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eSOUVENIRSDELAVALLÉE DE CHAMONIX,PARSAMUELBIRMANN,PUBLIÉS PAR BIRMANN ET FILS 5 EDITEURS,À BASLE, EN SUISSE.


PRÉFACE DELAUTEUR.A une distance de cinquante lieues et plus, les Alpes offr<strong>en</strong>t auxregards leurs sommités couvertes de neiges et de glaces éternelles, quibord<strong>en</strong>t l'horizon comme le rempart crénelé d'une forteresse gigantesque.Une force inconnue attire l'homme vers ces régions élevées; il traverseles plaines, s'<strong>en</strong>fonce dans les longues vallées, franchit des gorges étroites,et <strong>en</strong>fin, parv<strong>en</strong>u au pied de ces colosses, il s'arrête saisi d'un étonnem<strong>en</strong>tmuet; il contemple avec une sorte de respect religieux ces cimes élancéesdans l'azur des cieux, ces formidables rochers coupés à pic, ces cascadesécumantes qui batt<strong>en</strong>t-le flanc des ravins, ces antiques forêts de sapins etde mélèzes qui tapiss<strong>en</strong>t les escarpem<strong>en</strong>ts des monts, et ces vallons solitaires<strong>en</strong>tourés de tout ce que la nature offre de grand, d'imposant et même deterrible.Dans la longue chaîne de ces montagnes audacieuses, trois ou quatregrouppes se font principalem<strong>en</strong>t remarquer. A.l'est, s'élève au-dessus dessommités nombreuses du Tyrol et des Grisons, la cime de POrteler, d'oùse répand l'Adige et où jaillit la source merveilleuse de l'Adda. Au c<strong>en</strong>trede la Suisse, le Finsteraarhorn élance, au milieu du plus vaste champ deglace que prés<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t les Alpes, le plus beau pic de roche primitive queje connoisse; c'est du pied de cette montagne que l'Aar s'échappe pourarroser les délicieuses contrées de l'Oberland bernois, uniques même <strong>en</strong>


VIVSuisse. Entre le Vallais et l'Italie, l'imm<strong>en</strong>se Mont-Rose et le Matterhorn(Mont=Cerv'm')s dont la forme extraordinaire produit une sorte de stupéfaction,domin<strong>en</strong>t sur une vaste ét<strong>en</strong>due de glaciers, et sur les hautespointes de la vallée de Viège. Enfin, surpassant <strong>en</strong> hauteur toutes lesautres montagnes, et <strong>en</strong>touré de ses fameuses aiguilles, le Mont-Blancapparoît avec son dôme éblouissant, isolé dans les hauteurs du ciel, et,de la position avantageuse qu'il occupe, promène ses regards dominateursjusqu'aux Ap<strong>en</strong>nins, aux terres basses de la Lombardie et du Piémont,aux <strong>en</strong>virons de Lyon, embrasse dans sa vue imm<strong>en</strong>se les rochers duDauphiné, la Bourgogne, les collines de Langres, les Vosges dans touteleur ét<strong>en</strong>due, la Forêt noire, les plaines de la Suabe, et les arêteshérissées des glaciers de la Suisse.C'est au revers sept<strong>en</strong>trional de la chaîne du Mont-Blanc que setrouve la vallée de Chamonix, <strong>en</strong>ceinte paisible <strong>en</strong>tourée de belles horreurs.De nos jours elle est visitée par une foule d'étrangers; mais il n'y a guèreplus d'un demi-siècle qu'elle étoit inconnue au reste de l'Europe. Lesvoyageurs ne faisoi<strong>en</strong>t que contempler de loin avec effroi les MontagnesMaudites qui la déf<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t. Les premiers voyageurs qui osèr<strong>en</strong>t pénétrerjusqu'à ces aiguilles m<strong>en</strong>açantes, <strong>en</strong>tourées d'un effrayant amas de neigeset de glaces, fur<strong>en</strong>t deux anglais, Windham et Pockocke. Ils partir<strong>en</strong>tde G<strong>en</strong>ève au mois de Juin 1741, après avoir fait des préparatifs commes'il se fut agi de reconnoitre une contrée lointaine habitée par un peuplesauvage. On se munit de vivres, de chevaux, de t<strong>en</strong>tes; la petite caravaneétoit, <strong>en</strong> outre, armée de toutes pièces. À Maglan on lâcha descoups de fusil pour <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre l'écho; à Sall<strong>en</strong>che Pockocke se donna ledivertissem<strong>en</strong>t de jouer l'Emir arabe; <strong>en</strong>fin ils arrivèr<strong>en</strong>t au Prieuré sanspéril, et sans autre inconvéni<strong>en</strong>t que quelque fatigue. Accompagnés desindigènes, qui les avoi<strong>en</strong>t fort bi<strong>en</strong> accueillis, ils gravir<strong>en</strong>t sur le Montanvert,et eur<strong>en</strong>t la satisfaction de contempler la scène admirable que prés<strong>en</strong>te lamer de glace.Mais l'homme qui contribua le plus à faire connoître ces contrées futle savant de Saussure. Ses voyages, ses découvertes, ses expéri<strong>en</strong>cesphysiques, et son asc<strong>en</strong>sion au Mont-Blanc <strong>en</strong> 1786, jetèr<strong>en</strong>t les fondem<strong>en</strong>tsde cette r<strong>en</strong>ommée qu'a acquise la vallée de Chamonix, et qui a toujours


<strong>en</strong> plus grand nombre attiré au milieu de ses merveilles les voyageurs detous les âges, de toutes les conditions et de tous les pays.La vallée de Chamonix est bordée vers le sud par les hautes aiguillesatt<strong>en</strong>antes à la chaîne du Mont-Blanc, et du côté opposé par le Brév<strong>en</strong>et les Aiguilles Rouges; à l'est, l'issue est fermée par le Col de Balme, età l'ouest on <strong>en</strong>tre dans la vallée par le défilé situé <strong>en</strong>tre les monts deVaudagne, la Forclaz et le Coupeau.Longue de cinq à six lieues, à peine cette vallée a-1-elle une demilieuede largeur dans les <strong>en</strong>droits les plus ouverts. La forme de la valléeest marquée par la direction de l'Arve, qui suit presque une <strong>ligne</strong> droite.Le Chamonix élevé de deux mille jusqu'à plus de trois mille pieds au-dessusdu lac de G<strong>en</strong>ève^ partage l'âpre température de toutes les vallées alpines.L'hiver y dure depuis le mois d'Octobre jusqu'au mois de Mai. Il tombe,dans les années ordinaires, de trois à quatre pieds de neige; mais on a vula neige couvrir le sol à la hauteur de douze, et même, <strong>en</strong> certaines<strong>en</strong>droits, de quatorze pieds. Même au fort de l'été, les matinées et lessoirées continu<strong>en</strong>t à être fraîches; et, après de longues pluies, on voit laneige desc<strong>en</strong>dre jusqu'au fond de la vallée. C'est assez avertir le voyageurde se pourvoir de vêtem<strong>en</strong>ts chauds.A Chamonix les pommiers et les pruniers végèt<strong>en</strong>t avec peine. Enrevanche 9 c'est la patrie des sapins et des mélèzes, d'une quantité debeaux bouleaux, et de superbes bois d'aunes qui bord<strong>en</strong>t les ruisseaux etles torr<strong>en</strong>ts. Le fond de la vallée forme une assez jolie plaine dont lamoitié à-peu-près est consacrée à produire du fourrage; le reste est occupépar des plantations de pommes de terre, de lin d'une excell<strong>en</strong>te qualité,et de chanvre, et par des champs d'orge, de seigle et d'avoine. Le mielde la vallée est très estimé.Les montagnes <strong>en</strong>vironnantes ne nourriss<strong>en</strong>t que de huit à neuf c<strong>en</strong>tsvaches. Les pâturages étant, pour la plupart, pierreux, secs, et très <strong>en</strong>p<strong>en</strong>te, et manquant de pâturages préliminaires, le bétail ne peut y séjournerque deux mois ou trois mois au plus. Les meilleurs sont ceux des Barmeset de Charamillan.V


VIOn fait paître des moutons dans les lieux reculés qui <strong>en</strong>tour<strong>en</strong>t la merde glace, et dans d'autres <strong>en</strong>droits d'un accès difficile. On y élève aussiquelques mulets; les chèvres s'y trouv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> abondance.C'est une tradition accréditée parmi les indigènes de cette vallée,ainsi que parmi les peuplades de plusieurs autres contrées des Alpes, queles glaciers ont éprouvé, il y a quatre ou cinq siècles, un accroissem<strong>en</strong>teffrayant. On croit qu'avant cette époque le passage du Col du Géantétoit fort pratiqué; de nos jours c'est une <strong>en</strong>treprise qu'on ne t<strong>en</strong>te querarem<strong>en</strong>t et qui demande des précautions.Il faut mettre au nombre des particularités les plus remarquables dela vallée la disposition verticale des couches dont se compose la chaînedu Mont-Blanc. Il n'est guère moins remarquable que cette chaîne n'offreaucune cascade considérable; car on ne peut donner ce nom à celle desPèlerins, qui est plus curieuse qu'imposante.La race qui habite cette vallée n'est point affligée par les goîtres etle crétinisme dont l'aspect attriste si souv<strong>en</strong>t les plaisirs des voyageursdans les contrées du Vallais et de la Basse Savoye. Les hommes n'ontpoint la vigueur et la taille avantageuse des montagnards de la Suisseallemande; et les femmes sont loin d'égaler <strong>en</strong> beauté les filles du Cantonde Berne, de Gruyère et de Lucerne. Mais c'est un peuple robuste etlaborieux, et généralem<strong>en</strong>t honnête et complaisant pour les étrangers, quisont au reste une des principales ressources de ce petit pays.Le langage ordinaire de Chamonix, ainsi que du reste de la Savoye,est le patois français, idiome qui s'ét<strong>en</strong>d avec des variations infiniesjusqu'aux <strong>en</strong>virons de Lyon, dans le Dauphiné, dans la Bourgogne, dansles Cantons de G<strong>en</strong>ève, de Vaud, de Fribourg et du Vallais, et, au-delàdes Alpes, à Aoste, et jusqu'à Ivrée. On sait que ces pays formoi<strong>en</strong>t lepremier royaume de Bourgogne qui florissoit vers le 5 ème siècle. Dans lesparties du pays fréqu<strong>en</strong>tées par les étrangers, tout le monde compr<strong>en</strong>d lefrançais; il n'<strong>en</strong> est pas de même dans les <strong>en</strong>droits écartés. C'est ce quifait que l'orthographe des noms propres est sujette à des variantes, etoffre des difficultés.La population de la vallée s'élève à près de quatre mille âmes, quiform<strong>en</strong>t trois paroisses. Une partie intéressante de cette population,; ce


