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Pou<strong>le</strong>rousse est une bonne ménagère :Pas un grain de poussière sur <strong>le</strong>s meub<strong>le</strong>s, Des f<strong>le</strong>urs dans <strong>le</strong>s vases,Et aux fenêtres de jolis rideaux bien repassés.C’est un plaisir d’al<strong>le</strong>r chez el<strong>le</strong>.Seu<strong>le</strong>ment voilà, la petite pou<strong>le</strong> rousse, couic. El<strong>le</strong> l’avait égorgée.Comme tout <strong>le</strong> monde, je suis tombée des nues. Les mots me manquaient. El<strong>le</strong> nes’était jamais plainte, ne m’avait jamais fait part de ses doutes et venait de mettre aumonde un deuxième petit garçon adorab<strong>le</strong>. El<strong>le</strong> était aimée. El<strong>le</strong> avait tout, comme ondit. Comme <strong>le</strong>s imbéci<strong>le</strong>s disent.Comment faut-il réagir quand on vous annonce que votre système solaire se détraque? Que faut-il dire dans ce cas-là ? Bon sang, c’était el<strong>le</strong> qui nous montrait <strong>le</strong> cheminjusqu’à présent. Nous lui faisions confiance. Enfin, moi, en tout cas, je lui faisaisconfiance. Nous sommes restées très longtemps assises par terre à siff<strong>le</strong>r ma vodka.El<strong>le</strong> p<strong>le</strong>urait, répétait qu’el<strong>le</strong> ne savait plus où el<strong>le</strong> en était, se taisait et p<strong>le</strong>urait denouveau. Quel<strong>le</strong> que soit sa décision, el<strong>le</strong> serait malheureuse. Qu’el<strong>le</strong> parte ou qu’el<strong>le</strong>reste, la vie ne valait plus la peine d’être vécue.L’herbe de bison aidant, j’ai fini par la secouer un peu. Hé ! Ce n’était pas el<strong>le</strong> touteseu<strong>le</strong> ce naufrage ! Quand <strong>le</strong> <strong>livre</strong>t des règ<strong>le</strong>s du jeu est gros comme un annuaire etque tu cours en bouc<strong>le</strong> sur un bout de gazon à la con avec personne pour te soutenir,pas lui en tout cas, c’est sûr au bout d’un moment euh... Rou<strong>le</strong>, ma pou<strong>le</strong> !El<strong>le</strong> ne m’entendait pas.« Et pour <strong>le</strong>s petits, tu... tu ne peux pas tenir encore un peu ? » ai-je fini par murmureren lui tendant un autre paquet de mouchoirs. Ma question l’a essorée direct. Mais jene comprenais donc rien ? C’était pour eux ce carnage. Pour <strong>le</strong>ur éviter d’en souffrir.Pour qu’ils n’entendent jamais <strong>le</strong>urs parents se battre et p<strong>le</strong>urer au milieu de la nuit. Etparce qu’on ne peut pas grandir dans une maison où <strong>le</strong>s gens ne s’aiment plus, si ?Non. On ne peut pas. Pousser peut- être, mais pas grandir.La suite est plus sordide. Avocats, p<strong>le</strong>urs, chantage, chagrin, nuits blanches,fatigue, renoncements, culpabilité, dou<strong>le</strong>ur de l’un contre dou<strong>le</strong>ur de l’autre,agressivité, attestations, tribunal, clans, appel, manque d’air et front contre <strong>le</strong> mur. Etau milieu de tout ça, deux petits garçons aux yeux très clairs pour <strong>le</strong>squels el<strong>le</strong>continuait de faire l’Auguste en <strong>le</strong>ur inventant, au bord du lit, des histoires de princespétomanes et de princesses vraiment gourdes. C’était hier et <strong>le</strong>s braises sont encorechaudes. Il n’en faut pas beaucoup pour que <strong>le</strong> chagrin né du chagrin causé la noie denouveau, et je sais que certains matins sont diffici<strong>le</strong>s. El<strong>le</strong> m’a avoué l’autre jour que,lorsque <strong>le</strong>s enfants partaient chez <strong>le</strong>ur père, el<strong>le</strong> se regardait longtemps p<strong>le</strong>urer dans<strong>le</strong> miroir de l’entrée.Pour se diluer.C’est la raison pour laquel<strong>le</strong> el<strong>le</strong> ne voulait pas venir à ce mariage.Se cogner la famil<strong>le</strong>. Tous ces onc<strong>le</strong>s, ces vieil<strong>le</strong>s tantes et ces cousins éloignés.Tous ces gens qui n’ont pas divorcé. Qui se sont arrangés. Qui ont fait autrement.Leurs mines vaguement compatissantes ou vaguement consternées. Tout ce folklore.Le blanc virginal, <strong>le</strong>s cantates de Bach, <strong>le</strong>s serments de fidélité éternel<strong>le</strong> appris parcœur, <strong>le</strong>s discours potaches, <strong>le</strong>s deux mains sur <strong>le</strong> même couteau et Le Beau Danube

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