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Interview de Bernard Werber par Femmezine.fr *** - Le Livre de Poche

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<strong>Interview</strong> <strong>de</strong> <strong>Bernard</strong> <strong>Werber</strong> <strong>par</strong> <strong>Femmezine</strong>.<strong>fr</strong><strong>***</strong>Telle une petite fourmi, nous nous sommes hissés sur le canapé du salon <strong>de</strong> <strong>Bernard</strong> <strong>Werber</strong>où il nous a reçus pour <strong>par</strong>ler <strong>de</strong> son <strong>de</strong>rnier ouvrage, « <strong>Le</strong> miroir <strong>de</strong> Cassandre », et un peu<strong>de</strong> lui aussi.<strong>Femmezine</strong> : Dans « <strong>Le</strong> miroir <strong>de</strong> Cassandre », sorti en octobre 2009, le personnageprincipal est une femme. C'est une chose <strong>de</strong> décrire une femme, s'en est une autre d'écrireen étant dans sa peau. Comment travaille-t-on la psychologie d'un personnage féminin vue<strong>de</strong> l'intérieur ?<strong>Bernard</strong> <strong>Werber</strong> : Je crois qu'aucun homme n'est capable <strong>de</strong> comprendre une femme à labase. <strong>Le</strong>s hommes sont plus chien, les femmes plus chat. Un chat peut peut-êtrecomprendre un chien, un chien comprend moins facilement un chat. Par contre avec notreimaginaire on peut essayer <strong>de</strong> se projeter dans l'esprit d'une autre personne. Et on peutaussi réveiller, retrouver, creuser, faire vivre, sa <strong>par</strong>t féminine. J'en ai une comme tout lemon<strong>de</strong>, et c'est ce que j'ai fait, au point où tous les comportements <strong>de</strong> mon héroïne<strong>de</strong>venaient naturels pour moi, je n'avais pas à chercher. Un peu comme un acteur se metdans la peau d'un personnage, il fume comme son personnage, il <strong>par</strong>le comme sonpersonnage. En tant qu'écrivain je me suis mis dans la peau <strong>de</strong> Cassandre Katzenberg, unejeune fille <strong>de</strong> 17 ans, et j'ai essayé <strong>de</strong> penser comme elle. C'est très ra<strong>fr</strong>aîchissant pour unhomme d'essayer <strong>de</strong> penser comme une femme, <strong>de</strong> se mettre dans la peau d'une femme,cela ouvre <strong>de</strong> nouvelles perspectives.Vous êtes-vous inspiré, nourri <strong>de</strong>s femmes qui vous entourent dans la vie ?Oui, comme disait Dracula ! J'ai été éduqué <strong>par</strong> les femmes et je leur en sais gré. Entre mapremière maîtresse à la maternelle, qui m'a dit « vous <strong>de</strong>ssinez tellement bien qu'un jour,vous serez <strong>de</strong>ssinateur, alors inutile <strong>de</strong> vous dispersez dans les autres arts ! ». Puis, uneprofesseur <strong>de</strong> <strong>fr</strong>ançais au collège qui m'a dit : « J'adore vos rédactions, je les mets toujoursen haut pour me détendre ! ». Je n'avais pas spécialement <strong>de</strong> bonnes notes, mais au moinsça la faisait rire... je l'ai pris pour un compliment ! Et puis, il y a eu les rencontres amoureuses


qui ont toutes été <strong>de</strong>s expériences que j'ai vécues <strong>de</strong> manière extrêmement forte. Je suisassez romantique, alors je m'investis, et je le vis en profon<strong>de</strong>ur.Ecrire, est-ce que c'est justement revenir sur ces histoires-là, les comprendre différemment?Oui. Pour arriver à <strong>par</strong>ler <strong>de</strong>s femmes, il faut les écouter. J'aime bien <strong>par</strong>ler avec elles, lesécouter. Déjà quand j'étais petit, à l'école, j'aimais bien être avec les filles, <strong>par</strong>ce que leursconversations étaient plus intéressantes, l'univers <strong>de</strong>s