sont les guides, qui, pour la plupart, sont des hommes qui connoiss<strong>en</strong>t etfont bi<strong>en</strong> leur métier. Quelques-uns même ont acquis une réputationhistorique: ainsi Jacques Balmat, dit le Mont-Blanc, et J. Michel Cachât,dit le Géant, qui, avec Alexis Tournier, fut le premier qui franchit le Coldu Géant. 'L'étranger qui se propose de visiter ces contrées fera bi<strong>en</strong> de sepourvoir de quelque itinéraire ou manuel. Parmi ceux qui me sont connus,j'indiquerai les suivants :L'un des premiers est celui de M. J. P. Berthout van Berchem.G<strong>en</strong>ève, 18 05. in 8°.VII1. Depuis 1823, il existe un règlem<strong>en</strong>t relatif aux guides. Un maître guide dirige une compagnie dequarante guides et de vingt-quatre porteurs, qui sont exclusivem<strong>en</strong>t autorisés à accompagner tour-à-tour lesétrangers qui désir<strong>en</strong>t voir la vallée; l'exercice de cette industrie est interdit sévèrem<strong>en</strong>t à tout autre individu. C'estune espèce de monopole, qui ôte la liberté du choix, et qui devi<strong>en</strong>t par fois très gênant, et même disp<strong>en</strong>dieux, àcause des retours; il a cep<strong>en</strong>dant quelques avantages.La journée ordinaire du guide est fixée à 7francs; il y a un taux plus élevé pour les courses extraordinaires.Les mulets se pai<strong>en</strong>t 6 francs par jour ou par course, un char-à-banc avec deux chevaux, 12 francs; le voyagede Sallcnche ou de Saint-Martin à Chamonix, et vice versa, 24 francs. Il est déf<strong>en</strong>du de profiter des retours.Les monnoies qui ont principalem<strong>en</strong>t cours <strong>en</strong> Savoye sont celles de France; on y voit circuler aussi cellesde Piémont, de G<strong>en</strong>ève, de Suisse, et les écus de Brabant; ces derniers perd<strong>en</strong>t quelques sols. La petite monnoiesuisse n'a cours que dans la vallée de Chamonix jusqu'à Servoz; plus bas, elle perd considérablem<strong>en</strong>t:10 sols de France val<strong>en</strong>t 13 sols de G<strong>en</strong>ève.6 . 5 de Piémont.3 2 de Suisse.L.a seule route praticable pour les voitures légères des étrangers qui vont voir la vallée est celle de G<strong>en</strong>èvepar Salknche; elle a été améliorée il y a quelques années. Le chemin par la Tête noire n'est praticable que pourles mulets, et les personnes qui pass<strong>en</strong>t le Col de Balme sont obligées de faire une partie de la course à pied.Les principales auberges de G<strong>en</strong>ève à Chamonix sont:A Bonneville : la Couronne.A Cluse : la Parfaite Union, l'Ecu de France.iA Saint-Martin: l'Hôtel du Mont-Blanc, chez Ch<strong>en</strong>ey; cette maison ne jouit pas de la meilleure réputation.À Sall<strong>en</strong>che : l'Hôtel du Léman, l'Hôtel de Bellevue.À Saint-Gervais: aux Bains, chez M. Gontard; au village, l'Hôtel du Mont-Joli, chez Rosset; il estfort bon.A Servoz: la Balance d'or, chez les Deschamps, de très-braves g<strong>en</strong>s; aux Ouches: l'Hôtel des Glaciers;petite auberge.A. Chamonix: l'Hôtel de l'Union, chez les frères Charlet; grande auberge, parfaitem<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> organisée;l'Hôtel de Londres, chez Victor Tairraz; on y est aussi fort bi<strong>en</strong>; l'Hôtel de la Tour, petiteauberge. Le Lieut<strong>en</strong>ant Bossonay a une maison où l'étranger est fort bi<strong>en</strong> reçu, et à un prixmodique.A Arg<strong>en</strong>tière, à la Valorsine et au Tri<strong>en</strong>t, on trouve des cabarets, et un gîte pour passer la nuit.


VIIIItinéraire de G<strong>en</strong>ève, des Glaciers de Chamouni, du Vallais et duCanton de Vaud, par Th. Bourrit. G<strong>en</strong>ève, chez Paschoud, 1808^ in 8°.Cet ouvrage est d'une lecture assez amusante ; mais tout n'est pas égalem<strong>en</strong>tcroyable, sur-tout quand l'auteur parle de lui-même.Das Chamounithal am Fusse des Mont-Blanc, von Gottschalck. Halle,bei Hemmerde et Schwetschke, 1811, in 12°. Ouvrage allemand qui a dumérite, et qui peut être recommandé aux voyageurs.Nouvel Itinéraire des vallées autour du Mont-Blanc, par J. P. Pictet.G<strong>en</strong>ève, chez Manget et Cherbuliez, 1813, in 12°. C'est le plus completet le plus instructif. Les observations botaniques et minéralogiques, leschemins, les distances, les hauteurs, y sont consignés avec beaucoup deprécision. La manière de voyager y est aussi très bi<strong>en</strong> indiquée.Je ne connois jusqu'à prés<strong>en</strong>t aucune carte bi<strong>en</strong> faite, qui soit calculéepour les besoins du voyageur, comme on <strong>en</strong> a, par exemple, pour POberlandbernois. La seule recommandable est celle du Capitaine Raymond, levée<strong>en</strong> 1797 — 1799; mais elle est dev<strong>en</strong>ue rare; le format <strong>en</strong> est trop grand,et les détails sont manques.En accompagnant mes planches de quelques observations recueillies surles lieux, je suis bi<strong>en</strong> éloigné de la prét<strong>en</strong>tion d'offrir au public unouvrage littéraire. Comme peintre, j'ai tâché de r<strong>en</strong>dre fidèlem<strong>en</strong>t cett<strong>en</strong>ature imposante.* J'ai étudié assiduem<strong>en</strong>t les formes et le caractère deces paysages, dont un long séjour dans la vallée m'a permis de faire desétudes finies ; et j'ai fait plus volontiers le sacrifice de ce qu'on appelle lesbelles <strong>ligne</strong>s <strong>en</strong> composition, que celui de la vérité. A différ<strong>en</strong>tes reprisesj'ai gravi sur les hauteurs qui <strong>en</strong>vironn<strong>en</strong>t la vallée de Chamonix; j'ai fait<strong>en</strong>suite la tournée du Mont-Blanc, accompagné de M. Michel Carrier,jeune topographe, mieux instruit que personne des localités du pays. Jelui suis redevable, ainsi qu'à M. Ambroise Paccard et à mon hôte, M. leLieut<strong>en</strong>ant Bossonay, de plusieurs r<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>ts intéressants.1. Ce n'étoit pas pour la première fois que l'auteur parcouroit les hautes vallées de la chaîne des Alpes. IIles connoît depuis quinze ans ; il a passé et repassé une grande partie de leurs cols, et visité la plupart des cimesles plus fréqu<strong>en</strong>tées de sa patrie. Il possède les panoramas du Rigi, du Titlis, du Sidelhorn, du Faulhorn, duSchilthorn, de l'Eckischhorn, du Passage de Zermatt, du Col de la Seigne, du Crammont, etc.


J'ai préféré, pour l'exécution de l'ouvrage, l'aquatinte, comme lamanière la plus conv<strong>en</strong>able pour des planches destinées à être coloriées;et dans la crainte que le graveur n'exécutât pas mes dessins à mon gré,j'ai moi-même essayé ce g<strong>en</strong>re de gravure. Ceux qui <strong>en</strong> connoiss<strong>en</strong>t lesdifficultés, sur-tout pour un novice, comme je l'étois, me pardonnerontplus aisém<strong>en</strong>t une imperfection difficile à éviter.Je possède <strong>en</strong>core des vues du revers méridional du Mont-Blanc _, duVallais et des al<strong>en</strong>tours du lac de G<strong>en</strong>ève. Mais mon but ess<strong>en</strong>tiel ayantété de faire connoître la vallée de Chamonix, je me borne aux vues quele lecteur a sous les yeux. Si le public apprécioit ce fruit de mes études,je serois <strong>en</strong> mesure d'ajouter à l'ouvrage une seconde partie non moinsintéressante que la première.Basle, Mai 1826.IXSAMUELBIRMANN.


TABLE GENERALE DES VUES ET DESCRIPTIONS.N°.1. Gorge de Cluse.2. Cascade de l'Arpénaz.3. Environs de Sall<strong>en</strong>che.4. Four Savoyard.5. Habitation Savoyai-de.6. Le Mont-Blanc vu de Sall<strong>en</strong>che.7. Bains de Saint-Gervais.8. Cascade du Bonnant.9. Cascade de Chède.10. Lac de Chède.11. Le Mont-Blanc vu de Servoz.12. Bergères à l'Oratoire.13. Environs de Servoz.14. Aux Montées.15 Glacier des Bossons.16. Église de Chamonix.17. Le Prieuré et le Mont-Blanc.18. La Mer de glace, Vue du Montanvert.19. Vue prise du Jardin.20. Source de l'Arveron.21. Glacier des Bois.22. À la Flégère.23. Le Col de Balme, vu de la vallée d'Arg<strong>en</strong>tière.24. Église d'Arg<strong>en</strong>tière.25. La vallée de Chamonix, vue du Col de Balme.26. Panorama du Brév<strong>en</strong>.


GORGE DE CLUSE.Je n'ai point p<strong>en</strong>sé devoir comm<strong>en</strong>cer ces Souv<strong>en</strong>irs avant d'être àune certaine proximité du Mont-Blanc, l'objet principal et le c<strong>en</strong>tre demes descriptions et de mes tableaux; d'ailleurs, la route de G<strong>en</strong>ève àBonneville, et même celle de Bonneville à Cluse, n'offr<strong>en</strong>t pas de sitesqui puiss<strong>en</strong>t rivaliser avec ceux dont on jouit plus loin.Le pays, qui a été assez ouvert jusqu'à Cluse, change tout-à-coupde physionomie et de caractère; et, au passage du pont de l'Arve, lavue perce et se prolonge dans les défilés étroits et sauvages où l'on vabi<strong>en</strong>tôt s'<strong>en</strong>foncer.Au milieu d'une prairie solitaire se fait remarquer une petite maison(appelée Maladieda <strong>en</strong> langue du pays) <strong>en</strong>tourée de tous côtés de rochersd'une grande hauteur taillés à pic; l'Arve serp<strong>en</strong>te au fond, les aiguillesde Var<strong>en</strong>s s'élèv<strong>en</strong>t dans le lointain. Ce paysage a fourni le motif de lapremière vue.Le matin est le mom<strong>en</strong>t du jour le plus favorable pour jouir ducharme des effets de lumière dans le paysage.On r<strong>en</strong>contre plus loin le village de Balme, (Banne), qui pr<strong>en</strong>d sonnom d'une grotte profonde dont on voit l'ouverture à gauche dans lesrochers. Elle est à 7oo pieds au-dessus de l'Arve. Sa profondeur est desix à sept c<strong>en</strong>ts pas, et l'accès n'<strong>en</strong> est pas sans difficulté.Avant de quitter Cluse, je dois faire m<strong>en</strong>tion du vallon où est situéela Chartreuse du Reposoir. On y arrive <strong>en</strong> deux heures; de Songi lechemin, qui est fort mauvais, monte à travers une gorge tortueuse. Aucunlieu ne peut offrir une retraite plus conv<strong>en</strong>able à un homme qui, fatiguédu tumulte du monde, détrompé de ses plaisirs, et désabusé sur le comptede l'humanité, veut <strong>en</strong>selevir ses <strong>en</strong>nuis farouches et son amère misantropiedans un asile où ne pénètr<strong>en</strong>t ni les bruits de la société ni l'œilcurieux des mortels. Ce lieu sauvage est fait pour rappeler ce vers d'un,poè'te :„ La solitude est douce à qui fuit les méchants."I.


