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consulter le dossier la vraie fiancée - Espace Malraux

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3n° 68décembre 2008d’épouser. Pendant ce temps, <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong> l’attend.En désespoir de cause el<strong>le</strong> se rend au château ets’aperçoit qu’il l’a oubliée. El<strong>le</strong> est emprisonnéeen compagnie des acteurs. Ils décident de jouerune pièce dans <strong>la</strong>quel<strong>le</strong> <strong>le</strong> Prince interprétera sonpropre rô<strong>le</strong> (un peu comme « <strong>la</strong> Souricière » deHam<strong>le</strong>t). La jeune fil<strong>le</strong> tient éga<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> sienet ils interprètent à nouveau <strong>la</strong> scène du til<strong>le</strong>ul.Les yeux du prince se décil<strong>le</strong>nt et <strong>la</strong> marâtre estconfondue. Le père réapparait, ainsi que l’ange. Lamarâtre se jette du haut de <strong>la</strong> tour avec <strong>la</strong> poupée.Tout est bien qui finit bien.Illustrations extraites de La Vraie <strong>fiancée</strong>, d’après <strong>le</strong>s frères Grimm, adaptation d’Olivier Py, coll. Heyoka Jeunesse / Actes Sud-Papiers, 2008Image de <strong>la</strong> pièce L’Eau de <strong>la</strong> vie, 2006 © ALAIN FONTERAY


7b Après avoir repéré <strong>le</strong>s éléments du merveil<strong>le</strong>ux, demander aux élèves en quoi l’inventivitéd’Olivier Py est particulièrement origina<strong>le</strong> ?b Compléter <strong>le</strong> tab<strong>le</strong>au suivant.n° 68décembre 2008Les éléments du merveil<strong>le</strong>uxGRIMMPYUne rose a f<strong>le</strong>uri sur <strong>la</strong> tombe de <strong>la</strong>mère de <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong>Le jardin des questionsÉléments récurrents ouappartenant à d’autres contesLa roseIntervention d’une bonnevieil<strong>le</strong> femme à trois reprisespour effectuer <strong>le</strong>s tâchesinsurmontab<strong>le</strong>s que sa bel<strong>le</strong>mèreoblige <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong> àfaire1) Ébarber douze livres deplumes2) Vider <strong>le</strong> grand étang auprèsdu jardin avec une cuil<strong>le</strong>rtrouéeL’eau s’élève en l’air commeune vapeur, se confond avec<strong>le</strong>s nuages et l’étang se vide.3) Construire un beau châteaudans <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ineLes pierres grises se mettentà bouger, se rapprochant etse dressant... Le sol gronde,<strong>le</strong>s grandes colonnes s’élèventd’el<strong>le</strong>s-mêmes et se rangent<strong>le</strong>s unes à côté des autres.Éc<strong>la</strong>t aveug<strong>la</strong>nt du château.Le sp<strong>le</strong>ndide château et soncontenu (habits, or, pierresprécieuses)Les trois robes : une brodéed’étoi<strong>le</strong>s, <strong>la</strong> deuxième delunes, <strong>la</strong> troisième de so<strong>le</strong>ilsLa jeune fil<strong>le</strong> par<strong>le</strong> à son veauChevaux attelés au ventLa poupée de cire est <strong>la</strong> demisœurde <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong>. La marâtrelui par<strong>le</strong> ; <strong>le</strong> prince doit l’épouser,drogué par l’eau de l’oubliUn ange dont on ne voit pas <strong>le</strong>visage intervient pour effectuer<strong>le</strong>s tâches insurmontab<strong>le</strong>s que <strong>la</strong>marâtre impose à <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong>1) Coudre des robes avec une épinede rose et des feuil<strong>le</strong>s mortes2) Assécher <strong>le</strong> <strong>la</strong>c avec une cuil<strong>le</strong>rtrouée3) Creuser jusqu’au centre de <strong>la</strong> terrepour rapporter une tonne d’or avecune fourchetteConstruire <strong>le</strong> plus grand pa<strong>la</strong>is dumondeLe Prince marche depuis un an,cherche <strong>la</strong> peur, traverse descerc<strong>le</strong>s de f<strong>la</strong>mmes, combat <strong>le</strong> lionsanguinaire, <strong>le</strong>s ava<strong>la</strong>nches, <strong>le</strong>stornades, <strong>le</strong> raz-de-marée, <strong>le</strong> dragonqui crache des f<strong>la</strong>mmes, dort dansdes chambres sans fenêtre sur deslits de cendresLe jardinier dirige <strong>le</strong> chant desoiseaux, fait cou<strong>le</strong>r <strong>la</strong> rivièreLe pa<strong>le</strong>frenier et sa famil<strong>le</strong> interviennentau <strong>le</strong>ver du so<strong>le</strong>il, à <strong>la</strong> tombée de <strong>la</strong> nuitet sur l’apparence de <strong>la</strong> luneLes pierres et <strong>le</strong>s ruisseaux appel<strong>le</strong>nt<strong>le</strong> PrinceLa mandragore, filtre d’amour et demort, <strong>la</strong> pierre en forme de crapaud,l’eau de l’oubliCoudre des robes avec uneépine de rose, etc.


8n° 68décembre 2008Les éléments du merveil<strong>le</strong>ux (suite)GRIMMTil<strong>le</strong>ul avec <strong>le</strong>s vers luisants,il secoue ses branches etrenvoie sa senteurRampe de l’escalier duchâteau couverte de f<strong>le</strong>ursécloses et <strong>le</strong> chant desoiseaux des î<strong>le</strong>s s’échappe de<strong>la</strong> chambrePYLes mauvais esprits qui hantent <strong>le</strong>sforêts, <strong>le</strong> concert des damnésLa lune noire arrive dans 13 joursÉléments récurrents ouappartenant à d’autres contesINTERTEXTUALITÉ AVEC LES GRANDES ŒUVRESSHAKESPEARIENNES (ÉLÈVES DU SECOND DEGRÉ)b Faire identifier aux élèves <strong>le</strong>s passagesqui peuvent correspondre aux référencesshakespeariennes.Dans Le Songe d’une nuit d’été, Oberon demandeà Puck, (acte I, scène 3) de verser une gouttede suc magique sur <strong>le</strong>s yeux de Titania etd’He<strong>le</strong>na, afin de <strong>le</strong>s rendre amoureuses de <strong>la</strong>première personne qu’el<strong>le</strong>s verront à <strong>le</strong>ur réveil.Dans La Vraie <strong>fiancée</strong> d’Olivier Py, <strong>la</strong> marâtredonne à boire au Prince l’eau de « l’oubli » afinqu’il tombe amoureux de <strong>la</strong> poupée de cire.Dans La Tempête, <strong>le</strong> personnage d’Ariel, génieaérien, omniprésent, accomplit des bienfaitspuis à fin de <strong>la</strong> pièce, se dissout, et redevientesprit. Chez Olivier Py, <strong>la</strong> fée (<strong>la</strong> vieil<strong>le</strong> femme),incarnée par l’ange, accomplit <strong>le</strong>s trois tâchesinsurmontab<strong>le</strong>s et disparait comme el<strong>le</strong> estapparue.Image de <strong>la</strong> pièce L’Eau de <strong>la</strong> vie, 2006 © ALAIN FONTERAYb Demander aux élèves s’ils connaissent desexemp<strong>le</strong>s de mise en abyme au théâtre (<strong>le</strong>théâtre dans <strong>le</strong> théâtre).Dans La Vraie <strong>fiancée</strong> (scène 13), <strong>la</strong> troupe réuniepar l’acteur rejoue <strong>la</strong> scène du til<strong>le</strong>ul.Dans Le Songe d’une nuit d’été (acte I, scène 2),<strong>la</strong> troupe de Bottom (des paysans) va présenter<strong>la</strong> pièce intitulée « La cruel<strong>le</strong> mort de Pyrameet Thisbé ».Dans La Tempête (acte IV, scène 1), Iris, Cérès,Junon, <strong>le</strong>s moissonneurs et <strong>le</strong>s nymphes jouentune scène de théâtre devant <strong>la</strong> grotte deProspéro.Dans Ham<strong>le</strong>t, dans <strong>la</strong> scène dite de « LaSouricière » (acte III, scène 2), Ham<strong>le</strong>t faitrejouer aux comédiens <strong>la</strong> scène du meurtrede son père par C<strong>la</strong>udius devant celui-ci etsa mère, Gertrud.


10Après avoir vu <strong>le</strong> spectac<strong>le</strong>Pistes de travailn° 68décembre 2008© ALAIN FONTERAYÉVOCATION DU SPECTACLEb Après <strong>la</strong> représentation, accorder un temps de réf<strong>le</strong>xion puis de paro<strong>le</strong> aux élèves afinqu’ils fassent <strong>le</strong> point :• sur ce qu’ils ont compris ;• sur ce qu’ils ont vu ;• sur ce qu’ils ont ressenti.Pour <strong>la</strong> mise en œuvre de ce temps de paro<strong>le</strong>, onrépartira <strong>le</strong>s élèves en trois groupes qui confronteront<strong>le</strong>urs impressions. Des synthèses individuel<strong>le</strong>sou col<strong>le</strong>ctives (écrites, dessinées, chantées, danséesou jouées) pourront être présentées à l’issuede <strong>la</strong> séquence.Le professeur utilisera <strong>le</strong>s réponses des élèves pourapprofondir <strong>la</strong> compréhension du spectac<strong>le</strong>. Les élémentsprésentés ci-dessous peuvent lui fournir despistes. Il faut souligner que, comme dans tout grandspectac<strong>le</strong> pour <strong>la</strong> jeunesse, l’auteur et <strong>le</strong> metteur enscène (Olivier Py) n’hésite pas à p<strong>la</strong>cer dans <strong>le</strong> spectac<strong>le</strong>des références ou des réf<strong>le</strong>xions qui s’adressentdavantage aux adultes – comme <strong>le</strong>s digressions sur <strong>le</strong>sfonctions du théâtre popu<strong>la</strong>ire, qui sont des petitssignes malicieux adressés au spectateur averti. Lesspectateurs <strong>le</strong>s plus jeunes ne peuvent probab<strong>le</strong>mentpas percevoir ces clins d’œil, mais ce<strong>la</strong> ne <strong>le</strong>s empêchepas de suivre <strong>le</strong> dérou<strong>le</strong>ment de l’histoire. C’estplutôt un signe supplémentaire du refus de toutedémagogie et de toute infantilisation du spectac<strong>le</strong>que l’on destine à l’intelligence de chacun.UN SPECTACLE FACILE À SAISIR ?b Tenter de faire raconter aux élèves l’histoire avec <strong>le</strong>urs mots et pour <strong>le</strong>s plus âgés, <strong>la</strong> <strong>le</strong>urfaire résumer.On fera réaliser aux élèves <strong>la</strong> difficulté de cet exercice puisque <strong>le</strong> spectac<strong>le</strong> est constitué detab<strong>le</strong>aux variés qui se succèdent de façon extrêmement rapide. On peut rappe<strong>le</strong>r l’intrigue en sereportant à <strong>la</strong> première partie du <strong>dossier</strong>.POSTICHES, GRIMAGES ET DIVERS ARTIFICESb Faire préciser aux élèves ce qu’on attend traditionnel<strong>le</strong>ment d’un prince, d’une princesse,d’un père, etc.Certains personnages de La Vraie Fiancée ne correspondent pas à ce qu’on attend de <strong>le</strong>ur statutsocial traditionnel.b Faire récapitu<strong>le</strong>r aux élèves <strong>le</strong>s anachronismes de certains personnages. Quel<strong>le</strong>s significationspeuvent-ils revêtir ?b Faire choisir un des personnages du spectac<strong>le</strong> à chacun des élèves. Ils devront <strong>le</strong> décrire en <strong>le</strong>revêtant d’un costume de <strong>le</strong>ur invention. Ils réaliseront <strong>le</strong> dessin correspondant à <strong>le</strong>ur choix.


