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Les sédiments anthropiques

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<strong>Les</strong> sédiments <strong>anthropiques</strong>MÉTHODES D’ÉTUDE ET PERSPECTIVESJacques Élie BROCHIERAnthropique : ce qualificatif d’origine récente fait clairementréférence aux activités humaines et à leurs conséquences(fait par l’homme ; dû à l’existence et à la présencede l’homme, nous dit le dictionnaire). Employé parle sédimentologue ou le géoarchéologue, il peut cependants’appliquer à des objets très différents : des accumulationsd’éléments fins ou grossiers, en volumes limités(parfois importants dans le cas des tells, par exemple),dans ou à proximité du lieu occupé, témoins directs d’activitésvariées ; des accumulations détritiques, d’extensionlocale à régionale, mises en place par les agents habituelsde la sédimentation, conséquences non plus seulementdes états du couple climat/végétation mais également desactivités humaines.Le premier cas de figure regroupe les sédiments <strong>anthropiques</strong>que l’on peut qualifier de primaires. Ce sont ceuxqui seront décrits ici. <strong>Les</strong> dépôts entrant dans la secondecatégorie seront les sédiments <strong>anthropiques</strong> secondaires. Ilstémoignent de phases qualifiées par Erhart de rhexistasieanthropique (Erhart in Kunholtz-Lordat, 1958). De naturevariée (colluvions, alluvions, accumulations éoliennes) ilsne portent pas, à la différence des sédiments <strong>anthropiques</strong>primaires, les marqueurs intrinsèques de leur origine. Lequalificatif anthropique, qui peut parfois leur être appliqué,résulte d’un croisement complexe des données et ressortseulement du domaine de l’interprétation. Ces formations<strong>anthropiques</strong>, qui semblent bien ne concerner que les périodesrécentes, proto-historiques et historiques, ne serontpas détaillées ici.<strong>Les</strong> disciplines naturalistes en général, celles faisantappel à la géologie en particulier, ont suscité beaucoupplus d’intérêt, jusqu’à une période récente, chez les préhistorienspaléolithiciens que néolithiciens. Jusqu’aux années80, les accumulations sédimentaires dans les sites archéologiquesn’étaient que les conséquences des variations climatiques; l’essentiel de l’activité des sédimentologues seconcentrait alors, naturellement, sur les séquences pléistocènes.<strong>Les</strong> variations climatiques holocènes, que l’on savaitêtre faibles en comparaison de leurs homologues pléistocènes,n’incitaient guère les chercheurs à examiner les dépôtsrécents. <strong>Les</strong> rares tentatives de clarification de la miseen place de séquences archéologiques holocènes, montraientsurtout l’inadéquation des techniques (sédimentologiquesou pédologiques) et des schémas interprétatifs à desterres de nature aussi particulière. Ce n’est que lorsqu’ons’est soucié de savoir ce que l’on mesurait, lorsque l’on aplacé ces sédiments sous le microscope, que l’on a prisconscience de l’originalité des sédiments archéologiquesrécents. Ceci ne veut pas dire, pour autant, que les sédimentsarchéologiques pléistocènes ne puissent être <strong>anthropiques</strong>,mais simplement que si l’on peut parfois faire l’impassesur le fait anthropique dans l’étude géologique d’undépôt pléistocène, celui-ci devient central dans celle d’undépôt holocène. Des contre-exemples, comme les dépôtspléistocènes de la grotte de Kébara, sont cependant facilesà trouver! L’allongement des durées d’occupation, les activitésnouvelles qui caractérisent le Néolithique, l’âge,somme toute très récent, des dépôts, suffisent toutefois àrendre compte des différences généralement observéesentre les dépôts pléistocènes et holocènes.Des cailloux aux poussières<strong>Les</strong> fragments grossiers, apportset modificationsDes objets de toutes dimensions peuvent être accumulés oumodifiés par l’homme. Bien que ce soit sous le microscopeque le caractère anthropique d’un sédiment apparaisse avecle plus d’évidence, l’accumulation des éléments grossierspeut également être anthropique. Il est bien évident qu’en


454 GÉOLOGIE DE LA PRÉHISTOIREdehors des objets dont la nature pétrographique, ou la morphologie,est incompatible avec un transport naturel, que cen’est pas l’observation individuelle des fragments qui serapertinente. Une des voies qui peut être suivie pour mettre enévidence de tels apports <strong>anthropiques</strong> grossiers fait appel àl’analyse fine des distributions granulométriques.Deux distributions théoriques asymétriques décrivent,avec une approximation raisonnable, les cas rencontrésdans l’étude des formations superficielles : la distributionlog-normale et la distribution de Rosin-Rammler. Toutesdeux se symétrisent, parfaitement pour la première, partiellementpour la seconde, par une simple transformation logarithmiquedes dimensions (fig. 1).Dans les contextes sédimentaires où les transports sontfaibles ou nuls – un cas extrêmement fréquent en milieuarchéologique – il a été montré depuis longtemps que lesFigure 1. Distributions granulométriques, tronquées par commodité à 5 mm (- 2,67 PHI), des galets actuel du Coulon (Vaucluse)et de ceux de quelques sites mésolithiques de cette vallée. De petits galets calcaires sont présents, en quantité variable suivantles époques, dans les dépôts mésolithiques. Ils ont été systématiquement chauffés, quelle que soit leur taille, à hautetempérature (600 à 700 °C). Du Tardiglaciaire à la période actuelle, les distributions granulométriques des galets calcairesprélevés en contexte fluviatile s’ajustent toujours au modèle log-normal [a]. <strong>Les</strong> galets extraits des dépôts mésolithiques [c et d]s’ajustent également bien à ce modèle et démontrent ainsi que des échantillons représentatifs de galets étaient prélevés dansle lit de la rivière, en d’autres termes, qu’aucune dimension particulière n’était privilégiée.De haut en bas et de gauche à droite : [a] distribution log-normale ajustée d’un échantillon de galets actuels prélevés au niveaude Notre-Dame-de-Lumière ; [b] pour illustration, distribution de Rosin ajustée aux mêmes données, remarquer l’asymétrie ;[c] distribution granulométrique des galets mésolithiques de Roquefure 2, histogramme : données brutes ; courbe en trait plein :courbe gaussienne ajustée aux observations ; [d] distribution granulométrique des galets mésolithiques de l’abri du Centre.L’axe des abscisses est gradué en unités PHI. (d’après Brochier et Livache 1996, modifié).Figure 1. Granulometric distributions, truncated at 5 mm (-2.67 PHI), of present day gravels of Coulon river (Vaucluse) and ofriver gravels of some mesolithic sites of this valley. Small river gravels occurs, in variable amount according to age, in mesolithicdeposits. They were, whatever their size, heated to high temperature (1100 to 1300 °F). From Late Glacial to current day,granulometric distributions of river gravels always fit to log-normal model [a]. River gravels from mesolithic sites [c and d] alsofit to this model, showing that representative samples were carried from the river bed; in other word, no particular size wasprefered. [a] fitted log-normal distribution of present day river gravels; [b] as an example, same sample fitted to a Rosindistribution; note the asymmetry; [c] granulometric distribution of mesolithic river gravels from Roquefure 2 rock-shelter,histogram: raw data; solid line: fitted gaussian curve; [d] granulometric distribution of mesolithic river gravels from Centre rockshelter.Abscissa axis in PHI units. (after Brochier and Livache 1996, modified).


<strong>Les</strong> sédiments <strong>anthropiques</strong> – Méthodes d’étude et perspectives 455distributions granulométriques des fragments sont mieuxdécrites à l’aide de la « loi de broyage » de Rosin qu’àl’aide de la loi normale ; à tel point que la qualité de l’ajustementaux deux distributions théoriques (normales ouRosin) peut être utilisée pour décrire le degré d’évolutiond’un sédiment (Kittleman 1964, Schleyer 1987).L’utilisation par l’homme de fragments grossiers, pour un(ou des) besoin(s) particulier(s) peut laisser dans la zonehabitée une masse caillouteuse importante. Pour chaqueusage, le choix du module optimal est à l’origine de distributionsparticulières, tronquées ou à étendue réduite, qui nes’ajustent plus aux modèles « naturels ». Plus la qualité del’ajustement est mauvaise, plus forte est la probabilité d’êtreen présence d’une accumulation anthropique. Des cas pluscomplexes peuvent se produire lorsque des activités différentesse déroulent au cours d’une même phase d’occupation;elles peuvent alors donner naissance à plusieurs populationsdistinctes qui se combinent en une distributionrésultante pluri-modale. La qualité de l’ajustement des distributionsconstitue ainsi la donnée première de toute approchesédimentologique en contexte archéologique.À l’inverse, cette technique permet également de montrerque certains éléments grossiers que l’on sait être accumuléspar l’homme, à cause de leur nature pétrographique ou deleur morphologie, ont été prélevés à l’affleurement sansaucun choix. C’est le cas, par exemple, des petits et énigmatiquesgalets fluviatiles calcaires si caractéristiques des dépôtsmésolithiques du Vaucluse présenté sur la figure 1.L’homme peut également être à l’origine de modificationsdes fragments grossiers. <strong>Les</strong> plus évidentes sont naturellementcelles qui sont liées à l’usage du feu : fissurations, cupules,fractures et coloration. Cependant, la reconnaissancede ces stigmates, comme celle d’ailleurs de charbons (oumicro-charbons) de bois dans un sédiment, n’a pas nécessairementune signification anthropique ! N’oublions pasque les incendies naturels, certes rares, se produisent detemps à autre. Ce n’est qu’associés à d’autres témoins de laprésence humaine à l’intérieur même du lieu habité, et lorsqu’untransport naturel de ces éléments peut être exclu, queces modifications peuvent, sans conteste, être attribuées àl’homme. Ces considérations prennent un poids particulierlorsqu’il s’agit de traiter des débuts de l’usage du feu.Toutes les roches réagissent peu ou prou aux élévationsde température. Une gamme étalon, facilement obtenueavec un four à moufle, doit être établie dans chaque cas.Elle permet de définir les seuils thermiques au delà desquelsles modifications macro – ou microscopiques se produisent(fig. 2). Dans une même classe pétrographique, lesseuils varient d’une roche à l’autre tout en restant du mêmeordre de grandeur. Pour les calcaires et les molasses, parexemple, le début du rougissement peut être fixé autourde 270 °C; les teintes rouges s’intensifient ensuite et persistentjusque vers 500 °C ; l’intervalle 600 – 700 °C (etmême 800 °C pour certains calcaires) est le domaine desteintes grises ; au delà le blanchiment localisé, puis total,caractérise la transformation en chaux.Ces approches sédimentologiques impliquent, cela vasans dire, l’échantillonnage et le traitement de volumes importantsde sédiment. Plusieurs dizaines de kilogrammesde fragments rocheux sont très vite nécessaires lorsquel’on prend en compte des cailloux atteignant la dizaine decentimètres.<strong>Les</strong> poussièresD’une taille comprise entre quelques dizaines et quelquesmicromètres (soit la fraction limoneuse augmentée d’unepartie des sables les plus fins) les poussières sont sansconteste les éléments qui témoignent avec le plus de nettetéde la présence et des activités humaines.Technique de préparationet d’observationDeux techniques microscopiques complémentaires sontutilisées en routine : l’observation de lames minces issuesde blocs indurés de sédiment ; l’observation de décantationsde cette fraction granulométrique. Chacune de cesdeux techniques a son intérêt, et chacune a également seslimites. La lame mince est peu adaptée à l’observation desFigure 2. Exemple de gamme étalon sur calcaire obtenueau four à moufle. Température maximale : 700 °C.Figure 2. Example of standard colorimetric range obtained byheating limestone in a furnace. Maximum temperature:700 °C (1292 °F).


