M. Joseph Defos
avec <strong>la</strong> plus gran<strong>de</strong> célérité et par tous les moyens. Cesmoyens, vous les connaissez: les tours <strong>de</strong> guet, le téléphone,les Voitures-radio, les avions-radio.Si ce n'est avec déception, c'est cependant avec quelquemé<strong>la</strong>ncolie que je prononce ces <strong>de</strong>rniers mots, car ce<strong>la</strong> prouveque nous n'avons pas beaucoup avancé <strong>de</strong>puis vingt-cinq outrente ans.Certes, on a beaucoup progressé <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux ou trois ans;mais que <strong>de</strong> retard!Permettez à l'homme qui est à cette tribune <strong>de</strong> rappelerqu'il y était déjà il y a vingt-six ans. Et, avec une autrevigueur et peut-être un autre al<strong>la</strong>nt, au milieu d'un discoursqu'il s'était efforcé <strong>de</strong> faire aussi complet que possible, abordantl'une <strong>de</strong>s parties <strong>de</strong> son exposé seulement, il prononçaitces paroles:« Enfin, le <strong>de</strong>rnier article du programme <strong>de</strong> lutte contre lefeu est <strong>la</strong> préparation rationnelle <strong>de</strong> cette lutte même, pourle moment où elle s'impose. Cette préparation portera notammentsur <strong>de</strong>ux points spéciaux: <strong>la</strong> recherche et le développement,quand et où ce sera possible, d'un personnel spécialisé,mais surtout d'un outil<strong>la</strong>ge <strong>de</strong> qualité... »Et le compte rendu du Journal officiel porte: « Très «bien!"très bien ! - »« ...D'autre part, <strong>la</strong> signalisation par tous les moyens, observatoires,appels sonores, signaux optiques, télégraphe, téléphoneet, pourquoi ne pas le dire, l'avion I« Je sais bien, ajoutais-je, qu'en cette matière toute nouvelleil faut être pru<strong>de</strong>nt. Déjà, le préfet <strong>de</strong> <strong>la</strong> Giron<strong>de</strong>, si je suisbien renseigné, a dû prendre <strong>de</strong>s précautions pour que <strong>de</strong>sincinérations c<strong>la</strong>ns les Lan<strong>de</strong>s ne soient pas confondues avec<strong>de</strong>s commencements d'incendie.« Mais l'avion ne servira pas seulement, disais-je, à signaleret situer un incendie. Il peut servir — et ici je crois pouvoirm'aventurer un peu — à éteindre l'incendie, à l'étouffer. »Et l'un <strong>de</strong> mes collègues, m'interrompant à ce moment, seréférait à <strong>de</strong>s expériences que venait <strong>de</strong> faire, à ce sujet,M. Moureux, <strong>de</strong> l'Institut. Je n'avais alors qu'à remercier cecollègue <strong>de</strong> l'appui qu'il apportait à <strong>la</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong> que je »formu<strong>la</strong>isdès cette époque.Or qu'en est-il advenu ? Vous avez tous sans doute reçucomme moi une revue intitulée Le Feu, et «qui écrit sur cettejnême question <strong>de</strong> <strong>la</strong> signalisation rapi<strong>de</strong> <strong>de</strong> l'incendie:« L'aviation, très employée aux Etats-Unis pour les besoinsSe l'agriculture, ne semble pas avoir'donné <strong>de</strong> résultats, malgré<strong>la</strong> bombe à eau <strong>de</strong> 2.0Q0 litres, à cause <strong>de</strong> <strong>la</strong> vitesse <strong>de</strong>s avionsjqui rend le tir imprécis. L'hélicoptère capable <strong>de</strong> réduire[extrêmement sa vitesse, voire <strong>de</strong> p<strong>la</strong>fonner à point fixe, pourraitbien apporter <strong>la</strong> solution du (problème.« Quant aux produits extincteurs, ils se réduisent à peu prèsUniformément à l'eau, soit pure, soit additionnée d'un produitChimique qui <strong>la</strong> rend adhérente et quatre ou cinq fois plus(efficace. »Pourquoi en sommes-nous donc toujours au même point, et$ insister sur les mêmes nécessités que- je signa<strong>la</strong>is à cettemême tribune,-il y a vingt-six ans ? Pourquoi n'a-t-on pas faitdavantage ?J'en ai trouvé une explication et je vous <strong>la</strong> livre, messieurs,comme je l'ai lue. Elle est d'un homme q,ue je ne connais pas,mais dont <strong>la</strong> signature est une'référence, M. Roger Labat, propriétairesylviculteur, pilote <strong>de</strong> l'Aéro-Club <strong>de</strong>s Lan<strong>de</strong>s et <strong>de</strong>Biscarosse, qui a écrit dans un grand journal ces quelqueslignes que je cite, parmi d'autres:« En 1929, un préfet, M. Pierre Cassagneau, prit un arrêtéet donna à rAéro-Club <strong>de</strong>s Lan<strong>de</strong>s <strong>la</strong> tâche <strong>de</strong> surveiller <strong>la</strong>îorêt. Une subvention fut accordée; elle s^élevait, à l'époque,% 20.000 francs, mais, pour <strong>de</strong>s raisons politiques, le conseilgénéral <strong>de</strong>s Lan<strong>de</strong>s <strong>la</strong> supprima. Elle fut rejetée par 9 voixcontre 7 en 1930.