:'.2


CASCADE DE LARPÉNAZ.Un quart-d'heure avant d'arriver à Maglan, on voit jaillir à côté duchemin deux sources d'une eau parfaitem<strong>en</strong>t claire et limpide. Les g<strong>en</strong>sdu pays dis<strong>en</strong>t qu'elles provi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t du Lac de Flaine.Quoique la contrée offre <strong>en</strong>core aujourd'hui des sites charmants, etne soit ri<strong>en</strong> moins que dépouillée d'arbres et de verdure, l'œil est attristéde chercher <strong>en</strong> vain ces antiques bosquets qui faisoi<strong>en</strong>t les délices detous les amis de la belle nature: ils ont été coupés.Le Nant d'Orli, qui vi<strong>en</strong>t de la commune d'Arache, située sur lamontagne, forme une cascade assez jolie, mais qui manque d'eau <strong>en</strong> été.C'est ici qu'on tire quelques coups d'arme à feu pour faire ret<strong>en</strong>tir l'écho.Le village de Maglan se trouve au sortir des Gorges de Cluse; il estagréablem<strong>en</strong>t situé. Ses habitants, comme ceux de quelques districts deSall<strong>en</strong>che, vont presque tous passer une partie.de l'année <strong>en</strong> Suisse ou <strong>en</strong>Allemagne, où ils exerc<strong>en</strong>t quelque métier, ou font quelque trafic,Une lieue plus loin la cascade du Nant d'Arpénaz * attire les regardsdu voyageur. Elle tombe d'une grande hauteur, (près de 8 00'), et seréduit dans sa chute <strong>en</strong> une poussière, qui, au souffle du v<strong>en</strong>t, se répanddans l'air avec mille ondulations variées.La forme des couches que prés<strong>en</strong>te le rocher de la cascade est desplus singulières.Un peu plus loin est le village de Méribelle, qui a acquis une espècede célébrité, par la résistance que le Marquis de Salles y opposa auxFrançais <strong>en</strong> 1793.1. C'est, dans des proportions réduites, le p<strong>en</strong>dant du Staubbach dans la Vallée de Lauterbrunn<strong>en</strong>.(2.


1V.


ENVIRONS DE SALLENCHE.La vue est prise des bords de l'Arve, près de l'auberge du Mont*Blanc à Saint-Martin. Les montagnes qu'on voit dans le fond sont cellesde Cordon, de Saint-Roch sur Sall<strong>en</strong>che, etc.Le beau pont de Saint-Martin, r<strong>en</strong>versé par l'inondation de 1778,a été remplacé par un autre d'une construction moins "belle, mais trèssolide. La belle chaussée qui conduit à Sall<strong>en</strong>che y aboutit. ' En setransportant sur quelque hauteur, on observe avec peine que la plusgrande partie de la vallée est ravagée par l'Arve, dont les eauxemport<strong>en</strong>t les plus belles terres, et les remplac<strong>en</strong>t par les couches d'ungravier stérile. Les habitants ont déjà plus d'une fois t<strong>en</strong>té d'y porterremède; mais il paroît que cette <strong>en</strong>treprise est au-dessus des forcesdu pays.Derrière Saint-Martin s'élèv<strong>en</strong>t les aiguilles de Var<strong>en</strong>s, (hautes de13 88 toises au-dessus de la mer); les rochers qui les compos<strong>en</strong>t sontd'une coupe hardie.Le Mont-Blanc, qu'on a perdu de vue dans le voisinage de G<strong>en</strong>ève,reparoît ici bi<strong>en</strong> plus grand et plus majestueux; mais il ne se montre pastout <strong>en</strong>tier. Ce n'est qu'à Sall<strong>en</strong>che qu'il permet au voyageur de l'admirerdans son <strong>en</strong>semble imposant.1. Avant 1823 il existoit un chemin praticable pour les chars-à-banc, de Saint-Martin à Chède par Passy;comme il étoit plus court, il étoit suivi par le plus grand nombre des voyageurs; mais les débordem<strong>en</strong>ts de l'Arvel'ayant r<strong>en</strong>du impraticable, on suit ordinairem<strong>en</strong>t la route de Sall<strong>en</strong>che à Saint-Gervais.3.


y---L


FOURSAVOYARDPresque toutes les maisons de paysans, <strong>en</strong> Savoye, possèd<strong>en</strong>t de cesfours, qui sont toujours isolés de l'habitation, à cause du danger.Souv<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tourés de verdure et d'arbres fruitiers, il <strong>en</strong> est qui prés<strong>en</strong>t<strong>en</strong>tdes motifs très pittoresques.Communém<strong>en</strong>t, chaque ménage fait plusieurs fournées à la fois, et sepourvoit de pain pour un ou deux mois, quelquefois pour quatre; ontrouve même du pain d'une année; vieux, il devi<strong>en</strong>t si dur, qu'on estobligé de le couper avec la hache. Aussi les indigènes mang<strong>en</strong>t peu depain sec, sur-tout de la qualité inférieure, qui conti<strong>en</strong>t beaucoup de son;<strong>en</strong> général on l'accommode avec du bouillon chaud et du fromage.La Savoye produit assez de grain pour sa propre consommation; on<strong>en</strong> exporte même des districts moins montagneux.Aux <strong>en</strong>virons de Passy et de Sall<strong>en</strong>che, les habitants <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>tbeaucoup d'abeilles. C'est là qu'au printemps les Chamoniards vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>tacheter de jeunes essaims, qu'ils transport<strong>en</strong>t dans leur vallée. Quand labonne saison est passée, la plupart étouff<strong>en</strong>t ces ouvrières laborieuses,att<strong>en</strong>du que l'hiver dure trop long-temps pour qu'il y ait de l'avantage àles conserver. Le miel de ces abeilles, est d'ailleurs r<strong>en</strong>ommé pour sablancheur et sa bonté; c'est ce qu'on appelle du miel vierge.•4.


•i. IlIll.MANVrÏOUASAVOYARD


HABITATION SAVOYARDE.La plupart des maisons de campagnards sont de construction mixte.Les fondem<strong>en</strong>ts et le rez-de-chaussée sont <strong>en</strong> maçonnerie, le reste est <strong>en</strong>bois. Elles sont couvertes de bardeaux, <strong>en</strong> quelques lieux d'ardoises,rarem<strong>en</strong>t de tuiles. En général, elles sont petites, et n'offr<strong>en</strong>t point deplace superflue; et la propreté intérieure y est souv<strong>en</strong>t un peu négligée.Dans bi<strong>en</strong> des parties de la Savoye, les habitants s'expatri<strong>en</strong>t régulièrem<strong>en</strong>tpour une partie de l'année, et vont gagner leur pain dans lespays voisins, comme colporteurs ou <strong>en</strong> exerçant quelque métier. Il <strong>en</strong>est qui dès leur jeunesse dis<strong>en</strong>t adieu à leur pays natal, pour n'y rev<strong>en</strong>irqu'avec la petite fortune que leur assiduité leur a procurée. Aussi n'est-ilpresque aucun pays de l'Europe, où l'on ne r<strong>en</strong>contre des Savoyards.Le voyageur est généralem<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> reçu dans ce pays, où l'on neremarque point la réserve et la méfiance qui caractéris<strong>en</strong>t quelquescontrées de montagnes, particulièrem<strong>en</strong>t le Tyrol. On n'y <strong>en</strong>t<strong>en</strong>d pointparler non plus de voleurs de grands chemin, comme dans un pays quin'est pas éloigné, l'Italie ; et il n'y a guère d'exemple qu'un étranger aitété dépouillé <strong>en</strong> allant visiter la Vallée de Chamonix.5.


IIA M l'I* AM* IONBAVO VA K \)l


LE MONT-BLANC VU DE SALLENCHE.Pour l'étranger déjà familiarisé avec la vue des hautes montagnes, etdont l'œil a souv<strong>en</strong>t mesuré avec admirationces sommets indomptablesD'où l'aigle et le tonnerre arriv<strong>en</strong>t jusqu'à nous,le Mont-Blanc, vu de Sall<strong>en</strong>che, est <strong>en</strong>core un spectacle unique etincomparable. 1 Les regards ne peuv<strong>en</strong>t se détacher de cette scène majestueuse;ils se fix<strong>en</strong>t incessamm<strong>en</strong>t sur ces déserts sublimes dont le Créateura élevé la brillante nudité si loin au-dessus de la nature vivante.Mais ri<strong>en</strong> n'est si admirable que le lever et le coucher du soleil dansce noble paysage. Le matin, la montagne, <strong>en</strong>veloppée de légères vapeurs,paroît quelquefois se confondre avec l'air, et l'on n'<strong>en</strong> discerne les contoursqu'à la faveur des coups de lumière qui les effleur<strong>en</strong>t. Le soir, ces vastesplages de neige et de glace éternelles, brill<strong>en</strong>t <strong>en</strong>core long-temps de laplus belle teinte de pourpre, quand tous les autres objets se couvr<strong>en</strong>t déjàdes ombres de la nuit'.La position de Sall<strong>en</strong>che est de toute beauté; la végétation y estadmirable et d'une singulière richesse; j'ai vu réunis le chêne et lechâtaignier, le noyer et le sapin, le hêtre et le cerisier. Tous ces arbresétoi<strong>en</strong>t d'une taille et d'une vigueur étonnantes; j'ai vu même un tronc dechâtaignier, dont la circonfér<strong>en</strong>ce approche de celle de ses fameux frèresdu Mont-Etna. Sall<strong>en</strong>che est une petite ville qui compte de 1500 à 2000habitants; elle est traversée par un torr<strong>en</strong>t du même nom, qui offre unpeu plus haut des sites fort sauvages. Le carrillon passe pour un des plusbeaux du pays.1. La vue qui est sous les yeux du lecteur, n'ayant pour objet que le Mont-Blanc proprem<strong>en</strong>t dit, neprés<strong>en</strong>te qu'une partie de la chaîne qui se rattache à lui. Immédiatem<strong>en</strong>t au-dessous du sommet, on distinguera ledôme du Goûté, et un peu plus bas l'aiguille de ce nom. La première cime à gauche n'a pas de nom, la secondeest le Mont-Blanc du Tâcul, et la troisième l'aiguille du Midi. À droite du Mont-Blanc se fait remarquer l'aiguillede Bionassai; la montagne couverte de pâturages qui se trouve au pied du Mont-Blanc est le Prarion; on distingue<strong>en</strong>core le clocher de Saint-Gervais. Si l'on veut découvrir dans toute leur ét<strong>en</strong>due le Mont-Blanc et les aiguillesqui l'<strong>en</strong>tour<strong>en</strong>t, il faut monter à PJanajoux, plateau élevé, du côté des montagnes de l'Enduran. C'est une marched'une heure et demie ou deux heures; mais la vue magnifique dont on jouit de cette hauteur dédommage des1fatiguevS de ce petit voyage.6.


