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Maquetación 2 - Hotel Llegendes de Girona

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42 HISTOIRES MAGIQUES"LÉGENDES DE GÉRONE"


Nous dédions cette œuvre à la mémoire<strong>de</strong> Roser Vallmajó i Trayter, prési<strong>de</strong>nte <strong>de</strong>Fundació60, auteur <strong>de</strong> l’idée et <strong>de</strong> ceprojet culturel et patronal.Elle s’est éteinte à Gérone à l’âge <strong>de</strong> 51ans le 28.2.2007.


C’est ici que commence votre visitedu Gérone magique…


4Einstein disait : «Si vous voulez quevotre enfant soit savant, racontez-lui <strong>de</strong>shistoires et si vous voulez qu'il soit plussavant encore, racontez-lui en encore etencore.» Chaque jour, racontez auxenfants <strong>de</strong>s histoires, <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s et <strong>de</strong>scontes <strong>de</strong> fées...


Gerard Roca Ayats, est né à Sant Gregori (Province <strong>de</strong>Gérone) le 9.2.1972 (34 ans), peintre et sculpteur, il acomposé quarante-<strong>de</strong>ux reliefs en marbre <strong>de</strong>slégen<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Gérone qui figurent dans ce livre et quiconstitueront le thème <strong>de</strong> l’hôtel <strong>Llegen<strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong> <strong>Girona</strong>(octobre 2007). Il vit à Anglès.gerard.roca.ayats@hotmail.comNuri Ros Rue, est née à Palafrugell (Gérone) le 31.12.1975(31 ans), elle est journaliste et diplômée en anthropologiesociale et culturelle <strong>de</strong> l'Université Autonome <strong>de</strong> Barcelone.Elle allie son travail <strong>de</strong>journaliste à <strong>de</strong>s tâches sociales et travailleactuellement à la Fondation Jaume Bofill au Panel <strong>de</strong>sInégalités Sociales en Catalogne. Elle est l’auteur <strong>de</strong>s textes<strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Gérone qui font l'objet <strong>de</strong> ce livre. Elle vit àGérone.rrnurry@hotmail.com5Les droits et la propriété intellectuelle <strong>de</strong>s reliefs en marbre et<strong>de</strong>s textes <strong>de</strong>s quarante-<strong>de</strong>ux légen<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Gérone qui figurentdans ce livre appartiennent à Fundació60, qui les met à ladisposition <strong>de</strong>s habitants <strong>de</strong> Gérone et <strong>de</strong> ses visiteurs.Ce livre est paru le 23.4.2007, jour <strong>de</strong> la fête <strong>de</strong> Sant Jordi (SaintGeorges), en catalan, espagnol, anglais, français et allemand.Il est prévu la parution d’une <strong>de</strong>uxième édition plus exhaustiveen 2008, avec davantage <strong>de</strong> légen<strong>de</strong>s, <strong>de</strong> reliefs en marbre,<strong>de</strong> sculptures, <strong>de</strong> charme, <strong>de</strong> magie, <strong>de</strong> mystère... cette nouvelleédition paraîtrait aussi en italien, en russe, en hollandais, enarabe, en chinois et en japonais, onze langues au total.(e-mail: info@fundacio60.org / www.fundacio60.org).


Prologue <strong>de</strong> l’éditionHÔTEL À THÈME OU À VALEUR AJOUTÉE6Dans cette nouvelle culture <strong>de</strong> la mobilité, à plus forte raison sil’on parle <strong>de</strong> tourisme culturel, le lieu <strong>de</strong> séjour concentre <strong>de</strong> plusen plus <strong>de</strong> valeurs.Le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s appartient sans nul doute à notre imaginairecollectif.Mêler légen<strong>de</strong>s et séjour signifie donc parier sur ces valeurs ajoutéesque nous sommes <strong>de</strong> plus en plus nombreux à rechercher.Notre pays est certes une terre attachée à ses traditions et à sesracines, à ses coutumes et à la continuité, une terre <strong>de</strong> métierspopulaires et d’i<strong>de</strong>ntités, d’artisanats et d’histoire.C'est aussi un pays qui vient <strong>de</strong> loin, où la tradition <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>spuise ses racines à même la mythologie ancestrale.Le coutumier et par extension, le recueil <strong>de</strong> légen<strong>de</strong>s catalanes,héritier <strong>de</strong> cette tradition, est particulièrement riche. Son historiographieest vaste et bien documentée, avec <strong>de</strong>s noms significatifs(Joan Ama<strong>de</strong>s, Aureli et Maria Aurèlia Capmany) et <strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s<strong>de</strong> forte impulsion quant à la recherche et la diffusion <strong>de</strong> ceslégen<strong>de</strong>s dans un souci <strong>de</strong> récupération i<strong>de</strong>ntitaire.Cette richesse <strong>de</strong> notre recueil <strong>de</strong> légen<strong>de</strong>s se manifeste aussi trèsfortement dans notre région et en particulier dans la ville <strong>de</strong> Gérone,essentiellement, il va sans dire, au cœur <strong>de</strong> la ville historique.Parmi les nombreuses légen<strong>de</strong>s recueillies ici, il est <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>sreligieuses, profanes, érudites, historiques, populaires...En définitive, un con<strong>de</strong>nsé varié, séduisant et évocateur pour uneaventure hôtelière excitante.Le bâtiment qui abrite le complexe hôtelier recèle certainementune signification importante dans ce mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> fantaisie et <strong>de</strong>tradition car il se situe sur l’un <strong>de</strong>s axes articulant les légen<strong>de</strong>s <strong>de</strong>Gérone, autrement dit autour du personnage <strong>de</strong> saint Narcisse.Deux <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s rapportées ici, il s’agit d’une hypothèse parmid'autres, semblent puiser leur origine dans l’espace physique <strong>de</strong> cebâtiment ou son environnement.La bâtisse, dans sa configuration la plus récente, était une maisondivisée en plusieurs appartements à louer et bien qu'elle ait subi<strong>de</strong> nombreuses modifications à l’intérieur, elle conserve encorequelques éléments récupérables présentant un certain intérêt.La persistance d’éléments forts sur les faça<strong>de</strong>s, surtout dans la rueCarrer Portal <strong>de</strong> la Barca, résulte d'une réfection ultérieure aucours <strong>de</strong> laquelle on a introduit <strong>de</strong> vastes fenêtres et <strong>de</strong>s balconsd'une certaine qualité dans une volonté d'ennoblissement.Durant les travaux <strong>de</strong> restauration, <strong>de</strong> nouveaux éléments ont étérévélés, qui peuvent nous éclairer sur le passé et l'histoire du quartier.L’élément thématique du mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s nous apporte, au<strong>de</strong>là<strong>de</strong>s définitions formelles, un fil argumentaire très évocateur.La proposition <strong>de</strong> travail essaye <strong>de</strong> situer cette caractéristique en<strong>de</strong>çà <strong>de</strong> la simple référence et d'en faire un fait différentiel dansl’intervention même.Il s'agit là d'un nouvel argument venant soutenir le défi, qui consisteà rechercher dans la sagesse populaire ce qui va faire la singularité<strong>de</strong> ce service hôtelier.Nous disposons d'une documentation vaste et détaillée concernantle vieux quartier, el Barri Vell, qui s’étend <strong>de</strong>puis la premièremuraille tardo-romaine et suit un périmètre irrégulier vaguementtriangulaire, qui n'a été modifié qu'au milieu du IXe siècle avec laconstruction du château <strong>de</strong> Gironella et l’avancée vers Galligans.On assiste au XIe siècle à une gran<strong>de</strong> activité <strong>de</strong> construction,aussi bien à l'intérieur <strong>de</strong> la ville qu'en périphérie (Cathédrale,Sant Pere, Sant Nicolas, Sant Daniel, Sant Martí, Santa Eulàlia,Santa Susanna...); c'est à cette époque aussi que l’on voit naître lequartier <strong>de</strong> Sant Feliu.Ce n'est toutefois qu’aux XIVe et XVe siècles que la ville connaîtraune forte croissance et s'étendra à la plaine. Vers le milieu du siècle,on assistera à la construction <strong>de</strong> la muraille existante et <strong>de</strong>nouvelles murailles qui vont ceindre un espace plus vaste. C'estencore à cette époque que sera planifiée la nouvelle muraille du


Mercadal, qui ne sera concrétisée qu'à la fin du XVe siècle.Cette enceinte renferme nombre <strong>de</strong> monuments et édifices,l'histoire <strong>de</strong> la ville et les pierres qui aujourd'hui attirent les visiteursvenus <strong>de</strong> partout; la ville s’efforce <strong>de</strong> conserver son cœur entant qu’espace <strong>de</strong> vie et éviter qu'il ne se transforme en parc àthème touristique.En effet, le centre historique <strong>de</strong> Gérone, véritable foyer <strong>de</strong> vie et<strong>de</strong> dynamisme jusqu'à la fin <strong>de</strong>s années soixante comme l'a trèsbien décrit Joaquim Nadal à maintes reprises, a dû subir un profondprocessus <strong>de</strong> transformation et <strong>de</strong> revitalisation suite à uneperte <strong>de</strong> vitalité due à la croissance démesurée et même anarchiqueque l’ambitieux plan général <strong>de</strong> 1970 définissait comme la«Gran<strong>de</strong> Gérone».L’instrument clé du plan spécial a permis d'abor<strong>de</strong>r cette renaissanceindispensable; ainsi, la monumentalité et l’aspect culturelnécessaire -et même touristique- doivent maintenant être compatiblesavec un quartier vivant et surtout vivable.C’est là ce qui a constitué le pari d’une Gérone démocratique qui,malgré bien <strong>de</strong>s difficultés, récolte aujourd’hui le fruit <strong>de</strong> cettelour<strong>de</strong> tâche. C'est aussi, en quelque sorte, le pari que fait cetteinstallation hôtelière.La situation <strong>de</strong> l'hôtel, dans le secteur du Pou Rodó, un lieuempreint <strong>de</strong> cette forte tradition que recèle le vieux quartier <strong>de</strong>Gérone, <strong>de</strong>venu aujourd’hui une référence <strong>de</strong> l'action urbaine etun véritable nouveau pôle <strong>de</strong> dynamisation dans cet ensemblehistorique, lui confère un rôle <strong>de</strong> porte d’entrée et <strong>de</strong> pointd'accueil. Quels meilleurs hôtes pour nous accueillir que le rêve etla fantaisie émanant d’un mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> légen<strong>de</strong>s?C'est le point <strong>de</strong> départ d'un itinéraire partant à la découverted'un mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> sensations.Les villes sont plus que pierres, espaces, environnements et monuments.Les villes sont les témoins <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> leurs habitants, ellessont imprégnées <strong>de</strong> leur vécu, <strong>de</strong> leur histoire, <strong>de</strong> milliers <strong>de</strong> désirset d'efforts, elles sont les dépositaires <strong>de</strong> l’imaginaire et <strong>de</strong>s traditionsque le temps nous transmet <strong>de</strong> plusieurs manières, sousforme <strong>de</strong> légen<strong>de</strong>s en l’occurrence, présentes <strong>de</strong>puis la nuit <strong>de</strong>stemps dans toutes les cultures.Nos contrées et Gérone en particulier par son centre historique, sontles héritières <strong>de</strong> cette richesse exceptionnelle dans ce domaine.Soyons prêts à parcourir, percevoir et vivre ce mon<strong>de</strong> magique <strong>de</strong>sfables, enraciné dans l'imaginaire populaire, qui nous ouvrira <strong>de</strong>nombreuses portes vers la fascination.Un séjour dans un hôtel peut être vécu comme une parenthèsedans le quotidien, un petit ca<strong>de</strong>au dans notre vie agitée, un instant<strong>de</strong> bonheur nécessaire, <strong>de</strong>s sensations plus aptes à satisfairenotre vie spirituelle que matérielle.La ville historique offre plusieurs lectures et itinéraires, nous pouvonsdonc l'abor<strong>de</strong>r <strong>de</strong> différentes manières.On peut structurer une visite ou un itinéraire autour <strong>de</strong> sa richesseen monuments, en visitant les nombreux centres d’intérêt dontil n’est pas nécessaire <strong>de</strong> vanter la qualité ou bien faire un parcourshistorique, <strong>de</strong> l'enceinte romaine jusqu'aux murailles duMercadal ou encore opter pour <strong>de</strong>s parcours dont le but seraientles espaces où l’élément typique prédomine ; on peut aussi axer lavisite sur le commerce, la gastronomie, la culture, les nouvellesinterventions urbaines et architecturales...Les légen<strong>de</strong>s peuvent constituer par ailleurs, une autre manièred’abor<strong>de</strong>r et mieux connaître ces lieux sous un aspect différent,plus évocateur.Josep Riera MicalóPrési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la circonscription <strong>de</strong> Gérone<strong>de</strong> l'École d’Architectes <strong>de</strong> Catalogne7


GÉRONE: UNE PETITE VILLE,TRANQUILLE, MODERNE ET ACCESSIBLEGérone constitue un beau décor où l’histoire affleure <strong>de</strong>partout; elle est à la portée <strong>de</strong> ses habitants et <strong>de</strong> tousceux qui n'ont pas renoncé au passé ou aux bonneschoses que nous offrent les temps mo<strong>de</strong>rnes.C'est une petite ville, tranquille, mo<strong>de</strong>rne et accessible, oùune simple promena<strong>de</strong> peut satisfaire les intérêts les plusvariés; elle possè<strong>de</strong> un patrimoine architecturalexceptionnel, plus <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux mille ans d’histoire et unegran<strong>de</strong> variété <strong>de</strong> légen<strong>de</strong>s constituant un atout, certesintangible et versatile, mais qui peut éclairer l'histoired’un point <strong>de</strong> vue fantastique, imaginatif et ludique.Ce legs historique est <strong>de</strong>venu, au fil du temps, l’un <strong>de</strong>sattraits touristiques du vieux quartier et par extension,<strong>de</strong> la ville.Nous vous convions à découvrir Gérone à travers seslégen<strong>de</strong>s qui sont nombreuses: la Sorcière <strong>de</strong> laCathédrale, le Cul <strong>de</strong> la Lionne, les Mouches <strong>de</strong> saintNarcisse ou la Cocollona sont parmi les plus populaires,elles sont le reflet d'un patrimoine culturel qui constituel'i<strong>de</strong>ntité et l'histoire <strong>de</strong> notre ville.Nous nous <strong>de</strong>vons <strong>de</strong> féliciter l’hôtel <strong>Llegen<strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong> <strong>Girona</strong>car il offre un complément touristique à la ville <strong>de</strong> parson caractère innovateur et différentiel en puisant dansnos traditions et nos chroniques populaires.9Anna Pagans GruartmonerMairesse <strong>de</strong> Gérone


L'HISTOIRE DE LA VILLE DE GÉRONE SEREFLÈTE DANS SES LÉGENDES10Une légen<strong>de</strong> est un récit, oral ou écrit, <strong>de</strong> nature plus oumoins historique, dont l’espace et les personnages sontbien définis, qui associe <strong>de</strong>s éléments imaginaires etfantastiques. Il s’agit <strong>de</strong> récits qui s'apparentent à laréalité mais qui mêlent <strong>de</strong>s faits historiques et réels à <strong>de</strong>sfaits fantastiques ou irréels mais plausibles.Chaque groupe d’hommes crée son propre corpus <strong>de</strong>légen<strong>de</strong>s afin <strong>de</strong> narrer et se souvenir <strong>de</strong>s faits qu'ilconsidère les plus importants et cette attitu<strong>de</strong> n'est pasneutre puisqu'il agit selon son point <strong>de</strong> vue. Le groupe sedéfinit lui-même comme le bon, le véritable, levaleureux, ayant été maintes fois attaqué par les autres,les barbares, vainqueur à chaque fois. Dans ce sens, leslégen<strong>de</strong>s nous donnent <strong>de</strong>s informations sur le passéhistorique d’une communauté mais surtout sur la manièredont cette communauté l’a vécu et l'a interprété.L'histoire <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> Gérone se reflète dans seslégen<strong>de</strong>s. Le passé agité <strong>de</strong> Gérone, dû à sa situationgéographique stratégique, porte d'entrée <strong>de</strong> diversescultures, les années <strong>de</strong> mauvaises récoltes, les famines etles épidémies, la résistance héroïque contre les sièges, ladévotion aux saints <strong>de</strong> la ville, etc., tous ces éléments ontlaissé leur empreinte dans chacune <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s <strong>de</strong>Gérone.L’acte <strong>de</strong> narration d'une légen<strong>de</strong> est, en soi, un rituelvisant à faire en sorte que ceux qui écoutent la légen<strong>de</strong>s’i<strong>de</strong>ntifient à ce groupe d'appartenance, avec un passéhéroïque et victorieux en commun. Outre le fait qu'ellesdonnent <strong>de</strong> la cohésion au groupe, les légen<strong>de</strong>s façonnentaussi le caractère <strong>de</strong> la communauté et diffusent sesvaleurs, ses croyances et ses normes <strong>de</strong> comportementainsi que les châtiments qui s’appliquent à ceux qui<strong>de</strong>vient <strong>de</strong> cette norme.Les légen<strong>de</strong>s, outre leurs qualités esthétiques, <strong>de</strong> cohésionet <strong>de</strong> socialisation, ont servi à faire coïnci<strong>de</strong>r les différentespièces détachées <strong>de</strong> la connaissance <strong>de</strong> chaque époque, àexpliquer et à attribuer une cause et une origine à <strong>de</strong>sphénomènes inconnus, redoutés ou inexplicables: fontaines,lacs, ponts, bruits étranges...Les légen<strong>de</strong>s sont vivantes, elles ne sont pas statiques ; aucontraire, lorsqu'elles sont diffusées, elles évoluent,s’adaptent aux temps nouveaux ou à l'imagination dunarrateur. C'est pourquoi on trouve <strong>de</strong>s versions différentesd’une même légen<strong>de</strong>. Certaines sont empruntées à d’autrescultures et adaptées aux caractéristiques culturelles dugroupe. Si à l'origine, les légen<strong>de</strong>s étaient le fruit <strong>de</strong> lacréation populaire et se transmettaient oralement, il existeaussi <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s érudites qui sont ensuite <strong>de</strong>venuespopulaires.La société <strong>de</strong> la connaissance scientifique et les nouvellestechnologies <strong>de</strong> l'information n'ont pas arrêté le processus<strong>de</strong> création <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s ; elles se sont au contraireadaptées au nouveau contexte et sont diffusées grâce auréseau Internet. Des légen<strong>de</strong>s urbaines sur <strong>de</strong>s célébrités,sur <strong>de</strong>s marques commerciales ainsi que <strong>de</strong>s contesd'horreur font leur apparition et bien souvent, dans le fond,les sujets sont les mêmes que ceux <strong>de</strong>s vieilles légen<strong>de</strong>s,bien qu'ils soient mo<strong>de</strong>rnisés et adaptés au contexte actuel.Nuri Ros RueJournaliste et anthropologue


SommaireNº <strong>de</strong> Légen<strong>de</strong> Page Nº <strong>de</strong> Légen<strong>de</strong> PagePrologueOpinion <strong>de</strong> la mairesse <strong>de</strong> la GéroneIntroductionSommaire1. Le lac <strong>de</strong> Banyoles2. Gérion, fondateur <strong>de</strong> Gérone3. La conversion d’Afra*4. La gouvernante <strong>de</strong> saint Narcisse*5. La trace <strong>de</strong> saint Narcisse*6. Les catacombes*7. Charlemagne8. Geoffroy le Velu9. Le dragon sous le temple10. Saint Maurice et la mauvaise vieille <strong>de</strong> Cal<strong>de</strong>s11. Ermessen<strong>de</strong> <strong>de</strong> Carcassonne12. Le faucon <strong>de</strong> Cap d’Estopes13. Le cul <strong>de</strong> la lionne14. La rue <strong>de</strong>l Llop (du Loup)15. La sirène <strong>de</strong> Galligans16. Le fils du château17. Les juifs à Gérone18. Les mouches <strong>de</strong> saint Narcisse*19. Le mugissement <strong>de</strong> Castelló20. Les pommes*21. Saint Félix et le voleur <strong>de</strong> l’Église Collégiale*69101112141618202224262830323436384042444648505222. Le Tarlà5423. La sorcière <strong>de</strong> la Cathédrale5624. Le pont du diable5825. Le vampire <strong>de</strong> la Rambla6026. Le bœuf d’or6227. Le cochon <strong>de</strong> saint Antoine6428. Vie et miracles <strong>de</strong> saint Félix*6629. La cloche Beneta6830. Saint Narcisse et le Français empoisonneur* 7031. La fontaine <strong>de</strong> Pericot7232. Le coton miraculeux*7433. L’huile <strong>de</strong> la lampe*7634. Le lac <strong>de</strong> Sils7835. Les sorcières <strong>de</strong> Llers8036. Les lumières*8237. La pierre miraculeuse*8438. La mariée <strong>de</strong> Can Biel8639. Le symbolisme <strong>de</strong> sainte Catherine 8840. La fontaine <strong>de</strong>s amoureux9041. Le boulanger du Mercadal*9242. La Cocollona94Opinions sur le projet96Fundació60112Plan <strong>de</strong> Gérone116Plan <strong>de</strong> la province <strong>de</strong> Gérone118Bibliographie12011(*)14 légen<strong>de</strong>s sur saint Narcisse20 légen<strong>de</strong>s sur Gérone et ses environs8 légen<strong>de</strong>s sur la région <strong>de</strong> Gérone


1Le lac <strong>de</strong> Banyoles12Le lac <strong>de</strong> Banyoles a une curieuse formeen huit. Du nord au sud, il a une longueur<strong>de</strong> 2.080 mètres et d’est en ouest, unelargeur <strong>de</strong> 730 mètres. Sa profon<strong>de</strong>urmaximale est d'environ 60 mètres et il senourrit <strong>de</strong>s eaux souterraines <strong>de</strong> la rivièreLlierca et <strong>de</strong> la rivière Borró. Le lac acommencé à se former à l’époquequaternaire, il y a 250.000 ans. Au cours<strong>de</strong> sa longue vie, le lac a vu <strong>de</strong> tout dansses eaux: <strong>de</strong>s dragons qui dévoraient lesenfants, <strong>de</strong>s fées aquatiques... et mêmeles jeux olympiques.Il y a 250.000 ans - Banyoles (<strong>Girona</strong>).


L É G E N D E S D E G É R O N EIl s’agit <strong>de</strong> la légen<strong>de</strong> d’un paysan du nom <strong>de</strong>Morgat, qui fut témoin <strong>de</strong> la naissance du lac <strong>de</strong>Banyoles. Il y a <strong>de</strong>s milliers d’années, à l'endroit oùse trouve maintenant Sainte Marie <strong>de</strong> Porqueres,s’étendait une plaine fertile <strong>de</strong> champs <strong>de</strong> blé, quiallait jusqu'à Banyoles. Un jour, Morgat alla labourerle champ avec ses bœufs, comme il en avaitl'habitu<strong>de</strong>. Soudain, Morgat entendit une voix quilui disait «Morgat, Morgat, prend ta charrue et va temettre à l'abri.» Notre paysan resta coi. Commec'est étrange! Cette voix était si claire... D’oùvenait-elle? Et si c’était son imagination? Morgatregarda à droite et à gauche et ne vit âme qui vive...Il se dit qu’il n'avait pas mangé <strong>de</strong>puis un bonmoment et que la faim lui jouait peut-être <strong>de</strong>stours... Il retourna donc travailler. Les bœufsn'avaient pas fait <strong>de</strong>ux pas lorsque la voix se fitentendre à nouveau avec insistance: «Morgat,Morgat, prend les bœufs et rentre chez toi.» Le pauvreMorgat n'y comprenait rien... Si ce n'était lesbœufs qui avaient parlé, d'où pouvait bien venircette voix? Il retourna au travail, en se disant ques'il commençait plus tôt, il rentrerait plus tôt à lamaison. Mais la voix se fit entendre à nouveau, plusclaire et plus forte encore: «Morgat, Morgat, rentrevite chez toi ou tu seras noyé.» Cette fois-ci, Morgatécouta la voix, il rassembla ses bœufs et rentrachez-lui. Quand il arriva à la ferme, il entendit ungrand bruit, comme si la terre s'ouvrait. Morgat seretourna et vit <strong>de</strong>s vagues géantes qui jaillissaientdu sous-sol <strong>de</strong>s champs et inondaient toute laterre, arrachant avec furie arbres et cultures.Lorsque les eaux se calmèrent, un lac apparut, quiallait <strong>de</strong> la zone <strong>de</strong> Lió jusqu'aux Estunes et <strong>de</strong>l’endroit où aujourd'hui se trouve l’église <strong>de</strong>Porqueres jusqu'à Banyoles.Dès lors, le lac <strong>de</strong> Banyoles et ses alentours mystérieuxont abrité <strong>de</strong>s êtres fantastiques, tels que ledragon <strong>de</strong> Banyoles ou les fées appelées les Goges.Les Goges sont <strong>de</strong>s créatures aquatiques qui viventaux Estunes, au pied <strong>de</strong> la chaîne <strong>de</strong> Sant Patllari.Le jour, elles habitent <strong>de</strong>s galeries souterraines, auxmurs couverts d'or et <strong>de</strong> pierres précieuses, protégéespar une fine toile d'araignée en soie. À minuit,ces fées aquatiques sortent pour saisir la lumière<strong>de</strong> la lune, laver leurs fins voilages et se mirer dansles eaux du lac. Vous ne les avez jamais vues?13


2Gérion, fondateur <strong>de</strong> GéroneBon nombre <strong>de</strong> héros mythologiquesprovenant <strong>de</strong> toute la Méditerranée onttraversé les terres <strong>de</strong> Gérone pour y fon<strong>de</strong>rune ville, représenter <strong>de</strong>s passages <strong>de</strong>l’Odyssée d’Homère et participer à <strong>de</strong>scombats. Tubal, Gérion, Héraclès et Pyrènedonnent une teinte mythologique etépique au passé <strong>de</strong>s terres <strong>de</strong> Gérone.14An 2220 av. JC - Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N EGérion, fils <strong>de</strong> Crisar et Colliroe, est représentécomme un monstre tricéphale géant. Au cours <strong>de</strong>l’un <strong>de</strong> ses voyages en Méditerranée, il gagna noscontrées par la Catalogne Nord, où il fonda Colliourepuis, lorsqu'il gagna la terre <strong>de</strong>s Layétans, au sommetd'une petite montagne, sur la rive droite d’unerivière appelée Onyar, Gérion fonda une ville qu'ilbaptisa, comme il fallait s'y attendre! Geriona. Cescontrées conquises par Gérion n'étaient cependantpas orphelines, elles appartenaient au royaume <strong>de</strong>Tubal, roi d’Ibérie. Gérion s'affronta à Tubal au coursd’une bataille sanglante à l'issue <strong>de</strong> laquelle Tubaltrouva la mort et Gérion s'empara <strong>de</strong> ses terres. Lafille <strong>de</strong> Tubal, la belle Pyrène, pris la fuite et alla seréfugier dans les montagnes du nord. Toutefois, pourGérion, la disparition <strong>de</strong> Tubal ne suffisait pas et,craignant que Pyrène, l'héritière légitime <strong>de</strong>s terresd’Ibérie, ne lui arrache un jour le trône, il la chercha àtravers tout le royaume. Le géant tricéphale, apprenantque Pyrène s’était cachée dans les bois du nord,y mit le feu. Gérion, ayant maintenant la voie libredans sa course pour conquérir le pouvoir, s'installaau sud <strong>de</strong> l’Ibérie.Le hasard voulut que Hercule (Héraclès) atteigne cescontrées pour y réaliser ses douze travaux. Le hérosà la force surhumaine rencontra la belle Pyrène.L'héritière avait survécu au terrible incendie maisétait agonisante. Avant <strong>de</strong> mourir, elle eut le tempsd’expliquer à Hercule que son père avait été assassinépar Gérion, qui s'était emparé <strong>de</strong> son royaume etavait incendié les terres sur lesquelles elle s'étaitréfugiée.En apprenant cette histoire et en voyant la bellehéritière morte, Hercule ressentit au fond <strong>de</strong> lui ledésir <strong>de</strong> venger la mort <strong>de</strong> Pyrène. Justement, un <strong>de</strong>sdouze travaux qu'il <strong>de</strong>vait réaliser en Méditerranée,le dixième, consistait à voler le troupeau <strong>de</strong> bœufs<strong>de</strong> Gérion. Hercule partit vers les contrées du sud, oùdans la ville <strong>de</strong> Ga<strong>de</strong>s, il trouva le troupeau <strong>de</strong>Gérion, gardé par son chien à <strong>de</strong>ux têtes, Ortre.Hercule tua le chien à <strong>de</strong>ux têtes et s'appropria dutroupeau <strong>de</strong> bœufs <strong>de</strong> Gérion. Le dixième travailétait donc achevé mais Hercule n'était pas satisfait:il voulait venger personnellement la mort <strong>de</strong> la bellePyrène. Hercule partit à la recherche <strong>de</strong> Gérion.Quand il le trouva, ils s'affrontèrent dans une luttetitanesque qui fit trembler les terres du royaume.Hercule tua Gérion d'un coup d’épée qui trancha lestrois têtes. Après avoir tué le tyran, Hercule céda lesterres du nord aux trois fils <strong>de</strong> Gérion. Les triplets,pour honorer la mémoire <strong>de</strong> leur père, agrandirentGérone <strong>de</strong>puis la Tour Gironella en forme <strong>de</strong> triangleet construisirent une tour sur chaque sommet. Lesmontagnes où Pyrène trouva la mort furent baptiséesPyrénées en son honneur.Pas mal le mélange <strong>de</strong> héros et d'épiso<strong>de</strong>s épiquesqui ont eu lieu sur les terres <strong>de</strong> Gérone! L'histoire nepeut démentir ni prouver les faits qui se sont produitsen l’an 2220 av. JC, 554 ans après le déluge universel,même si ce n'est pas vrai, c'est bien trouvé.15


3La conversion d’AfraUne <strong>de</strong>s rares données que nousconnaissions au sujet <strong>de</strong> Saint Narcissepeu avant qu'il s’installe définitivement àGérone, est le voyage qu'il réalisa avec sonassistant, le diacre saint Félix à Augusta(Augsbourg). Au cours <strong>de</strong> ce voyage, il allachez Afra, une jolie dame <strong>de</strong> religionpaïenne, qui d'après la légen<strong>de</strong>, futtellement impressionnée par la religion<strong>de</strong> son hôte qu'elle décida <strong>de</strong> se convertir16 au christianisme.304 - Augusta (Augsbourg), Allemagne.


