai, selon ma manière de voir,parce qu'elles conduisent pourtant à certaines indicaticns probables.Je remarque d'abord que le Maïs est une plante singulièrementdépourvue de moyens de dispersion et de protection. Lesgraines se détachent difficilement de l'épi, qui est lui-mêmeenveloppé. Elles n'ont aucune aigrette ou aile dont le vent puisses'emparer. Enfin, quand l'homme ne recueille pas l'épi, ellestombent enchâssées dans leur gangue, appelée rafle, et alors lesrongeurs et autres animaux doivent les détruire en qualité,d'autant mieux qu'elles ne sont pas assez dures pour traverserintactes les voies digestives. Probablement, une espèce aussi malconformée devenait de plus en plus rare, dans quelque régionlimitée, et allait s'éteindre, lorsqu'une tribu errante de sauvages,s'étant aperçue de ses qualités nutritives, l'a sauvée de sa perteen la cultivant. Je crois d'autant plus à une habitation naturellerestreinte que l'espèce est unique, c'est-à-dire qu'elle constituece qu'on appelle un genre monotype. Evidemment les genres depeu d'espèces et surtout les monotypes ont, en moyenne, unehabitation plus étroite que les autres. La paléontologie apprendrapeut-être un jour s'il a existé en Amérique plusieursZea ou Graminées analogues, dont notre Maïs serait le dernier.Au temps actuel le genre Zea, non seulement est monotype,mais encore est assez isolé dans sa famille. On peut mettre àcôté de lui un seul genre, Euchlxna, de Schrader, dont uneespèce est au Mexique et l'autre à Guatemala, mais c'est ungenre bien particulier et sans transitions avec le Zea.M. Wittmack a fait des recherches curieuses pour devincrquelle variété du Maïs représente, avec une certaine probabilité,la forme d'une époque antérieure aux cultures. Dans ce but, il acomparé des épis et des grains extraits des Mounds de l'Amériquedu Nord, et des tombeaux du Pérou. Si ces monumentsavaient montré une seule forme de Maïs, le résultat aurait étésignificatif; mais il s'est trouvé plusieurs variétés différentes,soit dans les fflounds, soit au Pérou. Il ne faut pas s'en étonner.Ces monuments ne sont pas très anciens. Le cimetière d'Ancon,au Pérou, dont M. Wittmack a obtenu les meilleurs échantillons,est à peu près contemporain de la découverte de l'Amérique1. Or, à cette époque, le nombre des variétés était déjàconsidérable, selon tous les auteurs, ce qui prouve une culturebeaucoup plus ancienne.Des expériences dans lesquelles on sèmerait, plusieurs annéesl. Rochebrnne,Recherches ethnographiques sur les sépulturespéruviennesd'Ancon,d'après un extrait par Wittmack, dans Uhhvorm,Bot. Centralblatt,1880,p. 1633,où l'on voit quele cimetièrea serviavant et depuisla découvertede l'Amérique.

318 PLANTES CULTIVÉESPOUR LEURS GRAINESde suite, des variétés de Maïs, dans des terrains non cultivés,montreraient peut-être un retour à quelque forme commune,qu'on pourrait alors considérer comme la souche. Rien de pareiln'a été fait. On a seulement observé que les variétés sont peustables, malgré leur grande diversité.Quant à l'habitation de la forme primitive inconnue, voici lesraisonnements qui peuvent la faire entrevoir jusqu'à un certainpoint.Les populations agglomérées n'ont pu se former que dans lespays où se trouvaient naturellement des espèces nutritivesfaciles à cultiver. La pomme de terre, la batate et le maïs ontjoué sans doute ce rôle en Amérique, et les grandes populationsde cette partie du monde s'étant montrées d'abord dans lesrégions situées à une certaine élévation, du Chili au Mexique,c'est là probablement que se trouvait le Maïs sauvage. Il nefaut pas chercher dans les régions basses, telles que le Paraguay,les bords du fleuve des Amazones, ou les terres chaudes de laGuyane, de Panama et du Mexique, puisque leurs habitantsétaient jadis moins nombreux. D'ailleurs les forêts ne sont nullementfavorables aux plantes annuelles, et le Maïs ne prospèreque médiocrement dans les contrées chaudes et humides où l'oncultive le Manioc i.D'un autre côté, sa transmission, de proche en proche, est plusfacile à comprendre si le point de départ est supposé au centreque si on le place àl'une des extrémités del'étendue dans laquelleon cultivait l'espèce du temps des Incas et des Toltecs, ou plutôtdes Mayas, Nahuas et Chibchas qui les ont précédés. Les migrationsdes peuples n'ont pas marché régulièrement du nord aumidi ou du midi au nord. On sait qu'il y en a eu dans des sensdivers, selon les époques et les pays 2. Les anciens Péruviensavaient à peine connaissance des Mexicains et vice versa, commele prouvent leurs croyances et des usages extrêmement différents.Pour qu'ils aient cultivé de bonne heure, les uns et lesautres, le Maïs, il faut supposer un point de départ intermédiaireou à peu près. J'imagine que la Nouvelle-Grenade répondassez bien à ces conditions. Le peuple appelé Chibcha, qui occupaitle plateau de Bogota lors de la conquête par les Espagnolset se regardait comme autochtone, était cultivateur. Il jouissaitd'un certain degré de civilisation, attesté par des monumentsque l'on commence à explorer. C'est peut-être lui qui possédaitle Maïs et en avait commencé la culture. Il touchait d'un côtéaux Péruviens, encore peu civilisés, et de l'autre aux Mayas, qui1. Sagot, Culturedescéréalesde la Guyanefrançaise(Journal de la Soc.centr.d'hortic.deFrance,1872,p. 94).2.M.de Nadaillac,dans son ouvrageintitulé Les premiershommesetles tempspréhistoriques,donneun abrégédupeu que l'on sait aujourd'huisur ces migrations et engénéralsur les ancienspeuplesd'AmériqueṾoiren particulierle vol. 2, chap. 9.