11Personnages Postiches, grimages et divers artifices Interprétations possib<strong>le</strong>sn° 68décembre 2008La jeune fil<strong>le</strong>Grosses lunettes, blouse noire, col<strong>la</strong>ntsnoirs, galoches noires (au début duspectac<strong>le</strong>).Un tutu b<strong>la</strong>nc (comme <strong>la</strong> poupée de cire).À <strong>la</strong> fin, quand el<strong>le</strong> joue avec <strong>le</strong>s acteurs,el<strong>le</strong> porte une robe rouge et un louprouge.Fil<strong>le</strong> loin du stéréotype de <strong>la</strong> princessedu conte de fées. Au début duspectac<strong>le</strong>, el<strong>le</strong> lit consciencieusement,donc el<strong>le</strong> apparait commeintel<strong>le</strong>ctuel<strong>le</strong>, se moquant de sonapparence physique, avec un certainsens de l’humour.À <strong>la</strong> fin, dans <strong>la</strong> scène de <strong>la</strong> cabanequ’el<strong>le</strong> rejoue avec <strong>le</strong> prince, el<strong>le</strong>lui fait prendre conscience de soninfidélité : là, el<strong>le</strong> apparait dans toutl’éc<strong>la</strong>t de sa beauté.Le jardinierLa marâtreLe pèreFaux nez et fausses moustaches accrochésà de fausses lunettes, faux crâne chauve,chapeau.Jouée par un homme, en longue robenoire, chapeau à voi<strong>le</strong>tte, collier, trèsélégante (el<strong>le</strong> est en deuil de sa <strong>vraie</strong>fil<strong>le</strong> morte).Barbe, moustache et sourcils b<strong>la</strong>ncs(un peu comme un père Noël), lunetteset chapeau haut de forme, frac noir demarié.Jardinier d’opérette, il arrose avecdes confettis, en<strong>la</strong>ce son arrosoir.Habillé en chef d’orchestre, il dirigeson orchestre d’oiseaux des bois avecsa baguette magique. Sorte de clown,il est insouciant et drô<strong>le</strong>. Il est prochede <strong>la</strong> nature et protège <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong>.À l’époque de Shakespeare, <strong>le</strong>s rô<strong>le</strong>sdes femmes étaient interprétés pardes hommes.La marâtre fait peur ; el<strong>le</strong> domine tous<strong>le</strong>s autres personnages par sa tail<strong>le</strong>.El<strong>le</strong> a une voix grave, effrayante.Il semb<strong>le</strong> revenir de son mariage eta un aspect inoffensif, bonhomme.Inconsistant, il est cruel vis-à-vis desa fil<strong>le</strong>. Il <strong>la</strong>isse <strong>la</strong> marâtre faire et nerevient vers sa fil<strong>le</strong> qu’à <strong>la</strong> fin, quand<strong>la</strong> marâtre n’est plus là.L’angeC’est une jeune femme qui a des ai<strong>le</strong>s etqui joue de l’accordéon (<strong>la</strong> musique desanges). El<strong>le</strong> apparait toujours en hauteur.El<strong>le</strong> n’intervient que lorsque <strong>la</strong> jeunefil<strong>le</strong> est en situation critique, pourl’aider et faire <strong>le</strong> travail à sa p<strong>la</strong>ce.El<strong>le</strong> est cel<strong>le</strong> qui aide <strong>le</strong>s enfants quitravail<strong>le</strong>nt.La poupéede cireLes acteursUn mannequin au début, vissé sur unpied, puis que l’on peut asseoir.Ils se griment pour jouer dans <strong>la</strong> forêtet devant <strong>la</strong> marâtre (ils portent tous descol<strong>le</strong>rettes et des chapeaux).Une poupée Barbie, un sosie de <strong>la</strong>jeune fil<strong>le</strong> mais joli, habillé avec untutu b<strong>la</strong>nc, en princesse, qui va êtremanipulé pendant tout <strong>le</strong> spectac<strong>le</strong>par <strong>le</strong>s uns et <strong>le</strong>s autres.Les comédiens du spectac<strong>le</strong> La <strong>vraie</strong>Fiancée jouent à l’intérieur de cespectac<strong>le</strong> un extrait de La Jeune fil<strong>le</strong>,<strong>le</strong> diab<strong>le</strong> et <strong>le</strong> moulin d’Olivier Pyet une scène du début de La Vraie<strong>fiancée</strong> avec comme héros <strong>le</strong>s vraispersonnages de <strong>la</strong> pièce. On a un effetde mise en abyme. Pour ce<strong>la</strong> ils sontobligés de se grimer.


12n° 68décembre 2008b Demander aux élèves quels personnages<strong>le</strong>ur paraissent bons ou méchants. Pourquoi ?La jeune fil<strong>le</strong> (bonne et méchante à <strong>la</strong> fois) :a un certain humour et est assez touchante,parfois geignarde. El<strong>le</strong> est en tout cas origina<strong>le</strong>,en particulier lorsqu’el<strong>le</strong> décide de jouer sonpropre rô<strong>le</strong> pour permettre au prince de retrouver<strong>la</strong> mémoire.Le jardinier (bon) : attentionné et protecteur,drô<strong>le</strong> et joyeux, il effectue des tâches origina<strong>le</strong>s.Attaché à <strong>la</strong> nature, il représente unpersonnage positif qui aide <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong> danssa quête de <strong>la</strong> vérité.La marâtre (méchante, mais bonne pour ceuxqui comprendraient que son attitude vientdu fait qu’el<strong>le</strong> a perdu sa fil<strong>le</strong> récemment) :odieuse, cruel<strong>le</strong>, perverse, el<strong>le</strong> ourdit un complotpour perdre <strong>le</strong> prince et prendre <strong>le</strong> pouvoir.C’est une sorcière, une magicienne, adepte de<strong>la</strong> magie noire :• el<strong>le</strong> envoûte et charme <strong>le</strong> père ;• el<strong>le</strong> fait croire à <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong> que <strong>la</strong> poupéede cire est <strong>vraie</strong> ;• el<strong>le</strong> fabrique et fait boire l’eau de l’oubli auprince ;• el<strong>le</strong> veut faire brû<strong>le</strong>r tous <strong>le</strong>s livres et réc<strong>la</strong>me<strong>la</strong> guerre.Le père (méchant) : ne répond pas à l’amourde sa fil<strong>le</strong>, se <strong>la</strong>isse dominer par sa nouvel<strong>le</strong>femme. C’est un lâche.L’ange musicien (bon et méchant à <strong>la</strong> fois) :ne soutient <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong> qu’en effectuant à sap<strong>la</strong>ce <strong>le</strong>s tâches insurmontab<strong>le</strong>s exigées par sabel<strong>le</strong>-mère. Il vient au secours des enfants quitravail<strong>le</strong>nt.Le prince (méchant) : prétentieux, sot, vantard,de mauvaise foi et infidè<strong>le</strong>. C’est l’antihérospar excel<strong>le</strong>nce. Quand il est au pouvoir de<strong>la</strong> marâtre, il devient comme un démon, commeun fou, mais redevient conventionnel quand ilrecouvre <strong>la</strong> mémoire.Le pa<strong>le</strong>frenier (bon) : gai, charmant, il s’entendtrès bien avec <strong>le</strong> jardinier, cherche toujoursdes solutions à tout, est dévoué à sonmaître, <strong>le</strong> prince.© ALAIN FONTERAY


13SONS ET LUMIÈRESChansons et musique ont un rô<strong>le</strong> primordial. Qu’apportent-ils au spectac<strong>le</strong> ?n° 68décembre 2008b Demander aux élèves quels sont <strong>le</strong>s instrumentsqu’ils ont pu identifier au cours de<strong>la</strong> représentation. Quels sont <strong>le</strong>s différentesmusiques qui interviennent et de quel<strong>le</strong>manière ? Quels sont <strong>le</strong>s instruments jouésdans <strong>le</strong> spectac<strong>le</strong> ?Olivier Py a choisi dans son spectac<strong>le</strong> de privilégier<strong>le</strong> sty<strong>le</strong> de musique « fanfare popu<strong>la</strong>ire » jouéepar <strong>le</strong>s personnages musiciens avec <strong>le</strong>s instrumentsqui <strong>le</strong>ur correspondent et qui <strong>la</strong> composent.Exemp<strong>le</strong> : <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong> joue de <strong>la</strong> flûte traversière,l’ange de l’accordéon…Musique et sons divers produitspar <strong>le</strong>s instruments de musiqueLa fanfare (sur scène)L’accordéon (sur scène)Il a un doub<strong>le</strong> rô<strong>le</strong>.InterprétationAnnonce <strong>le</strong> spectac<strong>le</strong> et <strong>le</strong> clôt. Donne l’ambiance,<strong>la</strong> « cou<strong>le</strong>ur » du spectac<strong>le</strong> : fête foraine un peu« fellinienne ».Annonce <strong>le</strong>s interventions de l’angeet accompagne tous <strong>le</strong>s tab<strong>le</strong>aux et toutes <strong>le</strong>s chansons.Le tambour (dans <strong>le</strong>s coulisses) Traduit, en arrière-p<strong>la</strong>n <strong>le</strong>s bruits du cœur du prince :angoissant.Est joué pendant <strong>le</strong> spectac<strong>le</strong> et dans <strong>le</strong> spectac<strong>le</strong>,comme annonce.La flûte à bec, appeaux, siff<strong>le</strong>ts, etc.Les chansons religieusesProduisent <strong>le</strong>s chants des oiseaux dans <strong>la</strong> chanson dujardinier.Chantées à deux moments, en duo, au moment où<strong>le</strong> prince et <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong>, bras en croix, évoquent <strong>le</strong>bonheur d’aimer dans l’amour de Dieu.À chaque personnage son sty<strong>le</strong> de musique oude chant :• <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong> chante une goua<strong>la</strong>nte ;• <strong>la</strong> poupée répond à <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong> par unemusique stridente insupportab<strong>le</strong> aux oreil<strong>le</strong>shumaines ;• <strong>le</strong> prince fait penser à un baryton d’opérabouffequand il chante sur <strong>le</strong> <strong>le</strong>itmotiv du « jen’ai pas eu peur » ;• <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong> chante une romance dans <strong>le</strong>sbras du jardinier quand el<strong>le</strong> arrive dans <strong>le</strong>sbois devant <strong>la</strong> cabane ;• <strong>le</strong> jardinier s’évertue sur scène à <strong>la</strong> manièred’un comique troupier en évoquant <strong>le</strong>s chantsspécifiques des oiseaux, accompagné par<strong>le</strong> pa<strong>le</strong>frenier qui reproduit en déca<strong>la</strong>ge <strong>le</strong>schants des oiseaux ;• <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong> et <strong>le</strong> prince chantent un duod’amour de type mystique évoquant <strong>la</strong> célébrationde Dieu, bras en croix, sourires éc<strong>la</strong>tants(chant religieux) ;• <strong>la</strong> marâtre chante à <strong>la</strong> manière de Kurt Weildans un cabaret, accompagnée au tambour,tout en faisant un signe de croix ;• <strong>le</strong> prince chante un chant d’amour pendantque <strong>la</strong> poupée accrochée au filin se ba<strong>la</strong>nce ;• à <strong>la</strong> fin, <strong>la</strong> fanfare exécute sur une musiquetonitruante et discordante un air entrainantde cirque à <strong>la</strong> Nino Rota.


14n° 68décembre 2008La lumièreComme <strong>la</strong> musique, est un élément scénographiqueincontournab<strong>le</strong> qui contribue à servir <strong>le</strong>sintentions du metteur en scène et à éc<strong>la</strong>irer <strong>le</strong>texte. Les lumières sont signifiantes.Les lumières, très spectacu<strong>la</strong>ires, sont présentesdès l’entrée des spectateurs dans <strong>la</strong> sal<strong>le</strong>. Desrangées de petites ampou<strong>le</strong>s (d’une douce luminosité)sont accrochées aux cadres de scène (qui serecomposeront au gré des différents tab<strong>le</strong>aux duspectac<strong>le</strong>). Ces ampou<strong>le</strong>s ont une intensité lumineusequi varie en fonction de ce qui se dérou<strong>le</strong>sur <strong>le</strong> p<strong>la</strong>teau. On pourra faire remarquer l’originalitéet l’inventivité exceptionnel<strong>le</strong> des éc<strong>la</strong>iragesde scène qui viennent presque tous du p<strong>la</strong>teaului-même et sont parfaitement intégrés au décor.Exemp<strong>le</strong>s :• quand <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong> tente d’appe<strong>le</strong>r son pèreau secours, un rideau de lumière, semb<strong>la</strong>b<strong>le</strong> àun miroir l’en empêche ;• à plusieurs reprises, un fin film transparent(une gé<strong>la</strong>tine) descend des cintres sur <strong>la</strong> <strong>la</strong>rgeurdu p<strong>la</strong>teau :- d’abord b<strong>le</strong>u, il baigne toute <strong>la</strong> scène d’unelumière paisib<strong>le</strong>, <strong>la</strong>issant deviner <strong>la</strong> présencede l’ange ;- puis rouge, à <strong>la</strong> fin, avant que se joue <strong>le</strong>spectac<strong>le</strong> devant <strong>la</strong> marâtre, il descendpendant <strong>la</strong> préparation des comédiens etse relève quand <strong>le</strong> spectac<strong>le</strong> commence, enaccord avec <strong>la</strong> robe rouge que revêt <strong>la</strong> jeunefil<strong>le</strong>, transformée en comédienne ;• un mur de lumière apparait au fond, aumoment où l’ange a réalisé <strong>la</strong> troisièmetâche : récupérer <strong>la</strong> tonne d’or. Par ail<strong>le</strong>urs,partout où <strong>la</strong> richesse est évoquée, <strong>la</strong>lumière dorée est intense. El<strong>le</strong> s’éta<strong>le</strong> surtoute <strong>la</strong> scène, se reflète sur <strong>le</strong> sol et sur <strong>le</strong>sparavents qui figurent <strong>le</strong>s murs de <strong>la</strong> sal<strong>le</strong>du château ;• dans <strong>la</strong> scène de théâtre dans <strong>le</strong> théâtre,<strong>la</strong> lumière est fronta<strong>le</strong> et p<strong>la</strong>ce <strong>le</strong> spectateurdans une position traditionnel<strong>le</strong>,conscient qu’il est au théâtre. Cette façonde souligner par <strong>la</strong> lumière que nous assistonsà une scène de théâtre aide <strong>le</strong> jeunespectateur à ne pas oublier qu’il s’agit d’unsubterfuge pour dévoi<strong>le</strong>r au prince sa proprevérité en <strong>le</strong> faisant sortir de « l’oubli »où il a été plongé.© ALAIN FONTERAY


