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CHAPITRE V ANALYSE DES PERFORMANCES ... - Comores-online

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<strong>CHAPITRE</strong> V<strong>ANALYSE</strong> <strong>DES</strong> <strong>PERFORMANCES</strong> ET <strong>DES</strong> CONTRAINTES SECTORIELLESCe chapitre présente un diagnostic des principaux secteurs économiques et sociaux, pertinentspour la croissance et la réduction de la pauvreté. Dix études sectorielles ont été réalisées dans lecadre de l’élaboration de la SCRP par des consultants nationaux en partenariat avec les comitésd’orientation‚ les représentants de la société civile et les opérateurs économiques. Quatre étudesconcernent la croissance et le développement économique; deux ont rapport avec la gouvernance‚la justice et la sécurité; et quatre traitent de questions liées au développement humain. Chaqueétude a établi un diagnostic sectoriel, qui est présenté dans ce chapitre sous forme synthétique, eta identifié des actions prioritaires possibles pour la SCRP, qui sont présentées dans les deuxchapitres suivants.Le diagnostic sectoriel porte sur les éléments suivants : l’importance du secteur pour lacroissance et la réduction de la pauvreté; les performances sectorielles; les forces et les faiblessesdu secteur, c’est-à-dire les facteurs endogènes qui affectent les performances du secteur; et lesopportunités et les contraintes du secteur, soit les facteurs exogènes qui affectent lesperformances du secteur. Les spécificités de chacune des îles ont été mentionnées lorsque lesdonnées le permettaient. Malheureusement‚ toutes les études ont été confrontées à un manqueimportant de données‚ notamment pour faire une analyse approfondie des secteurs par île enrapport avec les conditions de vie des ménages et la pauvreté. Ce besoin de renforcement auniveau de l’information statistique désagrégée apparaît à tous les niveaux et fait l’objet derecommandations particulières dans le chapitre concernant le suivi-évaluation de la SCRP.Les analyses sectorielles portent sur les neuf thèmes suivants :• L’agro-alimentaire• Les infrastructures économiques• Le système financier• Le secteur privé• La gouvernance‚ la justice et la sécurité• L’éducation• La santé• La nutrition• Assainissement‚ eau potable et environnement55


5.1 SECTEUR AGRO-ALIMENTAIREImportance du secteur agro-alimentaireLa contribution de l’agriculture à l’économie comorienne est significative en terme de formationdu PIB‚ d’emplois‚ de satisfaction des besoins alimentaires de base et de recettes d’exportation.Elle génère environ 40% du PIB‚ 80% des emplois et près de 90% des recettes budgétaires.Les cultures vivrières contribuent pour environ 47% de la valeur ajoutée du secteur agricole ausens large. On estime la contribution de la pêche à 21%‚ les cultures de rente à 13% et l’élevage à8%. Le solde‚ soit 11%‚ vient de la vente de bois (Figure 5.1).Figure 5.1 : Contribution des sous-secteurs à la valeur ajoutée du secteur agricoleÉlevage8%Bois11%Cultures derente13%Culturesvivrières47%Pêche21%Source : Commissariat Général au Plan‚ Direction de la StatistiqueLe secteur agro-alimentaire constitue de loin la principale source de revenus de la populationpauvre.Performances du secteur agro-alimentaireAu cours des dernières années‚ la croissance de ce secteur est restée faible‚ voire stagnante etmême fortement négative en 1994 et 1995.56


Malgré l’importance du secteur agricole dans l’économie, les <strong>Comores</strong> importent de plus en plusde denrées alimentaires. Le riz qui est devenu l’aliment de base du régime alimentaire est importéà plus de 95%.La pauvreté est nettement plus élevée en milieu rural et l’incidence de la pauvreté monétaire chezles agriculteurs est supérieure à la moyenne nationale. L’incidence de la pauvreté chez lesagriculteurs-éleveurs est estimée à 62 % alors que l’incidence nationale est de 47,3 %.L’agriculture est essentiellement vivrière. On estime qu’environ 80% de la production agricoleest auto-consommée. Les activités de stockage et la transformation des produits agricoles‚ de lapêche et de l’élevage qui sont des opérations à plus forte valeur ajoutée sont encore très limitées.Les produits sont donc écoulés dans leur forme brute en faibles quantités.L’essentiel du travail est fait manuellement et les pratiques agricoles demeurent encore peuintensives, ce qui se traduit par des rendements faibles, inférieurs au potentiel du matériel végétalexistant et au niveau que permettrait la plupart des sols.La faible productivité des cultures‚ les vols‚ la dévastation des cultures par les animaux et lefaible niveau des prix au producteur des produits découragent les agriculteurs qui se tournentgraduellement vers une agriculture de subsistance et d’autres activités non agricoles.La croissance démographique forte‚ l’insécurité foncière qui limite l’investissement et laconservation‚ la mise en culture sur brûlis de terres marginales et la réduction‚ voire ladisparition des périodes de jachères‚ notamment à Ndzuwani‚ conduisent à une dégradationaccélérée des ressources naturelles (sols‚ forêts et ressources hydriques).Force du secteur agro-alimentaireLa fiscalité sur les produits et les intrants agricoles est limitée, réduisant les distorsions et lesprélèvements sur les revenus des agriculteurs.Faiblesses du secteur agro-alimentaireLes systèmes d’exploitation de type extensif et le faible niveau d’investissement s’expliquent partrois facteurs :• Des prix au producteur relativement faibles qui ne les incitent pas à produire pour la vente;57


• Le faible accès aux crédits et des conditions d’octroi inadaptées qui limitent lesinvestissements dans les secteurs de la production et de la transformation;• Un système foncier peu sécurisant. En effet‚ la majorité des paysans exploitent des terrespour lesquelles ils ne détiennent pas les titres de propriété, ce qui réduit d’autant l’incitation àinvestir. L’insécurité foncière est un élément central dans la relance du secteur agricole. Lesproblèmes actuels viennent surtout de la superposition de trois droits (traditionnel‚ islamiqueet moderne) et de l’absence de titres de propriété. Par ailleurs‚ la distribution des terres esttrès inégale et provient de l’héritage colonial.Le transport inter-îles est déficient. On dispose actuellement de 23 bateaux d’une capacitémoyenne de 25 tonnes. La contrainte n’est pas tant au niveau du volume disponible que de lavitesse avec laquelle le transport s’effectue et de l’irrégularité des horaires. A cela s’ajoute lesmauvaises conditions d’embarquement‚ la chaleur‚ les vols‚ etc. qui causent des pertesimportantes estimées à environ 10% de la valeur des biens transportés. Par ailleurs, la valeur destaxes sur le commerce inter-îles est supérieure au coût du fret. L’impact de cette taxation ducommerce intérieur est majeur et se répercute sur le pouvoir d’achat des ménages et la pauvreté.Opportunités et contraintes du secteur agro-alimentaireLes principales opportunités sont les suivantes :• Le climat est tropical humide et fortement influencé par le relief et son insularité. Lapluviométrie varie entre 1600 et 2700 mm par an. Les précipitations sont réparties sur toutel’année.• Les écarts de prix des produits agricoles entre les îles sont de nature à favoriser les échangeset la spécialisation. Sans entrave au commerce‚ cette situation devrait bénéficier auxconsommateurs.• Le pays dispose d’une stratégie agricole opérationnelle.Les principales contraintes sont les suivantes :• Le milieu physique des îles <strong>Comores</strong> est caractérisé par un relief accidenté.• Les sols agricoles sont dans certaines parties des îles très fertiles mais aussi très vulnérables àl’érosion.• Il existe un manque flagrant de terres. Les terres exploitables à des fins agricoles sontestimées à environ 110 000 hectares (environ deux tiers du territoire). Les terres cultivablesnon encore exploitées sont estimées à 32 000 hectares localisées sur Ngazidja et l’île deMwali. La superficie cultivable sur l’île de Ndzuwani s’étend actuellement au dépend deszones forestières et sur des terres marginales plus fragiles à l’érosion. Au niveau de Ngazidja,58


les terres encore disponibles nécessitent un travail d’épierrage important, de fertilisation et demise en place de dispositifs anti-érosifs.• On dénombre entre 40 000 et 50 000 exploitations agricoles réparties à raison de 60% enNgazidja‚ 35% à Ndzuwani et 5% à Mwali. La taille des exploitations agricoles est d’environ1 à 2 ha en moyenne pour une famille de 7 à 8 personnes. La taille moyenne des exploitationscache cependant des disparités importantes à l’intérieur de chaque île dans la mesure où ondénombre quelques grands propriétaires alors que certains ménages n’ont pas accès à la terre.Sur l’île de Ndzuwani‚ on estime que 20 % des ménages sont sans terre cultivable.• De plus, les parcelles sont très morcelées. On compte environ 3 à 4 parcelles par exploitationagricole d’une superficie unitaire moyenne de 60 ares chacune. La taille réduite et lemorcellement des exploitations sont liés d’une part‚ à la forte densité de la population etd’autre part‚ à la forte croissance démographique que connaît les <strong>Comores</strong> (2,7 %). Cettesituation est particulièrement aiguë sur l’île de Ndzuwani où l’on recense plus de 450habitants au km 2 .• Les problèmes de débouchés sont particulièrement importants et limitent grandement lacroissance du secteur.Le cas des cultures de renteLes cultures de rente (vanille, ylang-ylang et girofle) génèrent environ 98 % de la valeur desexportations comoriennes.La production des cultures de rente fluctue de manière importante d’une année à l’autre en raisondes techniques de production et des cours mondiaux. Cela a des répercussions importantes sur lesrecettes d’exportation‚ la balance commerciale et les revenus des producteurs.On observe également une baisse des rendements en raison des méthodes culturales basées sur laproduction extensive ainsi qu’une baisse dans la qualité des produits suite au non respect destechniques de production et de transformation primaire avant exportationLes faiblesses au niveau des cultures de rente sont les suivantes :• Non appropriation des innovations par les producteurs ;• Organisations professionnelles pas encore représentatives ;• Système de contrôle de la qualité déficient ;• Manque de données statistiques fiables.Les faiblesses spécifiques à la production d’ylang-ylang sont les suivantes :59


• Problème de sélection de la qualité des essences par rapport au coût de production ;• Dégradation des ressources ligneuses ;• Manque d’eau ;• Parc d’alambics désuet ;• Manque de concurrence entre les exportateurs (on en dénombre 6) ;Les faiblesses spécifiques à la production de vanille sont les suivantes :• Perte de compétitivité ;• Manque de dynamisme des opérateurs pour structurer la filière ;• Manque d’accès au crédit pour les producteurs ;• Vulgarisation insuffisante des techniques et technologies ;• Manque de contrôle de la qualité ;• Taille des parcelles trop petites ;• Vols des gousses ;Les grandes contraintes qui affectent le secteur des cultures de rentes sont les suivantes:• Les <strong>Comores</strong> sont un preneur de prix sur le marché mondial et les fluctuations des cours ontdes impacts significatifs sur les recettes d’exportation‚ la balance commerciale et le revenudes producteurs.• Le marché d’importation de l’ylang-ylang est dominé par quelques opérateurs français;• Le marché mondial de la vanille est dominé par quelques opérateurs américains;• Les technologies modernes ont un coût élevé.Le cas des cultures maraîchèresLes cultures maraîchères dont la production s’est développée rapidement au cours des dernièresannées sont presque exclusivement vendues sur les marchés urbains. Ces cultures bénéficientd’une attention plus grande sur le plan des techniques culturales car elles génèrent des revenussignificatifs pour les producteurs.Les principales faiblesses sont :• Le manque de capacité de stockage ;• Le manque de capacité de transformation.La principale contrainte est le manque de débouchés.60


Le cas des cultures vivrièresLes cultures vivrières (banane, manioc, taro, patate douce, maïs, pois cajan, coco, fruits, etc.) sontdestinées essentiellement à l’autoconsommation, avec de faibles excédents vendus sur lesmarchés locaux.Les systèmes de production sont peu intensifs. Les rendements ont eu tendance à décroître aucours des années en raison de la baisse de fertilité des sols et de la faible utilisation des intrantsagricoles. On constate que la croissance de la production vivrière est inférieure à la croissancedémographique ce qui se traduit par une diminution des disponibilités de produits vivriers parhabitant et accentue l’insécurité alimentaire.Les principales faiblesses sont les suivantes:• L’insécurité foncière ;• Le sous-équipement des producteurs ;• Le vieillissement des producteurs;• La faible organisation des filières ;• Les coûts élevés des intrants ;• Le manque de structures de stockage et de transformation ;• Le manque de formation technique des agriculteurs.La principale contrainte est le marché étroit et incertain pour ces produits .Le cas de l’élevageIl existe un embryon de secteur de l’élevage (bovins, caprins et volaille) qui est surtoutdéveloppé à Mwali. A part la volaille qui constitue une production de rente pour les femmes, laproduction animale est davantage un moyen d’épargne et de prestige dans la mesure où lesanimaux sont consommés principalement à l’occasion de grandes fêtes sociales, en particulierlors des grands mariages.L’élevage est peu intensif à l’exception de la région de Nioumakélé sur l’île de Ndzuwani oùl’amélioration génétique de la race locale bovine a permis d’augmenter la production laitière desvaches de 3 à 10 litres de lait par jour.Les principales forces sont les suivantes :Les bonnes qualités génétiques des races locales;61


