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Méthode naturelle d'apprentissage par tâtonnement expérimental

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157.QXD 28/02/07 9:43 Page 29Méthode <strong>naturelle</strong>d’apprentissage <strong>par</strong>tâtonnement expérimentalEn quoi des méthodes d’apprentissage peuvent-ellesêtre <strong>naturelle</strong>s ?Y a-t-il antinomie entre les termes « méthode » et« <strong>naturelle</strong> » comme entre les termes « tâtonnement» et « expérimental » ? Méthode <strong>naturelle</strong> ettâtonnement expérimental, est-ce <strong>par</strong>adoxal ?Edmond et Janou Lémery analysent et clarifient icices deux concepts-clés de la pédagogie Freinet.OUVERTUREIl semble bien que cette problématiquemérite d’être posée ausein du mouvement ICEM commeà l’extérieur,pour une clarificationnécessaire dans la perspectived’une théorisation de nospratiques, afin que celles-ci nesoient pas considérées comme de«simples recettes pédagogiques ».NATURELLEMENT...« LA VIE EST » (C. FREINET)Lorsque C.Freinet a voulu distinguerses actions pédagogiques,fondées sur des techniques et desoutils spécifiques, des méthodestraditionnelles,c’est qu’il percevaitdéjà la co-existence de deux viesdifférentes pour l’enfant : celle del’école, artificielle, et celle, audehors,<strong>naturelle</strong>,riche en apprentissagesmultiples et efficients.Nous savons bien, aujourd’hui,et les avancées des neuroscienceset de la psychologie cognitive deces deux dernières décennies leconfirment, que l’enfant, l’adolescentet l’adulte apprennent énormémentau contact de leur environnementphysique et social, ceque les neurophysiologistes désignentsous le vocable, très significatif,de « déterminisme environnemental».Il s’agit bien, là, de processusnaturels d’apprentissages.DES MÉTHODES NATURELLES,EN QUOI ? POURQUOI ?Où est le naturel ?[Pour éviter des redites, on sereportera au numéro 35 desÉditions ICEM]Ajoutons,simplement,que deuxraisons majeures justifient unepédagogie reposant sur desméthodes <strong>naturelle</strong>s :– supprimer ou plutôt réduireles hiatus entre l’école et la vie :faire entrer la vie à l’école et sortirl’école dans le milieu externe, cequi intensifie les intérêts, la curiosité,lesmotivations intrinsèques ;– faire de l’enfant, de l’adolescentles acteurs véritables de leursapprentissages,l’enseignant intervenant«en compagnonnage ».Cela signifie offrir à l’enfant,dèsson plus jeune âge, les possibilitésd’utiliser tout son potentiel cérébral:ces fonctionnalités <strong>naturelle</strong>sdu cerveau,c’est - à - dire les processusqui transforment tout stimulusen connaissance et compétences,savoirs et savoir-faire.Or, le processus «universel » dutâtonnement expérimental répondà cette finalité de la pédagogie Freinet<strong>par</strong>ce qu’il met en oeuvre,pratiquement,dans toute situationvécue, ces diverses fonctions dechacun,fondant ainsi les méthodes<strong>naturelle</strong>s.RECHERCHELe nouvel éducateur – n° 157 – Mars 2004 29


157.QXD 28/02/07 9:43 Page 30Un proccessus naturel d’apprentissageet d’action : le tâtonnementexpérimentalRECHERCHEOUVERTURENÉ(E) POUR APPRENDRE !Tout être humain, tout au longde sa vie, plongé dans son milieunaturel, environnement physiqueet social, reçoit de la <strong>par</strong>t de cemilieu une multitude de stimuliqui déclenchent,inconsciemmentou consciemment,réactions (rétroactionset proactions) et réponsesfondant son adaptation, plus oumoins adéquate à ce milieu.Dans cette interactivité permanente,toute son activité mentale,le fonctionnement naturel de sonintelligence, donne lieu à unemultitudes d’apprentissages, <strong>par</strong>une transformation des informationsreçues en connaissances stockées,utilisables, évolutives... quel’on désigne souvent <strong>par</strong> « l’expérience», ce qui fait dire aujourd’huique l’Homme « est né pourapprendre » ou encore « est unemachine à apprendre ».Ces transformations permanentesd’informations,constituant« l’acte d’apprendre », impliquentune activité constante de soncerveau, se traduisant <strong>par</strong> lamémorisation,selon les processus«naturels », essentiels, qui <strong>par</strong>ticipentà ses divers stades :encodage,stockage pour l’acquisition,consolidationpour récupération.