1 INTRODUCTIONLe présent document évalue sommairementl'efficacité et l'innocuité d'une approche de guérisonde certaines fractures et complications defractures par un traitement d'<strong>ultrasons</strong> à faib<strong>le</strong>intensité (Exogen TM ). Cette note est l'adaptationd'un avis remis à la Société de l'assurance automobi<strong>le</strong>du Québec (SAAQ) au printemps de2003. Si l'avis comportait des informationspropres au contexte décisionnel de cet organisme,cette note technique vise un public pluslarge, comprenant entre autres <strong>le</strong>s professionnelsqui traitent des patients présentant descomplications de fractures. La recension desécrits scientifiques s'est terminée en avril 2003<strong>pour</strong> l'avis, et en septembre 2003 <strong>pour</strong> la présentenote technique.2 DESCRIPTION DE LA TECHNOLOGIELe stimulateur de croissance osseuse Exogenemploie des <strong>ultrasons</strong> de faib<strong>le</strong> intensité (lowintensityultrasound [LIUS], 30 mW par cmcarré d'intensité spatiotemporel<strong>le</strong> moyenne 1 ),alors que <strong>le</strong>s <strong>ultrasons</strong> utilisés <strong>pour</strong> <strong>le</strong> traitementdes b<strong>le</strong>ssures des tissus mous peuvent atteindreune intensité allant jusqu'à 3 000 mW par cmcarré [Medical Services Advisory Committee,2002, p. 3]. Le niveau d'énergie de l'appareilcorrespond à peu près à celui des <strong>ultrasons</strong>diagnostiques. Le traitement est utilisé à domici<strong>le</strong>à raison de 20 minutes par jour pendantplusieurs mois <strong>pour</strong> accélérer la guérison decertaines fractures. L'appareil est soit loué, soitacheté et jeté après la période d'utilisation. Lecoût total d'un traitement est d'environ 3 000 $ 2 .Au niveau clinique, la compagnie Smith &Nephew détient <strong>le</strong> monopo<strong>le</strong> mondial de cettetechnologie.et ce, à condition que ces fractures soient immobiliséespar un plâtre avec une réductionfermée, s'il y a lieu. Pour l'indication d'accélérationde la guérison de certaines fractures, Exogenest donc utilisé comme adjuvant du traitementstandard. En 2000, la FDA a ajoutél'indication d'absence de consolidation de fractures(non-union) à son autorisation [Center forDevices and Radiological Health, 2000]. Pourcette indication, Exogen est employé soit <strong>pour</strong>traiter des patients après que d'autres interventionsont échoué à consolider la fracture, soit<strong>pour</strong> prévenir des chirurgies additionnel<strong>le</strong>s.L'homologation canadienne comprend <strong>le</strong>smêmes indications que la FDA 3 .Aux États-Unis, la Food and Drug Administration(FDA) des États-Unis a autorisé l'utilisationde l'appareil <strong>pour</strong> la première fois en 1994, etce, <strong>pour</strong> <strong>le</strong>s indications suivantes :l'accélération de la guérison des fractures récentesdu radius distal avec déplacement postérieur(fractures de Col<strong>le</strong>s), etl'accélération de la guérison des fractures récentesdu tibia, fermées ou de stade I ouvertes,1. Spatial-averaged temporal-averaged intensity.2. Selon une <strong>le</strong>ttre du 20 février 2002 de Christina Woodside,directrice généra<strong>le</strong> de Smith & Nephew Canada, à Jacques Privé,vice-président de la SAAQ.3. Communication personnel<strong>le</strong> par courriel avec Dorothy Corbett,Santé Canada, 14 juil<strong>le</strong>t 2003.1
