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3. La logique sous le coup de l'émotion - CEA

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DOSSIER<strong>La</strong> <strong>logique</strong><strong>sous</strong> <strong>le</strong> <strong>coup</strong><strong>de</strong> l’émotionIl suffit parfois d’undéclic émotionnelpour éviter une erreur<strong>de</strong> <strong>logique</strong> pure.Ainsi, nos sentimentspeuvent nousconduire à mieuxsolliciter notre cortex.<strong>CEA</strong>/Dcom - www.cea.fr© <strong>CEA</strong> 2002 - Tous droits réservés.Sommes-nous déraisonnab<strong>le</strong>s lorsquenous nous laissons al<strong>le</strong>r à nospassions? Selon Descartes, l’hommedoit apprendre à maîtriser ses émotions et àrediriger son esprit <strong>de</strong>s erreurs <strong>de</strong> raisonnementvers la pensée <strong>logique</strong>. « Mais faire <strong>de</strong>serreurs <strong>de</strong> raisonnement n’est pas forcémentsigne d’illogisme», rétorque Olivier Houdé.Ce professeur <strong>de</strong> psychologie cognitive <strong>de</strong>Science qui rend compte<strong>de</strong>s compétencescognitives à partir<strong>de</strong>s comportements.Il s’agit d’étudier<strong>le</strong>s connaissances,<strong>le</strong>ur organisationet <strong>le</strong> fonctionnementcognitif.l’université Paris-V,chercheur au Grouped’imagerie neurofonctionnel<strong>le</strong>(GIN)du <strong>CEA</strong>/CNRS, àCaen, croit même àune certaine formed’intelligence émotionnel<strong>le</strong>: « Certaines <strong>de</strong> nos émotions, lapeur <strong>de</strong> se tromper notamment, peuventcorriger nos erreurs <strong>de</strong> raisonnement. »Des erreurs, nous en faisons à notre insu,sans pour autant avoir <strong>de</strong> problème <strong>de</strong><strong>logique</strong>. C’est <strong>le</strong> cas lorsque nous sommesconfrontés à un raisonnement conditionnel.Par exemp<strong>le</strong> : « S’il n’y a pas <strong>de</strong> carré rougeà gauche, alors il y a un cerc<strong>le</strong> jaune à droite.»Quel<strong>le</strong>s formes géométriques <strong>de</strong> cou<strong>le</strong>urdoit-on sé<strong>le</strong>ctionner et comment doit-on<strong>le</strong>s placer pour réfuter cette règ<strong>le</strong> ? Un carrérouge à gauche d’un cerc<strong>le</strong> jaune, répondrions-nous,sûrs <strong>de</strong> nous-mêmes. Et nousaurions tort. Car nous venons <strong>de</strong> commettreun biais d’appariement perceptif.Autrement dit, au lieu <strong>de</strong> se concentrer sur<strong>le</strong> raisonnement <strong>logique</strong>, notre cerveau butesur la négation et se focalise sur <strong>le</strong>s mots,<strong>le</strong>s formes et l’espace. Les images par TEP<strong>le</strong> montrent bien.<strong>La</strong> peur est bonne conseillèreSeu<strong>le</strong>s s’activent <strong>le</strong>s aires <strong>de</strong>la perception visuo-spatia<strong>le</strong>. Dans notretête, <strong>de</strong>ux stratégies, l’une <strong>logique</strong>, l’autre© Ojéda/Le Mage - RMNLES DÉFIS DU cea • JUILLET-AOÛT 2002 - N°92 •6