15ACCESSOIRES ET ÉLÉMENTS DE DÉCORn° 68décembre 2008b Faire établir aux élèves une liste des accessoires et éléments de décor dont ils se souviennent,et <strong>le</strong>ur demander de se remémorer l’utilisation qui en est faite par <strong>le</strong>s personnages aucours du spectac<strong>le</strong>.Il ne s’agit pas d’être exhaustif mais de faire re<strong>le</strong>ver aux élèves <strong>le</strong>s éléments qui <strong>le</strong>ur ont paru <strong>le</strong>splus importants.Accessoire ouéléments de décorLe livre de <strong>la</strong> jeunefil<strong>le</strong>La croix celtiqueinsérée dans unpetit praticab<strong>le</strong>Utilité premièrePour se cultiverSigne religieuxUtilisation par <strong>le</strong>s personnagesSymbolise l’entrée dans l’histoire. C’est <strong>le</strong> livre desContes de Grimm.Figure sur <strong>la</strong> tombe de <strong>la</strong> mère.Le petit praticab<strong>le</strong>rectangu<strong>la</strong>ire àl’avant-scèneAccessoire Représente <strong>la</strong> tombe de <strong>la</strong> mère de <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong> :<strong>le</strong>s acteurs peuvent monter et jouer dessus.L’arrosoirLa branche de rosierSert à apporter del’eau aux p<strong>la</strong>ntesÉlément de <strong>la</strong>nature, pour orner unbouquetVerse des confettis b<strong>la</strong>ncs semb<strong>la</strong>b<strong>le</strong>s aux péta<strong>le</strong>sd’une rose.Sert de fouet à <strong>la</strong> marâtre.La pierre Élément de <strong>la</strong> nature Portée comme fardeau par <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong>. À <strong>la</strong> fin,el<strong>le</strong> est si légère que <strong>le</strong> prince jong<strong>le</strong> avec.Le croissant de luneet <strong>le</strong> so<strong>le</strong>il, insérésde chaque côté dupraticab<strong>le</strong>Les trois robes-tutusAccessoires en ferforgé représentantde façon stylisée uncroissant de lune etun so<strong>le</strong>il, élément dedécorationCostume de danseuseétoi<strong>le</strong> c<strong>la</strong>ssiqueLa lune est p<strong>la</strong>cée à jardin (donc gauche/ouestpour <strong>le</strong> spectateur). Le so<strong>le</strong>il est p<strong>la</strong>cé à cour (doncdroite/est pour <strong>le</strong> spectateur). Ils sont inséréssuccessivement ou conjointement de chaque côté dupraticab<strong>le</strong> (par exemp<strong>le</strong> dans <strong>la</strong> scène jouée devant<strong>la</strong> marâtre).Sont semb<strong>la</strong>b<strong>le</strong>s à <strong>la</strong> robe de <strong>la</strong> poupée de cire.La cuillère trouée Pour manger Doit être utilisée sur <strong>le</strong>s ordres de <strong>la</strong> marâtre par <strong>la</strong>jeune fil<strong>le</strong> pour vider <strong>le</strong> <strong>la</strong>c : tâche impossib<strong>le</strong>.La cabane rouge(maquette)La baguette du chefd’orchestre-jardinierLe morceau de <strong>la</strong>chemise du princeJouetBaguette de chefd’orchestreUn morceau de tissudéchiréDonnée au prince par <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong> pour qu’il serappel<strong>le</strong> sa promesse, sans succès.Permet au jardinier de diriger plus ou moins <strong>la</strong>chora<strong>le</strong> des oiseaux de <strong>la</strong> forêt. El<strong>le</strong> est magique.Symbolise <strong>le</strong> lien qui lie <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong> au prince.La jeune fil<strong>le</strong> l’attache à son poignet et tente dese pendre avec. Quand el<strong>le</strong> retrouve <strong>le</strong> prince, c’est<strong>la</strong> preuve qui, pense-t-el<strong>le</strong>, va lui permettre de serappe<strong>le</strong>r sa promesse…La timba<strong>le</strong> dorée Récipient pour boire Contient l’eau de l’oubli, <strong>la</strong> drogue qui va rendre <strong>le</strong>prince amoureux de <strong>la</strong> poupée de cire.


16Accessoire ouéléments de décorUtilité premièreUtilisation par <strong>le</strong>s personnagesn° 68décembre 2008La mandragoreGenre de p<strong>la</strong>nte dont<strong>la</strong> racine fourchueressemb<strong>le</strong> à unepetite poupéeUtilisée ici pour fabriquer <strong>le</strong> filtre d’amour et <strong>le</strong>filtre de mort, c’est-à-dire l’eau de l’oubli.L’eau de l’oubli Pour désaltérer Fait oublier au prince <strong>la</strong> <strong>vraie</strong> <strong>fiancée</strong>. Le prince entamponne <strong>le</strong>s yeux de <strong>la</strong> poupée de cire, sans doutepour qu’el<strong>le</strong> soit amoureuse de lui.La couronne sousune pierre en formede crapaudLa poupée de cireAttribut du roiMannequin decouturière au débutdu spectac<strong>le</strong>, puis,poupée de tail<strong>le</strong>adulteEnterrée par <strong>le</strong> prince qui envoie ensuite <strong>le</strong>pa<strong>le</strong>frenier <strong>la</strong> récupérer. La marâtre se <strong>la</strong> maintientsur <strong>la</strong> tête.Est <strong>la</strong> demi-sœur de <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong>, puis <strong>fiancée</strong> duprince. À un moment el<strong>le</strong> se ba<strong>la</strong>nce, accrochée àun filin, puis tombe, sous l’action du pa<strong>le</strong>frenier(scène du collier).Le collier Parure Permet au pa<strong>le</strong>frenier de découvrir que <strong>la</strong> <strong>fiancée</strong>du prince est une poupée, <strong>la</strong> tête se détache, <strong>la</strong>poupée tombe.La tête de mortAccessoiremorbideTenue par <strong>le</strong> Grand acteur quand il est en prison,c’est une référence directe à Ham<strong>le</strong>t de Shakespeare(<strong>la</strong> scène du fossoyeur « Pauvre Yorrick »).© ALAIN FONTERAY


17VIOLENCE, AMOUR ET GLOIREn° 68décembre 2008b Dégager avec <strong>le</strong>s élèves, et grâce à tout ce qu’ils ont vu et entendu dans ce spectac<strong>le</strong>, quelquesunsdes thèmes essentiels qui sous-tendent ce conte et en font une histoire exemp<strong>la</strong>ire.La volonté de pouvoirLa volonté de pouvoir est incarnée par <strong>la</strong> marâtrequi ne recu<strong>le</strong> devant rien pour étendre sa puissancesur <strong>le</strong> monde.El<strong>le</strong> éloigne <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong> de son père.El<strong>le</strong> lui impose trois tâches impossib<strong>le</strong>s à réaliser.El<strong>le</strong> <strong>la</strong> fait fuir de <strong>la</strong> maison paternel<strong>le</strong>.El<strong>le</strong> fait boire au prince l’eau de l’oubli et substitue<strong>la</strong> poupée de cire à <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong>.El<strong>le</strong> rend <strong>le</strong> prince fou.El<strong>le</strong> jette en prison <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong> pour assurer<strong>le</strong>s noces de <strong>la</strong> poupée.El<strong>le</strong> commande <strong>le</strong> spectac<strong>le</strong> aux comédiens pourque <strong>le</strong> mariage ait plus de retentissement.Pour arriver à ses fins, <strong>la</strong> marâtre utilise l’envoûtementDu père : devenu indifférent à sa propre fil<strong>le</strong>.De <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong> : qui croit que <strong>la</strong> poupée de cire est réel<strong>le</strong>.Du prince : qui boit l’eau de l’oubli. Il en devient malfaisant, impie.Du pa<strong>le</strong>frenier : <strong>le</strong>urré jusqu’au moment où il tente de mettre <strong>le</strong> collier au cou de <strong>la</strong> poupée.El<strong>le</strong> use éga<strong>le</strong>ment de vio<strong>le</strong>nces, tant physiques que psychologiquesEnvers <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong> à qui el<strong>le</strong> impose <strong>la</strong> poupée decire comme sa sœur (el<strong>le</strong> lui donne sa chambre).El<strong>le</strong> <strong>la</strong> fouette avec une branche de rosier ; el<strong>le</strong>l’humilie (lui fait baisser <strong>le</strong>s yeux).El<strong>le</strong> lui donne une lourde pierre à porter.El<strong>le</strong> <strong>la</strong> maintient par <strong>le</strong>s cheveux ; <strong>la</strong> menace de<strong>la</strong> pendre par <strong>le</strong>s oreil<strong>le</strong>s.El<strong>le</strong> lui distribue <strong>le</strong>s tâches impossib<strong>le</strong>s àexécuter.El<strong>le</strong> lui annonce faussement <strong>la</strong> mort de sonpère ; <strong>la</strong> fait fuir hors de <strong>la</strong> maison paternel<strong>le</strong>pour en avoir <strong>la</strong> jouissance tota<strong>le</strong>.El<strong>le</strong> <strong>la</strong> jette en prison et veut <strong>la</strong> faire tuer ; el<strong>le</strong>veut donner son cœur à <strong>la</strong> poupée de cire.Les desseins de <strong>la</strong> marâtre sont contrecarrés par <strong>la</strong> présence magistra<strong>le</strong>de deux personnages et par l’aide de personnages secondairesL’ange des enfants qui travail<strong>le</strong>nt : apparitionmerveil<strong>le</strong>use et fugace, l’ange musiciensymbolise l’amour universel, <strong>la</strong> spiritualité. Ilépouse <strong>la</strong> cause des enfants malheureux dans<strong>le</strong>s contes, comme dans notre monde. Il a doncun rô<strong>le</strong> social qu’il transmet ensuite à <strong>la</strong> fin duspectac<strong>le</strong> au prince et à <strong>la</strong> princesse.Le jardinier, un peu clown, permet à <strong>la</strong> jeunefil<strong>le</strong> de retrouver un contact avec <strong>le</strong> réel, tout enayant une connaissance intime de ses pensées. I<strong>la</strong> des pouvoirs sur <strong>la</strong> nature. Il dirige <strong>la</strong> chora<strong>le</strong>des oiseaux, fait cou<strong>le</strong>r <strong>la</strong> rivière. Il assiste avec<strong>le</strong> public au spectac<strong>le</strong> des acteurs. Il aborde <strong>le</strong>squestions fondamenta<strong>le</strong>s de l’existence. Il est<strong>le</strong> seul, avec <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong> à percevoir <strong>la</strong> rosequi pousse sur <strong>la</strong> tombe de <strong>la</strong> mère au début duspectac<strong>le</strong>. À <strong>la</strong> fin, <strong>la</strong> rose apparait vraiment,comme une réponse à toutes <strong>le</strong>s questions. Lejardinier symbolise peut-être <strong>la</strong> Providence, et <strong>la</strong>rose, l’esprit protecteur de <strong>la</strong> mère et <strong>le</strong> succèsde l’épreuve.Le pa<strong>le</strong>frenier, confident du prince, essaie de<strong>le</strong> mettre en garde. Il devient très complicedu jardinier, par <strong>le</strong> biais de <strong>la</strong> musique et de<strong>la</strong> nature. Il rappel<strong>le</strong> au prince sa promesseà <strong>la</strong> jeune fil<strong>le</strong>. Il est <strong>le</strong> premier à découvrir<strong>le</strong> subterfuge de <strong>la</strong> poupée de cire lors d’unescène p<strong>le</strong>ine d’humour. Il obtient <strong>la</strong> grâce duprince pour <strong>le</strong>s acteurs. Il <strong>le</strong> décide à jouer sonpropre rô<strong>le</strong>.


