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JOURNAL OF - Débats parlementaires de la 4e République

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€440 ASSEMBLEE NATIONALE — SEANCE DU 7. SEPTEMBRE 1948Mais êtes-vous résolu, d'autre part, àdéfendre les droits, les attributions et lesprérogatives <strong>de</strong> l'Etat et l'autorité qu'iltient <strong>de</strong>s représentants <strong>de</strong> <strong>la</strong> nation ?Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, non pas seulement <strong>de</strong>nous apporter — ce dont nous sommes certains,à cet égard — une affirmation <strong>de</strong>volonté, mais <strong>de</strong> nous dire quelles sontles mesures que vous enten<strong>de</strong>z prendrepour accomplir ce <strong>de</strong>voir et pour atteindrece butOh ! J'entends bien, monsieur le prési<strong>de</strong>ntdu conseil, que tout ne sera pas résoluparce que vous auriez réussi à assurerdans l'ordre le respect par tous, sansdistinction, <strong>de</strong> <strong>la</strong> légalité et <strong>de</strong> l'autorité<strong>de</strong> l'Etat. Mais c'est cependant par là qu'ilfaut commencer. Car, vous vous en ren<strong>de</strong>zcertainement compte, rien <strong>de</strong> bien n'estpossible et le pire est à craindre à défaut<strong>de</strong> cette restauration <strong>de</strong> l'Etat républicain.(App<strong>la</strong>udissements à droite, sur diversbancs au centre et sur certains bancs àgauche)ML te préskient. La parole est à M. Trifcoulet,pour développer son interpel<strong>la</strong>tion.M. Raymond TrilKmlef. Mesdames, messieurs,« <strong>la</strong> France Jibérée est en train<strong>de</strong> jouer sa liberté ».Je n'ai pas voulu choisir d'autre exor<strong>de</strong>que <strong>la</strong> première phrase prononcée icimême par M. le prési<strong>de</strong>nt du conseil lorsqu'ilvous <strong>de</strong>mandait l'investiture, aucours <strong>de</strong> <strong>la</strong> séance du 31 août. Au reste, jevoudrais que cette phrase sonne commeun diapason pour régler l'esprit et Je ton<strong>de</strong> nos discours.Aussi bien, <strong>la</strong> gravité <strong>de</strong> l'heuren'échappe plus à {personne, <strong>la</strong> gravité <strong>de</strong>ces vicissitu<strong>de</strong>s gouvernementales continuelles.dont on ne peut même plus sehâter <strong>de</strong> rire, <strong>la</strong> gravité <strong>de</strong>s décisions àprendre. D'où un ton qui ne m'est peutêtrepas habituel, et aussi le fait quej'abandonne les débats techniques —loyers, reconstruction, ravitaillement — oùje me suis jusqu'ici pru<strong>de</strong>mment cantonné.Mais je pense qu'à l'heure <strong>de</strong>s échéances— je n'ai pas dit du règlement <strong>de</strong> comptesnous <strong>de</strong>vons exprimer nos convictions ;je pense qu'à l'heure du danger, <strong>de</strong>s hommes,<strong>de</strong>s Français véritables se doivent aumoins <strong>la</strong> franchise. C'est, d'ailleurs, ce quedisait M. Guy Mollet, le 31 août, en affirmantque le pire était <strong>la</strong> confusion, l'incompréhensionet l'équivoque.Or, à <strong>la</strong> base même du nouveau gouvernement,je vois <strong>de</strong>ux graves équivoFques.La mine douteuse du Gouvernement, sivous me permettez cette expression, jure,non seulement avec <strong>la</strong> hauteur <strong>de</strong>s périlsnationaux du moment, mais avec <strong>la</strong> personnemême <strong>de</strong> son chef, qui n'a jamaisparu ici comme un homme <strong>de</strong> combinaisonset qui jouissait <strong>de</strong> toute notre estime.Je veux croire, pour ma part, qull aété victime <strong>de</strong> sa fatigue ou, peut-être, <strong>de</strong>quelques-uns <strong>de</strong> se§ amis.. [Mouvementsmvers.)La première équivoque était inévitable,car elle tient aux malfaçons <strong>de</strong> <strong>la</strong> loi du17 août <strong>de</strong>rnier dite <strong>de</strong> « redressement économiqueet financier », cette loi par <strong>la</strong>quellele