456 GÉOLOGIE DE LA PRÉHISTOIREpoussières en tant qu’objets isolés, peu adaptée égalementà une approche quantitative ou semi-quantitative des différentstypes; mais elle donne une image irremplaçable desrelations spatiales entre les éléments. <strong>Les</strong> décantations nedonnent, par définition, pas d’indication sur l’organisationspatiale ; elles sont, par contre, un excellent moyen d’observationet de quantification des poussières isolées. Destypes rares, ou très petits, sont facilement mis en évidence.Nous ne nous étendrons pas ici sur la première de cestechniques décrite en détail dans un autre chapitre de cevolume ; nous l’utiliserons seulement à titre d’illustrationlorsque le besoin s’en fera sentir.La préparation des décantations fait appel à une techniquesimple et relativement rapide, qui permet de traiterde très nombreux échantillons. Une petite quantité de sédimentest mise en suspension dans l’eau (0,5 g de sédimentpour environ 200 ml de liquide). La dissociation des agrégatsest obtenue à l’aide de quelques gouttes d’eau oxygénée(110 vol.). Après agitation, un prélèvement de la suspensionest déposé sur une lame de verre. Le temps quisépare l’agitation de la suspension du prélèvement est fixé,pour les analyses de routine, à 25 secondes. Il peut être réduitou augmenté en fonction de la taille des particules quel’on souhaite observer. La décantation et le séchage despoussières sur la lame se fait simplement sur une plaquechauffante à faible température. Le montage définitif est ensuiteeffectué au baume du Canada dont l’indice de réfractionest parfaitement adapté à l’étude des différents types depoussières rencontrés.La seule limitation concerne les matériaux solubles et lesrestes organiques fragiles (pollens et spores par exemple)qui peuvent être en partie détruits lors de la phase préliminairede dissociation à l’eau oxygénée, bien que celle-cisoit très courte.L’observation se fait ensuite au microscope pétrographique,à un grossissement de 200 fois pour l’estimation desabondances, et de 400 à 1000 fois pour les comptages et lesanalyses morphologiques de détail. Des dispositifs optiquesparticuliers, comme le contraste interférentiel Nomarsky,sont particulièrement bien adaptés à l’étude de la fractionisotrope – l’opale d’origine végétale – des poussières.Il est alors possible d’observer et de quantifier, à partird’une préparation unique, tous les constituants de la phaselimoneuse du sédiment, qu’ils soient détritiques, néoformésou <strong>anthropiques</strong>.Des objets originaux : définitionet caractérisationSans être nécessairement liées à la présence humaine,l’homme n’est pour rien dans la genèse d’un phytolithaire!les poussières ne prennent le qualificatif d’anthropique quepar leur forte concentration dans le site archéologique,concentration qu’aucun processus naturel ne saurait expliquer.Elles peuvent alors constituer, seules ou en mélange,de véritables unités sédimentaires.Peu variées, elles sont le plus souvent d’origine végétale.Nous les présenterons successivement, en commençant parles plus fréquemment rencontrées.<strong>Les</strong> phytolithaires d’origine oxalique ou POCC<strong>Les</strong> phytolithaires oxaliques (planche photo 1i) peuventêtre présents dans tous les organes végétaux, racines comprises.Ils sont constitués soit d’oxalate de calcium monohydraté,la whewellite, de formule CaC 2O 4.H 2O, soit d’oxalatede calcium di-hydraté, la weddellite, de formuleCaC 2O 4.2H 2O. Ces deux minéraux cristallisent dans deuxsystèmes cristallins différents : monoclinique pour le premier,quadratique pour le second. <strong>Les</strong> habitus cristallinssont distincts, mais le caractère qui permet de les différencierle plus nettement est leur biréfringence : faible pour laweddellite (Ng-Np = 0,031), extrême pour la whewellite(Ng-Np = 0,160). Ces deux minéraux, solubles dans lesacides forts, ne sont pas affectés par l’acide acétique.Ils ne se conservent pas dans les sédiments au delà dequelques années, sauf conditions tout à fait exceptionnelles.Leur intérêt paléoécologique ou archéologique seraitdonc nul s’ils n’avaient la propriété de se transformersous l’effet de la chaleur – entre 430 et 510 °C – en carbonatede calcium tout en gardant les caractères morphologiquesdu cristal originel (et non de la cellule végétale,comme on l’affirme parfois). <strong>Les</strong> agrégats micro-cristallinsainsi obtenus, images fidèles des cristaux d’oxalate de calcium,sont appelés pseudomorphoses d’oxalate de calciumen calcite (ou de façon plus condensée POCC).Dérivées de cristaux oxaliques monocliniques ou quadratiques,il est très contestable de les décrire par l’expression« cristaux rhomboédriques ». <strong>Les</strong> POCC forment la majeurepartie de ce que l’on appelle cendre de bois (Brochier1983a et b).Sous le microscope, leur texture grenue et leurs formesgéométriques sont caractéristiques. Observées en lumièrepolarisée analysée, la plupart des formes ne s’éteignent pas(ou très partiellement) lorsque l’on fait tourner la platine;ce ne sont donc pas des mono-cristaux mais des agrégatsmicro-cristallins (planche photo 1h, j, k) dont les composantsne sont pas optiquement orientés. Quelques exceptionsexistent cependant puisque les oxalates de calcium dequelques rares espèces (certains des prismes de Tilia platyphyllospar exemple) sont à l’origine de POCC formées decristallites dont les axes optiques présentent une orienta-


<strong>Les</strong> sédiments <strong>anthropiques</strong> – Méthodes d’étude et perspectives 457tion suffisamment cohérente pour provoquer une extinctiondroite quasi totale. <strong>Les</strong> POCC, généralement micritiques,peuvent parfois se présenter, en contexte archéologique,sous un faciès bien différent, microsparitique, qui n’a pourl’instant pu être reproduit au laboratoire (fig. 3).À partir de 600 °C environ, température banale dans unfeu de bois, les POCC sont progressivement transformées enchaux. Elles donnent alors naissance, par hydratation etcarbonatation, à de très fins carbonates secondaires.<strong>Les</strong> oxalates de calcium végétaux, et les POCC qui sontleur forme archéologique fossile, présentent un nombre deformes réduites et relativement ubiquistes. Celles-ci ne peuventêtre observées dans de bonnes conditions qu’à partirde décantations. <strong>Les</strong> grains y sont bien séparés et vus sousun angle constant. <strong>Les</strong> mesures, indispensables à unedétermination botanique sérieuse, ou les observationsfines, sont alors possibles.Sur 150 espèces ligneuses européennes, par exemple,une quinzaine seulement sont actuellement déterminables àpartir de cendres monospécifiques (ce qui n’est pratiquementjamais le cas en milieu archéologique, les taxons reconnuspar l’anthracoanalyse sont là pour nous le rappeler).À partir de cendres plurispécifiques, la liste de taxonsdéterminables est beaucoup plus réduite. Quelques formessont cependant suffisamment originales pour permettre dereconnaître quelques taxons, souvent au niveau spécifique.Le hasard fait que ces taxons, les pins et les deux espècesde tilleul en particulier, ont une signification écologiqueclaire : les tilleuls sont indicateurs de formations ferméescaducifoliées, les pins de formations plus ouvertes, pionnières,succédant souvent, dans les phases récentes del’holocène, à de fortes perturbations <strong>anthropiques</strong>.Toutes les espèces ligneuses ne produisent cependantpas, lors de leur combustion, les POCC si caractéristiquesdes cendres de bois. En prenant toujours en exemple lemême référentiel, une vingtaine de taxons produisent seulementdes micrites, en masses sans caractères spécifiques,parfois plus ou moins vaguement structurées en fibres ouen réseau (planche photo 1l).<strong>Les</strong> dimensions des POCC sont comprises dans un intervalleétroit centré autour d’une quinzaine de micromètres(fig. 4a). Le mode, qu’une simple analyse granulométriquemet facilement en évidence, est un bon moyen pour estimerleur abondance dans une unité sédimentaire.Soulignons enfin, pour clore la présentation de ce premiertype de poussière anthropique, qu’il est urgent d’introduireun minimum de rigueur dans les exposés en différenciantclairement les rarissimes oxalates de calcium végétaux,weddellite ou whewellite, de leurs descendants carbonatés,les POCC. <strong>Les</strong> interprétations géoarchéologiques qui découlentde la présence et de la conservation dans un sédimentde l’un ou l’autre de ces minéraux sont bien différentes !<strong>Les</strong> micro-charbons, génétiquement associés aux POCC, nenécessitent pas un long développement. Ils représentent letype le plus commun de poussière anthropique, tant dans lessédiments <strong>anthropiques</strong> primaires que secondaires. À partird’une certaine taille, il devient très difficile, voire impossible,de distinguer sous le microscope le micro-charbon dela suie. La quantification, facile à partir de décantations,peut être précisée par la mesure de la perte au feu à 500 °C.Figure 3. Pseudomorphose d’un cristal maclé d’oxalatede calcium en calcite (POCC) d’angiosperme dicotylédone.Remarquer l’engrènement des unités microsparitiques.Microscopie électronique à balayage.(Grotte de Santa Maira, province d’Alicante, Néolithique ;cliché C. Verdasco).Figure 3. Calcitic pseudomorph after twined dicotyledonousAngiosperm calcium oxalate cristal (POCC). Note the closemaching of microsparitic units.(Santa Maira cave, Alicante country, Neolithic; photo C. Verdasco).