18n° 68décembre 2008© ALAIN FONTERAYUne troupe d’acteurs : <strong>le</strong> Grand acteur est <strong>le</strong>chef d’une troupe d’acteurs amateurs composéedu boucher et du bûcheron. Il dispenseun discours critique sur <strong>la</strong> mission du théâtrepopu<strong>la</strong>ire.La première intervention du théâtre dans <strong>le</strong>théâtre est une répétition, devant <strong>la</strong> cabanedans <strong>la</strong> forêt, de <strong>la</strong> scène de La jeune fil<strong>le</strong>, <strong>le</strong>diab<strong>le</strong> et <strong>le</strong> moulin dans <strong>la</strong>quel<strong>le</strong> <strong>le</strong> père coupe<strong>le</strong>s mains de sa fil<strong>le</strong>. La scène est montée defaçon tota<strong>le</strong>ment parodique : <strong>le</strong> Grand acteurjoue à <strong>la</strong> fois <strong>le</strong> père et <strong>le</strong> diab<strong>le</strong> (il sur-joue <strong>le</strong>sdeux). Le rô<strong>le</strong> de <strong>la</strong> fil<strong>le</strong> est joué par <strong>le</strong> boucheraffublé d’une perruque et d’une robe. Il a l’airtota<strong>le</strong>ment stupide et amorphe. Le bûcheronjoue <strong>le</strong> prince complètement imbibé de rhum.La seconde intervention du théâtre dans <strong>le</strong> théâtreest exactement sur <strong>le</strong> modè<strong>le</strong> de <strong>la</strong> scène dite de<strong>la</strong> Souricière d’Ham<strong>le</strong>t de Shakespeare, mais <strong>le</strong> butn’est pas <strong>le</strong> même. Il s’agit de permettre, grâceà un heureux dénouement, de faire retrouver<strong>la</strong> mémoire au prince pour reconnaitre sa bienaimée,sa <strong>vraie</strong> <strong>fiancée</strong>. La jeune fil<strong>le</strong> (costumée)et <strong>le</strong> prince jouent chacun <strong>le</strong>ur propre rô<strong>le</strong>.Ces deux scènes entraînent une réf<strong>le</strong>xion sur <strong>le</strong>rô<strong>le</strong> et <strong>la</strong> mission du théâtre dans <strong>la</strong> société.b Proposer un débat en préparant <strong>le</strong>s argumentspar écrit : Comme dans <strong>la</strong> pièce quevous venez de voir, pensez-vous que <strong>le</strong>théâtre soit capab<strong>le</strong> de vous apprendre deschoses sur vous-même, sur <strong>le</strong>s autres, sur <strong>la</strong>vie en société ?La gloire pour <strong>le</strong>s humb<strong>le</strong>sLe prince, infidè<strong>le</strong>, retrouve sa <strong>vraie</strong> <strong>fiancée</strong>.La jeune fil<strong>le</strong> sans naissance, devient princessepar amour, après un chemin initiatique diffici<strong>le</strong>.Le père est ramené par <strong>le</strong> jardinier et, désenvoûté,revient à l’amour de sa fil<strong>le</strong>.L’ange poursuit sa tâche pour aider <strong>le</strong>s enfantsmalheureux et demande au prince de prendre<strong>le</strong> re<strong>la</strong>is.Le jardinier et <strong>le</strong> pa<strong>le</strong>frenier se retrouvent etse posent mutuel<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s questions « fondamenta<strong>le</strong>s».Les acteurs jouent à <strong>la</strong> cour du prince.b Demander aux élèves <strong>le</strong>s questions qu’ilsposeraient s’ils se trouvaient dans <strong>le</strong> « jardindes questions ». Faire confronter <strong>le</strong>s questionset essayer en séance plénière d’apporterdes réponses.


19REBONDS ET RÉSONANCESPropositions de travaux d’écriture et de jeun° 68décembre 2008Écriture et jeub Imaginez que <strong>la</strong> poupée de cire raconte sa propre histoire. Vous rédigerez un monologued’une trentaine de lignes qu’el<strong>le</strong> pourrait dire au public à <strong>la</strong> fin de <strong>la</strong> pièce. Vous pourrez vousexercer à interpréter ce monologue.Compte-rendu de débatb Rendez compte par écrit du débat auquel vous avez participé.Écriture journalistiqueb Critique du spectac<strong>le</strong> (pour <strong>le</strong>s plus grands) : étudiez quelques critiques du spectac<strong>le</strong>.Mettez vous à <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce d’un journaliste et rédigez à votre tour un artic<strong>le</strong> en soulignant l’intérêtde l’histoire racontée, en décrivant ce que l’on voit et ce que l’on entend pendant <strong>le</strong>spectac<strong>le</strong> et en disant pourquoi vous recommandez ou non de <strong>le</strong> voir.b Interview à travers <strong>le</strong>s temps : « Messieurs Grimm, que pensez-vous du spectac<strong>le</strong> LaVraie Fiancée adapté et mis en scène par Olivier Py, que vous venez de voir aux AteliersBerthier ? »© ALAIN FONTERAY


20Atelier théâtren° 68décembre 2008b Mettre en <strong>le</strong>cture et en jeu un court passage que <strong>le</strong>s élèves ont particulièrement apprécié.Suivre <strong>le</strong>s consignes suivantes :• bien définir l’espace de jeu ;• être très attentif à l’adresse (à qui s’adressent <strong>le</strong>s répliques que j’ai à dire) ;• veil<strong>le</strong>r à rendre <strong>le</strong> texte parfaitement audib<strong>le</strong> aux spectateurs.Théâtre et vidéob Projeter <strong>le</strong>s extraits du DVD Contesde Grimm d’Olivier Py (La Jeune fil<strong>le</strong>,<strong>le</strong> diab<strong>le</strong> et <strong>le</strong> moulin et L’Eau de <strong>la</strong>vie) coédité et co-diffusé par <strong>la</strong> COPATet <strong>le</strong> SCÉRÉN / CNDP et du DVD duPetit chaperon rouge de Joël Pommeratcoédité par <strong>la</strong> MGI et <strong>le</strong> CRDP de Parisdans <strong>la</strong> col<strong>le</strong>ction « Entrer en théâtre ».Faire comparer aux élèves <strong>la</strong> façon dontOlivier Py adapte <strong>le</strong>s contes de Grimm àpartir d’une écriture dramatique où <strong>la</strong>paro<strong>le</strong> poétique et <strong>le</strong> goût pour l’opéraprédominent à cel<strong>le</strong> de Joël Pommerat.Joël Pommerat conserve une part de récit (assumépar un comédien qui raconte) et transformeen images visuel<strong>le</strong>s, sonores et quasi chorégraphiques<strong>le</strong>s moments d’action. Deux principesde travail théâtral qui célèbrent l’un et l’autreà <strong>le</strong>ur manière <strong>la</strong> puissance onirique et émotivedes contes portés au théâtre.Trois spectac<strong>le</strong>s pour tous, à partir de 7 ansLa jeune fil<strong>le</strong>, <strong>le</strong> diab<strong>le</strong> et <strong>le</strong> moulin créé ennovembre 1993 au Théâtre de Sartrouvil<strong>le</strong> –HeyokaL’Eau de <strong>la</strong> vie créé en mai 1999 au CDN d’Orléans-Loiret-CentreLa Vraie <strong>fiancée</strong> créé en 2008 à l’Odéon-Théâtrede l’EuropeDistributionAvec Céline Chéenne, Samuel Churin, SylvieMagand, Thomas Matalou, Antoine Philippot,Benjamin Ritter ; décor, costumes & maquil<strong>la</strong>ges :Pierre-André Weitz ; lumière : Olivier Py avecBertrand Killy ; musique : Stéphane LeachNos cha<strong>le</strong>ureux remerciements à Olivier Py ainsi qu’à Anne-Marie Peigné de l’Odéon-Théâtrede l’Europe qui ont permis <strong>la</strong> réalisation de ce <strong>dossier</strong> dans <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>ures conditions.Tout ou partie de ce <strong>dossier</strong> sont réservés à un usage strictement pédagogiqueet ne peuvent être reproduits hors de ce cadre sans <strong>le</strong> consentement des auteurs et de l’éditeur.Comité de pilotage et de validationMichel<strong>le</strong> BÉGUIN, IA-IPR Lettres (Versail<strong>le</strong>s)Pascal CHARVET, IGEN Lettres-ThéâtreJean-C<strong>la</strong>ude LALLIAS, Professeur à l’IUFMde Créteil, directeur de <strong>la</strong> col<strong>le</strong>ction nationa<strong>le</strong>« Théâtre Aujourd’hui »Sandrine MARCILLAUD-AUTHIER,chargée de mission Lettres, CNDPAuteurs de ce <strong>dossier</strong>Daniel<strong>le</strong> BARTHÉLEMY-MESGUICH,Professeur de Lettres et HistoireCatherine GILLEQUIN-MAAREK,Professeur de LettresDirecteur de <strong>la</strong> publicationBernard GARCIA, Directeur du CRDPde l’académie de ParisResponsabilité éditoria<strong>le</strong>Lise BUKIET, CRDP de l’académie de ParisResponsab<strong>le</strong> de col<strong>le</strong>ctionMarie FARDEAU, CRDP de l’académie de Paris,Jean-C<strong>la</strong>ude LALLIASMaquette et mise en pagesÉric GUERRIERCréation, Éric GUERRIER© Tous droits réservésRetrouvez sur4http://crdp.ac-paris.fr l'ensemb<strong>le</strong> des <strong>dossier</strong>s « Pièce (dé)montée »


21ANNEXE 1 : BIOGRAPHIE ET BIBLIOGRAPHIE D’OLIVIER PYn° 68décembre 2008Nom : PyPrénom : OlivierAprès avoir fait ses c<strong>la</strong>sses préparatoires littéraires, il entre au Conservatoire de Paris et suit parallè<strong>le</strong>mentdes études de théologie. À vingt-trois ans, il commence à écrire et à mettre en scène sespropres textes avec <strong>la</strong> compagnie qu’il a fondée, “L’Inconvénient des boutures”. La grande aventuredu théâtre démarre alors.Pourquoi <strong>le</strong> théâtre ? Parce que <strong>le</strong> théâtre reconstruit <strong>le</strong> monde réel, dans sa totalité. Parce que <strong>le</strong>théâtre est une fête de <strong>la</strong> pensée et, nécessairement, une fête de l’espoir. De sa plume jaillissent unequinzaine de pièces tant pour <strong>le</strong>s petits que pour <strong>le</strong>s grands. Dramaturge, il ne l’est pas seu<strong>le</strong>ment.Il est aussi comédien. Et chanteur. Et cinéaste. Et romancier. Et poète. Ce parcours riche et varié <strong>le</strong>conduit à diriger <strong>le</strong> Centre dramatique national d’Orléans pendant huit années ; après <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s il estnommé en 2007 directeur de L’Odéon-Théâtre de l’Europe à Paris. Olivier Py est désormais dans <strong>la</strong> courdes grands même s’il pense toujours aux plus jeunes. Sa mère est très fière de lui.Pièces de théâtreLa Nuit au cirque, Les Solitaires intempestifs,1992Les Aventures de Paco Goliard, Les Solitairesintempestifs, 1992La Jeune Fil<strong>le</strong>, <strong>le</strong> Diab<strong>le</strong> et <strong>le</strong> Moulin, d’après unconte de Grimm, L’Éco<strong>le</strong> des loisirs, 1994La Servante, Actes Sud, 1995 et 2000Le Visage d’Orphée, Actes Sud-Papiers, 1997Théâtres, Les Solitaires intempestifs, 1998L’Eau de <strong>la</strong> vie, L’Éco<strong>le</strong> des loisirs, 1999L’Apocalypse joyeuse, Actes Sud-Papiers, 2000Épître aux jeunes acteurs pour que soit rendue <strong>la</strong>Paro<strong>le</strong> à <strong>la</strong> Paro<strong>le</strong>, coll. “Apprendre” n° 13, ActesSud-Papiers / CNSAD, 2000L’Exaltation du <strong>la</strong>byrinthe, Actes Sud-Papiers,2001Jeunesse, Actes Sud-Papiers, 2003Le Vase de parfums suivi de Faust nocturne,Actes Sud-Papiers, 2004Les Vainqueurs, Actes Sud-Papiers, 2005Illusions comiques, Actes Sud-Papiers, 2006Les Enfants de Saturne, Actes Sud-Papiers, 2007Discours du nouveau directeur de l’Odéon, ActesSud, publié avec <strong>la</strong> col<strong>la</strong>boration de l’Odéon-Théâtre de l’Europe, 2007L’Orestie d’Eschy<strong>le</strong>, texte français d’Olivier Py,Actes Sud-Papiers, 2008La Vraie <strong>fiancée</strong>, d’après un conte de Grimm,Actes Sud papiers/Heyoka jeunesse, 2008Contes de Grimm (La Jeune fil<strong>le</strong>, <strong>le</strong> diab<strong>le</strong> et <strong>le</strong>moulin et L’Eau de <strong>la</strong> vie), COPAT - SCÉRÉN/CNDP,DVD, 2006RomanParadis de tristesse, Actes Sud, 2002ScénarioLes Yeux fermés, Arte éditions, coll. “Scénars”, 2000CDLes Bal<strong>la</strong>des de Miss Knife, Actes Sud (distribution Naïve), 2000EntretienL’Inachevé, avec Geneviève Welcome, Bayard, 2003


