N°72-Septembre-Octobre 2009 - Chambre de métiers et de l'artisanat

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STYLEde vieArtisan est un métier, doublé d’une passionparfois dévorante. Une raison de prendre du tempspour se trouver une autre activité, qui reste un loisiroù la pression est donc sans comparaison.Malgré les contraintes de leur métier,certains ont fait ce choix et cela leur réussit.Rencontre avec ces artisans doublement passionnés.LOISIRSArtisans, mais pas seulement !Francine est restauratrice detableaux, Françoise, maîtreverrier, Philippe travailledans la maçonnerie, Micheltient son salon de coiffure et Rémyest serrurier. Mais ils sont aussi choriste,marathonien, entraîneur debasket, collectionneur de vaisselleancienne ou encore passionné parles coffres forts-anciens. Pour certains,le lien avec leur profession estévident, et pour d’autres, c’est dansun univers bien différent qu’ils ontchoisi de s’évader.Un prolongement■de son métier d’artisanLes coffres-forts anciens, Rémi n’yest pas arrivé par hasard. Serrurierdepuis seulement 3 ans, il a toujoursété un passionné : « Ça date de mongrand-père, il en avait un. Et m’a ditque si je l’ouvrais, il m’offrirait unmerle blanc. Alors j’ai essayé et je mesuis acharné. Un jour, j’ai réussi, jel’ai ouvert. Ma passion était née. »C’est d’ailleurs de ce « don » héritéde son grand père, maître ferronnier,qu’il fera son métier après avoir travaillécomme responsable de parcoursde golf jusqu’à 41 ans. Pour abritersa collection, Rémi a dû installer unatelier de 170 m 2 . Jean, 49 ans, a denombreuses passions. Mais une d’entreelles est en lien direct avec sa boucherie: sa collection de pinces à gigot.« C’est amusant car on n’en trouveplus aujourd’hui », précise-t-il.Oublier les soucis■et s’épanouir dans autrechoseParce qu’il faut « penser à autrechose qu’au travail, sinon on tourneen rond », Jean a deux autres loisirs :il collectionne la vaisselle ancienneet fait du cyclisme. « J’aime les collections.Avec la vaisselle, je trouvel’art, la géographie, l’histoiremais aussi la décoration. » Et quandil pédale, Jean « évacue le boulotet s’évade ». « Quand on a la têteÀ 55 ans, Michel Lartigue, artisan coiffeur, reste très actif : « je viens de faire une étapede la France en Courant et je pars pour New York à la fin de l’année ».© CMA 32dans le guidon, on ne voit plus laroute et de pratiquer un sport permetde sortir de son activité pourmieux voir les perspectives », expliqueBéatrice Nozary, ergonome auCIAMT (Centre inter entreprise etartisanal dedecine du travail)et kinésithérapeute. « Ceux qui neprennent pas de temps pour eux lepaieront à court, moyen ou longterme. Lorsqu’on pratique un sport,on fait travailler les muscles autrementque dans son travail. Et on peutprévenir certains problèmes de dosfréquents pour certains artisans. Detoute façon, c’est forcément bénéfiquepour le travail puisqu’on dortmieux et que l’on parvient à prendredu recul », ajoute la spécialiste.Pour Francine, 60 ans, restauratricede tableaux, « aller à la chorale,c’est un moment pour me retrouver,mon exutoire ». Depuis 16 ans, ellese passionne pour cette activité. « Onlaisse ses problèmes de côté. Et c’estessentiel de faire autre chose que cemétier qui vous bouffe littéralement.Quand j’arrive épuisée, je ressors enforme ». La chorale lui a apporté unechose inestimable puisqu’elle y a rencontréson compagnon : « l’amour dema vie », précise-t-elle. Aujourd’huivice-présidente de l’associationAmadeus, elle n’a pas hésité à enrôlerdes collègues artisans, a réussi àconvaincre Françoise, 48 ans, maîtreverrier. « Chaque année, elle merelançait lors qu’on se voyait au Salondes métiers d’art. Ca me tenait à cœurdepuis longtemps alors je me suislancée l’année dernière. » Une choseest sûre, elle ne le regrette pas : « Jepeux m’évader du monde du vitrail.C’est épanouissant de voir d’autresgens ». Ainsi depuis un an, Françoise14 ● Le monde des artisans ● septembre-octobre 2009

