Candolle, Alphonse de. Origine des plantes cultivées ... - EditAEFA
Candolle, Alphonse de. Origine des plantes cultivées ... - EditAEFA Candolle, Alphonse de. Origine des plantes cultivées ... - EditAEFA
CAROUBIER 269treintes où il existe en Sicile, dans les petites lies adjacentes etsur la côte d'Italie. Il s'appuie, en outre, sur le nom italienCarrubo, presque semblable au nom arabe, pour émettre ridéed'une introduction ancienne dans le midi de lEurope, l'espèceétant originaire plutôt de Syrie ou de l'Afrique septentrionale.A cette occasion, il soutient, comme probable,l'opinion de Hœfer et de Bonné 1,d'après laquelle le Lotos desLotophages était le Caroubier, dont la fleur est sucrée et le fruitd'un goût de miel, conformément aux expressions d'Homère.Les Lotophages habitant la Cyrénaïque, le Caroubier devaitcroître en masse dans leur pays. Pour admettre cette hypothèse,il faut croire qu'Hérodote et Pline n'ont pas connu laplante d'Homère, car le premier a décrit le Lotos comme ayantune baie de Lentisque et le second comme un arbre qui perdses feuilles en hiver 2..Une hypothèse sur une plante douteuse dont a parlé jadis unpoète ne peut guère servir de point d'appui dans un raisonnementsur des faits d'histoire naturelle. Après tout, le Lotos d'Homèreétait peut-être. dans le jardin fantastique des Hespérides.Je reviens à des arguments d'un genre plus sérieux, dontM. Bianca a touché quelques mots.Le Caroubier est désigné dans les langues plus ou moinsanciennes par deux noms l'un grec, Keraunia ou Kerateia 3;l'autre arabe, Chirnub ou Charûb. Le premier exprime la formedu légume, analogue à certaines cornes médiocrement recourbées.Le second signifie un fruit allongé (légume), car on voitdans l'ouvrage de Ebn Baithar que quatre autres Légumineusessont désignées par ce même nom, avec une épithète. Les Latinsn'avaient pas de nom spécial pour le Caroubier. Ils se servaientdu mot grée, on de l'expression Siliqua, Siliqua grmca, c'est-àdirefruit allongé de Grèce 5. Cette pénurie de noms est l'indiced'une habitation jadis restreinte et d'une culture qui ne remonteprobablement pas à des temps préhistoriques. Le nom grec s'estconservé en Grèce. Le nom arabe existe aujourd'hui chez lesKabyles, qui disent Kharroub pour le fruit, Takharrout pourl'arbre 6, comme les Espagnols disent Algarrobo. Chose singulière,les Italiens ont pris aussi le nom arabe, Currabo, Carubio,d'où vient notre nom français Caroubier. Il semble qu'une introductionse serait faite, par les Arabes, dans le moyen âge,1. Hœfer,Histoirede la botanique, de la minéralogie et de la géologie,1 vol. in-12, p. 20 Bonne, Le Caroubier ou l'arbre des Lotophages,Alger,1869(citéd'aprèsHœfer).Voir,ci-dessus,l'articleduJujubier.2.Pline,Hist.,1.16,c. 30.3.Théophraste,Hist plant, 1.1, c. 11; Dioscorides,1. 1, c. 155 Fraas,Sim.fl. class.,p. 654.Ebn Baithar,trad. allem..1,p. 354;Forskal,Flora œgypt.,p. 77.5. Columna,cité dans Lenz,Bot.der ÂltenGriech.und Rœm.,p. 733Pline, Hist.,1.13,c. 8.6. Dict.français-berbère, au mot Caroube.
270 PLANTES CULTIVÉESPOUR LEURS GRAINESdepuis l'époque romaine, où l'on employait un nom différent.Ces détails appuient l'idée de M. Bianca d'une origine plusméridionale que la Sicile. D'après Pline, l'espèce était de Syrie,Ionie, Gnide et Rhode, mais il ne dit pas si dans ces localités elleétait sauvage ou cultivée.Selon le même auteur, le Caroubier n'existait pas en Egypte.On a cru cependant le reconnaître dans des monuments bienantérieurs à l'époque de Pline, et même des égyptologues luiont attribué deux noms égyptiens, Kontrates ou Jiri 1. Lepsiusa donné la figure d'un légume qui paraît bien une caroube, etle botaniste Kotschy ayant rapporté une canne, sortie d'uncercueil, s'est assuré, par l'observation au microscope, qu'elleest de bois de Caroubier 2. On ne connaît aucun nom hébreude cette espèce, dont l'Ancien Testament ne parle pas. Le Nouveauen fait mention, avec le nom grec, dans la parabole del'enfant prodigue. La tradition des chrétiens d'Orient porte quesaint Jean se serait nourri de Caroubes dans le désert, et c'estde là que dans le moyen âge on a tiré des noms, commePaindeSaint-Jean, et Johannis brodbaum, pour le Caroubier.Evidemment, cet arbre a pris de l'importance au commencementde l'ère chrétienne, et ce sont les Arabes qui l'ont surtoutpropagé vers l'Occident. S'il avait existé antérieurement enAlgérie, chez les Berbères, et en Espagne, on aurait conservédes noms antérieurs à l'arabe, et l'espèce aurait probablementété introduite aux Canaries par les Phéniciens.Je résume l'ensemble des données comme suitLe Caroubier était spontané à l'orient de la mer Méditerranée,probablement sur la côte méridionale d'Anatolie et en Syrie,peut-être aussi dans la Cyrénaïque. Sa culture a commencé depuisles temps historiques. Les Grecs l'ont étendue dans leur pays eten Italie mais plus tard les Arabes s'en sont occupés davantageet l'ont propagée jusqu'au Maroc et en Espagne. Dans tous cespays, l'espèce s'est naturalisée çà et là, sous une forme moins productive,qu'on est obligé de greffer pour avoir de meilleurs fruits.Jusqu'à présent, on n'a pas trouvé le Caroubierfossile dans lestufs et dépôts quaternaires de l'Europe méridionale. Il est seulde son espèce, dans le genre Ceratonia, qui est assez exceptionnelparmi les Légumineuses, surtout en Europe. Rien nepeut faire supposer qu'il ait existé dans les anciennes flores tertiairesou quaternaires du sud-ouest de l'Europe.Haricot commun. Phaseolus vulgaris Savi.Lorsque j'ai voulu m'occuper, en 18553, de l'origine des Pha-1.Lexiconoxon.,citédansPickering,Chronological kist.of plants,p. 141.2. Le dessin est reproduit dans Unger,Pflanzendes alten JEgyptens,fig. 22.L'observationqu'il citede Kotschyaurait besoin d'être confirméepar un anatomiste spécial.3.A. de Candolle.Géogrḅot.raisonnée,p. 961.