458 GÉOLOGIE DE LA PRÉHISTOIREFigure 4. Distributions granulométriques, tronquées à 2 µm (9 PHI), de quelques poussières <strong>anthropiques</strong>. À gauche (a) : cendrede bois expérimentale, le mode est très net entre 12,5 et 16 µm ; à droite (b) : un migon chasséen provenant de la couche 17de la Baume de Fontbrégoua ; le deuxième mode (à partir de 63 µm, 4 PHI) est essentiellement constitué de phytolithaires,le troisième, centré sur 8 µm (7 phi), correspond en partie aux sphérolites (d’après Brochier 1983b, modifié).Figure 4. Granulométric distributions, truncated at 2 µm (9 PHI), of some antropogenic dust. Left: experimental wood ash,the mode, between 12.5 and 16 µm, is sharp. Right: middle neolithic « migon », Fontbrégoua cave, level 17; the second mode(from 63 µm, 4 phi, onwards) is principally formed by phytoliths, the third, around 8 µm (7 PHI), arise in part from sperulites(after Brochier 1983b, modified).<strong>Les</strong> phytolithaires siliceuxApparu dans la première moitié du XIX e siècle, le termephytolithaire reste attaché aux noms de Struve, Ehrenberget Darwin. Georges Deflandre, en 1963, en donne la définitionsuivante : « <strong>Les</strong> phytolithaires réunissent tous les corpusculessiliceux d’origine végétale rencontrés isolés àl’état fossile ou subfossile ». On y ajoutera, bien évidement,ceux que l’on observe dans les végétaux actuels. Unconsensus, visant à rassembler sous le terme génériquephytolithaire l’ensemble des minéralisations végétales(oxaliques, siliceuses et carbonatées 1 ) s’est peu à peu imposéces dernières années.1 <strong>Les</strong> phytolithaires carbonatés sont en très large majorité constitués de cellulesracinaires calcifiées (B. Jaillard 1987) ; ils résultent très directementde l’interaction sol-racine et n’ont, bien évidemment, pas de significationanthropique. Ils peuvent cependant apporter d’intéressantes précisions surl’histoire sédimentaire des dépôts archéologiques.On retrouvera dans la littérature francophone deuxtermes pour désigner ces objets : phytolithaire et phytolithe,ce dernier tantôt substantif masculin, tantôt féminin.Le simple respect des règles de priorité dans la nomenclaturegéologique et paléontologique impose le terme phytolithaire(n.m.) créé par Ehrenberg semble-t-il en 1846.L’énorme contribution anglo-saxonne à la discipline à partirde la deuxième moitié du XX e siècle, ignorant les travauxpionniers d’Ehrenberg, a imposé le terme phytolith, quisemble apparaître sous la plume de Ruprecht en 1866. Ilne nous semble pas y avoir de raisons justifiées pour nepas conserver le genre masculin au terme phytolithaire(Deflandre 1963) ou à son dérivé phytolithe (Riquier en1960 hésite entre les deux genres, pour Taugourdeau-Lanzet al. en 1976 phytolithe est clairement un substantif masculin).<strong>Les</strong> deux termes, parfaitement synonymes, peuventêtre employés indifféremment.


<strong>Les</strong> sédiments <strong>anthropiques</strong> – Méthodes d’étude et perspectives 459<strong>Les</strong> phytolithes siliceux prennent naissance dans ou entreles cellules végétales. Ils sont constitués d’un minéral isotrope,hyalin, faiblement réfringent (n = 1,42) : l’opale. Lafaculté de concentrer (activement ou passivement) la silicedans les tissus, à partir de l’acide monosilicique du sol, esttrès inégalement répartie dans le règne végétal. La polymérisationsous forme de gel, puis d’opale (SiO 2, nH 2O), estparticulièrement active dans les organes aériens, ceux danslesquels l’évapotranspiration est maximale. À la mort de laplante (ou à la chute des feuilles et des fruits des végétauxpérennes), les phytolithaires sont incorporés dans les horizonssupérieurs du sol et alimentent le cycle du silicium.Au cours de la formation du phytolithe intracellulaire, lecytoplasme se trouve souvent emprisonné. Cette matière organiqueoccluse, parfaitement protégée de toute pollution,peut être datée par dosage du 14 C résiduel (Wilding et al.1967, Mulholland et Prior 1993).<strong>Les</strong> phytolithaires résistent bien aux températures modérées,celles qui sont les plus fréquemment atteintes dans lesfoyers. Le passage au four des échantillons de référence estd’ailleurs une des deux méthodes de préparation communémentpratiquées (dry ashing). Des modifications, d’autantplus fortes que les phytolithaires sont fins, apparaissentparfois dès 600 °C. Une absence de transformation jusqu’à800 °C est cependant un cas de figure très commun (Runge1998). La reconnaissance, sous le microscope, des phytolithes« brûlés », en dehors des cas où des traces de fusionsont perceptibles, est à la fois difficile et controversée. Ilsemble toutefois que l’on puisse conclure positivement dansles cas de forts brunissements dus à la matière organiqueoccluse. L’incendie de gerbes de blé ou d’avoine, de réservesde paille, ont souvent donné naissance à des verressiliceux bulleux, parfois très colorés, aux compositions chimiquesoriginales (Vélain 1878, Folk 1982 par exemple).<strong>Les</strong> températures atteintes, déduites d’expériences de laboratoiresemblent comprises entre 900 et 1 100 °C. Le lentrefroidissement de ces verres a pour conséquence la cristallisationde nombreuses espèces minérales dont les plusfréquemment rencontrées sont des pyroxènes (augite etwollastonite) ou de la silice (tridymite).<strong>Les</strong> Poacées sont sans conteste les plus gros producteurs.<strong>Les</strong> morphotypes produits ne permettent généralementpas une détermination spécifique ni mêmegénérique; ils permettent cependant souvent de préciser lapartie de la plante d’où provient le phytolithe ; une informationqui n’est pas sans intérêt pour l’archéologue. L’objetphytolithe ne porte pas, en effet, en lui-même, à la différenced’un grain de pollen par exemple, le ou les caractère(s)morphologique(s) caractéristique(s) d’un taxon,que celui-ci soit une espèce, un genre ou une sous-famille.Chaque taxon produit généralement plusieurs formes, denombreuses formes sont communes à plusieurs taxons(Riquier, 1960). Cette particularité est soulignée dansl’abondante littérature anglo-saxonne par les termes demultiplicity et de redundancy.Contrairement à ce que l’on observe dans les végétationstropicales, productrices de nombreux morphotypes souventoriginaux, les végétations tempérées non graminéennesproduisent peu de phytolithaires siliceux spécifiques.Un gros travail de recherche fondamentale estencore nécessaire afin d’utiliser au mieux les potentialitéstaxinomiques des phytolithes.<strong>Les</strong> méthodes de préparation des échantillons détailléesci-dessus permettent d’observer les phytolithaires siliceuxdans d’excellentes conditions. Ceux-ci doivent cependantêtre suffisamment nombreux dans l’échantillon brut, ce quiest généralement le cas des dépôts archéologique récents.<strong>Les</strong> dépôts pléistocènes ou de la première partie del’Holocène, généralement pauvres en phytolithes, nécessitentune préparation plus complexe mettant en jeu un trigranulométrique, une décalcification et une concentrationsur liqueur dense (2,3 < d < 2,4).<strong>Les</strong> dimensions des phytolithes siliceux sont beaucoupplus variées que celles des phytolithes oxaliques (ou desPOCC). Leur taille est comprise dans une large fourchette,entre quelques micromètres et une (parfois même des)centaine de micromètres. <strong>Les</strong> dimensions les plus fréquentessont comprises entre 10 et 50 micromètres(planche photo 1a à f).Compte-tenu de l’excellente résistance mécanique et chimiquede ces poussières, quelques contraintes taphonomiquesdoivent être respectées. Le caractère local de l’accumulation,qu’elle soit naturelle ou anthropique, estcertainement la condition la plus importante. On évitera,par exemple, les dépôts fins des grands fleuves qui rassemblent,dans des proportions difficilement quantifiables, lestémoignages des étages de végétation successifs traversésquelques dizaines, voire quelques centaines, de kilomètresen amont du point d’échantillonnage.La calcite sphérolitiqueCe n’est qu’à partir de 1983 qu’ont été décrites, dans des sédimentsarchéologiques holocènes, des cristallisations calcitiquessphérolitiques de très petite taille d’origine animale,et qu’ont été détaillés leur mode de formation et leur significationarchéologique (Brochier 1983a et suivant). Pendantde nombreuses années, malgré leurs caractères optiques etleurs comportements chimiques, elles ont été considérées,par la plupart des micromorphologues, comme des cristallisationsoxaliques d’origine végétale. De très rares études,


460 GÉOLOGIE DE LA PRÉHISTOIREcomme celle de Horwitz et Goldberg en 1989, font cependantétat de ces cristallisations, décrites comme calcitiques,sans toutefois en tirer toutes les conséquences quant-à la genèsedes sédiments archéologiques holocènes.<strong>Les</strong> dimensions des sphérolites sont comprises entrequelques micromètres et une vingtaine de micromètres. Lemode de la distribution des diamètres se situe aux environsde 10 µm (fig. 4b). Sous le microscope, on peut facilementconstater que les sphérolites présents dans les crottes deruminants sont détruits par l’acide chlorhydrique. À l’issuede cette attaque, seule reste une fine trame organique. Lamême expérience utilisant, cette fois, l’acide acétique diluédonne le même résultat. Il est donc clair que ces sphérolitesne sont pas oxaliques puisque les oxalates de calciumne sont pas solubles dans l’acide acétique. L’étude par diffractiondes RX, d’échantillons contrôlés sous microscope,extraits de crottes de petits ruminants met en évidence, enplus des oxalates de calcium végétaux et des grains silicatésdétritiques, la calcite.<strong>Les</strong> teintes d’interférence, dans le premier et le début dusecond ordre pour les diamètres les plus fréquents, sont cependanttrop basses pour la calcite même si l’on tientcompte des phénomènes optiques propres aux arrangementssphérolitiques (Morse et al. 1932). En d’autre terme,la différence de marche apparaît trop faible pour l’épaisseurapparente de matière traversée. Tout se passe comme si lesphérolite était soit lacuneux (Brochier 1996), soit composépour partie d’un matériau (minéral ou organique) de faiblebiréfringence (Canti 1998). Nos observations de sphérolitesactuels au MEB (Brochier 1992, fig. 4) plaident plutôt pourla première hypothèse. Celles de M.G. Canti (1997) mettenten évidence des corps sphériques à sub-sphériques de trèspetite taille, à surface lisse ou faiblement granuleuse, quinous semblent plus proches des statospores de chrysophycées(cf. infra) que des sphérolites.La quantité de calcite sphérolitique contenue dans unecrotte de mouton est relativement importante. Un simpledosage au calcimètre donne 9,3 %. Sachant qu’une crottede mouton contient environ 72 % de matière organique, laquantité de calcite sphérolitique présente dans un échantillonminéralisé (i.e. archéologique) serait d’environ 33 %.<strong>Les</strong> sphérolites sont peu sensibles aux faibles températures.Dans toutes nos expérimentations, un passage aufour en atmosphère oxydante à 500 °C d’une crotte demouton suffit à transformer tous les oxalates de calciumvégétaux en calcite (POCC). <strong>Les</strong> sphérolites ne sont pas affectéssi ce n’est qu’ils deviennent foncés, parfois mêmepresque opaques. Ce phénomène est sans doute lié à lacarbonisation de la trame organique. Ils conservent leurcaractères optiques, et en particulier leur croix noire, sousun éclairage puissant. Ce n’est qu’entre 500 et 560 °C queles POCC et les sphérolites sont détruits. L’identité de com-Tableau 1. Présence de calcite sphérolitique dans les excréments de quelques mammifères domestiqueset sauvages (d’après J.E. Brochier 1996 et M.G. Canti 1997).Espèce Présence Présence occasionnelle AbsenceDromadaireChèvre (femelle)Mouton (femelle)VacheCochonÂneChevalAgneauCerfChevreuil (jeune mâle)Mouflon (mâle)Gazelle (Gazella gazella, mâle et femelle)ChamoisSanglierBouquetinBison (Bison bonasus)GirafeLièvreLapinXXXXXXXXXXXXXXXXXXX