• Les conditions sanitaires relativement bonnes;• L’expertise des producteurs appréciable dans certaines régions.Malgré des opportunités de marché, par exemple pour le lait frais et caillé à Ngazidja, le soussecteurde l’élevage est handicapé par plusieurs faiblesses, face à une forte concurrence desproduits importés :• Des approvisionnements coûteux et irréguliers (entre autres en poussins) ;• Des problèmes de commercialisation intérieure, par exemple pour l’écoulement du lait ;• Un manque de moyens de conservation et de transformation ;• Un manque de crédit.Le cas de la pêcheLa pêche côtière est une activité importante qui occupe 9000 pêcheurs et génère 32000 emploisindirects. Les dernières estimations de la Direction Générale de la pêche (2000) indiquentqu’entre 15 000 et 20 000 tonnes de poissons ont été capturées en 2000.Cependant, les pêcheurs figurent parmi les catégories socio-économiques les plus pauvres des<strong>Comores</strong>.Les principales faiblesses sont les suivantes:• Absence de cadre législatif et d’un plan de développement du secteur ;• Absence de système de suivi et de surveillance de la mer ;• Insuffisance de l’appui apporté aux opérateurs du secteur par la Direction Générale et desservices régionaux de la pêche ;• Insuffisance des compétences de l’institution chargée de la gestion des ressourceshalieutiques;• Manque d’organisation des pêcheurs• Manque de formation et de sensibilisation dans pratiquement tous les domaines ;• Peu d’accès aux intrants‚ équipements‚ pièces de rechange‚ etc. ;• Infrastructure de stockage et de transformation inexistantes ou inadéquates ;• Politiques de commercialisation inadéquate avec un manque de structure de groupement del’offre et de marché de proximité ;• Accès limité au crédit ;• Sites de pêche non aménagés.62


Le secteur de la pêche figure pourtant parmi les secteurs prometteurs sur le plan économique etpourrait contribuer significativement à la réduction de la pauvreté. Les réserves de poissons sontestimées à 50 000 tonnes et seraient exploitées à 26% de leur potentiel.Les réserves non encore exploitées offrent un grand potentiel mais sont au large pour la plupart.Leur exploitation exige des bateaux plus gros et mieux équipés‚ des dispositifs de sécurité despêcheurs en mer et des capacités de stockage et de transformation appropriées.En conclusion, le secteur agro-alimentaire est un secteur clé pour la croissance et la réduction dela pauvreté puisqu’il occupe le premier rang en termes de production et d’emploi et regroupe unepart importante des pauvres. Cependant, c’est un secteur en général peu performant et qui faitface à de sérieuses faiblesses et contraintes, ce qui explique le désintéressement des jeunes pource secteur. Le secteur agro-alimentaire doit faire l’objet d’actions prioritaires qui viseront à :• Améliorer le niveau de sécurité alimentaire des ménages et du pays;• Tirer parti de certains créneaux porteurs encore peu exploités tels que les produits maraîchers,le petit élevage, la pêche au large et peut-être d’autres créneaux dont il faut mieux cerner lafaisabilité et la rentabilité (aquaculture, culture d’algues, crevettes, langoustes, fleurscoupées, etc.)5.2 INFRASTRUCTURES ÉCONOMIQUES ET ÉNERGIELes infrastructures économiques font référence à l’énergie‚ aux routes‚ aux télécommunications‚aux ports et aux aéroports. Elles jouent un rôle très important dans le processus dedéveloppement. Or, aux <strong>Comores</strong>‚ les infrastructures économiques font cruellement défaut etfigurent parmi les principaux obstacles à la relance du secteur privé et à la réduction de lapauvreté.63


echerche d’autres sources d’énergie ou une technologie moins énergivore‚ en particulierpour les distilleries de ylang-ylang.• Les hydrocarbures (essence, gas-oil et pétrole lampant) constituent la seconde sourced’énergie. Ils sont principalement utilisés dans le transport, les centrales thermiques et pour laconsommation domestique (pétrole lampant).Figure 5.2 : Evolution de la consommation d’énergie totaleSource :• Le gaz 140butane n’est pas120vraiment accessible enmilieu rural.se limite pourSa consommationl’instantessentiellement-aux centres urbains. LaaugmentéKTEP160100806040201993 1994 1995 1996 1997AnnéesHydrocarburesconsommation asensiblement aucours des dernières annéesavec la réduction de la taxe.• L’électricité est surtout produite par les centrales thermiques; il existe seulement quelquescentrales hydroélectriques même si le potentiel hydraulique est relativement important (5635KW à Ndzuwani et 893 KW à Mwali). En effet‚ la valorisation de l’hydroélectricité estmarginale (environ 100 KW). La capacité de production d’électricité est estimée à 12 MWdont pratiquement la moitié (environ 45 %) est perdue. Ces pertes sont attribuables aux volsd’électricité (30 %) et aux déficiences des réseaux électriques. Par contre‚ la demandeconnaît une forte augmentation, environ 10% de croissance par an. Malheureusement laproduction d’électricité ne suit pas et reste nettement insuffisante pour satisfaire la demandecomme en témoignent les nombreuses demandes d’abonnement en attente et les délestagesinterminables.65


Figure 5.3 : Evolution de la production d’électricité40000350003000025000200001500010000500001983198419851986198719881989199019911992199319941995199619971998MWH1999Année<strong>Comores</strong> Ndzuwani Mwali NgazidjaSource :La production d’électricité est inégalement répartie entre les îles (tableau 5.1) et on constate uneconsommation par habitant relativement faible à Ndzuwani par rapport aux autres îles.Tableau 5.1 : Répartition de la puissance électrique installée par île, 2002Île Puissanceinstallée (kw)Population Puissance parhab. (kw/hab)Ngazidja 9300 321646 0.0289Ndzouani 1600 250211 0.0064Mwali 500 35843 0.0139Total 11400 607700 0.0187Source :Il faut également soulignerque la qualité du servicelaisse à désirer. Lesinterruptions de courantparfois longues, ont causédes pertes énormes aux entreprises‚ en particulier celles qui ont des chambres frigorifiques. Enbout de ligne‚ ce sont malheureusement les consommateurs finals qui en payent le prix.Parmi les points forts à souligner, on note :• L’existence de micro-centrales dans beaucoup de villages qui développent une culture de priseen charge de l’utilisation de l’électricité surtout à Ndzuwani puis à Ngazidja;• La présence d’un bailleur de fonds qui appuie le Projet d’électrification rural à Ngazidja.Parmi les faiblesses‚ on note :66


• Une gestion peu transparente, des fraudes et des problèmes de recouvrement à Ngazidja etNdzuwani, les fraudes étant plus limitées à Mwali ;• A Mwali, les hydrocarbures connaissent des problèmes d’approvisionnement qui se situentplus au niveau des fréquences de livraison qu’au niveau des capacités de stockage.Une contrainte à noter est le coût élevé de la production électrique avec des microcentralesdiesel et un atout de taille est les potentialités dont recèle le pays dans le domaine de l’énergiehydroélectrique, solaire et éolien.Le cas des infrastructures routièresLa contribution des infrastructures routières à la croissance économique et à la réduction de lapauvreté sont indéniables, dans la mesure où elles contribuent à augmenter la circulation desbiens et des personnes et à intensifier l’activité économique. En facilitant les échanges, ellespermettent aux producteurs d’écouler en tous temps leurs produits à bon prix sur les marchés deconsommation et aux consommateurs d’avoir un approvisionnement régulier en produits demeilleure qualité et à meilleur prix, soit pour la réduction du nombre d’intermédiaires, soit pourla réduction des coûts de transport‚ soit pour l’accroissement de l’offre sur le marché. En outre, ilfaut également souligner qu’un meilleur réseau routier a des impacts sociaux indirects tels qu’unemeilleure accessibilité des populations aux services administratifs, aux centres de santé, auxécoles, etc. Enfin‚ un bon réseau routier contribue également au développement de l’industrietouristique, ce qui crée de nouveaux emplois directs et indirects.Le réseau routier national est assez dense. Constitué de 553 km de routes bitumées et de 240 kmde routes et pistes en terre, il couvre environ 80% du territoire national. Par contre, lesinfrastructures routières sont sous dimensionnées par rapport aux sollicitations liées à lacirculation à Ngazidja et il existe des zones de production agricoles et de pêche encore enclavées‚notamment dans les îles de Ndzuwani et de Mwali. De plus, les routes en terre existantes sontmal entretenues si bien qu’elles sont impraticables à certaines périodes de l’année, en particulieren saison pluvieuse. Globalement, 228 km des routes et pistes de désenclavement restent àréaliser et 553 km de routes bitumés sont à entretenir au niveau des 3 îles.Tableau 5.2: Situation générale du réseau routier des <strong>Comores</strong>Routes nationales Routes régionales Piste dedésenclavementTotal67


Bitumée en terre Bitumée en terre restant à réaliserMwali 69.4 12.9 15.4 2.0 16.5 116.2Ndzuwani 134.0 11.0 46.7 52.5 82.0 326.2Ngazidja 212.4 0.0 76.6 131.5 130.0 550.5<strong>Comores</strong> 415.8 23.9 138.7 186.0 228.5 992.9Source :Les îles ne sont pas toutes dans la même situation. Le réseau des routes nationales est incomplet àMwali et à Ndzuwani tandis qu’à Ngazidja, il manque surtout de routes de désenclavement deszones de production.Tableau 5.3 : Densité de routes bituméesRoutesbitumées (km)Superficie(km 2 )DensitéroutièreMwali 84.8 290 0.293Ndzuwani 180.7 425 0.425Ngazidja 289.0 1150 0.251<strong>Comores</strong> 554.5 1865 0.297Source :Les principales faiblesses du secteur sont liées au manque de personnel et d’équipementsadéquats à la Direction des travaux publics.La construction et l’entretien des routes peut représenter une source importante d’emplois pourles pauvres si on a recours a des technologies intensives en main-d’œuvre plutôt qu’en matériel.Les travaux à haute intensité de main-d’œuvre sont à privilégier chaque fois que possible parrapport à l’utilisation de matériel coûteux en capital, en devises et en carburant.L’existence d’un fonds d’entretien routier est un atout majeur ainsi que l’existence d’un Fondsd’Appui au développement communautaire (FADC) financé par un prêt IDA qui aide les localitésà désenclaver leurs régions.Le cas des infrastructures portuairesLa quasi totalité du commerce extérieur (importation et exportation) se fait par voie maritime.80% de ces activités de commerce international s’effectuent au travers du Port de Moroni. La68


capitainerie de Moroni a enregistré en 1997 des taux d'occupation de 60% pour le poste demouillage, 50% pour le grand quai et 30% pour le petit quai. Ces taux d'occupation établissommairement seraient encore plus élevés si on prenait en compte les temps de séjour à quai desbateaux opérant dans le transport inter-îles.Ces taux d'occupation sont d'un niveau relativement élevé, surtout pour le grand quai et le postede mouillage. Ceci devrait théoriquement commencer à provoquer des attentes en rade. En 2001,la capitainerie du port de Moroni a enregistré 558 cabotages dont 145 cabotages internationaux.Le trafic inter-îles à Mwali correspond en 2001, à 473 cabotages dont 242 arrivées et 231 départset à 13923 passagers dont 7753 arrivés et 6170 départs. Ce trafic est en forte augmentation parrapport à 1997.Une force à noter est l’engagement du gouvernement dans un nouveau mode de gestion portuairepar concession. Un contrat est déjà signé avec une société qui reprend la manutention et qui adéjà commencé à prendre service.Les principales faiblesses sont les suivantes :• L’organisation du trafic maritime entre les îles. Les marchandises à destination de Mwali sontd’abord débarquées, soit à Ngazidja soit à Ndzuwani, puis sont ensuite réembarquées avantd’être débarquées une deuxième fois dans l’île de Mwali. Ce circuit du transport des biens àdestination de Mwali engendre des coûts supplémentaires qui sont répercutés sur les prix à lavente.• Au-delà de la croissance du trafic de navires, l'organisation dépassée des opérations demanutention est la principale cause d'augmentation des taux d'occupation des différents postesd'accostage et d'augmentation des coûts les marchandises. Ceci est dû en partie au manqued’équipements nécessaires aux opérations de débarquement et d’embarquement desmarchandises. Cette organisation a des implications négatives non seulement sur la maîtrisedes coûts des marchandises qui se répercutent sur les ménages pauvres, mais aussi sur lesperformances du secteur privé en général supposé être le moteur de l’économie.• L’incapacité des ports à fournir des services de qualité a limité le cabotage international etpose des problèmes au niveau des délais des approvisionnements du pays en intrants, pièces derechange, matières premières pour les différents secteurs économiques;• De lourdes procédures pour sortir les marchandises du port et de la douane;• Des problèmes de sécurité des marchandises en dépôt avec des avaries trop importantes;Les principales contraintes sont les suivantes :69


