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Les conflits dans le couple, c'est positif. - Oricom

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<strong>Les</strong> <strong>conflits</strong> <strong>dans</strong> <strong>le</strong> coup<strong>le</strong>, <strong>c'est</strong> <strong>positif</strong>.Jacques et Claire Poujol, Psychothérapeutes, Conseil<strong>le</strong>rs Conjugaux et FamiliauxOn a longtemps pensé que si un coup<strong>le</strong> avait peu de disputes sinon aucune, <strong>le</strong>s évitaitsystématiquement ou <strong>le</strong>s réglait par abus d’autorité, c’était bon signe. Il était admis quediscuter, argumenter, s’opposer, était répréhensib<strong>le</strong>. L’affirmation des psychologues et dessociologues selon laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s <strong>conflits</strong> sont une partie intégrante des relations et comportentdes aspects bénéfiques est relativement récente. Selon Saint-Exupéry, nous vivons « nondes choses, mais du sens des choses ». Apprenons donc à trouver <strong>le</strong> sens de nosdésaccords.1. Nos heurts quotidiens sont un signe que notre coup<strong>le</strong> est vivant.Le signe distinctif du phénomène vivant c’est la lutte : « La lutte est la loi, la structure del’être », a dit Jean Lacroix. De même que la vie n’est pas un état mais une lutte, de mêmeune relation de coup<strong>le</strong> n’est pas statique mais dynamique. <strong>Les</strong> mésententes que l’homme etla femme doivent résoudre jour après jour prouvent que <strong>le</strong>ur union est une réalité vivante.2. <strong>Les</strong> oppositions construisent l’identité de chacun.Chacun de nous s’identifie en se différenciant. C’est parce que quelqu’un nous résiste quenous réalisons notre existence, et la sienne. Pour avoir conscience d’être, il faut un autre àqui s’opposer. L’autre nous révè<strong>le</strong> à nous-mêmes. Toute opposition nous permet à la fois denous reconnaître <strong>dans</strong> l’autre car il est un être humain comme nous, et de nous identifieraussi comme absolument différent, distinct. On comprend qu’une conception qui tendrait àévacuer du coup<strong>le</strong> tout affrontement engendrerait une ambiance psychiquement malsaine.Un ménage <strong>dans</strong> <strong>le</strong>quel <strong>le</strong>s deux partenaires souhaitent être d’accord, penser identiquement,font taire toute velléité de discussion et tendent à un consensus total, ce ménage-là connaîten fait une atmosphère insupportab<strong>le</strong>. La personnalité de chacun tend alors à se dissoudre<strong>dans</strong> une espèce de fusion, de dépersonnalisation.Ce consensus est vécu comme un refuge car j’évite ainsi la rencontre-heurt avec l’autre, etl’inconfortab<strong>le</strong> remise en question de moi-même par <strong>le</strong> dialogue. Dialoguer implique que jerenonce à croire que je possède toute la vérité. Si j’estime que mon opinion, mes paro<strong>le</strong>ssont la vérité parfaite et révélée, <strong>le</strong> dialogue est impossib<strong>le</strong>. Je ne fais que dominer etmanipu<strong>le</strong>r l’autre. <strong>Les</strong> <strong>conflits</strong> favorisent la maturation des partenaires. Un coup<strong>le</strong> qui évitetout affrontement vit une existence mutilée de ses possibilités, une vie certes « sanshistoires », sans problèmes, mais aussi « sans histoire », c’est-à-dire sans évolutiondynamique. Comme l’a dit <strong>le</strong> psychiatre Spitz, « une existence sans conflit est une existenced’avare ». Si <strong>le</strong>s querel<strong>le</strong>s conjuga<strong>le</strong>s sont bien gérées, el<strong>le</strong>s conduisent chacun à seresponsabiliser, à remettre salutairement en question ses va<strong>le</strong>urs et ses motivations.3. <strong>Les</strong> différends au sein du coup<strong>le</strong> obligent à reconnaître l’existence de l’autre.Affronter signifie qu’en face de moi il y a un autre front, c’est-à-dire une autre intelligence : <strong>le</strong>heurt, un peu brutal parfois, est une rencontre avec un de mes semblab<strong>le</strong>s. Je suis unepersonne qui communique avec une autre personne. Le philosophe Martin Buber a parlé dece dialogue en termes de Je-Tu et non de Je-cela. L’autre est un Tu, non un cela, un objet.Buber souligne que c’est <strong>le</strong> Tu, l’autre, qui constitue <strong>le</strong> Je comme Personne. Mon partenaire,en face de moi, est l’Autre qui m’interpel<strong>le</strong> et m’échappe tout à la fois. Quoi que je fasse, la1