L É G E N D E S D E G É R O N ESaint Narcisse arriva à Augsbourg accompagné <strong>de</strong>son diacre saint Félix, ils cherchaient un logementpour la nuit et la divine provi<strong>de</strong>nce les mena chezAfra. Afra était a<strong>de</strong>pte <strong>de</strong> la religion païenne dédiéeau culte <strong>de</strong> Vénus. L’hôtesse convia les voyageurs àpasser la nuit chez elle et ordonna à ses servantes <strong>de</strong>préparer les chambres. Voyant que les lampesn'étaient pas encore préparées, Afra réprimanda lesdomestiques. C'est alors que saint Narcisse bénit leslampes à huile <strong>de</strong> sa main et sans y avoir mis <strong>de</strong>l'huile ou du feu, les lampes s'allumèrent seules etrépandirent une clarté miraculeuse. Afra fut stupéfaitepar la réalisation <strong>de</strong> ce miracle et s'intéressa àla religion <strong>de</strong> ses hôtes. Après une longue nuit passéeà converser sur la théologie avec saint Narcisse,Afra renonça à la vie qu'elle avait menée auparavantet renia son ancienne religion afin <strong>de</strong> recevoir leseaux du baptême. Une semaine plus tard, Afra et sesservantes Digne, Eunomie et Eutropie se convertirentau christianisme.La nouvelle vint aux oreilles <strong>de</strong> Gaius, le préfet <strong>de</strong> laville, qui donna l'ordre <strong>de</strong> capturer Afra et <strong>de</strong> la tuer.Saint Narcisse alla se réfugier chez Hilarie, la mèred’Afra, afin <strong>de</strong> pouvoir continuer sa missiond'évangélisation. Il créa le diocèse d’Augsbourg ettransforma la maison d’Hilarie en cathédrale. Le premierévêque fut un oncle d’Afra, Dionis, qui s'étaitégalement converti au christianisme.Afra se consacra à prêcher la religion chrétienne à traversla ville, tandis que les autorités la recherchaient.Elle fut capturée le 7 août 304 alors qu'elle était entrain d'évangéliser un groupe d'a<strong>de</strong>ptes. Afra ne serepentit pas et ne renia pas sa nouvelle religion, elleaccepta courageusement son martyre. Afra fut brûléevive sur une rive sablonneuse <strong>de</strong> la rivière Lech. SaintNarcisse, plein d'admiration <strong>de</strong>vant le courage <strong>de</strong> lasainte, prit soin <strong>de</strong> son corps et l'ensevelit. Lorsquesaint Narcisse repartit vers Gérone, il ramena avec luiun petit os <strong>de</strong> la sainte comme relique.Les habitants <strong>de</strong> Gérone et <strong>de</strong> la région reçurentavec admiration l'histoire <strong>de</strong> sainte Afra et quelquesannées plus tard, en 1344, ils décidèrent <strong>de</strong> construireun sanctuaire en son honneur à Ginestar, dans leterme municipal <strong>de</strong> Sant Gregori. La fête <strong>de</strong> sainteAfra est célébrée chaque année le 5 août. Et d'aprèsle dicton, «à la Sainte Afra, ni les mouches ni lesabeilles ne piquent.»17


4La gouvernante <strong>de</strong> saint NarcisseNous allons parler maintenant d’unelégen<strong>de</strong> apocryphe, qui est née il n'y a passi longtemps mais qui, tout comme lalégen<strong>de</strong> <strong>de</strong> la Cocollona, fait partie <strong>de</strong>slégen<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Gérone. Il s'agit <strong>de</strong> la légen<strong>de</strong>d'une gouvernante, gran<strong>de</strong> commère maisau bon cœur, qui aurait soi-disant reçusaint Narcisse dans sa maison du PouRodó (le puits rond).18304 - Rue Carrer <strong>de</strong> les Mosques, 1, à Gérone.Créateurs: Josep Tarrés et Carles Vivó


L É G E N D E S D E G É R O N ELa gouvernante <strong>de</strong> saint Narcisse était la sœur <strong>de</strong> lagrand-mère d’Afra qui accompagna saint Narcisselorsqu'il vint s'installer à Gérone, au retour <strong>de</strong> sonséjour à Augusta. Cette brave femme avait plus <strong>de</strong>cent ans mais elle paraissait très vigoureuse. Sapeau était aussi douce que celle <strong>de</strong>s nouveau-néset elle était majestueusement grasse. Cette gouvernantepossédait <strong>de</strong>s qualités culinaires exceptionnelles,elle avait inventé <strong>de</strong>s plats aussi savoureuxque le canard aux poires, les pommes farcies ou leboudin au sang; elle connaissait les plantes médicinaleset savait jeter <strong>de</strong>s sorts. Un jour qu'elle étaiten colère elle fit en sorte que toutes les églises <strong>de</strong>Gérone s’emplissent <strong>de</strong> toiles d'araignées etd’étranges araignées <strong>de</strong> toutes les couleurs.La gouvernante <strong>de</strong> saint Narcisse était très coquette,elle portait <strong>de</strong>s chapeaux ostentatoires et <strong>de</strong>srobes aux tissus éclatants, ornées <strong>de</strong> grelots coususau bas <strong>de</strong>s ourlets. Elle se promenait dans les rues<strong>de</strong> Gérone avec ses domestiques, qui la portaientsur une chaise lorsqu'elle était fatiguée <strong>de</strong> marcher.Cet adorable personnage avait cependant undéfaut: elle était très mauvaise langue, elle aimaitécouter les commérages et les colporter. Elle eut unjour la malchance <strong>de</strong> raconter un ragot au sujet <strong>de</strong>saint Narcisse dont celui-ci eut vent. Saint Narcissese mit en colère et lui ôta ses pouvoirs.La gouvernante qui avait été très estimée <strong>de</strong>vint larisée <strong>de</strong> la ville. Elle arpentait les rues comme uneâme en peine et elle ne réagissait même pas lorsqu'onjetait sur son passage les restes <strong>de</strong> repas. Unjour, elle eut une vision du martyre <strong>de</strong> saint Narcisseet <strong>de</strong> saint Félix. Peu <strong>de</strong> temps après, sa vision <strong>de</strong>vintréalité et dès lors, la gouvernante repentie consacrasa vie à ai<strong>de</strong>r les plus démunis.Lorsque la gouvernante sentit la mort s'approcher,elle alluma un feu <strong>de</strong>vant la cathédrale <strong>de</strong> Gérone etdans un ultime acte d’amour envers les plus démunis,elle inventa la soupe à la menthe, <strong>de</strong>stinée aupauvres et aux mala<strong>de</strong>s.On raconte que lorsqu’on l'enterra, son corps quiétait si gras, <strong>de</strong>vint léger comme celui d'un moineau.En souvenir <strong>de</strong> la gouvernante repentie, leshabitants <strong>de</strong> Gérone érigèrent une statue en pierre<strong>de</strong> Gérone, près d'où elle vécut, dans les jardinsface aux bains arabes, qui représente la gouvernante,<strong>de</strong>bout avec son gros ventre et tenant le Livre<strong>de</strong>s Mystères dans ses mains.19


5La trace <strong>de</strong> saint NarcisseOn ne possè<strong>de</strong> pas beaucoup <strong>de</strong>renseignements sur la vie <strong>de</strong> saintNarcisse avant son arrivée à Gérone.On ne s'accor<strong>de</strong> pas non plus sur l'originedu saint. La plupart <strong>de</strong>s donnéesconcernent la fin <strong>de</strong> sa vie à Gérone;il mourut trois ans après son arrivée àGérone, martyrisé pendant qu'il disait lamesse, en 307. Bien que son séjour dansla ville n'ait pas été très long, saint20 Narcisse eut le temps d'y laisser sonempreinte, au sens propre du mot.305 après JC - Rue Carrer <strong>de</strong> les Mosques, 1, à Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N EL'histoire nous dit que vers la fin <strong>de</strong> l’année 304 <strong>de</strong>notre ère, saint Narcisse arriva à Gérone accompagné<strong>de</strong> son diacre saint Félix et qu'au début <strong>de</strong> l’année 305,il choisit Gérone comme rési<strong>de</strong>nce épiscopale. Si onen croit la mémoire populaire, le saint évêques'installa dans une maison située entre la rue Carrer<strong>de</strong> Sant Narcís, aujourd'hui rue Carrer <strong>de</strong>l Pou Rodó,et la rue Carrer <strong>de</strong> les Mosques. En ces temps-là, lechristianisme ne cessait <strong>de</strong> gagner <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes, ce quipour l’empire romain était considéré comme unemenace. L’empereur Dioclétien donna l'ordre <strong>de</strong> lancerce qui fut la <strong>de</strong>rnière gran<strong>de</strong> persécution contreles chrétiens, au cours <strong>de</strong> laquelle saint Narcisse souffritle martyre ainsi que son diacre saint Félix.La légen<strong>de</strong> est née à partir <strong>de</strong>s faits historiques: Aucours d'une <strong>de</strong> ces persécutions, saint Narcisse imaginaune retraite digne du meilleur agent secret afin <strong>de</strong>détourner ses poursuivants. Saint Narcisse s'enfuit <strong>de</strong>la maison du Pou Rodó par la fenêtre mais il eut l'idée<strong>de</strong> laisser une trace <strong>de</strong> pas en sens inverse ; c'est à direcomme s'il entrait dans la maison au lieu d'en sortir.Lorsque ses persécuteurs arrivèrent à la maison etqu'ils virent la trace <strong>de</strong> pas, ils en déduisirent que lesaint s’y était caché, ils le cherchèrent dans tous lescoins et les recoins <strong>de</strong> la maison, ce qui permit à saintNarcisse d'aller se cacher très loin. Dès lors, la trace <strong>de</strong>pas est restée gravée sur l'allège <strong>de</strong> la fenêtre dunuméro cinq <strong>de</strong> la rue Carrer <strong>de</strong>l Pou Rodó, moelleépinière <strong>de</strong> la mythologie <strong>de</strong> Gérone, comme leraconte Joan Ama<strong>de</strong>s, en 1952, dans son recueil <strong>de</strong>coutumes El Costumari Català.Le culte aux traces <strong>de</strong> pas n'appartenant pas à <strong>de</strong>sterriens est très ancien et est présent dans plusieurscultures à travers le mon<strong>de</strong>, qui les interprètent <strong>de</strong>différentes manières : traces <strong>de</strong> pas appartenant à <strong>de</strong>ssaints chrétiens ou au diable, à Bouddha, à Adam, etc.La Grèce et la Rome antique vouaient un culte auxtraces <strong>de</strong> Bacchus et d'Héraclès et il est possible queles premiers chrétiens aient adapté ce rite à la nouvellereligion. Près <strong>de</strong> Gérone nous avons d'autres exemples<strong>de</strong> ces traces <strong>de</strong> pas : dans les massifs <strong>de</strong>s Gavarreset <strong>de</strong>s Guilleries, nous trouvons les traces <strong>de</strong> pas <strong>de</strong>saint Martin et <strong>de</strong> son cheval et dans d'autres endroits<strong>de</strong> la Catalogne, à Majorque et à Valencia, ces tracessont interprétées comme les traces du cheval du roiJaume Ier le Conquérant.21


6Les catacombesLe mot catacombe vient du grec «katá»,au-<strong>de</strong>ssous, et <strong>de</strong> «kymbé», excavation,et fait référence aux lieux souterrains oùse réunissaient les premiers chrétiens pourprier, enterrer leurs morts et glorifier leursmartyrs. En ces temps-là où lechristianisme était persécuté, les chrétiens<strong>de</strong>vaient trouver refuge dans lessouterrains <strong>de</strong>s villes afin <strong>de</strong> pouvoircélébrer leur culte.22Début du IVe siècle <strong>de</strong> notre ère, au cours <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière gran<strong>de</strong>persécution <strong>de</strong>s chrétiens.Près <strong>de</strong> l’église Saint Félix et dans la rue Carrer <strong>de</strong>l Pou Rodó, à Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N EÀ Gérone comme dans toutes les villes <strong>de</strong> l’Empireromain, le christianisme fut persécuté. C'est pourquoiles premiers chrétiens <strong>de</strong> Gérone <strong>de</strong>vaient seréunir en secret dans les catacombes. Il n'existe pas<strong>de</strong> preuves physiques <strong>de</strong> l’existence <strong>de</strong> catacombes àGérone comme il en existe dans d'autres villes. Il y apar contre <strong>de</strong>s documents qui mentionnent les catacombes<strong>de</strong> l’église Saint Félix. Le diacre <strong>de</strong> saintNarcisse, saint Félix, fut enterré dans ces catacombeset pendant <strong>de</strong> longues années, il y reposa, oublié <strong>de</strong>shabitants <strong>de</strong> Gérone. Quelques siècles plus tard, unedouce o<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> sainteté s'échappant <strong>de</strong> son tombeauavertit la ville <strong>de</strong> sa présence. Les habitants <strong>de</strong> laville l'exhumèrent et l'amenèrent au grand autel <strong>de</strong>l’église qui dès lors vénère le saint.On croit qu'au numéro un <strong>de</strong> la rue Carrer <strong>de</strong> lesMosques, où vivait saint Narcisse, très près <strong>de</strong>l'endroit où il a souffert le martyre avec son diacre,il y avait l'entrée <strong>de</strong>s catacombes <strong>de</strong> Gérone, commel’évoque Jaume Marquès i Casanovas dans son livre<strong>Girona</strong> vella (Le vieux Gérone), qui pourrait communiqueravec le puits qui se trouve au cloître <strong>de</strong> lacathédrale ou à l’église Saint Félix. Outre les catacombes<strong>de</strong> Saint Félix, le sous-sol <strong>de</strong> Gérone pourraitégalement abriter la crypte mythique <strong>de</strong> la cathédraleprimitive romane que l'on n'a jamais réussi àtrouver.Les catacombes font partie <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s du sous-sol<strong>de</strong> la ville, avec son réseau <strong>de</strong> passages souterrains,dont il est prouvé qu'ils parcourraient tout le vieuxquartier et menaient à l'extérieur <strong>de</strong>s murailles, tel lecélèbre tunnel <strong>de</strong> la Carbonera, qui reliait le muséed’art <strong>de</strong> la ville à la rue Carrer <strong>de</strong> les Ballesteries, aucoin <strong>de</strong> la rue Pujada <strong>de</strong> Sant Félix. Certains <strong>de</strong> cespassages avaient <strong>de</strong>s fins militaires et reliaient laTour Gironella au lit <strong>de</strong> la rivière Galligans et au château<strong>de</strong> Montjuïc. D’autres souterrains reliaient entreelles <strong>de</strong>s maisons particulières ou <strong>de</strong>s couvents et<strong>de</strong>s églises. Les juifs utilisaient certains <strong>de</strong> ces passagespour s'échapper du call (quartier juif) quand ilsétaient attaqués par les chrétiens.Un jour viendra peut-être, à l'occasion <strong>de</strong> travauxdans une maison, où l’entrée <strong>de</strong>s catacombes apparaîtraau grand jour et il nous sera enfin possible <strong>de</strong>connaître l'histoire souterraine <strong>de</strong> la ville.23


7CharlemagneLes habitants <strong>de</strong> Gérone au Moyen-âge,comme bien d'autres peuples <strong>de</strong> l’époque,étaient fascinés par les exploits <strong>de</strong>Charlemagne, qu'ils considéraient sonfondateur. Bien que l’empereur franc n'aitpas fondé Gérone, il libéra néanmoins laville <strong>de</strong> la domination musulmane en 785.Ce lien entre Charlemagne et Gérone alaissé en héritage bien <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s,plus ou moins fantastiques, <strong>de</strong>s24 constructions et <strong>de</strong>s objets liés <strong>de</strong> prèsou <strong>de</strong> loin à l’empereur à la barbe fleurie.785, libération <strong>de</strong>s musulmans - Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N ELe personnage <strong>de</strong> Charlemagne est présent dans <strong>de</strong>nombreuses légen<strong>de</strong>s liées à la ville <strong>de</strong> Gérone et safondation. Dans la version la plus fantastique <strong>de</strong> lafondation <strong>de</strong> Gérone, la magnifique épée <strong>de</strong>l’empereur à la barbe fleurie a un rôle central. Onraconte qu'il y a bien longtemps, quand les régions<strong>de</strong> la Selva et du Gironès formaient un immense lac,les habitants <strong>de</strong> l'Empordà furent envahis par lessarrasins. Charlemagne imagina un stratagème pourlibérer les terres <strong>de</strong> l'Empordà <strong>de</strong>s sarrasins et par lamême occasion, il fonda la ville <strong>de</strong> Gérone. L’empereurfranc, d'un grand coup d'épée, coupa les montagnes<strong>de</strong> Sant Julià <strong>de</strong> Ramis en <strong>de</strong>ux, et ouvrit lelieu actuellement connu comme Congost (Défilé).Les eaux du lac se frayèrent un chemin avec furieentre les montagnes pourfendues <strong>de</strong> Sant Julià <strong>de</strong>Ramis et arrivèrent jusqu'à l’Empordà. Les terres <strong>de</strong>l'Empordà furent inondées et l'eau emporta les musulmansvers la mer, libérant ainsi l’Empordà <strong>de</strong> sonjoug. C'est alors que Charlemagne fonda la ville <strong>de</strong>Gérone au beau milieu du lac qui s’était vidé.Dans d'autres légen<strong>de</strong>s, c’est le caractère plus religieux<strong>de</strong> l’empereur franc qui est mis en exergue, ilest aidé dans ses exploits par <strong>de</strong>s saints et <strong>de</strong>s viergespour vaincre les musulmans qui s'étaient emparés<strong>de</strong> Gérone. Au cours <strong>de</strong> la conquête <strong>de</strong> Gérone,Charlemagne est guidé par une pluie <strong>de</strong> gouttes <strong>de</strong>sang qui se transforment en croix dès qu'elles touchentle sol, une croix <strong>de</strong> feu apparaît sur la mosquée<strong>de</strong> Gérone, qui signale le moment propice pourattaquer les positions <strong>de</strong>s sarrasins et annonce lavictoire sur les sarrasins.Au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> ces légen<strong>de</strong>s, les habitants <strong>de</strong> Géronepeuvent encore admirer la tour <strong>de</strong> Charlemagne, unancien clocher <strong>de</strong> la cathédrale romane, servant <strong>de</strong>contrefort à la nef <strong>de</strong> la cathédrale, sur l’aile midi <strong>de</strong>l’ancien cloître. Toute la face nord est conservée,montrant sept étages ornés d'une frise d’arcs lombards.À l'intérieur du temple, <strong>de</strong>rrière le grand autel,se trouve la chaise <strong>de</strong> Charlemagne, sculptée dansun seul bloc <strong>de</strong> marbre. La chaise date du XIe siècle,il s'agit d'un <strong>de</strong>s modèles <strong>de</strong> chaise épiscopale le plusreprésentatif <strong>de</strong> l'art roman européen. Selon la tradition,si un couple s'assoit sur la chaise, le mariageaura lieu dans l'année; par contre, si un homme s'yassoit seul, il ne se mariera jamais.Gérone a vénéré Charlemagne dès l’an 1345, lorsquel'évêque Arnau <strong>de</strong> Camprodon encouragea son culte.Bien que le pape Sixte IV, en 1484, supprima cettefête, Gérone continua à célébrer les offices liturgiquesjusqu'au XVIIe siècle.25


8Geoffroy le VeluLe drapeau catalan est un <strong>de</strong>s plusanciens en Europe et dans le mon<strong>de</strong> entier.C'est à l'origine le symbole héraldique <strong>de</strong>la lignée <strong>de</strong>s comtes <strong>de</strong> Barcelone et par lasuite il va représenter l'ensemble duterritoire. Geoffroy le velu, le premier <strong>de</strong>la dynastie <strong>de</strong>s comtes <strong>de</strong> Barcelone,est entré dans la légen<strong>de</strong> en tant que pèrefondateur <strong>de</strong> notre territoire et <strong>de</strong> notredrapeau: quatre ban<strong>de</strong>s rouges du sang du26 comte sur fond doré. Les restes du comteGeoffroy se trouvent au monastère <strong>de</strong>Ripoll.An 897Monastère <strong>de</strong> Santa Maria <strong>de</strong> Ripoll, où est enterré Geoffroy le velu.