«La mémoire assure non seulementl’acquisition du savoir, maisaussi son avenir et son devenir.C’estun outil de communication qui faciliteles échanges et la circulationdes informations de façon chaleureuse,humanisée et personnalisée...Plus la mémoire est efficace,rapide, plus ses mécanismes sontaisés à mettre en place,plus le plaisirest grand. D’où une estime desoi accrue, née de cette satisfaction,de cette fluidité à disposeraisément de notre potentiel deconnaissances. » Monique LePoncin (Gym intelligence, Éditionsdu Rocher).Toute méthode <strong>naturelle</strong> sefonde sur ce processus mis enlumière <strong>par</strong> C. Freinet :«La méthode <strong>naturelle</strong> est laméthode normale du tâtonnementexpérimental… Notre psychologiedu tâtonnement expérimentaln’est nullement,ni notre invention,ni une nouveauté : elle est unenorme de vie. Toutes nos actions,même scientifiques,sont à base detâtonnement expérimental. Seulel’école serait-elle rebelle à cette loigénérale ? » Elise Freinet (L’itinérairede Célestin Freinet, PetiteBibliothèque Payot -1977 )L’analyse approfondie de ceprocessus , en confrontation avecles processus cognitifs de traitementde l’information (1) nouspermet de clarifier cette « normede vie » à laquelle Elise Freinet faitallusion.Ne pas confondre tâtonnementexpérimental (TE) et expériencetâtonnée (ET)Le processus du tâtonnementexpérimental fonctionne selondeux modalités :– un processus général (TE) nisimple, ni limité mais complexe,qui est un mode de conceptualisation,<strong>par</strong>approximations successives,interférentes, s’étalant plusou moins dans le temps, jusqu’àplusieurs années. Ce processusactive et réactive les mécanismes(de la «mémoire de travail » en<strong>par</strong>ticulier) de mémorisation à longterme (mémoires épisodique etsémantique) <strong>par</strong> associations,combinaisons d’expériences30Le nouvel éducateur – n° 157 – Mars 2004


157.QXD 28/02/07 9:43 Page 31tâtonnées (ET) : les informationsvécues c’est à dire traitées, stockées,récupérées.– un processus de base : l’expériencetâtonnée (ET),limitée à uneélaboration ponctuelle de savoir,fondée sur une saisie d’informations,analytico-synthétique dansune situation vécue donnée.Cette distinction, induite <strong>par</strong>C. Freinet (brochure BENP n° 36–1948 – rééditée :BTR n° 18/19,1976)est confortée <strong>par</strong> Franck Smith(L’enfant expérimentateur, NouvelEducateur n° 69)Ce processus du tâtonnementexpérimental fonctionne demanière individuelle mais aussicollective,<strong>par</strong> interactions,au seinde groupes coopératifs, qui, <strong>par</strong>combinatoire des idées ou leurcritique,l’enrichissent,l’accélèrent.Pratiquer des méthodes <strong>naturelle</strong>s,c’est favoriser, <strong>par</strong> l’organisationdes activités en alternance,la miseen oeuvre de ce processus,donc detous les mécanismes cognitifs(mémorisation, raisonnements...)pour tout individu,dans une dynamiquede groupe <strong>naturelle</strong> : «letâtonnement du groupe » et non« le tâtonnement en groupe ».La théorisation, <strong>par</strong> analyse denos pratiques et <strong>par</strong> confrontations,nombreuseset diverses,auxapports des neurosciences et dessciences cognitives de ces dernièresdécennies,nous permet d’affirmer,aujourd’hui, que le tâtonnementexpérimental, s’exerçant dans«toute activité humaine »,inconsciemmentou très consciemment(voire