<strong>Les</strong> sédiments <strong>anthropiques</strong> – Méthodes d’étude et perspectives 461portement, lors d’une élévation de température, des POCC(en calcite) et des sphérolites plaide en faveur d’unemême nature minéralogique.<strong>Les</strong> sphérolites se conservent mal s’il ne sont pas très rapidementenfouis. Quelques mois suffisent, par exemple,pour les éliminer d’une crotte de mouton soumise aux intempéries.Il sont ainsi plus rarement découverts dans lessites de plein air que dans les sites abrités.<strong>Les</strong> risques de confusion avec d’autres objets de taillesemblable sont faibles. Nous avons discuté ailleurs les casles plus fréquents : POCC de druses oxaliques et quelquesformes de coccolithes (Brochier 1993, 1996). Ajoutons lespetits sphérolites associés aux logettes de diapause deslombrics (Kretzschmar 1987), les sphérolites finement radiésproduits par les cyanobactéries (Verrecchia et al.1995), les cristallisations sphérolitiques de sidérite, en milieuréducteur (Gebhardt et Langohr 1996) et même lesgrains d’amidons. Tous ces objets laissent apparaître, entrenicols croisés, une croix noire plus ou moins nette. Uneobservation attentive des caractères morphologiques et optiqueslève, en général, toute indétermination.L’examen du contenu des quatre poches stomacales d’unmouton montre que les sphérolites en sont absents. Ils n’apparaissentque dans les premiers centimètres de l’intestingrêle ce qui suffit à établir que les sphérolites ne proviennentpas de la nourriture des animaux (Brochier et al., 1992).L’analyse de crottes de chèvre de même race, mais appartenantà des troupeaux différents, distants de quelqueskilomètres, montre qu’à alimentation semblable, la productionde sphérolites peut être fort différente puisque certainstroupeaux sont producteurs et d’autres pas.Ces deux observations établissent que la production n’estpas simplement contrôlée par un mécanisme chimique (lachute du pH est brutale dans la zone de cristallisation) maissans doute aussi par la flore bactérienne. Il n’en reste pasmoins qu’il reste difficile de prévoir si un animal est ou nonproducteur avant analyse. Même des animaux qui produisentsystématiquement des sphérolites dans le sud de la Francepeuvent, parfois, ne pas en produire ailleurs, comme l’onmontré les recherches de M.G. Canti en Grande Bretagne.La liste des animaux, principalement des ruminants, susceptiblesde produire des sphérolites est donnée dans le tableau1. Elle montre que les animaux domestiques, aussibien que les sauvages, peuvent être producteurs.<strong>Les</strong> sphérolites peuvent être observés aussi bien en lamemince qu’en utilisant la méthode de préparation préconiséeplus haut, pour peu qu’ils soient abondants dans leséchantillons. Si l’on s’intéresse aux premiers moments dela domestication des ruminants (la présence de quelquessphérolites, même très rares, a alors des implications importantes),ou si l’on travaille sur des sédiments ayant subiune certaine altération, il est de loin préférable d’observerdes décantations (Brochier 1993).<strong>Les</strong> algues siliceusesDeux groupes d’algues unicellulaires peuplant les eauxdouces sont régulièrement présents, voire abondants, dansles terres archéologiques : les diatomées (présentées dansun autre chapitre de ce livre) et les chrysophycées. <strong>Les</strong> diatoméessont représentées par leurs frustules dont la formeet l’ornementation sont d’excellents caractères taxinomiques.<strong>Les</strong> chrysophycées nous sont seulement connues parleurs statospores, enveloppes siliceuses plus ou moinssphériques, plus ou moins ornementées, possédant unpore (obturé chez le vivant par un bouchon) qui permet àla cellule de migrer et de survivre à l’intérieur de l’enveloppelorsque les conditions deviennent défavorables. Denombreux caractères descriptifs ont été utilisés depuislongtemps pour construire une parataxinomie, d’abord surle modèle linnéen dans les années 30 (travaux deFrenguelli, Andrieu, Deflandre, Rampi, Nygaard… ; les statosporesétaient alors isolées dans un sous ensemble deschrysophycées : les chrysostomatacées) puis selon un systèmemoins structuré mais néanmoins adopté par l’ensembledes algologues et paléolimnologues (Duff et al.1995). Il reste que pour l’instant, l’attribution d’une statosporeà un genre ou une espèce de chrysophycée reste exceptionnelle,ce qui n’est plus un obstacle majeur à leurutilisation dans recherches paléo-environnementales(Lotter et al. 1997, 1998 par exemple).La conservation de ces restes siliceux (opale) est relativementbonne. <strong>Les</strong> frustules de diatomées sont cependantbeaucoup plus fragmentées et corrodées que les statosporesde chrysophycées. Ce fait, remarqué depuis fortlongtemps (1936) par Georges Deflandre, reste inexpliqué.La taille des statospores est minuscule : de quelques micromètresà une vingtaine de micromètres seulement(planche photo 1g et 2e). Communes, voire fréquentes,dans les échantillons, elles restent peu visibles (et surtoutnon quantifiables) dans les lames minces. Elles peuventêtre, par contre, parfaitement observées et décomptées àpartir de décantations, en lumière polarisée ou encontraste interférentiel Nomarsky.<strong>Les</strong> frustules, comme les statospores, ne sont pas liées àun faciès géoarchéologique particulier. Dans certainssites, elles sont liées aux faciès de parcage des herbivoresdomestiques ; dans d’autres, la situation est inverse, puisqu’ellesse retrouvent en abondance seulement dans lesfaciès d’habitation. Bons marqueurs de la fréquentation


462 GÉOLOGIE DE LA PRÉHISTOIREhumaine et/ou animale des zones humides, c’est avanttout dans l’approche micro-chronologique qu’elles sontutiles au géoarchéologue.De l’information ponctuelle, anecdotique,à la zonation et à l’évolution.La technique de préparation décrite plus haut se prêtebien à l’estimation semi-quantitative des différents constituants.On peut utiliser une échelle à cinq classes d’abondance: 0 – absent, 1 – présent, 2 – rare, 3 – moyen et4 – abondant. Une sixième classe – dominant – est parfoisnécessaire dans les sites d’abris sous roche ou de grottedans lesquels quelques types de poussière forment, à euxseul, la majeure partie du sédiment.Il est également possible de traiter les fréquences absolues(n type x/g), plus laborieusement obtenues, en utilisantles méthodes mises au point par les palynologues : contrôledu poids et des volumes (Cour 1974) ou méthode baséesur l’adjonction d’une quantité connue de spores de lycopodesà l’échantillon (Stockmarr 1971).Que l’on choisisse l’option semi-quantitative ou quantitative,les décomptes de poussières (et les autres descripteursgéoarchéologiques) se prêtent parfaitement à l’analysestatistique. <strong>Les</strong> méthodes factorielles, AFC simples oumultiples et classifications hiérarchiques, débouchent surla détermination des faciès et sur la zonation géoarchéologique.L’analyse des correspondances multiples, en particulier,permet de croiser les informations hétérogènesissues de l’analyse géoarchéologique : information qualitative(chroma et value Munsell, par exemple), semi-quantitative(classes d’abondances des différentes poussières <strong>anthropiques</strong>ou détritiques) ou quantitative (résultatsd’analyses chimiques ou morphologiques). C’est grâce auxtechniques de l’analyse des données qu’il est possible d’obtenirune image synthétique des processus sédimentaires.Des critères de signification génétique ou dynamique inconnueprennent alors un sens. <strong>Les</strong> associations pertinentesde descripteurs, qui ne sont pas autre chose que desfaciès géoarchéologiques, sont propres à chaque site etdoivent être, en conséquence, à chaque fois reconstruites.Dans la séquence de Font-Juvénal, par exemple, les associationsdes descripteurs de la fraction limoneuse (poussières<strong>anthropiques</strong>) définissent trois faciès : les faciès decombustion (i.e. faciès d’habitation), les faciès de parcageet les faciès mixtes dans lesquels sont présentes en proportionéquivalente tous les types de poussières. Chacun de cesfaciès est caractéristique d’organisations et d’activités spécifiques.Reportés dans la stratigraphie (fig. 5), ils permettentd’effectuer une zonation géoarchéologique significativedes activités qui se sont déroulées dans le site.Il est souvent possible de trouver une signification, archéologiqueou environnementale, aux axes factoriels. Laposition des points échantillon sur ces axes permet alorsde restituer l’évolution de quelques paramètres fondamentaux.C’est ainsi, par exemple, qu’il a été possible d’obtenirune courbe synthétique d’évolution du degré d’anthropisationdu sédiment dans et à proximité du marais de laResclauze dans l’Hérault; d’obtenir, également, une restitutiondes débits de la source qui alimentait le marais entrele Néolithique ancien et l’époque romaine. Sur celle-ci(fig. 6) apparaissent très nettement trois périodes de crisesxériques : la première au Néolithique ancien entre 4500 et3900 BC, la deuxième au néolithique moyen vers 3400 BCet la troisième à l’époque romaine (l’assèchement est alorsdû à un captage). Si la troisième crise est anecdotique etclairement d’origine anthropique, les deux premières,mises en évidence dans d’autres sites du sud de la Franceou du nord de l’Espagne (elle y sont responsables de fortesérosions des formations superficielles) semblent être généraleset d’origine climatique.L’analyse canonique des correspondances (ACC) ouvre,quant-à elle, la voie à un croisement, réel et objectif, desdonnées géoarchéologiques et environnementales, pourpeu que l’on ait réalisé les échantillonnages conjointement.Poussières et micro-chronologieLe concept de couche archéologique, ou mieux d’unité archéologiqueminimale, est la pierre angulaire de toute démarchearchéologique. Dans les sites de milieu humide, lahaute résolution temporelle, atteinte grâce aux recherchesdendrochronologiques, autorise l’archéologue à aborderdes sujets centraux : démographie, cycles agro-pastoraux…(Lambert et al. 1983 ; Petrequin et al. 1998), aujourd’huiencore inaccessibles à partir des sites de milieu sec.<strong>Les</strong> exemples qui suivent illustrent le rôle que les poussières<strong>anthropiques</strong> peuvent jouer, en milieu sec, dans l’affinementde notre perception du temps.Arrêt de sédimentation<strong>Les</strong> sphérolites, les POCC, constitués de cristaux de très petitestaille, donc à grande surface spécifique, se sont révéléstrès sensibles à la dissolution. Handicap dans certains cas,ce caractère est particulièrement intéressant lorsqu’il s’agitd’obtenir, à des fins archéologiques, le découpage le plusfin des unités sédimentaires. <strong>Les</strong> hiatus que l’on peut ainsisouligner peuvent être brefs, parfois de l’ordre du siècle.L’échelle d’altérabilité que fournissent les sédiments <strong>anthropiques</strong>est la suivante : disparition des oxalates de calcium,disparition de la cellulose, disparition des sphérolites,disparition des POCC, et, enfin, corrosion puis