• Le Port de Moroni dans l’île de Ngazidja n’est pas en eau profonde. Ainsi le déchargementdes marchandise par boutres renchérit considérablement les coûts du fret maritime qui serépercutent sur les prix de vente des produits importés.• Le port de Mutsamudu dans l’île de Ndzuwani connaît actuellement des problèmesd'ensablement suite aux déversements de matériaux par la rivière qui vient se jeterdirectement sur le port. Pour que Mutsamudu puisse récupérer le trafic et retrouver un bonniveau de rentabilité économique, il doit être en mesure d'offrir aux armateurs les conditionssuffisantes pour être l'un des ports de transbordement international de la région.Le cas des infrastructures aéroportuairesLe trafic aérien tant international qu’inter îles est très limité. Les liaisons aériennes régionalessont limitées au nombre de 5 par semaine alors qu’il n’y a que deux liaisons long courrier. Letransport aérien inter-îles ne concerne pour l’essentiel que le transport de passagers car letransport maritime est plus adapté et moins coûteux pour le transport des marchandises. Levolume de passagers du trafic aérien inter-îles s’élevait à 19300 passagers en 1996 dont 41% audépart de Hahaya (Ngazidja), 39% de Ouani (Ndzuwani) et 20% de Bandar-Es-Salama (Mwali).Ce trafic a connu une forte augmentation durant les années 2001 et 2002 avec la stabilisation ducontexte politique.Un point fort à noter concerne la démarche en cours de l’adhésion des <strong>Comores</strong> à l’ASECNA,l’association pour la sécurité et la navigation aérienne.Parmi les faiblesses, on note que l’aéroport international de Hahaya connaît des problèmes defatigue de la piste et n’offre pas toutes les garanties en matière de sécurité aérienne. En outre, lesespaces de fret et des salles d’embarquement sont très restreintes.70


Les aéroports secondaires, quant à eux, sont caractérisés par :• Une capacité de recevoir des avions allant jusqu’à 70 passagers;• Un manque d’équipements de navigation (météo et radiocommunications);• Le manque de balisage des pistes ;• L’absence de clôture autour de l’aéroport;• Le manque de sécurité incendie (pas d’extincteurs)Enfin, toutes les compagnies aériennes nationales et régionales n’offrent pas actuellement lesgaranties adéquates de sécurité et de régularité dans les vols.Le développement du tourisme représente une opportunité importante de développement pour lesecteur aérien si ces questions de sécurité et de régularité de vols sont réglées.Le cas des télécommunicationsUn accès facile et peu coûteux au téléphone, fax et internet est nécessaire pour :• permettre aux entreprises sur l’ensemble des îles d’avoir accès à un prix raisonnable à unmoyen de communication efficace et rapide avec leurs fournisseurs et leurs clients;• connecter les <strong>Comores</strong> avec le reste du monde en termes d’accès aux opportunitéséconomiques et aux connaissances;• faire connaître les <strong>Comores</strong> à l’étranger et promouvoir le tourisme à travers les sites Web,etc.;• faciliter les contacts individuels à l’intérieur des <strong>Comores</strong> et avec la diapora.Les services de télécommunication restent encore un produit réservé à une couche aisée de lapopulation. En effet, en 2000 selon l’enquête MICS, seulement 7.2% des ménages ont letéléphone. Ce pourcentage était de 1.7% en 1991 lors du recensement général de la population etde l’habitat, et de 3.2% en 1996 selon l’enquête démographique. En avril 2002, on comptait 8826abonnés avec une couverture téléphonique particulièrement faible à Ndzuwani où le milieu ruralest complètement dépourvu de téléphone (voir tableau 5.4).71


Tableau 5.4 : Répartition des abonnées au téléphone par île en 2002Capacité Abonnés Population Hab./Ligne.Mwali 768 473 35843 76Ndzuwani 3 236 1 319 250211 190Ngazidja 14 788 9 364 321646 34<strong>Comores</strong> 18 792 11 156 607700 54Source :Le réseau téléphonique du pays permet d’exploiter environ 60 % de la capacité installée, alorsqu’il y a une demande de raccordements téléphoniques non encore satisfaite. Cette situationquelque peu paradoxale s’explique par la saturation des câbles actuels et le raccordement denouveaux abonnés exige l’installation de nouveaux câbles à partir des centrales téléphoniques quidépasse la capacité d’investissement actuelle de la SNPT.La téléphonie mobile permet de pallier aux problèmes liés aux câbles téléphoniques. De plus,celui-ci permettrait de brancher des clients assez dispersés sur le territoire national, en particulieren milieu rural tels que les postes de santé, les collectivités locales, les écoles, les ménages, etc.Un projet d’installation du téléphone mobile est en préparation au niveau de la Société desTélécommunication. Des sociétés étrangères ont été approchées pour l’exploitation de la licencede GSM.La mise en place d’un réseau de téléphonie mobile sera assurée par le secteur privé alors quel’État consacrera ses efforts dans la modernisation des installations téléphoniques existantes,l’objectif étant de remettre en ordre les équipements avant de les rétrocéder au secteur privé pourleur gestion.Il existe à ce jour 3 clients pour les lignes spécialisées d’internet à haut débit. L’Internet compteseulement un peu plus de 600 clients.5.3 SECTEUR FINANCIER ET MICROFINANCEImportance du secteur financier et de la microfinanceUn secteur financier formel et informel développé et de qualité peut contribuer à la lutte contre lapauvreté à travers :72


• Une intermédiation financière efficace, c’est-à-dire une meilleure mobilisation de l’épargne etune meilleure canalisation de celle-ci vers les secteurs de l’économie qui génèrent des emploiset des revenus pour les populations pauvres et des recettes pour l’État (agriculture, commerceet transformation);• Une augmentation des revenus des populations pauvres à travers le microcrédit qui permetd’augmenter le fonds de roulement, l’investissement, la productivité et la production desmicroentreprises;• Une diminution des fortes variations dans les revenus et la consommation des ménagespauvres à travers l’épargne, (en période difficile ou lorsque les revenus baissent‚ l’épargnepermet d’éviter les baisses de consommation);• Une diminution de la vulnérabilité des ménages pauvres et des microentreprises aux chocs,que ce soit les calamités naturelles, la maladie, etc., à travers l’épargne et/ou le crédit;• Une augmentation de la capacité des ménages pauvres à faire face aux dépenses saisonnièreset/ou occasionnelles telles les frais de scolarité, les fêtes religieuses, les activités sociales, etc.;• Des possibilités de services de microassurance permettant de faire face à différents chocs :- dépenses de santé;- protection des ménages face au décès ou à la maladie de l’emprunteur;- perte de biens productifs (par exemple, un bateau, une usine, etc.);La microassurance a l’avantage de pouvoir protéger à la fois l’emprunteur et l’institutionprêteuse.• L’octroi de prêts associatifs pour l’achat de gros équipements (moulin, tracteur, décortiqueuse,etc.);• L’association d’institutions de microfinance (IMF) avec les projets de développementcomme :- les projets de développement agricole;- les programmes d’alphabétisation;- les programmes d’IEC en matière de santé et d’hygiène;- etc.Performances du secteur financier et de la microfinanceLe secteur financier comorien est caractérisé par une offre peu diversifiée et très limitée. En effet,il existe une seule banque commerciale, la Banque pour l’Industrie et le Commerce (BIC) quidomine plus de 70% du marché. La Banque de Développement des <strong>Comores</strong> (BDC) rejoint unnombre limité de petits et moyens entrepreneurs compte tenu des modalités et des coûts detransaction liés au crédit qui constituent une barrière à l’accès des populations pauvres à ce typede service. Par ailleurs‚ la BDC est dans un situation financière difficile car elle ne peut pas73


vraiment offrir de nouveaux prêts alors qu’elle doit faire des efforts de recouvrementconsidérables. De plus, ces institutions sont très peu ou pas représentées sur les îles de Ndzuwaniet Mwali.Le secteur financier formel est caractérisé par une intermédiation financière peu efficace où unepartie insuffisante de l’épargne est réinjectée dans l’économie à travers des prêts et desinvestissements productifs. En effet, les institutions financières formelles financentprincipalement des activités commerciales et les campagnes pour les cultures de rente qui sontdes opérations de court terme.La situation dans le secteur financier aux <strong>Comores</strong> peut paraître paradoxale à première vue. Eneffet‚ on observe un système financier en surliquidité d’un côté et, de l’autre, à une demande deservices financiers non satisfaite. Cela s’explique par plusieurs facteurs dont sont la perceptiond’un risque élevé des projets d’investissement d’une part‚ et d’autre part‚ des perspectives derentabilité des entreprises plutôt faibles dans le contexte économique et politique actuel.Faiblesses du secteur financier et de la microfinanceL’offre de services financiers se caractérise par :• Un manque de concurrence;• Une dépendance forte de lignes de crédit des bailleurs de fonds;• Un manque de suivi des dossiers de crédit pour certaines institutions;• L’incapacité de canaliser les capitaux de la diaspora;• Le manque de rémunération de l’épargne;• Un cadre juridique non opérationnel en cas de contentieux;• Une confusion des rôles d’encadrement et de financement (il n’y a pas un partage clair entreles services financiers et non financiers dans plusieurs projets);• L’offre de services financiers ne tient pas compte des particularités de certaines activitéscomme par exemple le cycle de production dans le secteur agricole (le cycle desremboursements ne correspond pas aux entrées de recettes, forçant souvent le réendettementpour respecter les échéances);• Il y a un manque de produits financiers qui permettraient de mieux gérer le risque;• Les taux d’intérêt sont souvent jugés trop élevés au regard de la rentabilité desinvestissements.Les populations pauvres n’ont pas accès au système financier formel à cause :74


• des modalités et des coûts de transaction trop élevés (études de marché, comptabilité, fraisd’ouverture de dossier, etc.),• de l’éloignement des services ;• de la demande de garanties légales;• du fait qu’une partie importante de la population pauvre est analphabète, ce qui rend difficileleur accès au secteur financier formel.Opportunités et contraintes du secteur financier et de la microfinancePour pallier au manque d’accès des pauvres aux services financiers formels, des institutions demicrofinance (IMF) sont apparues vers le milieu des années 90, les Caisses Sanduk (réseau de 55caisses qui couvre toutes les îles) et la Mutuelle d’Epargne et de Crédit des Komor (MECK) (6caisses situées à Ngazidja et Mwali). Ces institutions ont gagné en popularité et leur part dumarché financier ne cesse de croître (augmentation de plus de 8% en 4 ans). Ceci indique que cesinstitutions répondent à une demande existante. Cependant, elles n’atteignent encore qu’unefaible proportion de la population, en particulier en milieu rural.De plus, il n’existe pas encore de cadre de réglementation qui contribue au développement et à laviabilité des institutions de microfinance tout en assurant l’accès des populations aux services.Un « Projet de réglementation des institutions décentralisées » est en cours qui vise à mettre à ladisposition des IMF une réglementation spécifique qui intègre les exigences liées à l’activitébancaire et établir des normes adaptées aussi bien pour la gestion que le contrôle des IMFappropriées à leur développement. Cette réglementation est une condition nécessaire audéveloppement d’un système de microfinance de qualité.5.4 SECTEUR PRIVÉImportance du secteur privéLe secteur privé comorien regroupe un ensemble d’opérateurs économiques de tailles variables‚mais surtout des petites unités réparties sur l’ensemble du territoire national. On estime le nombred’entreprises à environ 1800 si on exclut les producteurs agricoles‚ les pêcheurs et les éleveurs.On compte parmi elles des travailleurs autonomes qui ont créé leur propre emploi ou activitégénératrice de revenu, des petites unités qui produisent ou offrent des biens ou des services et quioccupent quelques personnes‚ en général de la même famille et des entreprises plus grandes etplus structurées qui emploient un nombre relativement important de travailleurs salariés.75


La très grande majorité de ces entreprises évolue dans le secteur informel ou semi-formel. Celapose un problème car ces activités échappent aux statistiques, ce qui rend l’appréciation de leurcontribution à l’économie plus difficile. Ces entreprises échappent également aux règles fiscalescontrairement au secteur formel fortement taxé. Malgré cela‚ ces petites entreprises offrent toutde même une gamme importante de biens et de services qui contribuent au bien-être desménages‚ notamment les plus pauvres :Le secteur privé formel manque de dynamisme dans le formel, en partie à cause des multiplesproblèmes auxquels est confrontée l’économie nationale dans ses divers secteurs :• Le secteur primaire, regroupe les activités du secteur agro-alimentaire au sens large etl’exploitation des ressources naturelles, est le plus important représentant plus de la moitié dela contribution du secteur privé au PIB;• Le secteur secondaire inclut les activités industrielles et artisanales reliées à la production debiens. Le secteur secondaire est marginal‚ représentant bon an mal an moins de 4% de lacontribution du secteur privé au PIB. Le secteur industriel comorien est donc embryonnaire et,malheureusement‚ il a perdu de son importance suite à la fermeture de nombreuses entreprisesmanufacturières aux cours des dernières années. Cette contraction s’explique en bonne partiepar la crise politique‚ mais aussi par les multiples entraves qui le rendent peut compétitif parrapport aux importations;• Le secteur tertiaire regroupe principalement les activités reliées au commerce et à l’offre deservices. Le secteur commercial est particulièrement important et a connu un développementrapide au cours des années‚ notamment au niveau de la vente de biens importés. Le secteurtertiaire représente environ 46% de la contribution du secteur privé au PIB.Performances du secteur privéLe secteur privé comorien est en général intensif en main d’œuvre, générant ainsi des revenuspour un nombre important de personnes. Par contre, les produits locaux sont fortementconcurrencés par les biens importés qui offrent souvent un meilleur rapport qualité/prix auxconsommateurs.76