de manière méthodologiquechez l’adolescent), est un processusde traitement de l’informationayant un caractère «universel »comme l’exprimait,d’une manièreprémonitoire, C. Freinet.Créer les conditions favorablesà son fonctionnement « pleinrégime »C’est <strong>par</strong>tir de l’enfant tel qu’ilest, <strong>par</strong> la prise en compte de sescapacités et de ses manques, deson « quotient génétique » commede son « quotient émotionnel »,dans son interactivité avec sonmilieu environnant...Cette prise en compte se réalisesous la forme d’un compagnonnage: accueillir, saisir l’imprévu,capter le spontané,répondre à desdemandes,à des questionnements,aider chacun dans ses démarches,apporter aux moments sensibles...exploiter les situations créatricesde motivations intrinsèques... et,chemin faisant,bâtir une « culturede base », commune à tous, quis’enracine. Car le but,comme le ditMonique Le Poncin, est «d’aiderl’enfant à acquérir une intelligenceen harmonie avec lui - même et lemonde qui l’entoure. Car l’intelligencedoit être utile et créative...Une intelligence de vie. »Or, la créativité, spécificité del’être humain,occupe un «espace »important dans les activités detoutes natures, au traversdesquelles s’exercent les méthodes<strong>naturelle</strong>s d’apprentissages. C’estlà une caractéristique de la pédagogieFreinet.Cette créativité, toujoursprésente, est inhérente auxméthodes <strong>naturelle</strong>s qui la favorisent,<strong>par</strong>ce qu’elle mobilise desfacultés, des mécanismes fonctionnelsmultiples,mettant en relationsdiverses localisations cérébralesdu néo-cortex avec lescouches profondes, au niveau dusystème limbique,siège de l’affectif: l’émotionnel, le désir et le plaisirde créer.Le tâtonnement expérimentalne s’exerce-t- il pas «à pleinrégime »,justement,dans ces activitéscréatrices ?L’hypothèse, au cœur de l’expériencetâtonnée,n’est-elle pas,ellemêmecréation ?Y a-t-il incompatibilité entreméthode et tâtonnement ?Peut-on penser que, si nouscentrons les apprentissages sur leprocessus du tâtonnement expérimental,il n’y ait pas méthode etméthodologie ?Peut-on dire que «laisser tâtonner» soit une perte de temps, soitanti-méthodique ?Et, finalement, devons-nousdistinguer, voire opposer ces deuxconcepts ?Confrontations :«Le tâtonnement désigne unréajustement réitéré qui impliquel’idée d’une progression, il est unetechnique graduelle pour gagnerdu terrain. Il ne répond pas auhasard mais à un ordre complexe,il n’est pas aveugle mais intimementfinalisé.Le tâtonnement n’estpas une loterie, c’est une tactique,une méthode » écrit Grégory Benichou(3) à propos d’évolution,maisl’éducation n’est-elle pas évolution ?Se posant la problématiquesuivante (4) :« La méthode est-ellesupérieure aux tâtonnements ? »,Olivier Reboul confronte les deux,et <strong>par</strong> là-même,méthode active etméthode passive, méthode analytiqueet méthode globale.La pédagogieFreinet est-elle une méthodeglobale ?OUVERTURERECHERCHELe nouvel éducateur – n° 157 – Mars 2004 31


157.QXD 28/02/07 9:43 Page 33Approfondir les caractéristiquesdes méthodes <strong>naturelle</strong>s pour affinernos pratiques[Pour approfondir les qualitésd’une méthode active,globale...onpeut se reporter aux analysesd’O. Reboul, citées plus loin.]Pour l’enseignant, instaurer lesapprentissages <strong>par</strong> méthode <strong>naturelle</strong>,implique une méthodologierigoureuse. Ne dit-on pas, <strong>par</strong>fois,la «méthode Freinet » ?Cette méthodologie donne lieuà trois types de pratiques quipeuvent se classer ainsi :– des pratiques organisationnelles: création d’un milieu«riche » stimulant – accueil, incitations– lieux d’activités(ateliers...) ;– création de conditions favorablesà l’expression, la création, larecherche, la communication ;– des techniques pédagogiqueset des outils pour les servir ;– des pratiques interventionnistesdans les cursus individuelset collectifs que nous ne développeronspas ici. (Se reporter àcertains numéros du Nouvel Educateur(2).POUR CONCLURE...SOYONS CLAIRS !Le tâtonnement expérimentalest bien au cœur de toute méthode<strong>naturelle</strong>mentale de l’apprenant :«l’action »(au sens large).Les méthodes <strong>naturelle</strong>s consistentà créer le milieu, à organiserles apprentissages, tant sur le planindividuel que collectif,à faire s’organiserla coopérative de productionde savoirs,en facilitant les relations,de nature systémique, entrela vie scolaire et la vie environnante,grâce aux techniques d’expression,de création, de recherche, decommunication et aux outils pourles servir, selon le modèle interactifentre les deux voies d’apprentissageheuristique et didactique.Les méthodes <strong>naturelle</strong>s « àl’écoute du vivant »son sens à l’apprentissage,fondéessur la créativité, mais sans exclurecependant des démarches analytiqueset synthétiques de traitementde l’information, <strong>par</strong> leprocessus, toujours présent, duTâtonnement Expérimental, dansl’élaboration des savoirs et savoirfaire.S’enracinant dans l’environnementet le vécu de l’apprenant,uneméthode <strong>naturelle</strong> génère unedynamique qui en fait, effectivement,une méthode vivante.Edmond et Janou LèmeryOUVERTURERECHERCHEMéthode <strong>naturelle</strong> et tâtonnementexpérimental ne sont doncpas deux entités de la PédagogieFreinet alternatives, successives...l’une générale, l’autre ponctuelle.Le tâtonnement expérimental n’estpas «un mécanisme mental à<strong>par</strong>t » puisqu’il est un processusde traitement de l’information,présent dans toute activitéAinsi, ces confrontations avecdes réflexions philosophiques surl’éducation et les apports dessciences cognitives,nous éclairentet nous confortent,encore une fois,dans cette conception desméthodes <strong>naturelle</strong>s d’apprentissage,à la fois méthodes actives,bien sûr, méthodes globalesinitiales,motivantes,donnant tout(1) Tâtonnement expérimental et pédagogie Freinet,Brochure n° 35, Éditions ICEM.(2) Dossier pédagogique : Méthodes <strong>naturelle</strong>s,Nouvel Educateur n° 81, septembre 1996.(3) Grégory Benichou (docteur en philosophie etpharmacie, ESSC), Le chiffre de la vie, Éd. Seuil.(4) Olivier Reboul (philosophe de l’Education)Qu’est-ce qu’apprendre ? Col. l’Educateur, PUF.N.B : Avant tout, on se reportera aux deuxpremières références traitant des méthodes <strong>naturelle</strong>set du tâtonnement expérimental, dontnous reprenons seulement quelques éléments.Le nouvel éducateur – n° 157 – Mars 2004 33


157.QXD 28/02/07 9:43 Page 34RECHERCHEOUVERTUREAnnexesCARACTÉRISTIQUES ET INTÉRÊTS POUR LA MÉTHODE NATURELLEY a-t-il incompatibilité entreméthode et tâtonnement ?Quelles caractéristiques et quelsintérêts peut présenter uneméthode selon qu’elle estpassive, active, globale, analytique...?Comment se situe la Méthode<strong>naturelle</strong> en pédagogie Freinet ?Pour répondre à ces interrogations,nous proposons unmontage de citations extraitesde l’ouvrage d’Olivier Reboul,ancien professeur de philosophiede l’Éducation à l’universitéde Strasbourg : Qu’est-cequ’apprendre ? (PUF, 5 e édition,1993.)A PROPOS DE L’APPRENTISSAGEMÉTHODIQUE...On a tendance, bien sûr, à opposerla méthode aux tâtonnements...« Le caractère essentiel de laméthode, ce qui la distingue dutâtonnement, est l’économiedes essais et surtout des erreurs.Dans tous les cas, elle consiste :1) à prendre conscience du but,du modèle à apprendre ; 2) àdiviser ce modèle en actes assezsimples pour que le sujet puisseles exécuter ; 3) à enchaînerprogressivement ces actessimples ; 4) à récapituler lesessais jusqu’à l’éliminationtotale de tout geste <strong>par</strong>asite. »Cependant...