L É G E N D E S D E G É R O N ENé aux environs <strong>de</strong> 840, il hérita <strong>de</strong> son père lescomtés d’Urgell et <strong>de</strong> la Cerdagne. En 878 le roifranc lui donna la charge <strong>de</strong>s comtés <strong>de</strong> Barceloneet <strong>de</strong> Gérone-Besalú. Son plus grand accomplissementfut le repeuplement <strong>de</strong> la Catalogne centrale,il établit une frontière avec les musulmans sur lapartie occi<strong>de</strong>ntale <strong>de</strong>s fleuves Llobregat et Car<strong>de</strong>ner.Ce repeuplement s'accompagna <strong>de</strong> la constructiond’églises et <strong>de</strong> monastères tels que lemonastère <strong>de</strong> Santa Maria <strong>de</strong> Ripoll, où il est enterréet celui <strong>de</strong> Sant Joan <strong>de</strong> les Aba<strong>de</strong>sses. Vers lafin <strong>de</strong> son gouvernement, il dut lutter pour défendreses terres contre les musulmans. Lors d'unebataille contre l'armée du gouverneur musulman<strong>de</strong> Lérida, Llop ibn Muhamnad al-Qasi, il fut blesséet trouva la mort le 11 août 897. Il est l’initiateur <strong>de</strong>la succession héréditaire <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Barceloneet <strong>de</strong> l'indépendance <strong>de</strong>s francs. À sa mort, omettantla volonté du monarque franc, il répartit sonterritoire entre ses fils. Cette dynastie gouverna laCatalogne <strong>de</strong> 878 jusqu'à son extinction en 1410.Dans le livre du monastère <strong>de</strong> Ripoll, Gesta ComitumBarcinonensium, du XIIe siècle, il est considérécomme le père <strong>de</strong> la patrie.Si l'histoire lui reconnaît ce mérite, la légen<strong>de</strong> lui enattribue un autre non moins important: la créationdu drapeau catalan, notre drapeau. Nous trouvons lapremière référence en 1420 dans le livre Fets d’Armes<strong>de</strong> Catalunya (Faits d'armes <strong>de</strong> Catalogne): Lalégen<strong>de</strong> raconte que Geoffroy mourut à la suite <strong>de</strong>blessures subies au cours d'une bataille héroïquecontre les Normands, aux côtés du roi franc Charlesle Chauve. Geoffroy se trouvait à l'agonie dans satente quand le roi franc voulut récompenser la luttecourageuse du comte catalan en lui octroyant unécusson d’armes. L’empereur joignit ses mains contrecelles <strong>de</strong> Geoffroy, mouilla ses doigts du sang <strong>de</strong>la blessure mortelle du comte et <strong>de</strong>ssina quatrebarres verticales sur le fond doré <strong>de</strong> son écu.Ces quatre barres <strong>de</strong>vinrent les armoiries <strong>de</strong>s comtes<strong>de</strong> Barcelone et par la suite, représentèrentl'ensemble <strong>de</strong> leur territoire. C'est un <strong>de</strong>s drapeauxles plus anciens au mon<strong>de</strong>. On trouve la premièrereprésentation <strong>de</strong>s quatre barres en 1150, sur un écud’armoiries du roi Ramon Berenguer IV, bien qu'onl'eût déjà utilisé auparavant comme symbole préhéraldiquesur les tombeaux <strong>de</strong> Ramon Berenguer IIen 1082 et <strong>de</strong> son arrière-grand-mère Ermessen<strong>de</strong><strong>de</strong> Carcassonne en 1052, qui se trouvent à la cathédrale<strong>de</strong> Gérone.27


9Le dragon sous le templeLa cathédrale gothique <strong>de</strong> Gérone sedresse sur la cathédrale romane, qui àson tour fut construite sur une égliseprimitive qui, elle aussi, on le suppose,s'élevait, sur un temple romain et il estprobable que ce temple fut construitauparavant sur un lieu sacré. Le fait queles cultures successives aient choisi lemême emplacement pour y représenterleur culte peut répondre à la volonté <strong>de</strong>28 s'approprier les symboles et les lieuxsacrés <strong>de</strong> la culture précé<strong>de</strong>nte maisl'explication se trouve peut-être sous terre.XIe-XVIIIe siècles - Cathédrale <strong>de</strong> Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N EL'époque qui va du XIe au XIIIe siècle est marquée parla construction <strong>de</strong> cathédrales, qui étaient pour laplupart consacrées à la vierge Marie. Les bâtisseurs <strong>de</strong>cathédrales constituaient une sorte <strong>de</strong> confrérie universelle,les maçons libres. Lorsque les maçons construisaientles cathédrales, ils y incluaient <strong>de</strong>s symboleset <strong>de</strong>s significations ésotériques à la portée <strong>de</strong>s seulsinitiés comme par exemple <strong>de</strong>s éléments <strong>de</strong> la cabalejuive et <strong>de</strong> la tradition alchimique. Cette symbolique,qui allait au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s simples ornementations, n'étaitpas en contradiction avec les usages et les dogmes duchristianisme mais apportait <strong>de</strong>s connaissances et <strong>de</strong>sinterprétations supplémentaires.On pense que les cathédrales <strong>de</strong> cette époque sontsituées sur <strong>de</strong>s lieux énergétiques particuliers, sur<strong>de</strong>s courants d’eaux souterrains et autres énergiestelles que plaques tectoniques et énergies magnétiques.Dans le langage <strong>de</strong>s drui<strong>de</strong>s, ces forces telluriquess'appellent vouivre, que l'on peut traduire parserpent ou dragon. Le dragon est un compendium<strong>de</strong> parties d’animaux énigmatiques et redoutés parles gens du Moyen-âge (ailes <strong>de</strong> chauve-souris, écailles<strong>de</strong> serpent, griffes d’aigle, etc.) représentant lesénergies occultes et inconnues du sous-sol.Il existe la croyance qu'en construisant sur ces lieuxsacrés, on agit sur les énergies telluriques, qui semodifient et se mettent au service du temple. Nousignorons si la cathédrale <strong>de</strong> Gérone se dresse sur un<strong>de</strong> ces lieux <strong>de</strong> pouvoir ou encore quel a été le rôle <strong>de</strong>la maçonnerie dans sa construction; toutefois,l’omniprésence du dragon dans l'iconographie <strong>de</strong> lacathé-drale est surprenante. Le dragon apparaît toujoursdominé par les forces du christianisme: saintMichel, le co-patron <strong>de</strong> la cathédrale, est représentédominant le diable qui prend la forme du dragon, il ya aussi une image <strong>de</strong> saint Georges terrassant le dragon,sainte Marguerite et sainte Marte y apparaissentelles aussi dominant leur dragon. Si nous observonsavec attention tous les recoins <strong>de</strong> la cathédrale, larosace, les consoles <strong>de</strong>s chapelles, etc., nous verronsplusieurs représentations du dragon. Il s'agit peutêtre<strong>de</strong> la représentation <strong>de</strong> ce dragon tellurique quihabite le sous-sol <strong>de</strong> la cathédrale et qui, lorsqu'il estdominé par les forces du christianisme, remplit lacathédrale d’une énergie particulière.29


10Saint Maurice et la mauvaise vieille <strong>de</strong> Cal<strong>de</strong>sCette légen<strong>de</strong> nous raconte l’origine dunom du village <strong>de</strong> Cal<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Malavella,qui est situé à une vingtaine <strong>de</strong> minutes<strong>de</strong> Gérone. Au XVIIIe siècle, une <strong>de</strong>schapelles <strong>de</strong> l’église paroissiale duMercadal, à Gérone, était dédiée à saintMaurice. La fête <strong>de</strong> saint Maurice,le 22 septembre, rassemblait <strong>de</strong> nombreuxvisiteurs locaux.30XIe siècle, construction <strong>de</strong> la chapelle <strong>de</strong> Saint Maurice au château<strong>de</strong> Sant Maurici - Cal<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Malavella (<strong>Girona</strong>).


L É G E N D E S D E G É R O N EIl était une fois un petit orphelin, prénomméMaurice, qui arriva au village <strong>de</strong> Cal<strong>de</strong>s, cherchantun moyen <strong>de</strong> gagner sa vie. Le jeune Maurice se retrouvadans un village soumis à la tyrannie <strong>de</strong> samaîtresse et terrorisé par les morts d'enfants tuéspar un homme loup. Ce même jour, Maurice rencontrala mauvaise dame <strong>de</strong> Cal<strong>de</strong>s. Poussé par lafaim, l'enfant lui vola quelques pièces mais la malchancevoulut qu'il soit surpris par Punyestret, lesecrétaire <strong>de</strong> la mauvaise vieille.La mauvaise vieille <strong>de</strong> Cal<strong>de</strong>s, frappée d'admirationenvers le courage du jeune, voulut le prendrecomme serviteur. Le bon Maurice alla doncs'installer au lugubre château du tyran, quis’étendait dans les profon<strong>de</strong>urs du village toutentier. Mais la drôlesse n'imaginait pas que le couragequ'elle avait tant admiré chez ce garçon lamènerait à sa perte. Le bon Maurice, en plus d'êtrecourageux, était aussi curieux et habité d'un fortsentiment <strong>de</strong> justice. Ce penchant l'amena àdécouvrir le secret <strong>de</strong> la mauvaise dame. Une nuit,il vit le nain Suc-<strong>de</strong>bruc, le bouffon du palais, quipénétrait dans la cuisine, il portait un sac et unmasque <strong>de</strong> loup sur le visage. La monstrueuse cuisinièrel’attendait pour cuisiner le contenu du sac:un enfant bien tendre.Maurice profita d'un moment <strong>de</strong> distraction <strong>de</strong> lacuisinière pour la pousser dans le chaudron mais ilfut surpris par Suc<strong>de</strong>bruc. S'ensuivit une bagarre,l'enfant arriva à s'échapper et Suc<strong>de</strong>bruc futassommé.Maurice porta à manger à la mauvaise vieille mais,cette fois-ci, le banquet ne fut pas <strong>de</strong> la vian<strong>de</strong>d'enfant mais <strong>de</strong> chien. La mauvaise vieille <strong>de</strong>vintfurieuse, tandis qu'à l'extérieur, les gens du village,alertés par le garçon, encerclèrent le palais etl'incendièrent. Notre héros réussit à sortir avantque la mauvaise vieille fut dévorée par les flammes.La mauvaise vieille, sans sa ration <strong>de</strong> vian<strong>de</strong>d'enfant, n'était plus immortelle et le village <strong>de</strong>Cal<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Malavella retrouva sa liberté.31


11Ermessen<strong>de</strong> <strong>de</strong> CarcassonneC'est l'histoire d’une femme qui ne s'estpas résignée à être simple spectatrice <strong>de</strong>la vie politique <strong>de</strong> la Catalogne du XIesiècle. La comtesse Ermessen<strong>de</strong> étaitcélèbre pour sa beauté et son caractèrebien trempé était légendaire. Dès le débutelle s'impliqua dans la politique catalaneet participa directement aux tâches <strong>de</strong>gouvernement <strong>de</strong>s comtés <strong>de</strong> son mari età la prési<strong>de</strong>nce d’assemblées et <strong>de</strong>32 tribunaux. Elle alla même jusqu'àaccompagner le comte Borrell III dans<strong>de</strong> nombreuses campagnes militaires àAl-Andalus (Royaume musulmand’Andalousie).1058, mort <strong>de</strong> la comtesse Ermessen<strong>de</strong> <strong>de</strong> CarcassonneCathédrale <strong>de</strong> Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N EErmessen<strong>de</strong> <strong>de</strong> Carcassonne, fille <strong>de</strong> Roger Ier <strong>de</strong>Carcassonne et d'Adélaï<strong>de</strong> <strong>de</strong> Gavaldà, naquit auxenvirons <strong>de</strong> 975. Elle se maria avec le comte <strong>de</strong>Barcelone, Ramon Borrell III, en 993. Le comte BorrellIII mourut lorsque son fils, Berenguer Ramon Ier, ditEl Corbat (le voûté), était encore mineur et Ermessen<strong>de</strong>assuma la régence <strong>de</strong>s comtés jusqu'à la majorité<strong>de</strong> son fils et jouit <strong>de</strong> l’usufruit <strong>de</strong>s comtés <strong>de</strong>Gérone-Osona, selon la volonté <strong>de</strong> son mari.Après la régence, la comtesse était peu disposée àrenoncer au pouvoir et son frère, Pierre Roger <strong>de</strong>Carcassonne, évêque <strong>de</strong> Gérone, dut intercé<strong>de</strong>r entrela mère et le fils en établissant un accord selon lequelson fils Berenguer Ramon <strong>de</strong>vait cé<strong>de</strong>r temporairementà sa mère la seigneurie <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> Géroneainsi que plusieurs châteaux et autres rentes.Berenguer Ramon Ier mourut en 1035 et Ermessen<strong>de</strong><strong>de</strong> Carcassonne se retrouva à nouveau en position <strong>de</strong>régente, cette fois-ci <strong>de</strong>s comtés <strong>de</strong> son petit-fils,Ramon Berenguer, jusqu'en 1056.Outre ces épiso<strong>de</strong>s d’intrigues, <strong>de</strong> luttes pour le pouvoiret <strong>de</strong> participation active dans la vie politiquecatalane, la comtesse Ermessen<strong>de</strong> reste dans lesmémoires grâce à son étroite relation avec l'église catalane.Ermessen<strong>de</strong> <strong>de</strong> Carcassonne, en tant que dame<strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> Gérone, fonda le couvent <strong>de</strong>s sœursbénédictines <strong>de</strong> Sant Daniel et le monastère <strong>de</strong> SantFeliu <strong>de</strong> Guíxols. En 1015 Ermessen<strong>de</strong> et son frèrePierre Roger favorisèrent la construction religieuse laplus importante <strong>de</strong> Gérone: la cathédrale, construitesur l’ancien temple romain, en faisant une donation<strong>de</strong> 100 onces d’or. La cathédrale romane <strong>de</strong> Géroneétait, comme <strong>de</strong> nos jours, une église à nef unique,couverte d'une voûte en berceau et à trois portes, ellefut consacrée le 21 septembre 1038.Lorsque la comtesse Ermessen<strong>de</strong> mourut, en 1058,son sépulcre fut transporté, selon sa volonté, avecl'écu comtal <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Barcelone, à la cathédrale<strong>de</strong> Gérone. Au XIVe siècle, le roi Pierre leCérémonieux fit recouvrir son sépulcre et celui <strong>de</strong>son petit-fils, Ramon Berenguer II, d'une sépulturegothique. On installa une sculpture d’Ermessen<strong>de</strong>,œuvre <strong>de</strong> Guillem Morell, sur le sépulcre <strong>de</strong> lacomtesse.33


12Le faucon <strong>de</strong> Cap d’EstopesCette fois-ci, les faits historiques quiengendrent la légen<strong>de</strong> sont bien définisdans l’espace et le temps. En 1053, lecomte <strong>de</strong> Barcelone, Ramon Berenguer Ier,eut pour <strong>de</strong>scendance <strong>de</strong>ux jumeaux quiétaient <strong>de</strong>stinés à régner conjointementsur le comté. On baptisa les enfants <strong>de</strong>snoms <strong>de</strong> Ramon Berenguer, égalementconnu sous le nom <strong>de</strong> Cap d’Estopes(Tête d’étoupe) à cause <strong>de</strong> sa chevelure34 blon<strong>de</strong>, et Berenguer Ramon. Le cinqdécembre 1082, on trouva RamonBerenguer II assassiné près <strong>de</strong> Gérone.1082, mort <strong>de</strong> Cap d’Estopes - Sant Feliu <strong>de</strong> Buixalleu / Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N ELa légen<strong>de</strong> commence par l'événement historique <strong>de</strong>la mort violente <strong>de</strong> Ramon Berenguer fils, lorsqu'ilétait à la chasse dans le Montnegre, sur le termemunicipal <strong>de</strong> Gaserans, entre Hostalric et Sant Celoni,près <strong>de</strong> Sant Feliu <strong>de</strong> Buixalleu. Cap d’Estopes annonçaà son frère qu'il avait assez chassé et qu'il rentraità Barcelone pour connaître son premier fils qui venait<strong>de</strong> naître. Cependant Ramon Berenguer II n'est jamaisretourné à Barcelone. Son corps fut découvert parun paysan, alerté par les lamentations du faucon ducomte. Le corps du comte gisait dans une mare connue<strong>de</strong> nos jours comme le Gorg (mare) <strong>de</strong>l Comte,dans un endroit isolé qui, dès lors, prit le nom <strong>de</strong>Voral (rive) <strong>de</strong> l’Astor ou <strong>de</strong> Perxa (perche) <strong>de</strong> l’Astor.Les restes du comte furent amenés à la cathédrale <strong>de</strong>Gérone, où on l'enterra. On raconte que le fauconaffligé suivit en volant le cortège funèbre jusqu'à lacathédrale, où il tournoya au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> BerenguerRamon avant <strong>de</strong> tomber mort <strong>de</strong> fatigue et <strong>de</strong> peinesur le cercueil <strong>de</strong> son maître.Le peuple a toujours cru que Berenguer Ramon avaiteu un lien direct avec l’assassinat et, <strong>de</strong>puis ce jourlà,on l'appela Berenguer Ramon le Fratrici<strong>de</strong>. La légen<strong>de</strong>nous dit aussi que, lors <strong>de</strong>s funérailles, lescurés qui <strong>de</strong>vaient chanter la messe <strong>de</strong>s défunts setrompaient dans leurs chants d'une façon inexplicableet ne cessaient <strong>de</strong> répéter Ubi est Abel fratertuus?: Où est Abel, ton frère?Dès lors, les restes <strong>de</strong> Ramon Berenguer II, son armureet son épée, reposent dans la cathédrale <strong>de</strong>Gérone, au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> la porte <strong>de</strong> l’ancienne sacristie,dans la chapelle conventuelle. Les habitants <strong>de</strong> Géronen'ont pas oublié le fidèle faucon et ils lui ontoctroyé une place d'honneur dans la cathédrale, prèsdu tombeau <strong>de</strong> son maître, dans une <strong>de</strong>s nervures <strong>de</strong>la voûte d’entrée aux salles capitulaires.Lorsqu'en 1982, on a ouvert le sarcophage originaldu comte, qui avait été recouvert <strong>de</strong> plaquesd’albâtre en 1385 sur ordre du roi Pierre leCérémonieux, on y a trouvé une représentation <strong>de</strong>squatre barres qui constitue l'image la plus ancienne<strong>de</strong> l'écu <strong>de</strong> la Catalogne.35


13Le cul <strong>de</strong> la lionneAu même titre que les mouches, le lion estun animal typique <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> Gérone.Tout au long <strong>de</strong> leur histoire, les habitants<strong>de</strong> Gérone ont toujours été attirés par cetanimal. Cependant, leurs pauvresconnaissances en zoologie faisaient qu'ilsconfondaient les loups et les lions commec'est le cas pour la Font <strong>de</strong>ls Lleons(la fontaine <strong>de</strong>s lions), appelée ainsi parcequ'il y en avait beaucoup... <strong>de</strong>s loups dans36 les environs. Et à ce sujet, puisqu'il estquestion <strong>de</strong> confondre les lions,les habitants <strong>de</strong> Gérone ont confondule sexe d’un autre lion célèbre <strong>de</strong> larue Carrer Cal<strong>de</strong>rers.XIIe siècle - Rue Carrer Cal<strong>de</strong>rers, Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N EDans la rue Carrer Cal<strong>de</strong>rers, anciennement connuecomme Carrer <strong>de</strong>ls Perolers, au numéro 19, se dressaitune colonne romane sur laquelle grimpait un lion <strong>de</strong>pierre. Il est possible que cette sculpture ait servid'enseigne au fameux Hostal <strong>de</strong> la Lleona qui existaitdéjà au Moyen-âge et a survécu jusqu’à l’époquemo<strong>de</strong>rne. Cette auberge était bien située, à l’entrée <strong>de</strong>la ville, et tous les voyageurs qui arrivaient à Gérone<strong>de</strong>puis la France y séjournaient.Bien que la sculpture représente un lion mâle, on ad'abord cru qu'il s'agissait d'une guenon, peut-être dufait que l'animal est en train <strong>de</strong> grimper, et par la suitela mythologie <strong>de</strong> Gérone en a fait une lionne.La figure n'étant pas très élevée, si on se mettait surla pointe <strong>de</strong>s pieds et on allongeait les bras, on arrivaità toucher le fessier <strong>de</strong> l’animal avec les mains. Et étantdonné que les catalans sont <strong>de</strong> nature scatologique,cet acte s'est transformé en rituel. La lionne est bientôt<strong>de</strong>venue célèbre parmi les habitants <strong>de</strong> Gérone etles étrangers. Avec le temps, le rituel qui consiste à luitoucher le fessier ou l'embrasser est <strong>de</strong>venu une sorte<strong>de</strong> baptême <strong>de</strong> Gérone pour les nouveaux-venus,après s'être inscrit au recensement municipal. Pour leshabitants <strong>de</strong> la ville, c'est la garantie que le retour àGérone, après une absence, se fera avec bonheur. Cerituel est accompagné <strong>de</strong> son dicton:On n'est pas un bon citoyen <strong>de</strong> Gérone si on n'a pasembrassé le cul <strong>de</strong> la lionne.Depuis 1986 il y a une reproduction <strong>de</strong> la lionnedans la rue carrer Cal<strong>de</strong>rers, sur la place Sant Félix,très près <strong>de</strong> l'endroit où se trouvait la figure originale,à laquelle on a ajouté quelques marches afin<strong>de</strong> faciliter le rituel.La reproduction <strong>de</strong> la lionne reçoit sans cesse <strong>de</strong>sbaisers sur son fessier <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s habitants <strong>de</strong> laville et <strong>de</strong>s visiteurs, tandis que la statue originalereçoit les visites au musée d’art <strong>de</strong> la ville.37


14La rue Carrer <strong>de</strong>l Llop (du Loup)La rue Carrer <strong>de</strong>l Llop, actuellement Pujada<strong>de</strong>l Rei Martí l’Humà, cache quelquesmystères. Le niveau <strong>de</strong> la rue fut surélevéen 1750 afin d'éviter les inondations.De sorte que les rez-<strong>de</strong>-chaussée actuelscorrespon<strong>de</strong>nt aux premiers étages <strong>de</strong>sanciennes bâtisses et les balconsd’autrefois constituent aujourd’hui lesportes <strong>de</strong>s maisons. En couvrant la rue,on a en même temps enfoui une partie <strong>de</strong>38 l'histoire, tel le tambour d’un templewisigoth, probablement dédié à saint Félix,cependant une curieuse sculpture asurvécu à la montée du niveau <strong>de</strong> la rue.XIIe siècle, date du haut-relief - Rue Carrer Pujada <strong>de</strong>l Rei Martí, Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N EDans le vieux quartier <strong>de</strong> Gérone, <strong>de</strong>vant le Portail <strong>de</strong>Sobreportes, près <strong>de</strong> la rivière Galligans, se trouve larue carrer <strong>de</strong>l Rei Martí l’Humà. C'est une montéeétroite, sombre et humi<strong>de</strong>, qui sent la vieille pierre etqui autrefois était connue comme Carrer <strong>de</strong>l Llop (ruedu loup). Dans cette rue il y avait un linteau en pierresculptée qui se trouve actuellement au Musée d’Art <strong>de</strong>Gérone. La sculpture représentait un grand loup, avecune crinière <strong>de</strong> lion, en train <strong>de</strong> dévorer un enfant.La figure que représente ce haut-relief <strong>de</strong> pierre commémoreles faits tragiques qui se déroulèrent il y a trèslongtemps dans cette rue. La légen<strong>de</strong> raconte que, aucours d’un jour néfaste, un loup affamé <strong>de</strong>scendit <strong>de</strong>la vallée <strong>de</strong> Sant Daniel pour trouver <strong>de</strong> quoi calmer safaim lorsqu'il arriva au Carrer <strong>de</strong>l Llop. L'animal affamévit un gamin qui était occupé à jouer et il s'en empara.À partir <strong>de</strong> là, nous disposons <strong>de</strong> différentes versions:il y a en a qui disent que le loup a emportél’enfant et l'a dévoré, d’autres disent que <strong>de</strong>s chasseursont réussi à faire peur au loup, qui a lâché l'enfant etest reparti vers Sant Daniel, la queue entre les jambes;selon d'autres sources, l'enfant était un petit enfant <strong>de</strong>chœur qui finit par être dévoré par le loup au beaumilieu d'une procession.On ne sait pas si ce tragique événement a vraiment eulieu. C'est peut-être à partir <strong>de</strong> ce triste fait que lasculpture a été conçue comme signe avertissant dudanger ou bien l'imagination populaire a-t-elle aussidonné naissance à la légen<strong>de</strong> à partir <strong>de</strong> la sculpturequi se trouvait dans la rue. Quoi qu'il en soit, c'est encoreun mystère qui vient s'ajouter aux énigmes <strong>de</strong>cette rue.Il y avait aussi dans cette même rue Carrer <strong>de</strong>l Llop, uncouvent <strong>de</strong> religieuses dont la faça<strong>de</strong> offrait une représentation<strong>de</strong> la Mare <strong>de</strong> Déu <strong>de</strong> la Llet (la Vierge du lait),à laquelle accouraient les mères qui avaient perdu leurlait et ne pouvaient alimenter leurs enfants.Il est toutefois curieux qu'il y ait une image <strong>de</strong> cettevierge dans la rue Carrer <strong>de</strong>l Llop, étant donné que leloup a également un rapport avec le lait maternelpuisque c'est une louve qui a allaité les <strong>de</strong>ux jumeauxqui ont fondé la ville <strong>de</strong> Rome.39


15La sirène <strong>de</strong> GalligansNous disposons <strong>de</strong> données, concernantl’existence du monastère roman <strong>de</strong> SantPere <strong>de</strong> Galligans, datant <strong>de</strong> 988.Les travaux <strong>de</strong> l’église <strong>de</strong> Sant Pere et ducloître du monastère ont commencé audébut du XIIe siècle et ont été achevésavant la fin du siècle. Dans le petit cloîtredu monastère se trouve un chapiteau quiprésente un bas-relief particulier surchacune <strong>de</strong> ses quatre faces : une sirène40 énigmatique. La sirène du monastère <strong>de</strong>Galligans n'est pas la représentationtypique d’une sirène au corps <strong>de</strong> femme,à longue chevelure et à queue <strong>de</strong> poisson.XIIe siècle - Monastère <strong>de</strong> Sant Pere <strong>de</strong> Galligans, Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N ECette sirène <strong>de</strong> Gérone est représentée avec le corpsd'une femme et non pas avec une mais <strong>de</strong>ux queues<strong>de</strong> poisson. La sirène flotte sur les eaux, les yeuxgrand ouverts et saisissant le bout <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>uxqueues. À la naissance <strong>de</strong> chaque queue, il y a un<strong>de</strong>ssin qui semble représenter <strong>de</strong>ux sexes. L'énigme<strong>de</strong> cette sirène atypique reste totale car on ne trouveaucune référence donnant une explication surson origine ou son sens.Toutes les cultures ont utilisé un bestiaire mythologiqueafin d'expliquer ce qui était inconnu ensymbolisant les dangers, les menaces, les vertus etles péchés, en fonction <strong>de</strong> leur système <strong>de</strong> croyances.Les premières références aux sirènes remontentà la culture gréco-romaine, qui a empruntécet animal mythologique aux cultures orientales.Les sirènes charmaient les marins avec leurs chantset les faisaient échouer contre les écueils. Dansl’Odyssée d’Homère, Ulysse <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à être attachéau mât du bateau afin <strong>de</strong> pouvoir résister àla tentation du chant <strong>de</strong>s sirènes. Le christianismea adopté et christianisé un grand nombre <strong>de</strong>symboles culturels antiques, parmi lesquels lafigure <strong>de</strong>s sirènes.Dans l'île <strong>de</strong> Lesbos, en Grèce, sur l'autel <strong>de</strong> Mytilèneon trouve la représentation d'une sirène qui ressemblebeaucoup à celle <strong>de</strong> Galligans; elle saisit, elle aussi,les extrémités <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux queues. L’art du Moyen-âge aemprunté cette représentation à la Grèce et quelquefois,la chevelure se confond avec les queues: dansune miniature du Beato <strong>de</strong>l Burgo <strong>de</strong> Osma, Babyloneest représentée comme une femme qui se tire les cheveux.L’art roman basque reproduit <strong>de</strong>s sirènes semblablesà celle <strong>de</strong> Galligans.Les cloîtres du Moyen-âge représentent l'union <strong>de</strong> cequi est terrestre et profane avec le divin et intègrentdans leur symbolique <strong>de</strong>s éléments fantastiques afin<strong>de</strong> diffuser leur message. Les eaux calmes sur lesquellesflotte la sirène représentent ce qui est occulteet dangereux, les eaux peuvent se déchaîner. Lessirènes symbolisent la luxure et la représentationmédiévale <strong>de</strong> la sirène à <strong>de</strong>ux queues avec un sexesur chacune d'elle vient renforcer ce symbolisme. Lasirène <strong>de</strong> Sant Pere <strong>de</strong> Galligans, avec ses yeux grandouverts, est peut-être un signe <strong>de</strong>stiné aux fidèles <strong>de</strong>l'époque les avertissant <strong>de</strong>s dangers que pouvaientengendrer le péché et la luxure.41


16Le fils du châteauLes sociétés traditionnelles obéissent à <strong>de</strong>snormes rigi<strong>de</strong>s <strong>de</strong> comportement etappliquent <strong>de</strong>s châtiments <strong>de</strong> rigueur àceux qui dévient <strong>de</strong> ces normes.Néanmoins, les forces divines peuventparfois pardonner ces écarts que la sociétéa condamnés. C'est ce qui est arrivé à lafille <strong>de</strong> Cal Sobirà <strong>de</strong> Santa Creu, qui esttombée enceinte <strong>de</strong> son fiancé.42XIIIe siècle - Le château <strong>de</strong> Farners.Santa Coloma <strong>de</strong> Farners (Gérone).