BAINS DE SAINT-GERVAIS./En suivant le Bonn ant à travers les beaux bois d'aulnes qui garniss<strong>en</strong>tses bords, on est agréablem<strong>en</strong>t surpris à l'apparition subite de l'établissem<strong>en</strong>tdes bains ; on ne pouvoit pas espérer de r<strong>en</strong>contrer un si riantcoin de terre dans cette gorge âpre et sauvage.- Le bâtim<strong>en</strong>t des bains se voit <strong>en</strong> face. Son architecture, qui ti<strong>en</strong>t dugoût moresque, paroît fort bi<strong>en</strong> imaginée pour un lieu pareil. ' Le contrastede ces formes et des souv<strong>en</strong>irs qu'elles rappell<strong>en</strong>t avec l'aspect hyperboré<strong>en</strong>de ces lieux sauvages, est piquant et agréable. Un joli bosquet de sapinss'élève dans la cour intérieure.Ces eaux, découvertes <strong>en</strong> 1806 par M. Gontard, ont acquis de laréputation par plusieurs cures remarquables. Les sources thermales, qui,à l'<strong>en</strong>droit d'où elles jailliss<strong>en</strong>t, ont 33° de Réaumur, coul<strong>en</strong>t dans unegalerie souterraine et voûtée de 200 ' de longueur. Vis-à-vis de chaquechambre à coucher est un cabinet de bain, qui n'<strong>en</strong> est séparé que parle corridor. L'eau est conduite dans chaque bain par le moy<strong>en</strong> de pompesmises <strong>en</strong> mouvem<strong>en</strong>t par des rouages que fait jouer le Bonnant.Les simples voyageurs sont logés dans une maison à part.Les eaux du torr<strong>en</strong>t se boiv<strong>en</strong>t à table par régime.Le beau pont <strong>en</strong> pierres de taille qui se trouve à l'<strong>en</strong>trée de la gorgedu Bonnant a été construit dans les années 1823 et 24. Il a remplacécelui qui avoit été établi <strong>en</strong> 17 84, à l'époque où fut tracée la nouvelleroute de Sall<strong>en</strong>che à Saint-Gervais. Il fut brûlé <strong>en</strong> 1793 dans une action<strong>en</strong>tre les Français et les troupes sardes.1. M. Gontard, <strong>en</strong>core aujourd'hui propriétaire dé ces bains, a été, pour ainsi dire, continuellem<strong>en</strong>toccupé à les agrandir et à les embellir.7.


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CASCADE DU BONNANT.Derrière l'établissem<strong>en</strong>t des bains, le torr<strong>en</strong>t fait plusieures chûtesd'un effet fort grandiose; la dernière est la plus belle et la plus pittoresque.L'emplacem<strong>en</strong>t même des bains est remarquable par son caractèresauvage; mais il n'a ri<strong>en</strong> qu'on puisse comparer à l'horreur imposante dugouffre d'où sort le Bonnant, horreur qui fait place à l'éclat le plusbrillant, lorsque le soleil dardant ses rayons sur les rochers et sur leseaux y produit d'admirables effets de lumière.En allant de l'autre côté de l'eau par le pont des bains, <strong>en</strong> montant<strong>en</strong>suite par un s<strong>en</strong>tier sur les hauteurs opposées, et <strong>en</strong> repassant le Bonnantpar le pont qu'on appelle du Diable s pour arriver au village de Saint-Gervais, on fait une des prom<strong>en</strong>ades qui peuv<strong>en</strong>t offrir le plus dejouissances sous le rapport des sites pittoresques et de la belle compositiondu paysage. A chaque instant la scène change ; tantôt ce sont deténébreuses forêts ou des prairies solitaires, où l'on aime à ral<strong>en</strong>tir sespas; tantôt on découvre les brillantes cimes de la chaîne du Mont-Blanc,élancées dans l'azur; quelques instants après on s'arrête avec effroi sur lebord des noirs précipices au fond desquels mugit le Bonnant. — Ducimetière de Saint-Gervais la vue est <strong>en</strong>core d'une grande beauté.Des bains de Saint-Gervais on compte une demi-heure de route pourmonter au village. Le voyageur remarquera que le costume de la valléede Mont-Joie se distingue de celui des <strong>en</strong>virons.En quatre ou cinq heures de marche on atteint la cime du Mont-Joli{mont Jouis), qui donne son nom à la vallée. La vue dont on y jouitest d'une vaste ét<strong>en</strong>due ; c'est particulièrem<strong>en</strong>t un point favorable pourexaminer les aiguilles qui s'élèv<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre le Mont-Blanc et le Col duBonhomme.8,


\sA l'AKi'AD¥\ DI" BONNANTì>3',iRIIÌ]H5liK IJKS 3ÎAJK.S JJB NT. BBRVAIS


CASCADE DE CHÈDE.À l'<strong>en</strong>trée du village de Chède, un s<strong>en</strong>tier tirant à gauche longe lapetite rivière qui débouche au grand chemin, et conduit vers l'une desplus jolies cascades qu'on r<strong>en</strong>contre sur la route. Elle se précipite dansplusieurs bassins, et forme <strong>en</strong> tombant un nuage de poussière humide oùle soleil du matin fait respl<strong>en</strong>dir avec magie les couleurs de l'iris. Aprèscette chute bruyante, les eaux redev<strong>en</strong>ues transpar<strong>en</strong>tes et calmes, cour<strong>en</strong>tà l'<strong>en</strong>vi baigner des prairies où elles <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t la plus fraîche verdure.C'est à Chède qu'on voit les dernières vignes.En quittant la grande plaine de Sall<strong>en</strong>che, on a devant soi une montéeassez forte. Le coteau est garni d'un grand nombre de superbes noyers,qui ombrag<strong>en</strong>t les prés et les maisons des villages de Chède et de Joux.Du côté de Saint-Martin se montre la commune de Passy, égalem<strong>en</strong>t<strong>en</strong>tourée de la plus belle végétation, et dans une situation charmante. Desinscriptions romaines trouvées sur les lieux et conservées au portail del'église, prouv<strong>en</strong>t que ces contrées étoi<strong>en</strong>t déjà connues et visitées dutemps des empereurs romains.Le costume des femmes des <strong>en</strong>virons est assez agréable.


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LAC DECHÈDE.Il n'y a que quelques années qu'on a fait passer la route le long dece délicieux petit lac; elle passoit par le pont qui se fait voir à sonécoulem<strong>en</strong>t. Les eaux du Lac de Chède sont d'une limpidité parfaite, etles reflets de la plus grande précision et du plus beau coloris. C'estsur-tout le soir, au soleil couchant, quand le Mont-Blanc se trouve àdécouvert, que les neiges teintes de pourpre s'y réfléchiss<strong>en</strong>t avec cetteharmonie profonde et magique, que le pinceau de Claude Lorrain a saisiedans ses plus heureux mom<strong>en</strong>ts.Le lac est alim<strong>en</strong>té par un petit ruisseau et plusieurs sources, dontl'eau est offerte aux voyageurs par des <strong>en</strong>fants du lieu. En sortant dulac, le ruisseau fait tourner des moulins, et tombe <strong>en</strong> cascade pour sejoindre à l'Arve. Les personnes qui désir<strong>en</strong>t suivre le s<strong>en</strong>tier du Châtelaret passer le pont des Chèvres, desc<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t le long d'un ravin d'une hauteurconsidérable, au fond duquel l'Arve forme plusieurs cascades d'un aspectfort sauvage. Au reste, on ne peut conseiller ce chemin qu'aux personnesqui vont aisém<strong>en</strong>t à pied; les mulets y pass<strong>en</strong>t plus difficilem<strong>en</strong>t.Un autre petit étang, nommé Lac de Joux, se trouve dans levoisinage de celui de Chède; il est passager, et n'a de l'eau que p<strong>en</strong>dantl'été, du mois de Mai à celui de Septembre. Les eaux paroiss<strong>en</strong>t prov<strong>en</strong>irde la fonte des neiges, et sont aussi d'une grande clarté. Il n'a pasd'écoulem<strong>en</strong>t.Du Lac de Chède à Servoz on traverse plusieurs torr<strong>en</strong>ts. Le Nantnoir, qui est le plus remarquable, est quelquefois difficile à passer. Seseaux bourbeuses, grossies par de longues pluies ou par des orages subitsne form<strong>en</strong>t plus alors qu'une masse confuse de terres mouvantes agglutinées<strong>en</strong>tre elles, et capables d'emporter les plus grands quartiers derochers.10.


LE MONT-BLANC VU DE SERVOZ.C'est quand le voyageur arrive à Servoz que le Mont-Blanc seprés<strong>en</strong>te à ses regards d'une manière grandiose; c'est aussi de là que l'oncomm<strong>en</strong>ce à saisir d'une manière distincte les détails de cette masse imposante: ces rochers sourcilleux, ces tapis de neiges éternelles, ces pics deglace, ces crevasses effrayantes. À son pied l'on distingue les Montées^plus bas comm<strong>en</strong>ce la plaine de Servoz; et le château de Saint-Michels'élève sur un rocher que baign<strong>en</strong>t les flots de l'Arve, qui sembl<strong>en</strong>t avoirr<strong>en</strong>oncé pour un temps à leur impétuosité accoutumée. Si l'on <strong>en</strong> croitde vieilles traditions, toute cette vallée étoit jadis occupée par les eauxd'un lac, qui, <strong>en</strong> s'écoulant, détruisit plusieurs grands villages. L'issueactuelle ayant été obstruée par quelque éboulem<strong>en</strong>t, les eaux fur<strong>en</strong>tcontraintes de refluer vers leur anci<strong>en</strong> lit dans la vallée du Châtelar; oncroit que ce ne fut qu'au 16 e siècle qu'elles se fir<strong>en</strong>t jour de nouveau àtravers les débris.Près d'un établissem<strong>en</strong>t de mines à demi-ruiné, on remarque lemonum<strong>en</strong>t que M. d'Eymar, préfet du départem<strong>en</strong>t du Léman, a fait éleverà la mémoire de F. A. Esch<strong>en</strong>, jeune Danois mort <strong>en</strong> I800 sur le glacierdu Buêt. Cet accid<strong>en</strong>t paroît avoir dégoûté les étrangers de gravir sur leBuêt de ce côté, et l'on préfère y monter du côté de la Valorsine; jecrois pourtant qu'il vaut mieux <strong>en</strong>trepr<strong>en</strong>dre d'ici cette course. On peutaller coucher aux chalets de Villi, et de là, <strong>en</strong> trois ou quatre heures, onatteint la cime. On trouve aussi à Servoz des guides qui connoiss<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong>les localités. La partie du Brév<strong>en</strong> peut aussi très bi<strong>en</strong> se faire d'ici.La Dioza pr<strong>en</strong>d sa source au pied du Buêt, et, avant de se jeterdans l'Arve, elle fait du haut d'un précipice d'une hauteur remarquable etextrêmem<strong>en</strong>t resserré, plusieurs chûtes d'un effet agréable; mais l'approche<strong>en</strong> est assez difficile.Les voituriers s'arrêt<strong>en</strong>t ordinairem<strong>en</strong>t au Bouchet, pour donner àmanger aux chevaux.il.


