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JOURNAL OFFICIEL - Débats parlementaires de la 4e République

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On a parlé <strong>de</strong> <strong>la</strong> malveil<strong>la</strong>nce, <strong>de</strong>s négligences, <strong>de</strong>s impru<strong>de</strong>nces,<strong>de</strong>s imprévoyances, <strong>de</strong>s hésitations, <strong>de</strong>s intérêts malcompris, et dans ce domaine chacun a eu sa (petite part: leGouvernement d'abord, les <strong>parlementaires</strong> ensuite, les fonctionnaires,les touristes, les associations <strong>de</strong> défense, voire mêmele p<strong>la</strong>n Marshall, les capitalistes américains et, il faut le direaussi, <strong>la</strong> cinquième colonne organisée par les accusateurs:Je passerai -ensuite aux causes qui dépen<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>séléments.On a parlé <strong>de</strong> <strong>la</strong> sécheresse, du <strong>de</strong>gré hygrométrique, <strong>de</strong>svents violents, <strong>de</strong> <strong>la</strong> déf<strong>la</strong>gration <strong>de</strong>s gaz, <strong>de</strong>s cyclones, <strong>de</strong>storna<strong>de</strong>s, tous sujets qui ont été développés <strong>de</strong>vant nous et —je ne parle pas pour M. le ministre — avec une autorité etune volubilité où l'imagination et parfois <strong>la</strong> fontaine le disputaientà <strong>la</strong> science. Passons.On a parlé <strong>de</strong> déf<strong>la</strong>gration <strong>de</strong> mé<strong>la</strong>nge détonant. J'indiquecependant que, quelle que soit <strong>la</strong> nature du mé<strong>la</strong>nge détonant,quels que soient les éléments qui le composent, il est biencertain, et je l'ai souvent remarqué comme vous-mêmes, qu'unevoiture automobile ne part pas lorsque l'allumage est mauvaisou n'existe pas, <strong>de</strong> piême qu'une cartouche ne défiagre paslorsque le détonateur ne fonctionne pas.Je voudrais donc savoir si, même dans les conditions énuméréespar les orateurs dans leurs propos pseudo-scientifiques,il est possible <strong>de</strong> provoquer, dans <strong>la</strong> forêt, <strong>la</strong> déf<strong>la</strong>gration <strong>de</strong>gaz en enf<strong>la</strong>mmant une allumette. Je voudrais savoir si, avecun bout <strong>de</strong>' cigarette allumée, il est possible <strong>de</strong> provoquer<strong>de</strong>s torna<strong>de</strong>s et <strong>de</strong>s cylones.Je voudrais savoir si, simplement avec une allumette enf<strong>la</strong>mmée,il est possible <strong>de</strong> faire brûler un $in, même s'il fait trèschaud, et même en <strong>la</strong>issant tomber dans un sentier un bout<strong>de</strong> cigarette allumée.Depuis vingt-cinq ans, je passe <strong>de</strong> longs mois dans lesLan<strong>de</strong>s. Je les ai traversées dans tous les sens. J'ai donc faitmoi-même certaines expériences.M. ¡s ministre <strong>de</strong> l'agriculture. Monsieur Au<strong>de</strong>guil, je vousconseille <strong>de</strong> ne pas renouveler trop souvent ces expériences,qui pourraient être dangereuses. {Sourires.)M. Jean-Fernand Au<strong>de</strong>guil. J'ai fait ces expériences moimême,monsieur le ministre. Evi<strong>de</strong>mment, j'ai surveillé lesrésultats et je vous dorme mes conclusions. *Lorsqu'on jette un bout <strong>de</strong> cigarette allumée suf un sol quiest propre, il ne se produit pas d'incendie. Lorsqu'on met uneallumette enf<strong>la</strong>mmée en contact avec le tronc d'un pin, celui-cine s'allume pas, pas plus que le feu ne s'allume dans unecheminée, s'il n'y a .pas été ¡p<strong>la</strong>cé <strong>de</strong> petit bois.M. Marc Dupùy. II. n'y a d'ailleurs que le ministre <strong>de</strong> l'intérieurpour y croire!M. <strong>la</strong> ministre <strong>de</strong> l'intérieur. En m'excusant <strong>de</strong> vous interrompre,monsieur Au<strong>de</strong>guil, je me permets une légère mise aupoint.Vous avez examiné <strong>de</strong>ux cas, celui d'un mé<strong>la</strong>nge gazeux etcelui d'un soli<strong>de</strong>.En