IMAGERIE CÉRÉBRALEperceptive, se té<strong>le</strong>scopent. Dans 90 % <strong>de</strong>scas, c’est la secon<strong>de</strong> qui l’emporte. Expliquerla <strong>logique</strong> du raisonnement n’y changera rien.<strong>La</strong> stratégie perceptive fait blocage. Sauf sil’on pointe du doigt <strong>le</strong> piège dans <strong>le</strong>quel nousentraîne notre perception. <strong>La</strong> peur <strong>de</strong> se tromperpermet d’inhiber la stratégie perceptiveet <strong>de</strong> rétablir la déduction <strong>logique</strong>. « <strong>La</strong> TEPen a apporté la preuve irréfutab<strong>le</strong>. On observeun changement <strong>de</strong> stratégie par <strong>le</strong> bascu<strong>le</strong>mentanatomique <strong>de</strong>s fonctions perceptives<strong>de</strong> la partie postérieure du cortex vers<strong>le</strong>s fonctions <strong>logique</strong>s préfronta<strong>le</strong>s », souligneOlivier Houdé. Le cortex préfrontal estaussi impliqué dans la prise <strong>de</strong> conscience<strong>de</strong> conflits et <strong>le</strong> sentiment <strong>de</strong> soi.Il suffit donc parfois d’un déclic émotionnelpour réparer nos erreurs. <strong>La</strong> peur, <strong>le</strong> stress,mais aussi <strong>le</strong> plaisir. Comme <strong>le</strong> rapporte OlivierHoudé: «Alignez <strong>de</strong>vant un jeune enfant <strong>de</strong>spions <strong>de</strong> cou<strong>le</strong>ur. Éta<strong>le</strong>z-en <strong>le</strong> même nombre<strong>de</strong>vant vous mais plus espacés. L’enfantdira que vous avez plus <strong>de</strong> pions que lui, assimilantla longueur au nombre. Remplacez<strong>le</strong>s pions par <strong>de</strong>s bonbons. Immédiatement,l’enfant en trouvera autant… » Qui a dit quela gourmandise est un vilain défaut ? ■Olivier DonnarsLe cerveau ne se laissepas acheterAppâter pour mieux gagner. Tel<strong>le</strong> est la <strong>de</strong>vise <strong>de</strong>s jeux télévisés.Pourtant, <strong>le</strong> cerveau ne se laisse pas si faci<strong>le</strong>ment acheter.Contrairement à l’idée reçue, <strong>le</strong>s candidats ne dévoi<strong>le</strong>nt pas plus <strong>de</strong>ta<strong>le</strong>nts cachés par appât du gain. Motivés, ils <strong>le</strong> sont certainementpour mieux s’impliquer dans une tâche ou un exercice mental.Mais cela ne suffit pas à décup<strong>le</strong>r <strong>le</strong>urs performances.Bruno Dubois, neurologue à l’hôpital <strong>de</strong> la Salpêtrière (Inserm), ena fait la preuve par l’image, avec l’IRMf, en collaboration avec <strong>le</strong> <strong>CEA</strong>.Il a soumis <strong>de</strong>s volontaires à une tâche <strong>de</strong> perception : repérer <strong>le</strong>sanalogies entre <strong>de</strong>s <strong>le</strong>ttres présentées à <strong>de</strong>s interval<strong>le</strong>s <strong>de</strong> tempscroissants. À chaque niveau <strong>de</strong> difficulté, une récompense pécuniaire.Au cours <strong>de</strong> la tâche, <strong>de</strong>ux zones cortica<strong>le</strong>s s’activent : <strong>le</strong> centre<strong>de</strong> la motivation en région ventra<strong>le</strong> et <strong>le</strong> centre opérationnel enzone dorsa<strong>le</strong>. <strong>La</strong> récompense renforce bien la motivation avantla planification <strong>de</strong> la tâche. Mais dès l’exercice commencé et au furet à mesure <strong>de</strong> l’élévation <strong>de</strong>s gains, <strong>le</strong> système motivationnels’éteint progressivement au profit <strong>de</strong> la zone opérationnel<strong>le</strong>. Un effetcoordonné et synchronisé vraisemblab<strong>le</strong>ment par une troisième zoneque l’IRMf a localisé dans la région préfronta<strong>le</strong> du cerveau. « Cettedésactivation pourrait être <strong>le</strong> filtre d’émotions trop intenses venuesperturber nos performances cognitives », estime Bruno Dubois.Serait-ce cela la domestication <strong>de</strong>s passions, chère à Descartes ?Formes et cou<strong>le</strong>urs perturbent <strong>le</strong> raisonnementTest <strong>logique</strong>« S’il n’y a pas <strong>de</strong> carré rougeà gauche, alors il y a un cerc<strong>le</strong>jaune à droite. »Choisissez une combinaison<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux pastil<strong>le</strong>s qui réfutecette règ<strong>le</strong>.ErreurRéponse{<strong>logique</strong>Avant apprentissageAprès apprentissageCe test <strong>de</strong> <strong>logique</strong> recè<strong>le</strong> unpiège dans <strong>le</strong>quel tombentplus <strong>de</strong> 90 % <strong>de</strong>s sondés. Ilsrépon<strong>de</strong>nt « un carré rougeà gauche d’un cerc<strong>le</strong> jaune »lorsqu’on <strong>le</strong>ur <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>réfuter la règ<strong>le</strong>. Focalisé sur<strong>le</strong>s mots, <strong>le</strong>s formes et <strong>le</strong>scou<strong>le</strong>urs, <strong>le</strong> cerveau n’activeque <strong>le</strong>s zones perceptives(en haut à droite). Ce n’estqu’après un apprentissagelié à <strong>de</strong>s avertissementsinduisant la peur <strong>de</strong>se tromper, donc l’activation<strong>de</strong>s zones émotionnel<strong>le</strong>s,que la <strong>logique</strong> prévaut(en bas à droite).Extrait <strong>de</strong> Cerveau et psychologie © PUF<strong>CEA</strong>/Dcom - www.cea.fr© <strong>CEA</strong> 2002 - Tous droits réservés.LES DÉFIS DU cea • JUILLET-AOÛT 2002 - N°92 •7

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