<strong>Les</strong> sédiments <strong>anthropiques</strong> – Méthodes d’étude et perspectives 463disparition de l’opale biologique. Seuls subsistent, en casde longs hiatus, les micro-charbons. Ils confèrent alors ausédiment une teinte particulièrement sombre. Nombre defoyers ou de couches paléolithiques apparaissent ainsi surle terrain comme des horizons foncés qui semblent très différentsde leurs homologues holocènes.L’utilisation des sédiments <strong>anthropiques</strong> dans la mise enévidence de lacunes repose principalement sur l’observationde l’évolution stratigraphique des POCC, des carbonatesfins (dosage calcimétrique), des sphérolites, des microcharbons(éventuellement de la perte au feu à 500 °C), deschroma et value Munsell, des coccolithes (sensibles,comme tout carbonate fin, à la dissolution) et de l’opalebiologique (les diatomées et les fines incrustations épidermiquesdes Poacées sont les éléments les plus fragiles). Ontrouvera dans les études consacrées à la Balma Margineda(Brochier 1995, 1998) ou à Çayönü (Brochier 1993), descas concrets analysés en détail.Algues d’eau douce et rythmes d’occupation<strong>Les</strong> travaux des (paléo)limnologistes, et plus particulièrementdes phycologistes, ont montré les liaisons exis-Figure 5. Zonation géoarchéologique du Néolithique de l’abri de Font-Juvénal. <strong>Les</strong> faciès sont déterminés par une analysefactorielle des correspondances multiples couplée à une classification ascendante hiérarchique.De gauche à droite : relevé de coupe, position des échantillons et unités archéologiques ; NM/R : transition Néolithique moyen-Néolithique récent ; CE : Chasséen évolué ; CC : Chasséen classique ; CA : Chasséen ancien ; NAE : Néolithique ancien évolué ;chronologie 14 C (BC) ; proposition de zonation, en blanc : horizons très riches en fumier ovi-caprin ; en hachures verticales :horizons très riches en cendre ; en grisés de plus en plus foncés : facies mixtes de plus en plus chargés de poussières<strong>anthropiques</strong> variées (d’après Brochier 1990).Figure 5. Geoarchaeological zonation of neolithic deposits at Font-Juvénal rock-shelter. Facies are established with assistanceof multiple correspondance analysis and hierarchical clustering. From left to right: field section, archaeological units;NM/R: transition between middle and late Neolithic; CE: late Chasséen; CC classical Chasséen; NAE: late ancient Neolithic;chronology 14 C (BC); proposed zonation, white: manure rich levels; vertical hatching: ash rich levels; grey (more and more dark):mixed facies more and more anthropogenic (after Brochier 1990).


464 GÉOLOGIE DE LA PRÉHISTOIREFigure 6. Restitutionfactorielle des deux moteursprincipaux dela sédimentation dansle marais de Gabian-LaResclauze.1. Le premier facteur est unfacteur « d’anthropisation »;les points échantillons ontdes abscisses d’autant plusfortes que les sédimentsd’origine anthropiqueconstituent une partimportante de l’échantillon.2. Présence cumulée desdescripteurs de l’habitat.Chaque carré correspondà l’occurrenced’un descripteur ayant traità la présence humaine.En noir : silex, os ou charbon ;en hachures verticales : POCC ;rond noir : fragment de testbrûlé de gastéropode ;en grisé : empreintesde monocotylédones brûlées ;en blanc : élémentsallochtones dans les diversesfractions granulométriques.3. Le deuxième facteurrestitue l’activité dela source (d’après Brochier1990).Figure 6. Factorial reconstruction of the two main causes of sedimentation in Gabian-La Resclauze marsh.1. The first factor is an anthropogenic one; samples points have high abscissa when anthropogenic deposits form a importantpart of the sample.2. Black: flint, bone or wood-charcoal; vertical hatching: pocc; black dot: burnt gastropod shell; grey: prints of burned Poaceae;white: allochtonous material.3. The second factor reconstruct the spring flow (after Brochier 1990).tantes entre les variables physico-chimiques (température,pH, conductivité, [PO 4], [NO 3]…) caractérisantl’eau des lacs et la composition de leur flore algaire. Ilest apparu que l’équilibre entre diatomées et chrysophycéesétait fortement dépendant de l’état trophique du milieu.<strong>Les</strong> périodes d’eutrophisation rapide, correspondantgénéralement à une perturbation anthropique dubassin versant, entraînent la prolifération des diatoméeset la raréfaction des chrysophycées d’où l’indicateur D/C(nombre de frustules/nombre de statospores) proposépar J.-P. Smol en 1985.<strong>Les</strong> conditions de conservation des algues siliceusessont relativement mauvaises en milieu archéologique comparéesà celle que l’on rencontre dans les milieux lacustresou palustres ; les diatomées, en particulier, y sontsouvent très fragmentées. L’indicateur D/C dépend doncégalement des phénomènes de conservation différentielle(Brochier 1993). Pour ces mêmes raisons, il paraît beaucoupplus simple de compter tout fragment de valve dediatomée comme une unité et non, comme dans la définitionoriginelle, deux valves pour une frustule. Le problèmene se pose pas pour les statospores qui sont toujours retrouvéescomplètes.<strong>Les</strong> dépôts du Néolithique moyen de la Baume deFontbrégoua dans le Var fournissent une bonne illustrationdes potentialités offertes par l’étude des algues siliceusesd’eau douce. La baume, vaste caverne creusée dans les dolomies,s’ouvre à mi-versant au dessus du ruisseau duJonquier, dans le lit duquel des dépôts palustres et travertineuxn’ont cessé de s’accumuler pendant la plus grandepartie de l’Holocène. <strong>Les</strong> dépôts d’âge néolithique moyen sedécomposent, sur 110 cm environ, en une quinzaine d’unitéssédimentaires qui ont pour caractère principal une trèsforte charge en poussières (phytolithaires et sphérolites


<strong>Les</strong> sédiments <strong>anthropiques</strong> – Méthodes d’étude et perspectives 465principalement) dérivées de l’accumulation d’excrémentsde petits ruminants (Brochier et al. 1992). <strong>Les</strong> algues siliceusesd’eau douce, très fréquentes, montrent que le ruisseaudu Jonquier était régulièrement visité par les troupeaux.La grotte, pendant toute cette période, est utiliséeuniquement comme abri pour le bétail. <strong>Les</strong> datations absoluesdisponibles se rassemblent en deux groupes homogènes(aux sens du χ 2 ) : le premier autour de 4350 cal. BC,le second autour de 3790 cal. BC. Autrement dit, la sédimentationapparaît instantanée pendant deux courtes périodesséparées par trois à cinq siècles. Ce caractère trèsrapide de la sédimentation est également démontré parl’énorme part que prennent les poussières <strong>anthropiques</strong>dans le sédiment (jusqu’à 58 % de limon, alors que partoutailleurs dans ce remplissage, très largement formé desables dolomitiques, ils oscillent autour de 10 %). Tout sepasse comme si, pendant ce court moment, les apports détritiquesétaient dilués dans d’énormes masses organiques.La question qui se pose alors, celle qui intéressera évidemmentle plus l’archéologue, est la suivante : deuxcourtes (?) périodes d’utilisation de la cavité par les bergerssemblent démontrées par les mesures du radiocarbone ; n’yen aurait-il pas plus, que dosage du 14 C, à la limite de sespossibilités compte-tenu des rapides vitesses d’accumulation,ne pourrait distinguer ? En d’autres termes, en combiend’unités archéologiques cohérentes l’ensemble néolithiquemoyen chasséen de Fontbrégoua peut-il être scindéet quelles sont les limites les plus judicieuses ?Une solution peut être trouvée en considérant l’évolutionde la fréquence des diatomées dans l’ensemble des alguessiliceuses (fig. 7). Trois cycles d’allure semblable –brusque augmentation suivie d’une dégression régulière –se succèdent durant ce court laps de temps. Chaque cycleest le reflet d’une brutale perturbation qu’il est légitimed’attribuer, compte-tenu des faciès rencontrés dans lagrotte, à une trop forte pression pastorale, à laquelle succèdeun lent retour vers des conditions plus oligotrophes.On peut y voir (une information à très haute résolution seraitnécessaire pour conclure), par exemple, la successionde décennies au cours desquelles, chaque année, la grottereçoit le troupeau et de décennies au cours desquelles l’exploitationdu vallon par les bêtes reste exceptionnel.L’utilisation pastorale du secteur apparaît ainsi très complexe; mais il est clair qu’un découpage en trois phases(sans doute très courtes, séculaires) est certainement plusconforme à la réalité. Enfin, on notera que l’évolution del’indicateur D/C peut permettre d’établir des corrélationsfines entre différents secteurs du site et, sans doute également,entre les différents sites néolithiques connus dans levallon du Jonquier et ses abords immédiats.Figure 7. Algues siliceuses et micro-chronologie. Évolutionde la fréquence relative des frustules de diatomées(par rapport à la somme frustules de diatomées et statosporesde chrysophycées) dans l’ensemble chasséen (couches 8-9à 27-28) de la Baume de Fontbrégoua (Var). Trois phasesde perturbation forte, occasionnant une certaineeutrophisation des zones palustres, se succèdent sur uneépaisseur de 110 cm ; elles sont suivies d’un retour progressifà la normale indiquant un relâchement (cycles plus longs,périodes d’utilisation plus courtes…) de la pression anthropique.Figure 7. Siliceous algae and micro-chronology. Evolution ofthe relative frequency of diatom frustules (against the sumdiatom frustule plus chrysophytes statospores) in the middlenéolithic, Chasséen, (level 8-9 to 27-28) of Fontbrégoua cave(South France, Var). Three strong anthropogenic disturbancepériod, giving rise to eutrophisation of marshes, followed oneanother through 110 cm depth; a progressive return toa normal state point to a decrease of anthropic pressure(longer cycles, shorter periods of use…).