L É G E N D E S D E G É R O N EQuand les parents <strong>de</strong> la pauvre fille apprirent lanouvelle, ils la jetèrent hors <strong>de</strong> chez eux. Le malheureuxcouple ne pouvait que fuir. Ils se marièrenten secret à l’ermitage <strong>de</strong> Sant Miquel <strong>de</strong> Cla<strong>de</strong>lls, etacceptèrent la proposition <strong>de</strong> l’ermite <strong>de</strong> vivre aveclui. La vie commençait à leur sourire et ils avaientretrouvé le bonheur à l’ermitage. Mais un jour néfaste,la jeune femme retrouva son mari et le braveermite assassinés. La veuve avait trop peur <strong>de</strong> resterseule à l’ermitage mais elle ne pouvait pas nonplus retourner chez sa famille car sans aucunepreuve <strong>de</strong> son mariage, ses parents ne l'auraientpas recueillie.Son fils était sur le point <strong>de</strong> naître quand, désespérée,elle alla jusqu'aux ruines du vieux château <strong>de</strong>Farners pour se reposer et assimiler toute la peinequi s'était abattue sur elle. La pauvre fille, cherchantune consolation, tourna le regard versl’ermitage <strong>de</strong> la Mare <strong>de</strong> Déu <strong>de</strong> Farners, au pied duchâteau, et implora le ciel <strong>de</strong> l'ai<strong>de</strong>r dans son malheur.Soudain, les murs du château s'éclairèrentd'une lumière éclatante, une belle dame surgit etaida la veuve à accoucher <strong>de</strong> son fils. La belle dame,qui n'était autre que la Vierge Marie, donnal'enfant à un couple qui venait <strong>de</strong> perdre leur filspour qu'ils prennent soin <strong>de</strong> lui pendant <strong>de</strong>ux ans.Ces <strong>de</strong>ux années écoulées, le couple alla au château<strong>de</strong> Farners et rendit l'enfant à sa mère. La ViergeMarie déposa dans le tablier <strong>de</strong> la femme quelquechose <strong>de</strong> lourd, une récompense pour avoir gardél'enfant en nourrice, en recommandant à l’hommeet à la femme <strong>de</strong> ne pas regar<strong>de</strong>r ce qu'il y avaitjusqu'à leur arrivée chez eux. Cependant le couplen'eut pas la patience d'attendre et à mi-chemin, ilss'arrêtèrent pour regar<strong>de</strong>r la mystérieuse récompensequi n'était autre qu'un tas <strong>de</strong> sable. Pris <strong>de</strong>colère, ils jetèrent le sable et rentrèrent chez eux.Quand la femme retira son tablier, un grain <strong>de</strong> sabletomba à terre et se transforma en or. S'ils avaientécouté les paroles <strong>de</strong> la Vierge Marie, ils seraient<strong>de</strong>venus riches.La fille du souverain entra dans les ordres, son filsgrandit et <strong>de</strong>vint un homme courageux et charitableque tout le mon<strong>de</strong> appelait le «Fils du château».43


17Les juifs à Gérone44La diaspora, la dispersion <strong>de</strong>s juifs, a débuté en l'an 70 <strong>de</strong>notre ère. La première référence aux juifs à Gérone date duIXe siècle. Au XIe siècle, il existait déjà une communautéenracinée à Gérone, qui occupait son propre espace dans laville, le Call ou quartier juif, jusqu'à ce qu'elle soit expulséeen 1492. Cette cohabitation nous a transmis <strong>de</strong>s histoirespersonnelles qui sont <strong>de</strong>venues <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s.1270, mort <strong>de</strong> Mossé Ben Nahman,Bonastruc <strong>de</strong> Porta., Quartier juif, Gérone


L É G E N D E S D E G É R O N ENé à Gérone en 1194, 4954 selon le calendrier juif,Mossé Ben Nahman, également connu sous le nom<strong>de</strong> Nahmàni<strong>de</strong>s ou par son nom catalan Bonastruc<strong>de</strong> Porta, fut le rabbin <strong>de</strong> la communauté juive <strong>de</strong>Gérone. Ses oeuvres figurent parmi les plus importantes<strong>de</strong> la littérature juive <strong>de</strong> la Péninsule Ibérique.Le roi Jaume Ier le désigna comme représentant <strong>de</strong>scommunautés juives auprès <strong>de</strong> la Couronne d’Aragondans la Controverse <strong>de</strong> Barcelone avec le juifconverti Pau Cristià. Après avoir plaidé la cause dujudaïsme et bien qu'il comptât sur la sympathie duroi, l’église condamna Nahmàni<strong>de</strong>s à l'exil. En 1276il gagna la ville d’Akko. Avant sa mort, à l'âge <strong>de</strong> 76ans, il fonda cependant une synagogue à Jérusalemqui officia jusqu'en 1585.Tandis qu'à Gérone déferlait la vague antisémite quis'était déjà abattue sur le royaume <strong>de</strong> Castille, le 10août 1391, une émeute contre le Call éclata et lesautorités durent enfermer les juifs dans la TourGironella afin <strong>de</strong> les protéger. Mais l'abri se transformaen prison d’où les juifs ne pouvaient sortirque s'ils se convertissaient au christianisme. Parmiles juifs <strong>de</strong> Torre Gironella qui s'étaient convertis, setrouvait Francesc Guillem <strong>de</strong> Vilaritg mais sa femme,Tolrana, refusa <strong>de</strong> se convertir et resta enferméedans la tour. Le 27 septembre, Francesc Guillemenvoya son procureur, Francesc Cervera, afin qu'ilobtienne <strong>de</strong> laisser partir Tolrana avec lui. Tolranarefusa <strong>de</strong> se convertir et <strong>de</strong> cohabiter avec son mariconverti selon les normes <strong>de</strong> l’église catholiquepour les couples entre chrétiens et «infidèles». Cesfaits furent recueillis dans un acte par le notaire LluísCarbonell. La légen<strong>de</strong> raconte que Tolrana préférase donner la mort en se jetant du haut <strong>de</strong> la tourplutôt que <strong>de</strong> renier le judaïsme. Depuis, quand latramontane souffle dans les ruelles du Call par lesfroi<strong>de</strong>s nuits d’hiver, on peut encore entendre le chantplaintif du fantôme <strong>de</strong> Tolrana.La situation ne fit qu'empirer pour les juifs. En 1490le tribunal <strong>de</strong> l'Inquisition s'installa à Gérone et <strong>de</strong>uxans plus tard, le 30 avril 1492, une lettre <strong>de</strong> Ferdinandle Catholique adressée à Gérone décrétaitl’expulsion <strong>de</strong> tous les juifs <strong>de</strong> la couronne <strong>de</strong>Castille et d'Aragon. Le 12 juillet, la communautéjuive <strong>de</strong> Gérone, l’aljama, vendit toutes ses propriétéset un mois plus tard en août 1492, officiellement,il ne restait plus aucun juif dans la ville.45


18Les mouches <strong>de</strong> saint NarcisseGérone a subi <strong>de</strong> nombreux sièges, plusd'une trentaine, dès le IIIe siècle, le <strong>de</strong>rnierayant eu lieu en 1874. Après chaque siègela ville était dévastée et comptait ungrand nombre <strong>de</strong> pertes parmi seshabitants mais à partir du siège <strong>de</strong> 1285,les habitants <strong>de</strong> Gérone ont reçu l'ai<strong>de</strong> <strong>de</strong>saint Narcisse et son armée <strong>de</strong> mouchespour expulser l'ennemi, surtout celui venu<strong>de</strong> France. Jetons donc un coup d’œil aux46 faits historiques, recueillis par lechroniqueur Bernat Desclot en 1288.1285, siège du roi français Philippe le Hardi.Église Saint Félix, Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N EGérone, à cause <strong>de</strong> sa situation géographique, au bord<strong>de</strong> la via Augusta, était une ville très convoitée pour<strong>de</strong>s raisons politiques, commerciales et militaires. Philippele Hardi <strong>de</strong> France, suite à une dispute territorialeavec le roi Pierre, comte <strong>de</strong> Barcelone et roi d’Aragon,décida d'assiéger Gérone. En 1285, les hommesdu roi <strong>de</strong> France arrivèrent dans la ville. Les habitants<strong>de</strong> Gérone et les troupes du roi Pierre, défendirent laville du mois <strong>de</strong> juin au mois <strong>de</strong> septembre. LesFrançais ne réussirent pas à conquérir Gérone mais ilsoccupèrent quelques quartiers à l'extérieur <strong>de</strong>s murailles.L’église Saint Félix se trouvait en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>l'enceinte fortifiée et les hommes <strong>de</strong> Philippe le hardil'occupèrent pour en faire une caserne. Les Français,fu-rieux <strong>de</strong> n'avoir pas réussi à s'emparer <strong>de</strong> la ville,profanèrent le sépulcre <strong>de</strong> saint Narcisse et en répandirentles restes. Un menuisier qui avait vu la scène,ramassa les restes du saint et les mit à l'abri dans uneboîte. Ce jour-là, le menuisier fut témoin d’un faitexceptionnel: le sépulcre du saint laissa s'échapper unessaim <strong>de</strong> mouches étranges.Les mouches sortaient par milliers, elles étaient plusgrosses que les mouches communes, <strong>de</strong> la taille d’ungland, <strong>de</strong> couleur bleu vert et sur la tête, elles avaientun grand dard. L'immense tache verte que formaitl'armée <strong>de</strong> mouches vénéneuses vola dans un vrombissementassourdissant vers les troupes françaises quiava-ient finalement occupé la ville. Les mouches vénéneusess’abattaient sauvagement sur les soldats et leschevaux; chaque piqûre <strong>de</strong> mouche donnait la mortdouloureusement. Sous les cris <strong>de</strong> douleur <strong>de</strong>s soldatset les hennissements <strong>de</strong>s chevaux, l’armée françaisedut finalement battre en retraite. On assiste à une véritablehécatombe pour ce qui est <strong>de</strong>s pertes du côtéfrançais; <strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong> chevaux et autant <strong>de</strong> soldats ypérirent et même le roi <strong>de</strong>s français passa <strong>de</strong> vie à trépassur le chemin du retour en France.Depuis ce siège <strong>de</strong> 1285, chaque fois que Gérone étaitassiégée, ses habitants portaient le sépulcre <strong>de</strong> leursaint aux murailles pour qu'il défen<strong>de</strong> la ville à l'ai<strong>de</strong> <strong>de</strong>sa puissante armée <strong>de</strong> mouches vénéneuses. Le <strong>de</strong>rniersiège français fut celui <strong>de</strong> Napoléon en 1808-1809.Cette fois-ci, l’armée <strong>de</strong> mouches n'est pas intervenuemais les habitants <strong>de</strong> la ville ont attribué la courageusedéfense <strong>de</strong> la ville jusqu'à sa capitulation, le 10 décembre1809, à la protection <strong>de</strong> saint Narcisse. Enremerciement au saint, le 27 novembre 1808, la JuntaSuprema <strong>de</strong>l Principat (le Conseil Suprême <strong>de</strong> la Principauté)octroya la distinction <strong>de</strong> Généralissime à SaintNarcisse.47


19Le mugissement <strong>de</strong> CastellóLes légen<strong>de</strong>s naissent bien souvent pouressayer d'expliquer <strong>de</strong>s faits qui semblentincompréhensibles. Des victoires à l'issued'âpres batailles, <strong>de</strong>s pierres <strong>de</strong>bout, <strong>de</strong>sfontaines, <strong>de</strong>s ponts... et même d'étrangescris trouvent une explication dans leslégen<strong>de</strong>s. Les légen<strong>de</strong>s servent d'autre partà montrer les modèles <strong>de</strong> comportementacceptables pour la société et lespunitions <strong>de</strong>stinées à ceux qui ne suivent48 pas ce comportement. Dans cette histoire,nous allons voir comment le cri d’unoiseau nous avertit <strong>de</strong> ce qui peut nousarriver si nous sommes avares.1333, année <strong>de</strong> famine en Catalogne - Castelló d’Empúries (Gérone).


L É G E N D E S D E G É R O N EAu temps du comte d’Empúries Ponç Hug, au XIVesiècle, il y eut une très mauvaise récolte. Le comte,qui avait un grand sens <strong>de</strong> la justice, réclama toutela récolte pour la distribuer à parts égales entre sessujets et éviter ainsi la famine entre les paysans lesplus pauvres.Mais, comme il arrive bien souvent, un riche habitantdu coin voulut être plus rusé que les autres. Ilramassa tout le blé qu'il put et le chargea dans unecharrette tirée par <strong>de</strong>s bœufs. Cet homme méprisable<strong>de</strong> Castelló voulait aller jusqu'à Rosas, oùl'attendait un bateau qui l'amènerait vers <strong>de</strong>s terreslointaines. L’escapa<strong>de</strong> <strong>de</strong>vait se faire pendant lanuit et à travers les étangs, car il ne voulait pasqu'on le découvrît.Lorsqu'il atteignit la zone traîtresse <strong>de</strong>s étangs, lesbœufs, la charrette, le blé et le riche avare commencèrentà s'enliser dans la boue. On ne put rienfaire contre les forces <strong>de</strong> l'étang, qui finirent par lesengloutir. Depuis cette nuit-là, on peut encore entendrela plainte <strong>de</strong>s bœufs, complices innocents<strong>de</strong> cet acte réprouvable.Il existe plusieurs versions <strong>de</strong> cette légen<strong>de</strong>. Onraconte aussi que c'est le comte d’Empúries qui aété englouti par les étangs car il n'avait pas voulupartager le blé avec ses sujets. Une autre version <strong>de</strong>cette légen<strong>de</strong> relie le cri <strong>de</strong>s bœufs à une entrée enenfer qui se trouverait au fond <strong>de</strong> l'étang commepour l’étang <strong>de</strong> Sils.L’explication <strong>de</strong> ces cris légendaires nous est donnéepar l’ornithologie: l’étrange cri <strong>de</strong>s bœufs n'estautre que le chant du Botaurus stellaris: un oiseauqui habite dans les cannaies <strong>de</strong>s petits lacs et qui,les soirs <strong>de</strong> printemps, en pério<strong>de</strong> d'accouplement,émet un son qui rappelle le mugissement du bœuf.À partir <strong>de</strong>s années 60, l’oiseau a disparu <strong>de</strong> larégion mais en récupérant le Parc National <strong>de</strong>sAiguamolls (Marais) <strong>de</strong> l’Empordà, en 1983, le mugissement<strong>de</strong> ce volatile s'est <strong>de</strong> nouveau laissé entendredans les terres <strong>de</strong> l'Empordà et par la mêmeoccasion, la légen<strong>de</strong> du mugissement <strong>de</strong> Castelló.49


20Les pommesGérone a maintenu une relationambivalente avec ses quatre rivières.La ville a utilisé ses eaux à <strong>de</strong>s finsagricoles, pour les moulins et pour laconsommation <strong>de</strong> ses habitants. Mais cesmêmes rivières qui alimentaient la ville eneau, l’inondaient aussi régulièrement.Gérone a du inventer <strong>de</strong>s stratagèmespour se protéger contre ces rivières quan<strong>de</strong>lles se déchaînaient. La première50 inondation répertoriée date <strong>de</strong> 1193et dès lors, la ville aux quatre rivièresen a subi plusieurs.1336, construction <strong>de</strong>s rives <strong>de</strong> l’Onyar - Sur le fleuve Onyar, à Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N ELes inondations ont été un fléau récurrent à Gérone.Les habitants du Mercadal subissaient les débor<strong>de</strong>ments<strong>de</strong>s rivières Güell et Ter et les gens du quartier <strong>de</strong>Sant Pere, ceux <strong>de</strong> la rivière Galligans. Quand, en 1336,le roi Pierre le Cérémonieux permit la construction surles rives du fleuve Onyar, les problèmes ne firentqu'empirer. Quand l’Onyar débordait, il pouvait inon<strong>de</strong>rles rues les plus basses et arriver jusqu'à la Plaça <strong>de</strong>l Viet la rue Carrer Ciutadans. Les gens <strong>de</strong>vaient se réfugierdans la partie haute <strong>de</strong> la ville. À partir <strong>de</strong> 1732, leshabitants <strong>de</strong> Gérone ont mit en place un réseau <strong>de</strong>ponts <strong>de</strong> secours, installés aux premiers étages <strong>de</strong>s maisons<strong>de</strong>s rues inondées et qui conduisaient aux partiesles plus hautes <strong>de</strong> la ville, aux rues Carrer <strong>de</strong> la Força etPujada <strong>de</strong> Sant Feliu. Une autre solution était <strong>de</strong> faire<strong>de</strong>s ouvertures dans les murailles pour permettrel'évacuation hors <strong>de</strong> la ville. Mais quand ces inventionshumaines n'étaient pas suffisantes pour protéger leshabitants <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong>s quatre rivières, ils ne leur restaientplus qu'à se tourner vers la foi et les prières et semunir <strong>de</strong> quelques pommes <strong>de</strong> saint Narcisse.Ces pommes venaient d’une propriété que la confrériedu saint possédait près <strong>de</strong> Banyoles. C'était <strong>de</strong>s petitespommes rouges. À la Saint Narcisse, on les posait<strong>de</strong>vant son sépulcre, on les y laissait pendant toute ladurée <strong>de</strong> la huitaine du saint pour les distribuer ensuiteparmi les fidèles. Une fois bénites, on disait que cespommes se conservaient pendant un an et elles possédaientpar ailleurs, le pouvoir <strong>de</strong> calmer les eaux <strong>de</strong>srivières quand elles quittaient leur lit. Les habitants<strong>de</strong>s maisons <strong>de</strong> l’Onyar en gardaient une bonne provisiondans le gar<strong>de</strong>manger et lorsque l'inondationmenaçait, ils les jetaient dans la rivière dans le butd'apaiser les eaux.Ce rituel est sûrement l'héritage <strong>de</strong>s sacrifices humainsque les romains pratiquaient dans le fleuve Tibre quandcelui-ci menaçait <strong>de</strong> débor<strong>de</strong>r; par la suite, d'autres culturesont substitué les êtres vivants par <strong>de</strong>s effigies enpaille ou en pain. La pomme symboliserait doncl’homme, passée toutefois par le sas religieux et bénite.Avec le processus <strong>de</strong> sécularisation qui eut lieu en 1835et qui affecta <strong>de</strong> nombreuses propriétés appartenant àl’église, la chapelle Sant Narcís perdit le champ <strong>de</strong> pommesqu'elle possédait à Banyoles et afin <strong>de</strong> conserver latradition, elle dut, dès lors, acheter les pommes. La traditions'est perdue aux environs <strong>de</strong> 1870.51


21Saint Félix et le voleur <strong>de</strong> l’Église CollégialeL'acteur principal <strong>de</strong> ces événements estl’autre gardien <strong>de</strong> la ville, aux côtés <strong>de</strong>saint Narcisse: Sant Feliu (Saint Félix).La légen<strong>de</strong> narre que saint Félix, soucieuxparce qu’il y avait à Gérone un voleur quiavait la marotte <strong>de</strong> voler <strong>de</strong>s chasubleset autres ornements liturgiques, décidad'effectuer une ron<strong>de</strong> nocturne pourmettre un terme à ces vols.52XIVe siècle - Église <strong>de</strong> Sant Feliu (Saint Félix)


L É G E N D E S D E G É R O N EIl faisait nuit noire dans la ville aux quatre rivières età la faveur du brouillard et <strong>de</strong> la nuit, un voleur à lapetite semaine marchait, transportant un sac qui contenaitle butin <strong>de</strong> la nuit: <strong>de</strong>s chasubles qu'il avaitdérobées à l’église collégiale. Sur son chemin, le voleurrencontra un voyageur nocturne et ils firent unbout <strong>de</strong> chemin ensemble tout en conversant. Lemystérieux voyageur gagna tout <strong>de</strong> suite la confiancedu voleur. Et le voleur se mit alors à raconter sonsecret au voyageur dans l'attente peut-être que ce<strong>de</strong>rnier lui livre aussi un secret en retour.Le voyageur répondit que son secret était sûr aveclui, qu'il ne le divulguerait pas. Le voleur lui montraalors le contenu du sac et sur ce, l'inconnu proposad'aller cacher le butin dans une gran<strong>de</strong> maison qu'ilpossédait. Le brigand accepta et suivit le voyageurqui l'amena jusqu'à l'église Saint Félix. Lorsqu'ilsatteignirent l’église collégiale, l'inconnu dit au voleuravec solennité: «Laisse tout ça ici, car nous sommeschez moi.» Après avoir prononcé ces quelques paroles,il disparut dans le brouillard <strong>de</strong> la ville.Le brigand, stupéfait, se frotta les yeux: il regarda ànouveau et ne vit trace du mystérieux voyageurnocturne. Le voleur reconnut alors l'église qu'il avaitprofanée quelques heures auparavant et tremblant,il vida le contenu du sac dans le temple. En relevantla tête, son regard tomba sur l'image qui se trouvait<strong>de</strong>rrière l'autel et il constata que son visage était lemême que celui du mystérieux voyageur qui l'avaitamené jusqu’ici. Le brigand comprit alors que saintFélix avait découvert le vol. Le saint avait donné unebonne leçon au brigand qui cessa ses incursions,tout au moins dans la maison du saint.53


22Le TarlàDans la rue Carrer <strong>de</strong> l’Argenteria, àl'occasion <strong>de</strong>s fêtes <strong>de</strong> printemps, on peutvoir une marionnette vêtue en Arlequin,suspendue à une barre horizontale qui vad'un balcon à l'autre. La marionnettecaptive les passants, surtout les enfants,avec son infatigable répertoire <strong>de</strong>pirouettes et <strong>de</strong> cabrioles. Il s’agit duTarlà, ou du Xato. Cette fête a étécélébrée, sauf quelques interruptions,54 jusqu'à la fin du siècle <strong>de</strong>rnier. La traditiona été récupérée par la suite et le Tarlàrefait son apparition lors <strong>de</strong>s fêtes <strong>de</strong>printemps sur la Rambla et au Carrer <strong>de</strong>l’Argenteria, aux alentours <strong>de</strong> la Sant Jordi.1348, peste bubonique - Rue Carrer <strong>de</strong> l’Argenteria, Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N EL’origine <strong>de</strong> cette fête, d'après la légen<strong>de</strong>, est àrechercher dans les terribles épidémies <strong>de</strong> pesteque Gérone subit entre 1348 et 1654 et qui sévirentdans la rue Carrer <strong>de</strong> l’Argenteria. La quarantainefut décrétée et les voisins barrèrent les accèsà la rue, aux portes et fenêtres <strong>de</strong>s maisons avec <strong>de</strong>sfagots, faits <strong>de</strong> roseaux verts, puis ils invoquèrentsaint Augustin pour qu'il les délivre <strong>de</strong> l’épidémie. Leseul contact qu'ils avaient avec la ville était le son<strong>de</strong>s cloches qui annonçaient les morts causées parl’épidémie. La quarantaine aurait été terriblementangoissante pour les habitants <strong>de</strong> la rue s'il n'y avaitpas eu Tarlà, un voisin qui amusait toute la rue avecses pirouettes et ses pitreries. À la fin <strong>de</strong> l'épidémie,qui provoqua seulement la mort d’une petite fille,les voisins décidèrent <strong>de</strong> commémorer ces journéesen représentant le sympathique Tarlà en signe <strong>de</strong>remerciement. Et pour manifester leur reconnaissanceà saint Augustin, ils instaurèrent leur fête lejour du saint. Cette fête était déjà célébrée au XVIIIesiècle, elle avait un caractère religieux, qui se perditpeu à peu, surtout au cours du XXe siècle.Chaque 27 août, la veille <strong>de</strong> la fête, les voisins ornaientles rues <strong>de</strong> barrières <strong>de</strong> roseaux verts et ilssuspendaient une marionnette en bois qui représentaitle personnage <strong>de</strong> Tarlà. La première trace surdocument du Tarlà date <strong>de</strong> l’année 1814 et jusqu'au<strong>de</strong>rnier tiers du XIXe siècle, le Tarlà <strong>de</strong> bois a présidéles fêtes avec le Tarlà en chair et en os. 1870 connutla fin <strong>de</strong>s Tarlas vivants, Capeta et Xarron.Le len<strong>de</strong>main avaient lieu les actes religieux et letroisième jour on allait aux fagots, c'est à dire qu'onfaisait un goûter-souper à l'extérieur <strong>de</strong> la ville, quimarquait la clôture <strong>de</strong> la fête. Cette tradition commémoraitle feu <strong>de</strong> joie qu'on avait allumé àl'extérieur <strong>de</strong> la ville avec <strong>de</strong>s fagots <strong>de</strong> roseaux etqui avaient protégé les habitants <strong>de</strong> Gérone <strong>de</strong> lapeste.La célébration du Tarlà n'est pas sans rappeler lesfêtes médiévales <strong>de</strong>s fous. Il s'agit d'une fête représentantles transferts d’autorité comme le carnaval.Ce sont <strong>de</strong>s jours <strong>de</strong> débauche, au cours <strong>de</strong>squelsl’ordre social est renversé et qui servent <strong>de</strong> soupaped'échappement aux conflits sociaux quotidiens.55


23La sorcière <strong>de</strong> la CathédraleCette histoire est arrivée aux tempsobscurs <strong>de</strong> la sorcellerie. Les sorcièresétaient généralement <strong>de</strong>s femmes auxpouvoirs maléfiques, qui avaient le don <strong>de</strong>voler et qui avaient fait alliance avec lediable dans le but <strong>de</strong> nuire aux chrétiens.Les Catalans du Moyen-âge lescraignaient plus que tout et les tenaientpour responsables <strong>de</strong>s pires maux:mauvaises récoltes, pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong>56 sécheresses et d'inondations, morts dubétail, épidémies et avortements.1350, date <strong>de</strong> la gargouille - La Cathédrale <strong>de</strong> Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N EMalgré leurs pouvoirs, les sorcières étaient souventprises aux pièges <strong>de</strong> leurs propres maléfices. L’églisepossédait <strong>de</strong>s armes pour les combattre: <strong>de</strong>s crucifix,<strong>de</strong> l'eau bénite, etc. Et qui plus est, l'Inquisition lespourchassaient pour les torturer et les brûler vives.Nicolau Eimeric, le grand inquisiteur, est <strong>de</strong>venu célèbrepour sa manie inquisitrice et pour son manuel<strong>de</strong>s inquisiteurs. On raconte qu'à Gérone, une sorcièrefut punie, non pas par les forces <strong>de</strong> l'inquisitionterrestre mais plutôt par les forces divines. Son châtimentest encore exhibé à la cathédrale, en forme <strong>de</strong>gargouille, comme leçon et avertissement à quiconqueaurait <strong>de</strong>s intentions diaboliques occultes.On dit qu'il y avait une vieille sorcière qui manifestaitsa haine contre les forces du bien en jetant <strong>de</strong>s pierresà la cathédrale ou au passage <strong>de</strong> la procession duCorpus, selon d'autres versions. Tant et si bien qu'unjour, tandis qu'elle faisait <strong>de</strong>s siennes, elle reçut unchâtiment que tous les habitants <strong>de</strong> la ville apprécièrent:les cloches se mirent à sonner et comme parenchantement, la sorcière fut pétrifiée.Les habitants <strong>de</strong> la ville pendirent la sorcière transforméeen gargouille sur la partie la plus élevée <strong>de</strong> lacathédrale. Depuis ce jour-là, on peut voir la figure <strong>de</strong>la sorcière qui a été condamnée à regar<strong>de</strong>r éternellementle sol, sans jamais pouvoir lever les yeux au ciel.Sa bouche ne peut plus proférer ni insultes ni malédictions;tout au contraire, lorsqu'il pleut, elle est purifiéepar l'eau propre.La gargouille <strong>de</strong> la sorcière pétrifiée date du milieudu XIVe siècle et on la reconnaît facilement car c'estla seule gargouille <strong>de</strong> la cathédrale qui a une figurehumaine. Si l’on passe au-<strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> la cathédrale,près <strong>de</strong> la Tour <strong>de</strong> Charlemagne, on peut la voir, ellevous regar<strong>de</strong> la bouche gran<strong>de</strong>-ouverte, et sanscrainte <strong>de</strong> représailles diaboliques, on peut lui dire:Pierres tu jettes, pierres tu jetteras,en pierre tu te transformeras.57


