Candolle, Alphonse de. Origine des plantes cultivées ... - EditAEFA

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COMMENCEMENTDES CULTURES 3Les causes variées qui favorisent ou contrarient les débuts del'agriculture expliquent bien pourquoi certaines régions se trouvent,depuis des milliers d'années, peuplées de cultivateurs,tandis que d'autres sont habitées encore par des tribus errantes.Evidemment, le riz et plusieurs légumineuses dans l'Asie méridionale,rorge et le blé en Mésopotamie et en Egypte, plusieursPanicées en Afrique, le maïs, la pomme de terre, la batate et lemanioc en Amérique ont été promptement et facilement cultivés,grâce à leurs qualités évidentes et à des circonstancesfavorables de climat. Il s'est formé ainsi des centres d'où lesespèces les plus utiles se sont répandues. Dans le nord de l'Asie,de l'Europe et de l'Amérique, la température est défavorable etles plantes indigènes sont peu productives; mais comme lachasse et la pêche y présentaient des ressources, l'agriculture adû s'introduire tard, et l'on a pu se passer des bonnes espècesdu midi sans souffrir beaucoup. II en était autrement pour l'Australie,la Patagonie et même l'Afrique australe. Dans ces pays,les plantes des régions tempérées de notre hémisphère ne pouvaientpas arriver à cause de la distance, et celles de la zoneintertropicale étaient exclues par la grande sécheresse ou parl'absence de températures élevées. En même temps, les espècesindigènes sont pitoyables. Ce n'est pas seulement le défaut d'intelligenceou de sécurité qui a empêché les habitants de lescultiver. Leur nature y contribue tellement, que les Européens,depuis cent ans qu'ils sont établis dans ces contrées, n'ont misen culture qu'une seule espèce, le Tetragonia, légume vert assezmédiocre. Je n'ignore pas que sir Joseph Hooker 1 aénuméré plusde cent espèces d'Australie qui peuvent servir de quelque manièremais en fait on ne les cultivait pas, et, malgré les procédésperfectionnés des colons anglais, personne ne les cultive.C'est bien la démonstration des principes dont je parlais tout àl'heure, que le choix des espèces l'emporte sur la sélection, etqu'il faut des qualités réelles dans une plante spontanée pourqu'on essaye de la cultiver.Malgré l'obscurité des commencements de la culture danschaque région, il est certain que la date en est extrêmementdifférente. Un des plus anciens exemples de plantes cultivéesest, en Egypte un dessin représentant des figues dans lapyramide de Gizeh. L'époque de la construction de ce monumentest incertaine. Les auteurs ont varié entre 1S0Oet 4200 ansavant l'ère chrétienne Si l'on suppose environ deux mille ans,ce serait une ancienneté actuelle de quatre mille ans. Or, laconstruction des pyramides n'a pu se faire que par un peuplenombreux, organisé et civilisé jusqu'à un certain point, ayantpar conséquent une agriculture établie,qui devait remonter plushaut, de quelques siècles au moins. En Chine, 2700 ans avant1. Hooker,Flora Tasmanise, I, p. ex.

4 NOTIONS PRÉLIMINAIRESJésus-Christ l'empereur Chen-nung institua, la cérémonie danslaquelle chaque année on sème cinq espèces de plantes utiles,le riz, le soja, le blé et deux sortes de millets 1. Ces plantesdevaient être cultivées depuis quelque temps, dans certaineslocalités, pour avoir attiré à ce point l'attention de l'empereurL'agriculture paraît donc aussi ancienne en Chine qu'en Egypte.Les rapports continuels de ce dernier pays avec la Mésopotamiefont présumer une culture à peu près contemporaine dans lesrégions de l'Euphrate et du Nil. Pourquoi ne serait-elle pas toutaussi ancienne dans l'Inde et dans l'archipel Indien? L'histoiredes peuples dravidiens et malais ne remonte pas haut et présentebien de l'obscurité, mais il n'y a pas de raisons de croire quela culture n'ait pas commencé chez eux il y a fort longtemps,en particulier au bord des fleuves.Les anciens Egyptiens et les Phéniciens ont propagé beaucoupde plantes dans la région de la Méditerranée, et les peuplesAryens, dont les migrations vers l'Europe ont commencé à peuprès 2500 ou au plus tard 2000ans avant Jésus-Christ ont répanduplusieurs espèces qui étaient déjà cultivées dans l'Asie occidentale.Nous verrons, en étudiant l'histoire de quelques espèces,qu'on cultivait probablement déjà certaines plantes en Europeet dans le nord de l'Afrique. Il y a des noms de langues anté^rieures aux Aryens, par exemple finnois, basques, berbères etguanches (des îles Canaries), qui l'indiquent. Cependant les restes,appelés Kjôkkenmoddings, des habitations anciennes du Danemark,n'ont fourni jusqu'à présent aucune preuve de culture eten même temps aucun indice de la possession d'un métal a. LesScandinaves de cette époque vivaient surtout de pêche, dechasse et peut-être accessoirement de plantes indigènes, commele chou, qui ne sont pas de nature à laisser des traces dans lesfumiers et les décombres, et qu'on pouvait d'ailleurs se passer decultiver. L'absence de métaux ne suppose pas, dans ces pays dunord, une ancienneté plus grande que le siècle de Périclès oumême des beaux temps de la république romaine. Plus tard,quand le bronze a été connu en Suède, région bien éloignée despays alors civilisés, l'agriculture avait fini par s'introduire. Ona trouvé dans les restes de cette époque la sculpture d'unecharrue attelée de deux bœufs et conduite par un homme 3.Les anciens habitants de la Suisse orientale, lorsqu'ils avaientdes 'instruments de pierre polie et pas de métaux, cultivaientplusieurs plantes, dont quelques-unes étaient originaires d'Asie.1. Bretschneider,On the study and value of chinesebotanicalworhsjp. 7.2. De Nadaillac,Lespremiers hommeset les tempspréhistoriques,I,p.266,268Ḷ'absencedetracesd'agriculturedansces débrism'est certifiéed'ailleurspar M.Heeret M.Cartailhac țrès au courant tous les deux,desdécouvertesen archéologie.3. M.Montelius,d'aprèsCartailhac,Revue,1875,p 237.