garçons se réduisait trop souvent ausport, à la télé. <strong>Le</strong>s filles étaient déjà dans <strong>de</strong>s réflexions sur la compréhension <strong>de</strong> lapsychologie. Tout ce livre, « <strong>Le</strong> miroir <strong>de</strong> Cassandre », m'a été inspiré <strong>par</strong> la rencontre d'unefemme, écrivaine aussi, pas célèbre, qui un jour m'a <strong>de</strong>mandé : « comment fais-tu pourécrire tes livres? ». Je lui ai répondu : « mon principe c'est que l'action révèle la psychologie.Mon personnage ouvre une porte, il va découvrir quelque-chose et la manière dont il varéagir va nous permettre <strong>de</strong> comprendre qui il est. C'est montrer plutôt qu'expliquer ». Ellem'écoute, hoche la tête. Puis elle me dit : « pourquoi ne fais tu pas l'inverse ? La psychologierévèle l'action ! ». J'ai dis chiche et j'ai commencé à écrire la première version du « Miroir <strong>de</strong>Cassandre ». Tout le mystère consistait à comprendre vraiment mon héroïne, à travers sespensées auxquelles nous avions accès. <strong>Le</strong> mystère <strong>de</strong> ce livre-là, c'était juste comprendrequelqu'un vraiment, en profon<strong>de</strong>ur. La plus belle quête pour un homme, c'est d'ailleurscelle-là, comprendre vraiment une femme.Ça se détermine dès le début, la psychologie <strong>de</strong> son héroïne, ou ça se construit au fur et àmesure <strong>de</strong> l'écriture ?Il y avait une sorte <strong>de</strong> canevas <strong>de</strong> base, et au fur et à mesure <strong>de</strong> l'écriture, j'avais envied'aller <strong>de</strong> plus en plus loin, d'aller chercher sa sensibilité, ses douleurs, ses extrapolations.Vers la fin on s'aperçoit que là où nous percevons une petite information, elle perçoit unegran<strong>de</strong> information. Je crois que d'une manière générale les femmes sont plus sensibles queles hommes, voir même que seules les femmes sont capables d'aimer, <strong>par</strong>ce qu'elles sontpré<strong>par</strong>ées hormonalement à aimer leurs enfants. <strong>Le</strong>s hommes n'en sont pas capables, car ilsn'ont pas ce ren<strong>de</strong>z-vous organique. Nous mettons le même mot « aimer » sur lessentiments <strong>de</strong>s hommes et <strong>de</strong>s femmes, mais il ne s'agit pas à mon sens du même vécu.Cassandre est une jeune-fille...Oui, elle <strong>de</strong>vient une femme tardivement, c'est une jeune-fille <strong>de</strong> 17 ans qui est <strong>de</strong>vant leseuil <strong>de</strong> la vie. C'est le livre d'une initiation : la chenille <strong>de</strong>vient papillon, l'enfant <strong>de</strong>vient


adulte... <strong>Le</strong> moment le plus intéressant dans la vie d'un être humain, à mon sens. Celui quiest à l'aube du changement.Espérons que l'on puisse changer toute sa vie, et pas qu'à 17 ans...<strong>Le</strong>s gens intelligents changent toute leur vie. <strong>Le</strong>s gens moins ambitieux <strong>de</strong> la vie se font uneplace où ils se trouvent bien et ne font ensuite que la gérer.Votre titre définitif « <strong>Le</strong> miroir <strong>de</strong> Cassandre » est venu assez tardivement. Pourquoi ?