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Phénomène de Raynaud - UMVF

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45Item 327Phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong>Insérer les T1Objectifs pédagogiquesENCDevant un phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong>, argumenter les principales hypothèsesdiagnostiques et justifier les examens complémentaires pertinents.COFERSavoir reconnaître les manifestations cliniques du phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> et enfaire le diagnostic.Savoir orienter l’enquête étiologique et connaître la démarche diagnostique <strong>de</strong>vantun phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> initial.Connaître les maladies générales et autres maladies inflammatoires, vasculaires,hématologiques, etc. pouvant s’associer à un phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong>.Connaître les causes locales et régionales du phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong>.Connaître les médicaments contre-indiqués en cas <strong>de</strong> phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> etconnaître les traitements médicamenteux symptomatiques et mesures associées, letraitement étiologique et la prévention <strong>de</strong>s complications, dont les nécrosesischémiques.DÉFINITIONLe phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> est un trouble vasomoteur caractérisé par une ischémieparoxystique <strong>de</strong>s extrémités (acrosyndrome traduisant l’arrêt brutal mais transitoire<strong>de</strong> la circulation artérielle digitale).1


Il s’agit d’un diagnostic d’interrogatoire, il est rare que la crise soit constatée lors <strong>de</strong>la consultation (photo 15 dans le cahier couleur). La crise se déroule habituellementen trois phases :– la phase ischémique dite syncopale : blanche et froi<strong>de</strong> (quelques minutes,parfois plus prolongée ; elle est parfois totalement isolée) ;– la phase dite asphyxique : aspect bleu avec dysesthésies le plus souventdouloureuses ;– la phase <strong>de</strong> récupération : doigts tuméfiés, rouges et douloureux.Cette crise est favorisée par : une exposition au froid, les changements <strong>de</strong>température, l’humidité. Les émotions, le stress sont également <strong>de</strong>s facteursfavorisants. Tous les doigts ne sont pas nécessairement intéressés, le phénomène<strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> peut être limité à un doigt, voire à une phalange. Lorsque les lésionsvasculaires s’aggravent, le phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> peut toucher le nez, les oreilles,les orteils, les extrémités.On distingue la maladie <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> où le phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> est isolé et noncompliqué, <strong>de</strong>s phénomènes <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> dits secondaires qui sont associés à uneautre pathologie (<strong>Raynaud</strong> plus sévères pouvant se compliquer <strong>de</strong> troublestrophiques).DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL– L’acrocyanose : anomalie <strong>de</strong> la coloration distale caractérisée par une peaufroi<strong>de</strong> (débit sanguin faible par vasoconstriction) et érythrosique (volumesanguin élevé secondairement).– L’érythromélalgie ou érythermalgie : la peau est cette fois-ci chau<strong>de</strong>,vasodilatation et débit sanguin élevé, rouge et douloureuse.ÉPIDÉMIOLOGIEEn France, la prévalence du phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> est <strong>de</strong> 15 % chez la femme,10 % chez l’homme. Dans la population générale, il s’agit d’une maladie <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong>primitive dans 85 % <strong>de</strong>s cas chez la femme, 45 % <strong>de</strong>s cas chez l’homme.ÉTIOLOGIEPhénomènes <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> secondairesUne démarche diagnostique très stéréotypée doit être engagée. Elle est basée surl’interrogatoire et l’examen physique permettant <strong>de</strong> rechercher les causessecondaires <strong>de</strong> phénomènes <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong>.2


Le phénomène est-il uni ou bilatéral ?Le phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> est habituellement bilatéral.L’existence d’un phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> unilatéral doit systématiquement faireévoquer une cause locorégionale (palpation du creux sus-claviculaire, <strong>de</strong>s poulsdistaux) et pratiquer une radiographie du rachis cervical (recherche d’une côtecervicale) et un écho-doppler pour rechercher un obstacle sur les vaisseaux axillosous-claviersou plus distaux.Rechercher les facteurs locaux ou microtraumatiques– Un syndrome <strong>de</strong> la traversée cervicobrachiale ou du défilé doit êtrerecherché par la manœuvre d’Adson (extension du rachis et rotation <strong>de</strong> latête du coté examiné, le bras examiné étant en abduction et rotationexterne) qui déclenche le phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong>.– La manœuvre d’Allen (compression <strong>de</strong>s artères radiales et cubitales, avecmouvements d’ouverture et <strong>de</strong> fermeture répétés <strong>de</strong> la main, la main <strong>de</strong>vientexsangue ; puis on décomprime l’une <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux artères en observant letemps et l’aspect <strong>de</strong> recoloration) permet <strong>de</strong> situer l’occlusion sur l’artèrecubitale ou radiale.– Syndrome du marteau hypothénar avec anévrysme <strong>de</strong> l’arca<strong>de</strong> palmairesuperficielle (pathologie professionnelle).– La maladie <strong>de</strong>s vibrations (pathologie professionnelle).– Un canal carpien.Éliminer les médicaments inducteurs ou la prise <strong>de</strong> toxiques– β-bloquants (même en collyre).– Ergot <strong>de</strong> seigle et ses dérivés.– Imipraminiques, amphétamines.– Œstro-progestatifs.– Interféron α.– Chimiothérapie type bléomycine, vinblastine.– Ciclosporine.– Arsenic, chlorure <strong>de</strong> vinyle (cause professionnelle à rechercher).Rechercher une profession à risque– Utilisation d’engins vibrants.– Utilisation répétée du marteau.– Canal carpien symptomatique <strong>de</strong> microtraumatismes répétés.3