Forces et faiblesses du secteur privéLe secteur privé informel fait montre d’un certain dynamisme, mais il se caractérise par un faibleniveau de développement technologique. Les produits fabriqués localement sont souvent dequalité moyenne et inégale.Opportunités et contraintes du secteur privéLe secteur privé fait face à de nombreuses contraintes d’ordre technique et institutionnel. Parmicelles-ci, on compte, pour la très grande majorité des opérateurs privés notamment‚ les difficultésd’accès aux services financiers (voir section sur la microfinance), les contraintes liées àl’environnement macroéconomique et le cadre juridique‚ administratif et réglementaire.Un nombre considérable d’organisations professionnelles et de programmes de soutien au secteurprivé existe et constitue une base sur laquelle certaines interventions peuvent s’appuyer (ADPE‚APSP‚ AMIE‚ PRIDE‚ AIEB‚ FADC‚ UCCIA‚ OPACO‚ OCOVA‚ ASAVIC‚ APEC‚SARUMAYA‚ VOUNA DJEMA‚ UPEC‚ etc.). Cependant, les programmes d’appui au secteurprivé enregistrent des performances en deça des attentes en raison des contraintes liées àl’environnement macroéconomique et notamment, le financement de l’économie.Les premiers États Généraux sur le Secteur Privé organisés en 1994 avaient permis d’identifierde nombreuses pistes pour assurer la relance du secteur privé. Plusieurs recommandationsconcrètes visant la levée des obstacles qui entravent l’investissement et la création d’entreprisesavaient été adoptées à l’issue de cette rencontre. Déjà‚ la révision du code des investissements‚l’allégement des procédures de création d’entreprises‚ l’instauration d’un guichet unique deservices d’appui et la mise en place de fonds de soutien aux entreprises pour palier auxcontraintes d’accès au capital financier faisaient partie des priorités. Malheureusement‚ aprèspratiquement une décennie d’interventions‚ on constate qu’il y a encore de nombreusescontraintes à l’ordre du jour même si plusieurs projets travaillent pour trouver des solutionsdurables à ces questions.Parmi les secteurs les plus porteurs figurent le tourisme. D’abord, il existe une demandeimportante et croissante au niveau mondial pour le tourisme. Entre autres, de nombreuxEuropéens disposent de temps de vacances et des moyens financiers pour se payer des vacancessous les tropiques loin de chez eux. Maurice a su exploiter habilement ce marché. Les Sud-Africains représentent un deuxième créneau intéressant à cause de leur pouvoir d’achat et de leur77


proximité. Enfin, le tourisme asiatique est en plein essor et pourrait potentiellement êtreintéressant.Les pays de l’Océan Indien représentent une destination de choix à cause de leurs paysages, deleur climat, de la qualité de la mer, de la richesse de la flore et de la faune tropicale et des fondssous-marins. Des pays comme Maurice et les Seychelles ont fait du tourisme un secteur majeurd’activité. Or, ces pays arrivent à saturation du nombre de sites aménageables compte tenu del’exiguïté de leur territoire et ont recours maintenant à une stratégie d’amélioration de leursinstallations existantes (upgrading). En aménageant de plus en plus d’hôtels de luxe, ces payslibèrent le créneau des installations de moyen-haut de gamme, créneau que les <strong>Comores</strong>pourraient occuper. En effet, les <strong>Comores</strong> disposent d’un potentiel touristique significatif avecune variété de paysages tropicaux, des espèces rares et des fonds sous-marins à toutes finpratiques vierges.Le tourisme et en particulier certains créneaux comme l’éco-tourisme semblent représenter unpotentiel majeur pour les <strong>Comores</strong> en termes de croissance de l’économie et de réduction de lapauvreté. En effet, le tourisme est une activité intensive en main-d’œuvre, y compris en maind’œuvrepeu qualifiée. A part des métiers spécialisés comme la gestion hôtelière, la cuisine ou laplongée, de nombreux emplois ne nécessitent pas un niveau d’éducation élevé ou une formationlongue. Outre les emplois directs dans l’hôtellerie, les excursions touristiques, les sports et lesloisirs, le tourisme peut créer de nombreux emplois indirects, entre autres dans le secteur agroalimentairepour approvisionner les hôtels et dans l’artisanat. Cependant, développer le tourismereprésente des défis significatifs pour la mise en place d’infrastructures suffisantes de transport etd’énergie et attirer les groupes étrangers pour investir dans l’hôtellerie. Il faut donc étudier plusprécisément le marché, le positionnement stratégique des <strong>Comores</strong> et procéder à un exercice deplanification stratégique pour orienter le développement de ce secteur sur le long terme.5.5 GOUVERNANCE‚ JUSTICE ET SÉCURITÉPerformances du secteurLes <strong>Comores</strong> ont traversé au cours des dernières années une crise politique qui a eu des effetsconsidérables sur le développement socio-économique du pays. Elle s’est traduite par unestagnation économique‚ un accroissement de la pauvreté et des inégalités‚ l’éclatement de lacohésion sociale‚ une remise en cause des institutions fédérales et une instabilité politiquepersistante. Cette crise profonde a également contribué à accentuer la fuite des cerveaux‚l’émigration sauvage et la montée de l’extrémisme.78


L’objectif de la bonne gouvernance est de restaurer la confiance dans trois domaines: le domainepolitique‚ avec le retour de la stabilité et l’acceptation du principe de la démocratie; le domaineéconomique‚ en encourageant les initiatives intérieures et en attirant les investissementsextérieurs dont le pays a besoin pour relancer durablement son économie; et le domaine social‚en renforçant la cohésion social et en mettant à contribution tous les acteurs de la société auservice du développement.La mal gouvernance qui a caractérisé le paysage politique du pays au cours des dernièresdécennies a freiné l’évolution de la société comorienne et son développement. On peut citer auplan politique‚ l’approche « politicienne » de la dimension politique qui a engendré l’instabilité‚l’opposition entre systèmes traditionnel et moderne‚ l’insuffisante référence au cadre légal et ledéficit d’information objective. De même‚ sur le plan économique‚ la gestion de l’économielaisse à désirer‚ celle des entreprises publiques a souvent été inefficace faute de procédures decontrôle adéquates et l’expertise disponible a trop longtemps été sous-utilisée. Enfin‚ dans ledomaine social‚ le fonctionnement même de la société comorienne constitue autant une source dedynamisme à travers ses associations et la tradition d’entraide que de blocage‚ par le repliementsur le groupe de référence.Plusieurs indicateurs permettent de caractériser la piètre performance des <strong>Comores</strong> en matière degouvernance :• Depuis l’indépendance‚ il y a eu cinq constitutions‚ quatre coups d’Etat (et plus d’une dizainede tentatives de coup d’Etat) et les gouvernements mis en place ont duré moins d’un an enmoyenne au cours des 25 dernières années. L’instabilité politique et la précarité desinstitutions n’ont pas favorisé l’élaboration de plans stratégiques de développement. Lesgouvernements qui se sont succédés n’ont pas accordé d’importance au renforcement descapacités humaines dans les domaines de l’administration, de la gestion économique, de lagestion des programmes de développement, de l’élaboration‚ du suivi et de l’évaluation despolitiques macroéconomiques et sectorielles, de l’Etat de droit et du respect de la sociétécivile, etc.• L’absence des moyens matériels et financiers pour assurer un fonctionnement minimal auxinstitutions publiques est caractéristique. Les fonctionnaires accusent des arriérées de salairesimportants et ne disposent d’aucun moyen matériel et financier pour remplir leur mission.• L’absence de dialogue entre les gouvernants et les gouvernés a été une constante en dehorsdes périodes électorales. Il s’ensuit une coupure importante entre le sommet et la base. Larupture a atteint son point culminant avec la crise séparatiste de Ndzuwani.79


• Plusieurs cadres expérimentés quittent la fonction publique, soit pour travailler dans le secteurprivé, soit pour migrer dans l’espoir de décrocher un emploi à Mayotte ou à l’extérieur del’Archipel, notamment en France.• La corruption est devenue un phénomène presque normal dans le fonctionnement du systèmepolitique et économique. Elle s’est généralisée de sorte que chacun exerce son petit pouvoir làoù il le peut. L’audit de la dette publique du pays a montré que plus de la moitié des créancesmanquent de pièces justificatives pertinentes soulevant des questionnements quant àl’utilisation de ces fonds.Ces conditions n’ont pas favorisé le développement socio-économique du pays. Au contraire‚ lamal gouvernance s’est caractérisée par une gestion des affaires publiques qui laisse à désirer, uneabsence de décentralisation susceptible d’impliquer la société civile dans le processus dedéveloppement, une corruption élevée qui induit des sur-coûts pour l’accès à certains servicespubliques, des inefficacités et une mauvaise allocation des ressources rares‚ et parfois, unmanque de respect des droits de l'homme.La gestion des affaires publiquesIl y a un lien fort entre la gestion efficace des affaires publiques, notamment des financespubliques, et la réduction de la pauvreté. Le niveau des revenus des ménages pauvres, ainsi que levolume et la qualité des services publiques auxquels ils ont accès, dépendent de la fiscalité et dela structure des dépenses publiques. Les tentatives récentes en faveur du support budgétaire directdes donateurs servent à renforcer l'importance primordiale d'une bonne gestion des processusbudgétaires au pays.La gestion des finances publiques est confrontée à de nombreuses difficultés. En premier lieu, larelation entre le processus de planification sectorielle‚ les objectifs des programmes et lesallocations budgétaires est quasi inexistante et ne permet pas de suivre et de juger de l’efficacitédes allocations budgétaires. Il apparaît important de mettre en place un Cadre de Dépenses àMoyenne Terme (CDMT) pour rationaliser la préparation du budget et établir un lien fort entreles ressources financières et les objectifs de réduction de la pauvreté. Par ailleurs, le contrôlebudgétaire actuel demeure faible. La Cour des Comptes qui a normalement le mandat d’assurer lecontrôle budgétaire n’existe pas. Par conséquent, un grand nombre de projets dont l’efficacité etla pertinence restent à démontrer ont été financés sur la base de critères pour le moinsdiscutables. Dans ce contexte, les propositions d'un système national de suivi de la pauvreté etdu DSRP‚ qui s’inscrit dans le CDMT sera d’une grande utilité pour améliorer l’efficacité dans lagestion des finances publiques et la pertinence des allocations budgétaires.80


La DécentralisationLa décentralisation de l’administration n’a jamais été effective, malgré le fait que le pays atoujours eu, depuis 1978, une constitution d’inspiration fédérale. L’administration comoriennetraîne des faiblesses chroniques : l’agent de la fonction publique est souvent mal préparé à satâche, son profil ne correspond pas toujours au poste occupé, il lui manque de moyens de travail,il se réfugie dans l’immobilisme et ne reçoit pas de salaires régulièrement. La notion de contrôleet de sanction n’existe pas. Les changements de régime ont entraîné des changements fréquentsdans les hautes sphères de l’Etat et dans les directions de services.Suite aux développements politiques récents, l'Union des <strong>Comores</strong> s'est engagée à mettre enplace une véritable décentralisation administrative. Avec la nouvelle constitution votée le 23décembre 2001, l'administration distingue le pouvoir au niveau central (l'Union des <strong>Comores</strong>),régional (Gouvernement de l'Ile) et local (Commune) et s'apprête à transférer des pouvoirs auxniveaux sous-nationales.La décentralisation constitue un moyen efficace pour lutter contre la pauvreté dans la mesure oùelle favorise une meilleure participation des pauvres dans la prise de décision et dans le suivi desactions mises en oeuvre. Toutefois, plusieurs conditions préalables doivent être réunies pour quequ’elle puisse jouer efficacement ce rôle, notamment une répartition rationnelle des compétencesde l'administration nationale, régionale et locale; des ressources financières suffisantes et desressources humaines compétentes; des mécanismes d’audit pour assurer que les ressourcesfinancières ne sont pas détournées au niveau local; des actions pour promouvoir une participationplus étendue des populations à la base dans la prise de décisions et le suivi de leur mise enœuvre ; et des élections locales qui permettent aux populations de choisir de manière transparenteleurs représentants.La CorruptionLa corruption est un problème qui menace les principes de la bonne gouvernance et qui freine leprogrès économique. La corruption a des conséquences néfastes directes sur les pauvres lorsqueces derniers sont obligés de payer des excédents pour obtenir des services qui devraientnormalement être offerts gratuitement. La corruption a aussi des effets néfastes indirects sur lapauvreté en détournant des dépenses publiques vers des allocations non pertinentes et enréduisant le taux de croissance économique. Il est généralement admis que la corruption est trèsrépandue dans le pays. Par exemple, au cours d’investigations menées en 2001, la Commission81