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270 PLANTES CULTIVÉESPOUR LEURS GRAINES<strong>de</strong>puis l'époque romaine, où l'on employait un nom différent.Ces détails appuient l'idée <strong>de</strong> M. Bianca d'une origine plusméridionale que la Sicile. D'après Pline, l'espèce était <strong>de</strong> Syrie,Ionie, Gni<strong>de</strong> et Rho<strong>de</strong>, mais il ne dit pas si dans ces localités elleétait sauvage ou cultivée.Selon le même auteur, le Caroubier n'existait pas en Egypte.On a cru cependant le reconnaître dans <strong>de</strong>s monuments bienantérieurs à l'époque <strong>de</strong> Pline, et même <strong>de</strong>s égyptologues luiont attribué <strong>de</strong>ux noms égyptiens, Kontrates ou Jiri 1. Lepsiusa donné la figure d'un légume qui paraît bien une caroube, etle botaniste Kotschy ayant rapporté une canne, sortie d'uncercueil, s'est assuré, par l'observation au microscope, qu'elleest <strong>de</strong> bois <strong>de</strong> Caroubier 2. On ne connaît aucun nom hébreu<strong>de</strong> cette espèce, dont l'Ancien Testament ne parle pas. Le Nouveauen fait mention, avec le nom grec, dans la parabole <strong>de</strong>l'enfant prodigue. La tradition <strong>de</strong>s chrétiens d'Orient porte quesaint Jean se serait nourri <strong>de</strong> Caroubes dans le désert, et c'est<strong>de</strong> là que dans le moyen âge on a tiré <strong>de</strong>s noms, commePain<strong>de</strong>Saint-Jean, et Johannis brodbaum, pour le Caroubier.Evi<strong>de</strong>mment, cet arbre a pris <strong>de</strong> l'importance au commencement<strong>de</strong> l'ère chrétienne, et ce sont les Arabes qui l'ont surtoutpropagé vers l'Occi<strong>de</strong>nt. S'il avait existé antérieurement enAlgérie, chez les Berbères, et en Espagne, on aurait conservé<strong>de</strong>s noms antérieurs à l'arabe, et l'espèce aurait probablementété introduite aux Canaries par les Phéniciens.Je résume l'ensemble <strong>de</strong>s données comme suitLe Caroubier était spontané à l'orient <strong>de</strong> la mer Méditerranée,probablement sur la côte méridionale d'Anatolie et en Syrie,peut-être aussi dans la Cyrénaïque. Sa culture a commencé <strong>de</strong>puisles temps historiques. Les Grecs l'ont étendue dans leur pays eten Italie mais plus tard les Arabes s'en sont occupés davantageet l'ont propagée jusqu'au Maroc et en Espagne. Dans tous cespays, l'espèce s'est naturalisée çà et là, sous une forme moins productive,qu'on est obligé <strong>de</strong> greffer pour avoir <strong>de</strong> meilleurs fruits.Jusqu'à présent, on n'a pas trouvé le Caroubierfossile dans lestufs et dépôts quaternaires <strong>de</strong> l'Europe méridionale. Il est seul<strong>de</strong> son espèce, dans le genre Ceratonia, qui est assez exceptionnelparmi les Légumineuses, surtout en Europe. Rien nepeut faire supposer qu'il ait existé dans les anciennes flores tertiairesou quaternaires du sud-ouest <strong>de</strong> l'Europe.Haricot commun. Phaseolus vulgaris Savi.Lorsque j'ai voulu m'occuper, en 18553, <strong>de</strong> l'origine <strong>de</strong>s Pha-1.Lexiconoxon.,citédansPickering,Chronological kist.of plants,p. 141.2. Le <strong>de</strong>ssin est reproduit dans Unger,Pflanzen<strong>de</strong>s alten JEgyptens,fig. 22.L'observationqu'il cite<strong>de</strong> Kotschyaurait besoin d'être confirméepar un anatomiste spécial.3.A. <strong>de</strong> <strong>Candolle</strong>.Géogrḅot.raisonnée,p. 961.