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BERGÈRES À L'ORATOIRE.En Savoye, si l'on excepte les grands fruitiers, les hommes vont peuà la montagne; ce sont <strong>en</strong> général les femmes et les filles qui soign<strong>en</strong>t lebétail et font le fromage. Les pâturages de la Savoye ne sont ni aussigras ni aussi vastes que ceux de la Suisse, et les bestiaux y sont pluspetits et de moindre qualité. Les fromages n'égal<strong>en</strong>t point non plus <strong>en</strong>bonté ceux de la Suisse. En visitant plusieurs chalets des <strong>en</strong>virons deSall<strong>en</strong>che et de Chamonix, j'ai cru remarquer que la fabrication desfromages n'étoit pas fort soignée, et que leur infériorité peut t<strong>en</strong>ir à unmanque de propreté.Ces détails peuv<strong>en</strong>t expliquer pourquoi il n'y a pas dans ce pays cettedisposition joyeuse que donn<strong>en</strong>t l'aisance et la prospérité, ni ces grandesfêtes de bergers qui se célèbr<strong>en</strong>t <strong>en</strong> Suisse. On n'y connoît ni la luttede l'Oberland bernois et des petits cantons, ni le jet de pierre desApp<strong>en</strong>zellois, ni l'exercice du saut des habitants du Rigi.Pour se garantir des injures de l'air, les bergers couvr<strong>en</strong>t leur corpsd'un manteau de peau de chèvre, auquel on a laissé les poils, et leur têted'un large chapeau de laine. Dans quelques pâturages élevés, les bergerscouch<strong>en</strong>t près de leur troupeau; et pour se préserver du froid^ ils port<strong>en</strong>tavec eux un réduit appelé canard, qui ressemble assez à un bois de litmuni d'un couvercle.12.


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ENVIRONS DE SERVOZ.Avant de quitter cette belle vallée, on fera bi<strong>en</strong> de s'arrêter quelquesinstants et de contempler le beau paysage que prés<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t les <strong>en</strong>virons deServoz. Il forme un contraste frappant avec les scènes qui vont succéder.Derrière Servoz s'élèv<strong>en</strong>t les fiers rochers des Fis, taillés à pic de cecôté. On remarque aisém<strong>en</strong>t l'éboulem<strong>en</strong>t qui eut lieu <strong>en</strong> 1751. A lasuite de longues pluies, une masse de rochers de plus de 3,000,000, detoises cubiques, s'écroula avec un bruit épouvantable, et fit croire auxhabitants effrayés que la fin du monde étoit arrivée. Le ciel s'obscurcit,une nuit passagère remplaça le jour, des tourbillons d'une poussière épaisse,semblables aux pluies de c<strong>en</strong>dre que le Vésuve répand autour de lui,couvrir<strong>en</strong>t les foins et les moissons qu'on étoit alors occupé à recueillir.On perdit beaucoup de bestiaux, mais six hommes seulem<strong>en</strong>t périr<strong>en</strong>t.Le roi de Sardaigne <strong>en</strong>voya de suite sur les lieux le physici<strong>en</strong> Donati,pour lui r<strong>en</strong>dre compte de l'événem<strong>en</strong>t; et comme l'éboulem<strong>en</strong>t duraplusieurs jours, ce savant arriva <strong>en</strong>core à temps pour voir le fait de sespropres yeux.La commune de Servoz se compose de plusieurs villages, Servozmême, le Bouchet, où sont l'église et l'auberge, les villages du Mont, laCombe _, la Côte, au pied des rochers des Fis, le village du Lac près duchâteau de Saint-Michel, la Vaudagne à droite des Montées, et leChâtelard sur le s<strong>en</strong>tier des Chèvres.Les arbres fruitiers prospèr<strong>en</strong>t <strong>en</strong>core sur ce point; on y trouve defort beaux noyers.


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AUX MONTEES.Quand on a passé le pont le Pelissier à une demi-lieue du Bouchet,on se trouve au pied des Montées. Le voyageur, qui a suivi jusqu'ici lecours de l'Arve, la quitte pour ne la rejoindre qu'au pont de la Piralota(Perolata)) éloigné d'une demi-lieue du Prieuré. Les Montées offr<strong>en</strong>t àl'œil une contrée des plus sauvages, armée de rochers, hérissée de sombresforêts. L'Arve, qui, p<strong>en</strong>dant la plus grande partie de la route, se dérobeaux yeux du voyageur, n'avertit de sa prés<strong>en</strong>ce que par le sourdmugissem<strong>en</strong>t de ses eaux au fond du précipice où elle coule invisible.Des sapins et des bouleaux ombrag<strong>en</strong>t la route, qui, contrainte de suivretous les contours des rochers, conduit à chaque pas parmi de nouvellesbeautés. L'aiguille et le dôme du Goûté se prés<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t supérieurem<strong>en</strong>tbi<strong>en</strong>; la hauteur prodigieuse dans laquelle ils s'offr<strong>en</strong>t aux regards, surpassetout ce qu'on a vu jusqu'à ce mom<strong>en</strong>t. Arrivé sur la hauteur, on voittout-à-coup la scène changer; à mesure qu'on avance., la vue se développeet s'ét<strong>en</strong>d; la vallée de Chamonix pr<strong>en</strong>d un aspect riant; le Mont-Blancet ses aiguilles paroiss<strong>en</strong>t avoir perdu leur caractère sauvage et leurhauteur imposante. !Au-delà de la Chapelle du Fouilly, le glacier des Bossons frappe lesyeux par la blancheur éblouissante de ses glaces, qui desc<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t jusqu'aufond de la vallée, où on les voit <strong>en</strong>tourées de la plus belle verdure. Àdroite, on aperçoit le village des Ouches (Houches) v et dans le fondl'aiguille Verte et celle d'Arg<strong>en</strong>tière ; plus tard paroît le glacier des Bois.Les Ouches sont à-peu-près à mi-chemin de Servoz au Prieuré; maisjusqu'à ce dernier <strong>en</strong>droit, la route cesse de monter. Un autre cheminpart de Servoz, et passe par les mines du Fouilly et le s<strong>en</strong>tier desTrapettes ; mais il est peu pratiqué.1. J'ai remarqué que, vu du Prieuré, le Mont-Blanc est loin de produire l'illusion de la hauteur, qui failtant admirer la Jungfrau dans la vallée de Lauterbrunn<strong>en</strong>, ou l'Eiger et le Wetterhorn dans celle du Grindchvnld.a,


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GLACIER DES BOSSONS.Aucun glacier de la vallée de Chamonix ne prés<strong>en</strong>te des tours et despyramides de glace aussi grandes et aussi bi<strong>en</strong> coupées que celui qu'on asous les yeux. Du temps que les glaciers croissoi<strong>en</strong>t considérablem<strong>en</strong>t,ces masses étoi<strong>en</strong>t prodigieuses ; <strong>en</strong>core à prés<strong>en</strong>t elles surpass<strong>en</strong>t <strong>en</strong>hauteur les clochers. Leurs formes variables ont un caractère fantastique,qui doit frapper à la seule inspection de ce dessin, fidèlem<strong>en</strong>t tracéd'après nature.Le glacier des Bossons (Buissons) desc<strong>en</strong>d presque <strong>en</strong> <strong>ligne</strong> droitedes plateaux les plus élevés du Mont-Blanc, et la pureté de ses glaces,se conservant jusqu'au bas, forme un contraste frappant avec les teintesfoncées des bois de sapins et de mélèzes qui garniss<strong>en</strong>t ses bords. Lap<strong>en</strong>te de ce glacier étant très rapide, il est le premier de la vallée àcroître et à se retirer. J'ai ouï-dire que, dans l'année 18 17, où ilaugm<strong>en</strong>ta le plus, les glaces s'avançoi<strong>en</strong>t de trois ou quatre pieds dans lesvingt-quatre heures, ' et qu'elles couvrir<strong>en</strong>t pour plus de trois mille francsde bonnes terres cultivées; la moraine s'ét<strong>en</strong>dit au-delà de tous les indicesqu'on avoit conservés des desc<strong>en</strong>tes plus anci<strong>en</strong>nes. Quelque temps après,le glacier s'arrêta, se dégonfla peu-à-peu, et vers l'an 1819 on le vitcomm<strong>en</strong>cer à reculer; et à cette heure un grand espace de terrain couvertde gravier et de grosses pierres sépare les glaces des terres labourables.Les habitants de la vallée de Chamonix prét<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t avoir observé quedès l'année 18il les glaciers ont comm<strong>en</strong>cé à croître, et qu'ils ont continuéà le faire jusqu'<strong>en</strong> 1817. Dans cette contrée comme dans plusieurs autresdu Tyrol et de la Suisse, on trouve accréditée l'opinion que les glaciers1. L'exemple le plus frappant d'augm<strong>en</strong>tation subite qui me soit connu est celui du glacier d'AroIa, au fondde la vallée d'Heir<strong>en</strong>s, dans le Vallais. En 1816, il s'avança de près d'une demi-lieue dans l'espace de six mois.Les habitants assur<strong>en</strong>t qu'il s'emparait souv<strong>en</strong>t de 5 ou 6 toises dans les vingt-quatre heures, et que son mouvem<strong>en</strong>tétoit accompagné d'un bruit semblable a celui du tonnerre.15.


augm<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t p<strong>en</strong>dant sept ans, et décroiss<strong>en</strong>t p<strong>en</strong>dant les sept annéessuivantes. Mais la vîtesse de leur accroissem<strong>en</strong>t dép<strong>en</strong>d de plusieurscirconstances: la quantité de neige tombée <strong>en</strong> est une; et il faut y joindrel'inclinaison du sol que parcour<strong>en</strong>t les glaces, et la distance d'où ellesvi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t; c'est ainsi que Inexpéri<strong>en</strong>ce nous appr<strong>en</strong>d que le glacier desBossons se retire, tandis que celui des Bois augm<strong>en</strong>te <strong>en</strong>core; et <strong>en</strong> effetce dernier avança jusqu'<strong>en</strong> 1821.On passe le glacier des Bossons <strong>en</strong> trois <strong>en</strong>droits; <strong>en</strong> haut, <strong>en</strong> escaladantle Mont-Blanc pour arriver aux grands Malets; <strong>en</strong> bas, on s'amuseà faire le trajet pour s'<strong>en</strong> retourner par une autre route au Prieuré.


