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La médiation civile et commerciale - Barreau du Québec

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<strong>La</strong> <strong>médiation</strong> <strong>civile</strong> <strong>et</strong> <strong>commerciale</strong>Emmanuelle GrilMoins connue par le grand public que la <strong>médiation</strong> familiale ou les conférences de règlement àl’amiable, la <strong>médiation</strong> <strong>civile</strong> <strong>et</strong> <strong>commerciale</strong> a pourtant fait bien <strong>du</strong> chemin depuis ses premiersbalbutiements au <strong>Québec</strong> en 1995. D’ailleurs, nombreux sont les contrats commerciaux qui prévoientaujourd’hui le recours à la <strong>médiation</strong> en cas de litige.M e Dominique Bourcheix pratique le droit depuis25 ans. Durant les 15 premières années de sa carrière,elle a surtout œuvré en litige, notamment dans lesdomaines <strong>du</strong> droit bancaire, commercial, des assurances<strong>et</strong> de la construction. Elle a commencé à s’intéresserprogressivement à la <strong>médiation</strong> <strong>civile</strong> <strong>et</strong> <strong>commerciale</strong> <strong>et</strong>s’y consacre entièrement depuis 1999.Un processus structuréSelon M e Bourcheix, le processus de <strong>médiation</strong> <strong>civile</strong> <strong>et</strong><strong>commerciale</strong> comporte trois principales étapes. « Dansun premier temps, le médiateur rencontre les parties <strong>et</strong>leurs avocats en plénière, dans le but de procéder à unéchange compl<strong>et</strong> d’informations sur tous les aspects <strong>du</strong>litige. Dans ce cadre, il doit faire en sorte de structurer ladiscussion, de cibler les éléments importants, de faireressortir les différences <strong>et</strong> les points communs. D<strong>et</strong>emps à autre, il peut aussi reformuler ce qui vient d’êtredit, afin de s’assurer que tout le monde a compris lamême chose <strong>et</strong> qu’à la fin de la plénière, chacun disposed’une information similaire », explique l’avocate.Les premiers caucus réalisés avec chaque partie <strong>et</strong> leursavocats constituent la deuxième étape. « Après laplénière, les gens éprouvent le besoin de parler en privéavec le médiateur de ce qui a été dit, de leursimpressions, <strong>et</strong>c. Cela fournit des outils supplémentairesau médiateur pour bien saisir le dossier. Par ailleurs,cela lui perm<strong>et</strong> aussi de donner <strong>du</strong> feed-back auxparties, eu égard à ce qui s’est dit le matin même enplénière. Il peut commencer à discuter de ce qui pourraitêtre particulièrement pertinent pour chaque partie <strong>et</strong>faire avancer le débat. »M e Bourcheix tient à souligner également que lors despremiers caucus, le médiateur sera confronté auxémotions parfois intenses que vivent les parties parrapport au conflit. « Cela peut paraître étonnant, mais ily en a autant sinon plus en matière <strong>civile</strong> <strong>et</strong><strong>commerciale</strong> qu’en matière familiale. <strong>La</strong> raison en estsimple : lors d’une <strong>médiation</strong> familiale, les gens neveulent pas que ce soit trop émotif. Ils souhaitent aucontraire pouvoir enfin régler la question de lasubstance. En matière <strong>civile</strong> <strong>et</strong> <strong>commerciale</strong>, c’estl’inverse : on ne parle que de substance, <strong>et</strong> les partiesont peu l’occasion d’exprimer leurs émotions. Le caucusleur perm<strong>et</strong>tra de le faire, c’est dans ce cadre que lesémotions ressortent. »Selon M e Bourcheix, la <strong>médiation</strong> aidera les parties àcheminer par rapport au conflit, à faire le point sur cequ’ils ressentent, à dépasser leurs frustrations <strong>et</strong> leurcolère.Une fois que toutes les informations ont été échangées,on peut entamer la négociation. « Très souvent, lesdifférentes pistes de solution proposées auront étéexplorées en caucus. Si le médiateur joue le rôle d’unguide, il ne négocie pas pour elles. Quand des offres sefont, son rôle consiste à mener de nouveaux caucuspour leur perm<strong>et</strong>tre d’en discuter. On aide à trouver desterrains d’entente, à dégager des points communs.Parfois les gens sont déçus <strong>et</strong> veulent quitter la<strong>médiation</strong>, mais il faut les inciter à se montrer patients.Nous sommes là pour injecter de l’optimisme <strong>et</strong> de lapersévérance ! », fait valoir M e Bourcheix.Les « vertus » de la <strong>médiation</strong>M e Bourcheix tient à souligner que la <strong>médiation</strong> est lefruit d’une longue