<strong>Le</strong> premier titre était « La petite fille aux yeux miroirs ». Mon éditeur trouvait que ça faisaittrop littéraire, et voulait quelque chose qui correspon<strong>de</strong> plus à ce que j'avais fait avant. Moij'aimais bien, mais j'ai proposé d'autres titres, dont celui qui a été choisi finalement.Donc, la référence au mythe <strong>de</strong> Cassandre n'était pas implicite dans le premier titre ?Non. D'ailleurs elle ne s'appelait même pas Cassandre au dé<strong>par</strong>t ! Mais Ja<strong>de</strong>. J'ai écris vingtversions, avec <strong>de</strong>s constructions, <strong>de</strong>s histoires, <strong>de</strong>s personnages différents. Au démarraged'un livre, il y a une première formule « toute fausse », puis vous rectifiez, pour tendre versle mieux. Au moment où le livre sort, il est encore im<strong>par</strong>fait, l'œuvre c'est comme uneasymptote, elle tend vers quelque chose <strong>de</strong> <strong>par</strong>fait mais ne l'atteint jamais.C'est le cas pour toutes les œuvres, et tous les artistes.Oui. C'est là la différence entre les amateurs et les professionnels. <strong>Le</strong> professionnel sait qu'ildoit s'arrêter, même si l'œuvre n'est pas <strong>par</strong>faite. Cette imperfection fait que l'œuvre estvivante, si elle était <strong>par</strong>faite elle serait morte. Lorsque j'ai relu « <strong>Le</strong>s fourmis », je me suis dit: « ah ! Je vois comment l'améliorer... ». J'aurais pu faire ça toute ma vie en fait, êtrel'homme d'un seul roman que je n'aurais jamais cessé d'améliorer pendant vingt ans. C'estpeut-être ce que je fais du reste... améliorer « <strong>Le</strong>s fourmis » mais avec d'autres livres,raconter ce premier livre avec d'autres histoires autour, d'autres personnages, <strong>de</strong> plein <strong>de</strong>manières différentes. C'est peut-être ce que font tous les écrivains. Ils ont un projet <strong>de</strong> livre<strong>par</strong>fait qu'ils cernent avec plein <strong>de</strong> livres, d'œuvres. Tous les artistes font ça d'ailleurs !


Pourquoi vous imposez vous les contraintes que l'on vous connait pour écrire ?Une sortie tous les 1er octobre chaque année, et écrire tous les jours <strong>de</strong> 8h à 12h, chaquematin. <strong>Le</strong>s contraintes sont bonnes pour la création. Si on se laisse aller, on se dilue dans letemps. Là, tout est organisé, il y a un moment où je dois rendre mon manuscrit, un autre oùje choisis la couverture, un autre temps pour la promotion, puis pour poser l'idée, etc. Toutça trouve une sorte d'architecture dans mon année, et je ne suis pas perdu. Sinon, marecherche <strong>de</strong> perfection ferait que je rendrais un livre tous les 3 ou 4 ans.Comment faites-vous pour sortir un livre tous les ans ?J'écris beaucoup <strong>de</strong> nouvelles, tous les jours. C'est un peu comme <strong>de</strong>s gammes pour unpianiste, je travaille ainsi ma technique <strong>de</strong> création d'histoires. Derrière chacun <strong>de</strong> meslivres, il y a un jumeau mort-né, un autre roman, sur un autre sujet, l'un s'impose commeune évi<strong>de</strong>nce et je laisse tomber l'autre. Mais il peut resservir plus tard. J'ai <strong>de</strong>s sortes <strong>de</strong>livre à l'état <strong>de</strong> squelette, avec quelques organes, <strong>de</strong>s monstres. « <strong>Le</strong> miroir <strong>de</strong> Cassandre »était le jumeau mort-né <strong>de</strong> « Nous les Dieux ». <strong>Le</strong> livre <strong>de</strong> Cassandre, j'ai décidé <strong>de</strong> leressortir, <strong>de</strong> le faire évoluer. Ecrire, c'est un travail <strong>de</strong> créateur, et en tant que créateur je nesuis pas sûr <strong>de</strong> moi. Avoir <strong>de</strong>ux livres en route cela me permet <strong>de</strong> choisir, <strong>de</strong> sentir celui queje vais avoir le plus <strong>de</strong> plaisir à développer, qui est le plus dans l'air du temps.C'est important d'être en connexion avec l'air du temps ? Vous êtes également beaucoupdans la projection dans le futur...