22ANNEXE 2 : ENTRETIEN AVEC OLIVIER PYÀ PROPOS DE LA VRAIE FIANCÉEn° 68décembre 2008Cet entretien est réservé plus spécifiquement aux enseignants qui souhaitent être éc<strong>la</strong>irés sur <strong>le</strong>sintentions de l’adaptateur et du metteur en scène Olivier Py. Il s’agit d’un complément à l’entretienfigurant dans <strong>le</strong> <strong>dossier</strong> des deux premiers spectac<strong>le</strong>s.On peut cependant, <strong>le</strong> faire étudier aux plus grands élèves.b Leur faire trouver <strong>le</strong>s raisons pour <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s Olivier Py a choisi ce conte.b Leur faire dégager <strong>la</strong> portée symbolique des deux personnages récurrents dans <strong>le</strong>s troiscontes, <strong>la</strong> justification de <strong>la</strong> présence de <strong>la</strong> poupée de cire, <strong>la</strong> vision origina<strong>le</strong> d’Olivier Pyconcernant <strong>le</strong> prince…(1) Siegfried et Brünnhild sont mariés. Mais,Siegfried perd <strong>la</strong> mémoire suite aux manœuvresde Hagen et tombe amoureux de Gutrune, sœurdu roi Gunther. Brünnhild fol<strong>le</strong> de dou<strong>le</strong>ur accusepubliquement Siegfried de trahison. Siegfried sedéfend et s’engage à être déchiré par <strong>la</strong> <strong>la</strong>nce deHagen s’il a menti. À l’occasion d’une partie dechasse, Hagen rend <strong>la</strong> mémoire à Siegfried.(2) Hoffmann est amoureux d’Olympia, <strong>la</strong> « fil<strong>le</strong> »du scientifique Spa<strong>la</strong>nzani. Cel<strong>le</strong>-ci s’avère en faitêtre un automate dont Coppélius, un char<strong>la</strong>tan,a fourni à Spa<strong>la</strong>nzani <strong>le</strong>s yeux. Hoffmann achêtedes lunettes magiques qui lui font voir Olympiacomme une <strong>vraie</strong> femme dont il se croit alorsaimé. Au cours d’une valse, Hoffmann tombe etses lunettes se brisent. Il se rend compte de <strong>la</strong><strong>vraie</strong> nature de cel<strong>le</strong> qu’il aimait, cependant que<strong>la</strong> fou<strong>le</strong> ricane de <strong>la</strong> naïveté du poète.Pourquoi, parmi tous <strong>le</strong>s contes des FrèresGrimm, avez-vous choisi d’adapter celui de LaVraie Fiancée ?Tout d’abord je vou<strong>la</strong>is un conte dont <strong>le</strong> personnagecentral soit une jeune fil<strong>le</strong>, une femme,parce que dans L’Eau de <strong>la</strong> vie, <strong>le</strong> spectac<strong>le</strong> quej’ai monté précédemment, <strong>le</strong> héros était ungarçon et je vou<strong>la</strong>is alterner <strong>le</strong>s héros fémininset masculins. D’autre part, c’est un conte qui,de manière très éloignée, a servi à Wagner pourconstruire <strong>le</strong> Ring. Les rapports entre Siegfriedet Brünnhild sont tirés en fait de La VraieFiancée 1 . J’ai été étonné de <strong>la</strong> grande originalitédu conte dans <strong>le</strong>quel <strong>le</strong> prince est infidè<strong>le</strong>et où l’amour n’est un amour ni idéal ni faci<strong>le</strong>.D’habitude, <strong>le</strong> prince arrive à <strong>la</strong> fin du conte eten est <strong>la</strong> résolution harmonique. Dans La VraieFiancée, il s’agit d’un amour diffici<strong>le</strong>, ce quiest rare, pratiquement unique, dans ce corpusde contes.Enfin, ces contes permettent une adaptationtrès libre parce qu’ils sont écrits comme unsynopsis. Ils <strong>la</strong>issent une grande <strong>la</strong>titude auxécrivains pour créer une œuvre qui <strong>le</strong>ur ressemb<strong>le</strong>.J’ai beaucoup plus l’impression que c’estune pièce d’Olivier Py qu’un conte de Grimm.Voilà pourquoi j’ai choisi celui-là. J’aimerais enfaire d’autres encore. Pour moi c’est une chosesalutaire de revenir aux contes de Grimm et defaire des spectac<strong>le</strong>s pour enfants.Comment justifiez-vous <strong>la</strong> présence du théâtredans <strong>le</strong> théâtre dans votre adaptation ?Cette présence m’appartient en propre puisqu’iln’y a pas de comédien, ni de pièceenchâssée et ce n’est pas <strong>le</strong> théâtre qui permet<strong>la</strong> <strong>le</strong>vée d’amnésie du prince dans Grimm.Il y a un doub<strong>le</strong> questionnement sur <strong>le</strong> théâtre– <strong>la</strong> <strong>fiancée</strong> du prince est doub<strong>le</strong>ment fausse :d’abord ce n’est pas cel<strong>le</strong> qu’il a rencontréeau début de l’histoire, mais en plus, c’est unepoupée de cire. Il y a ici une méditation sur<strong>le</strong> rapport au réel, bien plus qu’une citationcorporatiste. C’est une méditation sur <strong>le</strong> <strong>vraie</strong>t <strong>le</strong> faux, puisque <strong>la</strong> pièce s’appel<strong>le</strong> La <strong>vraie</strong><strong>fiancée</strong>. Comment <strong>le</strong> rapport amoureux nouspermet-il de redéfinir <strong>le</strong> réel ou au contraired’avoir l’impression de sa perte ? C’est beaucoupplus l’aspect analytique qui m’a intéressédans l’utilisation du théâtre qu’une citationde <strong>la</strong> vie théâtra<strong>le</strong>. À vrai dire, <strong>le</strong> processusde <strong>la</strong> <strong>le</strong>vée d’amnésie permet de retrouverune vérité, un désir véritab<strong>le</strong>, originel, quiétait perdu, comme abîmé. La façon dont on<strong>le</strong> retrouve – grâce à quoi et comment ? – pournous, c’est <strong>le</strong> Théâtre, toutes sortes de théâtres,qui ne sont pas forcément <strong>le</strong>s théâtresen costume.Pourquoi <strong>le</strong> personnage de <strong>la</strong> poupée decire ?Je travail<strong>la</strong>is à l’époque sur <strong>le</strong>s Contes d’Hoffmannd’Offenbach – ce<strong>la</strong> a dû m’influencer – quire<strong>la</strong>tent l’histoire d’un personnage amoureuxd’une poupée 2 . Les Contes d’Hoffmann et <strong>le</strong>sContes de Grimm sont presque de <strong>la</strong> même époque.Le merveil<strong>le</strong>ux et <strong>le</strong> fantastique en sontdeux lignes romantiques différentes. J’ai rajoutécette poupée de cire, parce que j’ai voulu montrerqu’à travers <strong>le</strong> rapport amoureux, <strong>le</strong> rapportau monde change. Le prince finit par se rendrecompte que cel<strong>le</strong> qu’il aime est une poupée, maisil ne l’en aime pas moins. Il préférera penserqu’il n’y a pas de vérité, que <strong>le</strong> monde entier estune illusion, plutôt que d’avoir à remettre encause l’illusion de son désir, l’illusion de l’objetde son désir ou de voir l’objet de son désir telqu’il est. C’est intéressant, parce qu’on a unpersonnage de prince très éloigné de <strong>la</strong> visioncheva<strong>le</strong>resque que l’on peut en avoir dans <strong>le</strong>scontes pour enfants. On a un prince névrotique,jusqu’au moment où on lui prouve que sa <strong>fiancée</strong>est fausse. Lui, au lieu de l’accepter, pense quec’est <strong>le</strong> monde entier qui est faux. Il devientvraiment psychotique. C’est ce<strong>la</strong> que je vou<strong>la</strong>israconter, <strong>le</strong>s rapports avec <strong>la</strong> folie. Ce sont desréf<strong>le</strong>xions assez vio<strong>le</strong>ntes dans une pièce quis’adresse aux enfants.


23n° 68décembre 2008Nous voulions vous interroger sur <strong>le</strong>s deuxpersonnages récurrents dans <strong>le</strong>s trois spectac<strong>le</strong>s,à savoir, <strong>le</strong> jardinier et l’ange.D’abord ils n’existent ni l’un ni l’autre dans <strong>le</strong>scontes originels. Il y a quelquefois des jardiniers,quelquefois des anges, mais pas particulièrementdans ces contes-là. Ce sont des personnagespositifs, qui aident <strong>le</strong> héros à retourner à <strong>la</strong> joie,puisque en général, <strong>le</strong>s héros ou <strong>le</strong>s héroïnes deGrimm ont toujours vécu un traumatisme initial.Ce sont des enfants qui ont été confrontés à <strong>la</strong>vio<strong>le</strong>nce, à toutes sortes de vio<strong>le</strong>nces d’ail<strong>le</strong>urs,politique, socia<strong>le</strong>, sexuel<strong>le</strong> quelquefois même.Dans Peau d’âne, par exemp<strong>le</strong>, il y a un pèrequi veut épouser sa fil<strong>le</strong>, c’est assez c<strong>la</strong>ir. DansLa jeune fil<strong>le</strong>, <strong>le</strong> diab<strong>le</strong> et <strong>le</strong> moulin, <strong>le</strong> père quicoupe <strong>le</strong>s mains de sa fil<strong>le</strong>, est une métaphorede <strong>la</strong> vio<strong>le</strong>nce sexuel<strong>le</strong> faite à l’enfant. Mais<strong>le</strong>s contes de Grimm restent pourtant positifset véhicu<strong>le</strong>nt une bonne paro<strong>le</strong>. On peut <strong>le</strong>sadapter pour un public jeune parce qu’il y a despersonnages qui arrivent à remettre <strong>le</strong> hérosdans <strong>la</strong> voie de <strong>la</strong> joie et de <strong>la</strong> lumière. Ce sontl’ange et <strong>le</strong> jardinier que je fais agir toujoursen tandem, comme s’il y en avait un qui venaitdu ciel et l’autre de <strong>la</strong> terre. L’un, horizontal,explique à l’héroïne qu’en travail<strong>la</strong>nt, en regardant<strong>le</strong>s f<strong>le</strong>urs, en retrouvant <strong>le</strong> contact avec <strong>la</strong>nature, on arrive à se retrouver soi-même, etl’autre, au contraire, est plutôt de l’ordre desidées, de l’idéal, du spirituel, de <strong>la</strong> pensée et ilpermet aussi de rouvrir <strong>le</strong> champ des possib<strong>le</strong>sdétruits par un traumatisme. Ce sont donc deuxpersonnages positifs. En ce qui me concernej’ai une petite répugnance quelquefois à mettredes animaux en scène, je <strong>le</strong>s remp<strong>la</strong>ce par despersonnages qui ont plus de pouvoirs magiques.C’est un ange musicien et un jardinier qui ontgrandi de pièces en pièces et qui en concluent<strong>le</strong> cyc<strong>le</strong>. Je suis maintenant très attaché au personnagedu jardinier et on s’est aperçu que <strong>le</strong>senfants s’identifiaient très fortement à lui, parceque c’est une sorte de clown. Pour moi, c’est unfou shakespearien : on sait qu’il dit <strong>la</strong> vérité maisque personne ne l’écoute.Comptez-vous proposer aux jeunes et moinsjeunes un nouveau spectac<strong>le</strong> à partir d’unconte de Grimm ?Je voudrais continuer. J’hésite entre beaucoupde contes. J’aime Les Sept cygnes, mais c’estencore autour d’un personnage de jeune fil<strong>le</strong>,alors j’aimerais bien pouvoir alterner, un pour<strong>le</strong>s fil<strong>le</strong>s, un pour <strong>le</strong>s garçons. Pour l’instantc’est deux à un dans <strong>le</strong> camp des fil<strong>le</strong>s, donc ilfaudrait plutôt que je trouve un conte avec unhéros masculin.Depuis notre dernier entretien, vous avezpris <strong>la</strong> direction de l’Odéon-Théâtre del’Europe, un des cinq Théâtre nationauxfrançais. Après un peu plus d’un an d’exercice,comment vivez-vous votre nouvel<strong>le</strong>fonction ?De mieux en mieux. Chacun sait que quandon arrive dans une grande maison commecel<strong>le</strong>-là, c’est <strong>le</strong> début qui est <strong>le</strong> plus diffici<strong>le</strong>.Diffici<strong>le</strong>, parce qu’il ne s’agit pas d’êtrenommé pour que magiquement <strong>le</strong> projetqu’on a dans <strong>la</strong> tête soit réalisé. Il n’y apas un ange qui vient travail<strong>le</strong>r à ma p<strong>la</strong>ce.J’accepte aussi que même en travail<strong>la</strong>nt quinzeheures par jour, je me couche en me disantqu’on n’a pas fini, qu’on n’a pas tout fait,qu’on n’a pas rappelé tout <strong>le</strong> monde. Pourmoi, <strong>le</strong> chantier était énorme et à mon sens,cette maison n’a pas <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce socia<strong>le</strong> qu’el<strong>le</strong>mérite d’avoir. J’ai même envie de dire « ces »maisons. C’est très différent. L’Odéon, dans<strong>le</strong> VI e , est maintenant, je crois, une maisonvivante, qui en-dehors de <strong>la</strong> programmation,joue un rô<strong>le</strong> important : c’est un lieu où l’onpense, où l’on se rencontre, où l’on protesteéventuel<strong>le</strong>ment. Voilà, c’est un lieu qui estouvert à <strong>la</strong> paro<strong>le</strong> en général.Nous jouons beaucoup plus (presque un tiers dereprésentations en plus) et nous vendons 15 %de bil<strong>le</strong>ts supplémentaires : c’est <strong>la</strong> réponse dupublic. Il y a aussi un rajeunissement du publicavec une augmentation d’un tiers de moins de26 ans. Le fait de faire du théâtre pour <strong>le</strong>s jeunesspectateurs montre qu’une subvention n’est pasdu mécénat d’État, c’est une responsabilité publique.Ce rô<strong>le</strong>, de s’adresser à un public plus jeune,de former <strong>le</strong> public de demain, il me semb<strong>le</strong> fairepartie de <strong>la</strong> mission de cette maison. Nous avonsaussi développé beaucoup de choses avec l’Éducationnationa<strong>le</strong>. On peut dire, qu’avant, l’Odéonse vivait comme un théâtre parisien fermé unpeu sur lui-même et n’avait pas pris <strong>la</strong> mesuredes <strong>le</strong>çons de <strong>la</strong> décentralisation, notamment enterme de re<strong>la</strong>tions publiques. Là, <strong>le</strong>s choses sontcertainement modifiées. C’est ce qui fait que nossal<strong>le</strong>s sont p<strong>le</strong>ines, que nous avons augmenté defaçon significative <strong>le</strong> nombre des abonnements :ce n’est donc pas seu<strong>le</strong>ment l’arrivée d’un créateurà <strong>la</strong> tête de l’Odéon qui a tout changé,mais éga<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> travail de l’ensemb<strong>le</strong> descol<strong>la</strong>borateurs impliqués dans <strong>la</strong> bonne marchedu théâtre.Réalisé par Catherine Gil<strong>le</strong>quin Maareket Daniel<strong>le</strong> Barthé<strong>le</strong>my-Mesguich,<strong>le</strong> 18 décembre 2008