Parlement, sous prétexte <strong>de</strong>mieux respecter <strong>la</strong> Constitution et sespropres droits, s'est <strong>de</strong>ssaisi <strong>de</strong> pouvoirsréglementaires étendus, sans limitation <strong>de</strong>durée ni d'équipe.C'est pourquoi M. Frédéric - Dupont,M. Truffaut et moi-même avions déposéun amen<strong>de</strong>ment à l'article 1 er *Le 9 août, j'avais l'honneur <strong>de</strong> dire àl'Assemblée :« Nous nous <strong>de</strong>mandons si l'unanimitéqui s'est faite dans le Gouvernement... »— je m'adressais au prési<strong>de</strong>nt du conseild'alors, M. André Marie — « ...sur le projet<strong>de</strong> M. Paul Reynaud, si cette unanimiténe s'est pas réalisée précisément parcequ'on en est resté aux gran<strong>de</strong>s lignes etsi, lorsqu'on parlera <strong>de</strong>s mesures d'exécution,elle • n'est pas appelée à disparaître.Nous nous <strong>de</strong>mandons s'il n'y aura pas(bientôt <strong>de</strong>s conflits entre M. Paul Reynau<strong>de</strong>t l'un <strong>de</strong>s ministres qui seront appelés àsigner avec lui tel ou tel décret. D'où unecrise gouvernementale.« Comment aurons-nous alors l'occasion<strong>de</strong> manifester que nous maintenons ounon le bénéfice <strong>de</strong> cette extension <strong>de</strong>spouvoirs réglementaires ? Par un votedfinvestiture, me direz-vous. Vous savezjiarîaitement que non. Le vote ne porterapas sur l'objet du débat d'aujourd'hui, ilportera sur <strong>la</strong> «personnalité du nouveauprési<strong>de</strong>nt du conseil. »Je m'excuse <strong>de</strong> m'être cité ainsi, maisc'est ce qui a expliqué, au moment duvote <strong>de</strong>s (pouvoirs réglementaires, notreabstention, et c'est ce qui explique enpartie que nous ayons voté contre l'investituremême <strong>de</strong> M. le prési<strong>de</strong>nt Schuman.Bref, mesdames, messieurs, le fait estlà qui se passe <strong>de</strong> tout commentaire: lespouvoirs réglementaires étendus, <strong>de</strong>mandéspar M. Paul Revnaud à l'appui d'unepolitique qu'il avait éloquemment exposéeà l'Assemblée, c'est M. Christian Pineauqui va les utiliser, M. Pineau,, second ministre<strong>de</strong>s finances socialiste <strong>de</strong>puis <strong>la</strong> libération,après les quelque sept mois qu'àpassé à ce ministère, en <strong>de</strong>ux fois, M. Philip.Un tour <strong>de</strong> passe-passe aussi grossier meparaît indigne d'une Assemblée soueieused'affronter c<strong>la</strong>irement ses responsabilités.Si le Gouvernement <strong>de</strong>vait durer plusque l'espace d'un matin, je déposerais avec{plusieurs do mes amis, en <strong>de</strong>mandant <strong>la</strong>discussion d'rogence, une proposition <strong>de</strong>loi qui tendrait à abroger <strong>la</strong> loi du 27 aoûtpour que, si une nouvelle majorité entendaitmaintenir les pouvoirs réglementairesétendus, à M. Pineau et au ministère actuel,elle le fasse c<strong>la</strong>irement savoir dansun nouveau vote. (Très bien ! très bien! àdroite.)Secon<strong>de</strong> équivoque et qui tient, celle-ci,entièrement à <strong>la</strong> présente équipe ministérielleet aux conditions dans lesquelleselle s'est rassemblée.Oh ! je m'abstiendrai <strong>de</strong> toute ironie facilesur <strong>la</strong> fantaisie qui paraît avoir inspiréce que je me permettrai d'appeler <strong>la</strong>composition du nouveau cocktail ministériel.Je n'insisterai pas non plus sur cettelettre envoyée dô l'hôtel Matignon et qui,touchant le quai Voltaire, n'a pas réussi àtraverser <strong>la</strong> Seine pour atteindre, sur <strong>la</strong>rive droite, le pa<strong>la</strong>is <strong>de</strong> l'Elysée.Je ne critiquerai même pas, en passant,ce que j'ai entendu dire, à savoir que lesprési<strong>de</strong>nts <strong>de</strong> groupes, lorsqu'ils n'avaientpas voté l'investiture, n'avaient pas étéconvoqués.Non. L'équivoque qui me paraît choquante,l'équivoque même qui me paraîtà certains égards