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sous contrainte de financement - RATP

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[Repères]ROCE vs WACC : La rentabilité<strong>sous</strong> <strong>contrainte</strong> <strong>de</strong> <strong>financement</strong>EBITDA, EBIT, ROCE, ROI, WACC, EVA … l’usage <strong>de</strong> sigles <strong>de</strong>s comptabilités anglo-saxonne est <strong>de</strong>plus en plus répandu dans la communication financière <strong>de</strong>s grands groupes industriels européens.Pour la première année en 2009, certains d’entre eux font leur apparition dans lescomptes sociaux <strong>de</strong> la <strong>RATP</strong>. A quoi servent ces indicateurs et quelles inci<strong>de</strong>nces peuvent-ilavoir sur le pilotage <strong>de</strong>s activités d’une entreprise? Tentons un décryptage.« En rapportant un résultat annuel à un patrimoine<strong>de</strong> long terme rigi<strong>de</strong> par nature,le ROCE tend à exacerber la flexibilité attendue<strong>de</strong>s moyens d’exploitation. »érenne « profitable », « ren-», valent dans le voca-«Ptablebulaire <strong>de</strong> l’auditeur les mots dumé<strong>de</strong>cin pour qualifier <strong>de</strong> « rassurante», « bonne », ou « excellente», la santé économique etfinancière d’une entreprise. Achaque mot son importance etplus que l’utilité et la durée <strong>de</strong> vie<strong>de</strong> l’entreprise, on vante désormaisnon seulement ce qu’elleoffre comme source potentielle<strong>de</strong> revenus, mais surtout, à quelprix ce profit peut être obtenu.Sous le terme <strong>de</strong> rentable, l’entreprisemontre son aptitu<strong>de</strong> àproduire une valeur supérieure àl'investissement fourni en temps,en travail, en argent. Mais à quellevaleur se réfère-t-on pour mesurerla performance d’une entrepriseet quel est le prix <strong>de</strong> l’argentmis à sa disposition ? C’estici qu’entrent en scène l’EBIT, leROCE et le WACC.La mesure <strong>de</strong> laperformanceDu haut vers le bas du compte <strong>de</strong>résultat, quel sol<strong>de</strong> intermédiaire<strong>de</strong> gestion reflète le mieux la valeurcréée par l’activité <strong>de</strong> l’entreprise? Sol<strong>de</strong> ultime, le résultatnet (ou bénéfice) inclut <strong>de</strong>s donnéesparfois éloignées <strong>de</strong> l'activitéproductive <strong>de</strong> l'entreprise, commele résultat financier ou comme lerésultat exceptionnel. Sa pertinencecomme instrument <strong>de</strong> mesure<strong>de</strong> la performance est ainsilimitée 1 . Aussi, les analystes financierss’intéressent-ils <strong>de</strong> près à un<strong>de</strong>uxième sol<strong>de</strong> <strong>de</strong> gestion : lerésultat d'exploitation ou sonéquivalent américain, l’EBIT(Earnings Before Interest andTaxes). Résultat <strong>de</strong> l’exploitation,il ne tient compte que <strong>de</strong>sseuls produits et charges d'exploitation(chiffre d’affaires - frais <strong>de</strong>personnels - matières et autrescharges externes - dotations auxamortissements). Un premierratio (EBIT/CA) permet <strong>de</strong> définirun taux <strong>de</strong> marge opérationnelle.Indicateur <strong>de</strong> la profitabilité<strong>de</strong> l’entreprise, il est parfois utilisépour la comparaison d’entreprisesd’un même secteur dotéesd’une structure <strong>de</strong> coûts comparable.Dans le cas contraire, le taux<strong>de</strong> rentabilité économique, enanglais, <strong>de</strong> Return On CapitalEmployed (ROCE) lui sera préféré.Le ROCE, rapporte unprofit (le résultat d'exploitation)aux moyens qu’il a fallu engager,avancer ou investir pourl’obtenir (capitaux engagés). Ilpermet <strong>de</strong> comparer les sociétésindépendamment <strong>de</strong> leur structurefinancière, <strong>de</strong> leur activité,<strong>de</strong> leur taille, <strong>de</strong> leur <strong>de</strong>gré d'intégration,<strong>de</strong> leur <strong>de</strong>gré d'automatisationet <strong>de</strong>s événementsexceptionnels qui les frappent 2 .C’est aussi un indicateur utilisépour apprécier l’efficacité <strong>de</strong> différentesdivisions métiers au seind’une même entreprise (ou d’ungroupe).La <strong>contrainte</strong> <strong>de</strong><strong>financement</strong>Du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> l’actionnaire,la rentabilité dégagée est un critèreinsuffisant pour mesurerla valeur créée par l’entreprisepuisque la formule ne tient pascompte du coût du capital qui ya été investi. Or, selon le mêmeprincipe que l’intérêt versé auxbanques, les actionnaires vontexiger une rémunération <strong>de</strong>ssommes qu’ils ont engagées, appelée« prime <strong>de</strong> risque ». Sans entrerdans le détail <strong>de</strong> son calcul, notonsque son taux oscille dans la zoneEuro entre 3 et 6 % et varie selonla sensibilité du secteur industrielà la conjoncture économique. Lepoids relatif <strong>de</strong> l’en<strong>de</strong>ttement et<strong>de</strong>s capitaux propres dans l’entrepriseet les taux <strong>de</strong> rémunérationqui leur sont associés, seront ainsipris en compte pour déterminerun coût moyen pondéré du capital(le WACC <strong>de</strong>s Anglo-Saxons).C’est en comparant ce WACC auROCE que l’investisseur mesurerasi <strong>de</strong> la valeur a été créée oudétruite. Si le coût moyen pondérédu capital est supérieur à larentabilité économique <strong>de</strong> l’entreprise(ou <strong>de</strong> l’activité), l’actionnairene sera pas incité à investir,l’épargne pouvant représenter unmeilleur placement. Partant <strong>de</strong> ceprincipe, quelles sont les marges <strong>de</strong>14 CONNEXIONS _ mai-juin 2010


La performance économique <strong>de</strong> la <strong>RATP</strong> (en M€)327 314manœuvre laissées à l’entreprisepour optimiser WACC et ROCE ?Dans le premier cas, ses moyenssont limités. Ne pouvant intervenirsur les taux <strong>de</strong> rémunérationdu capital, l’entreprise chercheraà obtenir un « maximum raisonnable» <strong>de</strong> <strong>de</strong>ttes au regard<strong>de</strong>s capitaux propres. Pour lamaximisation du ROCE, sapalette d’outils sera plus étoffée.Structurée par l’intensité capitalistique<strong>de</strong> l’activité, la valeur dudénominateur (l’actif immobiliséet le BFR), sera en particuliersensible à la date d’apports <strong>de</strong>fonds propres, au coût d’évaluation<strong>de</strong>s immobilisations, à l’âge<strong>de</strong>s équipements et au report <strong>de</strong>certains investissements ou besoins<strong>de</strong> <strong>financement</strong> (stocks, créance)sur <strong>de</strong>s <strong>sous</strong>-traitants. Côté numérateur,les moyens d’actions serontmultiples : augmentation <strong>de</strong>s prix<strong>de</strong> vente, accélération du rythme<strong>de</strong> productivité, mutualisation <strong>de</strong>sfonctions support, externalisation<strong>de</strong>s activités non rentables auprès<strong>de</strong> <strong>sous</strong>-traitants sur lequel on faitpeser les <strong>contrainte</strong>s <strong>de</strong> flexibilitéet <strong>de</strong> salaire en sont <strong>de</strong>s traductionscourantes. Notons qu’enROCE et WACC à la <strong>RATP</strong>rapportant un résultat annuel àune structure patrimoniale <strong>de</strong>long terme et rigi<strong>de</strong> par nature, leROCE tend à exacerber la flexibilitéattendue <strong>de</strong>s moyens d’exploitation.De la théorie à lapratiqueOn le voit, ce mécanisme <strong>de</strong> suivi<strong>de</strong> la performance <strong>de</strong> l’entrepriseest affaire « <strong>de</strong> point <strong>de</strong> vue 3 ». Leniveau <strong>de</strong> rentabilité doit permettred’assurer le développement<strong>de</strong> l’entreprise, la