certitude de son existence est une réalité incontournab<strong>le</strong>. Par sa seu<strong>le</strong> présence, il est soitune chance, soit une menace pour ma tranquillité. En effet, comme il est un miroir, il merenvoie une image de moi-même qui me déplaît peut-être car je me vois autrement. Alors j’aienvie de l’éliminer de mon chemin, de casser <strong>le</strong> miroir plutôt que d’examiner l’image qu’il medonne de moi. L’autre me par<strong>le</strong> et ses paro<strong>le</strong>s ont un sens, une cohérence. Je dois choisir :après m’être heurté à lui, soit je ferme mes yeux, mes oreil<strong>le</strong>s et mon cœur pour ne plus <strong>le</strong>voir ni l’entendre, soit j’admets qu’il est là, et que sa présence est voulue par Dieu pour notreprogression à tous <strong>le</strong>s deux.Le philosophe Levinas a cette formu<strong>le</strong> : « Autrui m’importe », qui est à mettre en relationavec une phrase bien différente souvent proférée <strong>dans</strong> <strong>le</strong>s coup<strong>le</strong>s en crise : « Lui (el<strong>le</strong>), jem’en f...! » Reconnaître l’existence de mon partenaire, c’est accepter des possibilités dedésaccord avec moi. Il est et sera toujours différent de moi, je ne suis pas <strong>le</strong> centre dumonde et mon point de vue n’est pas <strong>le</strong> seul valab<strong>le</strong>. Une dissension <strong>dans</strong> mon coup<strong>le</strong> estdonc uti<strong>le</strong> en ce qu’el<strong>le</strong> m’oblige à être attentif à l’autre, à <strong>le</strong> regarder et l’écouter. Il n’est pasfait de pâte à mode<strong>le</strong>r, malléab<strong>le</strong> à volonté. D’ail<strong>le</strong>urs, si je veux <strong>le</strong> transformer, n’est-ce pasparce que j’aimerais qu’il me renvoie une meil<strong>le</strong>ure image de moi-même? Mon partenaire estun être humain, un don de Dieu pour marquer <strong>dans</strong> ma vie des limites à mon pouvoir et à maliberté et pour favoriser ma maturation.4. <strong>Les</strong> mésententes de coup<strong>le</strong> révè<strong>le</strong>nt ce qui resterait caché sans cela. El<strong>le</strong>s révè<strong>le</strong>ntl’autre.Certains de ses problèmes font surface, peuvent être discutés et résolus. Il y a une rupturebénéfique qui débloque certaines situations inextricab<strong>le</strong>s. Le conflit est un langage qui vamanifester la nature de l’autre et me permettre de mieux <strong>le</strong> connaître. Une personnalité, c’estun immense domaine, mouvant, insaisissab<strong>le</strong>, comp<strong>le</strong>xe, qui se cache et ne se révè<strong>le</strong> quede temps à autre. Une attitude agressive peut aussi constituer un appel. Si mon partenairese sent insignifiant, estime qu’il est une non-personne, il va commencer une dispute pourprouver qu’il existe. En m’affrontant, il me dit inconsciemment : « Regarde-moi! Écoute-moi!Je compte! Je voudrais que tu me reconnaisses comme une personne ». Je devraisapprendre à décrypter <strong>le</strong>s « orages » au sein de mon coup<strong>le</strong>, car ils ont un sens. L’autrecherche à me communiquer quelque chose. Peut-être certains de ses besoins ne sont-ilspas assez compris? Le dialogue est donc très important : c’est la paro<strong>le</strong> (logos) grâce àlaquel<strong>le</strong> chacun franchit la distance (dia) qui <strong>le</strong> sépare de l’autre.El<strong>le</strong>s me révè<strong>le</strong>nt à moi-même mes côtés cachés. Si je <strong>le</strong>s évite, c’est que je sais qu’el<strong>le</strong>sdévoi<strong>le</strong>nt qui je suis réel<strong>le</strong>ment, qu’el<strong>le</strong>s disent la vérité sur moi-même. El<strong>le</strong>s révè<strong>le</strong>nt mapensée intérieure, <strong>le</strong>s émotions que je refou<strong>le</strong> et que j’enfouis profondément. Carl Rogersappel<strong>le</strong> congruence la coïncidence entre <strong>le</strong>s sentiments que nous éprouvons et ceux quenous exprimons. Cette congruence est rare entre partenaires, parce que ceux-ci craignent ladésunion, <strong>le</strong> rejet, la rupture de la relation. Alors ils prennent garde à faire taire <strong>le</strong>ur langageintérieur, s’en tenant à <strong>le</strong>ur langage extérieur.Mais c’est précisément parce qu’ils évitent <strong>le</strong>s affrontements qu’ils ne sont pas en mesurede vivre des relations authentiques, congruentes. Ils cachent et refou<strong>le</strong>nt <strong>le</strong>urs émotions etopinions véritab<strong>le</strong>s, ils masquent <strong>le</strong>urs problèmes, empêchant, par des moyens artificiels,l’explosion de <strong>le</strong>ur ressentiment. La communication est bloquée et faussée : ce n’est pas <strong>le</strong>urmoi authentique qui par<strong>le</strong>, mais un moi de surface qui bavarde de sujets insignifiants où toutrisque de mésentente est exclu. Leurs souffrances n’ont nul<strong>le</strong>ment disparu et risquent des’envenimer.2