<strong>Le</strong> futur n'est plus ce qu'il était. Il avance et j'essaie <strong>de</strong> rester en phase avec lui ! Parexemple, mon livre « <strong>Le</strong> Papillon <strong>de</strong>s étoiles » s'est imposé avant celui <strong>de</strong> Cassandre, alorsqu'à l'origine, j'avais commencé ce <strong>de</strong>rnier. Je voulais dénoncer la barbarie, alerter les genssur la menace du terrorisme avec l'histoire <strong>de</strong> Cassandre, mais après l'avoir commencé, j'airéalisé en écrivant que c'était déjà trop tard, les attentats se multipliaient. Du coup, ce quej'ai eu envie à ce moment-là d'écrire c'était un livre faisant l'apologie du dé<strong>par</strong>t, sur l'envie<strong>de</strong> fuir, <strong>de</strong> se casser ! J'ai donc laissé tomber mon premier livre pour écrire « <strong>Le</strong> Papillon <strong>de</strong>sétoiles », une sorte <strong>de</strong> nouvelle arche <strong>de</strong> Noé qui quitte la terre pour créer une autrehumanité ailleurs. Mais je suis revenu à Cassandre, pour finir.... car au-<strong>de</strong>là du thème,travailler ce personnage m'intéressait.


Vous avez un regard cinématographique. Avez-vous toujours besoin <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>srepérages, <strong>de</strong>s photos, un montage d'images, pour écrire chacun <strong>de</strong> vos livres ?Il y a <strong>de</strong>ux sortes d'écrivains : ceux qui sont le cul sur leur chaise et n'en bougent pas <strong>par</strong>cequ'ils considèrent que tout est dans leur tête. Et puis il y a ceux qui vont voir le mon<strong>de</strong> pouressayer d'être étonnés eux-mêmes avant <strong>de</strong> coucher ça <strong>par</strong> écrit. Lorsque j'écris sur la tourMont<strong>par</strong>nasse, j'y monte pour voir comme elle est. Lorsque j'écris sur l'autisme, je vaisrencontrer <strong>de</strong>s autistes. Je trouve que c'est une honnêteté d'écrivain. J'ai une formation <strong>de</strong>journaliste scientifique et <strong>de</strong> scénariste. <strong>Le</strong> cinéma, l'image, c'est quelque chose pour lequelje sais que j'ai une capacité. J'ai d'ailleurs réalisé un film, mais j'ai tellement voulu faireoriginal, que j'ai perdu le consensus. La durée <strong>de</strong> vie d'un film est tellement courte que lebouche à oreille n'a pas eu le temps <strong>de</strong> s'installer, <strong>de</strong> fonctionner. J'assume ce film car c'estaussi le film du courage <strong>de</strong> Clau<strong>de</strong> <strong>Le</strong>louch qui a été mon producteur. A la fin <strong>de</strong> ce tournage,j'étais au point, car je me suis intéressé à toutes les étapes. Maintenant, je sais faire un film.Mais... c'est mon grand regret, je ne suis pas certain qu'un producteur me fera à nouveauconfiance pour en réaliser un. En France, il y a en plus une méfiance envers ce qui relève dufantastique ou <strong>de</strong> la science-fiction. <strong>Le</strong>s producteurs ne savent pas comment vendre cesfilms si différents aux chaines qui souhaitent <strong>de</strong>s projets testés, validés avant d'avancer lessous. Mes projets sont trop novateurs, décalés. Ils ef<strong>fr</strong>aient.Ce regard cinématographique explique-t-il le succès <strong>de</strong> vos livres ? En plus d'une écrituresimple, abordable ?Oui, j'ai une technique d'écriture qui relève du montage. J'utilise un traitement <strong>de</strong> texte quime permet <strong>de</strong> décomposer toutes les séquences que je peux bouger à ma guise, pourassocier les différentes scènes. Au niveau <strong>de</strong> mon style, je me dis toujours que c'est l'histoirequi est complexe, pas le texte. L'histoire est une cathédrale très centrée, très géométrique.Je ne m'attar<strong>de</strong> pas à limer chaque brique <strong>de</strong> la cathédrale, chaque phrase, chaque mot.C'est le tout qui compte, le reste est au service <strong>de</strong> ce