MAÏS 317avant que l'homme se fût mis à le cultiver, on ne peut faire que<strong>de</strong>s conjectures. Je les énoncerai, selon ma manière <strong>de</strong> voir,parce qu'elles conduisent pourtant à certaines indicaticns probables.Je remarque d'abord que le Maïs est une plante singulièrementdépourvue <strong>de</strong> moyens <strong>de</strong> dispersion et <strong>de</strong> protection. Lesgraines se détachent difficilement <strong>de</strong> l'épi, qui est lui-mêmeenveloppé. Elles n'ont aucune aigrette ou aile dont le vent puisses'emparer. Enfin, quand l'homme ne recueille pas l'épi, ellestombent enchâssées dans leur gangue, appelée rafle, et alors lesrongeurs et autres animaux doivent les détruire en qualité,d'autant mieux qu'elles ne sont pas assez dures pour traverserintactes les voies digestives. Probablement, une espèce aussi malconformée <strong>de</strong>venait <strong>de</strong> plus en plus rare, dans quelque régionlimitée, et allait s'éteindre, lorsqu'une tribu errante <strong>de</strong> sauvages,s'étant aperçue <strong>de</strong> ses qualités nutritives, l'a sauvée <strong>de</strong> sa perteen la cultivant. Je crois d'autant plus à une habitation naturellerestreinte que l'espèce est unique, c'est-à-dire qu'elle constituece qu'on appelle un genre monotype. Evi<strong>de</strong>mment les genres <strong>de</strong>peu d'espèces et surtout les monotypes ont, en moyenne, unehabitation plus étroite que les autres. La paléontologie apprendrapeut-être un jour s'il a existé en Amérique plusieursZea ou Graminées analogues, dont notre Maïs serait le <strong>de</strong>rnier.Au temps actuel le genre Zea, non seulement est monotype,mais encore est assez isolé dans sa famille. On peut mettre àcôté <strong>de</strong> lui un seul genre, Euchlxna, <strong>de</strong> Schra<strong>de</strong>r, dont uneespèce est au Mexique et l'autre à Guatemala, mais c'est ungenre bien particulier et sans transitions avec le Zea.M. Wittmack a fait <strong>de</strong>s recherches curieuses pour <strong>de</strong>vincrquelle variété du Maïs représente, avec une certaine probabilité,la forme d'une époque antérieure aux cultures. Dans ce but, il acomparé <strong>de</strong>s épis et <strong>de</strong>s grains extraits <strong>de</strong>s Mounds <strong>de</strong> l'Amériquedu Nord, et <strong>de</strong>s tombeaux du Pérou. Si ces monumentsavaient montré une seule forme <strong>de</strong> Maïs, le résultat aurait étésignificatif; mais il s'est trouvé plusieurs variétés différentes,soit dans les fflounds, soit au Pérou. Il ne faut pas s'en étonner.Ces monuments ne sont pas très anciens. Le cimetière d'Ancon,au Pérou, dont M. Wittmack a obtenu les meilleurs échantillons,est à peu près contemporain <strong>de</strong> la découverte <strong>de</strong> l'Amérique1. Or, à cette époque, le nombre <strong>de</strong>s variétés était déjàconsidérable, selon tous les auteurs, ce qui prouve une culturebeaucoup plus ancienne.Des expériences dans lesquelles on sèmerait, plusieurs annéesl. Rochebrnne,Recherches ethnographiques sur les sépulturespéruviennesd'Ancon,d'après un extrait par Wittmack, dans Uhhvorm,Bot. Centralblatt,1880,p. 1633,où l'on voit quele cimetièrea serviavant et <strong>de</strong>puisla découverte<strong>de</strong> l'Amérique.

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