24Le pont du diableLe diable et son surprenant génie lorsqu'ils'agit <strong>de</strong> construire <strong>de</strong>s ponts en très peu<strong>de</strong> temps, généralement avant minuit ouavant le chant du premier coq et toujoursen échange d’âmes, sont présents dans <strong>de</strong>nombreuses légen<strong>de</strong>s sur l’origine <strong>de</strong> nosponts. On trouve en Catalogne au moinsvingt légen<strong>de</strong>s concernant les ponts et lesdiables, à Martorell, à Olot... et à Gérone:il y a ici <strong>de</strong>ux ponts qui doivent leur58 origine aux efforts <strong>de</strong> construction <strong>de</strong>Banyeta (le cornu) et Olot a aussi sonpont du diable.1357 - Pont <strong>de</strong>l Dimoni et Pont Major, Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N ELe Pont Major, à l'endroit où le Ter conflue avecl’Onyar et relie Sarrià <strong>de</strong> Ter à Gérone, ne porte pasle nom du diable, bien que la légen<strong>de</strong> narre commentle Malin et ses dons d’ingénieur ont participéà la construction du pont.Maria, la plus belle fille <strong>de</strong> la région, était amoureuse<strong>de</strong> Jacint, un riche héritier <strong>de</strong> l’autre rive du Ter.Voyant que leur amour était véritable, les famillesacceptèrent cette union. La veille du mariage, Mariase dirigea vers la rivière pour aller retrouver sonamoureux, comme elle avait l'habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la faire. Cejour-là, cependant, un vent fort soufflait, qui empêchales amoureux <strong>de</strong> traverser la rivière pour se retrouver.Maria, désespérée s’écria alors: «Je donneraimon âme à qui pourra construire un pont pour traverserla rivière !» Au même moment apparut le diablequi promit à Maria <strong>de</strong> construire un pont avantminuit si en échange, elle lui donnait son âme. Sitôtdit, sitôt fait, le diable et <strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong> diablotins ailésse mirent au travail, amenant <strong>de</strong>s pierres <strong>de</strong> Montserratet <strong>de</strong>s Pyrénées. Mais Maria, prise <strong>de</strong> remords,se repentit et implora la Vierge Marie. Ses prièresfurent entendues, <strong>de</strong>s vents forts se mirent à souffleret les montagnes à trembler, empêchant ainsi lesforces du malin d'achever le travail avant minuit; ilsdurent abandonner les <strong>de</strong>rnières pierres dans toutela région. Ce sont les pedres dretes (pierres <strong>de</strong>bout)que l'on trouve à partir <strong>de</strong> Santa Pau et Sant Hilari jusqu'àla Vallée d’Aro. Maria, en remerciement, reportason mariage à un an plus tard pour expier ses péchés.Les légen<strong>de</strong>s ne finissent pas toutes aussi bien. Auquartier <strong>de</strong> Sant Narcís, à Gérone, se trouve le pontdu diable, sur la rivière Güell, qui pendant longtempsa été le trait d'union entre ce quartier et le village <strong>de</strong>Santa Eugènia. Il fut construit par maître GuillemGranollers, <strong>de</strong> Montfullà, en 1357, avec la collaboration<strong>de</strong> Lucifer. Maître Guillem ne vendit pas son âmeau diable, il l'hypothéqua: Il dut faire pénitence enenfer pendant mille ans; une année pour chaque pierre<strong>de</strong>mandée au diable pour la construction du pont,dont sept cents ont déjà été accomplies. On peutparier qu'il s’en repentit d’autant plus lorsque le pontfut démantelé en 1968, après la suppression <strong>de</strong> la voieferrée du train d’Olot, et que les pierres furent entreposéesau cimetière <strong>de</strong> Santa Eugènia.59


25Le vampire <strong>de</strong> la RamblaSi nous marchons le long <strong>de</strong>s rueshistoriques <strong>de</strong> Gérone en regardant endétail tout ce qui nous entoure, observantchaque pierre <strong>de</strong> chaque faça<strong>de</strong>, chaquecolonne, chaque arca<strong>de</strong>, chaque toit...sans pour autant trébucher et tomber parterre, nous découvrirons <strong>de</strong>s habitantssilencieux <strong>de</strong> la ville, qui d'habitu<strong>de</strong>passent inaperçus.60XIVe siècle - Aux arca<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la Rambla, Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N EOn trouve ces citoyens en pierre, camouflés à différentsendroits du vieux quartier <strong>de</strong> Gérone, ils tiennentcompagnie à la célèbre lionne et à la sorcière <strong>de</strong>la cathédrale. Sur la porte qui donne à la salle <strong>de</strong>sséances <strong>de</strong> la mairie <strong>de</strong> Gérone, il y a une sculpturereprésentant la tête d’un homme qui se mord la langueet un arbre qui jaillit <strong>de</strong> son front. Cette têtemystérieuse évoque peut-être la sagesse <strong>de</strong> ceux quise réunissent dans cette salle <strong>de</strong> mairie et le secret<strong>de</strong>s affaires qui y sont traitées.Tout près, à la Plaça <strong>de</strong>l Vi, sur une vieille faça<strong>de</strong>, noustrouvons une autre tête qui représente celle d'undémon. Nous ignorons par ailleurs qui l'a placée à cetendroit et quand. À défaut <strong>de</strong> données, nous avonsrecours à l’explication apportée par la mémoire populaire.Autrefois, se tenait un marché sur cette placeet un usurier y avait un étalage. Cet usurier sans scrupuleprofitait <strong>de</strong>s habitants <strong>de</strong> Gérone en leur <strong>de</strong>mandantchaque fois plus d'argent jusqu'au jour où ilapparut pétrifié, en forme <strong>de</strong> tête <strong>de</strong> démon, àl'endroit où se tenait son étalage. On dit que <strong>de</strong>puis cejour-là, il veille à ce que tous les habitants <strong>de</strong> la villepayent leurs impôts. Ce personnage est connu <strong>de</strong>shabitants <strong>de</strong> la ville sous le nom <strong>de</strong> Banyeta (le Cornu).Le vampire <strong>de</strong> la Rambla, un autre personnage enpierre, est tout aussi célèbre que mystérieux dans laville. Ce vampire en pierre se trouve dans un endroitsombre et ténébreux, entre <strong>de</strong>ux arca<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la Rambla.Il s’agit d’une petite tête d'homme avec une longuebarbe et <strong>de</strong>s ailes <strong>de</strong> chauve-souris. Malgré son apparencequelque peu diabolique, ce personnage est enréalité un vampire romantique, reconverti en unesorte <strong>de</strong> cupidon, qui se tient en gardien tout au long<strong>de</strong> l'année. Selon la tradition, le vampire <strong>de</strong> la Ramblaaime user <strong>de</strong> ses pouvoirs pour faire tomber les gensamoureux. Si un garçon ou une fille amène la personnequi lui plaît sous la statue du vampire et parvientà ce que celle-ci lui fasse un ca<strong>de</strong>au, le vampire<strong>de</strong> la Rambla fera en sorte que l’amours'épanouisse entre eux. Lui seul sait combien <strong>de</strong> couplesse sont formés à l'abri <strong>de</strong>s arca<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la Rambla.61


26Le bœuf d'orLes juifs <strong>de</strong> Gérone constituaient unecommunauté très riche, jusqu'à ce qu'ilsabandonnent la ville en 1492. L’imaginaire<strong>de</strong>s gens <strong>de</strong> la ville a toujours suscitécette idée qu'un juif aurait enterré sontrésor quelque part dans la ville, mais ilfallait être sur ces gar<strong>de</strong>s car l’or <strong>de</strong>s juifsétait assimilé aux forces infernales.La légen<strong>de</strong> du Bœuf d’Or et ses variantesmêlent ces ingrédients: la croyance que <strong>de</strong>62 gran<strong>de</strong>s fortunes appartenant aux juifsseraient enterrées à Gérone etl'association <strong>de</strong> celles-ci au diableet à l'enfer.1492. Après l’expulsion <strong>de</strong>s juifs <strong>de</strong> la ville.Au Bou d’Or (Bœuf d'or), Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N ESur un versant <strong>de</strong> la montagne <strong>de</strong> Montjuïc, près duPont Major, se trouvait un endroit avec une carrière etun pont qui, jusqu'au XIXe siècle, était connu comme leBœuf d'Or. Le bruit courrait qu'à la croisée d’un chemin,il y avait une maison en ruines qui cachait un grandcoffre en pierre encastré dans un <strong>de</strong> ses murs. Il <strong>de</strong>vaitprobablement contenir un trésor mais vu les histoiresque l'on racontait, personne n'avait jamais osé ouvrir cecoffre mystérieux.Il faisait nuit noire et quatre joueurs marchaient dansla rue en maudissant leur malchance au jeu qui leuravait fait perdre tout leur argent dans un tripot. C'estalors qu'ils rencontrèrent un étrange personnage quileur proposa <strong>de</strong> les mener à un endroit où se trouvaientd'immenses richesses et où ils pourraient prendretout ce qu'ils désiraient. Face à cette offre, les quatrejoueurs oublièrent qu'il faisait nuit noire, que latempête faisait rage, tandis que les sons <strong>de</strong> cloche lesavertissaient qu'il valait mieux rentrer chez soi. Ils suivirentl'homme jusqu'à l'extérieur <strong>de</strong> la muraille, passèrentpar Pedret, traversèrent le pont du Bœuf d’Or etatteignirent la maison abritant le coffre <strong>de</strong> pierre.Le mystérieux personnage les guida à traversl'obscurité jusqu'au puits qui se trouvait <strong>de</strong>rrière lesruines <strong>de</strong> la maison et les fit <strong>de</strong>scendre par unescalier en colimaçon. Ils n'en finissaient pas <strong>de</strong><strong>de</strong>scendre par cet escalier et l’homme les encourageaiten leur criant <strong>de</strong> ne pas s'arrêter. L'un d’entreeux, fatigué par toutes ces marches, s'exclama:«Mon Dieu! Quand toucherons-nous le fond <strong>de</strong>cette <strong>de</strong>scente?» À peine cette invocation prononcée,les quatre hom-mes furent tirés du puits par untourbillon qui les fit voler dans les airs. Ils aboutirenttous dans <strong>de</strong>s positions bien difficiles: le premieratterrit au pont <strong>de</strong> Sarrià, accroché à la rampedu côté <strong>de</strong> la rivière; le <strong>de</strong>uxième finit dans la mêmeposition au pont <strong>de</strong> Sant Francesc; le troisièmeréapparut agrippé à la cloche Féliua <strong>de</strong> l’église SaintFélix et le quatrième, celui qui s'était exclamé, seretrouva sur l’ange <strong>de</strong> la cathédrale. Il est évi<strong>de</strong>ntque l'invocation religieuse qu'ils avaient prononcéeles avait sauvés en les empêchant <strong>de</strong> suivre le cheminsans retour du diable vers l’enfer.63


27Le cochon <strong>de</strong> saint AntoineC'est l'histoire d’un saint qui a eu pitiéd'un porcelet estropié et c'est aussil'histoire du sentiment <strong>de</strong> gratitu<strong>de</strong> qu'aressenti le porcelet envers son guérisseur.Les habitants <strong>de</strong> Gérone ont été trèstouchés par cette légen<strong>de</strong> qu'ils ontévoqué pendant longtemps en faisant uneloterie. Le prix le méritait bien!64XVIe siècle - Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N ELes fêtes hivernales atteignaient leur point culminantà la Saint Antoine, le 17 janvier, pendant la semaine<strong>de</strong>s barbus. C'était la fête la plus importante <strong>de</strong> l’hiveret la <strong>de</strong>rnière avant l’arrivée du printemps. SaintAntoine était le patron <strong>de</strong>s animaux, c'est pourquoi,ce jour-là, on décorait les animaux à patte ron<strong>de</strong>avec <strong>de</strong>s rubans <strong>de</strong> couleurs et on les amenait <strong>de</strong>vantle parvis <strong>de</strong> l'église du Mercadal où, après la messe, ilsétaient bénis pour ensuite leur donner du pain béni.Dès le XVIe siècle et cela jusqu'en 1882, un <strong>de</strong>s actespopulaires les plus importants <strong>de</strong> ces festivités <strong>de</strong> laSaint Antoine consistait en une loterie bien particulière:le lot du porc <strong>de</strong> saint Antoine.Derrière cette loterie si généreuse se trouve, bien sûr,une légen<strong>de</strong>. Cette légen<strong>de</strong> raconte qu'une fois, unetruie se planta <strong>de</strong>vant saint Antoine avec dans sagueule un porcelet estropié <strong>de</strong> naissance qu'elledéposa aux pieds du saint. Le bon saint Antoines'apitoya <strong>de</strong>vant les gémissements du pauvre petitanimal et prit le cochon <strong>de</strong> lait dans ses bras. Il prit lapatte mala<strong>de</strong> <strong>de</strong> l'animal et lui fit un signe <strong>de</strong> croix.Lorsqu'il déposa le porcelet à terre, celui-ci se mit àmarcher comme s'il n'avait jamais rien eu. Telle fut lagratitu<strong>de</strong> du cochon <strong>de</strong> lait envers saint Antoine qu'ilne voulut plus jamais s'en séparer. Le petit cochon suivitdésormais saint Antoine partout où il allait. On ditmême qu'il creusa la fosse du saint le jour <strong>de</strong> sa mort.Gérone, comme d'autres villes du Pays catalan, décidadès lors d'offrir un porc à la loterie en honneur àsaint Antoine. Le jour du saint, on sortait le porc dansles rues principales <strong>de</strong> la ville pour que tout le mon<strong>de</strong>puisse voir comme il était gras et beau. Le cochon <strong>de</strong>lait était joliment garni et arborait un carapaçon <strong>de</strong>couleur rouge et un nœud autour <strong>de</strong> la queue. On lepromenait tous les jours dans la ville jusqu'au jour <strong>de</strong>la loterie qui avait lieu le jeudi gras. La tradition voulaitque l'on mangeât beaucoup <strong>de</strong> vian<strong>de</strong> <strong>de</strong> porc aucours du jeudi gras, avant l'abstinence du Carême.65


28Vie et miracles <strong>de</strong> saint FélixSaint Félix, compagnon <strong>de</strong> prêches et <strong>de</strong>miracles <strong>de</strong> saint Narcisse, fut très vénéréà Gérone; il fut le premier saint à qui lesgens <strong>de</strong> la ville dédièrent un temple, élevésur sa tombe, à son martyrium.La caractéristique particulière du saint estqu'il est constitué d'un mélange <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux«saint Félix»: le saint africain et le diacre<strong>de</strong> saint Narcisse. Le fait qu'ils portent lemême nom conduisit l’imaginaire66 populaire à créer un unique saint Félixà Gérone, associant la vie et les miracles<strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux saints.1567, imploration solennelle à saint Félix pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r la pluie.Sant Feliu <strong>de</strong> Guíxols (<strong>Girona</strong>).


L É G E N D E S D E G É R O N ESaint Félix l’Africain n'était pas natif <strong>de</strong> Gérone maisil y prêcha. Né en Afrique du nord, il périt noyé enmer, une pierre <strong>de</strong> moulin attachée autour du cou.Saint Félix, diacre <strong>de</strong> saint Narcisse, naquit à Géroneet y mourut, sûrement en 307, suite au martyre qu'ilsubit avec saint Narcisse au cours d’une messe. Aumilieu <strong>de</strong> toute cette confusion, Charlemagne emportales restes du diacre saint Félix en France, tandisque les reliques du saint africain restèrent dansl’église Saint Félix.Prenant les attributs <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux saints, les habitants<strong>de</strong> Gérone en ont crée un sur mesure: ce saint Félixétait natif <strong>de</strong> Gérone, il fut le diacre <strong>de</strong> saint Narcisseet l'accompagna dans ses voyages et dans sa fuitelors <strong>de</strong>s persécutions contre les chrétiens. On représentehabituellement ce saint avec les attributs <strong>de</strong>s<strong>de</strong>ux saints Félix: il est vêtu comme un diacre et porteune pierre <strong>de</strong> moulin attachée autour du cou.L’église était consciente du mélange <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux saintsmais elle respecta cette création du peuple <strong>de</strong> Gérone.Du VIe siècle à la fin du XIe siècle, saint Félix futle saint <strong>de</strong>s habitants <strong>de</strong> Gérone mais il finit par êtredétrôné par saint Narcisse et ses miracles.Saint Félix était lié à l'eau et, par conséquent, lorsqueles habitants <strong>de</strong> la ville avait besoin <strong>de</strong> pluie, ils portaientles reliques du saint jusqu'à la crique <strong>de</strong> Sans,à Sant Feliu <strong>de</strong> Guíxols, où les romains, disait-on, avaientjeté le saint à la mer avec une pierre <strong>de</strong> moulinautour du cou. Une fois sur la plage, ils trempaient lesreliques du saint dans l'eau <strong>de</strong> mer, ce qui garantissaitla pluie. Ce voyage ne pouvait pas cependants'effectuer d'une seule traite. Lorsqu'ils arrivaient àPe-ne<strong>de</strong>s, le cortège <strong>de</strong>vait faire une halte en hommageaux reliques pour prier. Car on dit que les amisdu saint et ses disciples le sortirent <strong>de</strong> l'eau, à moitiémort, après avoir été jeté dans la mer par les romains,puis l'amenèrent jusqu'à ce lieu où il mourut.En 1567 il y eut une terrible sécheresse et on fit uneprière publique à saint Félix pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong> lapluie. Le bon saint Félix mesura mal la quantité d'eauou peut-être, à cette occasion, le laissa-t-on trempertrop longtemps, le fait est qu'en 1568 il y eut <strong>de</strong>gran<strong>de</strong>s inondations et l’Onyar arriva jusqu'à la Plaça<strong>de</strong>l Vi. On dit que saint Narcisse dut interveniravec ses pommes mais c’est là une autre légen<strong>de</strong>...67


29La cloche BenetaLa cloche Beneta <strong>de</strong> Gérone pèse 4.800kilos, elle mesure 1,9 mètres <strong>de</strong> diamètreet 1,78 mètres <strong>de</strong> hauteur sans compterles anses, le battant pèse 70 kilos. Dès lejour <strong>de</strong> sa fonte qui se révéla trèscompliquée, <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s ont vu le jourconcernant sa construction difficile,sa puissante sonorité et sa capacitéà prédire l'avenir.681574, année <strong>de</strong> la fonte <strong>de</strong> la cloche - Cathédrale <strong>de</strong> Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N ELa cloche Beneta est la cloche principale <strong>de</strong> lacathédrale <strong>de</strong> Gérone, elle est située au centre duclocher. Elle a été baptisée Beneta en l'honneur <strong>de</strong>saint Benoît, bien que les habitants <strong>de</strong> la villel'aient toujours appelée «Bombo» à cause <strong>de</strong> sagran<strong>de</strong>ur et du son grave qu'elle produit, un dopuissant et soutenu. Les habitants <strong>de</strong> la ville disentqu'il n'y a pas un meilleur son <strong>de</strong> cloche dans toutela Catalogne.Il semblerait qu'à cause <strong>de</strong> son grand volume, lafonte <strong>de</strong> la cloche fut difficile. Par trois fois on lafondit et par trois fois elle se fendit, la quatrièmetentative fut la bonne et elle ne bougea pas lorsqu'onla démoula. On dit aussi que le fon<strong>de</strong>ur étaitsi impatient d'entendre le son <strong>de</strong> la cloche que, dèsqu'elle fut démoulée, il voulut en essayer le sonavec un marteau. Mais le malheureux artisan ratason coup et le marteau s'abattit sur l'anse <strong>de</strong> la cloche,qui émit un son rauque <strong>de</strong> fêlure. Le fon<strong>de</strong>ur,pensant que c'était le véritable son <strong>de</strong> la cloche ethonteux <strong>de</strong> son échec, quitta la ville sans plusattendre pour ne plus y revenir. Il prit la fuite si vitequ'il ne put entendre le vrai son <strong>de</strong> la cloche unefois celle-ci installée sur le clocher <strong>de</strong> la cathédrale;on n'avait jamais entendu un son aussi magnifique.La cloche Beneta a accompagné dès 1574 lavie quotidienne <strong>de</strong>s âmes <strong>de</strong> Gérone: sonnant lesheures, les festivités et les funérailles, elle avertissaitles habitants en sonnant le tocsin quand la villeétait assiégée.On disait que la cloche Beneta pouvait abriter quatrecordonniers tirant sur les fils avec lesquels ilscousaient les chaussures. On racontait aussi que vuson envergure, on ne pouvait pas faire sonner laBeneta car son fort retentissement aurait brisé lesverres <strong>de</strong>s maisons du vieux quartier et aurait blesséles oreilles <strong>de</strong> tous les sonneurs chargés <strong>de</strong> cettetâche. Si l’on va plus loin dans la légen<strong>de</strong>, nous découvronsque cette cloche avait le don <strong>de</strong> prédire lamort du chanoine. Lorsque le chanoine était àl'orée <strong>de</strong> la mort, on entendait trois coups <strong>de</strong> clocherésonner à travers les arca<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la cathédrale,an-nonçant la mort du clerc; néanmoins le sonneurn'y était pour rien.69


30Saint Narcisse et le français empoisonneurEn cette occasion, l’omniprésentprotecteur <strong>de</strong> Gérone, saint Narcisse,sauve une fois <strong>de</strong> plus ses habitants d’uneépidémie <strong>de</strong> peste, un <strong>de</strong>s mauxrécurrents <strong>de</strong> la ville avec les inondationset les sièges. Et curieusement, une fois<strong>de</strong> plus, la menace vient <strong>de</strong> France.701592, première procession <strong>de</strong> saint Narcisse.La fontaine <strong>de</strong> Pedret, Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N EOn raconte qu'un français appelé Bernat, désireux<strong>de</strong> faire le mal, rodait dans les parages <strong>de</strong> Géroneinfectant l'eau <strong>de</strong>s puits qu'il trouvait sur son cheminavec <strong>de</strong>s poisons mortels pour les hommes etles animaux. Ce méchant français avait déjà répandula pestilence dans les eaux <strong>de</strong> l’Empordà, <strong>de</strong> laSelva et dans d’autres endroits proches <strong>de</strong> la villeaux quatre rivières.Les habitants <strong>de</strong> la ville, alertés par les villages voisins,suivirent la piste du méchant français et parvinrentà le capturer. On l'amena <strong>de</strong> force et on lui <strong>de</strong>mandapourquoi, après avoir empoisonné les eaux<strong>de</strong>s alentours, il n'en avait pas fait <strong>de</strong> même avec leseaux <strong>de</strong> la ville. Le Français répondit à cela que cen'était pas l’envie qui lui en manquait mais qu'iln'avait pas pu. Il avait essayé une fois mais «quelqu'un»l'en avait empêché.Le Français raconta que juste à l'entrée <strong>de</strong> Gérone,près <strong>de</strong> la fontaine <strong>de</strong> Pedret, un mystérieux personnageavait surgi du néant, comme par magie. C'étaitun évêque vêtu en pontife. L’apparition, semblantlire dans ses pensées, le menaça <strong>de</strong>s pires maux s'ilentrait dans la ville pour y accomplir ses noirs <strong>de</strong>sseins.Le Français prit peur, abandonna son intentiond’empoisonner la ville et s’en allait semer le malailleurs lorsque les gens <strong>de</strong> Gérone le capturèrent.Ainsi donc, saint Narcisse, une fois encore, sauvaGérone d’un désastre. Ce n'était pas la première foisqu'il sauvait une contrée <strong>de</strong> la peste; il sembleraitqu'il en ait fait <strong>de</strong> même à l'étranger. Lors <strong>de</strong> sonséjour à Augusta (Augsbourg), fuyant une persécutionavec son diacre Félix, il fut le vainqueur d’unerixe avec le diable pour sauver l’âme <strong>de</strong> sainte Afra.Le diable accepta la défaite, il avait cependantbesoin <strong>de</strong> tuer quelqu'un pour calmer sa rage. SaintNarcisse lui proposa alors <strong>de</strong> tuer un dragon quiempoisonnait les eaux du pays.Les tribunaux <strong>de</strong> Gérone prirent acte <strong>de</strong>s faits quis'étaient produits la nuit du 29 octobre 1592 et ensigne <strong>de</strong> gratitu<strong>de</strong> à saint Narcisse, les gens <strong>de</strong> la villedéfilèrent en une procession, arborant son image,toutes les veilles <strong>de</strong> la Saint Narcisse.71


31La fontaine <strong>de</strong> PericotL’eau a toujours été et est encore un <strong>de</strong>sbiens les plus précieux. Contrairement auxeaux sales et stagnantes, propageant lesépidémies, les fontaines sont source <strong>de</strong>vie. Le jet d'eau <strong>de</strong> la source jaillissantinexplicablement <strong>de</strong> la roche était perçucomme un ca<strong>de</strong>au mystérieux pour la terreet ses gens... et pour ces <strong>de</strong>rniers celavalait bien une légen<strong>de</strong>. Dans la vallée <strong>de</strong>Sant Daniel, nous trouvons la fontaine <strong>de</strong>72 Pericot et bien sûr sa légen<strong>de</strong>.1631, premier lit <strong>de</strong> la Vierge Marie - La Cathédrale <strong>de</strong> Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N EDe nos jours, l’eau gazeuse <strong>de</strong> cette fontaine n'estplus potable mais autrefois, il n’en coulait pas que <strong>de</strong>l'eau, elle offrait aussi une <strong>de</strong>s huiles les plus fines.Les habitants <strong>de</strong> Gérone, toutefois, ne pouvaient pasen jouir car un gros serpent vivait là et dévorait quiconqueosait s'en approcher.Un jour, un paysan <strong>de</strong> Sant Daniel qui passait par-là,vit le redoutable gardien <strong>de</strong> près. Le serpent, qui étaittrès long et repoussant, rampa jusqu'au jet d'huile ets'arrêta pour poser une pierre précieuse éblouissantequ'il tenait dans sa gueule. Quand il eut fini <strong>de</strong>boire, il saisit la brillante pierre avec sa gueule et disparut.Le paysan s'en alla, réfléchissant à la manière<strong>de</strong> s'emparer du bijou; dans sa réflexion il eut uneidée. Le len<strong>de</strong>main, après une nuit passée à donner<strong>de</strong>s coups <strong>de</strong> marteau et à manier les clous et lesserrures, il s'en retourna à la fontaine. À l'ai<strong>de</strong> d'uneoutre à vin, qu'il avait fourrée <strong>de</strong> clous aiguisés, ilfabriqua un engin ressemblant à un hérisson. Il avaitfait un trou au couvercle afin d’y passer le bras.Le téméraire paysan attendit caché dans l'outre, près<strong>de</strong> l'endroit où le gros serpent déposait la pierre pourboire à la fontaine. Quand le serpent se mit à boirel'huile, le paysan allongea le bras et saisit la pierre.Voilà, il l'avait! Quand le serpent se rendit compte duvol, il dressa la tête et siffla si fort que les arbres etles pierres frissonnèrent <strong>de</strong> peur. Il se jeta sur le fauxhérisson, enroula son corps immon<strong>de</strong> tout autour,l'étreignant, le mordant et glapissant. Ils roulèrent lelong du chemin vers les champs. Le paysan crut biensa <strong>de</strong>rnière heure arrivée et recommanda son âme àla Vierge. Le serpent s’acharna sur l'outre transpercéepar les clous et ils roulèrent jusqu'à la rivière Galligans,où l'outre éclata contre une pierre. Le paysan àmoitié assommé, voyant que le serpent lardé <strong>de</strong> clousétait mort, courut offrir la pierre précieuse à la ViergeMarie.On dit que cette pierre ornait la gran<strong>de</strong> couronnedorée qui recouvrait le lit <strong>de</strong> la Vierge Marie, que l'onmontait chaque année à la cathédrale le jour <strong>de</strong>l’Assomption. Cette procession était l'une <strong>de</strong>s plusimportantes <strong>de</strong> Gérone et elle se tint dès 1574; il estquestion <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux lits <strong>de</strong> la Vierge: l’un évoqué auXVIIe siècle et l’autre au XVIIIe siècle. Mais on ne saitrien <strong>de</strong> la mystérieuse pierre.73