tout. J'appelle ça l'écriture Sushi : pas<strong>de</strong> sauce, pas <strong>de</strong> cuisson, pas <strong>de</strong> déformation du goût <strong>de</strong> l'histoire. Je n'essaie pas <strong>de</strong> <strong>fr</strong>imeravec <strong>de</strong>s adjectifs à tire-larigot, <strong>de</strong>s phrases qui n'en finissent pas. C'est un choix, le choix <strong>de</strong>mettre en exergue l'histoire. C'est un retour à l'essence pure et au goût non dénaturé <strong>de</strong>l'élément littéraire.Est-ce que cela peut également expliquer votre immense succès à l'étranger, en Coréenotamment ?Je pense effectivement que cette clarté, cette simplicité, touche un public jeune, également<strong>de</strong>s non-lecteurs, qui étaient dégouttés <strong>de</strong> la lecture. <strong>Le</strong>s gens prennent du plaisir et nerestent pas béats <strong>de</strong>vant une jolie phrase. Je reçois beaucoup <strong>de</strong> lettres <strong>de</strong> gens qui me


disent qu'ils se sont remis à la lecture grâce à mes livres. Pour la traduction en 35 langues,effectivement, cette écriture simple, accessible, me permet d'être bien traduit. Et puis j'écrisaussi pour les générations à venir. J'espère être lu dans cent, <strong>de</strong>ux cents ans. <strong>Le</strong> temps est lameilleure critique. J'ai d'ailleurs fait une prouesse en tant qu'auteur avec un ouvrage qui metient <strong>par</strong>ticulièrement à cœur « <strong>Le</strong>s Thanatonautes ». Sans la moindre couverturemédiatique, ce livre a réussi à faire son chemin. Il était tellement déroutant que personne necomprenait pourquoi cet objet existait. Et maintenant, il est en train <strong>de</strong> rattraper « <strong>Le</strong>sFourmis » en termes <strong>de</strong> notoriété et <strong>de</strong>vient le livre préféré <strong>de</strong> beaucoup <strong>de</strong> mes lecteurs.C'est dans celui-là que vous vous êtes adonné à l'écriture automatique ? Commentarticulez-vous cela avec la précision <strong>de</strong> votre cathédrale et <strong>de</strong> vos contraintes <strong>de</strong> travail,votre discipline d'écriture ?Pour les scènes d'envol <strong>par</strong> exemple, je voulais vraiment ressentir quelque chose.Physiquement. Je me suis mis dans le casque audio le « Prélu<strong>de</strong> à l'après-midi d'un faune »<strong>de</strong> Clau<strong>de</strong> Debussy. J'étais dans un cocon, la musique me saoulant. De cette ivresse estressortie une écriture. J'étais presque en transe, je suis dans le film, à l'intérieur du film,<strong>de</strong>rrière le miroir, je ne vois pas le temps passer, j'écris. Je regar<strong>de</strong> ma montre et j'ai écritpendant 6 heures ! Cela ressemble à un acte physique d'amour, juste <strong>de</strong> l'émotion, c'estd'ailleurs comme ça que je conçois l'écriture.Est-ce que vous avez retravaillé ce texte ensuite ?Oui, mais beaucoup moins que les autres livres, c'était un livre bizarre mais je l'ai assumé. Laversion définitive est très proche <strong>de</strong> la première. J'avais comme structure initiale une visionprécise du <strong>par</strong>adis et d'un arbre <strong>de</strong> vie. J'ai très vite intégré mes scènes à tout cela.Vous-êtes à la fois très structuré et très ouvert. Chaque livre est-il une aventure ?C'est une structure chaotique et un chaos structuré. Au moment où j'écris je ne vais pasn'importe où, ni n'importe comment. Il y a ces <strong>de</strong>ux notions indispensables pour moi :musique, géométrie. La musique pour le style, la géométrie pour le plan. Comme quelqu'unqui avancerait dans la forêt, la nuit, avec une lampe torche, mais qui se doute <strong>de</strong> ce qu'il y aau-<strong>de</strong>là du faisceau.