466 GÉOLOGIE DE LA PRÉHISTOIREMicrocharbons, suie et spéléothèmes.Vers une résolution annuelleSuie et micro-charbons, en contexte karstique, peuventfournir au géoarchéologue de précieuses informationsmicro-chronologiques. <strong>Les</strong> cas sont rares, exceptionnelsmême, mais les indications sur les durées et les rythmesd’occupation, généralement inaccessibles à l’archéologue,permettent alors de discuter d’un des concepts centraux enarchéologie : celui d’unité archéologique minimale.Sur les parois des entrées de grotte ou des abris-sousrochese déposent parfois des enduits stalagmitiques quiprennent, comme les stalagmites et stalactites, le nom génériquede spéléothèmes. Ceux-ci, qu’il est parfois difficilede distinguer des stromatolites, sont formés d’un empilementde doublets calcitiques dont les termes sont caractériséspar des fabriques différentes. <strong>Les</strong> films de calcite engrand cristaux, souvent palissadiques, absorbant la lumièreréfléchie et apparaissant donc sombres, sont nommées parcommodité DCL (Dark Compact Laminae) ; les films decalcite finement divisée, réfléchissant fortement la lumière,sont nommés WPL (White Porous Laminae) (Genty et al.1994). Le caractère annuel de ces doublets, véritables« varves carbonatées », semble bien être le cas général(Baker et al. 1993, Genty et al. 1994, 1997).Quelques rares cas d’inclusion de matières carbonées ausein des doublets ont été signalés dans des spéléothèmesrécents (grotte de Domitsa en Tchécoslovaquie, mentionnédans le Précis de géologie de Aubouin et al., p. 326; grottede Han-sur-<strong>Les</strong>se en Belgique, Genty et al 1997); ils laissentdeviner le potentiel de ce type de témoignage de laprésence humaine pour le géoarchéologue. Bien plus surprenanteencore est la découverte de restes charbonneuxdans une stalagmite prélevée au plus profond du systèmekarstique de Couffin-Chevaline, dans le Vercors. Ici, il n’estplus question de fréquentation humaine de cette zone profonde,inaccessible sans les techniques d’exploration modernes,mais de témoignages de l’activité de charbonniersqui, au XIX e siècle, produisaient le charbon de boisquelques centaines de mètres au dessus de la caverne surle plateau des Coulmes (Perrette et al. 1997).À notre connaissance, la première application à des problèmesgéoarchéologiques a été réalisée à partir de mincesfragments de spéléothèmes retrouvés dispersés dans les dépôtstardiglaciaires d’un abri-sous-roche pyrénéen d’altitude,la Balma de la Margineda. Ces fragments sont fins, rares ettrès petits, toujours largement inférieurs au centimètre carré.Ils justifient, à eux seuls, l’observation méticuleuse de tousles éléments grossiers extraits d’échantillons volumineux.Sans entrer dans les détails d’une analyse complexe, il apparaîtque ce sont uniquement les lamines WPL qui sont noirciespar un fin dépôt interprété, en référence à des observationsactuelles, comme de la suie (fig. 8). On remarque que lesfragments récoltés dans quelques unités sédimentaires successivesprésentent une telle similitude dans les rythmesd’occupation (absence ou présence de film de suie) qu’ilfaut conclure à une seule période séculaire de concrétionnement.Que cette période, enfin, représente une partie (ou latotalité) du temps correspondant à une seule couche archéologique(Brochier 1997, 1998).<strong>Les</strong> caractères climatiques locaux actuels et les processushydrologiques associés, largement conditionnés par le reliefet l’enneigement, ne font que conforter le caractère annueldes doublets. La couche archéologique, azilienne, apparaîtainsi résulter du cumul (et non pas être un palimpseste)de très nombreux (n > 30) passages annuels, parfoisconsécutifs, toujours à la même période de l’année. Au delàde l’information archéologique : l’abri n’était occupé quequelques mois dans l’année, régulièrement, toujours à lamême saison, par un groupe de chasseurs(-cueilleurs) debouquetins, qu’il était donc intégré dans un parcours le reliantà d’autres sites, l’information fondamentale est certainementcelle qui oblige à considérer la couche archéologiquecomme un objet composite et cumulatif. En d’autrestermes, que le synchronisme des différents témoins recueillisdans cette couche unique (industrie, faune… etstructures) est bien loin d’être assuré.Ce constat risque bien d’être le cas de figure généraldans les dépôts de grotte et d’abri-sous-roche. Il nouscontraint à admettre que l’approche spatiale d’une unitéarchéologique minimale, aussi mince soit elle, n’a guère desens et de crédibilité tant que nous n’aurons pas lesmoyens d’assurer le synchronisme à haute résolution (i.e.annuelle) de tous les témoins exhumés.Quand tous les grains sont <strong>anthropiques</strong>Étables et bergeriesDès les débuts de l’élevage, le marqueur spécifique, lesphérolite, se retrouve dans les habitations, à proximité, oudans les lieux réservés à cette activité. La présence dequelques sphérolites dans les terres d’un site où l’on suspecteles petits ruminants d’être domestiqués est suffisantepour conclure, même si les caractères ostéologiques sontencore peu convaincants. C’est ainsi que sur le site PPNBde Çayönü, en Turquie, la domestication est nette, si l’on sefie à l’analyse microscopique des poussières, quelquessiècles avant que les critères ostéologiques soient probants(Brochier 1993). La possibilité d’échantillonner dans lacavité médullaire des os longs permet de prendre encompte le matériel conservé dans les collections, et d’avoirainsi accès à des sites depuis longtemps disparus.


<strong>Les</strong> sédiments <strong>anthropiques</strong> – Méthodes d’étude et perspectives 467Pour peu que les conditions taphonomiques soient favorables,que le troupeau soit longtemps maintenu en un lieuunique, le sphérolite, éventuellement associé à d’autrespoussières (phytolithaires et algues siliceuses principalement),va constituer des accumulations sédimentairesconsidérables.<strong>Les</strong> recherches géo-éthnoarchéologiques conduites cesdernières années en Sicile et en Grèce ont permis de préciserla mise en place, les traitements et l’évolution des accumulationsd’excréments (Brochier et al. 1992, Acovitsioti-Hameau 2000).L’accumulation des crottes des moutons et des chèvresest extrêmement rapide. En fonction de l’hydratation desfèces, et donc de l’animal, de son régime alimentaire et dela saison, les faciès observés sont différents ; ils vont del’accumulation aérée et plus ou moins mobile de crottes dechèvres (ou de moutons en été), aux plaques dures et tasséesproduites par les brebis. <strong>Les</strong> parois de la grotte, ou dubâtiment, dans lequel sont abritées les bêtes sont usées parla laine poussiéreuse des animaux, suivant une bande dequelques décimètres de largeur comprise entre 40 et65 cm au dessus de la surface du sol. Le poli obtenuconserve ses caractères morphologiques macroscopiquespendant des millénaires. L’abrasion est telle qu’elle peutêtre suffisante pour effacer partiellement les profondssillons de quelques gravures paléolithiques ; celles de lagrotte Chabot en Ardèche en sont un bon exemple. Dans lesgrottes ou les abris ayant été utilisés pour l’élevage pendantdes siècles, il est facile de retrouver, plusieurs mètres audessus du sol, de tels polis ; leur découverte, avant toute interventionarchéologique, indique clairement la fonctionprincipale du site et les faciès qui y seront rencontrés. Cespolis perchés permettent d’imaginer les énormes quantitésde crottes qui se sont accumulées ; ils permettent égalementde prendre conscience de l’énorme réduction de volumequi s’est produite au fil des siècles consécutivement àla disparition de la matière organique.Celle-ci se produit soit progressivement, soit brutalementpar brûlage.En milieu abrité, il faut entre un et sept siècles pour quela bio-minéralisation soit totale. Il est difficile d’estimerprécisément la réduction de volume qui en résulte. Si l’onenvisage seulement la réduction pondérale, l’ordre degrandeur de la partie minérale restante est du quart de lamasse initiale ; la marge d’erreur est cependant grandepuisque ceci dépend de l’animal (est-il producteur desphérolites ?), de son alimentation (quelle est la part desPoacées dans son régime ?) et des caractéristiques du ter-Figure 8. Suie, spéléothème et micro-chronologie. LaminesDCL, WPL et films de suie restitués en fausses couleurs. Aziliende la Balma de la Margineda en Andorre. En vert les lamineswpl, en bleu les lamines DCL. <strong>Les</strong> différents passages, misen évidence par les films de suie (en rouge), sont toujoursassociés aux lamines WPL ; ils ont donc toujours eu lieuà la même période de l’année. On peut démontrer qu’ilscorrespondent à une seule unité archéologique qui prendainsi un caractère composite évident (d’après Brochier 1998,modifié).Figure 8. Soot, speleothem and micro-chronology. DCL, WPLand soot films shown in false colors. Azilian from Balma de laMargineda (Andorra). Green: WPL laminae; blue: dcl laminae.The presence of the hunters, proved by soot film (in red), isalways associated with WPL laminae; they thus occur at thesame period of the year. It can be demonstrated that all thesoot films correspond to only one archaeological unit, whichin turn take an obvious cumulative nature (after Brochier1998, modified).


468 GÉOLOGIE DE LA PRÉHISTOIRErain de parcours (les pâturages sont-ils secs ou humides?La contamination des feuilles par les poussières détritiquesse fera dans des proportions bien différentes, Healy etLudwig 1965). À cette réduction pondérale s’ajoute uneforte réduction de volume. <strong>Les</strong> accumulations de crottesd’herbivores, même dans leur faciès les plus compacts, ontune forte porosité. Celle-ci devient énorme si l’on prend encompte les fibres végétales destinées à disparaître (planchephoto 2a et b). <strong>Les</strong> faciès fossiles correspondants ont uneporosité plus faible; ils prennent même parfois une structureporphyrique. La comparaison des densités de sphérolitesdans un échantillon actuel de la grotte d’Uzzo, enSicile, et dans un échantillon néolithique de la grotte del’Abeurador donne une juste idée de l’énorme réduction devolume que peuvent subir les accumulations de crottes aucours des siècles (fig. 9, planche photo 2e et f).Le sédiment, très fin, est le plus souvent formé de 60 à70 % de particules d’un diamètre compris entre 2 et50 mm dont la distribution granulométrique est caractéristique(fig. 4b). <strong>Les</strong> accumulations de phosphates decalcium y sont fréquentes, sous forme de croûtes ou depetites concrétions sub-sphériques creuses à surface lisseet mamelonnée.Ces faciès « résiduels », ces concentrés minéraux, danslesquels sphérolites et phytolithaires sont les composantsmajoritaires, sont ainsi le signe d’énormes réductions devolume. Celles-ci se signalent sur le terrain par de largesstructures en berceau, dans lesquelles, pour des raisonsgéométriques simples, les couches se redressent très fortementà l’approche des parois lorsque celles-ci ont une certaineobliquité (Brochier 1992, fig. 11).Dans ces conditions, il est clair qu’une crotte qui auraitconservé sa forme au début de la phase de minéralisationlente (les crottes de chèvre, sèches et résistantes, sont parfoispréservées dans les plaques denses formées de crottesde brebis écrasées), devient vite méconnaissable. Ce nesont d’ailleurs pas dans ces faciès que le fouilleur découvredes coprolithes. La concentration de la partie minérale desFigure 9. Évolution séculaire des fumiers et des migons. Supposons, pour simplifier, que les périodes d’utilisation de la bergeriesont saisonnières et annuelles. a : quelques dizaines d’épisodes de parcage se succèdent. À la fin du dernier, après une périodede séchage estival, les pasteurs assainissent la bergerie par brûlage (b) ; des banquettes imbrûlées subsistent dans les zonesrestées humides (proximité des parois, égouttoirs) ; le contact brûlé/imbrûlé est souligné par un liseré d’aspect charbonneux.c : les épisodes de parcage reprennent et nivellent, peu à peu, le relief. d : un nouvel assainissement par brûlage est pratiqué ;il est à nouveau suivi de quelques épisodes de parcage. e : quelques siècles plus tard, la minéralisation lente terminée,les niveaux imbrûlés sont réduits à leur charge minérale (principalement phytolithaires, sphérolites et poussières détritiques) ;les cendres, correspondant à une (ou quelques) année(s) de parcage seulement, prennent alors une place aussi importante,voire plus, que les dépôts issus d’une minéralisation lente, déposés pendant des dizaines voire des centaines d’années.Figure 9. Secular evolution of manure and migon deposits. a: ten or so annual folding occur. After a summer period of drying,shepherds disinfect the sheep pen through burning (b); unburnt banks remain in humid places; a black carbonaceous filmunderline the contact between burnt and unburnt material. c: folding periods resume and level the surface. d: a new burningoccur; several folding occur next. e: some century later, slow mineralisation achived, unburnt levels are reduced to their mineralcontent (phytoliths, spherulites and detritic dust); ashes, corresponding to one (or some) year, take as much thicknessas slow mineralised deposits corresponding to tens (or hundred) years.