de Vérification des Comptes a constaté un grand nombre d’anomalies au sein des entreprisespubliques et privées y incluant la mauvaise tenue de la comptabilité et le non-respect desprocédures (administratives, passation des marchés, etc.), la non élaboration des états financierspour certaines structures, des dépenses excessives et non justifiées, etc.Comme en témoigne l'expérience internationale, une stratégie multidimensionnelle est le moyenle plus effectif pour combattre la corruption. Cela implique le contrôle des comptes (une Courdes comptes, des audits, etc.), l'implication directe de la société civile dans le processus etsurtout, celle des média. Pour rendre effective une telle stratégie‚ il est nécessaire d’entreprendredes réformes judiciaire et légale. Au niveau opérationnel, la réforme institutionnelle est unélément clé, notamment le renforcement des capacités d'audit et de suivi financier au sein del'administration et l'appui aux organisations de la société civile dans ce sens.Les Droits de l'hommeLa relation entre la pauvreté et les droits de l'homme est aujourd’hui reconnue par la plupart despays. La pauvreté est considérée par certains comme une violation des droits de l'homme. Parconséquent, la promotion des droits de l'homme doit être une partie intégrale d'une stratégie decroissance et de lutte contre la pauvreté. Cette stratégie doit s’appuyer sur des outils moraux,politiques et légaux. Au niveau opérationnel, cela implique une amélioration des conditionsstructurelles de promotion des Droits de l'homme et surtout‚ un appui aux organisations dedéfenses des Droits de l’homme‚ notamment à la Commission Nationale Consultative des Droitsde l'homme. Cette dernière a la responsabilité de sensibiliser les pouvoirs publics sur lapromotion des droits de la femme, sur la protection des enfants en situation particulièrementdifficile et sur le travail des enfants. Par ailleurs, il importe de renforcer les capacités de laDélégation Générale des Droits de l'Homme pour que la lutte contre la pauvreté fasse partie deces activités opérationnelles.La SCRP propose des moyens pour rétablir une bonne gouvernance aux <strong>Comores</strong>. Ces moyenspermettront de renforcer les dimensions politique‚ économique et sociale qui caractérise lagouvernance avec l’objectif de relancer la croissance économique et de réduire la pauvreté. Endehors de l’Etat et des projets de développement, la société civile et les communautés localess’organisent pour améliorer leur cadre de vie. Les structures traditionnelles jouent un rôleinestimable dans l'ordre et la stabilité sociale. Elles disciplinent les citoyens et assurent uneéducation civique axée sur le respect des valeurs de la société et le dévouement pour les tâchescommunautaires. Ainsi, les structures coutumières contribuent au développement communautaireet doivent être soutenues. En effet‚ dans un contexte de bonne gouvernance‚ l’Etat doit établir de82


ons rapports avec les communautés villageoises et les associations de développement. Lacommunauté villageoise constitue l’unité par laquelle les actions de lutte contre la pauvretépeuvent prendre racine. Elles peuvent prendre des initiatives qui comblent ou complémentent lesinterventions de l’Etat de manière à mieux répondre aux besoins de la population.La justice et la sécuritéLa Justice et la Sécurité constituent les principaux instruments pour la garantie et la protectiondes libertés fondamentales qui sont indissociables d’un développement qui puisse améliorer lebien-être de la population et réduire la pauvreté. Le respect et la défense des droits de l’hommeconstituent une obligation pour ceux qui, au sein de la communauté, contrôlent les moyens quipermettent de les assurer. L’Etat doit par conséquent protéger, promouvoir et garantir à l’individula jouissance de ses droits ; la sécurité des personnes et des biens et la justice font partie desmissions essentielles et irréductibles d’un Etat.Dans un Etat de droit, la justice est chargée de faire droit à chacun. Elle doit protéger la paixpublique en réglant les conflits qui opposent les individus, évitant ainsi le recours à la vengeanceprivée, mettant fin au trouble social causé par le crime, et, sauvegardant, par l’effet de sesdécisions, les libertés individuelles. Le système judiciaire comorien, confronté à de nombreusesdifficultés structurelles et de fonctionnement, est gravement défaillant dans l’accomplissement desa mission, notamment en ce qui concerne la protection des personnes vulnérables, plusparticulièrement les pauvres. Ces derniers jouissent d’ailleurs d’un accès limité à la justice. Cefaible accès provient de certains obstacles parmi lesquels figurent l’insuffisance des tribunaux et,partant, l’éloignement du justiciable, le coût du procès et les carences dans l’assistance judiciaire,l’ignorance ou la mauvaise compréhension du droit. Or, on sait que l’accès à la justice est undroit fondamental qui détermine l’exercice de tous les autres droits reconnus aux justiciables.Des efforts ont été faits pour étendre l’implantation des juridictions à l’ensemble du territoirenational, notamment en instaurant une Justice de Paix dans chaque Préfecture. Toutefois, enraison des contraintes budgétaires et du manque de personnel judiciaire qualifié, seulsfonctionnent les tribunaux de première instance (un tribunal par île) ainsi que quelquesjuridictions de cadis qui s’occupent presque exclusivement des problèmes liés au mariage et sessuites.Dans l’exercice de ses fonctions, le magistrat comorien reste confronté à toute une foule dedifficultés quotidiennes qui ne sont pas sans conséquences néfastes sur la qualité de son travail :un personnel subalterne peu formé, insuffisant et non motivé en raison des mauvaises conditions83


de travail ; des conditions minimales de travail inexistantes ; une précarité dans le paiement dessalaires qui fragilise le magistrat qui n’est plus à l’abri de la tentation ; l’égalité des citoyensdevant la justice qui est loin d’être réalisée en raison de l’éloignement des juridictions, et del’absence d’une aide juridictionnelle pour palier au niveau de revenus très bas de la plupart desjusticiables ; et des droits de la défense qui sont gravement compromis dans la mesure où, après25 ans d’indépendance, le barreau de Moroni ne compte que trois avocats.Les lenteurs enregistrées dans le jugement des affaires en instance, les fortes présomptions departialité voire même de corruption (suite à la multiplication de décisions ou de jugementscontestables) qui pèsent sur certains magistrats, l’impossibilité de faire exécuter les décisionsrendues et le manque d’une maison pénitentiaire organisée et surveillée portent gravementatteinte à la crédibilité de l’institution judiciaire. Il y a lieu de souligner également ici que lesjuges comoriens sont soumis à d’énormes pressions politiques et, comme ils ne sont pasinamovibles et sont sujets à des affections qui peuvent être décidées à tout moment parl’Exécutif, ils sont facilement influençables.Le système judiciaire est également handicapé par les insuffisances quantitatives et qualitativesqui prévalent du côté des auxiliaires de justice, notamment par les problèmes que connaît lapolice nationale qui manque d’effectifs, de moyens matériels et surtout d’organisation et decompétence. Par ailleurs, ce sont les mêmes agents qui remplissent les fonctions dévolues à lapolice judiciaire, auxiliaire de la justice et donc exerçant sous la direction du Procureur de laRépublique, et celles relevant de la police administrative, chargée du maintien de l’ordre et del’exécution des lois et règlements, qui reçoit ses ordres du Ministère de l’Intérieur ; cela entraînesouvent la confusion, l’amalgame et l’inefficacité. La gendarmerie nationale remplit égalementles fonctions de police judiciaire mais, même si elle est mieux équipée que la police nationale,elle a ses propres contraintes qui limitent son apport dans ce domaine.84


Forces et faiblesses du secteurLes principales forces du secteur sont :• L’introduction par les constitutions de l’Union et des îles du suffrage direct comme uniquemoyen d’accéder au pouvoir politique à tous les niveaux, ce qui permet aux populations de sedonner les dirigeants qu’elles ont choisis ;• La forte mobilisation et implication des communautés dans la gestion de leurs terroirs ;• La justice cadiale qui, avec des moyens limités, s’occupe des affaires liées au mariage et sessuites et arrive à faire exécuter la quasi-totalité de ses décisions ;Les principales faiblesses du secteur sont :• L’absence de procédures de contrôle adéquates de la gestion des affaires publiques,notamment des finances publiques. Cela a conduit à une faible transparence et imputabilitédans la gestion des affaires publiques et favorise la corruption et les détournements de toutessortes;• L’insuffisante référence au cadre légal, inapplication ou application laxiste des textes légauxet réglementaires en vigueur. Outre le fait qu’elle démotive l’élaboration et l’adoption denouvelles lois, cette situation sème la confusion dans les affaires publiques et ouvre la voieaux favoritisme, à la corruption et aux autres délits et crimes économiques et sociaux;• La centralisation des structures opérationnelles de la justice dans les trois capitales des îlesqui contribue à éloigner la justice du justiciable;• L’absence de prisons dignes de ce nom qui permettrait de garder effectivement enfermés lesdétenus tout en respectant leurs droits. Les prisons comoriennes sont dans un état dedélabrement avancé et sont de véritables passoires. La plupart des prisonniers se promènentlibrement en ville avec tout ce que cela suppose de frustrations, voire de menace pourmagistrats et les victimes concernés;• Le nombre très limité d’avocats qui réduit la disponibilité de ces derniers et maintient lesfrais afférents à des niveaux inaccessibles y compris pour les moins pauvres;• L’insuffisance, quantitative et qualitative, des auxiliaires de justice. Le pays manqued’huissiers qualifiés et la police judiciaire est paralysée par des problèmes de fonctionnementet d’organisation qui limitent son efficacité. La justice se trouve ainsi privée d’instrumentsessentiels dans l’accomplissement de sa mission;• L’absence de la cour de cassation prévue par la loi; ce qui limite malencontreusement lesrecours pertinents offerts par la loi au justiciable.85


Atouts et contraintes du secteurLes principaux atouts du secteur sont :• Les traditions comoriennes favorables au développement de la gouvernance participative.Ainsi, certaines localités ont déjà mis en place, depuis un certain temps, des communes pilotesavant même l’adoption des textes;• Le nouveau cadre institutionnel du pays qui fait une place privilégiée à la décentralisation.Cela donne une occasion de rapprocher l’administration des administrés, d’impliquerdavantage les communautés dans la gestion des affaires publiques et donc de rendre plusefficace l’action publique;• L’émergence d’une presse libre et le développement de média communautaires qui peuventcontribuer, notamment à décloisonner et à rehausser le débat public en l’orientant vers lesproblèmes liés à la transparence et à l’imputabilité dans la gestion des affaires publiques;• L’existence de structures publiques et privées, nationales et régionales, de défense et depromotion des droits humains.Les principales contraintes du secteur sont :• La forte propension du politique à s’immiscer dans les affaires judiciaires qui empêchel’institution judiciaire de jouir de son indépendance vis à vis de l’exécutif et donc de rehaussersa crédibilité;• Le penchant naturel du Comorien à privilégier le compromis et le consensus à la référence aucadre légal et à l’application des textes;• L’incapacité de l’Etat à honorer ses engagements ( non paiement des salaires de ses agents etde ses dettes envers les privés) qui le décrédibilise et l’empêche de disposer de l’autoriténécessaire pour une application efficace des lois et règlements;• La progression de la pauvreté qui entraîne une montée des périls, notamment l’apparition denouvelles formes de délinquance et une hausse significative des crimes et délits;• L’instabilité politique qui entrave l’élaboration et l’adoption de textes légaux etréglementaires pertinents pour améliorer la gouvernance, la justice et la sécurité. La plupartdes lois adoptées par le parlement comorien sont difficilement applicables faute de textesd’application justement.86