Depuis un an, Françoise (au centre) quitte l’atelier à 17h30 tous les jeudis coûte que coûte :« Je peux m’évader du monde du vitrail. C’est épanouissant de voir d’autres gens ».quitte l’atelier à 17h30 tous les jeudiscoûte que coûte. « Ça me plaît tellementque je vais prendre des cours depiano pour m’améliorer. » Pour elle,cette activité est essentielle et bénéfiquepour le travail : « l’artisan doitsortir de son atelier pour que les chosesavancent, évoluent... »Le cercle de connaissances issues dela pratique d’un loisir ou d’un sportpeut même être un lieu de développementprofessionnel. « J’ai connuun imprimeur qui jouait au golf eta ainsi trouver plusieurs clients ! »relate Béatrice Nozary. Faisant référenceaux grandes entreprises quiincitent leurs salariés à pratiquerune activité sportive, elle préciseque, « c’est parce qu’elles saventqu’ils en seront plus performants.Et cela est valable également pourles artisans ».■ Découvrir le mondeDepuis 10 ans, Michel, artisan coiffeur,fait de la course à pied. « Aprèsun malaise cardiaque, j’ai décidéde m’occuper un peu plus de moncorps. » Il ne fait pas les choses àmoitié, puisqu’avec un collègue, ilparticipe à des marathons à l’étranger: Londres, Berlin, Rotterdam…« J’ai couru sur la route de la Soiependant deux semaines en Chine,c’était une belle aventure. » Il pratique« pour le plaisir et pour se prouverqu’il en est capable ». À 55 ans,il reste très actif : « je viens de faireune étape de la France en Courantet je pars pour New-York à la fin del’année ». Il espère pouvoir continuerle plus longtemps possible : « quandon a une vie professionnelle plutôtprenante, parfois un peu usante,ça vide la tête. On se sent mieux. »Sans forcément pousser jusqu’auxÉtats-Unis, Francine et Françoiseaussi voient du pays avec la chorale: « Le Canada, l’Italie, l’Écosse...on se balade. On fait des échangesavec d’autres chorales et des concertscaritatifs. » Un moyen de partageleur passion avec le public et de fairedes rencontres enrichissantes. Pour© AmadeusBéatrice Nozary, « les artisans sontsouvent un peu isolés et pratiquer unsport ou un loisir peut être un moyende rencontrer d’autres personnes ».Le samedi et le dimanche, Philippe,55 ans, artisan maçon, troque satruelle et sa taloche pour sa casquetted’entraîneur de basket : il s’occuped’une équipe féminine. « Il n’yavait rien pour les filles en sport collectifdans le village, donc j’ai étécontent quand le club de basket s’estcréé. Et, de fil en aiguille, me voilàdevenu président.» Ses filles jouent,puis entraînent dans le club, et safemme aide également. « Nous partageonscette passion en famille,c’est précieux. » Pour lui, c’est unbon apprentissage de la vie : « ongagne, on perd, c’est une formed’éducation. »Quand il pédale, Jean Bardy, 49 ans,boucher-charcutier « évacue le boulotet s’évade. Ce n’est pas la même fatigueque celle du travail, ça fait du bien ».© Jean BardyA VIS D’EXPERTLes conseils de Béatrice NozaryErgonome au CIAMT (Centre inter entreprise et artisanal dedecine du travail) et kinésithérapeute.Pratiquer un sport peut apporter un bien être physiqueet moral aux artisans, pour autant qu’ils respectentcertains principes.Se dégager du tempsPour profiter des bienfaits d’une telle activité, il faut se dégagerdu temps pour l’exercer. Difficile de le faire entre deux rendezvous.Il n’y a pas d’horaires conseillés pour la pratique du sport,le créneau à choisir est celui qui est adapté au rythme de travailde l’artisan.Pratiquer de façon régulière et progressiveLa plupart des effets secondaires bénéfiques ne se font sentirqu’au bout d’un certain temps de pratique. Il vaut mieux faire20 minutes de marche tous les jours qu’une heure de joggingtous les mois. Si vous ne pratiquez qu’une fois par mois, vousserez courbaturé le lendemain et ne percevrez pas les bénéficesde l’activité. Il vaut mieux éviter de commencer par un sportviolent quand on n’en a pas fait depuis longtemps.Autre conseil : il est évidemment important de faire une visitemédicale avant de se lancer pour éviter toute contre-indication.Le monde des artisans ● septembre-octobre 2009 ● 15

Depuis un an, Françoise (au centre) quitte l’atelier à 17h30 tous les jeudis coûte que coûte :« Je peux m’éva<strong>de</strong>r du mon<strong>de</strong> du vitrail. C’est épanouissant <strong>de</strong> voir d’autres gens ».quitte l’atelier à 17h30 tous les jeudiscoûte que coûte. « Ça me plaît tellementque je vais prendre <strong>de</strong>s cours <strong>de</strong>piano pour m’améliorer. » Pour elle,c<strong>et</strong>te activité est essentielle <strong>et</strong> bénéfiquepour le travail : « l’artisan doitsortir <strong>de</strong> son atelier pour que les chosesavancent, évoluent... »Le cercle <strong>de</strong> connaissances issues <strong>de</strong>la pratique d’un loisir ou d’un sportpeut même être un lieu <strong>de</strong> développementprofessionnel. « J’ai connuun imprimeur qui jouait au golf <strong>et</strong>a ainsi trouver plusieurs clients ! »relate Béatrice Nozary. Faisant référenceaux gran<strong>de</strong>s entreprises quiincitent leurs salariés à pratiquerune activité sportive, elle préciseque, « c’est parce qu’elles saventqu’ils en seront plus performants.Et cela est valable également pourles artisans ».