24ANNEXE 3 : COMPARAISON DU DÉBUT DU CONTE DES FRÈRESGRIMM ET DE LA PIÈCE D’OLIVIER PYn° 68décembre 2008Le conteIl était une fois une fil<strong>le</strong> qui était jeune et bel<strong>le</strong>, mais el<strong>le</strong> avait perdu sa mère de bonne heure,et sa bel<strong>le</strong>-mère lui faisait subir <strong>le</strong>s pires crève-cœur. Quand el<strong>le</strong> lui donnait une tâche, si lourdequ’el<strong>le</strong> fût, el<strong>le</strong> s’y mettait sans se <strong>la</strong>isser rebuter et l’accomplissait dans <strong>la</strong> mesure de ses forces.Mais el<strong>le</strong> ne parvenait pas a adoucie <strong>le</strong> cœur de <strong>la</strong> méchante femme qui était toujours mécontente,jamais el<strong>le</strong> n’en faisait assez. Plus el<strong>le</strong> était <strong>la</strong>borieuse, Plus el<strong>le</strong> lui donnait de travail, et el<strong>le</strong> nepensait qu’au moyen de lui imposer des tâches de plus en plus lourdes pour lui bien empoisonner<strong>la</strong> vie.Début de La Vraie <strong>fiancée</strong>, Les frères GrimmLa pièceScène 1Le jardin.LE JARDINIER : Une rose a f<strong>le</strong>uri sur <strong>la</strong> tombe de ta mère.LA JEUNE FILLE : Je ne <strong>la</strong> cueil<strong>le</strong>rai pas.LE JARDINIER : El<strong>le</strong> est si bel<strong>le</strong> qu’on est forcé de se demander pourquoi.LA JEUNE FILLE : Ma mère est morte ; il y a un an.LE JARDINIER : Nous vivons dans <strong>le</strong> jardin des questions. Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ? Commedes enfants qui se font un trésor avec des objets trouvés, du verre cassé, des fils dorés, des boutonsde nacres.LA JEUNE FILLE : Aujourd’hui mon père vient de <strong>la</strong> vil<strong>le</strong> pour me présenter sa nouvel<strong>le</strong> épouse.LE JARDINIER : Ta nouvel<strong>le</strong> mère.LA JEUNE FILLE : Et sa fil<strong>le</strong> d’un premier lit.LE JARDINIER : Tu as peur ?LA JEUNE FILLE : Cette rose est incomparab<strong>le</strong>ment bel<strong>le</strong>, et pourquoi ?LE JARDINIER: C’est qu’el<strong>le</strong> n’a pas <strong>le</strong> temps d’être autre chose.LA JEUNE FILLE: Ce n’est pas ce que je demande. Je demande <strong>la</strong> raison.LE JARDINIER : La raison ? Ah !LA JEUNE FILLE : J’entends <strong>la</strong> voiture de mon père.LE JARDINIER : Il faut vivre ainsi, dans <strong>le</strong> pourquoi. Comme dans un jardin.(Entrent <strong>le</strong> père et <strong>la</strong> marâtre. El<strong>le</strong> porte une poupée de cire.)LE PÈRE : Ma fil<strong>le</strong> voilà ta nouvel<strong>le</strong> mère.LA MARÂTRE : J’espère que tu aimes travail<strong>le</strong>r.


25LA JEUNE FILLE : Je préfère chanter.LE PÈRE, (désignant <strong>la</strong> poupée) : Dis bonjour à ta sœur.n° 68décembre 2008LA JEUNE FILLE : Bonjour ma sœur. El<strong>le</strong> ne répond pas.LE PÈRE : Le voyage l’a épuisée.LA MARÂTRE : Je vais faire <strong>le</strong> tour de <strong>la</strong> maison.LE PÈRE : Sois bonne avec ta bel<strong>le</strong> mère, c’est une femme qui a souffert.LA JEUNE FILLE : Vous ne m’embrassez pas ? (Il ne bouge pas. El<strong>le</strong> regarde <strong>la</strong> poupée.)Qu’el<strong>le</strong> est bel<strong>le</strong>. Tu aimes <strong>la</strong> musique ? El<strong>le</strong> ne répond pas. Tu es heureuse ? El<strong>le</strong> ne répond pas ?Qui était ton père ? El<strong>le</strong> ne répond rien.LA MARÂTRE : Assez de bavardage, tu l’épuises. C’est une enfant fragi<strong>le</strong>, el<strong>le</strong> a besoin de si<strong>le</strong>nce.LA JEUNE FILLE : Le si<strong>le</strong>nce me fait peur.LA MARÂTRE : Tu as beaucoup d’orgueil, je te briserai. Tourne-toi.(El<strong>le</strong> cueil<strong>le</strong> une branche et <strong>la</strong> fouette.)Ce n’est qu’un avant-goût de ce que tu auras si tu n’obéis pas.LA JEUNE FILLE : Je n’ai rien fait.LA MARÂTRE : Baisse <strong>le</strong>s yeux quand tu me par<strong>le</strong>s. (El<strong>le</strong> prend <strong>la</strong> poupée.) Viens ma chérie je t’emmènedans ta chambre.Je <strong>la</strong> couche dans ton lit, il n’y a pas d’autre chambre. Toi tu dormiras par terre dans <strong>le</strong> garage.Voilà une bûche pour oreil<strong>le</strong>r.LA JEUNE FILLE : C’est injuste. Mon père, dis quelque chose.LA MARÂTRE : Vous avez mal é<strong>le</strong>vé cette enfant. Laissez-moi <strong>la</strong> dresser.LE PÈRE : Comme vous voudrez cher ange.LA MARÂTRE : Cette nuit nous allons voir si tu sais te rendre uti<strong>le</strong>. Voilà une épine de rose et dufil. Avec ces feuil<strong>le</strong>s mortes, tu vas coudre pour ma fil<strong>le</strong> une robe cou<strong>le</strong>ur de lune, une robe cou<strong>le</strong>urd’étoi<strong>le</strong> et une robe cou<strong>le</strong>ur de so<strong>le</strong>il. Et si el<strong>le</strong>s ne lui p<strong>la</strong>isent pas tu seras fouettée. Au travail,nous, nous allons dîner.LA JEUNE FILLE : O mon père ! Mon père ! Je ne pourrais jamais coudre avec une épine de rose etdes feuil<strong>le</strong>s mortes. Je soupire et mon souff<strong>le</strong> fait envo<strong>le</strong>r l’aiguil<strong>le</strong> et <strong>le</strong> fil.Entre un ange.L’ANGE : Je suis l’ange des enfants qui travail<strong>le</strong>nt. Je vais par <strong>le</strong> monde et j’essuie <strong>le</strong>ur front.LA JEUNE FILLE : Je ne vois pas votre visage.L’ANGE : Dors et je ferai <strong>le</strong>s choses à ta p<strong>la</strong>ce. Je n’aime pas que <strong>le</strong>s enfants travail<strong>le</strong>nt.La Vraie <strong>fiancée</strong>, Olivier Py


26ANNEXE 4 : QUELQUES RÉFLEXIONS SUR LE CONTELe conten° 68décembre 2008Parmi tous <strong>le</strong>s récits possib<strong>le</strong>s – re<strong>la</strong>tions d’événements vrais ou imaginaires –, <strong>le</strong> conte évoque desévénements présentés comme imaginaires. Il s’inscrit dans tous <strong>le</strong>s registres : satirique, humoristique,fantastique ou merveil<strong>le</strong>ux. Il peut avoir un but moral ou philosophique ; il se rapprochealors de l’apologue.Origines et évolution du conteL’origine est ora<strong>le</strong> et popu<strong>la</strong>ire. Le conte étaitraconté par certaines personnes <strong>le</strong> plus souventâgées : grand-mère, grand-père, vieux, vieil<strong>le</strong>squi avaient du temps devant eux pour dévoi<strong>le</strong>rl’expérience de <strong>le</strong>ur vie au travers de récitsimaginaires. Leur mémoire et <strong>le</strong>ur expérienceavaient eu loisir de conserver bon nombre d’histoiresqu’ils avaient récoltées et qui s’étaient“figées” en eux, et qu’ils souhaitaient à <strong>le</strong>urtour restituer à d’autres, perpétuant ainsi <strong>la</strong>tradition ora<strong>le</strong> de <strong>la</strong> transmission en <strong>le</strong>s faisantrevivre. Dans quel but ? Pour instruire, prévenirceux qui <strong>le</strong>s écoutaient, des embûches et despièges que <strong>la</strong> vie <strong>le</strong>ur tendrait. C’était aussipour <strong>le</strong>s préparer symboliquement au chemininitiatique souvent émaillé d’actions bruta<strong>le</strong>squ’ils auraient à parcourir pour arriver à l’âgeadulte. Aussi, trouve-t-on des descriptionsréalistes – des besoins du corps par exemp<strong>le</strong>– et parfois même des allusions érotiques.Cependant, <strong>le</strong>urs diverses transcriptions écritesont eu pour conséquence de <strong>le</strong>s “lisser” progressivementafin de <strong>le</strong>s adapter dans <strong>le</strong> mêmetemps aux règ<strong>le</strong>s de <strong>la</strong> stylistique et à l’évolutionde <strong>le</strong>ur <strong>le</strong>ctorat.Les contes <strong>le</strong>s plus connus en France sont issusdu folklore européen. Ils ont été transcrits – etpeut-être sauvés de l’oubli – d’abord essentiel<strong>le</strong>mentpar Perrault, puis par <strong>le</strong>s frères Grimm.Plus récemment, Bruno Bettelheim dansPsychanalyse des contes de fées, a montré, à <strong>la</strong>lumière des théories de Freud, <strong>le</strong>s fondementsinconscients des contes et <strong>le</strong> bénéfice psychologiqueque <strong>le</strong>s enfants en tiraient. Bien que sonanalyse ait été en son temps très discutée, tous<strong>le</strong>s ouvrages actuels reconnaissent <strong>le</strong>s vertuséducatives des contes par <strong>le</strong>s sujets communsdont ils traitent : conflits œdipiens, jalousie,peurs enfantines, enfance maltraitée, parentsindignes, contradiction des désirs (grandir/rester enfant), rites initiatiques, <strong>le</strong> bonheuraprès <strong>le</strong>s épreuves, <strong>la</strong> puberté, revanches surl’injustice, etc.Le récit et <strong>la</strong> mora<strong>le</strong>La didactique c<strong>la</strong>ssique entend enseigner <strong>la</strong>mora<strong>le</strong> par l’exemp<strong>le</strong>. Le conte permet une combinaisonentre un court récit et une moralité,énoncé moral d’ordre général dont l’histoireest une illustration. Le conte avec toutes sesséductions et ses ambiguïtés est un des genresbrefs particulièrement adapté à l’écrituremoraliste.De <strong>la</strong> culture pop<strong>la</strong>ire à <strong>la</strong> culture savanteLe conte est, comme <strong>le</strong>s autres genres moralistes,issu de <strong>la</strong> préciosité littéraire et présente<strong>le</strong>s caractéristiques suivantes :• brièveté de forme ;• fausse naïveté ;• art du sous-entendu ;• passage de <strong>la</strong> culture popu<strong>la</strong>ire à <strong>la</strong> littératuresavante.Le conte propose une mora<strong>le</strong> dont il fautsouvent se méfier, car <strong>le</strong> récit qui l’illustre endéborde toujours l’enseignement explicite, pluséquivoque, traversé par des archétypes quisuggèrent <strong>le</strong>s structures plus profondes du désiret de <strong>la</strong> peur.