rémunération<strong>de</strong> l’actionnaire et <strong>de</strong> lever<strong>de</strong>s fonds auprès <strong>de</strong>s organismes<strong>de</strong> crédit ou directement sur lemarché financier. D’inspirationlibérale, sa mise en exergue intéresseparticulièrement l’entreprisecotée en bourse qui cherche àlever directement <strong>de</strong>s fonds surle marché auprès d’investisseursepotentiels en présentant <strong>de</strong>s promesses<strong>de</strong> gains futurs. Mais quepenser <strong>de</strong> la généralisation <strong>de</strong> cesindicateurs à l’entreprise publique ?Mesurer l’efficacité économiqueLa <strong>RATP</strong> affiche pour la première année en 2009 un WACC <strong>de</strong> 5,9% qui correspond aucoût moyen pondéré du capital entre les capitaux empruntés (4,1% à la <strong>RATP</strong>) et lescapitaux propres (OAT 10 ans majoré d’une prime <strong>de</strong> risque propre au secteur <strong>de</strong>stransports et proche à ce jour <strong>de</strong> 5%). Le ROCE, <strong>de</strong> 4,3%, est inférieur au WACC.Notons que ce taux s’applique aujourd’hui à l’ensemble <strong>de</strong>s activités <strong>de</strong> l’EPIC or lesmodifications apportées à l’ordonnance <strong>de</strong> 1959 par les lois ORTF et du Grand Paris,auront une inci<strong>de</strong>nce structurante sur l’organisation et la gestion <strong>de</strong> l’entreprise. Acompter du 1er janvier 2012, la <strong>RATP</strong> <strong>de</strong>vra présenter une comptabilité séparée entre« son activité <strong>de</strong> gestionnaire <strong>de</strong> l’infrastructure du réseau <strong>de</strong> métro » et celle « d’exploitant<strong>de</strong> services <strong>de</strong> transport public <strong>de</strong> voyageurs ». Le STIF <strong>de</strong>vra « assurer unerémunération appropriée <strong>de</strong>s capitaux engagés » par le gestionnaire <strong>de</strong> l’infrastructure.Le terme « approprié », a <strong>de</strong>puis précisé le Conseil Constitutionnel, fera référenceau coût moyen pondéré du capital. Or si l’écart entre le ROCE et le WACC est <strong>de</strong>1,6 point aujourd’hui, qu’en sera-t-il <strong>de</strong>main <strong>de</strong> l’écart entre ROCE et WACC pour laseule activité <strong>de</strong> gestionnaire d’infrastructure ? Les péages reversés annuellementpar le STIF pourront-ils raisonnablement être rapportés à la valeur globale <strong>de</strong>s infrastructuresdu réseau ferré ? Ces re<strong>de</strong>vances seront-elles <strong>de</strong>stinées au remboursementpartiel <strong>de</strong> la <strong>de</strong>tte <strong>de</strong> la <strong>RATP</strong> ou couvriront-elles exclusivement l’entretien, lacharge d’investissements à venir et la rémunération <strong>de</strong> l’entreprise pour son activité<strong>de</strong> gestion <strong>de</strong> l’infrastructure ? Quel sera le périmètre d’activité du gestionnaire d’infrastructure? Les choix qui seront faits ne seront pas sans conséquence sur lesniveaux <strong>de</strong> ROCE et <strong>de</strong> WACC qui détermineront à leur tour les <strong>contrainte</strong>s auxquelless’expose le gestionnaire d’infrastructure. Le 1 er janvier 2012 est également la dated’entrée en vigueur du prochain contrat avec le STIF – qui <strong>de</strong>vrait logiquement se scin<strong>de</strong>ren <strong>de</strong>ux contrats distincts investissement/exploitation. Gageons qu’ils feront l’objet<strong>de</strong> vives discussions entre les <strong>de</strong>ux parties qui, espérons le, ne perdront pas <strong>de</strong> vuel’impact <strong>de</strong> ces arbitrages sur les usagers et les agents.2353,6%2684,1%Source : comptes sociaux <strong>RATP</strong> 2009Définition :Les capitaux engagés se composent <strong>de</strong>s immobilisations, machines, terrains, brevets…et du besoin en fond <strong>de</strong> roulement d'exploitation. Ce besoin résulte <strong>de</strong>l'écart entre, d'une part, la valeur <strong>de</strong>s stocks et les créances d'exploitation et,d'autre part, les <strong>de</strong>ttes d'exploitation, essentiellement les <strong>de</strong>ttes fournisseurs.