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Droit de la consommation et surendettement - Barreau du Québec

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LE JOURNAL – BARREAU DU QUÉBEC Janvier 2012 PAGE 3<strong>Droit</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>consommation</strong> <strong>et</strong> suren<strong>de</strong>ttementProtéger les plus vulnérablesSuite <strong>de</strong> <strong>la</strong> page 1Crédit 101M me Roussin croit qu’il y a un manque d’é<strong>du</strong>cation enmatière <strong>de</strong> finances personnelles : les gens ne connaissentpas ou ne comprennent pas certaines informations liéesà leur crédit. « Ils ne savent pas toujours les taux d’intérêtsur leur carte <strong>de</strong> crédit, ne savent pas qu’en payantseulement le montant minimum sur leur sol<strong>de</strong>, <strong>de</strong>s intérêtss’accumulent. Mais il ne faut pas tout rem<strong>et</strong>tre entre lesmains <strong>de</strong>s consommateurs. La responsabilité est aussi<strong>du</strong> côté <strong>de</strong>s commerçants. » M me Roussin s’indigne <strong>de</strong>constater que pour c<strong>et</strong> aspect où le manque d’é<strong>du</strong>cationest criant, les gouvernements coupent les coursd’économie au secondaire. « C’est à contre-courant <strong>de</strong> cequi se passe. »Malheureusement, note M me Roussin, il n’y a pas <strong>de</strong> solutionsmiracles au suren<strong>de</strong>ttement. « Pour les consommateursaux prises avec <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong> finances personnelles,les ACEF (Association coopérative d’économie familiale)offrent <strong>de</strong>s cours sur le budg<strong>et</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong>s consultationsbudgétaires indivi<strong>du</strong>elles. La première chose à faire estd’établir un budg<strong>et</strong> : il faut savoir où va l’argent. On nes’aperçoit pas toujours <strong>de</strong> ce que l’on dépense. »Un peu d’histoireDevant c<strong>et</strong>te situation, le gouvernement provincial arécemment proposé son proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> loi 24, soit <strong>la</strong> Loivisant principalement à lutter contre le suren<strong>de</strong>ttement<strong>de</strong>s consommateurs <strong>et</strong> à mo<strong>de</strong>rniser les règles re<strong>la</strong>tivesau crédit à <strong>la</strong> <strong>consommation</strong>. Membres <strong>du</strong> Comité sur<strong>la</strong> protection <strong>du</strong> consommateur <strong>du</strong> <strong>Barreau</strong> <strong>du</strong> <strong>Québec</strong>,M es Yves Lauzon, Ad.E. <strong>et</strong> Michel Deschamps, Ad.E.se sont penchés sur ce proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> loi qui apportera <strong>de</strong>smodifications à <strong>la</strong> Loi sur <strong>la</strong> protection <strong>du</strong> consommateur(LPC). M e Lauzon rappelle que <strong>la</strong> LPC existe <strong>de</strong>puis 1971<strong>et</strong> qu’elle n’avait été revue que brièvement en 1978 avantque le gouvernement provincial manifeste son intention<strong>de</strong> <strong>la</strong> revoir en profon<strong>de</strong>ur, en 2006. C’est à ce moment« Les gens économisent <strong>de</strong> moins en moins <strong>et</strong> ils doivent avoir recours au crédit lorsd’une dépense imprévue. Mais souvent, les gens n’épargnent pas, car ils n’en ontpas les moyens... »M me Sophie Roussinqu’une première série <strong>de</strong> modifications y a été apportée,tout d’abord concernant les contrats à distance <strong>et</strong> lesc<strong>la</strong>uses d’arbitrage. Ensuite, en 2009, <strong>de</strong>s amen<strong>de</strong>mentsconcernant <strong>la</strong> téléphonie