5.6 SECTEUR DE L’ÉDUCATIONImportance du secteur de l’éducationL’importance de l’éducation pour la croissance et la réduction de la pauvreté est une évidence.Au niveau macro, une population éduquée a une productivité supérieure, est à même de maîtriserdes technologies modernes productives, et peut générer une valeur ajoutée et des revenusimportants. Au niveau micro, l’éducation augmente de beaucoup les probabilités de la personnede trouver un emploi, que celui-ci soit intéressant, non épuisant et rémunérateur. Dans uncontexte de globalisation, l’éducation devient un outil essentiel pour assurer la compétitivité de lamain-d’œuvre locale et développer des avantages comparés face aux autres pays.Performances du secteur de l’éducationLe secteur de l’éducation aux <strong>Comores</strong> se caractérise par :un accès inadéquat à l'éducationprimaire. Par ailleurs, des écarts importants persistent entre la situation des filles et garçons ainsiqu'entre les couches pauvres et non-pauvres.Le taux net d'admission au primaire 1 (TNA) est très faible et semble avoir chuté pendant ladécennie précédente (tableau 5.5). En plus, le TNA demeure plus faible pour les filles àNdzuwani et Mwali, en dépit du progrès réalisé au cours de la décennie à Ndzuwani.Tableau 55 : Taux net d’admission au CP11988-89 1998-99M F T F/M M F T F/MNgazidja 30.5 29.2 29.9 1.0 15.4 17.4 16.4 1.0Ndzuwani 28.1 14.6 21.5 0.5 19.4 17.5 18.5 0.8Mwali 46.7 39.9 43.4 0.9 23.9 14.4 19.2 0.6<strong>Comores</strong> 32.2 20.8 26.6 0.8 17.8 17.3 17.5 0.9M : masculin; F : féminin; T : total.Source :Le taux net de scolarisation au primaire (TNS), qui représente l'admission de tous les enfantsâgés de 6 à 11 ans, exprimé en pourcentage de la population âgés de 6 à 11 ans, est aussi à un1 Le taux net d'admission (TNA) désigne le nombre de nouveaux élèves au CP1 âgés de 6 ans, exprimé enpourcentage de la population ayant 6 ans.87


niveau bas (tableau 6). Une fois encore, les écarts persistent entre les jeunes filles et garçons àNdzuwani et Mwali, et entre les couches pauvres et non-pauvres.Tableau 5.6 : Taux net de scolarisation au primaireAnnée 1988-89 1998-99Région M F T F/M M F T 2 F/MNgazidja 66.1 65.0 65.5 1.0 58.8 58.4 58.6 1.0Ndzuwani 68.1 45.2 56.8 0.7 70.0 51.0 60.5 0.7Mwali 75.6 69.0 72.4 0.9 80.7 65.8 73.3 0.8<strong>Comores</strong> 68.1 55.7 62.0 0.8 64.9 55.4 60.2 0.8Source :Par ailleurs, le taux de transition dans le primaire est très bas, ce qui indique un nombre élevéd'abandons et de redoublements (tableau 5.7).Tableau 5.7 : Taux de transition de la 1 ère à la 5ème année du primaireSource MICS (2000) MEN/CGP (1999)M F T M F TCOM 26.9 22.1 24.2 32.6 31.2 31.9Source : MICS‚ 2000 ; MEN/CGP‚ 1999.La faiblesse et les défaillances de la formation technique et professionnelle se reflètent dans letaux élevé de sous-emploi en milieu urbain ainsi que dans le manque des cadres professionnels ettechniques dans des domaines porteurs de l'économie comorienne.Forces et faiblesses du secteur de l’éducationLes faibles performances s'expliquent par plusieurs facteurs et plus particulièrement par l'offreinsuffisante de salles de classes au niveau primaire, la qualité faible de l'environnement scolaire,y incluant la qualité des établissements scolaires, des matériaux didactiques et des programmesd'instruction ainsi que l'offre insuffisante d'établissements de formation technique etprofessionnelle.2 Les résultats de l'enquête MICS sont encore plus faibles a savoir, GC: 31%; AN: 28%; MO: 43%; T: 31%. Cetteenquête n'a pas trouvé d'écart selon le genre d'étudiant au niveau national.88


Le problème d'accès physique à l'éducation primaire est l'un des facteurs qui explique les faiblestaux d'admission et de scolarisation au primaire, un problème qui pénalise davantage les couchespauvres. Cette conclusion se base sur des données provenant des enquêtes auprès des ménagesoù on demande les raisons pour la non-admission or l'abandon des enfants de l'école (EDS,1996). Les capacités d'accueil actuelles au primaire sont extrêmement limitées en dépit de ladouble vacation institutionnalisée dans le pays. La situation s'est probablement aggravée au coursde la décennie passée à cause de la croissance rapide de la population, aux environs de 3% paran. Durant cette période, les effectifs inscrits à l'école primaire sont passés de 66.000 à 82.000élèves, soit un accroissement de 25%. Un rythme de construction accéléré d’écoles est requis,juste pour faire face à cette croissance démographique élevée.La qualité de l'environnement scolaire est un défi majeur à relever. La vétusté et le délabrementdes bâtiments, le déficit en tables et en bancs d’écoles, la rareté du matériel didactique, la faibledisponibilité de manuels scolaires et de services sociaux (cantines, bibliothèques), les mauvaisesconditions de sécurité et la qualification insuffisante des enseignants du primaire et du secondairereprésentent tous des facteurs qui minent la performance du système. Par exemple, hormis lelycée de Moroni, aucune école primaire, collège ou lycée des Îles ne dispose de bibliothèque.Améliorer la qualité du système éducatif constitue un complément essentiel aux actions baséessur l'augmentation du nombre de salles de classe.L'absence d'un réseau actif de formation technique et professionnelle vient aggraverl'inadéquation entre l'offre et la demande de main d'œuvre qualifiée sur le marché du travail. Lacrise économique ainsi que les difficultés conséquentes au niveau des finances publiques ontcontribué à la détérioration des institutions nationales dans ce domaine comme l’Ecole Nationaled’Agriculture, l’Ecole Nationale des Pêches et l'École Nationale Technique et Professionnelle. Ils'agit maintenant de redynamiser ces institutions et de développer de nouvelles filières deformation porteuses dans l'optique d'une stratégie de lutte contre la pauvreté.5.7 SECTEUR DE LA SANTÉComme pour l’éducation, il va de soi que le secteur de la santé joue un rôle clé pour la croissanceet la réduction de la santé. La croissance économique requiert une main-d’œuvre active,productive, dynamique et une jeunesse en état d’apprendre. La santé est une dimensionessentielle du bien-être (voir la section sur les résultats des études de perceptions de la pauvreté).Les mauvaises conditions sanitaires des pauvres résultent de la relation complexe entre la santé et89


la pauvreté. Non seulement la pauvreté mène à une mauvaise santé faute de soins adéquats, maisun mauvais état de santé contribue à entretenir la pauvreté monétaireStratégies et performances du secteurEn l’absence d’une politique sanitaire proprement dite, l’environnement sanitaire aux <strong>Comores</strong>est régi par le Plan National de Développement Sanitaire – Perspectives an 2010- (PNDS) qui aété élaboré en décembre 1993 à partir d’un document initial produit lors du premier colloquenational sur la santé à Moroni en 1991. Le document de 1993 reste dans l’esprit des principes dela déclaration d’Alma Ata adoptée en 1978, du scénario africain de développement sanitaire entrois phases de Lusaka de 1985, de l’initiative de Bamako de septembre 1987 et du consensus deDakar de novembre 1992.Le PNDS vise à ralentir la croissance démographique, à réduire les taux de mortalité et demorbidité maternelles et infantiles, à assurer un meilleur équilibre nutritionnel à la population età améliorer l’accès aux médicaments essentiels. Il définit les axes d’intervention prioritaires dupays en matière de santé ainsi que les axes d’accompagnement de la mise en œuvre. Ces axesprincipaux prennent en considération :• la structure et la gestion du système de santé, incluant le renforcement des mécanismes dedécentralisation à tous les niveaux du système de santé et l’amélioration des moyens decommunications entre les différentes structures du système de santé,• la formation et la motivation du personnel,• l’amélioration des allocations budgétaires et l’atténuation des effets négatifs de la récentedévaluation du franc comorien sur la santé de la population, ainsi que l’instauration d’uncontrôle rigoureux de l’utilisation des ressources financières au regard des réalisationsphysiques sur le terrain,• la garantie d’une meilleure accessibilité des populations aux médicaments essentiels,• l’instauration d’un système adéquat de recouvrement des coûts, et l’amélioration des moyensde communications entre les différentes structures du système de santé• la mise en place d’une commission de suivi et d’évaluation du plan.Sur la base du PNDS, les <strong>Comores</strong> se sont lancées dans la réforme de leur système de santé. Cettereforme est basée sur la décentralisation des services de santé, le recouvrement des coûts et laparticipation de la communauté à la gestion des structures de santé. En 1994, un cadre législatif,la loi N° 94-016/AF portant Cadre Général du Système de Santé et définissant les missions deservice public de la Santé, définit les principes de base de cette réforme du système de santé. Il aété complété par le décret N° 95/053/PR portant statut et organisation administrative et financière90


des établissements sanitaires et le décret N° 98/054/PR portant statut, organisation etfonctionnement des centres de santé de district et postes de santé ;La réforme du système de santé a introduit une structuration du système sur un mode pyramidal àtrois niveaux de compétence hiérarchisés (central, intermédiaire et périphérique), structurationqui subira sans doute quelques modifications avec l'avènement du nouvel ensemble comorien.Le niveau central comprend la superstructure du Ministère, la Direction Générale de la Santé, laDirection Générale des Affaires Sociales et de la Condition Féminine et la Direction Généraledes Structures. Le niveau intermédiaire du système national de santé comprend les DirectionsRégionales de la Santé (une par île) et les Centres Hospitaliers Régionaux (un par île). Le niveaupériphérique est constitué par les districts sanitaires qui offrent des services à travers deuxcentres médico-chirurgicaux, trois centres médicaux urbains, 12 centres de santé et 49 postes desanté. Ces postes de santé sont le premier contact de la population avec le système.Le tableau 5.8 rend compte de la répartition des formations sanitaires par région, conformément àl’arrêté n° 93/038/MSP fixant la carte sanitaire des <strong>Comores</strong>. Toutefois, il est à signaler que dansplusieurs localités s’érigent des infrastructures sanitaires construites par les communautés endehors de cette carte sanitaire. Si leur existence témoigne de la volonté effective descommunautés de s’impliquer dans l’offre de services de santé, le fonctionnement dans les normesde qualité requises de ces structures, entre autres en terme de ressources humaines, pose souventun problème crucial aux autorités sanitaires.91


Tableau 5.8 : Distribution de formations sanitaires en RFICURESREGION AZIDJA ZUWANI WALI EMBLENombre de Districts sanitaires 7 7 3 17Centre Hospitalier Régional 1 1 1 3Centre Médico chirurgical 1 1 - 2Centre Médico Urbain 1 1 1 3Centre de santé de district 5 5 2 12Poste de santé 22 21 6 49TOTAL 30 29 10 69Sources : Ministère de la Santé Publique/Carte sanitaireLe système de santé est composé de deux secteurs: le secteur public qui constitue l’essentiel dusystème de santé et le secteur privé qui est encore à l’état embryonnaire mais qui se développetrès rapidement. Le secteur privé se localise essentiellement en zone urbaine plusparticulièrement à Moroni. Au début de l’année 2001, on dénombrait 23 cabinets et groupesmédicaux de médecine générale et spécialisée, 6 structures d’hospitalisation dont 4 réalisent desactivités de chirurgie, 8 pharmacies d’officine et 1 laboratoire d’analyse.Cette expansion accélérée du secteur privé n’est pas suffisamment encadrée par les pouvoirspublics, notamment en matière de normes et standards, et il donne lieu à certains dérapagesconstatés particulièrement dans les prix des prestations.La reforme a permis, par le truchement de la carte sanitaire, une nette amélioration del'accessibilité géographique (80% des habitants vivent dans un rayon d’au plus 5 km d’uneformation sanitaire et 62,75% des habitants si on se limite aux structures régionales et aux centresde santé de districts) aux structures de santé à la population et des gros efforts ont été déployésdans le domaine de la formation du personnel médical et paramédical. Par ailleurs, la mise enplace de la Pharmacie Nationale Autonome des <strong>Comores</strong> (PNAC), chargée d’approvisionner lepays en médicaments sous forme générique, a permis d’accroître la disponibilité desmédicaments essentiels à moindre coût.Malgré les progrès substantiels enregistrés grâce à la réforme de 1994, le système de santé dupays reste encore peu efficace et la plupart des indicateurs sanitaires sont alarmants (fortesprévalences et incidences des infections respiratoires aiguës, des maladies diarrhéiques, dupaludisme, de la malnutrition etc.). On note, par ailleurs, une recrudescence des infections92


sexuellement transmissibles qui fait craindre le pire quand à l’évolution du VIH/SIDA dans notrepays qui reste encore relativement épargné par cette pandémie. En effet‚ même si le taux deprévalence à l’infection à VIH est encore faible (0,11%), une explosion est possible et doit êtreprévenue maintenant. Malheureusement, les activités de prévention contre le SIDA sont limitées.La population est très peu informée sur les problèmes de santé limitant ainsi l’adoption decomportements de prévention.La démographie galopante qui accroît considérablement les besoins (surtout au niveau de la santéde la mère et de l’enfant) conjuguée à la pauvreté des ménages maintient la population dans unmauvais état sanitaire. Des enquêtes légères laissent supposer que le système de recouvrementdes coûts a contribué à rendre inaccessibles des soins de base à certaines catégories de lapopulation sans pour autant générer de réelles retombées sur la qualité de l’accueil et desprestations dans les structures de santé.Un examen de certains indicateurs de suivi des objectifs de la CIPD relatifs à la santé de lareproduction (Tableau 5.9) laisse clairement apparaître la faible performance du système sanitairecomorien, surtout quand on sait que l’amélioration de la santé de la mère et de l’enfant (laréduction des niveaux des mortalités maternelle et infantile) est au centre des préoccupations despouvoirs publics telles qu’elles transparaissent au travers du PNDS. Les valeurs affichées par cesindicateurs sont d’autant plus inquiétantes qu’un programme de SMI/PF appuyé par plusieursbailleurs de fonds est mis en oeuvre depuis plus d’une décennie dans le pays.Tableau 5.9: Indicateurs de suivi des objectifs de la CIPD liés à la santé de la reproductionIndicateur Valeur ObjectifAccouchements réalisés avec l'assistance d'un personnelqualifié (%)63 >= 60Taux de prévalence de la contraception (%) 19,4 >= 55Taux de mortalité infantile (pour mille) 59