32Le coton miraculeuxSaint Narcisse, patron <strong>de</strong> Gérone, neprotège pas uniquement la ville <strong>de</strong> toutesorte <strong>de</strong> maux et <strong>de</strong> menaces (inondations,sièges, épidémies...), il se consacreégalement à <strong>de</strong>s activités sanitaires etassiste personnellement les âmes <strong>de</strong>Gérone qui souffrent <strong>de</strong> maux divers, ilguérit les entorses, les palpitations et lemal d’oreille.741638 - Cathédrale <strong>de</strong> Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N EOn invoque saint Narcisse pour le mal d’oreille.Chaque 29 octobre, à la cathédrale <strong>de</strong> Gérone, ondistribue parmi les fidèles du saint <strong>de</strong>s sachets enpapier contenant un morceau du soi-disant cotonmiraculeux. Il s'agit d’un coton béni qui aurait étéen contact avec le sépulcre <strong>de</strong> saint Narcisse et <strong>de</strong>son corps non corrompu, acquérant ainsi <strong>de</strong>s pouvoirsguérisseurs. Ce coton <strong>de</strong> saint Narcisse possè<strong>de</strong>la vertu <strong>de</strong> guérir instantanément le mald’oreille et même <strong>de</strong> prévenir la surdité.Depuis les débuts du culte à saint Narcisse, vers leXIe siècle, bon nombre <strong>de</strong> gens <strong>de</strong> la ville ont étéguéris <strong>de</strong> toutes sortes <strong>de</strong> maladies grâce à ce saintguérisseur, que ce soit grâce à ce coton miraculeux,à l'huile curative <strong>de</strong> sa lampe ou au rituel <strong>de</strong> laneuvaine <strong>de</strong>s cierges. C'est pourquoi les dévots ontvoulu montrer leur gratitu<strong>de</strong> à saint Narcisse pourtous ces actes <strong>de</strong> guérison en créant ces goigs (verspoétiques):Vous qui atteignez les fiévreuxEt quiconque est mal en point…Boiteux, contrits, invali<strong>de</strong>s,Paralysés et estropiés,De ces maladies, en quelques jours,Dieu par vous les a guéris...Contre la peste, la famine et la guerreVous êtes notre protecteur,De la sécheresse et <strong>de</strong> la tempêteVous gar<strong>de</strong>z les fruits <strong>de</strong> la terre.La surdité et toutes les douleursVous guérissez si l’on vous invoque...La renommée <strong>de</strong> protection du saint n'a cessé <strong>de</strong>croître et <strong>de</strong> se répandre dans toute la province <strong>de</strong>Gérone. Cette dévotion croissante atteignit sonpoint culminant lorsqu’en 1638, Rome canonisa leculte populaire <strong>de</strong> saint Narcisse et qu’en 1689, leroi Charles II <strong>de</strong>manda à Rome que la fête <strong>de</strong> saintNarcisse soit concédée à d'autres royaumes <strong>de</strong> lapéninsule et aux territoires d’outremer.75


33L’huile <strong>de</strong> la lampeLes pouvoirs protecteurs et curatifs <strong>de</strong>saint Narcisse s’éten<strong>de</strong>nt dans <strong>de</strong>nombreux domaines, ils se manifestent etagissent à travers <strong>de</strong>s éléments divers.Les pommes <strong>de</strong> saint Narcisse, le cotonmiraculeux... même les lampes à huile ontle pouvoir <strong>de</strong> guérir et <strong>de</strong> prévenir ungrand nombre <strong>de</strong> maladies.761685, offran<strong>de</strong> du vice-roi <strong>de</strong> Catalogne d’une lampe en argentà saint Narcisse.Église Saint Félix, Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N ELa légen<strong>de</strong> raconte que dans toutes les églises oùsaint Narcisse officia la messe, il ne fallut jamais mettre<strong>de</strong> l'huile dans les lampes, ni les allumer, elless'allumaient toutes seules et ne s’éteignaient jamais.Lors <strong>de</strong> son séjour à Augusta, dans la maison d’Afra,saint Narcisse avait déjà fait une démonstration <strong>de</strong>son pouvoir illuminateur: il alluma les lampes à huile<strong>de</strong> la maison sans y mettre une seule goutte d'huileet sans les toucher, simplement en les bénissant.Outre cette combustion miraculeuse, les lampesoffraient aussi d'autres pouvoirs aux âmes <strong>de</strong> Gérone.L'huile <strong>de</strong> la lampe qui brûlait continuellement<strong>de</strong>vant l'autel <strong>de</strong> saint Narcisse possédait <strong>de</strong>s propriétéscuratives.Afin d'activer le pouvoir <strong>de</strong> guérison <strong>de</strong> l'huile <strong>de</strong> lalampe <strong>de</strong> saint Narcisse, il fallait réaliser un petitrituel: la neuvaine <strong>de</strong>s cierges. Ce rituel consistait àfaire neuf tours <strong>de</strong>vant le sépulcre du saint en portantun cierge allumé et en le changeant à chaquetour. Une fois les neufs tours du rituel exécutés, onpouvait appliquer l'huile <strong>de</strong> la lampe sur la partie ducorps affectée: blessures, entorses... et autres mauxétaient alors guéris. Ces rituels prévenaient même lacassure <strong>de</strong>s os.Cette croyance prit <strong>de</strong> l'ampleur surtout à partir <strong>de</strong>1685; un an après le siège du maréchal Bellefonds, laprotection du saint se manifesta à travers <strong>de</strong> mystérieuseslumières qui entourèrent l’église Saint Félix,pendant trois jours, jusqu'à le retraite <strong>de</strong>s troupesfrançaises. En remerciement à cette nouvelle protection<strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> la part du patron <strong>de</strong> Gérone, le 23mai 1685, le roi Charles II fit l'offran<strong>de</strong> d'une bellelampe en argent <strong>de</strong> 954 onces au patron <strong>de</strong> Gérone.Lors <strong>de</strong>s sièges napoléoniens, cette lampe fut dérobéepar l'armée française mais les habitants <strong>de</strong> Gérone necessèrent <strong>de</strong> croire aux pouvoirs <strong>de</strong> guérison <strong>de</strong> lalampe <strong>de</strong> saint Narcisse.77


34Le lac <strong>de</strong> SilsLes étangs sont empreints <strong>de</strong> mystère.Quand vient le soir, une brume basse lesrecouvre, défigurant les formes <strong>de</strong> lavégétation alentours, et la lueur <strong>de</strong> la luneprojette d'étranges reflets évoquant <strong>de</strong>sombres fantasmagoriques et attisantl'imagination <strong>de</strong>s gens du pays. C’est avecles premiers habitants <strong>de</strong> Sils quesurgirent les premières légen<strong>de</strong>s surl'étang, reliant celui-ci aux forces78 diaboliques.XVIIe siècle, première référence écrite <strong>de</strong> cette légen<strong>de</strong> - Sils (Gérone).


L É G E N D E S D E G É R O N ELes habitants <strong>de</strong> Sils étaient contraints <strong>de</strong> vivreavec un étang qui était leur ennemi. Ses eaux propageaient<strong>de</strong>s maladies et empêchaient les paysansd’avoir plus <strong>de</strong> terrain pour les cultures. On croyaitaussi qu'elles dissimulaient une entrée en enfer.C'est pourquoi, l'histoire <strong>de</strong> l’étang <strong>de</strong> Sils n’estautre que l'histoire <strong>de</strong>s tentatives d'assèchementqu'il a subi.La légen<strong>de</strong> <strong>de</strong> Pere Porter narre la visite en enferqui eut lieu à travers l’étang <strong>de</strong> Sils, avant qu’il nesoit asséché. Pere Porter était un paysan <strong>de</strong> Tor<strong>de</strong>raqui <strong>de</strong>vait se rendre à Maçanet pour régler unevieille <strong>de</strong>tte <strong>de</strong> famille. La <strong>de</strong>tte avait apparemmentdéjà été payée mais le notaire d’Hostalric était mortavant d'avoir eu le temps d'enregistrer le paiement.Sur la route <strong>de</strong> Maçanet, le brave Pere rencontra unautre marcheur, qui n'était autre que le diable.Pourtant, en cette occasion, ce personnage diaboliqueressentit <strong>de</strong> la sympathie envers le pauvre PerePorter et pour une fois, il décida <strong>de</strong> faire le bienen l'aidant.La solution au malentendu, selon Banyeta (le Cornu),se trouvait en enfer et comme ce jour-là le Malinn’était pas très méchant, il proposa <strong>de</strong>l'accompagner. L’entrée en enfer se fit par l'étang <strong>de</strong>Sils. Une fois en enfer, Pere fut surprit par la présence<strong>de</strong> tant <strong>de</strong> personnages importants <strong>de</strong> la vieterrestre, parmi lesquels se trouvait GelmarBonsoms, le notaire d’Hostalric. Pere Porter expliquaau notaire la raison <strong>de</strong> sa visite et ce <strong>de</strong>rnier lui indiquaoù se trouvait l'acte <strong>de</strong> paiement <strong>de</strong> la vieille<strong>de</strong>tte puis Pere s'en retourna sur la terre. Si l’entréeen enfer se trouvait à l’étang <strong>de</strong> Sils, il sembleraitque la sortie menait à Morvedre, en Pays valencien.Néanmoins, ce voyage ne fut pas gratuit: le pauvrePere dut payer un péage sous la forme d’une étrangemaladie qui dura <strong>de</strong> début septembre à débutoctobre. Lorsque Pere se sentit mieux, il continua sonpériple vers Hostalric pour aller récupérer l’acte <strong>de</strong>paiement. Le premier novembre, le jour <strong>de</strong>s défunts,Pere arriva à Hostalric où il raconta son extraordinaireaventure aux villageois. Beaucoup ne le crurentpas et le prirent pour un fou ou pour un esprit égarémais lorsque, suivant les indications du défuntnotaire, ils retrouvèrent l’acte <strong>de</strong> paiement, tout lemon<strong>de</strong> le crut et la famille Porter retrouva sa bonneréputation.79


35Les sorcières <strong>de</strong> LlersLa Catalogne était au Moyen-âge un pays<strong>de</strong> sorcières, surtout les Pyrénées et l’AltEmpordà. On pouvait choisir librement <strong>de</strong><strong>de</strong>venir sorcière en invoquant le diableselon les rituels établis mais dans d'autrescas, c'était une pré<strong>de</strong>stination: l’héritagefamilial, le jour ou le village <strong>de</strong> naissanceétaient déterminants. On disait que toutesles femmes qui naissaient dans le village<strong>de</strong> Llers étaient <strong>de</strong>s sorcières très80 puissantes.XVIIe siècle, l’époque la plus ru<strong>de</strong> dans la persécution <strong>de</strong>s sorcières.Llers (Gérone).


L É G E N D E S D E G É R O N EAu Moyen-âge, l’Alt Empordà et en particulier levillage <strong>de</strong> Llers étaient connus et craints pour leursorcières. En ce temps-là, tous les malheurs étaientattribués à la sorcellerie. De cette relation forcée <strong>de</strong>sgens <strong>de</strong> l'Empordà avec les sorcières sont nées bonnombre <strong>de</strong> légen<strong>de</strong>s.Un métayer <strong>de</strong> Llers aperçut un jour un gros oiseaunoir qui survolait les terres <strong>de</strong> la ferme. Il prit son fusilet tira <strong>de</strong>ux coups pour chasser cet oiseau <strong>de</strong> mauvaisaugure. Bien qu'il fût touché, l’oiseau continua àvoler. Le len<strong>de</strong>main, le métayer assista à la mort soudaine<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> ses fils. Le curé déclara que c'étaitla faute aux sorcières et que pour en finir avec la sorcellerie,il aurait du tirer avec du plomb béni.Les gens <strong>de</strong> Llers ressentaient à la fois <strong>de</strong> la crainte et<strong>de</strong> la curiosité envers les sorcières mais cette curiositéne finissait en général pas très bien. Un garçon <strong>de</strong>Llers, dont la fiancée était petite-fille, fille et sœur <strong>de</strong>sorcières, en fit personnellement les frais. Il n’y croyaitpas vraiment mais comme on le chassait tous lessoirs avant minuit, il décida <strong>de</strong> se cacher afin d'épiersa promise. La jeune-fille sortit dans la cour, se frottales aisselles avec un onguent en récitant d'étrangesmots puis s'envola. Le garçon voulut faire la mêmechose mais il se trompa dans les mots et une force lefit rebondir contre le plafond <strong>de</strong> la maison puis sur lesol où il tomba assommé.Les sorcières <strong>de</strong> Llers avaient une vie sociale intense.Le samedi elles se réunissaient avec d'autres sorcières<strong>de</strong> la région pour se coiffer avant <strong>de</strong> s'envolervers l'assemblée du sabbat <strong>de</strong> Tretzevents, auCanigou. Le 31 décembre elles se rencontraient afin<strong>de</strong> donner la malvenue à la nouvelle année en exerçantleurs pouvoirs maléfiques.Le plus célèbre méfait <strong>de</strong>s sorcières <strong>de</strong> Llers futl’attaque du clocher <strong>de</strong> Figueras. Les sorcières voulurentdétruire le clocher <strong>de</strong> Figueras parce que leson <strong>de</strong>s cloches <strong>de</strong> l’angélus contrariaient leurs <strong>de</strong>sseinsdiaboliques. Ainsi donc, elles volèrent commeun coup <strong>de</strong> tramontane jusqu'au clocher. Fort heureusement,le sonneur était aux aguets et il eut letemps <strong>de</strong> sonner les cloches. Le clocher ne fut pasdétruit mais il subit <strong>de</strong>s fissures à cause du choc provoquépar l'armée <strong>de</strong> sorcières.Les sorcières et leur symbolique sont toujours trèsprésentes à Llers. En fait, on dit qu'il y a encore <strong>de</strong>ssorcières; mais fort heureusement elles ne commettentaucun méfait.81


36Les lumièresSaint Narcisse continua à exercer l'activitéentreprise pendant le siège <strong>de</strong>s troupes duroi français Philippe III le hardi en 1285,qui consistait à diriger son armée <strong>de</strong>mouches contre les envahisseurs <strong>de</strong> laville. Lors du siège du maréchal Bellefonds,la victoire <strong>de</strong> Gérone fut attribuée auxcélèbres mouches <strong>de</strong> saint Narcisse et à <strong>de</strong>mystérieuses lumières qui firent leurapparition dans l'église Saint Félix.821684, siège du maréchal Bellefonds.Église Saint Félix, Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N EAu printemps 1684, l’armée française, aux comman<strong>de</strong>sdu maréchal Bellefonds, entra en Catalognepar l’Empordà et assiégea Gérone. Les habitants<strong>de</strong> Gérone, qui commençaient à avoirl'habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s sièges, unirent leurs forces pourdéfendre la ville, en espérant une nouvelle interventiondu saint patron <strong>de</strong> la ville.La protection du saint ne se fit pas attendre; cettefois-ci, grâce à d’étranges lumières que l'on n'avaitjamais vu auparavant à Gérone. Le soir du 22 mai,les habitants <strong>de</strong> Gérone virent apparaîtred'étranges lumières à l’église Saint Félix, qui filtraientpar les arca<strong>de</strong>s du temple et le toit. Lesmystérieuses lumières firent <strong>de</strong> nouveau leur apparitionles 23 et 24 mai, avant le début du combatqui allait donner la victoire aux habitants <strong>de</strong> la ville.La nuit du 24 au 25 mai 1684, les gens <strong>de</strong> Géronese rendirent au sépulcre du saint afin <strong>de</strong> lui manifesterleur reconnaissance pour cette nouvelle victoiresur les Français. Selon l’acte dressé par les tribunaux<strong>de</strong> la ville, à <strong>de</strong>ux heures du matin, on vitune mouche sur le sépulcre du saint. Comme ils’agissait d’une mouche plus grosse que les autres,plus longue et <strong>de</strong> couleur verte, on sut qu'on étaiten présence d'un nouveau miracle <strong>de</strong> saint Narcisse.La nouvelle se répandit aussi vite que la poudreet l’église collégiale s’emplit rapi<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> paroissienset <strong>de</strong> représentants <strong>de</strong> l’autorité, qui voulaientvoir ce miracle <strong>de</strong> leurs propres yeux. Sur lesol <strong>de</strong> l’église on trouva sept drapeaux français, quel'on garda comme trophées du saint.Les lumières et les mouches ne furent pas les seulesmanifestations divines contre les Français,d'autres énergies miraculeuses <strong>de</strong> Gérone s'unirentcon-tre l'armée <strong>de</strong> l'envahisseur. Des mois avant lesiège, les Français tentèrent d'entrer dans la ville lanuit <strong>de</strong> la Toussaint mais la cloche Susanna, <strong>de</strong>l’église Santa Susanna du Mercadal, se mit à sonnerle tocsin, elle réveilla les habitants <strong>de</strong> la ville, lesavertissant qu'il fallait défendre la ville.83


37La pierre miraculeuseOn dit que ces faits ont eu lieu du temps<strong>de</strong> l'évêque Lorenzana, à la fin du XVIIIesiècle. Sur initiative <strong>de</strong> l’évêque, onconstruisit une chapelle dédiée à saintNarcisse dans l’église Saint Félix. Il sembleque l'idée plut tant au saint protecteur<strong>de</strong> la ville qu'il approvisionna la ville enmatière première pour la construction<strong>de</strong> la chapelle et protégea les travailleursdurant les travaux.841782-1792, construction <strong>de</strong> la chapelle Saint Narcisse.Église Saint Félix, Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N ELe culte à saint Narcisse commença au XIe siècle et dèslors, après chaque siège, chaque inondation, chaquedésastre, dont la ville sortait victorieuse, la dévotionprenait <strong>de</strong> l'ampleur. Bien que parmi les cercles les plusérudits, on préférât récupérer le culte à saint Félix,l'évêque Lorenzana écouta le peuple et décida <strong>de</strong>construire une chapelle pour le saint en réponse à lagran<strong>de</strong> dévotion que lui vouaient les gens <strong>de</strong> la ville.Tandis qu'à l'évêché on discutait les détails <strong>de</strong> la futurechapelle Saint Narcisse, qui allait être bâtie àl'endroit où se dressaient les anciens cloîtres <strong>de</strong> l’églisecollégiale, un vieux berger guidait son troupeau à traversla montagne <strong>de</strong> Sant Miquel. Ce jour-là, quelquechose attira le regard du berger: une pierre qui étincelaitau soleil. Le berger, frappé <strong>de</strong> curiosité,s'approcha et vit une gran<strong>de</strong> pierre qui sortait <strong>de</strong> terreet qui brillait comme aucune autre. Le berger racontace qu'il avait vu à ses amis et les amena jusqu'à la pierre.Surpris à leur tour, ils virent qu'il s'agissait d’unecarrière <strong>de</strong> marbre très fin jaspé blanc et noir.La nouvelle parvint à l'évêché, qui interpréta celacomme l'approbation du saint pour le projet <strong>de</strong> constructionet, comme en 1782 les travaux avaient déjàété commencés, l'évêché donna l'ordre d’extraire lemarbre qui serait ainsi <strong>de</strong>stiné à la construction <strong>de</strong> lachapelle Saint Narcisse.Trois mois après avoir posé la première pierre, une <strong>de</strong>smaisons près <strong>de</strong>s travaux s'effondra ensevelissantcinq ouvriers sous les décombres. Aucun <strong>de</strong>s ouvriersne fut blessé et on interpréta donc ce fait comme unautre miracle du saint en faveur <strong>de</strong> la chapelle que lesparoissiens étaient en train <strong>de</strong> bâtir en son honneur.Dix ans plus tard, le 2 septembre 1792, on transportale sépulcre du saint à la chapelle, la célébration dupremier office liturgique marqua l'inauguration <strong>de</strong> lachapelle Saint Narcisse, entièrement faite <strong>de</strong> marbre<strong>de</strong> Gérone jaspé blanc et noir.On raconte que, la chapelle achevée, le filon <strong>de</strong> marbrequi semblait interminable, s'épuisa et on ne trouvaplus un seul morceau <strong>de</strong> marbre dans toute lamontagne <strong>de</strong> Sant Miquel.85


38La mariée <strong>de</strong> Can BielLe mas <strong>de</strong> Can Biel, à Anglès, date du XVIesiècle. C'est un mas fortifié majestueux,sa caractéristique principale étant unetour <strong>de</strong> défense carrée extraordinaire.Malgré la beauté du lieu et sa richesse,ce mas mit en scène un évènementtragique, le jour <strong>de</strong>s noces <strong>de</strong> l’héritieravec une riche héritière.86Première moitié du XIXe siècle - Anglès (<strong>Girona</strong>).


L É G E N D E S D E G É R O N ELe banquet <strong>de</strong> noces réunit toutes les personnalitésimportantes <strong>de</strong> la région: le recteur d’Anglès, les notables,le be<strong>de</strong>au, les grands propriétaires et mêmequelques chanoines. Après le banquet et le bal, quelqu'unsuggéra <strong>de</strong> jouer à cache-cache sans imaginerque ce jeu innocent apporterait le malheur au mas<strong>de</strong> Can Biel.Tout le mon<strong>de</strong> voulait bien sûr retrouver la mariéequi avait prit soin <strong>de</strong> chercher une bonne cachette.La mariée grimpa jusqu'en haut <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> tour. Latour <strong>de</strong> défense n'était plus utilisée <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s annéescar les bandits ne sévissaient plus dans ces contrées,elle servait maintenant <strong>de</strong> débarras. La tourprésentait <strong>de</strong> nombreux coins sombres où se cacher,<strong>de</strong>s vieux oripeaux, <strong>de</strong>s meubles anciens couverts <strong>de</strong>poussière... Au beau milieu <strong>de</strong> la pièce, se trouvait unmagnifique coffre <strong>de</strong> mariée qui, <strong>de</strong>s années auparavant,avait servi à gar<strong>de</strong>r le trousseau d'une <strong>de</strong>sfilles du mas. La mariée ouvrit le coffre et se cacha àl'intérieur. Le coffre se referma sur elle et la malheureusemariée fut incapable <strong>de</strong> sortir <strong>de</strong> sa cachette.Les convives cherchèrent la mariée dans tous lescoins et les recoins du mas, sauf dans la gran<strong>de</strong> tour.Après mainte recherche, s'avouant vaincus, ilsl'appelèrent pour la faire sortir <strong>de</strong> sa cachette. Leurappel resta sans réponse et les invités commencèrentà s'inquiéter. À la fin <strong>de</strong> la soirée, la mariée restanttoujours introuvable, ils décidèrent <strong>de</strong> rentrerchez eux. Le malheureux jeune marié se retrouvaseul face à son chagrin.Les gens disaient que la mariée était peut-être tombéedans le Ter et avait été emportée par la rivière;on disait aussi qu'elle avait peut-être été enlevée parles hommes du brigand Ramon Felip et que, si larançon été payée, la mariée serait rendue au mas.Mais la mariée n'apparut ni cette nuit-là ni aucuneautre. Quelques années plus tard, le <strong>de</strong>stin voulutqu'une <strong>de</strong>s filles du mas montât à la gran<strong>de</strong> tourpour fouiller dans les affaires, elle fut prise <strong>de</strong> curiositéen voyant un vieux coffre <strong>de</strong> mariée poussiéreux.L'héritière ouvrit le coffre et y découvrit unsquelette portant une robe <strong>de</strong> mariée et paré <strong>de</strong>bijoux <strong>de</strong> noce.87


39Le symbolisme <strong>de</strong> sainte CatherineL’image <strong>de</strong> Santa Caterina est trèsprésente dans la symbolique <strong>de</strong> laprovince <strong>de</strong> Gérone, dans la cathédraleet dans <strong>de</strong> nombreuses chapelles dédiéesà la sainte. On la trouve même à l’hôpital<strong>de</strong> province. Santa Caterina représentela sagesse mais elle personnifie aussi laconnaissance ésotérique. C’est à lapharmacie <strong>de</strong> l’ancien hôpital que lasainte est davantage présente.88XIXe siècle, Hôpital Santa Caterina, Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N EL’hôpital Santa Caterina a presque 800 ans d’histoire.L’ancien hôpital Santa Caterina fut bâti par la confrérie<strong>de</strong> Saint Martin, en 1211, sur <strong>de</strong>s terrains hors<strong>de</strong>s murailles <strong>de</strong> la cité, où se trouve aujourd'hui laplace du marché. En 1666 on le reconstruisit sur laPlaça <strong>de</strong> l’Hospital, où il est <strong>de</strong>meuré jusqu'à ces <strong>de</strong>rnierstemps; il a été récemment installé à Salt.L’édifice suit le modèle <strong>de</strong>s hôpitaux du XVIIe siècle,une cour centrale, une église et une décoration extérieureaustère. À l'intérieur <strong>de</strong> cet édifice se trouveune pharmacie du XVIIe siècle, elle est couverted'une voûte et on peut y voir <strong>de</strong>s peintures décorativesau plafond. Les peintures originales étaient <strong>de</strong>style baroque mais au XIXe siècle, on y a fait unenouvelle décoration. Les peintures réalisées il y a<strong>de</strong>ux siècles reproduisent <strong>de</strong>s scènes allégoriquesévoquant les processus d’élaboration <strong>de</strong> formulespharmaceutiques à partir <strong>de</strong> substances exotiquesvenues <strong>de</strong> pays lointains.Ces peintures semblent aussi représenter <strong>de</strong>s scènesalchimiques. C’est certainement par hasard quel’artiste inconnu chargé <strong>de</strong> la décoration <strong>de</strong> l'anciennepharmacie s'inspira d'anciennes peintures alchimiqueset, les jugeant adéquates pour ce type d’endroit,les reproduisit sur le plafond <strong>de</strong> la pharmacie. On peutvoir dans ces peintures bon nombre <strong>de</strong> symbolesalchimiques tels que l’athanor, le four alchimique, lacucurbite, le récipient alchimique en verre en forme<strong>de</strong> ci-trouille, l’arbre et le cerf qui, en alchimie, représententla nature contrôlée par l’homme et mise à sonservice. Les coïnci<strong>de</strong>nces s’intensifient et donnent dupoids à ces éléments supposés alchimiques, illustréssur le plafond <strong>de</strong> la pharmacie <strong>de</strong> l’hôpital SantaCaterina, si on pense au symbolisme occultiste etalchimique que recèle la sainte. Sainte Catherine estl’adaptation chré-tienne d’Hypatie, une intellectuellealexandrine, célèbre pour ses connaissances ésotériques,qui mourut égorgée sur les ordres <strong>de</strong> l'évêque <strong>de</strong>la ville. Elle adopta le nom <strong>de</strong> Catherine, qui était unenoble dame connue pour sa sagesse et qui trouva lamort dans <strong>de</strong>s circonstances semblables. Les initiésconsidèrent sainte Catherine comme la «Gran<strong>de</strong>Mère», la déesse du savoir. Il s'agit en définitive d'unensemble <strong>de</strong> faits fortuits qui laissent entrevoir, <strong>de</strong>manière indirecte, la signification alchimique <strong>de</strong>l’ancienne pharmacie <strong>de</strong> l’hôpital <strong>de</strong> Santa Caterina.89


40La fontaine <strong>de</strong>s amoureux90Cette légen<strong>de</strong> offre plusieurs versions, qui évoquent toutesl’origine d’une source d'eau gazeuse située au «Congost»,sur les rives du fleuve Ter. Cette fontaine est née <strong>de</strong>s larmesamères versées par une jeune fille qui s'est repentie aprèsavoir causé <strong>de</strong>ux morts.XIXe siècleAu Congost (Le défilé), Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N ELa légen<strong>de</strong> raconte que Sara, une jeune fille dont lephysique était peu gracieux, accepta le sort que luijeta une gitane afin que l’amour impossible qu'ellenourrissait envers Albert, un jeune <strong>de</strong> la région quiétait déjà fiancé, soit réciproque. La gitane lui fitboire un breuvage en lui promettant que le cœur <strong>de</strong>l'homme qu'elle aimait lui appartiendrait pour toujours.C'est cette même gitane qui, par la suite, prédità Albert qu'il tuerait sa bien-aimée et qu'il seraitpuni pour ce crime.Albert était à la chasse sur les rives du Ter, du côtédu Congost, et il pensait à l'étrange prédiction <strong>de</strong> lagitane lorsque le vol d’une colombe blanche ledétourna <strong>de</strong> ses pensées. Il tira sans hésiter etl'oiseau tomba mort <strong>de</strong>rrière <strong>de</strong>s buissons. Quand lejeune alla chercher l'oiseau, il eut une crampe, sespieds ne lui obéissaient plus, ils s’enfonçaient dans laterre et son corps se transforma en tronc d'arbre. Cesoir-là, Albert, converti en énorme chêne, vit commentle corps <strong>de</strong> la colombe se transformait en uncorps humain ensanglanté. C'était le corps inerte <strong>de</strong>sa promise que les femmes <strong>de</strong> l'eau s’empressèrentd'emporter en amont vers la grotte <strong>de</strong>s fées.Les mauvais présages <strong>de</strong> la gitane s'étaient réalisés.Quand Sara vit son bien-aimé transformé en arbreet sa fiancée morte, elle s'agrippa au tronc et sanglotaamèrement. Se sentant coupable <strong>de</strong> ce drame,elle versa tant <strong>de</strong> larmes et son repentir fut si gran<strong>de</strong>t inconsolable qu'elle finit par se transformer enfontaine.Le len<strong>de</strong>main, la ville assista à l'enterrement d'unjeune homme et <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux jeunes filles, morts la veilledans <strong>de</strong> mystérieuses circonstances. Depuis cejour-là, il y a maintenant cent ans, au Congost, aupied d'un chêne, jaillit une source d'eau gazeuse,fruit <strong>de</strong> larmes amères.91


41Le boulanger du MercadalLe culte à saint Narcisse a commencé auXIe siècle. Cette dévotion n’a faitqu'augmenter au fil <strong>de</strong>s ans et <strong>de</strong>smiracles du saint. Néanmoins, les saintspeuvent parfois poser certaines conditionsà leurs fidèles. Saint Narcisse n'aimaitpas que l'on travaillât le jour <strong>de</strong> sa fêteet il en informa un boulanger du Mercadalet un meunier <strong>de</strong> Peralada.921864, Saint Narcisse patron <strong>de</strong> Gérone et du Diocèse.Place du Mercadal, Gérone.