<strong>Les</strong> sédiments <strong>anthropiques</strong> – Méthodes d’étude et perspectives 469crottes a pour autre conséquence d’augmenter la fréquence,extrêmement faible dans les dépôts actuels, desdents lactéales rhizolysées perdues par les animaux sur lelieu du parcage (Helmer 1984).Le second mode de minéralisation des accumulationsorganiques issues de l’élevage est le brûlage. <strong>Les</strong> enquêtesethno-archéologiques indiquent qu’autrefois lesbergers y mettaient le feu dans le but d’assainir la bergerieen cas de maladie du troupeau. Aujourd’hui, cettemotivation a disparu et le brûlage n’est plus effectué quepour réduire le volume des fumiers accumulés, sansavoir à les extraire manuellement.La période de mise à feu est, semble-t-il, toujours ledébut de l’automne, après une longue période d’inoccupationet de séchage, en préalable à une nouvelle utilisationde la bergerie. L’allumage est facile : on ajoute un peu depaille ou des branches à quelques plaques soulevées etmises en tas. La combustion ne produit pas en un feu vif,avec flammes, mais se réduit à un feu qui couve et progresselentement ; un feu de profondeur au sens deA. Metro (1975). <strong>Les</strong> avis convergent pour reconnaîtrequ’il serait très difficile de l’arrêter une fois allumé. Lacombustion dure très longtemps (deux mois pour la dernière,dans la grotte 2108A représentée figure 10).Le sol de la bergerie est alors couvert d’une couche decendre très poreuse ; le feu a épargné les secteurs les plushumides (proches des parois, sous les égouttoirs) qui subsistentsous la forme des banquettes et de petits îlots(fig. 10, planche photo 2l) surplombant d’une trentaine decentimètres la surface du sol. Cette hauteur varie, évidemment,avec l’hydratation. Le contact cendre/fumier est soulignépar un mince horizon charbonneux noirâtre rougissanten profondeur. Banquettes et accumulations cendreusessont rapidement recouvertes par une nouvelle couche decrotte au cours de la nouvelle utilisation de la bergerie,alors que se poursuit la lente réduction de volume des dépôtsnon brûlés déposés antérieurement. La figure 9 détaillel’évolution séculaire de ces stratigraphies. On y remarquel’importance relative grandissante que prennent les horizonsbrûlés dont l’épaisseur, qui évolue peu, est compriseentre le tiers et la moitié de l’épaisseur de départ ; end’autres termes, les horizons brûlés correspondants à une(ou quelques) année(s) occupent une épaisseur équivalenteou supérieure aux horizons minéralisés lentement déposéspendant des dizaines d’années voire des siècles. Laperception du temps dans de telles séquences reste doncextrêmement difficile.C’est dans ces horizons brûlés, bariolés et poreux, queles crottes peuvent, éventuellement, être fossilisées. Ellesrestent cependant difficilement attribuables à un animalparticulier tant est grande la variabilité saisonnière. Ce n’estque sous le microscope, en lame mince, que certainesstructures (convolutées ou « en dentelle », à pores aplatiset parallèles ; planche photo 2g, h et i) semblent pouvoirdifférencier les chèvres et les moutons des bovins (Brochieret Claustre 2000, Guélat et al. 1998). Inversement, si lesstructures sont bien fossilisées par le brûlage, leurs élémentsconstitutifs ne le sont pas : les sphérolites, lorsqu’ilssont préservés, sont devenus opaques et l’opale végétale estsoit très dégradée soit fondue.Le brûlage des accumulations de crottes, lorsqu’il est volontaire(des cas de brûlages en grotte déclenchés par lafoudre sont connus), a quelques conséquences archéologiquesimportantes : il implique une utilisation intermittentedu site, autrement dit, que celui-ci est une étape dansle mouvement cyclique annuel d’une partie (ou d’une)communauté agro-pastorale ; plus localement, il impliqueque les amendements n’étaient pas utilisés dans les cultures,que celles-ci soient absentes (s’il s’agit d’un site spécialisédans une activité unique) ou que l’intérêt de la fumuredes champs ne soit pas perçu.Le problème des litières est un problème difficile étudiéen détail à partir des dépôts holocènes récents de la Caunade Bélesta (Brochier et Claustre 2000 et planche photo 2jet k). L’ajout de litière pourrait être une pratique aussi ancienneque le Néolithique. Il reste cependant très difficilede le différencier d’une autre pratique, tout aussi banale :le nourrissage. L’ambition est sans doute d’ailleurs illusoirepuisque, de l’avis même des bergers, les fourrages souilléspar les animaux jouent le rôle de litière.Nous avons évité, jusqu’ici, d’employer le terme fumierque tous les lexicographes s’accordent à définir comme unmélange d’excréments animaux et de litière utilisécomme engrais ou, plus largement encore, comme n’importequelle accumulation de produits végétaux et animauxen voie de putréfaction. S’ajoute à ces sens agronomiques,le sens archéologique, comme dans l’expression « fumierlacustre », désignant un dépôt à dominante organique decomposition extrêmement variée, d’origine aussi bien domestiquequ’animale. On mesure à quel point l’emploi dece terme peut créer de confusion. Si l’on veut détailler unjour aussi bien les techniques d’élevage que l’histoire desfaçons culturales, des termes sans ambiguïté sont nécessaires.Il nous semble en particulier urgent, devant l’accumulationde données géoarchéologiques, de bien différencierles accumulations brutes d’excréments d’herbivores(simplement compactées) de celles dans lesquellesl’homme a introduit, quelle qu’en soit la finalité, des restesvégétaux. Si l’adjonction de paille, de feuilles, etc. est clairementétablie (litière) et bien qu’il soit difficile de diffé-


470 GÉOLOGIE DE LA PRÉHISTOIREFigure 10. Une bergeried’hiver, la grotte 2108Aen Béotie. <strong>Les</strong> bergers ontbrûlé les fumiers à plusieursreprises, en fin d’automne,ces dernières années ; le feua affecté la plus grande partiede l’espace barrésous surplomb (1) à l’exceptiondes secteurs les plus humides :voisinages des paroiset égouttoirs. Il est à l’originede banquettes et d’îlotsimbrûlés (en trait fort)de quelques décimètres dehauteur. <strong>Les</strong> nappescendreuses, aux contours trèsirréguliers, sont ainsidiscontinues, à l’imagede celles que l’on connaît enmilieu archéologique (d’aprèsAcovitsioti-Hameauet Brochier et Hameau 2000,modifié).Figure 10. A wintersheepfold: the 2108A cave(Beotie). Shepherds burnedmanure many times at theend of autumn during theselast years; all apart the mosthumid areas were burnt.Unburnt banks (bold solidline), some tens centimetershigh, resulted. Ashy layer isdicontinuous and has, likearchaeological ones, irregularoutline (after Acovitsioti-Hameau, Brochier andHameau 2000, modified).rencier complément alimentaire et litière, le terme fumierpourrait être utilisé. Dans le cas contraire, il nous fautrechercher des termes précis spécifiques. En ce quiconcerne les bovidés, nos recherches ont été vaines etnous devrons nous contenter pour l’instant, bien que cesoit un peu lourd, d’une périphrase du type « accumulationde fientes de bovidés ». Le terme migon, par contre,semble pouvoir désigner les accumulations de crottes demouton simplement écrasées et tassées par le piétinement.Nous employons ce terme, d’origine provençale, en l’absenced’équivalent français précis et non ambigu.Il est ainsi aujourd’hui possible, sur des critères archéozoologiquesou géoarchéologiques, de retrouver l’endroitoù l’on abritait les bêtes. Il est également facile de constaterque rares sont les sites qui ne contiennent pas de tracescoprologiques du bétail. Tout site comprend ainsi, à un endroitdonné, à un instant donné, si court soit il, une partiebergerie ou étable. Tous ne correspondent pourtant pas à