qualité en rapport avec leur situation sanitaire et ont donc souvent recourt à des méthodestraditionnelles parfois néfastes pour leur santé.Forces et faiblesses du système de santéLes principales forces du système de santé sont :• La participation communautaireLes communautés villageoises et régionales sont très actives dans le domaine de la santé.Malgré un manque d’encadrement approprié, elles prennent une part active dans la gestion dusystème de santé dans le cadre de la réforme et participe très significativement à sonfinancement à tous les niveaux.• La Pharmacie Nationale Autonome des <strong>Comores</strong> (PNAC)La création de la PNAC permet la mise à la disposition des populations et des formationssanitaires des médicaments essentiels et autres produits médicaux de base à bas prix.Les principales faiblesses du système de santé sont :• Une gestion inadéquate du système au niveau centralLa structuration du système de santé sur un mode pyramidal à trois niveaux de compétencehiérarchisés nécessite une gestion efficace et transparente pour générer des résultats probants.Or des insuffisances importantes sont enregistrées, notamment au niveau du Ministère de laSanté, dans le pilotage du système en ce qui concerne notamment la répartition et la gestiondu personnel de santé et la fixation des normes et standards.• La mauvaise qualité de l’accueil et des soins dans les structures sanitaires publiquesLa qualité de l’accueil dans les formations sanitaires publiques laisse à désirer et constituesans doute le principal obstacle à la fréquentation de ces structures. Par ailleurs, le niveau desprestations des soins est considéré comme très insuffisant et pousse de nombreux patients, ycompris les pauvres, à recourir au système privé de santé qui est pourtant beaucoup plus cher.• La vétusté des infrastructures et des équipementsCertaines infrastructures sanitaires, notamment des postes de santé, se trouvent dans un étatproche de l’insalubrité, ce qui contribue à les disqualifier auprès des populations. Par ailleurs,la plupart des formations sanitaires manquent d’une partie notable des équipements etmatériels requis pour qu’elles puissent exercer les missions qui leur sont assignées dans lecadre de la réforme sanitaire.• L’insuffisance de personnel qualifiéLe système de santé ne dispose pas du personnel qualifié requis pour atteindre les objectifsarrêtés dans le cadre de la réforme. Par exemple, les postes de santé sont tenus par deux94


infirmiers de l’Assistance Médicale et chaque district sanitaire est couvert par un seulmédecin. Cette situation est d’autant plus grave qu’elle est statutaire.• La non prise en compte du cas des indigentsLa réforme du système de santé, en introduisant le principe de recouvrement des coûts, arendu difficilement accessibles certains soins à certaines catégories de la population. Enparticulier, certains pauvres ne peuvent même pas accéder aux soins de santé de base.• Une mauvaise répartition du personnel de santé entre les régions du pays.Cette répartition est inégale entre les îles mais cette inégalité est encore plus importante entreles villes et les campagnes. Les milieux ruraux sont moins dotés en personnel de santénotamment par le fait que chaque district sanitaire, quelle que soit sa taille, compte unmédecin. Des déséquilibres importants sont aussi notés dans la répartition du personnelqualifié aux différents niveaux du système de santé et notamment dans la répartition desprestataires spécialisés qui sont pour la plupart concentrés dans les zones urbaines. Lesresponsables ont essayé, en vain, d’opérer un redéploiement du personnel à la suite de la miseen place de la reforme du système de santé dans l’optique de renforcer la capacité techniquedes équipes exerçant en périphérie. Le personnel de santé est, de façon générale, réticent àexercer dans les zones défavorisées où il existe peu de perspectives de revenuscomplémentaires par des activités parallèles dans le secteur privéAtouts et contraintesLes principaux atouts du système de santé sont :• La décentralisationLe nouveau cadre institutionnel que le pays s’est donné et qui met en avant la décentralisationpolitique et administrative peut permettre un meilleure pilotage du système de santé etaccroître son efficacité. Le principe fondamental de participation communautaire à la gestiondu système, inscrit dans la réforme, peut trouver ici un terrain plus favorable à sa mise enoeuvre• Les ONG et les Communautés localesLe pays dispose d’un nombre important d’organisations non gouvernementales nationales etinternationales opérant activement dans le secteur de la santé, plus particulièrement en santéde la reproduction. Par ailleurs, les communautés locales se sont mobilisées pour améliorerl’état sanitaire de leur région et coopèrent souvent avec les Comoriens de la diaspora ou desorganismes étrangers pour développer des petits projets dans le domaine de la santé. Un bonencadrement de ces ONG et des communautés locales permettrait d’engranger des profitsimportants pour le système de santé du pays.95


• Les nombreux programmes et projets sectoriels de santé appuyés par les partenaires audéveloppementLes <strong>Comores</strong> bénéficient d’une aide importante de la communauté internationale dans ledomaine de la santé. Toutefois, cet appui se fait au travers de programmes et projets verticauxet peu intégrés qui répondent plus souvent aux mandats et préoccupations des donateursqu’aux besoins liés au PNDS. Une meilleure orientation et une coordination appropriée desinterventions dans le secteur auront un impact majeur sur le système de santé du pays.Les principales contraintes du système sont :• La forte fécondité de la femme comorienneLa forte fécondité de la femme comorienne entraîne une importante demande en matière desanté maternelle et infantile, d’autant plus que les maternités nombreuses et rapprochéestendent à maintenir les femmes dans un mauvais état sanitaire qui lui fait courir des risquesaccrus à l’accouchement. Par ailleurs, cette forte fécondité maintient une structure par âgetrès jeune, donc une proportion très élevée des enfants dans la population, engendrant unedemande croissante et variée dans les diverses affections infanto-juvéniles.• La faiblesse du budget de l’Etat alloué à la santéLes problèmes financiers que connaît le pays font que non seulement les montants alloués ausecteur de la santé dans le budget de l’Etat sont dérisoires au vu de l’importance des besoinsdans le secteur, mais que ces sommes inscrites dans le budget ne sont qu’en partie seulementmises à la disposition des structures pertinentes. Ainsi, la plupart des formations sanitaires nereçoivent plus, depuis belle lurette, les subventions de fonctionnement qui sont pourtantinscrites au budget ; elles sont contraintes de vivre sur la participation communautaire et sontde plus en plus tentées de hausser les prix de leurs prestations• La faiblesse des revenus de la population pour financer le systèmeLe nouveau système de santé est assis, entre autres, sur une participation communautaire aurecouvrement des coûts. Or, l’aggravation de la pauvreté empêche une partie importante de lapopulation, bien qu’elle ne rejette pas le principe et malgré sa disponibilité, à faire face aufinancement de leurs soins de santé• Les difficultés de l’Etat à payer ses fonctionnairesL’Etat a d’énormes difficultés à payer ses fonctionnaires. Ceux-ci accusent plus d’unevingtaine de mois d’arriérés de salaires et leurs carrières (les avancements et autresintégrations statutaires) sont gelées. Cela a entraîné une démotivation et un absentéismeimportants des agents de l’Etat et donc du personnel médical et paramédical• L’analphabétisme et le faible niveau d’instruction de la population, notamment les femmes eten milieu rural,96


L’analphabétisme et le faible niveau d’instruction de la population, notamment la populationrurale et les femmes, rend fort difficile les activités en matière d’IEC dans le domaine de lasanté. Cette catégorie de la population accède très peu aux informations pertinentes luipermettant de saisir les opportunités potentielles pour protéger sa santé et améliorer sonenvironnement sanitaire.5.8 NUTRITION ET SÉCURITÉ ALIMENTAIRESituation en matière de nutritionUne bonne nutrition constitue évidemment une condition pour avoir une main-d’œuvre en bonnesanté et productive. S’alimenter adéquatement est aussi un besoin essentiel et une mauvaisenutrition reflète souvent un état de pauvreté.La situation nutritionnelle reste préoccupante aux <strong>Comores</strong> et s'est probablement détériorée aucours de la décennie passée. La malnutrition parmi les enfants de moins de cinq ans, ainsi que lescarences en iode, en vitamine A et en fer semblent être les problèmes les plus importants. Lamalnutrition a atteint un niveau alarmant (tableau 5.10).97


Tableau 5.10 : Évolution des taux de malnutrition protéino-énergétiques chez les enfants demoins de 3 ans aux <strong>Comores</strong> et par île en 1991, 1996 et 2000IndicateursRégions Mwali Ndzuwani Ngazidja <strong>Comores</strong>AnnéesProportion d’enfantsaccusant une insuffisancepondéraleProportion d’enfantsdont l’insuffisancepondérale est sévèreProportion d’enfantsaccusant un retard decroissanceProportion d’enfantsdont le retard decroissance est sévèreProportion d’enfantsaccusant une émaciationProportion d’enfantsdont l’émaciation estsévère1991 1996 2000 1991 1996 2000 1991 1996 2000 1991 1996 200016,2 30,6 39,1 17,7 32,7 36,5 10,6 18,9 19,8 13,9 25,8 26,35,1 9,7 16,0 7,1 11,9 14,7 2,5 4,0 4,9 4,6 7,9 8,717,6 27,8 35,0 24,2 41,6 51,6 18,2 27,6 38,9 20,6 33,8 42,39,6 5,6 16,5 18,3 19,8 33,9 10,4 8,8 19,5 12,4 13,4 23,43,0 16,7 24,2 3,5 10,1 10,3 3,5 5,2 10,4 3,5 8,3 11,50,7 4,2 12,7 1,2 2,0 3,3 1,2 1,6 3 1,1 2,0 3,9Source : Enquête sur l’état nutritionnel des enfants de 2 ans, 1991; Enquête Démographique et santé, 1996; Enquête MICS, 2000.Les données les plus récentes, celles du MICS, témoignent sans ambiguïté de l'ampleur et lagravité des problèmes nutritionnels. Les prévalences mesurées des différents types demalnutritions sont très élevées. Le retard de croissance (la malnutrition chronique) à Ndzuwaniainsi que l'émaciation (la malnutrition aiguë) à Mwali sont les préoccupations majeures. Parailleurs, 10% des femmes de 15 à 49 ans ont un indice de masse corporelle (IMC) inférieur auxnormes internationales, ce qui représente une malnutrition aiguëe. Cette situation est plus sévèreen milieu rural (12 % des femmes) qu’en milieu urbain (5 %).Les carences en iode se traduisent par un taux de prévalence du goitre de 14%. Les îles de Mwali(15%) et Ndzuwani (16%) ainsi que les filles (16% contre 11% pour le garçons) sont les plustouchés. Les carences en vitamine A sont modérées aux <strong>Comores</strong>, car la prévalence mesurée estde 1,5%. Ngazidja est l’île la plus affectée avec 3,2%. Finalement, il n'existe pas d'étude surl'anémie nutritionnelle due au carence en fer. Toutefois, on peut présumer qu'elle affecte uneproportion importante de personnes, surtout des femmes enceintes et des enfants d'âge scolaire.Faiblesses en matière de nutrition98


Un nombre de facteurs clés sont à l'origine des problèmes nutritionnels dans le pays. D'abord, lesfaiblesses du secteur agroalimentaire se traduisent par un déficit structurel de la production dedenrées alimentaires par rapport aux besoins de consommation de la population. Deuxièmement,une pourcentage élevé de la production alimentaire est perdue, faute de techniques detransformation, de conservation et de stockage adéquates. Comme le démontre le tableau 5.11les conséquences sont néfastes pour la disponibilité énergétique, qui reste en deçà du niveau jugésuffisant pour satisfaire les besoins caloriques de la population.Tableau 5.11 : Évolution des disponibilités alimentaires en Kilocalories par tête et par jourRubriques 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1992-97Production Vivrière Nationale 890 976 829 1186 1173 1150 1034Importations Alimentaires 673 809 751 973 754 796 792Disponibilité Énergétique 1564 1785 1580 2160 1928 1947 1827Carences Énergétiques (%)* 72 83 73 100 89 90 85Source :* Les carences énergétiques représentent la disponibilité énergétique comme pourcentage des besoins caloriques, établi au niveau de 2160Kcal par personne et par jour.En ce qui concerne la consommation, trois facteurs contribuent aux problèmes nutritionnelsmentionnés ci-dessus. D'abord, le pouvoir d'achat très limité des couches pauvres les privent desmoyens de s'approvisionner en aliments pour satisfaire leurs besoins nutritionnels. Selonl'enquête Budget- consommation de 1995, 33% des ménages se trouvent dans l'impossibilitéfinancière de se payer un panier de biens alimentaires équivalent aux normes caloriques de 2160Kcal par personne et par jour (sans parler des dépenses non-alimentaires). Une stratégie effectived’augmentation des revenus des couches pauvres constitue un élément clé pour combattre lamalnutrition aux <strong>Comores</strong>.Par ailleurs, il y a des problèmes au niveau de la qualité et de l'innocuité des alimentsconsommés, en particulier des produits importés qui ne subissent aucun contrôle. Des produitsde qualité douteuse, dont les dates de péremption sont dépassées, sont vendus auxconsommateurs non avertis, notamment les femmes analphabètes. Il y a un besoin urgent demettre en place des dispositions visant à résoudre le problème du contrôle de la qualité desdenrées alimentaires et de protection des consommateurs.De plus, un certain nombre de pratiques alimentaires traditionnelles viennent aggraver cesproblèmes. La préparation inappropriée des aliments pour les jeunes enfants occasionnent denombreuses affections, y incluant les diarrhées aiguës. Les habitudes et les coutumes amènent99


