Les Colloques de Menton Samedi 1 - Ville de Menton

Science et Conscience Samedi 8 octobre 2011InterventionsBruno TERTRAISMaître de recherche à la Fondation pour la Recherche StratégiqueLa catastrophe de Fukushima a permis de relancer le débat sur le nucléaire dans notre pays, sachantque la France est le pays du monde qui, en part de la génération d’électricité, consomme le plusd’énergie d’origine nucléaire.Je remercie les organisateurs du colloque de ne pas avoir enfermé les termes du débat dans un« pour ou contre le nucléaire ». Je milite en faveur d’une approche dépassionnée et raisonnable dunucléaire civil. Je n’appartiens à aucun groupe d’intérêt.En revanche, je reste sceptique quant aux arguments antinucléaires. Le maintien de l’énergienucléaire dans un pays hautement industrialisé et développé comme la France me semble plusraisonnable que d’envisager une sortie du nucléaire.Trois grandes peurs concernant la question du nucléaire ressortent du débat.La première réside dans le fait que le nucléaire civil risque de dériver vers le nucléaire militaire, soitdans la prolifération nucléaire. Certes, il existe des passerelles entre le civil et le militaire.Néanmoins, si un pays a les moyens de se doter d’une centrale nucléaire, il ne peut pas forcément sepermettre de développer une arme nucléaire.La question de la gestion des déchets ultimes, dits « déchets à vie longue », constitue une peur pluslégitime. Ces déchets, ne pouvant être recyclés, doivent être enterrés profondément. Ces déchets neconstituent pas réellement un danger pour les populations. Il s’agit alors de se demander s’ilapparaît acceptable de laisser comme héritage ces déchets dangereux à nos descendants. Or notregénération lègue aussi bien des choses positives que négatives aux générations à venir. Cette raisonne peut donc être évoquée pour justifier la sortie du nucléaire.Enfin, le risque d’accident suscite légitimement des craintes considérables dans les opinions.L’approche probabiliste et statistique des accidents est vouée à l’échec. En raison de l’importancedu nombre de paramètres, il est difficile de calculer la probabilité qu’un accident majeur se produiseen France ou ailleurs dans le monde. L’utilisation du nucléaire implique en elle-mêmenécessairement un risque d’accident majeur. Il s’agit d’une activité humaine et industrielleextrêmement complexe, pour laquelle de multiples facteurs doivent être pris en compte. C’estl’ampleur, plus que la probabilité du risque qui doit être prise en compte lorsqu’on évaluel’acceptabilité du risque nucléaire au regard des bénéfices que le nucléaire civil apporte.Les deux grands accidents de Tchernobyl et de Fukushima ont été provoqués par des erreurshumaines. Toutes les activités industrielles sont dangereuses, et certaines plus dangereuses que lenucléaire en termes de vie humaine. Les barrages qui se sont effondrés en Chine en 1975 ont, parexemple, causé entre 25 000 et 30 000 morts. Des voix se sont-elles élevées pour interdire lesbarrages ? Il apparaît important d’analyser de manière dépassionnée ces questions. La peur résidedans la conscience des risques. Or il est plus probable de mourir dans un accident de voiture que3