« La méthode est donc une écoled’économie. Néanmoins, cetteopposition entre tâtonnementset méthode est peut être tropsimple pour n’être passimpliste ; celle-ci n’a pas nécessairementcet aspect purementrationnel qui lui permettrait dese passer de ceux-là. Mais,même si la pure méthode étaitpossible, serait-elle vraimentsouhaitable ? N’est-elle pas uneentrave à la spontanéité et à lacréativité de ceux qui apprennent,une atteinte à leurliberté ? »Ne pas confondre la méthodeavec ses excès et la méthodelibrement consentie« Reste que la méthode n’estvraiment éducative que si lesujet en comprend la nécessité.S’il ne voit pas le but des exercicesde détails, comme la respirationou les gammes*, ceux-cine sont plus que des corvéesqui risquent non seulement dele dégoûter d’apprendre maisplus encore de l’aliéner dans leconformisme ; tout exercicedevient dommageable dèsqu’on n’en comprend plus l’enjeu,dès qu’on est privé de voirà quoi l’on s’exerce »... (* àpropos de musique)... « La méthode, à conditionqu’elle soit comprise <strong>par</strong> l’élèveet si possible trouvée <strong>par</strong> lui,est donc ce qui lui permet deprendre en main son propreapprentissage. Alors, elle n’estpas contrainte mais liberté. »MÉTHODE PASSIVE...MÉTHODE ACTIVE...Le problème, écrit O. Reboul,est d’affronter la tâche commeun tout, quitte à échouer totalement:« Faut-il éviter à tout prix cerisque d’échec, ou faut-il enfaire au contraire une conditionde l’apprentissage lui-même ?Guillaume oppose deuxméthodes : la méthode« passive », où le sujet est guidédu dehors pour accomplir dèsle début l’acte sous sa formedéfinitive et sans se tromper, àla méthode « active » où le sujetest livré à lui-même et doit arriver,à ses risques et périls, aurésultat. Et sur trois exemples,il va montrer la supériorité dela seconde sur la première. »« Dans ces trois exemples, entout cas, la méthode actives’avère être la meilleure, sinonla seule ; c’est <strong>par</strong>ce qu’elle vadu tout aux <strong>par</strong>ties, alors quesi l’on commence <strong>par</strong> les<strong>par</strong>ties, on risque de ne jamaistrouver le tout. De plus, cesexemples montrent que leserreurs jouent un rôle positif,favorable à l’apprentissage ;elles ne sont pas des « fautes »,mais des essais actifs d’ajustementde la conduite au modèlesouhaité. Même quand elle estun véritable échec, <strong>par</strong> exempleune chute, l’erreur reste utile,car se tromper est encore le plussûr moyen de comprendre lescauses de l’erreur et d’éviterainsi qu’elle ne survienne troptard, une fois l’apprentissageterminé. Felix culpa est unegrande vérité pédagogique. » P.Guillaume, Manuel de psychologie,PUF.MÉTHODE GLOBALE,MÉTHODE ANALYTIQUERien n’existe à l’état pur !« ... Par là même, la méthodeglobale comporte une marge detâtonnements. Ce qui nousamène à réviser l’opposition <strong>par</strong>trop simpliste entre l’apprentissage<strong>par</strong> essais et erreurs etl’apprentissage méthodique.D’abord, il n’existe guère d’apprentissage<strong>par</strong> essais et erreursà l’état pur. Les rats eux-mêmes,quand on les lâche dans unlabyrinthe, ne font pas n’importequoi ; ils sont guidés <strong>par</strong>34Le nouvel éducateur – n° 157 – Mars 2004


157.QXD 28/02/07 9:43 Page 35une tendance, <strong>par</strong> exemplegarder la direction initiale, quiagit comme une hypothèse detravail qui sera rectifiée au furet à mesure des essais.Inversement, il n’existe pasd’apprentissage purementméthodique, qui permettraitd’exclure toute erreur et toutrisque. La meilleure méthodene peut éliminer les tâtonnements...»Ainsi, O. Reboul, en nousdémontrant qu’il n’y a pas deméthode sans tâtonnements,pas plus qu’il n’y a de tâtonnementssans une méthode quis’élabore <strong>par</strong> l’apprenant luimême,nous conforte dans cetteperspective d’apprentissage <strong>par</strong>tâtonnement expérimental,processus toujours présent danstoute forme d’activité, doncprocessus inhérent à l’espècehumaine, naturel et universelcomme l’affirmait C. Freinet.Quels intérêts pour uneméthode globale ?A propos des caractères d’uneméthode, O. Reboul confronteméthode analytique et méthodeglobale...