ce qui concerne le mé<strong>la</strong>nge gazeux, je le disais ce matin,et je le répète, car c'est Je fait essentiel, selon moi, il n'y apas <strong>de</strong> doute que <strong>la</strong> distil<strong>la</strong>tion d'essence <strong>de</strong> térébenthine constitueavec l'air, dans <strong>de</strong>s conditions <strong>de</strong> température et d'hygrométriedonnées, un mé<strong>la</strong>nge détonant extiêmement dangereux.M. Jean-Fernand Au<strong>de</strong>guil. Je suis <strong>de</strong> cet avis.11. le ministre <strong>de</strong> l'intérieur. Vous avez cité l'expérience <strong>de</strong>l'allumette, que M. le ministre <strong>de</strong> l'agriculture vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>instamment <strong>de</strong> ne pas renouveler. {Sourires.) Je vous enpropose une autre: Si vous jetez une allumette dans un bidond'essence, votre allumette s'éteindra, dans l'essence; mais sivous chauffez un tant soit peu ce bidon d'essence, il prendrafeu.C'est l'expérience c<strong>la</strong>ssique du punch; pour allumer un punch,il faut d'abord chauffer l'assiette.Ce sont là <strong>de</strong>s questions <strong>de</strong> température et ce que l'on peutaffirmer, c'est que dans une situation déterminée le mé<strong>la</strong>ngen'est pas combustible, mais que le même mé<strong>la</strong>nge est dangereusementcombustible dans d'autres conditions <strong>de</strong> température.M. Jean-Fernand Au<strong>de</strong>guil. Monsieur le ministre, j'ai ditqu'une allumette enf<strong>la</strong>mmée dans <strong>la</strong> forêt ne provoque pasl'explosion du mé<strong>la</strong>nge détonant, quelles qu'en soient les qualités.Je pourrais vous donner quelques exemples typiques.Revenant <strong>de</strong> Luchon, après l'incendie, du côté <strong>de</strong> Captieux,dans une forêt suicliaufïée par l'incendie et à quelques centaines<strong>de</strong> mètres du brasier, par une température torri<strong>de</strong>, j'aicroisé un camion qui a <strong>la</strong>issé tomber sur le milieu <strong>de</strong> <strong>la</strong> routeun sac en feu qui donnait <strong>de</strong>s f<strong>la</strong>mmes d'au mo'ns cinquantecentimètres <strong>de</strong> haut.J'ai arrêté ma voiture, je me suis précipité avec une couverturepour éteindre ce sac enf<strong>la</strong>mmé. J'ai constaté que mêmecette f<strong>la</strong>mme, dan-s <strong>de</strong>s conditions particulièrement favorables,n'avait pas provoqué d'explosion.J'en conclus qu'il faut considérer une troisième cause, miseen évi<strong>de</strong>nce par une phrase <strong>de</strong> M* Ver<strong>de</strong>ille, rapporteur <strong>de</strong> <strong>la</strong>commission <strong>de</strong> l'intérieur au Conseil <strong>de</strong> <strong>la</strong> République, qui adit: « L'incendie commence par les broussailles. »Notons cette phrase pour y revenir dans quelqueset passons maintenant aux moyens <strong>de</strong> défense.instants,Après le discours <strong>de</strong> M. Guyon que je viens d'entendre,j'abor<strong>de</strong> très rapi<strong>de</strong>ment, dans l'organisation <strong>de</strong> cette défense,'d'abord ce qui se rapporte aux hommes.Réorganiser. le corps <strong>de</strong>s sapeurs-pompiers, constituer <strong>de</strong>srégiments <strong>de</strong> pionniers forestiers, assurer <strong>la</strong> présence <strong>de</strong>stroupes en pério<strong>de</strong> critique, préparer et appeler le concours<strong>de</strong> l'aviation, acheter du matériel lourd et léger et le répartirjudicieusement entre <strong>de</strong>s organisations quasi militaires hiérarchiséeset les milieux professionnels p<strong>la</strong>cés sous un comman<strong>de</strong>mentunique pour supprimer leur regrettable opposition, lesconflits d'attribution ou <strong>la</strong> rivalité <strong>de</strong>s services, tous ce<strong>la</strong> esttrès bien.Nous sommes aussi certainement d'accord sur <strong>la</strong> nécessité<strong>de</strong> créer un corps d'observateurs et <strong>de</strong> guetteurs uour assurer<strong>la</strong> rapidité <strong>de</strong>s interventions