cellu<strong>la</strong>ire ont été adoptés.En 2011, <strong>la</strong> troisième phase <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>rnisation <strong>de</strong> <strong>la</strong> LPC a étéamorcée, notamment pour lutter contre le suren<strong>de</strong>ttement<strong>de</strong>s consommateurs.Plusieurs mesures existent déjà à <strong>la</strong> LPC pour protégerles consommateurs contre le suren<strong>de</strong>ttement, mais cesmesures ne semblent pas suffisantes. Pour M e Deschamps,il doit cependant y avoir un équilibre entre l’encadrement<strong>de</strong>s pratiques <strong>de</strong>s commerçants, dont certains encouragent<strong>de</strong> façon in<strong>du</strong>e l’octroi <strong>de</strong> crédit, <strong>et</strong> <strong>la</strong> con<strong>du</strong>ite <strong>de</strong>sconsommateurs, qui font souvent preuve d’indiscipline<strong>et</strong> d’insouciance.Innover pour mieux protégerLe proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> loi 24 va plus loin que les lois <strong>de</strong> mêmenature au Canada. Au chapitre <strong>de</strong>s mesures novatrices, leproj<strong>et</strong> <strong>de</strong> loi prévoit que le titu<strong>la</strong>ire d’une carte <strong>de</strong> crédit<strong>de</strong>vra verser un paiement minimum <strong>de</strong> 5 % <strong>de</strong> son sol<strong>de</strong>,chaque mois. « Présentement, aucune mesure n’existe àc<strong>et</strong> eff<strong>et</strong> <strong>et</strong> plusieurs ém<strong>et</strong>teurs prévoient seulement unpaiement minimum <strong>de</strong> 2 %, ce qui alourdit à long termele far<strong>de</strong>au <strong>de</strong>s consommateurs », informe M e Deschamps.C<strong>et</strong>te mesure novatrice ne viserait toutefois qu’unnombre restreint <strong>de</strong> consommateurs, ajoute-t-il.En eff<strong>et</strong>, le Mouvement <strong>de</strong>s caisses Desjardins,dans son mémoire à <strong>la</strong> commission parlementaire,mentionne que « 64 % <strong>de</strong>s détenteurs <strong>de</strong> cartes <strong>de</strong>crédit au Canada acquittent <strong>la</strong> totalité <strong>de</strong> leur(s)compte(s) <strong>de</strong> carte(s) <strong>de</strong> crédit avant <strong>la</strong> date d’échéance<strong>et</strong> s’en servent donc essentiellement comme carte(s)<strong>de</strong> paiement plutôt que comme carte(s) <strong>de</strong> crédit.Suite page 7


LE JOURNAL – BARREAU DU QUÉBEC Janvier 2012 PAGE 7<strong>Droit</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>consommation</strong> <strong>et</strong> suren<strong>de</strong>ttementProtéger les plus vulnérablesSuite <strong>de</strong> <strong>la</strong> page 3De plus, 93 % <strong>de</strong> ceux qui n’acquittent pas le sol<strong>de</strong>en entier déc<strong>la</strong>rent verser une somme supérieureau paiement minimum requis. » On vise donc, par c<strong>et</strong>temesure, une clientèle restreinte, probablement plusvulnérable <strong>et</strong> moins avisée, signale M e Deschamps.Une autre mesure, en vigueur dans certains pays européens,est l’obligation, pour le commerçant, avant <strong>de</strong> consentirun crédit, <strong>de</strong> prendre <strong>de</strong>s mesures visant à vérifier<strong>la</strong> capacité <strong>de</strong> l’emprunteur <strong>de</strong> rembourser le crédit<strong>de</strong>mandé ou <strong>de</strong> remplir ses obligations. M e Deschampssouligne toutefois que c<strong>et</strong>te disposition soulève <strong>de</strong>sdifficultés d’interprétation <strong>et</strong> d’application, notammentquant à savoir s’il s’agit d’une obligation <strong>de</strong> résultatou <strong>de</strong> moyens. Le <strong>Barreau</strong> recomman<strong>de</strong> que <strong>la</strong> LPCcontienne <strong>de</strong>s balises perm<strong>et</strong>tant aux commerçants <strong>de</strong>savoir avec certitu<strong>de</strong> qu’ils respectent leurs obligations.Consommateurs vulnérablesPar ailleurs, une disposition prévoit qu’en cas <strong>de</strong> forcemajeure, un consommateur pourrait s’adresser au tribunalpour faire modifier les modalités <strong>du</strong> contrat. « C<strong>et</strong>tedisposition ne perm<strong>et</strong> pas <strong>de</strong> changer <strong>la</strong> nature <strong>de</strong>l’obligation <strong>du</strong> consommateur, mais lui perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> faireface aux contrecoups <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie. C<strong>et</strong>te mesure démontreune volonté <strong>de</strong> se démarquer un peu <strong>du</strong> droit commun<strong>et</strong> <strong>de</strong> protéger le consommateur vulnérable », soutientM e Lauzon.Le proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> loi tente également <strong>de</strong> mieux encadrerles publicités fausses ou trompeuses, par lesquelles onavance que le crédit peut améliorer <strong>la</strong> condition financière<strong>du</strong> consommateur. « On <strong>la</strong>isse croire à quelqu’un qui a<strong>de</strong> nombreuses <strong>de</strong>ttes qu’il s’agit d’une solution miracle,alors que les consommateurs vont contracter <strong>de</strong>s prêts<strong>de</strong> consolidation à <strong>de</strong>s taux d’intérêt faramineux, quipeuvent les con<strong>du</strong>ire à <strong>la</strong> faillite. L’eff<strong>et</strong> est totalement àl’inverse <strong>de</strong> celui recherché par le consommateur », souligneM e Lauzon.Par le proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> loi 24, il serait également interdit d’offrirun bien ou un service pour inciter un consommateur à<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r une carte <strong>de</strong> crédit. M e Lauzon croit qu’onvise sûrement un pourcentage infime <strong>de</strong> personnes quise <strong>la</strong>isseraient ainsi convaincre, mais <strong>la</strong> LPC tient encoreici à protéger une clientèle plus vulnérable. Parmi lesautres mesures, mentionnons également l’interdiction <strong>de</strong>consentir une limite <strong>de</strong> crédit supérieure à celle <strong>de</strong>mandéepar le consommateur <strong>et</strong> l’interdiction <strong>de</strong> faire parvenir auLe <strong>Barreau</strong> a présenté ses commentaires en Commission parlementaire le27 octobre <strong>de</strong>rnier, le mémoire ayant été accueilli favorablement par les députés,selon M es Deschamps <strong>et</strong> Lauzon.Le <strong>Barreau</strong> ne s’oppose pas à <strong>la</strong> lutteau suren<strong>de</strong>ttement <strong>et</strong> les critiquesformulées ne portent pas sur lesprincipes sous-jacents <strong>du</strong> proj<strong>et</strong> <strong>de</strong>loi. Cependant, le <strong>Barreau</strong> croit que <strong>la</strong>LPC, comme toute loi, doit être c<strong>la</strong>ire<strong>et</strong> facile d’application.consommateur qui n’en a pas fait <strong>la</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong> par écrit undocument qui, par sa signature, lui perm<strong>et</strong> d’utiliser uncrédit alors offert.Ouverture <strong>du</strong> <strong>Barreau</strong>M e Lauzon témoigne que le <strong>Barreau</strong> <strong>du</strong> <strong>Québec</strong> atoujours été ouvert à <strong>la</strong> mo<strong>de</strong>rnisation <strong>de</strong>s lois pourtenir compte <strong>de</strong> l’évolution <strong>de</strong> <strong>la</strong> société. « Par exemple,lors <strong>de</strong> l’adoption <strong>de</strong> <strong>la</strong> LPC, l’un <strong>de</strong>s grands enjeuxétait les ven<strong>de</strong>urs itinérants. Des gens, impulsivement,ach<strong>et</strong>aient <strong>de</strong>s biens <strong>et</strong> ensuite regr<strong>et</strong>taient leur geste.La LPC avait instauré un régime perm<strong>et</strong>tant, seloncertaines conditions, d’annuler ce type <strong>de</strong> contrat pourprotéger les consommateurs vulnérables. Quarante ansplus tard, on s’est attaqué à <strong>la</strong> téléphonie cellu<strong>la</strong>ire, quin’existait pas alors. La culture québécoise nous perm<strong>et</strong>d’être plus attentifs aux consommateurs lesplus vulnérables <strong>et</strong> le <strong>Barreau</strong> a toujours étéd’accord avec c<strong>et</strong>te approche. »Quelques bémolsLe <strong>Barreau</strong> a présenté ses commentairesen Commission parlementairele 27 octobre <strong>de</strong>rnier, le mémoireayant été accueilli favorablement parles députés, selon M es Deschamps<strong>et</strong> Lauzon. Le <strong>Barreau</strong> ne s’opposepas à <strong>la</strong> lutte au suren<strong>de</strong>ttement<strong>et</strong> les critiques formulées ne portentpas sur les principes sous-jacents <strong>du</strong>proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> loi, explique M e Deschamps.Cependant, le <strong>Barreau</strong> croit que <strong>la</strong> LPC,comme toute loi, doit être c<strong>la</strong>ire <strong>et</strong>facile d’application. « Il y a déjà,dans <strong>la</strong> loi actuelle, un grand nombred’ambigüités qui donnent lieu à<strong>de</strong>s litiges n’étant à l’avantage <strong>de</strong>personne. Que l’on soit d’accord ounon avec <strong>la</strong> Loi, on <strong>de</strong>vrait savoircomment s’y conformer. Le <strong>Barreau</strong>a donc recommandé que certaines<strong>de</strong>s nouvelles dispositionssoient c<strong>la</strong>rifiées. On a ainsisouligné que l’eff<strong>et</strong> combiné<strong>de</strong>s nouvelles dispositions aveccelles actuellement présentesdans <strong>la</strong> LPC crée <strong>de</strong>s difficultésd’interprétation. »Le <strong>Barreau</strong> ajoute aussi qu’il est difficile d’évaluer <strong>la</strong> portée<strong>de</strong> plusieurs mesures <strong>du</strong> proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> loi puisqu’elles ser<strong>et</strong>rouveront dans un texte réglementaire qui n’est pasencore adopté. Le <strong>Barreau</strong> croit qu’on ne <strong>de</strong>vrait pasdéléguer trop <strong>de</strong> pouvoirs réglementaires au gouvernement<strong>et</strong> que les principes <strong>de</strong>vraient se r<strong>et</strong>rouver dans <strong>la</strong> loi <strong>et</strong>non dans <strong>de</strong>s règlements. Par exemple, M e Deschamps,rappelle, au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> l’obligation <strong>du</strong> commerçant <strong>de</strong>vérifier le crédit <strong>du</strong> consommateur, que le <strong>Barreau</strong>a suggéré que <strong>la</strong> mise en vigueur <strong>de</strong> c<strong>et</strong> article soitreportée jusqu’à ce que les grands paramètres <strong>de</strong> c<strong>et</strong>teobligation <strong>de</strong> vérification soient établis dans <strong>la</strong> loi.Le <strong>Barreau</strong> croit finalement que l’harmonisation <strong>de</strong> <strong>la</strong> LPCavec le Co<strong>de</strong> civil <strong>du</strong> <strong>Québec</strong> serait souhaitable, en ce quiconcerne notamment <strong>la</strong> notion <strong>de</strong> consommateur <strong>et</strong> lechamp d’application <strong>de</strong> <strong>la</strong> LPC.

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