■ Découvrir le mon<strong>de</strong>Depuis 10 ans, Michel, artisan coiffeur,fait <strong>de</strong> la course à pied. « Aprèsun malaise cardiaque, j’ai décidé<strong>de</strong> m’occuper un peu plus <strong>de</strong> moncorps. » Il ne fait pas les choses àmoitié, puisqu’avec un collègue, ilparticipe à <strong>de</strong>s marathons à l’étranger: Londres, Berlin, Rotterdam…« J’ai couru sur la route <strong>de</strong> la Soiependant <strong>de</strong>ux semaines en Chine,c’était une belle aventure. » Il pratique« pour le plaisir <strong>et</strong> pour se prouverqu’il en est capable ». À 55 ans,il reste très actif : « je viens <strong>de</strong> faireune étape <strong>de</strong> la France en Courant<strong>et</strong> je pars pour New-York à la fin <strong>de</strong>l’année ». Il espère pouvoir continuerle plus longtemps possible : « quandon a une vie professionnelle plutôtprenante, parfois un peu usante,ça vi<strong>de</strong> la tête. On se sent mieux. »Sans forcément pousser jusqu’auxÉtats-Unis, Francine <strong>et</strong> Françoiseaussi voient du pays avec la chorale: « Le Canada, l’Italie, l’Écosse...on se bala<strong>de</strong>. On fait <strong>de</strong>s échangesavec d’autres chorales <strong>et</strong> <strong>de</strong>s concertscaritatifs. » Un moyen <strong>de</strong> partageleur passion avec le public <strong>et</strong> <strong>de</strong> faire<strong>de</strong>s rencontres enrichissantes. Pour© Ama<strong>de</strong>usBéatrice Nozary, « les artisans sontsouvent un peu isolés <strong>et</strong> pratiquer unsport ou un loisir peut être un moyen<strong>de</strong> rencontrer d’autres personnes ».Le samedi <strong>et</strong> le dimanche, Philippe,55 ans, artisan maçon, troque satruelle <strong>et</strong> sa taloche pour sa casqu<strong>et</strong>ted’entraîneur <strong>de</strong> bask<strong>et</strong> : il s’occuped’une équipe féminine. « Il n’yavait rien pour les filles en sport collectifdans le village, donc j’ai étécontent quand le club <strong>de</strong> bask<strong>et</strong> s’estcréé. Et, <strong>de</strong> fil en aiguille, me voilà<strong>de</strong>venu prési<strong>de</strong>nt.» Ses filles jouent,puis entraînent dans le club, <strong>et</strong> safemme ai<strong>de</strong> également. « Nous partageonsc<strong>et</strong>te passion en famille,c’est précieux. » Pour lui, c’est unbon apprentissage <strong>de</strong> la vie : « ongagne, on perd, c’est une formed’éducation. »Quand il pédale, Jean Bardy, 49 ans,boucher-charcutier « évacue le boulot<strong>et</strong> s’éva<strong>de</strong>. Ce n’est pas la même fatigueque celle du travail, ça fait du bien ».© Jean BardyA VIS D’EXPERTLes conseils <strong>de</strong> Béatrice NozaryErgonome au CIAMT (Centre inter entreprise <strong>et</strong> artisanal <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cine du travail) <strong>et</strong> kinésithérapeute.Pratiquer un sport peut apporter un bien être physique<strong>et</strong> moral aux artisans, pour autant qu’ils respectentcertains principes.Se dégager du tempsPour profiter <strong>de</strong>s bienfaits d’une telle activité, il faut se dégagerdu temps pour l’exercer. Difficile <strong>de</strong> le faire entre <strong>de</strong>ux ren<strong>de</strong>zvous.Il n’y a pas d’horaires conseillés pour la pratique du sport,le créneau à choisir est celui qui est adapté au rythme <strong>de</strong> travail<strong>de</strong> l’artisan.Pratiquer <strong>de</strong> façon régulière <strong>et</strong> progressiveLa plupart <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s secondaires bénéfiques ne se font sentirqu’au bout d’un certain temps <strong>de</strong> pratique. Il vaut mieux faire20 minutes <strong>de</strong> marche tous les jours qu’une heure <strong>de</strong> joggingtous les mois. Si vous ne pratiquez qu’une fois par mois, vousserez courbaturé le len<strong>de</strong>main <strong>et</strong> ne percevrez pas les bénéfices<strong>de</strong> l’activité. Il vaut mieux éviter <strong>de</strong> commencer par un sportviolent quand on n’en a pas fait <strong>de</strong>puis longtemps.Autre conseil : il est évi<strong>de</strong>mment important <strong>de</strong> faire une visitemédicale avant <strong>de</strong> se lancer pour éviter toute contre-indication.Le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s artisans ● septembre-octobre <strong>2009</strong> ● 15

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