des parents à priver les enfants de certains aliments alors qu'ils sont facilement accessibles. Enoutre, une proportion faible de nourrissons (24%) est nourrie exclusivement au lait maternel.Finalement, le régime alimentaire est peu diversifié, ce qui expose la population à des carencesnutritionnelles, incluant le goitre et l'anémie par carence en fer.5.9 EAU POTABLE, ENVIRONNEMENT ET ASSAINISSEMENTLes <strong>Comores</strong> sont caractérisées par une richesse et une diversité environnementalesconsidérables. Malheureusement‚ en raison d’une pauvreté extrême‚ la survie de la populationdépend grandement des ressources naturelles qui n’arrivent plus à ce régénérer en raison de laforte pression démographique. Les problèmes environnementaux sont majeurs et doivent être prisen compte dans le cadre de la SCRP. En effet‚ on reconnaît aujourd’hui que la dégradation desressources naturelles et de l’environnement apparaît de plus en plus comme un facteur limitant ledéveloppement futur des <strong>Comores</strong>‚ tant sur le plan du secteur agro-alimentaire que du point devue du secteur éco-touristique.Les principaux problèmes recensés sont :• un déboisement accéléré lié aux besoins énergétiques croissant des ménages‚ de l’industrie dela transformation et du secteur de la construction ;• la sur-exploitation du littoral‚ notamment le sable de mer‚ les coraux et les ressourceshalieutiques côtières;• le tarissement des sources d’eau ;• l’insalubrité de l’habitat.Le déboisement‚ l’eau et la sur-exploitation du littoralLa forêt de l’archipel est soumise à une déforestation massive, due aux besoins croissants enressources énergétiques, aux techniques d’exploitation agricole extensive ainsi qu’à l’absence derèglement forestier. Cette déforestation excessive a pour conséquences une accélération desphénomènes naturels d’érosion, une baisse de la fertilité de sols, l’assèchement des rivières et dessources d’eau‚ la destruction des sites à potentiel touristique ainsi que la pression sur denombreuses espèces menacées d’extinction.Le prélèvement des ressources naturelles s’avère une nécessité vu l’état de pauvreté de lapopulation et la forte croissance de celle-ci. La demande en matériaux de construction est en forteaugmentation alors que les ménages utilisent toujours le bois comme principale source d’énergiepour la cuisine. La plupart des habitations sont construites avec des madriers et des planches. A100


ceux-là s’ajoutent d’autres facteurs qui contribuent également à la déforestation. Il s’agitnotamment :• des distilleries d’ylang-ylang à Anjouan et dans un moindre mesure à Mohéli ;• des charbonneries à Ngazidja et à Anjouan ;• des fours pour la fabrication de la chaux à Anjouan et à Ngazidja ;• du problème foncier et du manque de terre à Anjouan qui viennent accentuer la pression surles forêts encore inexploitées.Par ailleurs, les zones côtières subissent une double agression par les apports terrigènes quiperturbent profondément les écosystèmes côtiers, notamment l’envasement qui détruit les coraux‚et par les prélèvements le long des plages. Il en découle une fragilisation des cotes et unemodification de leur rôle de zone tampon laissant ainsi la place à l’érosion côtière.Le prélèvement du sable de mer qui occupe une place centrale dans la construction deshabitations est une menace pour les écosystèmes et le littoral. Enfin‚ les techniquestraditionnelles de pêche exercent localement une pression forte sur les ressources halieutiquesdans les zones côtières.L’insalubrité de l’habitatAvec la croissance démographique et l’urbanisation, on note une augmentation significative de laproduction de déchets ménagers (estimée à environ 1m 3 /habitant en moyenne)‚ un accroissementdes déchets hospitaliers non traités et une hausse des rejets liés aux activités de transport (huilesde vidange, carcasses de voiture‚ etc.). Actuellement‚ la production de déchets n’est prise encharge par aucune structure de ramassage et de traitement. D’une manière générale‚ l’absence desystème de gestion des déchets et d’assainissement constitue un problème majeur de santépublique.La gestion des eaux usées et pluviales s’avère une préoccupation majeure aussi bien en milieuurbain qu’en milieu rural. Le problème demeure entier dans la plupart des villes qui n’ont pu yconsacrer les moyens nécessaires pour faire face aux difficultés engendrées par ce type denuisances. Dans les centres villes, les ordures qui s’entassent constituent également une forme depollution visuelle et elles dégagent de surcroît des mauvaises odeurs fétides mal supportées parles habitants.Les spécificités insulaires101


Grande ComoreL’île de la Grande Comore est caractérisée par des coulées noires provenant d’éruptions récenteset non encore colonisées. Le relief est moins marqué par le phénomène de l’érosion‚ sauf auniveau de Mbadjini. Par contre, elle est marquée par la présence de deux forêts naturellesd’altitude que sont les massifs du Karthala et de la Grille. Ce dernier est complètement atrophié àl’heure actuelle. Les ressources forestières sont donc très limitées.De nombreuses plages de l’île sont déjà abîmées par l’extraction de sable et de corail. Ceci relèvedu fait que traditionnellement les habitations‚ surtout en milieu rural‚ sont faits de sable et lecorail est utilisé pour la préparation de la chaux servant de liant. L’exemple le plus frappant estcelui du site balnéaire de Malé au sud Est de l’île. En effet, le site comptait 4 plages il y a 15ans ; il n’en reste qu’une aujourd’hui (même si l’article 79 de la loi cadre de l’environnementprévoit 50000 à 500000 FC d’amende en cas d’extraction de matériaux du littoral.La faune marine est aussi menacées et en péril‚ notamment par le braconnage des tortuesmarines. Les plages de l’île, plus exactement celles de Bouni, Itsandzeni au Nord Est et celle deMoidzaza Boini à l’Ouest répondent aux exigences écologiques de deux espèces de tortuesmarines mondialement menacées d’extinction. Elles constituent donc leurs zones privilégiéespour la ponte. Ces tortues sont principalement menacées par le braconnage de pêcheurs des deuxautres îles qui cherchent une viande à bon marché (le kilogramme coûte 200 FC, soit 2 fois moinsque le poisson et 4 fois moins que la viande) et réputée de bonne qualité. Par ailleurs‚ la pratiquede pêche à la dynamite ou par empoisonnement, le piétinement des lieux de ponte et ledéboisement en bordure des plages sont également des menaces à la survie de certaines espècesde tortue.Certains travaux d’assainissement sont effectués‚ notamment la construction de canalisation et lebétonnages de ruelles. Ces travaux sont souvent exécutés par les communautés locales. Il restetoutefois un travail significatif à faire dans ce sens en dépit des efforts consentis.La gestion des déchets est particulièrement déficiente. On retrouve des amas de déchets un peupartout‚ notamment à Moroni et en bordure du littoral.L’alimentation en eau est un facteur essentiel de confort. Cependant, si à Anjouan et à Mohéli ilexiste des sources ou des rivières pérennes, ce n’est pas le cas en Grande- Comore oùl’approvisionnement en eau pose un problème. Pourtant, l’île est particulièrement bien arrosée ducôté ouest où l’essentiel de la population est concentrée. Le manque chronique d’eau potable a102


favorisé le captage des eaux de pluie et la construction de citernes domestique et publique. Laplupart de ces citernes sont non couvertes avec tout ce que cela suppose pour la qualité de l’eau.Moroni est alimenté en eau par la nappe de Vouvouni, soit 2 forages effectués à 38 et 42 m. Cetteeau est stockée dans trois châteaux d’eau et alimente 120 fontaines publiques urbaines etplusieurs villages environnants. Elle permet à 3849 abonnés de jouir de l’eau courante au robinet(soit 2,8 millions de mètres cube qui déservent 6% de la population). La seule entreprise dans lesecteur est la MAMWE qui assure la production et la distribution mais qui rencontre desproblèmes de gestion qui accroissent le coût du service.MohéliL’île de Mohéli est la plus petite et la moins peuplée des trois îles. L’île est réputée pour lecharme de ses côtes, sa grande biodiversité et la richesse de ses ressources marines et côtières.Toutefois l’île s’appauvrit à travers une dégradation environnementale accélérée‚ le déclin desressources naturelles et de sa biodiversité.La beauté du monde sous-marin et celle de coraux colorés peuplés de nombreuses espècesmarines, conjuguée aux plages de sable fin typiques des côtes de la région font de Mohéli unparadis naturel.La gestion intégrée des zones côtières apparaît ici comme la meilleure approche en faveur d’undéveloppement durable des régions côtières. C’est pour cette raison que l’île a vu la mise enplace d’un Parc marin. Cette aire protégée occupe la presque totalité de la partie sud de l’île‚ duvillage d’Itsamia au village de Miringoni .L’approvisionnement en eau des populations de l’île se fait principalement à partir des eaux desurface et des eaux de sources. Certaines localités s’approvisionnent à partir des puitstraditionnels de grands diamètres. Sur le plateau de Djando les sources d’approvisionnement setarissent au fil des ans de plus en plus tôt pendant la saison sèche et l’eau est fortementcontaminée par les latrines à fond perdu des habitations. Dans cette région‚ l’approvisionnementen eau est devenu la préoccupation essentielle de toutes les communautés.Les ressources en eau de l’île de Mohéli n’ont jusqu’à ce jour jamais été précisément quantifiées.Une étude hydrogéologique et hydrologique de l’île incluant le calcul du bilan hydriquepermettrait de répondre à cette question.103


Environ 20% des ménages possèdent l’eau courante à domicile (même si elle est de mauvaisequalité) avec des problèmes de rationnement en saison sèche. Certains projets en cours tententd’améliorer la situation.En termes de qualité, l’eau de robinet et de fontaines publiques, l’eau de pluie et des puits etautres sources doivent être considérées comme insalubres. Cela résulte du fait qu’à Mohéli, l’eaude robinet provient de captage d’eaux de surface qui ne subissent aucun traitement, niphysique‚ni bactériologique‚ ni chimique. Il n’existe même pas de périmètre de protection autourdes ouvrages de captage laissés dans un complet abandon.On dénombre quelques travaux d’assainissement au niveau de l’île. Il s’agit notamment dubétonnage des ruelles et des canalisations servant à évacuer les eaux de pluie. Jusqu’à ces joursseuls quelques villages ont bénéficié de ces travaux . Le Fond d’Appui au DéveloppementCommunautaire (FADC) a financé cinq projets de cette nature au niveau de l’île.La gestion des déchets est inexistante. Aucune tentative n’a été menée dans ce sens jusqu’àprésent alors que près des deux tiers de la population utilisent des latrines traditionnelles faites‚soit en ciment ou en matériaux locaux.AnjouanAnjouan est la deuxième plus grande île de l’archipel des <strong>Comores</strong> en superficie‚ la croissancedémographique et la densité de population sont les plus élevées du pays. Le patrimoine forestierde l’île a pratiquement disparu‚ il reste moins de 2500 hectares de forêt.L’économie des régions rurales est basée sur l’agriculture de subsistance. La terre cultivable estrare‚ ce qui oblige les populations à se rabattre sur des terres impropres à l’agriculture, auxpentes trop raides ou peu productives. Il existe un peu de terres arables de très bonne qualité‚mais elles appartiennent à des propriétaires qui n’utilisent pas la terre intensivement ou quipratiquent des cultures d’exportation telles que l’ylang ylang ou la girofle.Les distilleries de l’ylang-ylang sont nombreuses (300 distilleries dans l’île) ainsi que lesfabricants de chaux ce qui contribue à accentuer la pression sur la forêt.Dans les années 70, une part importante de la population de l’île avait accès à des réseauxd’adduction d’eau potable alimentés par des captages sur des sources et des rivières. Le taux decouverture a considérablement diminué à cause du manque d’entretien des réseaux‚ de leur sous-104


dimentionnement par rapport à la croissance de la population et de l’amenuisement progressif dudébit des sources et des rivières provoqué par la déforestation massive des bassins versants.On dénombre quinze zones couvertes par le réseau d’adduction d’eau dans l’ensemble de l’île.Cependant, il s’est avéré que cette disponibilité hydrologique connaît divers problèmes :• une insuffisance des infrastructures hydrologiques,• une eau non traitée et de mauvaise qualité,• une quantité insuffisante due à l’explosion démographique d’une part et de l’autre par lavétusté des réseaux.Les problèmes de la qualité de l’eau sont aussi importants ici. L’eau captée sur les rivières nesubit aucune sédimentation‚ ni filtration, encore moins de traitement chimique de désinfection.Ceci a des conséquences directes sur l’état de santé de la population : maladies diarrhéique ettyphoïde notamment.Au niveau de l’assainissement‚ on dénombre quelques ouvrages de bétonnage des ruelles et decanalisation servant à évacuer les eaux de pluie.105

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