– Intoxication professionnelle au chlorure <strong>de</strong> vinyle, à la silice, à l’arsenic.Rechercher une artériopathie oblitérante– Artériopathie athéromateuse favorisée par le tabagisme.– Embolie distale.– Syndrome du défilé costo-claviculaire.– Maladie <strong>de</strong> Buerger : il s’agit d’un diagnostic clinique et artériographiquetraduisant l’existence d’une artériopathie distale inflammatoire :• homme jeune, fumeur dans 95 % ;• artériopathies <strong>de</strong>s membres inférieurs : claudication au niveau <strong>de</strong> laplante <strong>de</strong>s pieds, ischémie distale ;• parfois manifestations veineuses avec thrombose superficielle ;• manifestations rhumatologiques dans 10 % <strong>de</strong>s cas avec <strong>de</strong>smonoarthrites pouvant précé<strong>de</strong>r les signes cliniques ;• il n’existe pas <strong>de</strong> syndrome inflammatoire, pas d’anomalie <strong>de</strong>l’hémostase, pas <strong>de</strong> facteurs antinucléaires.– Vascularite (cf. infra).– Syndrome para-néoplasique.Rechercher <strong>de</strong>s éléments en faveur d’une connectivite ou d’unevasculariteLe phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> est présent dans :– 95 % <strong>de</strong>s scléro<strong>de</strong>rmies, souvent sévères et compliquées <strong>de</strong> nécroses(photo 16 dans le cahier couleur) ;– 80 % <strong>de</strong>s connectivites mixtes ;– 20 % <strong>de</strong>s lupus ;– 10 % <strong>de</strong>s polyarthrites rhumatoï<strong>de</strong>s et syndrome <strong>de</strong> Gougerot-Sjögren,– vascularite : panartérite noueuse, maladie <strong>de</strong> Horton, Wegener (photo 17dans le cahier couleur), maladie <strong>de</strong> Takayasu, etc.Autres causes à rechercher– Polyglobulie, thrombocytémie.– Hypergammaglobulinémie <strong>de</strong> type IgM avec cryoglobulinémie.– Syndrome <strong>de</strong>s antiphospholipi<strong>de</strong>s et/ou thrombophilie.– Myxœdème, thyroïdite, anorexie mentale, acromégalie.– Hypertension artérielle pulmonaire primitive.4


Explorations complémentairesAprès l’examen clinique :– si le phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> est nu et non compliqué : on <strong>de</strong>man<strong>de</strong> unbilan biologique comportant : numération formule sanguine, VS, CRP,électrophorèse <strong>de</strong>s proti<strong>de</strong>s sériques, facteurs antinucléaires et facteurrhumatoï<strong>de</strong> ;– si le phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> est compliqué ou s’associe à <strong>de</strong>smanifestations systémiques, on discutera :• anti-RNP, anti-sl 70, anticorps anticardiolipines, cryoglobulinémie,• une radiographie <strong>de</strong>s mains, <strong>de</strong>s pieds, du thorax,• un écho-doppler <strong>de</strong>s membres supérieurs,• une capillaroscopie.La capillaroscopie périunguéale : il s’agit d’une visualisation directe <strong>de</strong>s capillairessanguins avec un microscope optique par translumination <strong>de</strong> l’épi<strong>de</strong>rme cutané. Lecapillaire apparaît comme un filament homogène, ininterrompu, à bord lisse et àbranche afférente <strong>de</strong> 7 microns, d’une anse <strong>de</strong> réflexion en épingle puis d’unebranche efférente <strong>de</strong> 11 microns environ. Il existe au moins 10 capillaires par mm,parallèles et régulièrement espacés.La capillaroscopie permet d’orienter le diagnostic étiologique du phénomène <strong>de</strong><strong>Raynaud</strong>. Elle recherche <strong>de</strong>s signes <strong>de</strong> microangiopathie spécifique :– un nombre d’anses capillaires < 9, s’accompagnant <strong>de</strong> plages désertes ;– la présence <strong>de</strong> méga-capillaires (anse dilatée et dystrophique <strong>de</strong> plus <strong>de</strong>50 microns, <strong>de</strong> longueur diminuée) ;– un œdème péricapillaire avec <strong>de</strong>s pétéchies et un exsudat ;– la présence <strong>de</strong> capillaires rétrécis.Une capillaroscopie normale ou proche <strong>de</strong> la normale évoque une maladie <strong>de</strong><strong>Raynaud</strong>.Une capillaroscopie anormale, montre :– soit une microangiopathie spécifique d’une scléro<strong>de</strong>rmie, ou d’unepolymyosite, ou d’une maladie <strong>de</strong> Scharp ;– soit une microangiopathie aspécifique pouvant correspondre à uneconnectivite, ou à une maladie <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> primitive.Maladie <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong>La maladie <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong>, phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> idiopathique, survient le plussouvent chez :– une femme jeune ;– contexte familial fréquent ;5


– phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> non compliqué respectant le plus souvent lespouces ;– absence <strong>de</strong> cicatrice distale, d’ulcérations ;– présence d’un pouls normal et artères palpables aux membres supérieurs ;– absence <strong>de</strong> syndrome inflammatoire ou d’anomalie immunologique ;– recul évolutif <strong>de</strong>puis plus <strong>de</strong> 2 ans ;– absence d’étiologie précise retrouvée ;– absence <strong>de</strong> cause professionnelle ou <strong>de</strong> médicament inducteur ;– capillaroscopie normale.SUIVI D’UN PHÉNOMÈNE DE RAYNAUDLa surveillance clinique est effectuée sur :– la fréquence et la durée <strong>de</strong>s crises ;– le nombre <strong>de</strong> doigts touchés ;– la survenue <strong>de</strong> ces phénomènes <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> en été, les facteursdéclenchants ;– les troubles trophiques (nécroses, ulcérations).Maladie <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> ou phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> : on peut se poser la question <strong>de</strong> lapossibilité du risque <strong>de</strong> passage d’une maladie <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> idiopathique vers unphénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> symptomatique d’une maladie sous-jacente. Une métaanalyserécente évalue à 12,6 % le risque <strong>de</strong> voir développer une connectivite<strong>de</strong>vant une maladie <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> (65 % <strong>de</strong> scléro<strong>de</strong>rmie, soit un risque <strong>de</strong>3,2 % patients/année).TRAITEMENT DU PHÉNOMÈNE DE RAYNAUDIl faut informer les patients sur :– la maladie et son évolution possible ;– les médicaments inducteurs qu’il faut contre-indiquer ;– l’arrêt absolu et définitif du tabac ;– la protection contre le froid et l’humidité (port <strong>de</strong> gants <strong>de</strong> soie associé auport <strong>de</strong> moufles). Éviter tout contact avec les objets froids et toutchangement brusque <strong>de</strong> température (baigna<strong>de</strong>, etc.) ;– éviter les traumatismes locaux.Lorsque ces mesures sont insuffisantes, le traitement médicamenteux est indiqué.Différents traitements sont proposés :– les inhibiteurs calciques sont efficaces dans les formes sévères (nifédipine,diltiazem) ;– les dérivés nitrés sous forme <strong>de</strong> patch à appliquer sur la pulpe <strong>de</strong>s doigts,ou sur les doigts, ou sur les poignets ;6


– dans les syndromes <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> sévères avec nécroses associées, enparticulier au cours <strong>de</strong> la scléro<strong>de</strong>rmie, <strong>de</strong>s médicaments à viséevasodilatatrice sont utilisés, tels que l’iloprost, analogue <strong>de</strong> la prostacycline.Points clés• Le phénomène <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> est un trouble vasomoteur caractérisé par une ischémieparoxystique <strong>de</strong>s extrémités.• La maladie <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> est un acrosyndrome bénin, sans risque trophique, survenanthabituellement chez la femme jeune.• Les phénomènes <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> secondaires aux connectivites (en particulier lascléro<strong>de</strong>rmie) peuvent être compliqués <strong>de</strong> troubles trophiques et <strong>de</strong> nécrose.• Une démarche diagnostique stéréotypée permet le diagnostic <strong>de</strong> maladie <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> et<strong>de</strong>s phénomènes <strong>de</strong> <strong>Raynaud</strong> secondaires.• Son traitement repose sur <strong>de</strong>s mesures non médicamenteuses (contre-indication <strong>de</strong>smédicaments inducteurs, arrêt du tabac, protection contre le froid, etc.) ; les phénomènes <strong>de</strong><strong>Raynaud</strong> sévères ou compliqués justifient l’utilisation <strong>de</strong> vasodilatateurs.7

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