R&F Analyse des pratiques Approches psychosociologique et ...

R&F Analyse des pratiques Approches psychosociologique et ... R&F Analyse des pratiques Approches psychosociologique et ...

arianesud.com
from arianesud.com More from this publisher
12.07.2015 Views

L'écriture de la pratique professionnelleThe book which has been published on the basis of this research is acontribution to this identification of knowledge. The will to publish theresults is also an invitation to an open dialogue centered on ways toconstruct or formalize tacit knowledge in the helping professions.Identifier des savoirs spécifiquesToute prsonne occupnt une fonction de cadre a le souci d'assurer l'avenir profes¬sionnel de ses collaborateurs. La directrice des soins infirmiers de l'hôpital universi¬taire de Genève, en développant des pstes d'infirmières spécialistes cliniques,exerçant un travail de consultante auprès des services de soins, était parfaitementconsciente de la nécessité de défendre ce statut novateur et fragile. Les infirmièresspécialistes cliniques (ISC), qui sont fréquemment d'anciennes infirmières de soins etparfois, d'anciennes respnsables de service, ont un cahier des charges de spécia¬liste travaillant dans un secteur d'activité médicale inscrit dans l'organisation hospi¬talière, comme, par exemple, les maladies cardio-vasculaires ou la stomafhérapie.Ce cahier des charges peut également être défini à partir de domaines cliniques envoie de constitution, tels que ceux de la douleur ou de l'image corprelle. Il s'agit,pur les spécialistes cliniques, d'exercer un rôle d'experte en soins infirmiers dansun champ clinique déterminé, en répnse aux besoins d'une ppulation spécifiquede patients. Ce statut requiert également des infirmières spécialistes cliniques qu'ellesdispensent des prestations de soins hautement qualifiés dans le cadre d'une consul¬tation spécialisée ou dans des situations de soins complexes, qu'elles élaborent etréalisent enfin des programmes d'enseignements destinés au patient, à ses proches42 | ainsi qu'aux equips de soins et autres professionnels. Elles peuvent, en outre, réaliserdes programmes de recherche et d'assurance-qualité en soins infirmiers et prticiperaux recherches entreprises pr le corps médical.La directrice des soins infirmiers avait, pr ailleurs, la conviction que cet espee depratique infirmière puvait devenir une source d'enrichissement réel pur la profes¬sion. Elle jugeait, donc, primordial de valoriser l'expertise de cette nouvelle fonction.Les échos qui lui prvenaient étant avant tout fondés sur des témoignages oraux, elleme sollicita pur me demander de concevoir dans ce nouveau domaine d'activités,une manière de formaliser les savoirs « tacites » que ces praticiennes élaboraient auquotidien. Elle se rendait parfaitement compte de l'ampleur et de la complexité de latâche qu'elle me confiait. Personnellement, j'ai vu dans sa demande une occasiond'approfondir le problème de la construction et de la portée du savoir clinique dansles professions d'aide. Des recherches précédentes, inspirées des travaux d'histoirede vie, m'avaient permis, en effet, de comprendre la puissance du récit et la placeque celui-ci puvait occuper dans un travail d'analyse de pratique. Je me suis donclancé dans une aventure qui s'est révélée pssionnante et dont je voudrais, dans cetarticle, souligner l'intérêt et la signification.RECHERCHE et FORMATION N° 39 - 2002

Pierre DOMINICERencontrer la directrice des soins infirmiers et discuter avec elle de sa demande nevoulait évident pas dire que le group des professionnelles concernées allait approu¬ver son projet. De fortes réticences se sont manifestées dès la première réunion. Lesuniversitaires sont, pour les infirmières, des gens de puvoir qui sont assimilés auxmédecins et n'ont donc guère l'habitude de défendre leur cause. Le climat hospita¬lier est, de plus, régi pr le respct des hiérarchies, et les réticences auxquelles je mesuis heurté tenaient, pur les infirmières, en grande partie, au fait de se mettre auservice d'un projet qui n'était ps le leur. Des heures de discussion, et, prfois d'af¬frontement, ont été nécessaires pur prouver notre bonne foi. Nous avons convenude procéder, dans un premier temps, à une phase exploratoire qui devait nousconduire à une identification plus précise des thèmes sur lesquels pouvait prter untravail de recherche. Nous étions, alors, trois chercheurs issus de la Faculté de psy¬chologie et des sciences de l'éducation, deux étudiants avancés de niveau pstlicence,auxquels j'avais demandé si le projet les intéressait, en vue du travail qu'ilsavaient à rédiger dans un cours prtant sur les « démarches de recherche en for¬mation d'adultes ». Brunella Colombelli était docteur en biologie et Benoît Michel,diplômé enpsychologie clinique. Tous deux avaient travaillé pendant plusieursannées dans leur domaine professionnel, mais, tout comme moi, ils ignoraient lequotidien de l'hôpital, sinon pur l'avoir connu en tant que malade.Suite à la suggestion de l'adjointe de la directrice des soins infirmiers, nous avonstous trois commencé pr un temps d'observation de plusieurs demi-journées, enaccompagnant en blouse blanche, dans son service, l'une des infirmières spécialistescliniques. Ces temps pssés au concret de l'activité hospitalière nous ont grandementaidé à saisir les enjeux de cette nouvelle orientation professionnelle. Ils nous ont per¬mis, suite aux divers entretiens qui ont suivi les temps d'observation, de discuter prsonnellementavec chaque spécialiste clinique, d'expliciter nos intentions et declarifier l'objet général de la recherche envisagée. Les réunions de l'ensemble desmembres du group, au cours desquelles étaient restituées nos observations, ontégalement contribué à créer un climat de confiance oui a rendu pssible le contratde recherche auquel nous sommes prvenus après plusieurs mois de tâtonnement.Une recherche centrée sur l'activité de professionnels engagés dans un contexte ins¬titutionnel aussi codifié que le contexte hospitalier exige nécessairement un préalablede concertation. L'objet de recherche propse pr un supérieur hiérarchique ne putêtre impsé aux collaborateurs concernés. Pour s'impliauer dans un projet, ceux-cidoivent en comprendre le sens et la prtée institutionnelle. Ils ont, en outre, besoinde savoir à quoi ils s'engagent en termes de temps et à quoi va aboutir le travailauquel ils vont donner beaucoup d'énergie. Les questions, les réticences, lesméfiances, qui ont fait l'objet d'échanges nombreux, au cours de ces premiers mois,constituent sans doute une garantie indispnsable à la réalisation d'une tellerecherche.41RECHERCHE et FORMATION N° 39 - 2002