COMMENCEMENTDES CULTURES 3Les causes variées qui favorisent ou contrarient les débuts <strong>de</strong>l'agriculture expliquent bien pourquoi certaines régions se trouvent,<strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s milliers d'années, peuplées <strong>de</strong> cultivateurs,tandis que d'autres sont habitées encore par <strong>de</strong>s tribus errantes.Evi<strong>de</strong>mment, le riz et plusieurs légumineuses dans l'Asie méridionale,rorge et le blé en Mésopotamie et en Egypte, plusieursPanicées en Afrique, le maïs, la pomme <strong>de</strong> terre, la batate et lemanioc en Amérique ont été promptement et facilement cultivés,grâce à leurs qualités évi<strong>de</strong>ntes et à <strong>de</strong>s circonstancesfavorables <strong>de</strong> climat. Il s'est formé ainsi <strong>de</strong>s centres d'où lesespèces les plus utiles se sont répandues. Dans le nord <strong>de</strong> l'Asie,<strong>de</strong> l'Europe et <strong>de</strong> l'Amérique, la température est défavorable etles <strong>plantes</strong> indigènes sont peu productives; mais comme lachasse et la pêche y présentaient <strong>de</strong>s ressources, l'agriculture adû s'introduire tard, et l'on a pu se passer <strong>de</strong>s bonnes espècesdu midi sans souffrir beaucoup. II en était autrement pour l'Australie,la Patagonie et même l'Afrique australe. Dans ces pays,les <strong>plantes</strong> <strong>de</strong>s régions tempérées <strong>de</strong> notre hémisphère ne pouvaientpas arriver à cause <strong>de</strong> la distance, et celles <strong>de</strong> la zoneintertropicale étaient exclues par la gran<strong>de</strong> sécheresse ou parl'absence <strong>de</strong> températures élevées. En même temps, les espècesindigènes sont pitoyables. Ce n'est pas seulement le défaut d'intelligenceou <strong>de</strong> sécurité qui a empêché les habitants <strong>de</strong> lescultiver. Leur nature y contribue tellement, que les Européens,<strong>de</strong>puis cent ans qu'ils sont établis dans ces contrées, n'ont misen culture qu'une seule espèce, le Tetragonia, légume vert assezmédiocre. Je n'ignore pas que sir Joseph Hooker 1 aénuméré plus<strong>de</strong> cent espèces d'Australie qui peuvent servir <strong>de</strong> quelque manièremais en fait on ne les cultivait pas, et, malgré les procédésperfectionnés <strong>de</strong>s colons anglais, personne ne les cultive.C'est bien la démonstration <strong>de</strong>s principes dont je parlais tout àl'heure, que le choix <strong>de</strong>s espèces l'emporte sur la sélection, etqu'il faut <strong>de</strong>s qualités réelles dans une plante spontanée pourqu'on essaye <strong>de</strong> la cultiver.Malgré l'obscurité <strong>de</strong>s commencements <strong>de</strong> la culture danschaque région, il est certain que la date en est extrêmementdifférente. Un <strong>de</strong>s plus anciens exemples <strong>de</strong> <strong>plantes</strong> <strong>cultivées</strong>est, en Egypte un <strong>de</strong>ssin représentant <strong>de</strong>s figues dans lapyrami<strong>de</strong> <strong>de</strong> Gizeh. L'époque <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong> ce monumentest incertaine. Les auteurs ont varié entre 1S0Oet 4200 ansavant l'ère chrétienne Si l'on suppose environ <strong>de</strong>ux mille ans,ce serait une ancienneté actuelle <strong>de</strong> quatre mille ans. Or, laconstruction <strong>de</strong>s pyrami<strong>de</strong>s n'a pu se faire que par un peuplenombreux, organisé et civilisé jusqu'à un certain point, ayantpar conséquent une agriculture établie,qui <strong>de</strong>vait remonter plushaut, <strong>de</strong> quelques siècles au moins. En Chine, 2700 ans avant1. Hooker,Flora Tasmanise, I, p. ex.

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