(ROCE) d’un service publicmarchand n’est en soi pas aberrant,l’objectif pour la collectivitéétant d’obtenir la meilleure allocation<strong>de</strong> moyens nécessaires à laréalisation du service qui lui estrendu. Reste toutefois à relativisercet indicateur au regard d’autreséléments <strong>de</strong> nature qualitative(qualité, distribution, accessibilitédu service public, etc.).L’idée <strong>de</strong> la rémunération ducapital investi (WACC) apparaîtelle en revanche contreproductive.L’actionnaire (dans ce cas, lacollectivité) étant par ailleurs lebénéficiaire du service, la prime<strong>de</strong> risque n’a plus sa raison d’être.Sauf à préparer l’acteur qui assureaujourd’hui la mission du servicepublic à une privatisation progressive.Encadrée au niveaueuropéen, la libéralisation enmarche <strong>de</strong>s services publics <strong>de</strong>réseau conduit ainsi l’Etat à légiférerle cas échéant, en faveurd’une rémunération du gestionnairetenant compte <strong>de</strong> l’argentinvesti dans l’infrastructure.Derrière l’intérêt grandissantpour les indicateurs ROCE etWACC dans ces entreprises, l’objectif<strong>sous</strong> jacent est <strong>de</strong> refléterune vérité tarifaire concernant lecoût d’utilisation <strong>de</strong>s infrastructures<strong>de</strong> réseau, par nature nonrentables, afin d’en répartir lacharge entre la collectivité et lesutilisateurs privés (augmentationprogressive <strong>de</strong>s re<strong>de</strong>vances) touten rémunérant l’activité du gestionnaire(qui tend à <strong>de</strong>venir lui,<strong>de</strong> droit privé). En revanche, leprincipe <strong>de</strong> subventionnement<strong>de</strong>s activités non rentables par<strong>de</strong>s activités lucratives (et donc6,3%4,7%6 5196 588 6 952 7 3752006 2007 2008 2009ROCE WACC Capitaux engagés EBIT5,9%4,3%concurrentielles) est abandonné.Pour l’illustrer, la libéralisationd’Aéroport <strong>de</strong> Paris (ADP) faitfigure <strong>de</strong> cas d’école 4 . Transforméen société anonyme en 2005 etintroduit en bourse en 2006,ADP envisage pour le contrat <strong>de</strong>régulation économique à venir(CRE 2) <strong>de</strong> sortir du périmètrerégulé son activité immobilière <strong>de</strong>diversification (loyers immobiliers,commerces), mettant ainsi fin auprincipe <strong>de</strong> « caisse unique ». Cetransfert d’activité entraîne unerégression du ROCE du périmètrerégulé <strong>de</strong> près <strong>de</strong> 3 points à2,9%, que le groupe compte rattraperen 5 ans afin d’être enligne avec son WACC. Par quelsmoyens ? En ralentissant nettementson rythme d’investissementsau cours <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> et enimposant aux agents, fournisseurset <strong>sous</strong>-traitants, un rythme <strong>de</strong>productivité sans précé<strong>de</strong>nt. Est-celà, la fin d’un modèle socio-économiqueau profit d’un modèleéconomico-financier ? Du partage<strong>de</strong> la valeur ajoutée à celui durésultat d’exploitation, on le voit,le choix n’est pas neutre pourl’homme, le travail qu’il produit etla société pour laquelle il le réalise.[Sophie Raffort](1) Alexis Canuet, Alternatives Economiquesn° 268 - avril 2008.(2) Guillaume DUVAL, Alternatives Economiques,Article Web - 01 novembre 1995.(3) Marc Bartoli, Diagnostic d’entreprise, l’économiqueà l’épreuve du social, 1994(4) Pour aller plus loin, cf. Rapport du Sénatsur le projet <strong>de</strong> loi relatif aux aéroports(2004), Présentation <strong>de</strong>s résultats annuels2009, ADP (2010) et Dossier public <strong>de</strong> consultationCRE 2011-2015 (2010).CONNEXIONS _ mai-juin 2010 15

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