<strong>Les</strong> sédiments <strong>anthropiques</strong> – Méthodes d’étude et perspectives 471ce qui, très vite, a été baptisé grotte ou abri-bergerie. Le caractèreprincipal, et discriminant, de ces sites spécialisésest, paradoxalement, le rôle extrêmement discret tenu parles témoignages archéologiques et géoarchéologiques detoute autre activité.Cette rapide présentation des sédiments <strong>anthropiques</strong>montre quelques une des possibilités offertes par l’applicationdes disciplines géologiques et naturalistes à l’archéologie.Des possibilités, des cas exposés en détail, nous avonsévidemment choisi les plus convaincants! En prolongementdu chapitre précédent, quelle trace laisserait, par exemple,des chèvres non productrices de sphérolites pendant la périodede l’année où elles ne mangent que très peu de graminées? Nombre d’activités ne laissent pas de traces, destraces identiques peuvent être laissées par des activités différentes.Il faut garder à l’esprit la part d’aléatoire qui caractérisetoutes les activités humaines.C’est ce qui nous a fait privilégier la recherche des tendancesévolutives, quantifiées à partir de nombreux échantillons,à l’observation ponctuelle d’un fait archéologiquedont on ne peut juger ni de l’importance ni de la généralité.Au delà de la reconnaissance d’une aire de parcage dans unabri-sous-roche, n’est-il pas plus signifiant, au plan de l’archéologie,de remarquer que les sites abrités du sud-est dela France, en marge des bassins alluviaux, ont seulementreçu, pendant les quelques siècles du Néolithique moyen, lavisite des bergers et de leurs troupeaux alors qu’avant,comme après, c’est l’image d’une communauté agro-pastoralecomplète qui nous est parvenue, aussi bien au traversdes sédiments que de l’archéologie.Au delà de l’intérêt archéologique évident de ces recherches,l’étude des sédiments archéologiques holocènesconduit nécessairement à réviser notre perception dutemps, des rythmes, notre conception de la couche archéologique.Celle-ci apparaît alors, avec évidence, comme uncumul interdisant, dans la grande majorité des cas, touteapproche spatiale. Ce qui vaut pour l’Holocène vaut égalementpour le Pléistocène. Démontrer l’origine anthropiquede la majeure partie des sédiments moustériens de la grottede Kébara, décrire leur devenir diagénétique, éclaire égalementd’un jour nouveau le concept de couche archéologique(ou mieux d’unité archéologique minimale) en soulignant,à l’image des dépôts organiques néolithiques, lesdéformations, les énormes réductions volumétriques etl’incontournable rétraction apparente du temps.Tout le problème, aujourd’hui, est d’estimer quelle est lagénéralité et l’ampleur de ces phénomènes dont la causeest simplement l’occupation humaine, avec ses inévitablesaccumulations de produits végétaux : bois, feuilles, POCC,micro-charbons et fèces du bétail.BibliographieACOVITSIOTI-HAMEAU A., BROCHIER J.E., HAMEAU P. 2000 –Témoignages et marqueurs du pastoralisme actuel en Grèce :une ethnographie des gestes et des restes et les applicationsarchéologiques corrélées. 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474 GÉOLOGIE DE LA PRÉHISTOIREPlanche 1.Phytolithaires siliceuxa : plaquettes polygonales verruqueuses du fruit du micocoulier (Celtis australis), dimension d’une plaquette : 20 µm. environ.Contraste interférentiel en transmission.b : sphères à épines mousses de la base du stipe du palmier nain (Chamaerops humilis), diamètre d’une sphère : 15 µm. environ.Contraste interférentiel en transmission.c : épiderme silicifié de la feuille d’orme (Ulmus sp.), la largeur d’un stomate est d’environ 35 µm. Contraste interférentielen transmission.d : épiderme silicifié de la feuille du roseau à balais (Phragmites australis) ; noter la fréquence des cellules courtes en doublehache (saddle). Contraste interférentiel en transmission.e : phytolithaires de l’épi de la folle avoine (Avena sp.). Noter les grandes différences de taille entre les cellules courtes et lesbaguettes épineuses. La cellule à pointe courte (papilla) dans le quart nord-ouest de la photo mesure 30 µm. Contrasteinterférentiel en transmission.f : poils en crochet de la feuille de pariétaire (Parietaria officinalis). Contraste interférentiel en transmission. Diamètre moyendes poils : environ 10 µm.Chrysophycées et diatoméesg : flore algaire d’un marécage actuel (Lac de l’Oeuf, Haute-Loire). Remarquer la grande diversité des morphotypesde statospores de chrysophycées (lisses, ornées d’épines, à expansion aliforme porale). La forme épineuse mesure 15 µmde diamètre. La plaquette à deux mamelons dans la partie centrale haute de la photographie est un phytolithe caractéristique,dans ce milieu, de la famille des cypéracées. Contraste interférentiel en transmission.Phytolithaires oxaliques et dérivés (POCC)h : cristaux d’oxalate de calcium de formes banales transformés en calcite micritique (POCC) par la chaleur, dans un charbonde bois d’alaterne (Rhamnus alaternus). <strong>Les</strong> pocc mesurent entre 15 et 20 µm. Microscopie électronique à balayage.Photo J.E. Brochier et M. Thinon.i : résidu minéral obtenu après digestion de la matière organique d’une feuille de chêne (Quercus pubescens). Noter la grandeabondance des oxalates de calcium, en cristaux simples, maclés ou, plus fréquemment encore, sous forme de druses.<strong>Les</strong> trachéides silicifiées sont abondantes chez cette espèce. Contraste interférentiel en transmission. <strong>Les</strong> druses mesurent entre10 et 15 µm de diamètre.j : POCC du bois de tilleul (Tilia cordata). <strong>Les</strong> prismes courts (qui doivent nécessairement être accompagnés de druses) sontcaractéristiques de cette espèce. Lumière polarisé. <strong>Les</strong> POCC de druses mesurent 20 µm de diamètre environ.k : POCC prismatiques très allongées de pin (ici Pinus Halepensis). Leur étude morphométrique permet de les différencierde celles de tout autre genre. Lumière polarisée.l : calcite micritique en réseau du bois de thuya (Tetraclinis articulata). Aucune POCC n’est présente chez cette espèce.Lumière polarisée.Plate 1.Siliceous phytolithsa: polygonal verrucate platelets from Celtis australis fruit (each about 20 µm). Interferencial contrast.b: spinulose sphere from Chamaerops humilis stipe base (each about 15 µm). Interferencial contrast.c: Ulmus sp leaf epidermis (stomata width about 35 µm). Interferencial contrast.d: Phragmites australis leaf epidermis. Note the high frequency of saddle short cells. Interferencial contrast.e: Avena sp ear phytoliths. Note the great size difference between siliceous short cells and long spiny rods. Cone-shapedphytolith (papilla), in the north-west quarter of the photograph measure 30 µm. Interferencial contrast.f: Parietaria officinalis hook hairs. Interferencial contrast. Rough mean diameter: 10 µm.Diatoms and Chrysophytesg: siliceous algal flora of a present day marsh (Lac de l’Oeuf, Haute Loire). Note the great statospore morphotype diversity(smooth, spiny, with above pore wing). The spiny morphotype diameter is 15 µm. The platelet with two nipple like bumps,in the central part of the photograph, is, in this context, sedge caracteristic. Interferencial contrast.Oxalic and oxalic heat derived (POCC) phytolithsh: common calcium oxalate crystal shapes converted by heat into micritic calcite (POCC) in a Rhamnus alaternus charcoal.The pocc sizes are between 15 and 20 µm. SEM. Photograph J.E.Brochier and M. Thinon.i: Quercus pubescens leaf mineral residue obtained after organic matter removal. Note the great abundance of calcium oxalatecrystals, singles, twinned, and more frequently sphericaly aggregated (druses). Siliceous tracheids are common in this specie.Interferencial contrast. Druse size between 10 and 15 µm.j: lime wood (Tilia cordata) POOC. Short prisms (when combined with druses) are distinctive of this specie. Polarized light. Roughdruses diameter is 20 µm.k: pine wood (Pinus Halepensis) long prismatic POCC. Morphometric data allows to differentiate them from any other POCC.Polarized light.l: Tetraclinis articulata micritic calcitic network. This specie does not produce any POCC. Polarized light.


<strong>Les</strong> sédiments <strong>anthropiques</strong> – Méthodes d’étude et perspectives 475a b cd e fg h ij k l


476 GÉOLOGIE DE LA PRÉHISTOIREPlanche 2.a et b : migon actuel de la grotte d’Uzzo (Sicile). Remarquer l’abondance des restes végétaux et la forte porosité malgrél’aspect très compact du migon. <strong>Les</strong> sphérolites, jaunâtres sur la photo b, sont moyennement denses. a : lumière polarisée,b : lumière polarisée analysée.c et d : migon brûlé fossile de l’aven de Baume Ronze (Ardèche, Néolithique moyen). <strong>Les</strong> sphérolites, lorsqu’ils sont préservés,sont généralement bruns foncés à noirs. La minéralisation brutale par brûlage a conservé une forte porosité et une densitémoyenne de sphérolites. c : lumière polarisée, d : lumière polarisée analysée.e et f: migon fossile de la grotte de l’Abeurador (Hérault, Néolithique). La minéralisation, lente et naturelle, est à l’origined’une très importante réduction du volume initial. La porosité est faible, les sphérolites très abondants. On remarqueral’abondance des statospores de chrysophycées (petites sphères hyalines isotropes de 5 µm. environ de diamètre) dans les zonesles plus minces de la lame, de part et d’autre du vide central. e : lumière polarisée, f : lumière polarisée analysée.g : structure convolutée d’une crotte ovi-caprine dans un migon brûlé sub-actuel de la Grotta La Porta (Sicile). Lumièrepolarisée.h et i : structure en dentelle, à vides plans et parallèles, d’origine bovine probable, d’un horizon brûlé de la Cauna de Bélesta(Pyrénées-Orientales, Âge du Bronze). L’épaisseur de cette lamine isotrope est comprise entre 1,2 et 1,5 mm. Remarquer,à l’extérieur, la présence de pellets dans un sédiment de faciès mixte sans sphérolites. h: lumière polarisée, i : lumière polariséeanalysée.j et k : empilement de lamines isotropes lenticulaires finement poussiéreuses formées uniquement de phytolithaires (souventen connexion) et de lamines biréfringentes denses, très riches en phytolithaires dispersés accompagnés d’une fraction détritiqueet anthropique (POCC et micro-charbons principalement, les sphérolites sont absents). Ces dépôts, issus d’une minéralisationlente, semblent devoir être interprétés comme une alternance de déjections animales mêlées de poussières et de restesde nourriture ou de litière (en noir sur la photo k). Il pourrait donc s’agir ici, non plus d’un migon, mais d’un véritable fumier.Cauna de Bélesta (Pyrénées-Orientales, Âge du Bronze). La plus épaisse des lamines isotropes mesure 0,5 mm. j : lumièrepolarisée, k : lumière polarisée analysée. (d’après Brochier et Claustre, 2000).l : banquette résiduelle issue du brûlage des fumiers dans la grotte 2108A en Béotie (le paillage du sol et le nourrissage hivernaldes bêtes sont responsables de la formation d’un véritable fumier). La base des cendres est soulignée par un mince niveau noirqui se prolonge verticalement jusqu’à la surface du sol; le frottement des pattes des moutons contre la base de la banquettel’a fait disparaître sur quelques centimètres. <strong>Les</strong> fumiers visibles à l’avant et l’arrière plan correspondent à la réoccupationhivernale de la grotte-bergerie après le séchage estival et le brûlage automnal. (d’après Acovitsioti-Hameau, Brochieret Hameau 2000). Échelle 50 cm.Plate 2.a and b: present day migon of Uzzo cave (Sicily). Note the abundance of vegetal material and the high porosity in spiteof the compact appearance of migon. Sperulites, yellowish on photograph b, are moderately dense. a: polarized light,b: cross polarized light.c and d: fossil burnt migon from Baume Ronze rock-shelter (Ardèche, Middle Neolithic). Spherulites, when preserved,are usualy dark brown to black. The rapid mineralisation through burning led to high porosity and scattered spherulites.c: polarized light, d: cross polarized light.e and f: fossil migon from Abeurador cave (Hérault, Neolithic). Slow and natural mineralisation led to a huge volume reduction.Porosity is weak, spherulites abundant and close each other. Note the high frequency of Chrysophytes statospores (small hyalineisotropic sphere, 5 µm. in diameter) in the thinest area of the thin-section. e: polarized light, f: cross polarized light.g: convoluted structure of an avi-caprine dropping in a recently burnt migon from Grotta La Porta (Sicily). Polarized light.h and i: lacy structure, with plane and parallel voids, of likely bovine origin, found in a burnt layer of Bélesta cave (PyrénéesOrientales, Bronze Age). The thickness of this isotropic laminae is between 1.2 and 1.5 mm. Note, outside, pellets in a mixedfacies without spherulites. h: polarized light, i: cross polarized light.j and k: pile of lenticular dusty isotropic laminae solely made of phytoliths (often connected) and birefringent dense laminaemade of disorganized phytoliths, detritic and anthropic (POCC and micro-charcoal, spherulites absents) dust. These deposits,resulting from slow natural mineralization, are interpreted as alternation of dung mixed with dust and litter and/or fodder(black on photograph k). It would not be thus a migon but a true manure. Bélesta cave (Pyrénées Orientales, Bronze Age).The thickest isotropic laminae measure 0.5 mm. j: polarized light, k: cross polarized light. (after Brochier and Claustre, 2000).l: residual bank resulting from manure burning in the 2108A cave, Béotie. The lower part of the ash is underlined by a thinblack layer which extend verticaly up to soil surface; it disappeared at the base of the bank through abrasion by sheep legs.Manure, visible in the foreground and background, correspond to the winter use of the sheep-fold after summer drying andautumnal burning. (after Acovitsioti-Hameau, Brochier et Hameau 2000). Scale 50 cm.


<strong>Les</strong> sédiments <strong>anthropiques</strong> – Méthodes d’étude et perspectives 477a b cd e fg h ij k l

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