5. <strong>Les</strong> <strong>conflits</strong> sont des facteurs d’équilibre et de changement <strong>dans</strong> <strong>le</strong> coup<strong>le</strong>.Pourquoi un coup<strong>le</strong> serait-il uniquement caractérisé par l’ordre? La vie commune est faiteaussi bien de mouvements que d’ordre, de divergences que d’accord, d’antagonismes qued’union et il n’y a aucune raison de privilégier l’un de ces aspects. Sans affrontements,l’équilibre d’un coup<strong>le</strong> serait statique. Ce sont <strong>le</strong>s forces opposées qui <strong>le</strong> rendent dynamique,entretiennent sa vie, maintiennent sa cohésion, approfondissent <strong>le</strong> partage. Le philosopheHéraclite affirmait déjà que l’harmonie procède d’une lutte entre <strong>le</strong>s contraires, c’est l’accord detensions inverses : « Ce qui est taillé en sens contraire s’assemb<strong>le</strong>; de ce qui diffère naît laplus bel<strong>le</strong> harmonie; tout devient par discorde. » Il est l’auteur de la célèbre formu<strong>le</strong> :« Polémos (<strong>le</strong> conflit) est <strong>le</strong> père de toutes choses. »Par ail<strong>le</strong>urs <strong>le</strong>s désaccords favorisent <strong>le</strong> changement. Un coup<strong>le</strong>, parce qu’il est composé dedeux êtres vivants, a besoin de bouger, de changer, d’avancer. Ce qui favorise ces évolutions,c’est la contradiction, la contestation, qui induisent l’innovation. En effet une relation sansopposition, sans question, tombe <strong>dans</strong> la sclérose. <strong>Les</strong> heurts entre partenaires offrentl’occasion de faire lucidement <strong>le</strong> point sur <strong>le</strong>ur relation : est-el<strong>le</strong> saine ou malsaine,cha<strong>le</strong>ureuse ou indifférente, satisfaisante ou frustrante, profonde ou superficiel<strong>le</strong>? Ilsconstituent une chance d’améliorer la relation parce que, après un échange mutuel d’opinions,chacun identifiera mieux <strong>le</strong>s besoins et comprendra davantage <strong>le</strong>s idées de l’autre. C’est,paradoxa<strong>le</strong>ment, une preuve d’amour que de s’engager <strong>dans</strong> une discussion, même animée,car c’est risquer de se laisser transformer par <strong>le</strong>s arguments de l’autre.Une franche explication vaut mieux qu’un si<strong>le</strong>nce de mort qui cache de l’indifférence et laconviction pessimiste que la communication est inuti<strong>le</strong>. L’opposition prouve au moins qu’unerelation existe. Le psychiatre Spitz note que « <strong>le</strong>s <strong>conflits</strong> se produisent à cause de “l’être enrelation” et non à cause de l’absence de relation ». Une jeune femme disait être malheureuse<strong>dans</strong> son ménage. On lui demanda si el<strong>le</strong> se disputait souvent avec son compagnon. El<strong>le</strong>répondit : « Malheureusement, nous ne nous disputons jamais. Nous n’avons absolument rienà nous dire. » Nous venons de dire que <strong>le</strong>s tensions peuvent produire des modifications <strong>dans</strong><strong>le</strong> coup<strong>le</strong>; mais il y a de nombreuses résistances à l’innovation. La grande majorité des genspréfère maintenir l’ordre établi parce que <strong>le</strong>s habitudes sont rassurantes. Changer, c’est al<strong>le</strong>rvers l’inconnu.Alors nous nous opposons fortement à toute nouveauté, car notre sécurité affective est en jeu.Nous refusons de laisser la relation évoluer. Nous restons sur nos acquis, même s’ils sontfaib<strong>le</strong>s et décevants, par peur de l’inconnu. Devant toute nouveauté la tentation première esttoujours <strong>le</strong> repli sur ce que l’on connaît déjà bien. Mais c’est comme vouloir immobiliser unmorceau de musique à un moment donné, sur un accord que l’on croit parfait. Un coup<strong>le</strong>, c’estcomme une symphonie en train de se jouer et l’immobiliser, c’est l’arrêter. On résiste auchangement parce que l’on a décrété que l’habituel, <strong>le</strong> régulier, <strong>le</strong> normal, est bon et quel’inhabituel est mauvais. Nous espérons que vous discernerez mieux à présent la positivité des<strong>conflits</strong> <strong>dans</strong> votre coup<strong>le</strong>.Cet excel<strong>le</strong>nt texte est tiré du site Web www.relation-aide.com de Jacques et Claire Poujol,Psychothérapeutes, Conseil<strong>le</strong>rs Conjugaux et FamiliauxCité <strong>dans</strong> <strong>le</strong> site Web www.michelgiroux.net de Michel Giroux psychologue3

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