Vous êtes une star en Corée, comment l'expliquez vous ?La Corée aime ce que je fais car elle est très tournée vers le futur et la nouveauté. La Franceelle est tournée vers le passé, la nostalgie. En Corée, ils ont un passé abominable. Donc, ilssont tournés vers le futur, la science-fiction, les mon<strong>de</strong>s fantastiques. En France, il fautréhabiliter le mot futur. Quand on <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aux gens : « comment voyez-vous le futur ? », ilsrépon<strong>de</strong>nt tous <strong>par</strong> <strong>de</strong>s catastrophes ! Mais il ya plein <strong>de</strong> choses bien qui se <strong>de</strong>ssinent, nousatten<strong>de</strong>nt. Par exemple mon héroïne, Cassandre, voit Paris écolo, avec <strong>de</strong>s arbres, <strong>de</strong>spapillons, <strong>de</strong>s fleurs dans le futur.Cette réflexion s'articule-t-elle avec votre projet <strong>de</strong> l'Arbre <strong>de</strong>s possibles ?C'est aussi un <strong>de</strong> mes bébés. C'est un site internet où les gens viennent déposer leur visiondu futur et un webmaster met ces visions sous forme <strong>de</strong> feuilles sur l'arbre <strong>de</strong>s possibles.C'est une sorte <strong>de</strong> forum tourné vers le futur. Pour bien penser le futur il faut savoir bienpenser le présent. C'est ce que Cassandre nous délivre essentiellement comme messagedans mon <strong>de</strong>rnier livre. Conduire une vie, c'est comme conduire une voiture, il faut regar<strong>de</strong>rle tableau <strong>de</strong> bord, se tourner vers soi-même pour savoir qui on est, regar<strong>de</strong>r <strong>de</strong>vant,l'avenir, et puis <strong>de</strong> temps en temps aussi dans le rétroviseur, pour voir comment on est suivi.En voiture comme dans la vie, il faut avoir plusieurs niveaux <strong>de</strong> vision pour choisir lameilleure trajectoire.Que voyez-vous <strong>de</strong>rrière le <strong>par</strong>e-brise, dans votre avenir proche, comme prochain livre ?C'est un « Isidore et Lucrèce », dans la continuité <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux précé<strong>de</strong>nts livres, « <strong>Le</strong> Père <strong>de</strong> nospères » et « L'Ultime Secret ». Ce n'est pas la suite, mais c'est une nouvelle enquête <strong>de</strong> cecouple-là. Cette fois-ci, mes <strong>de</strong>ux héros enquêtent sur <strong>de</strong>s choses très peu connues <strong>de</strong> lascience et les révèlent. Cela ressemblera à un Sherlock Holmes, mais avec une dimensionpsychologique. Car c'est un couple étrange, avec <strong>de</strong>s corps disproportionnés, elle est toutepetite, lui très grand et costaud. Mon héroïne fonce, cherche l'action, mon héros masculinlui est plutôt en retrait, dans la réflexion psychologique. <strong>Le</strong>s <strong>de</strong>ux ont une manièrecomplémentaire d'enquêter. C'est un couple détonnant, elle se comporte comme unhomme, elle est assez nerveuse, mais est en même temps un concentré <strong>de</strong> féminité. Lui esttout en puissance douce, c'est une force tranquille, il est Yang. Une autre manière d'explorerles rapports homme-femme.Sources : http://www.femmezine.<strong>fr</strong>/culture/portraits/bernard_werber_miroir_cassandre_interview.html

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