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Je m’informe de sa dernière activité professionnelle, et elle me raconte ses débutsdifficiles dans la restauration : « ça a été dur ! ». Elle s’est accrochée, malgré la concurrenceavec les autres serveuses, ses erreurs de débutante (« un trou de caisse »), le rythme de travail(« 15 heures par jour »). La rémunération attractive a soutenu sa motivation initiale issue dufait de se retrouver désormais seule avec ses trois filles : « on gagnait bien, on était à lacommission » (1 er entretien) ; « on faisait bien 15-16000 francs par mois quand j'ai débuté [en1989], c'était dur, mais on gagnait » (5 e entretien) 1 . Cette expérience de trois années luipermettra de se faire aisément accepter dans d’autres restaurants. Elle pourra ainsi retrouverdu travail dans ce métier à plusieurs reprises jusqu’au déclenchement de sa maladie.• Deux nouvelles situations qui interrogent l’histoire d’une vie.Concernant les divers lieux dans lesquels elle a exercé, je lui fais remarquer qu’ils’agit d’établissements connus ; mais reprenons d’abord l’ensemble de ce passage riche enquiproquos qui viennent éclairer la situation.- Ce sont des restaurants connus où vous avez été.- Oui. Le Lion d’Or m'a bien lancée. Quand ils voyaient que j'y avais tenu 3 ans, ilsétaient intéressés. L'autre restaurant, là, il a fait faillite, et entre les deux, j'ai étédans une institution pour Handicapés. Mais c'était dur, il faut les soulever.- Ah ! Et vous avez pu faire ça sans être préparée !?- En fait, avant de suivre mon mari en Dordogne, j'étais rentrée à l'écoled'infirmières. Ensuite, j'ai pris un an de disponibilité quand j'étais enceinte, etquand on est parti, mon mari gagnait bien sa vie, et a dit que je n'avais pas besoinde travailler. Alors, c'était tentant ; moi, j'ai pouponné. Et quelques années après,quand on a divorcé, je me suis dit que j'avais fait une erreur, que j'aurais dûcontinuer. On a des regrets ensuite, mais bon, c'est comme ça !Ce que je pourrais faire aussi, c'est …(1 er entretien)A ma remarque sur les restaurants connus, Marthe répond par ses 3 annéesd’expérience ; elle ne reprend pas le thème de la réputation, mais plutôt celui d’avoir été« bien lancée », et elle poursuit la description de son parcours professionnel. Si Vermerschnous propose des formulations neutres pour ne pas influencer l’interlocuteur dans le contenu1La question de la pension de conjoint éventuellement versée par un mari qui « gagnait bien sa vie » (1 erentretien) n’est pas soulevée par Marthe, alors qu’elle joue un rôle prédominant pour Jeanne (cf. plus loin) ainsique pour la femme, également cinquantenaire, évoquée dans l’annexe 2 (fiche 59).Numér

de ses propos, on voit ici, ainsi que dans d’autres exemples 1 , que le consultant interprète danssa propre perspective les paroles du conseiller. C’est ce que l’on peut également repérer dansla suite.Entre deux activités de serveuse, Marthe m’indique qu’elle a « été dans une institutionpour Handicapés. Mais c'était dur, il faut les soulever ». Je me montre étonné qu’elle ait ainsipu être engagée dans une pratique professionnelle aussi différente. Marthe me fait alors partde ses études initiales « à l’école d’infirmière » qu’elle a finalement abandonnées pour éleversa première fille, car son « mari gagnait bien sa vie ». Elle n’explique ainsi pas tant le faitqu’elle ait été recrutée (et qui est davantage le sens de ma question) que celui d’avoir décidéde postuler dans une telle institution à laquelle ses études d’infirmière ont pu la préparer ; àma question, elle répond en explicitant son choix à partir de son histoire (et non pas d’unidéal, d’une nécessité économique, ou d’autres raisons). On comprend que les deux aspectsaillent de paire : elle a pu argumenter auprès du recruteur de ses études initiales, et celui-ci aété convaincu. Mais pourquoi s’est-elle présentée alors qu’elle pouvait, comme on l’observe,poursuivre dans la restauration ?Marthe a conservé un attachement à son projet initial de travailler dans le secteur dessoins. Après son divorce, elle se dit « qu’(elle) avait fait une erreur, qu’(elle) aurait dûcontinuer. On a des regrets ensuite, mais bon, c’est comme ça ! ». La raison première des« regrets » qui semble apparaître dans le cours de l’énonciation est une raison d’ordreéconomique : avec un métier bien en mains, elle pourrait, maintenant qu’elle divorce, assurerplus facilement ses ressources. Mais sa nouvelle situation de divorcée vient modifier laperspective de toute sa vie, c’est-à-dire, non seulement de son avenir qu’elle doit assumerfinancièrement, mais également de son passé et des choix qu’elle a effectués. Si le mariage estremis en cause, c’est l’ensemble des choix qu’il a entraînés qui se voient potentiellement réinterrogés.Ainsi que l’avance Clot, dans la perspective développementale de la clinique del’activité, « l’expérience a une histoire et son analyse transforme cette histoire. Lasignification des activités n’est pas constante pour le sujet » (Clot, 1999, p.151). Le divorceamène Marthe à « analyser » son histoire (à la reprendre, à la modifier) et elle revient sur l’unde ses choix : elle retourne dans sa région d’origine. Elle assume ses décisions antérieures,« c’est comme ça ! » ; elle n’en vient pas moins à s’interroger : et si elle avait persisté dans ses1On le retrouve également avec Marthe lors de notre dernière rencontre ; lorsque je lui dis que son expérience estintéressante, elle acquiesce en disant qu’elle est perfectionniste : « Quand on a travaillé comme ça … [je voulaisdire qu'une telle expérience dans la restauration était un signe pour les employeurs futurs.] - Oui, je suisperfectionniste, … ».Numér