« Aujourd'hui, on re ( parle <strong>de</strong> surveil<strong>la</strong>nce et <strong>de</strong> défense <strong>de</strong><strong>la</strong> forêt. Nous sommes heureux <strong>de</strong> constater, non sans amertume,que <strong>la</strong> validité <strong>de</strong> l'action à <strong>la</strong>quelle nous participionsil y a vingt ans est aujourd'hui reconnue, ou va l'être. »Ainsi donc, mes chers collègues, les moyens sont inventés"<strong>de</strong>puis longtemps pour lutter contre l'incendie, et on nepeut, à ce sujet, que se répéter. Mais- il faut agir. Il faut.exécuter, en tirant leçon <strong>de</strong> <strong>la</strong> trop cruelle expérience.Il faudra tenir compte <strong>de</strong> cette expérience, d'abord en'enseignant partout les résultats: dans les écoles, dans les communes,dans <strong>la</strong> presse; en second lieu — et je m'adresse iciplus spécialement à M. le ministre <strong>de</strong> l'agriculture — en créantun service <strong>de</strong> renseignements météorologiques journaliers, servicequi fera connaître quotidiennement, à toutes les communes,par <strong>la</strong> radio, l'état hygrométrique..Ainsi, en telle pério<strong>de</strong>, scientifiquement définie, il y auraitétat d'alerte et tout pourrait être mis à pied-d'œuvre, car onsaurait partout, lorsqu'un incendie éc<strong>la</strong>te, qu'il peut prendre<strong>de</strong>s proportions encore jamais vues. On ne saurait trop <strong>de</strong>vancerles événements.Il faudra tenir compte <strong>de</strong> cette vérité jusque dans <strong>la</strong> tactique<strong>de</strong> <strong>la</strong> lutte contre le feu. Sans m'aventurer à ce sujet, jesouligne l'importance <strong>de</strong> <strong>la</strong> question. Il faudra reviser <strong>la</strong> question<strong>de</strong> l'emploi <strong>de</strong> l'eau dans certains cas. Il faudra surtoutaménager le contre-feu, <strong>de</strong> façon qu'en cas <strong>de</strong> fuite renduenécessaire, les sauveteurs ne soient pas adossés à <strong>de</strong>s terrainsdifficiles et couverts d'une végétation elle-même inf<strong>la</strong>mmable.La science pourra trouver <strong>de</strong>s moyens <strong>de</strong> lutte contre leseffets <strong>de</strong> toutes circonstances nouvelles. Elle le <strong>de</strong>vra même. Enattendant, dans le minimum <strong>de</strong> temps, il nous faut employer lemaximum <strong>de</strong> moyens en vue du résultat souhaité.Or,'vous l'avez dit, monsieur le ministre <strong>de</strong> l'agriculture,pour tous ces grands travaux, <strong>de</strong>s crédits sont prévus, je n'yreviens pas. Vous même voudrez, sans doute> <strong>de</strong> nouveau^dansvotre intervention, nous en donner l'assurance. Il y a <strong>de</strong>scrédits, <strong>de</strong>s centaines <strong>de</strong> millions, pour ne pas dire un ou <strong>de</strong>uxmilliards. On peut beaucoup avec <strong>de</strong>s sommes <strong>de</strong> ce genre,pourvu que leur emploi soit effectué à bon escient et qu'il soitsévèrement contrôlé.En faisant tout pour sauvegar<strong>de</strong>r l'avenir, vous allez, bien"entendu, messieurs du Gouvernement, régler d'urgence le pré-L'auteur <strong>de</strong> cette lettre m'a même chargé..., mais je préféréreprendre l'expression même qu'il emploie à <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> salettre :« Comme le débat reprend mardi et que vous aurez malettre, j'espère que vous en toucherez un petit mot auministre. » (Sourires.)Eh bien, monsieur le ministre, c'est fait: je vous en ai« touché un petit mot », selon l'expression <strong>de</strong> mon correspondant.Je l'ai fait du haut <strong>de</strong> <strong>la</strong> tribune et je pense quevous agirez au mieux. *Il va falloir encore rebâtir et, récemment, j'entendais avecbeaucoup <strong>de</strong> raison qu'on <strong>de</strong>mandait, d'un certain côté <strong>de</strong>l'Assemblée, que ce<strong>la</strong> fût fait en « dur ». Il ne faut pas secontenter <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> F extra provisoire.Il va falloir enfin assurer <strong>la</strong> reconstitution du cheptel, aubesoin en organisant <strong>de</strong>s prêts. Il va falloir, et ceci est urgentaussi, un programme pour <strong>de</strong>main et après-<strong>de</strong>main, rétablir<strong>la</strong> polyculture dans notre pays. 11 va falloir aussi défendrenos industries locales, telles, par exemple, que nos fabriques<strong>de</strong> pâtes à papier.Tout ce<strong>la</strong>, vous le savez comme moi, mes chers collègues,et c'est pourquoi je me gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> rien développer <strong>de</strong> cettelongue énumération.