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N° 14 - Iulm

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34 Livresimaginaire original et quelles en sont les transcriptions spatiales spécifiques ? Autrementdit, l’auteur nous propose une démonstration dans laquelle il réhabilite l’imaginaire et lerestaure à sa véritable place: une place centrale, fondamentale au sein de l’étuderationnelle, logique, des relations entre l’homme et son espace. Fort de positionner lagéographie comme véritable science de l’homme, Luc Bureau s’attelle à cette noble etultime recherche géographique qu’est la recherche de nous-mêmes et de notre relation àl’espace.« La Terre et moi » (1991), dans un éloge vibrant à la Terre, développe le corollaire del’influence de la culture sur l’espace: l’influence de l’espace sur l’élaboration culturelle.C’est une géographie profondément humaniste, dans tous les sens du terme, qui se déploieici: humaniste par son érudition et sa volonté universelle, humaniste tel que l’entend lagéographie béhavioriste, s’interrogeant sur les représentations que l’être humain se rit deson milieu. Luc Bureau va plus loin, développant le concept de résonance, de va-et-vient,d’interpellation, de « non-différence » entre l’homme et la Terre: «la terre et l’homme sontdes miroirs jumeaux.» Et l’auteur d’expliciter: «L’homme et ses lieux ne sont donc riend’autre qu’une série de résonances. Les lieux se nourrissent de l’empreinte de l’homme, etce dernier est habité par les lieux [...] Je mobilise le moi pour former toute la part desubjectivité de ma démarche dont l’enjeu n’est pas de creuser plus adéquatement le réelmais de comprendre comment je l ‘intériorise et le modèle au gré de ma mémoire et de monimagination. »La « géographie de la nuit » (1997) reprend cette démarche originale au profit d’unespace habituellement délaissé par le géographe: l’espace nocturne. Evoquant les mythesgrecs, la littérature européenne, son expérience personnelle et la géographie classique,1’auteur propose une vision syncrétique, objectivo-subjective », de cet espace qui est, pourlui, le lieu même de toute humanité. La nuit, en tant qu’espace de liberté, d’expression dela sensibilité humaine, de défoulement de l’imaginaire, est le lieu par excellence del’élaboration culturelle. « Autant la nuit ferme les yeux sur la nature, autant elle les ouvresur homme [...] le jour, la chose est certaine, est l’œuvre de Dieu, la nuit, celle del’homme. » La thèse explicitée, Luc Bureau tente de cerner l’identité de la ville nocturne, nitout à fait semblable, ni vraiment opposée à son double diurne. Puis, en tant que Québécois,faisant intervenir un double héritage culturel, il confronte les imaginaires européens etaméricains et montre en quoi, dans les représentations collectives des deux continents, .nuit tient une place foncièrement divergeante, se matérialisant dans des typesd’organisation de l’espace très différents. Reprenant l’idée de résonance entre la Terre etl’homme, Luc Bureau insère dans sa démonstration deux cahiers (résonance I et résonanceII) composés chacun de sept photographies, en noir et blanc, d’artistes québécois, endialogue étroit avec sept citations articulées sur la page blanche en vis-à-vis. Entrel’homme et la erre, pense l’auteur, la correspondance est totale... et la démonstration estplutôt convaincante.Ce livre est un ouvrage déroutant pour qui est formé au cartésianisme et à la géographiefrançaise. Et il est admirablement écrit, ce qui rend sa lecture aisée, la compréhensionintime de cette pensée très riche et exotique » demande un état d’attention et de sensibilitéparticulier. Mais le jeu en vaut la chandelle ! Car ce texte enrichit son lecteur et l’insémined’aspirations nouvelles, humanistes, agissant sur lui comme un révélateur. Luc Bureaunous prend par la main pour nous aider à réhabiliter dans notre propre pensée une part tropsouvent oubliée de nous-mêmes: I’ imagination.

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