Pierre DOMINICERencontrer la directrice <strong>des</strong> soins infirmiers <strong>et</strong> discuter avec elle de sa demande nevoulait évident pas dire que le group <strong>des</strong> professionnelles concernées allait approu¬ver son proj<strong>et</strong>. De fortes réticences se sont manifestées dès la première réunion. Lesuniversitaires sont, pour les infirmières, <strong>des</strong> gens de puvoir qui sont assimilés auxmédecins <strong>et</strong> n'ont donc guère l'habitude de défendre leur cause. Le climat hospita¬lier est, de plus, régi pr le respct <strong>des</strong> hiérarchies, <strong>et</strong> les réticences auxquelles je mesuis heurté tenaient, pur les infirmières, en grande partie, au fait de se m<strong>et</strong>tre auservice d'un proj<strong>et</strong> qui n'était ps le leur. Des heures de discussion, <strong>et</strong>, prfois d'af¬frontement, ont été nécessaires pur prouver notre bonne foi. Nous avons convenude procéder, dans un premier temps, à une phase exploratoire qui devait nousconduire à une identification plus précise <strong>des</strong> thèmes sur lesquels pouvait prter untravail de recherche. Nous étions, alors, trois chercheurs issus de la Faculté de psy¬chologie <strong>et</strong> <strong>des</strong> sciences de l'éducation, deux étudiants avancés de niveau pstlicence,auxquels j'avais demandé si le proj<strong>et</strong> les intéressait, en vue du travail qu'ilsavaient à rédiger dans un cours prtant sur les « démarches de recherche en for¬mation d'adultes ». Brunella Colombelli était docteur en biologie <strong>et</strong> Benoît Michel,diplômé enpsychologie clinique. Tous deux avaient travaillé pendant plusieursannées dans leur domaine professionnel, mais, tout comme moi, ils ignoraient lequotidien de l'hôpital, sinon pur l'avoir connu en tant que malade.Suite à la suggestion de l'adjointe de la directrice <strong>des</strong> soins infirmiers, nous avonstous trois commencé pr un temps d'observation de plusieurs demi-journées, enaccompagnant en blouse blanche, dans son service, l'une <strong>des</strong> infirmières spécialistescliniques. Ces temps pssés au concr<strong>et</strong> de l'activité hospitalière nous ont grandementaidé à saisir les enjeux de c<strong>et</strong>te nouvelle orientation professionnelle. Ils nous ont per¬mis, suite aux divers entr<strong>et</strong>iens qui ont suivi les temps d'observation, de discuter prsonnellementavec chaque spécialiste clinique, d'expliciter nos intentions <strong>et</strong> declarifier l'obj<strong>et</strong> général de la recherche envisagée. Les réunions de l'ensemble <strong>des</strong>membres du group, au cours <strong>des</strong>quelles étaient restituées nos observations, ontégalement contribué à créer un climat de confiance oui a rendu pssible le contratde recherche auquel nous sommes prvenus après plusieurs mois de tâtonnement.Une recherche centrée sur l'activité de professionnels engagés dans un contexte ins¬titutionnel aussi codifié que le contexte hospitalier exige nécessairement un préalablede concertation. L'obj<strong>et</strong> de recherche propse pr un supérieur hiérarchique ne putêtre impsé aux collaborateurs concernés. Pour s'impliauer dans un proj<strong>et</strong>, ceux-cidoivent en comprendre le sens <strong>et</strong> la prtée institutionnelle. Ils ont, en outre, besoinde savoir à quoi ils s'engagent en termes de temps <strong>et</strong> à quoi va aboutir le travailauquel ils vont donner beaucoup d'énergie. Les questions, les réticences, lesméfiances, qui ont fait l'obj<strong>et</strong> d'échanges nombreux, au cours de ces premiers mois,constituent sans doute une garantie indispnsable à la réalisation d'une tellerecherche.41RECHERCHE <strong>et</strong> FORMATION N° 39 - 2002

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!