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ÉGLISE DECHAMONIX.Vers la fin du onzième siècle (1090), le comte Aymon de G<strong>en</strong>èveayant fait don de la vallée aux Bénédictins de Saint-Michel de la Clusaz,ils y fondèr<strong>en</strong>t cette église; et c'est de ce temps que date le nom dePrieuré, qu'on donne <strong>en</strong>core aujourd'hui au bourg de Chamonix. Ces lieux,à-peu-près incultes dans ces temps reculés, vir<strong>en</strong>t peu-à-peu leur populations'augm<strong>en</strong>ter. Bi<strong>en</strong>tôt les habitants eur<strong>en</strong>t des démêlés avec leurssouverains temporels et spirituels; mais il paroît que ce n'est que versl'an 1519, lorsque le Prieuré fut réuni à la m<strong>en</strong>se capitulaire de l'églisede Saint-Jacques de Sall<strong>en</strong>che, que les bonnes g<strong>en</strong>s de la vallée fur<strong>en</strong>tvraim<strong>en</strong>t opprimés par leurs Seigneurs, qui se servir<strong>en</strong>t même, dans uneoccasion, de trois c<strong>en</strong>ts hommes, qu'ils fir<strong>en</strong>t v<strong>en</strong>ir de leur pays deSall<strong>en</strong>che. P<strong>en</strong>dant la révolution, ce petit pays fut incorporé à la France,avec le reste de la Savoye; et ce n'est qu'après la chute de Napoléon,qu'il est retourné sous la domination sarde.Cette contrée, presque ignorée du reste de l'Europe avant de Saussure,est de nos jours une des plus fréqu<strong>en</strong>tées par les amateurs d'une natureimposante et de scènes d'un grand effet. Depuis quelques années, lebourg s'est accru de plusieurs maisons; indép<strong>en</strong>damm<strong>en</strong>t des belles aubergesqu'il possède, on y trouve des cabinets d'histoire naturelle, des plans <strong>en</strong>relief de plusieurs contrées intéressantes des Alpes, un café, et même desbillards.Les habitants de la vallée sont observateurs scrupuleux des devoirs deleur religion; aucun guide ne partiroit le dimanche et les jours de fête avantd'avoir <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du la messe. Dernièrem<strong>en</strong>t un particulier qui n'avoit passuivi les usages de l'église, fut <strong>en</strong>terré sans cérémonie derrière la maisondu curé (1823). La paroisse de Chamonix est actuellem<strong>en</strong>t desservie parun curé et un chapelain.A la fête de l'Assomption, qui se célèbre au mois d'Août, il y a unegrande procession. Nous nous <strong>en</strong> sommes servis pour animer la vue quele lecteur a sous les yeux.Le sommet qu'on voit s'élever derrière l'église est celui du Brév<strong>en</strong>.16.


'IGiaSJH \W, CHAMONIX


LE PRIEURÉ ET LE MONT-BLANC.En se prom<strong>en</strong>ant le long de l'Arve, <strong>en</strong>tre le village des Prats (després ou prairies) et le Prieuré, le voyageur ne peut détacher ses regardsdu Mont-Blanc, qui se prés<strong>en</strong>te à lui avec tous ses détails. L'œil étonnés'arrête avec respect sur les éblouissants espaces qu'étale le Dôme duGoûté, il se tourne avec une sorte d'effroi sur les tours de glace et lescrevasses profondes du glacier des Bossons, il suit les sinuosités du grandplateau, et atteint le grand rocher rouge, d'où il semble qu'il n'y ait plusqu'un pas à faire pour arriver à la cime de cette fameuse montagne.Cette asc<strong>en</strong>sion est possible, pourvu qu'on ait la tête et la poitrine bonnes,et qu'on ne redoute pas les fatigues, les privations et les dangers attachésà cette <strong>en</strong>treprise. C'est alors qu'il faut, s'abandonner <strong>en</strong>tièrem<strong>en</strong>t àl'expéri<strong>en</strong>ce des guides. On compte dix-huit heures de marche suivie duPrieuré à la cime; la desc<strong>en</strong>te se fait <strong>en</strong> dix ou douze heures.Les premières personnes qui parvinr<strong>en</strong>t à la cime fur<strong>en</strong>t Jacques Balmat,surnommé depuis lors le Mont-Blanc et M. le docteur Paccard, tous deuxindigènes, et <strong>en</strong>core vivants. Le premier servit de guide, l'année suivante,à M. de Saussure. Depuis ce temps-là, plusieurs individus ont <strong>en</strong>treprisla même expédition; mais un petit nombre seulem<strong>en</strong>t, dont je donnerai lesnoms, l'ont conduite à son terme :1. Le docteur Paccard et Jacques Balmat, le 8 Août 1786.2. M. de Saussure, accompagné de 18 guides. Il se trouva sur Jesommet le 3 Août 1787.3. M. le chevalier de Beaufoix, anglais, <strong>en</strong> Août 17 87.Â. M. William Woodley, anglais, <strong>en</strong> Août 1788.5. M. le baron d'Hortz<strong>en</strong>, courlandais, et M. Forneret, de Lausanne,<strong>en</strong> Août 1802.6. M. Rodatz, de Hambourg, <strong>en</strong> Septembre 1812.7. M. le comte Mazoski, polonais, <strong>en</strong> Août 1817.17.


8. M. le docteur J. Ransselaer, et M. Howard, des États-unis, <strong>en</strong>Juillet 1819.9. M. Blundel, capitaine de marine, et son compagnon, anglais^ <strong>en</strong>Août 1819.. io. M. F. Clissold, écossais, <strong>en</strong> Août 1822.11. M. Jackson, anglais, <strong>en</strong> Août 1823.12. M. le docteur E. Clark et M. le capitaine Marckham Sharwil,anglais, <strong>en</strong> Août 1825.En 1809, sept habitants de Chamonix fur<strong>en</strong>t <strong>en</strong>semble au sommet; ilsavoi<strong>en</strong>t avec eux une fille nommée Marie Paradis, la seule personne deson sexe qui ait été sur la cime du Mont-Blanc.En 1811, Napoléon fit transporter sur le sommet une colonne de boiscomposée de plusieurs pièces, pour servir de signal. Trois ans après elleavoit disparu.En 1820 eut lieu la malheureuse t<strong>en</strong>tative du docteur Hamel. Le tortde n'avoir pas voulu écouter les conseils des guides coûta la vie à troisde ceux-ci, et exposa toute la société aux plus grands périls. On étoitparv<strong>en</strong>u jusqu'au grand plateau.»


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LA MER DE GLACE,VUE DU MONTANVERT.Les scènes qui att<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t le voyageur sur le Col de Balme, sur le Brév<strong>en</strong>,à la Flégère, sont grandes et imposantes, bi<strong>en</strong> que surpassées peut-êtrepar celles du Col de la Seigne et de l'Allée blanche; mais aucune nes'élève à la majestueuse grandeur de la vue dont on jouit sur le Montanvert(ou Mo?it=Envers). i Toutes les personnes qu'émeuv<strong>en</strong>t les beautés de lanature, se rappelleront avec plaisir ces vers de Delille où respire uneadmiration si bi<strong>en</strong> s<strong>en</strong>tie :„ Salut aux voyageurs dont l'active p<strong>en</strong>sé<strong>en</strong> Brûle de contempler cette mer courroucée„ Dont les solides flots couvr<strong>en</strong>t le Mont-Envers,„ Où Phœbus et sans force et Neptune est aux fers.„ Non, jamais, au milieu de ces grands phénomènes,„ De ces tableaux touchants, de ces terribles scènes,„ L'imagination ne laisse dans ces lieux„ Ou languir la p<strong>en</strong>sée, ou reposer les yeux."La mer de glace pr<strong>en</strong>d son origine à la réunion des trois grandsglaciers du Tâcul, de Léchaud et du Talèfre, au pied des Périades. Lesglaces du Talèfre étant plus sales, form<strong>en</strong>t ce qu'on appelle la veine noire,et celles du Tâcul la veine blanche; plus bas, à l'<strong>en</strong>droit où une partiede ses glaces se précipite des rochers des Mottets, elle reçoit le nom deglacier des Bois.On ne doit pas négliger de desc<strong>en</strong>dre à la mer de glace pourcontempler de près le beau bleu-verdâtre (cœrulewn) des crevasses, etles autres phénomènes qu'offr<strong>en</strong>t les glaciers.Les pâturages du Montanvert nourriss<strong>en</strong>t à peine trois ou quatre vacheset quelques chèvres. On n'appr<strong>en</strong>dra pas sans étonnem<strong>en</strong>t que les bestiauxqui pass<strong>en</strong>t vis-à vis, au Bayer, situé au pied de l'aiguille du Dru, sontobligés de passer et repasser la mer de glace. Quand les glaces augm<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t,le passage est plus difficile.1. Du bourg de Chamonix on peut arriver à l'hospice du Montanvert, après une marche non interrompuede deux heures ù deux heures et demie. Le s<strong>en</strong>tier ayant été amélioré il y a quelques années, on y va assez bi<strong>en</strong>18.


à dos (ie mulet. Arrivé à la fontaine du Caillet, oh a fait la moitié du chemin. Lorsqu'on a atteint la hauteur, lemagnifique tableau de la mer de glace, <strong>en</strong>cadré de fières aiguilles, s'offre tout-à-coup au spectateur étonné. Ladesc<strong>en</strong>te se fait presque toujours à pied, sur-tout si l'on pr<strong>en</strong>d le s<strong>en</strong>tier de la Filia.En 1784, M. Félix Desportes, résid<strong>en</strong>t de France auprès de la république de G<strong>en</strong>ève, ménagea un abricommode aux voyageurs, <strong>en</strong> faisant construire le petit pavillon, qu'on nomme l'hospice du Montanvert. Il étoitorné de glaces et meublé ; mais quelques malveillants l'ayant dévasté, on se borna aux réparations les plus nécessaires,au moy<strong>en</strong> d'une somme donnée par M. le Sénateur Doulcet Pontécoulant Ç1S03). Aujourd'hui ce pavillon sert autantaux bergers du lieu pour y exposer une petite collection de minéraux, de cristaux travaillés et de plantes, qu'auxétrangers pour s'y reposer. On peut juger du prix que mett<strong>en</strong>t les indigènes à la jouissance de ce pavillon, parla somme de huit à neuf c<strong>en</strong>ts francs qu'ils pai<strong>en</strong>t pour la saison. P<strong>en</strong>dant la révolution, toute la propriété étoit5 v<strong>en</strong>dre pour trois ou quatre c<strong>en</strong>ts francs.1. Aiguille du Moine.2. Le Bayer, base de l'aiguille du Dru.•Ì. Petites Jorasses.h. Grandes Jorasses.5. Monts Malets ou Maudits.G. Aiguille du Géant.7. Les Périades.S. Aiguille de Charmoz.y. Aiguille du Greppond.10. Glacier de la Lavange.11. Branche des glaciers de Léchaud et du Talèfre.12. Brandie du glacier du Tâcul.13. Veine noire de la Mer de glace.14. Veine blanche de la Mer de glace:15. Les Charmoz.