de ses propos, on voit ici, ainsi que dans d’autres exemples 1 , que le consultant interprète danssa propre perspective les paroles du conseiller. C’est ce que l’on peut également repérer dansla suite.Entre deux activités de serveuse, Marthe m’indique qu’elle a « été dans une institution<strong>pour</strong> Handicapés. Mais c'était dur, il faut les soulever ». Je me montre étonné qu’elle ait ainsipu être engagée dans une pratique professionnelle aussi différente. Marthe me fait alors partde ses études initiales « à l’école d’infirmière » qu’elle a finalement abandonnées <strong>pour</strong> éleversa première fille, car son « mari gagnait bien sa vie ». Elle n’explique ainsi pas tant le faitqu’elle ait été recrutée (et qui est davantage le sens de ma question) que celui d’avoir décidéde postuler dans une telle institution à laquelle ses études d’infirmière ont pu la préparer ; àma question, elle répond en explicitant son choix à partir de son histoire (et non pas d’unidéal, d’une nécessité économique, ou d’autres raisons). On comprend que les deux aspectsaillent de paire : elle a pu argumenter auprès du recruteur de ses études initiales, et celui-ci aété convaincu. Mais <strong>pour</strong>quoi s’est-elle présentée alors qu’elle pouvait, comme on l’observe,<strong>pour</strong>suivre dans la restauration ?Marthe a conservé un attachement à son projet initial de travailler dans le secteur dessoins. Après son divorce, elle se dit « qu’(elle) avait fait une erreur, qu’(elle) aurait dûcontinuer. On a des regrets ensuite, mais bon, c’est comme ça ! ». La raison première des« regrets » qui semble apparaître dans le cours de l’énonciation est une raison d’ordreéconomique : avec un métier bien en mains, elle <strong>pour</strong>rait, maintenant qu’elle divorce, assurerplus facilement ses ressources. Mais sa nouvelle situation de divorcée vient modifier laperspective de toute sa vie, c’est-à-dire, non seulement de son avenir qu’elle doit assumerfinancièrement, mais également de son passé et des choix qu’elle a effectués. Si le mariage estremis en cause, c’est l’ensemble des choix qu’il a entraînés qui se voient potentiellement réinterrogés.Ainsi que l’avance Clot, dans la perspective développementale de la clinique del’activité, « l’expérience a une histoire et son analyse transforme cette histoire. Lasignification des activités n’est pas constante <strong>pour</strong> le sujet » (Clot, 1999, p.151). Le divorceamène Marthe à « analyser » son histoire (à la reprendre, à la modifier) et elle revient sur l’unde ses choix : elle retourne dans sa région d’origine. Elle assume ses décisions antérieures,« c’est comme ça ! » ; elle n’en vient pas moins à s’interroger : et si elle avait persisté dans ses1On le retrouve également avec Marthe lors de notre dernière rencontre ; lorsque je lui dis que son expérience estintéressante, elle acquiesce en disant qu’elle est perfectionniste : « Quand on a travaillé comme ça … [je voulaisdire qu'une telle expérience dans la restauration était un signe <strong>pour</strong> les employeurs futurs.] - Oui, je suisperfectionniste, … ».Numér

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