L É G E N D E S D E G É R O N ESaint Narcisse est le patron <strong>de</strong> Gérone <strong>de</strong>puis le XIVesiècle et en son honneur, se tient une foire <strong>de</strong> renom.On dit qu'un boulanger qui se trouvait entre laplace du Mercadal et la place du Molí, travailla laveille au soir <strong>de</strong> la Saint Narcisse. Pensant davantageà l'argent qu'il perdrait s'il ne travaillait pas cejour <strong>de</strong> festivité plutôt qu'à son <strong>de</strong>voir religieux, il semit à pétrir pour vendre le pain le len<strong>de</strong>main. Tandisqu'il pétrissait, il constata que la pâte prenait unecouleur rouge sang et plus il pétrissait, plus la pâte<strong>de</strong>venait rouge. Le boulanger comprit que saintNarcisse lui faisait savoir qu’il ne <strong>de</strong>vait pas travaillerle jour <strong>de</strong> sa fête ; effrayé et craignant un châtimentplus dur, il ferma le pétrin et courut à l’égliseSaint Félix et, agenouillé <strong>de</strong>vant son sépulcre,implora le pardon <strong>de</strong> saint Narcisse.Le boulanger n'osa pas retourner dans sa boutiqueavant trois jours. Quand il ouvrit le pétrin il putconstater que la pâte avait perdu cette couleurrouge si menaçante, elle s'était bien conservée etelle était prête à être enfournée. Le boulanger, soulagé,enfourna la pâte et prit bonne note <strong>de</strong> la leçonque lui dicta cet épiso<strong>de</strong> pour l'année suivante.Un meunier <strong>de</strong> Peralada vécut une expérience semblable,<strong>de</strong>s siècles plus tard, un 29 octobre également.Ce meunier <strong>de</strong> Peralada s'en alla travailler àson moulin, se souciant peu <strong>de</strong> l'interdiction au travaildurant ce jour férié et considérant que, hormisdans la ville <strong>de</strong> Gérone, ailleurs il n’en était rien. Maisune fois <strong>de</strong> plus, le saint sapa le travail du meunieret transforma le blé en sciure.L'évêque <strong>de</strong> Gérone Constantí Bonet, apprenant cequi s'était passé et soucieux d’éviter pires châtiments,<strong>de</strong>manda au pape Pie IX d’étendre, dès cette année1864, le patronage <strong>de</strong> saint Narcisse à tout l'évêchéafin que la fête du saint patron soit rigoureusementobservée à Gérone et dans tout le diocèse.93


42La CocollonaNous avons voulu inclure dans ce recueilune autre légen<strong>de</strong> apocryphe qui, étantdonné sa force et sa diffusion rapi<strong>de</strong>,a fait partie intégrante, en peu <strong>de</strong> temps,du corpus <strong>de</strong> légen<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la ville<strong>de</strong> Gérone et est <strong>de</strong>venue un symboleincontournable <strong>de</strong> l'iconographie<strong>de</strong> la ville.94XXe siècle - Couvent <strong>de</strong> Santa Clara, Gérone.Créateurs: Dolors Codina,Emili Massanas et Carles Vivó


L É G E N D E S D E G É R O N ESur la rive gauche du fleuve Onyar, dans le quartierdu Mercadal, se trouvait un couvent <strong>de</strong> clarisses.Dans ce couvent, il y avait une religieuse enferméesous clé dans une cellule en sous-sol, sombre ethumi<strong>de</strong>, très près du canal Monar.Les raisons pour lesquelles cette novice, que lalégen<strong>de</strong> appelle Rosalie, était enfermée dans lacellule diffèrent en fonction <strong>de</strong> la légen<strong>de</strong>. Certainesracontent que la religieuse, en désaccord avecle genre <strong>de</strong> vie plutôt débauchée que menaient sessœurs, leur faisait sans cesse <strong>de</strong>s remontrances. Lesreligieuses, pour ne plus l'entendre et poursuivre leurvie <strong>de</strong> pécheresses, décidèrent <strong>de</strong> l'enfermer au soussol.L’autre version est plus romantique et raconteque la novice, la nuit venue, s'échappait par les couloirsdu sous-sol pour aller retrouver son amoureux,un moine franciscain du monastère <strong>de</strong> Sant Francescet bien sûr, lorsque la mère supérieure les découvrit,celle-ci décida <strong>de</strong> l'enfermer sous clé.Tout naturellement, lorsque la malheureuse se retrouvaenfermée dans cette cellule sombre et humi<strong>de</strong>, lapauvre religieuse tomba dans le désespoir. Que cesoit à cause <strong>de</strong> l'humidité du lieu ou à cause <strong>de</strong>s larmesqu'elle versa, le corps <strong>de</strong> la novice subit uneétrange métamorphose: il se recouvrit d'écailles etelle se transforma en une sorte <strong>de</strong> crocodile, tandisque sur son dos, pour compenser l’aspect répugnantque présentait son corps, poussèrent <strong>de</strong>s ailes <strong>de</strong>papillon. Voilà comment la novice se transforma enun mélange <strong>de</strong> crocodile et <strong>de</strong> papillon... en unecocollona, c’est-à-dire un croco-illon.Quand la religieuse mourut, <strong>de</strong>s années plus tard,dans sa cellule, on raconte que Gérone fut inondéesans qu’il soit tombé une goutte <strong>de</strong> pluie. Dès lors,on peut voir son corps <strong>de</strong> cocollona nager ou volerau-<strong>de</strong>ssus du fleuve Onyar. Si vous vous promenezentre le Pont <strong>de</strong> Pedra et le Pont <strong>de</strong> Peixateries Velles,par une nuit où la lune peint <strong>de</strong>s fantômes dans lebrouillard <strong>de</strong> Gérone, vous verrez la Cocollona.95


UN SIGNE DE SAGESSE96À la Saint Narcisse 1946, un petit bijou d’une gran<strong>de</strong>valeur sortait d'une imprimerie <strong>de</strong> Barcelone: un livreintitulé <strong>Girona</strong>, petita història <strong>de</strong> la ciutat, <strong>de</strong> les sevestradicions i folklore (Gérone. Petite histoire <strong>de</strong> la ville,<strong>de</strong> ses traditions et <strong>de</strong> son folklore), écrit par J. Gibert,un enfant <strong>de</strong> Gérone, qui recueille les coutumes ettraditions <strong>de</strong> Gérone dans le but, comme le dit son auteur,«<strong>de</strong> conserver, au moins par écrit, la tradition <strong>de</strong> laville <strong>de</strong> Gérone». Mois après mois, jour après jour, Gibertégrène la vie <strong>de</strong> la ville à travers les éléments quiprobablement caractérisent le plus les gens qui l'habitent:dictons, chansons, légen<strong>de</strong>s, traditions, danses...Gibert, Vivó, Fañanàs –entre autres– et Nuri Rosaujourd’hui, tous ces écrivains ont situé les légen<strong>de</strong>s,la fantaisie et la tradition au cœur <strong>de</strong> leur recherches et<strong>de</strong> leurs œuvres, et à travers celles-ci, ils noustransmettent la sagesse populaire qui surgit <strong>de</strong>l’imaginaire collectif. Les fables et les mythes marchent,tour à tour, en parallèle à l'histoire réelle, celle qui faitl'objet <strong>de</strong> recherches, rationnelle et écrite par les historiens.Connaître les légen<strong>de</strong>s d’une ville cela veut dire se mettredans la peau <strong>de</strong> celle-ci, éprouver les sentiments et lesexpériences <strong>de</strong> la communauté qui leur a donné vie.Notre <strong>de</strong>voir est donc <strong>de</strong> les écouter ou <strong>de</strong> les lire pourpouvoir par la suite les raconter. L'initiative qui consisteà créer un espace aidant à transmettre les légen<strong>de</strong>s <strong>de</strong> laville <strong>de</strong> génération en génération et les divulguer àd'autres peuples est un signe <strong>de</strong> sagesse. Félicitations.Arcadi Calzada SalavedraPrési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> Caixa <strong>Girona</strong>


GÉRONE EST UNIVERSELLE.LES LÉGENDES FONT DE NOUSLES HÉRITIERS D’UN SAVOIRPublier un livre regroupant toute la documentation à cesujet est une excellente idée qui est tout à fait à propos.Les légen<strong>de</strong>s, les mythes, les contes, nous révèlent uneréalité certes onirique mais ayant un fond <strong>de</strong> vérité. C'estpourquoi nous tenons à féliciter tous ceux qui, en voulantse souvenir, ont contribué à ce genre d’activité à la foisludique et intellectuelle. Gérone est une ville <strong>de</strong> légen<strong>de</strong>s,comme toutes les villes qui ont une longue histoire. Lesmythes et les légen<strong>de</strong>s nous livrent <strong>de</strong>s connaissances surnous-mêmes et notre environnement et sont un facteur<strong>de</strong> cohésion sociale chez les peuples qui partagent unmême territoire.De Gérion au Cul <strong>de</strong> la Lionne, en passant par <strong>de</strong>spersonnalités et personnages <strong>de</strong> Gérone et d'ailleurs maistoujours liés à notre culture, c'est là une étu<strong>de</strong> complète,élégante et consistante. La teneur du discours estrenforcée par son exhaustivité et s’installe dans le cadreanthropologique <strong>de</strong> la connaissance sociale. Il s’agit d’unvéritable coutumier sur les relations humaines et cequ'elles sont dans leur contexte naturel.Les légen<strong>de</strong>s nous humanisent, elles nous font rêver <strong>de</strong>quelque chose que notre cerveau d’enfant analyse ets'approprie. Qui ne se sent pas attiré par une légen<strong>de</strong>,aussi lointaine soit-elle? Il y a <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s dans le mon<strong>de</strong>entier et au cours <strong>de</strong> mes voyages, j'ai eu la chance d'enentendre beaucoup. Et savez-vous ce que je crois? Ellesnous disent toutes la même chose, c'est ce qui rendl'être humain universel.Gérone est universelle et ses habitants doivent poursuivredavantage cette idée. Quiconque ne comprendpas ou n'aime pas les légen<strong>de</strong>s <strong>de</strong> son peuple ou <strong>de</strong> saville pourra difficilement <strong>de</strong>venir un être universel.Les légen<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Gérone, <strong>de</strong> mon point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong>scientifique, nous ai<strong>de</strong>nt à <strong>de</strong>venir plus humains et font<strong>de</strong> nous les héritiers d'un savoir qui serait voué àdisparaître si ces initiatives n’existaient pas.Félicitations pour ce projet.Dr. Eudald Carbonell RouraUniversité Rovira i VirgiliDépartement <strong>de</strong> PréhistoireCodirecteur d’AtapuercaDirecteur <strong>de</strong> l’institut Catalan <strong>de</strong> PaléoécologieHumaine et Évolution Sociale.97


GÉRONE A SU CONSERVERSON HISTOIRE ORALE GRÂCEAUX LÉGENDES98Une promena<strong>de</strong> dans le vieux quartier <strong>de</strong> Gérone estindispensable à qui veut découvrir la ville et sa magie,y sentir le passage <strong>de</strong>s siècles et le caractère profond<strong>de</strong> ses habitants.Lorsqu'on se promène dans ces ruelles qui ne cessent <strong>de</strong>grimper, on se rend tout <strong>de</strong> suite compte qu'elles recèlentune longue histoire. Gérone a su conserver son histoireorale grâce aux légen<strong>de</strong>s; la légen<strong>de</strong> <strong>de</strong> la Lionne, celle <strong>de</strong>saint Narcisse, celle <strong>de</strong> Gérion ou bien celle <strong>de</strong> la Sorcière<strong>de</strong> la Cathédrale. Les écouter c'est se laisser séduire toutcomme nous séduit la ville, elles nous transmettent cequ'il y a <strong>de</strong> meilleur dans la tradition populaire <strong>de</strong> Gérone.Permettez-moi <strong>de</strong> pencher pour une légen<strong>de</strong> issue <strong>de</strong> laprovince <strong>de</strong> Gérone elle aussi mais pas <strong>de</strong> la capitale: lalégen<strong>de</strong> <strong>de</strong> Geoffroy le Velu, à cause <strong>de</strong> ses racines dansnotre i<strong>de</strong>ntité nationale en tant que peuple et aussi parceque je suis natif <strong>de</strong> Ripoll.J'ai toujours souscrit à la phrase suivante: Qui perd sesracines, perd son i<strong>de</strong>ntité; et aujourd’hui plus que jamais,elle doit régir. Je remercie donc ceux qui ont su conserveret promouvoir les légen<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Gérone.Eudald Casa<strong>de</strong>sús BarcelóPrési<strong>de</strong>nt du CDC <strong>de</strong> la province <strong>de</strong> GéroneDéputé <strong>de</strong> CiU au Parlement <strong>de</strong> Catalogne


LES LÉGENDES DE GÉRONE ETSA RÉGION SONT AUJOURD'HUIINSCRITES DANS LA PIERREEmpruntant aux stèles <strong>de</strong> Mésopotamie, aux bas-reliefsgréco-romains et même aux bas-reliefs funéraires <strong>de</strong>spierres tombales néoclassiques, les légen<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Gérone etsa région sont aujourd’hui inscrites dans la pierre –lemarbre– grâce à Gerard Roca i Ayats, artiste <strong>de</strong> Bescanóparticulièrement sensible à la tradition et au échos <strong>de</strong>slégen<strong>de</strong>s qui nous ai<strong>de</strong>nt à mieux comprendre notrehistoire et donner une interprétation subjective auxéléments les plus perturbateurs <strong>de</strong> notre passé.À la valeur symbolique <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s, il faut maintenantajouter une valeur artistique. Précisons que le choix <strong>de</strong>smatériaux n'est pas le fruit du hasard: la volonté <strong>de</strong> duréefait <strong>de</strong> la pierre un support incontournable et parmi lespierres, c’est le marbre qui a été choisi dans cette autrevolonté d’ennoblir ce qui est populaire. Ce style précis etclair s’inscrit dans une démarche pédagogique implicite àla manière <strong>de</strong>s bas-reliefs romans <strong>de</strong>s églises, quiinstruisaient les profanes en matière divine et terrestregrâce à <strong>de</strong>s images souvent exagérées mais parfaitementreconnaissables. Il faut tenir compte par ailleurs ducadre <strong>de</strong> l'ensemble: il s'agit d'un magnifique édificemédiéval situé au cœur <strong>de</strong> Gérone qui, en l’occurrence,possè<strong>de</strong> sa propre légen<strong>de</strong>: la légen<strong>de</strong> <strong>de</strong> la trace <strong>de</strong> pas<strong>de</strong> saint Narcisse.Il n'est guère facile <strong>de</strong> synthétiser en une seule image entrois dimensions la magnitu<strong>de</strong> d’une légen<strong>de</strong>; pour cela,il faut avoir l'esprit <strong>de</strong> synthèse et une gran<strong>de</strong>imagination… Nous gardons tous, plus ou moins, enmémoire ces légen<strong>de</strong>s, toutefois les images,les proportions et les détails ne sont pas bien définis.Je pense que Gerard nous facilite la tâche; à la valeurindiscutable <strong>de</strong> son métier <strong>de</strong> marbrier et <strong>de</strong> sculpteur, ilfaut ajouter son bon goût et son grand talentd'illustrateur, <strong>de</strong>s qualités qui transparaissent sur cesbas-reliefs.Nous vous souhaitons <strong>de</strong> passer un bon moment avec cesreprésentations <strong>de</strong> légen<strong>de</strong>s dont la popularité serarenforcée grâce à cette initiative.Lluís Costabella Casa<strong>de</strong>vallPoète, musicien et compositeurDiplômé en Histoire <strong>de</strong> l’Art99


RÉCUPÉRER LES LÉGENDES ETS'ENRACINER DANS LE RÉEL100Toutes les civilisations, tous les peuples, sont nés et sesont développés sous le couvert <strong>de</strong>s mythes et <strong>de</strong>slégen<strong>de</strong>s. On peut lire l'histoire <strong>de</strong> l'humanité, pour unelarge part, à travers les récits mythologiques etlégendaires qui sont à l'origine <strong>de</strong> chaque pays. DepuisIsis et Osiris dans l'ancienne Égypte en passant par lesdieux et les héros <strong>de</strong> la Grèce classique jusqu'à nos jours,les cultures, les nations, se sont développées parallèlementà une série <strong>de</strong> mythes ancestraux qui ont contribué àforger leur idiosyncrasie. Un groupe d'hommes organisé,sans ses mythes, sans ses légen<strong>de</strong>s, sans sa religion, est unorganisme auquel il manque un élément important.Il faut ajouter à cela que les sociétés qui ont le plusavancé dans la poursuite <strong>de</strong>s droits et <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong>bien-être <strong>de</strong> ses membres sont celles qui ont su sortir ducarcan dans lequel les enferment les mythes, en lespercevant simplement comme ce qu'ils sont:un instrument qui, en son temps, a donné un sentimentd'appartenance à un peuple, à une nation, mais qui <strong>de</strong>nos jours ne peut en aucun cas constituer un frein ou unobstacle quant au progrès et quant à la mo<strong>de</strong>rnisation <strong>de</strong>la collectivité.Gérone, ville à la sagesse ancestrale avec une histoireriche et compliquée, a très bien su combiner ces <strong>de</strong>uxéléments: le caractère populaire et culturel <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s(Gérion, Charlemagne, la Sorcière <strong>de</strong> la Cathédrale,les Mouches <strong>de</strong> saint Narcisse, le Tarlà <strong>de</strong> l’Argenteria...)et par ailleurs, la mobilisation permanente <strong>de</strong> tous lesagents afin d'améliorer les niveaux <strong>de</strong> bien-être, aussibien pour les habitants que pour les visiteursd'aujourd'hui et <strong>de</strong> <strong>de</strong>main. C’est-à-dire, respecter le passéen travaillant pour le présent et en préparant le futur.En d'autres termes, <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s, oui, mais engardant les pieds sur terre.La proposition présentée par l’hôtel <strong>Llegen<strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong> Géroneest une belle manière d'illustrer cette volonté <strong>de</strong> travaillerle présent en pensant au futur, non sans un regardnostalgique et, pourquoi pas, amusé sur un passé qui,s'il ne s'est pas réellement déroulé tel qu’on l'évoque,nous aurait tout au moins satisfaits si les choses enavaient été ainsi.Bon travail et bonne chance.Francesc Francisco-Busquets PalahíSous-délégué du Gouvernement <strong>de</strong> l’État à Gérone


GÉRONE EST PIERRE ET EAU,MATIÈRE ET MÉMOIREUNE MAISON OÙ CHAQUERECOIN INVITE À IMAGINERUN CONTE OU UNE LÉGENDEGérone s'est formée, au fil <strong>de</strong>s siècles, dans ses muraillesqui la protégeaient; nous avons <strong>de</strong>s documents attestant<strong>de</strong> sa vitalité et <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> ces hommes et <strong>de</strong> cesfemmes qui y ont souffert et travaillé. Les colonieshumaines les plus anciennes <strong>de</strong> l’histoire y ont laissé<strong>de</strong>s structures romaines, <strong>de</strong>s labyrinthes médiévaux et <strong>de</strong>puissantes constructions civiles et religieuses. Gérone estfaite <strong>de</strong> pierre, d’eau, <strong>de</strong> matière et <strong>de</strong> mémoire.La réalité actuelle est donc faite <strong>de</strong> cet apport populaireet <strong>de</strong> cette capacité à créer <strong>de</strong>s imaginaires qui nousai<strong>de</strong>nt à comprendre la longue marche <strong>de</strong>s siècles.Gérone, c’est aussi cela: un ensemble <strong>de</strong> légen<strong>de</strong>sconstituant l’épi<strong>de</strong>rme d’une ville riche intérieurementet dont les qualités sont indéniables.Anna M. GeliRectrice <strong>de</strong> l'UdGC’est un honneur pour moi que d’appartenir à l'équipe quifera <strong>de</strong> l’hôtel <strong>Llegen<strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong> <strong>Girona</strong> une réalité.Mon humble concours comme architecte techniqueà l'histoire du vieux quartier <strong>de</strong> Gérone et en particulierà la restauration d’une maison où le moindre recoin inviteà imaginer un conte ou une légen<strong>de</strong>.Toutes mes félicitations pour le nom donné à l’hôtel queva abriter cette maison.En ce qui concerne la légen<strong>de</strong> <strong>de</strong> Morgat, qui me touche<strong>de</strong> près en raison <strong>de</strong> mon passage à la Mairie <strong>de</strong>Porqueres, je dois avouer qu'il s'agit là d'une légen<strong>de</strong> quim’impressionne au plus au point car elle me donnematière à réflexion. Nous avons tendance à voir leslégen<strong>de</strong>s comme quelque chose <strong>de</strong> très lointain, c’est entous cas mon point <strong>de</strong> vue. En revanche, pour ce qui est<strong>de</strong> la légen<strong>de</strong> <strong>de</strong> Morgat, si l’on connaît un peu cetterégion, on aura pu constater par soi-même que cettelégen<strong>de</strong> a un fond <strong>de</strong> réalité; au cours <strong>de</strong>s années,plusieurs étangs se sont formés et d'autres peuventencore apparaître, surtout en pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> sécheressecomme c’est le cas actuellement.101Xavier Gifra DarnéArchitecte technique


C’EST ICI QUE DÉMARRE VOTREVISITE D’UNE GÉRONE MAGIQUE102Une légen<strong>de</strong> est une narration orale ou écrite, en prose ouen vers, d'apparence plus ou moins historique, dont lateneur est plus ou moins importante en élémentsimaginatifs, transmis par la tradition orale ou écrite.Les légen<strong>de</strong>s peuvent par ailleurs être populaires (ellessont nées plus ou moins spontanément ouinconsciemment) mais aussi être le fruit <strong>de</strong> l’éruditionou encore le résultat d’un mélange d’éléments issus <strong>de</strong>ces <strong>de</strong>ux origines. Elles peuvent avoir été érudites àl'origine et être <strong>de</strong>venues très populaires par la suite.La longueur n'a pas d'importance (bien qu'elles soientgénéralement courtes), ce qui définit la légen<strong>de</strong>, c’est lethème qu’elle évoque ou bien son contenu car elleconstitue toujours un exposé dont la finalité estd'expliquer un phénomène naturel par le biais d'unehistoire fantastique.On peut se laisser séduire ou se laisser charmer enobservant, à l'hôtel <strong>Llegen<strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong> <strong>Girona</strong>, les nombreuseslégen<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la Gérone Impériale. La magie <strong>de</strong> Gérone està rechercher dans ses traditions, ses légen<strong>de</strong>s, même leslégen<strong>de</strong>s urbaines qui courent dans ses rues.Nous aurons ainsi la possibilité <strong>de</strong> découvrir dans cethôtel les multiples facettes occultes <strong>de</strong> Gérone... C’est icique démarre votre visite d’une Gérone magique.Fernando Lacaba SánchezPrési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la Cour d’Appel <strong>de</strong> Gérone