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VUE PRISE DU JARDIN.Ceux qui sont dans l'int<strong>en</strong>tion de visiter le Jardin (Courtil <strong>en</strong> languedu pays) font bi<strong>en</strong> de passer la nuit au Montanvert, de peur de sefatiguer trop et de ne pouvoir jouir à loisir, pressés par le temps. ' Ilfaut partir par un temps parfaitem<strong>en</strong>t beau, et de plus avoir la tête bonnepour passer les ponts et <strong>en</strong>suite les crevasses de la mer de glace. AuCouvercle, il y a aussi de mauvais pas.On ne négligera pas de s'approcher pour examiner ce que les habitantsappell<strong>en</strong>t moulins. On <strong>en</strong> trouve plusieurs très-grands <strong>en</strong> s'avançant versla jonction des trois glaciers. Ce sont des ruisseaux qui, ayant creusé leurlit dans la surface, s'<strong>en</strong>fonc<strong>en</strong>t tout-à-coup dans le glacier. L'homme leplus courageux ne peut se déf<strong>en</strong>dre d'une sorte de terreur <strong>en</strong> s'approchantde ces abymes. 2Vers le fond, la mer de glace devi<strong>en</strong>t unie; et l'on se promène surcet imm<strong>en</strong>se amas de glace et de neige avec un singulier plaisir, auquelcontribue sans doute l'air frais et délicieux qu'on y respire. L'aiguille duGéant prés<strong>en</strong>te une coupe extrêmem<strong>en</strong>t hardie et une élévation de 21 74 toises.Pour varier la route, je conseille de monter le long de la moraine duBér<strong>en</strong>ger, et de desc<strong>en</strong>dre par le Couvercle, ou vice-versâ. Arrivé auhaut, on a sous les yeux un nouveau bassin d'une grande ét<strong>en</strong>due. Versle fond, au pied de l'Aiguille Verte et des Courtes, on voit le Jardin,rocher aplati de forme triangulaire, qui se revêt p<strong>en</strong>dant la belle saisond'un peu de gazon, de mousse et de quelques fleurs alpines, dernierssignes de vie d'une nature qui n'étale que la mort aussi loin qu'on porteles regards. Un sil<strong>en</strong>ce profond règne dans ces lieux; il n'est interrompu1. La journée est de douze à quinze heures de marche, <strong>en</strong> partant de Chamonix.2. C'est dans un pareil moulin que tomba M. le pasteur Mouron, du Canton de Vaud, <strong>en</strong> 1821, dans lamer de glace de la vallée du Grindelwald. On peut admettre que dans certains <strong>en</strong>droits de ces vallées, les glacescombl<strong>en</strong>t une profondeur de quatre à cinq c<strong>en</strong>ts pieds.19.


de loin à loin que par le bruit sourd des avalanches, et le cri de quelquemarmotte solitaire.Le Mont-Blanc, vu d'ici, prés<strong>en</strong>te les formes les plus grandioses.A sa gauche on découvre l'aiguille marbrée, qui forme l'extrémité duCol du Géant, caché plus à gauche derrière la Noire et les Périades,par-dessus lesquelles l'aiguille du Géant s'élance vers les nues. À droitedu Mont-Blanc se fait voir le Mont-Blanc du Tâcul, et à leur pied leglacier de ce nom, et, tout-à-fait au bord, les rochers prolongés desCharmoz. Sur le devant à gauche une arête de rocs desc<strong>en</strong>d au Bér<strong>en</strong>ger,ainsi que le glacier du Talèfre, à droite est une partie du Jardin même,dont l'élévation au-dessus de la mer est de 14U toises.En desc<strong>en</strong>dant le Couvercle, on paiss<strong>en</strong>t <strong>en</strong> été une c<strong>en</strong>taine demoutons, on est frappé de l'aspect du Talèfre. Ce glacier n'est pasremarquable par de hautes tours de glaces, comme ceux des Bossons etdes Bois, mais par des crevasses profondes, dont l'<strong>en</strong>semble forme le pluseffrayant cahos.^Sur les différ<strong>en</strong>tes moraines de la mer de glace on r<strong>en</strong>contre souv<strong>en</strong>tdes chercheurs de cristaux, et plus rarem<strong>en</strong>t quelque chasseur de chamois.I


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SOURCE DE LARVERON.Entre les quatre ou cinq c<strong>en</strong>ts glaciers que l'on compte dans la chaînedes Alpes, il seroit difficile d'<strong>en</strong> trouver un plus intéressant que celui desBois. Il n'<strong>en</strong> est aucun du moins dont l'accès soit plus facile; car on peuts'<strong>en</strong> approcher de très près avec les chars-à-banc.L'arcade de glace qui se forme à l'embouchure du glacier, sur-toutvers la fin de l'été, est une des principales merveilles de la vallée deChamonix. i Elle s'élève souv<strong>en</strong>t à la hauteur de c<strong>en</strong>t pieds et plus, et salargeur est <strong>en</strong>core plus considérable. Ri<strong>en</strong> n'est plus frappant que lecontraste des morceaux de glace écroulés, d'une blancheur pareille à cellede la neige, avec la couleur transpar<strong>en</strong>te du plus beau bleu foncé etd'aiguë-marine de cette grotte <strong>en</strong>chantée.C'est du fond de cette voûte que jaillit l'eau furieuse de PArveron,qui <strong>en</strong>traîne souv<strong>en</strong>t de grands fragm<strong>en</strong>ts de rochers, des glaçons, et toutce qui met obstacle à son passage. C'est sur-tout quand on passe sur lespetits ponts jetés sur le torr<strong>en</strong>t^ qu'on est frappé de l'impétuosité et de laforce de ses eaux destructives.On peut s'approcher de la voûte, on peut même y <strong>en</strong>trer si les eauxle permett<strong>en</strong>t; mais ce n'est jamais sans danger. Les personnes qui veul<strong>en</strong>tle t<strong>en</strong>ter doiv<strong>en</strong>t le faire de bon matin, avant que la chaleur ait comm<strong>en</strong>céà amollir les glaces. zDans les années froides, la voûte est moins considérable ; sa formed'ailleurs varie non-seulem<strong>en</strong>t à chaque saison, mais tous les quinze jours.Une vaste ét<strong>en</strong>due de terrain devant le glacier est couverte et dévastéepar de gros blocs de granit et une imm<strong>en</strong>se quantité de gravier, qui,charriés par les glaciers, desc<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t des arêtes les plus reculées.1. Il y a une lieue du bourg de Chamonix à la Source. Ordinairem<strong>en</strong>t les personnes qui ont visité le MontanvertSe r<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t à la Source <strong>en</strong> desc<strong>en</strong>dant le s<strong>en</strong>tier de la Filia, chemin un peu pénible, qui ne se fait qu'à pied.2. En 1797, MM. Maritz de G<strong>en</strong>ève fur<strong>en</strong>t les victimes d'une curiosité imprud<strong>en</strong>te. Us avoi<strong>en</strong>t négligéde se retirer <strong>en</strong> lieu sûr au mom<strong>en</strong>t de la chîite d'une grande masse de glaçons.«20.


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GLACIER DES BOIS.En arrivant au village des Prats, on jouit du plus beau point de vuequi prés<strong>en</strong>te l'<strong>en</strong>semble de ce glacier. On ne peut se lasser d'admirerl'obélisque du Dru 1 et l'arrête hérissée de l'Aiguille Verte et du Bochard,<strong>en</strong>tre laquelle et le Montanvert les glaces desc<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t, pareilles à un grandfleuve dont les ondes auroi<strong>en</strong>t été susp<strong>en</strong>dues tout d'un coup par une forceinconnue.P<strong>en</strong>dant toute l'année^ mais principalem<strong>en</strong>t dans la saison des chaleurs,une partie des glaces se précipite au bas des rochers des Mottets, et l'oncroiroit voir de superbes cascades; les quartiers de glace, <strong>en</strong> se brisantcontre les rochers, font un bruit pareil à celui du tonnerre. 2Il arrive - quelquefois que les glaces s'étant plus fortem<strong>en</strong>t assisesp<strong>en</strong>dant l'hiver, obstru<strong>en</strong>t le canal ordinaire par où s'échapp<strong>en</strong>t les eauxde l'Arveron, et les contraign<strong>en</strong>t de chercher une issue par-dessus lesrochers des Mottets. Ce spectacle, qui est fort beau, ne se fait voir quep<strong>en</strong>dant quelques semaines du printemps.Le glacier pr<strong>en</strong>d son nom du village situé à ses pieds, et qu'il am<strong>en</strong>acé déjà plus d'une fois. En 1821 il s'avança jusqu'à vingt pas d'unemaison du village; les habitants consternés prir<strong>en</strong>t le parti d'abandonnerleurs demeures; mais le glacier respecta pour cette fois ces limites_, et dèslors il comm<strong>en</strong>ça à se retirer l<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t.Un rocher, garni à son revers d'une petite forêt de sapins, sert deboulevard au village; sans cette déf<strong>en</strong>se il y a long-temps qu'il auroit étér<strong>en</strong>versé de fond <strong>en</strong> comble; car au comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t du siècle passé, lesglaces dépassèr<strong>en</strong>t même la grande moraine qui s'ét<strong>en</strong>d de l'aiguille deBochard jusqu'à ce rocher, et se répandir<strong>en</strong>t du côté des Tines jusqu'à la1. Dru, <strong>en</strong> patois du pays, veut dire comique, gai.2. C'est sur la W<strong>en</strong>ger Alp <strong>en</strong> face de la Jungfrau qu'on a le mieux l'occasion de voir presque régulièrem<strong>en</strong>tles plus grandes et les plus belles avalanches de ce g<strong>en</strong>re.21.


oute où l'on passe maint<strong>en</strong>ant; la trace <strong>en</strong> est <strong>en</strong>core visible. Les g<strong>en</strong>sdu pays assur<strong>en</strong>t que le glacier ne se mit <strong>en</strong> devoir de se retirer qu'aprèsavoir été exorcisé par les prêtres.On compte de dix-sept à dix-huit glaciers qui desc<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t immédiatem<strong>en</strong>tdu Mont-Blanc.Le miel des Bois est réputé le meilleur de la vallée.On voit croître ici des pommiers, dans le voisinage d'un hiver éternel.


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À LAFLÉGÈRE.La vue dont on jouit de la croix de Flégère est, <strong>en</strong> quelque sorte,la combinaison de celles du Montanvert et du Brév<strong>en</strong>; elle compr<strong>en</strong>d<strong>en</strong>semble la mer de glace et le Mont-Blanc. Le chemin qui y conduitn'est ni plus pénible ni plus long que celui qui mène à l'Hospice duMontanvert; ce site est égalem<strong>en</strong>t peu fréqu<strong>en</strong>té, et la petite maison élevéeil y a peu d'années pour la commodité des voyageurs reste déserte.À une distance de dix minutes derrière la croix, dans un <strong>en</strong>foncem<strong>en</strong>t,se trouv<strong>en</strong>t les premiers chalets; les seconds sont une bonne demi-lieueplus haut. C<strong>en</strong>t vaches paiss<strong>en</strong>t à l'<strong>en</strong>tour p<strong>en</strong>dant neuf ou dix semaines.Ces pâturages manqu<strong>en</strong>t d'eau; on est obligé de l'am<strong>en</strong>er d'une grandedistance.Les Aiguilles Rouges élèv<strong>en</strong>t au-dessus des seconds chalets leursrochers arides habités par des chamois. Ces animaux, qu'on voyoit parc<strong>en</strong>taines avant l'inv<strong>en</strong>tion des armes à feu, sont plus rares de nos jours;cep<strong>en</strong>dant on <strong>en</strong> trouve <strong>en</strong>core des troupeaux de vingt à tr<strong>en</strong>te. Iln'arrive guère au voyageur d'<strong>en</strong> apercevoir; s'il <strong>en</strong> découvrait, ce seraitdans la course du Jardin. i Les bouquetins sont beaucoup plus rares<strong>en</strong>core; les rochers et les précipices du revers méridional de la chaîne duMont-Blanc sont leur séjour favori. Il y a quelques années qu'on montraitun jeune bouquetin vivant, au Prieuré; mais il mourut bi<strong>en</strong>tôt, n'ayant pusupporter sans doute un régime trop différ<strong>en</strong>t de celui dont jouiss<strong>en</strong>t cesanimaux dans l'état de liberté.La marmotte est indigène dans toute la Savoye. Dans la vallée deChamonix, elle habite les bases élevées des Aiguilles voisines du Mont-Blanc et des sommités voisines. Il est rare de voir un.aigle ou un vautour.Les loups et les ours ne séjourn<strong>en</strong>t pas dans ces montagnes ; et lorsqu'un deces animaux vi<strong>en</strong>t à s'égarer dans la vallée, on lui donne aussitôt la chasse.1. Jean Joseph Charlet, qui demeure à Arg<strong>en</strong>tière, est un des chasseurs les plus r<strong>en</strong>ommés de la vallée.Il lui est arrivé un jour de tuer trois chamois l'un après l'autre sans changer de place.22.