« On lui reproche d’être analytique,c’est-à-dire axée sur ladécomposition et la recompositiondes actes à apprendre,alors qu’une méthode globaleserait nettement plus féconde<strong>par</strong>ce que plus <strong>naturelle</strong>. »« Il faut reconnaître à laméthode globale un doubleavantage. D’abord, ellecomporte une très forte motivation; il est bien plus intéressantde faire de la musiqueque du solfège, de converserdans une langue que de fairedes exercices structuraux, delire que d’épeler. D’autre <strong>par</strong>t,elle est effectivement plus« <strong>naturelle</strong> » que la méthodeanalytique, autrement dit plusconforme à la réalité de l’apprentissage.»« La méthode globale est supérieurepuisqu’elle permet de« constituer le tout aussitôt quepossible, pour procéder ensuiteà une différenciation progressivedes <strong>par</strong>ties. »« Toujours est-il que la méthodeglobale reste une méthode, etnon pas un retour aux tâtonnements,encore qu’elle leurlaisse plus de place dans laphase initiale que la méthodeanalytique...... Une méthode, ensuite, <strong>par</strong>cequ’on procède, dans un secondtemps, « à une différenciationprogressive des <strong>par</strong>ties » ; ainsi,l’élève de Freinet, après avoirécrit son texte, corrige ses fautesde français et d’orthographejusqu’à ce qu’il soit imprimable...»De plus, O. Reboul ajoute :« Plus généralement, dans unapprentissage quel qu’il soit, iln’y a progrès que si l’apprentiest à même d’isoler l’acte qu’ilsait mal faire et de l’exercer à<strong>par</strong>t, sans perdre de vue pourautant l’enjeu de l’exercice. »Cela évoque, pour nous, « lespaliers de répétitions » (schémaen escalier de C. Freinet), répétitionsd’entraînement motivées,auxquelles répondenttechniques et outils (l’autocorrectionen <strong>par</strong>ticulier).La pédagogie Freinet, uneméthode globalePour O. Reboul, la pédagogieFreinet, qu’il cite commeexemple à plusieurs reprises, secaractérise comme uneméthode globale <strong>par</strong> unedémarche générale fondée surle tâtonnement expérimental.Il confirme que la méthodeglobale comporte certainesformes de tâtonnements, en<strong>par</strong>ticulier dans ce cas :« A titre d’exemple, citons ceque Freinet nomme « le tâtonnementexpérimental », méthodeglobale appliquée à l’acquisitiondu savoir, et quiremplace le cours <strong>par</strong> la librerecherche des élèves. Il s’agitbien d’un « tâtonnement » ; unélève, ou un groupe, se poseune question... Et c’est à lui detrouver la réponse ; il regardera...cherchera dans les fichesou dans les livres. Mais il s’agitd’un tâtonnement bien encadré,qui n’a rien d’aveugle. Lesenfants <strong>par</strong>tent d’une questionprécise, font des hypothèses...puis des expériences ; ils disposenten outre d’un matérieladéquat... enfin le maître est làpour les aider à trouver uneméthode de recherche et pourleur fournir les documents pertinents.Son rôle est sans douteplus important que dans l’enseignementtraditionnel, et la« leçon a posteriori » luidemande plus d’efforts que lesleçons routinières répétéeschaque année.L’intérêt de la méthode globaleest donc de motiver fortementl’apprentissage en permettantà l’élève d’en trouver lui-mêmel’enjeu. Mais global ne signifiepas laisser-aller ou débraillé. Etl’opposition entre l’analytiqueet le global n’est pas celle entrela contrainte et le hasard, maisentre une méthode mécaniqueet une méthode qui s’appuiedavantage sur la liberté. »OUVERTURERECHERCHELe nouvel éducateur – n° 157 – Mars 2004 35

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