27La doub<strong>le</strong> <strong>le</strong>cture du conten° 68décembre 2008Supposés racontés par un adulte à un publicjeune, <strong>le</strong>s contes sont <strong>le</strong> résultat d’une é<strong>la</strong>borationsubti<strong>le</strong> et d’un travail d’écriture visantà <strong>la</strong> concision et aux effets : jeux de mots,allusions, connotations, clins d’œil à l’adressedes <strong>le</strong>cteurs adultes, métaphores et allégories,variantes (doub<strong>le</strong> moralité de La Barbe b<strong>le</strong>ue).On peut ainsi dire que <strong>le</strong>s contes se situent àdeux niveaux de <strong>le</strong>cture :<strong>le</strong> p<strong>la</strong>n narratif : généra<strong>le</strong>ment destiné auxenfants, mêlé de merveil<strong>le</strong>ux et de cruel (<strong>la</strong>fiction joue alors un rô<strong>le</strong> protecteur) ;<strong>le</strong> p<strong>la</strong>n moral : plutôt destiné aux adultes,explicité pour <strong>le</strong>s enfants par <strong>la</strong> moralité, el<strong>le</strong>mêmesouvent à décrypter.La <strong>le</strong>cture moderne des contes faite par BrunoBettelheim, Marc Soriano ou Marthe Robert,révè<strong>le</strong> un troisième p<strong>la</strong>n :<strong>le</strong> p<strong>la</strong>n psychologique : à travers <strong>le</strong>urs liensavec <strong>le</strong> subconscient, ils relèvent aussi de <strong>la</strong>mythologie et de l’inconscient col<strong>le</strong>ctif.Pour toutes ces raisons, ils offrent au <strong>le</strong>cteur duXXI e sièc<strong>le</strong> un champ d’investigation historiqueet social et des significations qui dépassent<strong>la</strong>rgement <strong>la</strong> simp<strong>le</strong> histoire racontée auxenfants.Les fonctions du conte d’après Bruno Bettelheim et Marthe RobertFonction historique et mythologique lié aupaganisme : interprétation naturaliste de phénomènescomme <strong>la</strong> puissance des astres, <strong>le</strong>stempêtes, <strong>le</strong>s orages, <strong>la</strong> succession des saisons,ainsi que <strong>la</strong> perception du naturel et du surnaturel,<strong>la</strong> présence des animaux et <strong>le</strong>ur implicationdans <strong>le</strong> monde des humains.Fonction de transmission des thèmes fondamentauxde <strong>la</strong> civilisation, indépendammentdes changements sociaux et religieux.Fonction initiatique : <strong>le</strong>s étapes du développementdu jeune enfant correspondent aux étapesdu récit. El<strong>le</strong>s sont aussi adaptées en fonctionde l’âge du <strong>le</strong>cteur.Fonction de catalyseur permettant <strong>la</strong> connaissancede soi, <strong>le</strong> développement personne<strong>le</strong>t intel<strong>le</strong>ctuel, l’évolution saine et <strong>la</strong> volontéd’engagement.Fonction de divertissement et d’attrait littérairepour une œuvre d’art.


28ANNEXE 5 : À PROPOS DU CONTE, DOCUMENTSDocument 1 : <strong>le</strong> conte de fées, forme d’art uniquen° 68décembre 2008Le conte de fées, tout en divertissant l’enfant, l’éc<strong>la</strong>ire sur lui-même et favorise <strong>le</strong> développementde sa personnalité. Il a tant de significations à des niveaux différents et enrichit tel<strong>le</strong>ment <strong>la</strong> vie del’enfant qu’aucun autre livre ne peut l’éga<strong>le</strong>r.J’ai essayé de montrer dans cette étude comment <strong>le</strong>s contes de fées représentent sous une formeimaginative ce que doit être l’évolution saine de l’homme et comment ils réussissent à rendre cetteévolution séduisante, pour que l’enfant n’hésite pas à s’y engager. Ce processus de croissance commencepar <strong>la</strong> résistance aux parents et <strong>la</strong> peur de grandir, et finit quand <strong>le</strong> jeune s’est vraimenttrouvé, quand il a atteint l’indépendance psychologique et <strong>la</strong> maturité mora<strong>le</strong> et quand, ne voyantplus dans l’autre sexe quelque chose de menaçant ou de démoniaque, il est capab<strong>le</strong> d’établir avec luides re<strong>la</strong>tions positives. En bref, ce livre explique pour quel<strong>le</strong>s raisons <strong>le</strong>s contes de fées contribuentd’une façon importante et positive à <strong>la</strong> croissance intérieure de l’enfant.Le p<strong>la</strong>isir et l’enchantement que nous éprouvons quand nous nous <strong>la</strong>issons al<strong>le</strong>r à réagir à un conte defées viennent non pas de <strong>la</strong> portée psychologique du conte (qui y est pourtant pour quelque chose)mais de ses qualités littéraires. Les contes sont en eux-mêmes des œuvres d’art. S’ils n’en étaient pas,ils n’auraient pas un tel impact psychologique sur l’enfant.Ils sont uniques, non seu<strong>le</strong>ment en tant que forme de littérature, mais comme œuvres d’art qui sont plusque toutes <strong>le</strong>s autres tota<strong>le</strong>ment comprises par l’enfant. Comme toute production artistique, <strong>le</strong> sens <strong>le</strong>plus profond du conte est différent pour chaque individu, et différent pour <strong>la</strong> même personne à certainesépoques de sa vie. L’enfant saisira des significations variées du même conte selon ses intérêts et sesbesoins du moment. Lorsqu’il en aura l’occasion, il reviendra au même conte quand il sera prêt à ené<strong>la</strong>rgir <strong>le</strong>s significations déjà perçues ou à <strong>le</strong>s remp<strong>la</strong>cer par d’autres En tant qu’œuvres d’art, <strong>le</strong>s contesde fées présentent de nombreux aspects qui vaudraient d’être explorés en dehors de <strong>le</strong>ur signification etde <strong>le</strong>ur portée psychologiques qui font l’objet de ce livre. Notre héritage culturel, par exemp<strong>le</strong>, trouveson expression dans <strong>le</strong>s contes de fées et il est transmis à l’esprit de l’enfant par son intermédiaire 1 . Unautre livre pourrait étudier en détail <strong>la</strong> contribution unique que <strong>le</strong>s contes de fées peuvent apporter etapportent effectivement à l’éducation mora<strong>le</strong> de l’enfant, sujet qui n’est qu’eff<strong>le</strong>uré dans <strong>le</strong>s pages quivont suivre.Les folkloristes abordent <strong>le</strong>s contes de fées sous l’ang<strong>le</strong> de <strong>le</strong>ur discipline ; <strong>le</strong>s linguistes et <strong>le</strong>s critiqueslittéraires examinent <strong>le</strong>ur signification pour d’autres raisons. Il est intéressant de noter, parexemp<strong>le</strong>, que certains voient dans <strong>le</strong> thème du Petit Chaperon Rouge avalé par <strong>le</strong> loup <strong>le</strong> thème de <strong>la</strong>nuit absorbant <strong>le</strong> jour, de <strong>la</strong> lune éclipsant <strong>le</strong> so<strong>le</strong>il, de l’hiver remp<strong>la</strong>çant <strong>le</strong>s saisons chaudes, du dieuava<strong>la</strong>nt <strong>la</strong> victime propitiatoire, etc. Aussi intéressantes que puissent être ces interprétations, el<strong>le</strong>sn’apportent pas grand-chose aux parents et aux éducateurs qui veu<strong>le</strong>nt connaitre <strong>le</strong> sens qu’un contede fées peut avoir pour l’enfant dont l’expérience, après tout, est bien éloignée d’une explication dumonde fondée sur des concepts où interviennent <strong>la</strong> nature et <strong>le</strong>s déités.Les contes de fées abondent éga<strong>le</strong>ment en thèmes religieux ; de nombreuses histoires bibliques sontde <strong>la</strong> même nature qu’eux. Les associations conscientes et inconscientes qu’évoquent <strong>le</strong>s contes defées dans l’esprit de l’auditeur dépendent de son cadre général de référence et de ses préoccupationspersonnel<strong>le</strong>s Les personnes religieuses trouveront donc en eux des éléments d’importance dont il nesera pas question ici.(1) Un exemp<strong>le</strong> illustrera très bien cet aspect des contes de fées. Dans l’histoire des frères Grimm Les Sept Corbeaux, sept frères vont puiserde l’eau dans une cruche pour <strong>le</strong> baptême de <strong>le</strong>ur petite sœur. Ils perdent <strong>la</strong> cruche, et sont transformés en corbeaux. La cérémonie du baptêmeannonce <strong>le</strong> début d’une existence chrétienne. On peut considérer que <strong>le</strong>s sept frères représentent ce qui a dû disparaitre pour <strong>la</strong>isser<strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce à <strong>la</strong> chrétienté. S’il en est ainsi, ils symbolisent <strong>le</strong> monde païen pré chrétien où <strong>le</strong>s sept p<strong>la</strong>nètes représentaient <strong>le</strong>s dieux du ciel.La petite fil<strong>le</strong> qui vient de naitre est alors <strong>la</strong> nouvel<strong>le</strong> religion qui ne peut se propager, que si <strong>le</strong>s anciennes croyances ne gênent pas sondéveloppement. La chrétienté (<strong>la</strong> sœur) ayant vu <strong>le</strong> jour, <strong>le</strong>s frères, qui représentent <strong>le</strong> paganisme, sont relégués dans l’ombre. Mais, en tantque corbeaux, ils vivent au sein d’une montagne à l’autre bout du monde, ce qui <strong>la</strong>isse supposer qu’ils continuent de vivre dans un mondesouterrain, subconscient. Ils ne recouvrent <strong>le</strong>ur apparence humaine que lorsque <strong>le</strong>ur petite sœur sacrifie l’un de ses doigts, ce qui est conformeà l’idée chrétienne que seuls ont accès au ciel ceux qui sont prêts, s’il <strong>le</strong> faut, à sacrifier <strong>la</strong> partie de <strong>le</strong>ur corps qui <strong>le</strong>s empêche d’atteindre<strong>la</strong> perfection. La nouvel<strong>le</strong> religion, <strong>le</strong> christianisme, peut libérer même ceux qui se sont attardés dans <strong>le</strong> paganisme.Bruno BETTELHEIM, Psychanalyse des contes de fées, 1976