scandaleuse et qui s'estprolongée jusqu'au <strong>de</strong>rnier moment, c'estque rien n'avait annoncé le choix <strong>de</strong>M. Pineau, le choix d'un socialiste au ministère<strong>de</strong>s finances et <strong>de</strong>s affaires économiques^La majorité d'investiture — j'en parled'autant plus librement que je n'en suispoint — peut s'indigner d'une telle supercherie.M. Maurice Schumann. Laissez-lui cesoin.M. Raymond Triboulet. Tel le vieil Isaae<strong>de</strong>venu aveugle — que l'on excuse cettacomparaison biblique — cette majorité acru bénir Esau-Schuman ou Poher et elleconstate maintenant qu'elle a béni, sousie faux couvert d'une peau <strong>de</strong> bique, Jacob-Pineau.{Rires.)M. Marcel Poimbœuf. Et voici Triboulet-Ba<strong>la</strong>ami [Rires.)M. Raymond Triboulet. Il m'est difficile,-monsieur Poimhœuf, <strong>de</strong> répondre à uneinterruption que je n'ai pas entendue.M. Marcel Poimbœuf. Je continuais lescitations bibliques IM. Raymond Triboulet. J'abandonne: enhistoire sainte, je ne serai jamais aussifort qu'un membre du M.R.P. (Rires etapp<strong>la</strong>udisse m eut s à droite.) -,Donc, relisant avec soin les déc<strong>la</strong>rations<strong>de</strong> M. Schuman, nous y retrouvons pointpar point le programme die M. Reynaud.Nous y trouvons les hausses inévitablesdu pain et du <strong>la</strong>it et, d'ailleurs, l'une da' celles-ci se réalise.Nous trouvons l'éloge du judicieux travailpréparé par M. Paul Reynaud pourréduire le train <strong>de</strong> vie, et je crois que,déjà, certaines mesures viennent <strong>de</strong> suivre.Nous trouvons citées ces entreprises .nationalesauxquelles il faudra s'en prendrerapi<strong>de</strong>ment; et là, malheureusement, nouscraignons que <strong>la</strong> suite ne soit moins rapi<strong>de</strong>qu'on l'avait promis..Nous trouvons l'appel à l'épargne ; coqui suppose bien une politique qui ne soitpas socialiste.Nous trouvons <strong>la</strong> promesse, d'ici <strong>la</strong> fin<strong>de</strong> l'année, <strong>de</strong> dispositions cohérentes, notammentd'ordre fiscal, autrement dit <strong>la</strong>réforme fiscale.Nous lisons que, entre l'augmentationsubstantielle <strong>de</strong>s sa<strong>la</strong>ires ou <strong>de</strong>s mesures<strong>de</strong> compensation, le choix est fait et quel'on veut seulement essayer <strong>de</strong> sauvegar<strong>de</strong>refficacement le pouvoir d'achat par<strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> compensation sans hausse<strong>de</strong> sa<strong>la</strong>ires.Nous trouvons enfin <strong>la</strong> réforme <strong>de</strong> <strong>la</strong>sécurité sociale et <strong>la</strong> détermination libredans une certaine mesure, par les organisationsouvrières et patronales, <strong>de</strong> certainesmodalités du travail.Et ces déc<strong>la</strong>rations <strong>de</strong> bon apôtre quirappellent les gran<strong>de</strong>s lignes <strong>de</strong> ce qu'onappe<strong>la</strong>it le p<strong>la</strong>n Reynaud, étaient accueiliiessans qu'il y ait le moindre démenti,sans qu'il y ait <strong>la</strong> moindre réserve ou <strong>la</strong>,moindre rectification <strong>de</strong> <strong>la</strong> part du prési<strong>de</strong>ntdu conseil désigné, par une adhésionéloquente <strong>de</strong> notre collègue M. le prési<strong>de</strong>ntCuaenet qui déc<strong>la</strong>rait — oui, j f aurai <strong>la</strong>cruauté <strong>de</strong> citer ce texte même :« Monsieur le prési<strong>de</strong>nt Schuman, c'estparce que vous avez raccourci d'une façonconsidérable <strong>la</strong> distance entre le programmedéfini par AL André Marie, sonministre <strong>de</strong>s finances et ses col<strong>la</strong>borateurs^et votre propre programme, que nous pouvons,en pleine liberté <strong>de</strong> conscience, vousapporter notre adhésion. Nous connaissonsvotre caractère .et votre loyauté. Nous pen-

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