évolution, <strong>et</strong> que si on peutaujourd’hui s’offrir ce « luxe » supplémentaire, c’estparce qu’à la base, nous possédons déjà un systèmejudiciaire fonctionnel.Elle ajoute que selon elle, ce mode de résolution deconflits répond à un facteur d’ordre générationnel. « Lesbaby-boomers ne voient pas l’autorité de la même façon;ils ne veulent pas qu’un autre décide de leur avenir àleur place, au contraire, ils souhaitent avoir accès à unsystème de justice où ils agissent comme participants. Àce point de vue, la <strong>médiation</strong> correspond parfaitement àces aspirations. D’une certaine façon, ils deviennent leurpropre juge, ils sont proactifs, <strong>et</strong> c’est ce qui fait que lesgens sont généralement très satisfaits de la <strong>médiation</strong>quand ils en font l’expérience. »Dans le cadre d’une <strong>médiation</strong>,les parties peuvent s’exprimer,raconter leur histoire, <strong>et</strong>finalement éprouver le sentimentd’avoir été enten<strong>du</strong>es <strong>et</strong>comprises par un tiers impartial.« Cela valide leurposition <strong>et</strong> à partir de là, ellespeuvent plus facilement passerpar-dessus les difficultés,explique M e Bourcheix. Cefaisant, elles acceptent aussileur part de responsabilitédans le litige, ce qui aide àrésoudre le conflit. Dans lefond, en <strong>médiation</strong> <strong>civile</strong> <strong>et</strong><strong>commerciale</strong>, on donne beaucoupde place à l’humain. »Elle ajoute que même dans les cas où la <strong>médiation</strong> aéchoué, les parties demeurent tout de même assezsatisfaites. « Cela a au moins permis d’échangerbeaucoup d’information, d’identifier les points dedésaccord <strong>et</strong> les terrains d’entente. Et même si un procèsa lieu par la suite, bien souvent, il <strong>du</strong>rera moinslongtemps, car certains éléments sur lesquels les partiesse sont ren<strong>du</strong> compte qu’elles s’entendaient ont pu êtreréglés. »Enfin, il y a toute la partie financière, qui constitue unavantage non négligeable. « En droit civil <strong>et</strong> commercial,il n’est pas rare que les procès soient très longs. En<strong>médiation</strong>, on peut régler en un ou deux jours ce quipourrait prendre plus de temps devant un juge. Pour lesprocureurs <strong>et</strong> leurs clients, il y avantage à tenter leprocessus après que le travail de représentation del’avocat ait été poussé à sa limite <strong>et</strong> que la négociationbilatérale a échoué, <strong>et</strong> ce, avant même de se lancer dansl’aventure <strong>du</strong> procès. »M e Bourcheix soutient cependant qu’il y a encore uncertain travail d’é<strong>du</strong>cation à faire. « Il y a beaucoup deméconnaissance <strong>et</strong> de crainte, aussi bien de la part <strong>du</strong>public en général qui a peur de devoir “couper la poireen deux’’ que des avocats qui craignent d’être ré<strong>du</strong>its ausilence par le médiateur, ce qui n’est pourtant pas le cas.Les avocats jouent un rôle primordial dans la <strong>médiation</strong>.Mieux on comprend le processus, <strong>et</strong> plus on en voit lesavantages. »Des qualités à cultiverEn <strong>médiation</strong> <strong>civile</strong> <strong>et</strong> <strong>commerciale</strong> – comme dans la plupart des autres typesde <strong>médiation</strong> – un médiateur doit posséder plusieurs qualités <strong>et</strong> aptitudes.« Il faut avoir la capacité d’analyser rapidement une grande quantitéd’informations, soutient M e Dominique Bourcheix. Quand on rencontre lesparties <strong>et</strong> leurs procureurs en plénière, il y a beaucoup de matière à digérer,<strong>et</strong> ce, dans un laps de temps très court. »Pour mener à bien le processus de <strong>médiation</strong>, il faut aussi parfaitement bienmaîtriser les techniques de processus, s’y tenir <strong>et</strong> les appliquer de façonsystématique. « Le secr<strong>et</strong> est de rester orienté sur le processus <strong>et</strong> non de seconcentrer sur le résultat. Le processus fournit des outils qui, en bout deligne, perm<strong>et</strong>tront de parvenir à un règlement. En outre, on doit aussi fairepreuve de persévérance, car les gens ont tendance à se décourager, enparticulier pendant la période de négociation. Ils peuvent notamment êtredéçus par les offres faites par l’autre partie. Mais tant que le processus a lieu<strong>et</strong> que les choses avancent, il ne faut pas baisser les bras », conclutM e Bourcheix.22 Avril 2007 Le Journal <strong>Barreau</strong> <strong>du</strong> <strong>Québec</strong>

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