NOTRE GÉNÉRATION N'A PASEU LA POSSIBILITÉ D’INSTAURERDES LÉGENDESLes légen<strong>de</strong>s sont nées <strong>de</strong> la volonté <strong>de</strong> l’être humain <strong>de</strong>transmettre les événements extraordinaires à <strong>de</strong>s tierset aux nouvelles générations. Elles proviennent <strong>de</strong> cebesoin vital d'immortaliser quelque chose et vaincre letemps en l'y inscrivant.Notre génération n'a pas eu la possibilité d’instaurer <strong>de</strong>slégen<strong>de</strong>s. Les faits sont comme ils sont, ils disposentd'acteurs et <strong>de</strong> témoins et ils sont d'autre part vécus endirect indépendamment du lieu où ils se produisent.Ils per<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> l’objectivité et les événements sont privés<strong>de</strong> toute pénétration <strong>de</strong> la subjectivité, en principe innée.C’est là le fruit <strong>de</strong> l’évolution technologique, produit <strong>de</strong>l'homme <strong>de</strong>venu l’esclave du progrès. Les légen<strong>de</strong>scontiennent une plus gran<strong>de</strong> part d’imagination que <strong>de</strong>certitu<strong>de</strong>s et si elles sont potentiellement évolutives,aujourd'hui, lorsqu’on retransmet en direct un acte <strong>de</strong>guerre, pour citer un exemple, comprenant sont lot <strong>de</strong>bombes et <strong>de</strong> tragédie humaine, aujourd'hui, donc, il n'estplus possible <strong>de</strong> créer <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s, leur donner un nouvelélan et les laisser en gage d’un présent qui sera sansaucun doute dépassé par le passage du temps.On n'était pas dans ce contexte quotidien lorsqu'on a bâtil'immeuble <strong>de</strong> l'hôtel <strong>Llegen<strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong> <strong>Girona</strong>, en plein cœurdu vieux quartier, qui dominait la ville à cette époque;<strong>de</strong> nos jours, l’activité économique et le sentimenthumaniste lui ont insufflé assez <strong>de</strong> force pour continuerà faire battre son cœur au bénéfice <strong>de</strong> nous tous et <strong>de</strong>tous ceux qui viennent nous rendre visite, attirés parnotre passé et par l'intelligente restauration qui est entrain <strong>de</strong> s'effectuer.Autrefois, où n'existaient ni les journaux ni la radio ni latélévision ni le cinéma et encore moins Internet, lesévénements se transmettaient par le bouche à oreille etl'imagination <strong>de</strong> ceux qui les répandaient, les rendaientbien croustillants. La légen<strong>de</strong> consiste en cela: un fait quia eu lieu et autour duquel on a brodé une explicationdont le résultat final est d'une gran<strong>de</strong> poésie. Elle possè<strong>de</strong>un corps mais aussi une âme. C'est son âme qui nousattire et qui rend possible l'impossible: que se passe-t-il?Si nous voulons apporter à la légen<strong>de</strong> plus d'imagination,la notre en l'occurrence, pour trouver son fil rouge,car elle en possè<strong>de</strong> un, nous pouvons jouir <strong>de</strong>sinstallations d’un hôtel qui a osé s'appeler Légen<strong>de</strong>s.L’établissement appartient au présent, sa réalité est bientangible, cotée et mesurable, et pourquoi ne pas laisser,nous aussi, nos légen<strong>de</strong>s personnelles dans les archivesdu silence? Je vous invite à retrouver tout ce que le vieuxquartier <strong>de</strong> la vieille Gérone a, dit-on, vécu et à éprouvertout cela avec notre cœur.Josep López <strong>de</strong> LermaPrési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> “Tribuna <strong>de</strong> <strong>Girona</strong>”.103


L'HISTOIRE DE GÉRONE ESTDOTÉE DE SA PROPRE FORCE104Une maison existe grâce à la famille qui l'habite et <strong>de</strong>la même manière, la ville existe grâce à la société qui laconstitue, et comme la famille qui établit son espaceintime et vital suivant son caractère profond, la sociétécrée et modèle l’espace urbain, qui va être admiré partous ses habitants, le reste du pays et aussi par toutesles cultures étrangères.Nous aimons tous, chez nous, disposer <strong>de</strong>s élémentspermettant à nos sens <strong>de</strong> découvrir un mon<strong>de</strong>supérieur où chaque émotion et chaque sentimentnous rapprochent <strong>de</strong> notre condition d'être humain.La sculpture, la peinture, l'architecture... La villeconstitue, en définitive, une gran<strong>de</strong> maisonpour nous tous.La ville, avec ses pierres et ses gens, est le reflet <strong>de</strong>l'être humain sur la nature. Gérone, l’ensorceleuse villeaux quatre rivières, possè<strong>de</strong> <strong>de</strong>puis toujours une vieculturelle et artistique qui a profondément marqué sapropre personnalité. Ses sculptures, ses églises, sesmaisons, ses moindres recoins et toutes ses pierres ontété les témoins <strong>de</strong> la formation <strong>de</strong> la ville, <strong>de</strong> batailles,<strong>de</strong> sièges, <strong>de</strong> fêtes, <strong>de</strong> légen<strong>de</strong>s, <strong>de</strong> l'innovation,<strong>de</strong> spectacles, <strong>de</strong> l’arrivée <strong>de</strong> l'industrie, <strong>de</strong>s grandsmouvements sociaux, <strong>de</strong> la transformation <strong>de</strong> cestrente <strong>de</strong>rnières années... Mais elles <strong>de</strong>meurent à leurplace, elles contemplent les changements quis’effectuent et comprennent qu'elles sont bien à leurplace, une place éternelle.C'est pourquoi, cette maison <strong>de</strong> maître, où, selon lalégen<strong>de</strong>, vécut il y a 1.700 ans, saint Narcisse, évêque,martyr et patron <strong>de</strong> Gérone, et où <strong>de</strong>meure encore sonessence, évolue dans ce sens positivement et se trouveface à un projet qui va permettre à <strong>de</strong>s gens du mon<strong>de</strong>entier d'aller plus loin dans l'histoire <strong>de</strong> Gérone, quipossè<strong>de</strong> sa propre puissance, qui force l'admiration.Oriol Mallart VallmajóÉtudiant en architectureÉcole d’Architecture La Salle


QUARANTE-DEUX HISTOIRESMAGIQUES: LES LÉGENDES DE GÉRONELES LÉGENDES S’APPARENTENTÀ L'HISTOIRELes légen<strong>de</strong>s constituent <strong>de</strong>s narrations généralementorales à l'origine, contenant en gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong>s élémentsimaginaires et mythologiques; elles évoquent quelquefois<strong>de</strong>s thèmes religieux et parfois païens et dans bon nombre<strong>de</strong> cas populaires, elles recèlent presque toujours un aspecthistorique, ce qui signifie que lorsqu'on en a réuniquarante-<strong>de</strong>ux, comme c'est le cas pour l’hôtel <strong>Llegen<strong>de</strong>s</strong><strong>de</strong> <strong>Girona</strong>, on a assurément recueilli une gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong>l'histoire <strong>de</strong> la ville. Il s'agit d'une histoire différente maisnon moins importante pour autant, qui a été composée parles gens qui sont nés et ont vécu dans la ville ou quisimplement s'y sont aventurés un jour, par hasardpeut-être.Les légen<strong>de</strong>s ne nous racontent pas uniquement les faits,elles nous transmettent aussi les peurs, les désirs et surtoutles fantaisies <strong>de</strong>s gens qui autrefois ont vécut dans lamême rue ou peut-être même dans la maison où noushabitons aujourd'hui. Chacune <strong>de</strong> ces quarante-<strong>de</strong>uxhistoires magiques reflète un imaginaire collectif qui émaned'une manière d'être, d’une manière <strong>de</strong> vivre et <strong>de</strong> penserqui, à n'en pas douter, a d'une certaine façon aidé àconfigurer la réalité <strong>de</strong> la ville d’aujourd'hui, toujoursmagique.Il ne me reste donc qu'à féliciter les personnes qui sont à labase <strong>de</strong> cette initiative et son auteur, et leur souhaiter unegran<strong>de</strong> réussite.Les légen<strong>de</strong>s ne sont pas <strong>de</strong> l'histoire mais elless’apparentent néanmoins à l'histoire. Dans toute légen<strong>de</strong>il y a toujours un fond historique qui, en passant <strong>de</strong>bouche à oreille, au fil du temps, <strong>de</strong>vient une entité à partentière, donnant à certains événements, à l'origine réels,un caractère fantastique et même surnaturel.Si l'histoire est le domaine <strong>de</strong>s érudits, la légen<strong>de</strong> estessentiellement populaire et a une plus gran<strong>de</strong>acceptation. Cet aspect <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s est propice à lacréation artistique qui en extrait la thématique.Gérone, ville chargée d’histoire, est aussi très riche enlégen<strong>de</strong>s.C'est pourquoi, décorer les installations <strong>de</strong> l’hôtel avec <strong>de</strong>smotifs inspirés <strong>de</strong> nos légen<strong>de</strong>s locales et régionalesconstitue une gran<strong>de</strong> trouvaille.Tout comme le fait d’appeler l’établissement <strong>Llegen<strong>de</strong>s</strong><strong>de</strong> <strong>Girona</strong>.Enric Mirambell BellocChroniqueur officiel <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> Gérone105Jordi Martinoy CamósDélégué territorial du Gouvernement<strong>de</strong> la Generalitat <strong>de</strong> Catalogne à Gérone


UN BÂTIMENT DES PLUS ORIGINAUXD’UN GRAND INTÉRÊT HISTORIQUE106Nous assistons aujourd’hui à la réhabilitation d'unbâtiment <strong>de</strong>s plus originaux, d’un grand intérêt historique,situé dans un coin agréable <strong>de</strong> Gérone. C’est certainementl'édifice le mieux conservé et ayant subi le moins <strong>de</strong>modifications <strong>de</strong> tout ce secteur. Il s'agit d'une zone enpleine ébullition, changeant à un rythme trépidant etn’omettant en aucun cas la qualité.Faire un hôtel d'un édifice noble est une conversionréussie. À la noblesse <strong>de</strong>s murs vient s'ajouter une autrevaleur: la <strong>de</strong>nsité <strong>de</strong> l'histoire.C'est, à n'en pas douter, un défi courageux et cohérentdans le contexte <strong>de</strong>s transformations qu'a vécues lecentre historique <strong>de</strong> Gérone.Voilà une bâtisse accueillante au cœur <strong>de</strong> la ville, très près<strong>de</strong>s portes <strong>de</strong> la cité, pratiquement sur les rives du fleuveOnyar, au pied <strong>de</strong> l'église Saint Félix (Sant Feliu).Joaquim Nadal FarrerasConseiller en Politique Territoriale et <strong>de</strong>s Travaux Publicsdu Gouvernement <strong>de</strong> la Generalitat <strong>de</strong> Catalogne


LA CULTURE POPULAIRE DE GÉRONEET L'HÉRITAGE DE L'HISTOIRELa construction <strong>de</strong> l'histoire <strong>de</strong> l'humanité se résume à laconjonction du rôle <strong>de</strong>s individus avec leur milieu, dont lerésultat est la culture. Or, on peut considérer que laculture constitue l'héritage ou le patrimoine qui a étéconsciemment produit, accumulé et transmis par lesindividus au fil du temps. Ainsi, si on tient compte <strong>de</strong>sdifférents concepts rattachés au mot culture, l'histoire <strong>de</strong>Gérone que l'on nous présente n'est pas seulementl'histoire <strong>de</strong> faits héroïques et <strong>de</strong>s grands combats inscritsdans la mémoire collective et représentant la Géroneimmortelle, c'est aussi une histoire enracinée et construiteà travers ses légen<strong>de</strong>s ou ces mythes qui se cachent dansle patrimoine historique <strong>de</strong> la ville et qui, <strong>de</strong> ce fait,forgent la culture populaire <strong>de</strong> la ville.Gérone, la porte <strong>de</strong> la Catalogne, a toujours été à lacroisée <strong>de</strong>s différentes civilisations qui ont laissé leurhéritage dans les rues <strong>de</strong> la ville; c'est une ville bâtie surla base <strong>de</strong> ses légen<strong>de</strong>s, issues <strong>de</strong> la culture populaire,qui a été conçue au regard <strong>de</strong> son énorme patrimoineartistique et archéologique et que l'on peut comparer,toutes proportions gardées, aux gran<strong>de</strong>s villeseuropéennes. L’hôtel <strong>Llegen<strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong> <strong>Girona</strong> est un belexemple <strong>de</strong> la réutilisation <strong>de</strong> ce patrimoine, nonseulement dans un but <strong>de</strong> divulgation <strong>de</strong> l'histoire <strong>de</strong> laville à ses habitants, mais aussi pour recueillir et préservernotre histoire et notre culture les plus intimes, que noussommes encore en train <strong>de</strong> créer ensemble et qui ai<strong>de</strong>rales étrangers à aller plus loin dans la connaissance <strong>de</strong>notre passé. L’hôtel est situé dans une zone qui autrefoisétait à la croisée <strong>de</strong>s chemins d’entrée à la ville <strong>de</strong>puis lenord et ce n'est pas un hasard car cette situation vamaintenant permettre aux visiteurs d'abor<strong>de</strong>r un parcourspratique et plaisant, à la découverte <strong>de</strong>s charmes <strong>de</strong> labelle (et vieille) Gérone.Tout cela fait <strong>de</strong> Gérone une ville qui charme les visiteursgrâce à son patrimoine, avec ses légen<strong>de</strong>s inscrites dansl’imaginaire collectif, dont ils peuvent se pénétrer à loisirà l'ombre <strong>de</strong> monuments millénaires, en parcourant sesruelles sombres et austères. Actuellement le tourismeculturel est très à la mo<strong>de</strong>; cela consiste à faire <strong>de</strong>svoyages accompagnés par <strong>de</strong>s gui<strong>de</strong>s touristiques,à visiter <strong>de</strong>s monuments et <strong>de</strong>s musées célèbres par letruchement <strong>de</strong>s médias... C'est une façon <strong>de</strong> cultiver lesgens mais ce qui révèle l'essence <strong>de</strong> la culture d’unpeuple, ce sont les mythes et les légen<strong>de</strong>s populaires,<strong>de</strong>s narrations fictives qui <strong>de</strong>viennent une réalitéhistorique lorsque naît un sentiment commun aux gensqui écoutent ces histoires.Je terminerai en citant une phrase extraite du livre <strong>de</strong>Jaume Marquès, <strong>Girona</strong> vella (La vieille Gérone), quiillustre avec exactitu<strong>de</strong> l'importance du patrimoine ancien<strong>de</strong> la ville pour la société actuelle: «L’amour commun quenous ressentons envers la vieille Gérone contribue à unrapprochement plus fort <strong>de</strong> tous ses habitants ainsiqu’à une cohabitation plus pacifique et plus agréabledans la communauté».Eduard Nadal MartínÉtudiant en histoire à l'UAB107


LE TERRITOIRE GRANDIT108Les visiteurs qui arrivent à Gérone ou qui se promènentdans notre région sont attirés par l’ensemble <strong>de</strong>s élémentset <strong>de</strong>s caractéristiques qui configurent notre personnalité:le paysage, les saveurs <strong>de</strong> notre gastronomie, les loisirs etpourquoi pas, notre héritage culturel. Les légen<strong>de</strong>s <strong>de</strong>Gérone intègrent ce patrimoine, qui s'est forgé dans lestraditions et les chroniques populaires.La Diputació (Conseil général) <strong>de</strong> Gérone apprécie cesprojets ambitieux tel que celui que mène à bien laFundació60 avec l’hôtel <strong>Llegen<strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong> <strong>Girona</strong>. C'est grâce àce genre d’initiatives que le territoire grandit et peut ainsioffrir un choix plus vaste en infrastructures.Carles Pàramo PonsetíPrési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la Diputació <strong>de</strong> Gérone


LES LÉGENDES SONT L'EXPRESSIONDU SENTIMENT D’UN PEUPLEUNE INSTALLATION TOURISTIQUEDE PREMIER ORDRENotre passé nous est souvent présenté comme unmonument pétri, un décor inerte et ennuyeux. Par contre,les légen<strong>de</strong>s, grâce à leur extraordinaire chargesymbolique, con<strong>de</strong>nsent les préoccupations, les peurs,les fantaisies et les désirs <strong>de</strong>s véritables acteurs <strong>de</strong>l'histoire <strong>de</strong> Gérone. Ainsi, ce passé se présente commeun antidote efficace visant à combattre le seul regar<strong>de</strong>n blanc et noir, en nous transportant dans la dimensiondu vécu <strong>de</strong> notre histoire.Tout cela fait que les légen<strong>de</strong>s soient l'expression dusentiment d’un peuple. Nous tourner vers notre passé doitnous servir, non pas à y rester ancrés, mais bien aucontraire, à considérer le présent en ayant une idéeprécise <strong>de</strong> notre i<strong>de</strong>ntité et à envisager le futur dansce seul but <strong>de</strong> définir clairement cette i<strong>de</strong>ntité.La Gérone d’aujourd'hui, riche <strong>de</strong> par son histoire, esttoutefois bien différente <strong>de</strong> celle qui a donné lieu à ceslégen<strong>de</strong>s. Nous commettrions donc une erreur si nousnous regardions dans ce passé immobile. Le défi qui estlancé à notre ville consiste à assumer la richesse <strong>de</strong> notrehistoire tout en regardant droit <strong>de</strong>vant et en avançantvers <strong>de</strong> nouveaux horizons. C'est seulement ainsi que lesgens <strong>de</strong> Gérone pourront dans le futur être fiers <strong>de</strong> leurpassé.J'ai lu avec intérêt le livre <strong>de</strong> l'hôtel <strong>Llegen<strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong> <strong>Girona</strong>que vous m'avez fait parvenir. Je tiens à vous féliciter,tant pour le contenu que pour votre façon absolumentnovatrice <strong>de</strong> travailler, dont le but est <strong>de</strong> faire connaîtreune nouvelle installation touristique <strong>de</strong> premier ordre.Je vous félicite vivement et vous encourage.Ramon Ramos ArgimonPrési<strong>de</strong>nt du Patronat <strong>de</strong> TourismeCosta Brava-<strong>Girona</strong>109Carles Puig<strong>de</strong>mont CasamajóCandidat <strong>de</strong> CiU à la Mairie <strong>de</strong> Gérone


CULTURE, PATRIMOINE, «GLAMOUR» ET MYSTÈRE:UN TOURISME QUI RECHERCHE LE REPOS, LATRANQUILLITÉ ET DE NOUVELLES EXPÉRIENCES110Félicitations. Il est grand temps que nous comprenionsque pour promouvoir le tourisme dans notre région,il faut montrer à ceux qui nous visitent notre héritageculturel. Tourisme est synonyme <strong>de</strong> culture, c'est pourquoinous tenons à bien faire les choses et à montrer ce quenous possédons. Une riche histoire et un immensepatrimoine…Si nous ajoutons à ces éléments <strong>de</strong> base <strong>de</strong>s services <strong>de</strong>qualité, nous aurons posé <strong>de</strong>s bases très soli<strong>de</strong>s qui nouspermettront <strong>de</strong> bénéficier pendant longtemps d'untourisme autre que le tourisme <strong>de</strong> masse standard et <strong>de</strong>ce fait, nous n'aurons pas à dépendre du flux économiqueimposé par les tours operators.Les petits hôtels, bien équipés et offrant une variété <strong>de</strong>services, sont une garantie <strong>de</strong> qualité qui permettra àGérone <strong>de</strong> recevoir un tourisme qui recherche le repos,la tranquillité et <strong>de</strong> nouvelles expériences. Ces élémentsqui sont pourtant basiques, ne sont pas faciles à trouver<strong>de</strong> nos jours à cause bien sûr du tourisme <strong>de</strong> masseà gran<strong>de</strong> échelle.Si nous offrons aux clients <strong>de</strong> l'hôtel la touche «glamour»et <strong>de</strong>s services <strong>de</strong> qualité irréprochables et si d'autre part,on y respire une atmosphère <strong>de</strong> mystère émanant <strong>de</strong>slégen<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la ville, sculptées dans <strong>de</strong> belles pierres enmarbre, on peut penser que le succès est assuré.Je termine en félicitant le sculpteur Gerard Roca Ayatspour les magnifiques pièces qu'il a réalisées et aussi lajournaliste et anthropologue Nuri Ros Rue pour sonrecueil <strong>de</strong> légen<strong>de</strong>s et finalement la Fundació60 pour ceprojet culturel, une entreprise si ambitieuse.Emili Rams RieraArchiviste municipal d’Anglès


MIEUX CONNAÎTRE L'HISTOIRE DESTERRES DE GÉRONEJe vous suis très reconnaissant <strong>de</strong> m'avoir fait parvenirle livre que vous avez édité et qui donne à lire cesquarante-<strong>de</strong>ux légen<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Gérone.J'en profite pour vous féliciter très sincèrement pour cetteintéressante initiative culturelle, une entreprise si novatrice.L'édition <strong>de</strong> ce livre est une réussite. D'une part, les clients<strong>de</strong> l’hôtel en visite à Gérone disposerons <strong>de</strong> légen<strong>de</strong>s et <strong>de</strong>gravures qui leur permettront <strong>de</strong> mieux connaîtrel'histoire <strong>de</strong> nos terres. Et d'autre part, cela témoignemanifestement <strong>de</strong> la volonté d’enracinement etd'i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong> cette nouvelle installation dansla ville <strong>de</strong> Gérone.Je vous souhaite beaucoup <strong>de</strong> chance.111Xavier Soy SolerVice-prési<strong>de</strong>ntDiputació <strong>de</strong> Gérone


Rue C/ Portal <strong>de</strong> la Barca, 4 - GIRONAwww.fundacio60.org112


113Rue Mosques, 1 - Rue Pou Rodó, 5 GIRONALe vieux quartier (Barri Vell)Près <strong>de</strong> l’église Saint Félix – GÉRONE


114Les membres <strong>de</strong> Fundació60, lafamille Mallart, au cours d’un acteen présence <strong>de</strong> l’évêque <strong>de</strong> Gérone,Monseigneur Carles Soler.Sur la photographie <strong>de</strong>gauche à droite:Oriol Mallart (membre patronat),Anna Mallart (membre patronat),Roser Vallmajó (E.P.D. 28.2.2007),Monseigneur Carles Soler,évêque <strong>de</strong> Gérone,Carles Mallart(sous-prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la fondation),Marc Mallart(prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la fondation),la jeune Estel avec Astrid.Administration <strong>de</strong> Fundació60www.fundacio60.org


115Jusqu’en 1964, Rue Sant NarcísBarri Vell (vieux quartier) – GÉRONEF60 dans la province <strong>de</strong> Gérone


La ville <strong>de</strong> Gérone116Gérion, fondateur <strong>de</strong> GéroneLa gouvernante <strong>de</strong> saint NarcisseLa trace <strong>de</strong> saint NarcisseLes catacombesCharlemagneLe dragon sous le templeErmessen<strong>de</strong> <strong>de</strong> CarcassonneLe faucon <strong>de</strong> Cap d’EstopesLe cul <strong>de</strong> la lionneLa rue <strong>de</strong>l Llop (du loup)La sirène <strong>de</strong> GalligansLes juifs à GéroneLes mouches <strong>de</strong> saint NarcisseLes pommesSaint Félix et le voleur <strong>de</strong> l’Église CollégialeLe TarlàLa sorciére <strong>de</strong> la CathédraleLe vampire <strong>de</strong> la RamblaLe cochon <strong>de</strong> saint AntoineVie et miracles <strong>de</strong> saint FélixLa cloche BenetaSaint Narcisse et le Français empoisonneurLa fontaine <strong>de</strong> PericotLe coton miraculeuxL’huile <strong>de</strong> la lampeLes lumièresLa pierre miraculeuseLe symbolisme <strong>de</strong> sainte CatherineLe boulanger du MercadalLa Cocollona


Province<strong>de</strong> Gérone118Le lac <strong>de</strong> BanyolesLa conversion d’AfraGeoffroy la VeluSaint Maurice et la mauvaisevielle <strong>de</strong> Cal<strong>de</strong>sLe fils du châteauLe mugissement <strong>de</strong> CastellóLe pont du diableLe bœuf d’orLe lac <strong>de</strong> SilsLes sorcières <strong>de</strong> LlersLa mariée <strong>de</strong> Can BielLa fontaine <strong>de</strong>s amoureux


BIBLIOGRAPHIE120Alberch, Ramon: El miracle <strong>de</strong> les mosquesi d’altres llegen<strong>de</strong>s. CCG Edicions, 2001.Ama<strong>de</strong>s, Joan: Costumari català. El curs <strong>de</strong> l’any.Vol. V. Salvat Editores i Edicions 62, 1982.Ama<strong>de</strong>s, Joan: Costumari català. El curs <strong>de</strong> l’any.Vol. IV. Salvat Editores i Edicions 62, 1989.Calzada Oliveras, Josep: Les campanes<strong>de</strong> <strong>Girona</strong>. Diputació Provincial <strong>de</strong> <strong>Girona</strong>, 1977.Clara, Josep Marquès, Josep: Sant Feliu<strong>de</strong> <strong>Girona</strong>. Edita Centre d’Estudis Diocesà.Costa, Lluís Maroto, Julià: Història <strong>de</strong> <strong>Girona</strong>.CCG edicions, 1991-2000.De Riquer, Martí: <strong>Llegen<strong>de</strong>s</strong> històriquescatalanes. Qua<strong>de</strong>rns Crema, 2000.Fàbrega, Albert: <strong>Llegen<strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong> ponts,dòlmens i menhirs a Catalunya. Itineraris.El Farrell edicions, 2000.Gibert, Josep, 1946. <strong>Girona</strong>. Petita Història <strong>de</strong> laciutat i <strong>de</strong> les seves tradicions i folklore. (Imprèsel 29 d’octubre <strong>de</strong> 1946, diada <strong>de</strong> Sant Narcís)Marquès Casanovas: <strong>Girona</strong> vella. Vol I i II.Edita Ajuntament <strong>Girona</strong>, 1979.Pla Cargol, Joaquim: Santos mártires <strong>de</strong> Gerona.Dalmáu Carles, Pla, SA Editors, 1962.Van Gennep, Arnold: La formación <strong>de</strong> lasleyendas. Editorial Altafulla, 1982.Vila, Pep: El Tarlà <strong>de</strong> <strong>Girona</strong> i les festes <strong>de</strong>l carrer<strong>de</strong> l’Argenteria. Ajuntament <strong>de</strong> <strong>Girona</strong>, 2004.Violant Ribera, Ramona: El món màgic <strong>de</strong>les fa<strong>de</strong>s. Farrell editors, 2002.Vivó, Carles: <strong>Llegen<strong>de</strong>s</strong> i misteris <strong>de</strong> <strong>Girona</strong>.Qua<strong>de</strong>rns <strong>de</strong> la Revista <strong>de</strong> <strong>Girona</strong>, 1989.Première édition:Éditeur:Reliefs en marbre:Auteur <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s:Conception graphiqueet maquette:Photographie:Cartes:Impression:Dépôt légal:Avril 2007FUNDACIO60www.fundacio60.orgGerard Roca Ayatse-mail: gerard.roca.ayats@hotmail.comNuri Ros Ruee-mail: rrnurry@hotmail.comEstudi Sicíliae-mail: sicilia@intercomgi.comPere SicíliaPTCBG, Antonio Garrido, Francesc Tur,Kim Castells, J.L. Banús, Pep Iglesias,Joan Ureña, Ariadna Àlvarez, Jordi Mas,Josep Padilla, Toni Soriano,Fundació Gala/Salvador Dalí© Ajuntament <strong>de</strong> <strong>Girona</strong> UMATPatronat <strong>de</strong> Turisme Costa Brava <strong>Girona</strong>Gràfiques Alzamora - <strong>Girona</strong>GI.550-2007


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