29n° 68décembre 2008Document 2Ainsi <strong>le</strong>s frères Grimm et <strong>le</strong>s savants de <strong>le</strong>uréco<strong>le</strong> croient pouvoir expliquer <strong>le</strong>s contes par<strong>le</strong>s mythes dont ils dérivent, en ramenant <strong>le</strong>suns et <strong>le</strong>s autres à une seu<strong>le</strong> théorie : poureux, contes et mythes sont <strong>la</strong> représentationdu grand drame cosmique ou météorologiqueque l’homme, dès l’enfance de son histoire, nese <strong>la</strong>sse pas d’imaginer. Rien de plus simp<strong>le</strong>,dès lors, que d’interpréter sinon <strong>le</strong> détail, dumoins <strong>le</strong> dessin général de chaque conte : si<strong>le</strong>s personnages mythiques sont <strong>le</strong>s personnificationsdes phénomènes naturels, astres,lumière, vent, tempête, orages, saisons, il fautcomprendre <strong>la</strong> Bel<strong>le</strong> au Bois Dormant comme <strong>le</strong>printemps ou l’été engourdi par l’hiver, et <strong>la</strong>léthargie où el<strong>le</strong> est plongée pour s’être piqué<strong>le</strong> doigt avec <strong>la</strong> pointe d’un fuseau, comme <strong>le</strong>souvenir de l’anéantissement dont <strong>le</strong>s dieuxaryens sont menacés au seul contact d’unobjet aigu. Il s’ensuit que <strong>le</strong> jeune prince qui<strong>la</strong> réveil<strong>le</strong> représente certainement <strong>le</strong> so<strong>le</strong>ilprintanier. (Notons que <strong>la</strong> version de Perraultsemb<strong>le</strong> soutenir cette façon de voir : <strong>la</strong> Bel<strong>le</strong> et<strong>le</strong> Prince y ont en effet deux enfants, <strong>le</strong> petitJour et <strong>la</strong> petite Aurore, tandis que <strong>la</strong> versional<strong>le</strong>mande s’arrête au mariage, comme il estpresque de règ<strong>le</strong> pour <strong>le</strong>s contes de ce type).En appliquant <strong>le</strong> même procédé, on trouve queCendrillon est une aurore éclipsée par des nuages– <strong>le</strong>s cendres du foyer – enfin dissipés par <strong>le</strong>so<strong>le</strong>il <strong>le</strong>vant – <strong>le</strong> jeune prince qui l’épouse. Etdans toute jeune fil<strong>le</strong> qui, en butte aux désirsincestueux de son père, se couvre d’une peau debête pour lui échapper (dans notre recueil, c’estPeau-de-Mil<strong>le</strong>-Bêtes, variante du Peau-d’Âne dePerrault), il faut reconnaitre l’Aurore poursuiviepar <strong>le</strong> so<strong>le</strong>il ardent dont el<strong>le</strong> redoute <strong>la</strong> brûlure.Dans cette interprétation, dite « naturaliste »,tous <strong>le</strong>s récits ont à peu près <strong>le</strong> même sens, et<strong>le</strong> conte lui-même relève de <strong>la</strong> pure métaphore,c’est une image poétique, l’expression voiléed’un sentiment du monde et de <strong>la</strong> nature, telsque <strong>le</strong>s concevaient en <strong>le</strong>ur enfance <strong>le</strong>s peup<strong>le</strong>sde nos pays. Sans entrer dans <strong>la</strong> discussiond’une théorie qui fut diversement complétée,étendue, réfutée et n’a plus guère aujourd’huiqu’une va<strong>le</strong>ur historique, notons cependantqu’el<strong>le</strong> fut surtout ruinée par <strong>la</strong> connaissancedes folklores non européens, qui devait mettreen évidence <strong>la</strong> parenté étroite de tous <strong>le</strong>scontes, quel que soit <strong>le</strong>ur lieu d’origine. À <strong>la</strong>fois trop étroite et trop <strong>la</strong>rge, <strong>la</strong> théorie desfrères Grimm apparait maintenant comme unehypothèse, mais on lui doit un rapprochementfécond entre deux ordres de phénomènes jadisfort éloignés dans <strong>la</strong> pensée des érudits. Encherchant à établir <strong>le</strong>s rapports du conte etdu mythe, el<strong>le</strong> a mis pour <strong>la</strong> première foisen lumière l’expérience humaine tout à faitgénéra<strong>le</strong> que <strong>le</strong> conte, comme <strong>le</strong> mythe et <strong>la</strong>légende, est chargé en même temps de voi<strong>le</strong>ret de transmettre. Et c’est ce<strong>la</strong> qui importe bienplus que <strong>la</strong> traduction en c<strong>la</strong>ir des allégories dumonde féerique, car cette expérience qui est aufond de tout récit merveil<strong>le</strong>ux, a pu changer deformes, mais n’a cessé de s’affirmer en dépit desplus grands changements sociaux et religieux.Ainsi, <strong>le</strong>s contes de fées qui se sont propagésdans des pays depuis longtemps chrétiens nousrestituent avec une fidélité surprenante quantitéde rites, de pratiques et d’usages qui révè<strong>le</strong>ntun attachement tenace au paganisme. Etce ne sont point là de simp<strong>le</strong>s souvenirs, car <strong>le</strong>conte, on l’a remarqué depuis longtemps, enseignequelque chose, il est à sa manière modesteun petit ouvrage didactique. Qu’exprime-t-il eneffet sous ses cou<strong>le</strong>urs fantastiques ?Pour l’essentiel, il décrit un passage – passagenécessaire, diffici<strong>le</strong>, gêné par mil<strong>le</strong> obstac<strong>le</strong>s,précédé d’épreuves apparemment insurmontab<strong>le</strong>s,mais qui s’accomplit heureusement à <strong>la</strong>fin en dépit de tout. Sous <strong>le</strong>s affabu<strong>la</strong>tions <strong>le</strong>splus invraisemb<strong>la</strong>b<strong>le</strong>s perce toujours un faitbien réel : <strong>la</strong> nécessité pour l’individu de passerd’un état à un autre, d’un âge à un autre, et dese former à travers des métamorphoses douloureuses,qui ne prennent fin qu’avec son accessionà une <strong>vraie</strong> maturité. Dans <strong>la</strong> conceptionarchaïque dont <strong>le</strong> conte a gardé <strong>le</strong> souvenir,ce passage de l’enfance à l’ado<strong>le</strong>scence, puisà l’état d’homme, est une épreuve péril<strong>le</strong>usequi ne peut être surmontée sans une initiationpréa<strong>la</strong>b<strong>le</strong>. C’est pourquoi l’enfant ou <strong>le</strong> jeunehomme du conte, égaré un beau jour dans uneforêt impénétrab<strong>le</strong> dont il ne trouve pas l’issue,rencontre au bon moment <strong>la</strong> personne sage,âgée <strong>le</strong> plus souvent, dont <strong>le</strong>s conseils l’aidentà sortir de l’égarement.Les Contes de Grimm, Édition Folio,Préface de Marthe Robert, 1976


30n° 68décembre 2008Document 3On voit que <strong>le</strong>s qualités <strong>le</strong>s plus apparentesdu conte, sa naïveté, son charme enfantin,sont loin de justifier son étonnante survie. Enréalité, il est profondément ambigu, et s’il p<strong>la</strong>îtpar <strong>la</strong> simplicité de son dessin, il fascine partout ce que l’on y sent de vrai, quand mêmeon ne tenterait pas de traduire sa vérité. Toutmasqué qu’il est par <strong>le</strong>s symbo<strong>le</strong>s et <strong>le</strong>s images,il par<strong>le</strong> cependant un <strong>la</strong>ngage plus direct que <strong>le</strong>mythe ou <strong>la</strong> fab<strong>le</strong>, par exemp<strong>le</strong>, et <strong>le</strong>s enfants<strong>le</strong> savent d’instinct, qui y « croient « dans <strong>la</strong>mesure même où ils y trouvent ce qui <strong>le</strong>s intéresse<strong>le</strong> plus au monde : une image identifiab<strong>le</strong>d’eux-mêmes, de <strong>le</strong>ur famil<strong>le</strong>, de <strong>le</strong>urs parents.C’est là sans doute l’un des secrets du conte, etl’explication de sa durée : il par<strong>le</strong> uniquementde <strong>la</strong> famil<strong>le</strong> humaine, il se meut exclusivementdans cet univers restreint qui, pour l’homme, seconfond longtemps avec <strong>le</strong> monde lui-même,quand il ne <strong>le</strong> remp<strong>la</strong>ce pas tout à fait.Le « royaume » du conte, en effet, n’est pasautre chose que l’univers familial bien clos etbien délimité où se joue <strong>le</strong> drame premier del’homme. Le roi de ce royaume, il n’en faut pasdouter, c’est un époux et un père, rien d’autre,du moins est-ce comme tel qu’il nous estprésenté. Sa richesse fabu<strong>le</strong>use, sa puissance,l’étendue de ses possessions, il faut croirequ’el<strong>le</strong>s ne sont là que pour donner du relief àl’autorité paternel<strong>le</strong>, car pour <strong>le</strong> reste, autantdire que nous ne savons rien de lui, La plupartdu temps, <strong>le</strong> conte se borne à l’introduire par <strong>la</strong>formu<strong>le</strong> traditionnel<strong>le</strong> : « Il était une fois un roi... »puis, ajoutant aussitôt, « ...qui avait un fils... » ;il l’oublie sur-<strong>le</strong>-champ et s’attache aux aventuresdu fils, jusqu’à <strong>la</strong> fin où il ne se souvient delui que pour <strong>la</strong> réconciliation dernière. Il n’enva d’ail<strong>le</strong>urs pas autrement quand <strong>le</strong> roi est remp<strong>la</strong>cépar un homme quelconque, ce qui, on <strong>le</strong>verra dans maint conte de ce recueil, n’entraîneaucun changement sensib<strong>le</strong> de l’histoire. Dequelque va<strong>le</strong>ur symbolique qu’on puisse <strong>le</strong> charger,<strong>le</strong> roi, au moins dans ce que nous voyonsde lui, est simp<strong>le</strong>ment un homme défini par sesliens charnels et affectifs avec <strong>le</strong>s membres desa famil<strong>le</strong>. Il n’est jamais célibataire, et quandil est veuf, ce qui lui arrive souvent, il n’a pasd’affaire plus pressée que de se remarier (<strong>la</strong>raison d’État n’est ici encore alléguée que pouraugmenter sa puissance, car l’homme ordinairen’agit pas autrement : « Quand vint l’hiver, ditmé<strong>la</strong>ncoliquement <strong>le</strong> conteur de Cendrillon, <strong>la</strong>neige mit un tapis b<strong>la</strong>nc sur <strong>la</strong> tombe et quand<strong>le</strong> so<strong>le</strong>il du printemps l’eut retiré, l’homme pritune autre femme... »). Le roi ne peut restersans femme, encore bien moins sans enfants, ets’il lui arrive de se trouver dans cette situationfâcheuse, <strong>le</strong> conte s’empresse de l’en sortir. Lareine, de son côté, n’a pas d’autre fonction nid’autre raison d’être que cel<strong>le</strong> d’épouse et demère. Quant au prince et à <strong>la</strong> princesse, ils sontpar excel<strong>le</strong>nce fils ou fil<strong>le</strong> jusqu’au moment dumoins où ils fondent à <strong>le</strong>ur tour une famil<strong>le</strong> etmarquent ainsi <strong>la</strong> fin d’un règne : celui de <strong>la</strong>vieil<strong>le</strong> génération.Les Contes de Grimm, Édition Folio,Préface de Marthe Robert, 1976


31ANNEXE 6 : LEXIQUE THÉÂTRALn° 68décembre 2008Une pièce de théâtre comprend des :actes : cinq actes dans <strong>le</strong> théâtre c<strong>la</strong>ssique ;scènes : à l’intérieur de chaque acte, des scènes découpent <strong>le</strong> texte ;tab<strong>le</strong>aux : en absence d’acte et de scène, il peut y avoir des tab<strong>le</strong>aux.La doub<strong>le</strong> énonciation : <strong>la</strong> situation de communication d’un texte théâtral, comme tout texteécrit, met en re<strong>la</strong>tion un auteur avec ses <strong>le</strong>cteurs ou spectateurs. Mais <strong>la</strong> situation d’énonciationest particulière, car l’auteur fait par<strong>le</strong>r des personnages entre eux et s’adresse en même temps, àtravers ces personnages, aux spectateurs.Les didascalies : <strong>le</strong>s indications scéniques fournies par l’auteur dans <strong>le</strong> texte écrit par <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>sil s’adresse au <strong>le</strong>cteur, au metteur en scène et aux comédiens pour suggérer des jeux de scène,décrire <strong>le</strong>s lieux, <strong>le</strong>s costumes, etc.Le prologue : chez <strong>le</strong>s Grecs, il est débité par un seul personnage, humain ou divin, qui annonce <strong>le</strong>sujet, parfois <strong>le</strong> dénouement, et résout <strong>le</strong>s difficultés premières comme si l’auteur craignait d’êtremal compris de <strong>la</strong> fou<strong>le</strong>.La scène d’exposition : c’est <strong>la</strong> première scène d’une pièce de théâtre c<strong>la</strong>ssique qui a pour objetd’informer <strong>le</strong> spectateur de tout ce qu’il a besoin de connaitre pour comprendre l’action et en suivre<strong>le</strong> dérou<strong>le</strong>ment. Dans <strong>le</strong> théâtre du xx e sièc<strong>le</strong>, l’exposition peut ne plus exister ou bien exister sousforme d’allusion.Les répliques : brefs échanges de paro<strong>le</strong>s entre <strong>le</strong>s personnages.Les tirades : longues répliques adressées à un ou plusieurs personnes présentes sur <strong>la</strong> scène. Lespersonnages par<strong>le</strong>nt entre eux tout en s’adressant au public.Le monologue : discours théâtral prononcé par un personnage seul sur scène. Le personnages’adresse à lui-même, mais aussi aux spectateurs.Les stances : poème lyrique comportant un nombre variab<strong>le</strong> de strophes du même type. C’est uneforme de monologue mis en vers.L’aparté : <strong>le</strong> personnage s’adresse soit au public, soit à un autre personnage comme en cachette.L’intrigue : <strong>la</strong> trame d’une œuvre théâtra<strong>le</strong> c<strong>la</strong>ssique, son fil rouge qui assure <strong>la</strong> cohésion de <strong>la</strong>pièce.

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