3 MODES D'ACTIONL'effet positif des <strong>ultrasons</strong> sur <strong>le</strong> processus deguérison fait l'objet de recherches depuis plusieursdécennies. Un certain nombre de modesd'action ont été proposés <strong>pour</strong> expliquer cet effet[Hadjiargyrou et al., 1998, tab<strong>le</strong>au 1]. La théoriedes micromouvements est la plus généra<strong>le</strong>mentacceptée [Pilla, 2002]. Il est établi que des stressmécaniques, sans aucun déplacement macroscopique,accélèrent la guérison des fractures. Cesmicromouvements seraient <strong>le</strong> principal moded'action des <strong>ultrasons</strong> [Medical Services AdvisoryCommittee, 2002; Pilla, 2002; Sun et al.,2001; Warden et al., 2001a], bien que l'on nesache pas comment ils agissent précisément.Il semb<strong>le</strong> n'exister aucune information sur <strong>le</strong>lien entre <strong>le</strong>s paramètres de stimulation (fréquence,intensité, interval<strong>le</strong>) et l'effet thérapeutique.Des recherches effectuées à partir d'unmodè<strong>le</strong> animal indiquent qu'un appareildiagnostique à <strong>ultrasons</strong> exerce éga<strong>le</strong>ment uneffet thérapeutique <strong>pour</strong> accélérer la guérisondes fractures [Heybeli et al., 2002].4 ÉPIDÉMIOLOGIE ET PHYSIOPATHOLOGIE DES FRACTURESAux États-Unis, <strong>le</strong> nombre annuel de fracturesest évalué à 5,6 millions, et 5 à 10 % d'entreel<strong>le</strong>s présenteraient des problèmes de consolidationou de cal vicieux (malunion) [Einhorn,1995]. En ce qui concerne la situation au Canadaet au Québec, il semb<strong>le</strong> qu'aucune étude de cetype n'ait été publiée. En 2001, la SAAQ a reçusept demandes de remboursement. Certainesfractures, dont cel<strong>le</strong>s du tibia et du scaphoïde,sont particulièrement sujettes aux problèmes deconsolidation.<strong>Les</strong> systèmes de classification des fracturesdifférencient <strong>le</strong>s fractures fermées des fracturesouvertes. Ces dernières sont définies commedes fractures qui communiquent avec des plaies,habituel<strong>le</strong>ment à proximité du foyer de fracture[Co<strong>le</strong> et McNally, 2002]. <strong>Les</strong> fractures ouvertessont habituel<strong>le</strong>ment classées selon <strong>le</strong> système deGustilo et Anderson, qui comporte trois niveauxde gravité. Le type I inclut <strong>le</strong>s fractures associéesà des plaies propres de moins de 1 cm, et<strong>le</strong> type II, <strong>le</strong>s fractures associées à des plaies deplus de 1 cm sans atteinte importante des tissusmous. Le type III, qui correspond à des fracturescausées par un impact à forte énergie, comprendtrois sous-types (IIIa, IIIb et IIIc) [Co<strong>le</strong> etMcNally, 2002].<strong>Les</strong> fractures des os longs, tel <strong>le</strong> tibia, sont souventassociées à des traumatismes multip<strong>le</strong>s.<strong>Les</strong> fractures dues à des accidents de la circulationsont généra<strong>le</strong>ment particulièrement graves,c'est-à-dire des types II et III, et sujettes auxproblèmes de consolidation [Karladani et al.,2001].La guérison des fractures dépend d'une cascaded'événements comp<strong>le</strong>xes. <strong>Les</strong> phases d'inductionde cellu<strong>le</strong>s ostéogéniques, de réaction inflammatoire,de formation du cal fibrocartilagineux,de formation du cal osseux et deremodelage se succèdent sur une période deplusieurs mois [Mandracchia et al., 2001]. Si <strong>le</strong>processus de guérison est plus <strong>le</strong>nt que prévu,nous parlons de retard de consolidation, et lorsqu'ily a arrêt du processus de guérison, d'absencede consolidation.Certains facteurs tels qu'un âge avancé et <strong>le</strong>tabagisme ra<strong>le</strong>ntissent la progression du processusde guérison, mais nous ne disposons pas dedonnées solides quant à <strong>le</strong>ur effet sur l'absencede consolidation. En ce qui concerne <strong>le</strong>s fracturesdu tibia fermées ou ouvertes de type I, <strong>le</strong>tabagisme ra<strong>le</strong>ntit <strong>le</strong> processus de guérison maisne semb<strong>le</strong> pas <strong>pour</strong> autant entraîner un risqueaccru d'absence de consolidation [Schmitz et al.,2