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LE COL DEBALME,VU DE LA VALLÉE D'ARGENTIÈRE.Le petit village qu'on remarque sur le second plan de cette vues'appelle les Isles; plus loin, sur la droite, se découvre le glacierd'Arg<strong>en</strong>tière; les hauteurs du Col de Balme termin<strong>en</strong>t le tableau.Au-delà de l'église d'Arg<strong>en</strong>tière, le chemin du Col tourne à droite;un s<strong>en</strong>tier qui tire à gauche conduit au village de Trèlechamp, et plusloin, après un petit col, introduit dans la Valorsine.En montant des Tines, on laisse sur la hauteur à droite le hameaudu Lavanché. Il tombe, presque tous les hivers, des <strong>en</strong>virons de cehameau, des avalanches qui barr<strong>en</strong>t pour un temps plus ou moins long laroute du Prieuré à Arg<strong>en</strong>tière. Au reste, ce lieu n'est pas le seul exposé.Dans toute l'ét<strong>en</strong>due de la vallée de Chamonix, il est peu d'<strong>en</strong>droits àl'abri de toute insulte; les avalanches, les eaux, les glaciers sont unesource continuelle de désastres, et les plus formidables <strong>en</strong>nemis de laprospérité et du repos de ses habitants. Les glaciers du Tour, d'Arg<strong>en</strong>tière,des Bossons et des Bois sont <strong>en</strong>tourés de vastes ruines. L'Arve et lesnombreux torr<strong>en</strong>ts qui se jett<strong>en</strong>t dans son lit ravag<strong>en</strong>t le fond de la vallée,et couvr<strong>en</strong>t les terres voisines d'un gravier stérile; ainsi celui des Favrans,<strong>en</strong> 1821, dévasta les prés du petit hameau du même nom, r<strong>en</strong>versa lesmaisons, et fit périr plusieurs personnes. Le lac du Tâcul s'étant vidéprécipitamm<strong>en</strong>t <strong>en</strong> Août 1820, l'Arveron charria des glaçons jusqu'-attPrieuré, et emporta presque tous les ponts jusqu'à Saint-Martin.La majeure partie des forêts qui garniss<strong>en</strong>t la p<strong>en</strong>te des montagnessont protégées contre la hache par une loi qui déf<strong>en</strong>d de les couper, àcause des avalanches. Dans Phiver de 1817 à 1818, une avalanchedesc<strong>en</strong>due du Brév<strong>en</strong> arriva jusqu'au bourg.L'Arve, qui n'est pas <strong>en</strong>core très-forte ici, pr<strong>en</strong>d sa source sur leshauteurs du Col de Balme; ses principaux r<strong>en</strong>forts lui vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t des glaciersdu Tour, d'Arg<strong>en</strong>tière et des Bois, et d'une foule de petits ruisseaux. Leseaux qui sont bourbeuses et blanchâtres, sur-tout dans la saison chaude,charri<strong>en</strong>t alors une quantité prodigieuse de gravier, et sont d'une grandeimpétuosité.23.


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ÉGLISED'ARGENTIÈRE.À la chapelle de Tines, la vallée de Chamonix paraît vouloir sefermer; mais un peu plus loin, <strong>en</strong> remontant le cours de l'Arve, on voits'ouvrir un passage à côté de la rivière qui mugit dans un ravin profond.Vers le haut de la montée, le paysage pr<strong>en</strong>d un caractère plus austère; lavégétation est plus pauvre; 1 au-delà d'Arg<strong>en</strong>tière, à chaque pas, pourainsi dire, on la voit diminuer; et avant même d'être arrivé au Tour, quiest le dernier village, on ne r<strong>en</strong>contre plus ni arbre ni arbuste.À Arg<strong>en</strong>tière, et plus <strong>en</strong>core au Tour, les habitants ont coutume derecueillir <strong>en</strong> été le sable et les terres que l'Arve charrie; et, au retourdu printemps, ils éparpill<strong>en</strong>t ces terres sur la neige pour qu'elle fonde pluspromptem<strong>en</strong>t. Ils appell<strong>en</strong>t cela terrasser. Cette opération est trèsefficace; on m'a dit que dans une belle journée on a vu la neige diminuerde six pouces, quelquefois même d'un pied. Mais aussi la quantité d<strong>en</strong>eige qui tombe au Tour est extraordinaire. Dans les hivers rigoureux,elle forme sur les toîts de ce village une couche de près de quatorze pieds.Au Col de Balme, les chalets rest<strong>en</strong>t <strong>en</strong>sevelis sous la neige jusqu'au moisde Mai; et les indigènes assur<strong>en</strong>t qu'elle s'<strong>en</strong>tasse par fois sur le terraindu passage à la hauteur redoutable de 24 à 30 pieds. 2Les habitants du Tour et des villages voisins pass<strong>en</strong>t pour les plusaisés de la vallée; cela peut s'expliquer par leur g<strong>en</strong>re de vie, qui leurprés<strong>en</strong>te peu d'occasions de dép<strong>en</strong>ses.Le Tour est situé immédiatem<strong>en</strong>t au pied des pâturages qui s'élèv<strong>en</strong>tvers le Col de Balme.1. À Arg<strong>en</strong>tière, un cerisier est une rareté.2. L'hiver de 1824 à 1825 fut très neigeux. Des personnes qui passèr<strong>en</strong>t dans cette saison la montagne duGrimsel, observèr<strong>en</strong>t qu'aux <strong>en</strong>virons d'une grande pierre nommée Hallebardcnstein, qui se trouve à côté duchemin, la neige s'étoit élevée à la hauteur de 21 pieds.24.


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LA VALLÉE DE CHAMONIX,VUE DU COL DE BALME.Le voyageur qui pénètre par cette route dans la vallée de Chamonix,oublie les fatigues du voyage à l'aspect imprévu du paysage qui se dérouledevant ses yeux; et <strong>en</strong> ressortant de ce même côté., il emporte avec luiun profond souv<strong>en</strong>ir du point d'adieu de cette intéressante vallée.La vue, qui est très-belle du côté de la Savoye est bornée du côtéde la Suisse par la Forclaz et les hauteurs qui l'avoisin<strong>en</strong>t. Pour embrasserun plus vaste horizon, il nous faut monter sur la hauteur à gauche du Col(<strong>en</strong> v<strong>en</strong>ant de Chamonix). Quinze ou vingt minutes nous suffiront pouratteindre ce point de vue, d'où va s'offrir à l'œil un nouvel horizon, formédu Buet, d'une chaîne de rochers qui se prolonge jusqu'à la d<strong>en</strong>t du Midi,de la d<strong>en</strong>t de Mordes à large face, et de la chaîne des Alpes qui sépar<strong>en</strong>tle Vallais du Canton de Berne; du côté opposé, Pierre-à-Vue se faitremarquer. La Forclaz et les rochers de la croix de fer interdis<strong>en</strong>t auxregards la plaine du Vallais. ' C'est du haut de ces rochers que seprécipita un jeune Zuricois, Escher von Berg, <strong>en</strong> 1791. Le petit lac deCotogne s'ét<strong>en</strong>d à nos pieds, du côté de la Valorsine.Les pâturages de Balme (<strong>en</strong> patois les Bannies, ce qui signifie lesabris) v et ceux de Charamillan, pass<strong>en</strong>t pour les meilleurs de la vallée.Les premiers nourriss<strong>en</strong>t 160, les seconds 70 vaches.jusqu'à Sion.1. Cette plaint: se déploie aux yeux du voyageur lorsqu'il desc<strong>en</strong>d la Forclaz, et laisse pénétrer son regard25.


1. Aiguille Verte.2. Aiguille du Dru.3. Aiguille du Bochard.4 Glacier du Tour.5. Aiguille Marbrée.6. Aiguille de Charmoz.7. Aiguille du Greppond.8. Aiguille de Blaitière ou du Plan.£>. Aiguille du Midi.10. Le Mont-Blanc du Tâcul.11. Aiguille qui n'a pas de nom.12. Le Mont-Blanc.13. Dôme du Goûté.îi. Aiguille du Goûté.15. Le grand Plateau.16. Rochers des grands et petits Mulets.17. Glacier des Bossons.18. Montagne de la Côte.19- Montagne des Féaux ou de Taconaz.20. Montagne de la Gria.21. Mont Lâcha.22. Montagne de Tricot.23. Aiguille de Bionassay.24. Le Brév<strong>en</strong>.25. Bourg de Chamonix.26. Village des Prats.27. L'Arveron.28. L'Arve.29. Hameau des Isles.30. Hameau voisin du Tour.


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IPANORAMA DU BRÉVEN.J'ai choisi le panorama du Brév<strong>en</strong> <strong>en</strong>tre les différ<strong>en</strong>ts que je possède,parce qu'il donne le mieux les détails de la chaîne du Mont-Blanc, telqu'on le voit ordinairem<strong>en</strong>t, et qu'il prés<strong>en</strong>te, si je puis m'exprimer ainsi,la face de ce colosse imposant.À l'aide de ces contours, il sera aisé de reconnoitre dans la plupartdes vues les différ<strong>en</strong>tes aiguilles.J'ai ajouté la hauteur, <strong>en</strong> toises, prise au-dessus de la mer, de tousles points intéressants, cette manière de la marquer étant la plus usitéedans ces contrées. Le sommet du Brév<strong>en</strong> est élevé de 13 0 6 toises.En montant par le Planprat, chalet situé à-peu-près aux deux tiersde la montagne, on a trois heures et demie ou quatre heures de marcheà faire. 1 En sortant du bourg, on suit le s<strong>en</strong>tier de la Molaz, villagesitué précisém<strong>en</strong>t au-dessous du Brév<strong>en</strong>, et de là une bande dégarnie debois s'élevant vers les rochers du sommet; du Planprat on arrive par lesEscaliers et une p<strong>en</strong>te rapide au pied d'une espèce de couloir appeléCheminée, passage assez difficile; et de là on parvi<strong>en</strong>t au sommet <strong>en</strong>passant sur des débris de rochers.A l'opposé de la chaîne du Mont-Blanc, la vue s'ét<strong>en</strong>d sur les montsde Mégève, les <strong>en</strong>virons de Sall<strong>en</strong>che, les montagnes du Cœur, du Four,de Duran, les aiguilles de Var<strong>en</strong>s, les rochers des Fis et d'Anterne, leBuet et les aiguilles rouges. On voit, du côté de Servoz, le petit lac duBrév<strong>en</strong>, dans les pâturages de Calaveiran.1. Il est assez difficile, dans des pays montagneux, de fixer les distances, la desc<strong>en</strong>te se faisant toujoursbi<strong>en</strong> plus vite que la montée. Il peut arriver qu'on emploie jusqu'au double de temps pour la dernière. J'ai faitl'expéri<strong>en</strong>ce qu'<strong>en</strong> montant d'un pas ordinaire et sans s'arrêter, on s'élève de 1000 pieds jusqu'à deux c<strong>en</strong>ts toisespar heure, pourvu toutefois que le chemin ne soit pas trop mauvais.26.


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