par liaisons téléphoniques, radiophoniques,et par un service permanent d'estafettes dans lescommunes, <strong>de</strong> même que sur <strong>la</strong> nécessité d'aménager <strong>de</strong>spoints d'eau.Puis vient <strong>la</strong> série <strong>de</strong>s interdictions. Interdiction <strong>de</strong> circu<strong>la</strong>tion<strong>de</strong>s gazogènes, interdiction d'effectuer <strong>de</strong>s incinérations,,<strong>de</strong>s carbonisations en meules ou en fours mobiles, défense <strong>de</strong>fumer, d'allumer du feu, défense aux chasseurs d'utiliser <strong>de</strong>sbourres en papier; toutes interdictions qui auront, je le crains,le même <strong>de</strong>stin que celles qui sont re<strong>la</strong>tives par exemple auxpassages cloutés et à <strong>la</strong> défense d'afficher, autant <strong>de</strong> prescriptionsqui ne seront qu'à peu près observées et dont l'efficaciténe sera que très re<strong>la</strong>tive dans notre pays.11 faut prévoir alors, en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> celte organisation et <strong>de</strong>ces interdictions, ce qui <strong>de</strong>vra faire l'objet principal <strong>de</strong> nospréoccupations en ce qui concerne <strong>la</strong> prévention,Il existe <strong>de</strong>s moyens <strong>de</strong> défense et <strong>de</strong>s prescriptions qui serapportent à <strong>la</strong> forêt elle-même. Ce sont les plus importantset les moins nombreux, parce qu'ils se réduisent en vérité àun seul, comme je vais essayer ue le démontrer.Je rappelle tout d'abord l'observation <strong>de</strong> M. Ver<strong>de</strong>ille : L'in-^ cendie commence par les broussailles. Ce qui semblerait indi-" quer, si cette affirmation est vraie, qu'en f absence <strong>de</strong> broussailles,l'incendie ne commencerait pas.Examinons ensuite les diverses suggestions apportées sur cesujet. On nous recomman<strong>de</strong> <strong>la</strong> construction <strong>de</strong> pare-feu, lecloisonnement et le quadril<strong>la</strong>ge <strong>de</strong> <strong>la</strong> forêt.Cette opération consiste à opérer un débroussaillement partielsuivant <strong>de</strong>s directions déterminées. C'est affirmer, en d'autrestermes, qu'une partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> forêt débroussaillée est susceptibled'arrêter l'incendie. Je ne vois pas d'autre conclusion.On nous recomman<strong>de</strong> ensuite <strong>de</strong> dégager <strong>de</strong>s zones <strong>de</strong>débroussaillement <strong>de</strong> chaque côté <strong>de</strong>s routes nationales etdépartementales, <strong>de</strong>s chemins communaux et <strong>de</strong>s pistes. C'estaboutir, sous une autre forme, aux mêmes conclusions,Puis, <strong>de</strong> créer, à l'intérieur <strong>de</strong> <strong>la</strong> forêt elle-même, <strong>de</strong>s alléesdébroussaillées, orientées suivant <strong>la</strong> direction <strong>de</strong>s vents dominants.N'est-ce pas là encore révéler les vertus préventives dudébroussaillement ?On recomman<strong>de</strong> encore <strong>de</strong> prescrire autour <strong>de</strong>s habitations,srinsi qu'autour <strong>de</strong>s vil<strong>la</strong>ges et <strong>de</strong>s villes et sur un rayon *<strong>de</strong>300 mètres, l'aménagement <strong>de</strong> zones neutres — c'est "encorepratiquer un débroussaillement à titre <strong>de</strong> sauvegar<strong>de</strong> — d'encourager<strong>la</strong> polyculture, seigle, blé, maïs, qui s'est révélée particulièrementignifuge; <strong>de</strong> créer <strong>de</strong>s prairies artificielles, c'est-àdire<strong>de</strong> développer une surface <strong>de</strong> zone débroussaillée rendueparfaitement rentable par <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> culture.On nous recomman<strong>de</strong> encore l'élevage du mouton; c'estencourager <strong>la</strong> présence dans <strong>la</strong> forêt <strong>de</strong> débroussailleurs naturelset faire confiance encore au débroussaillement.

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