RAPPORTS NATIONAUX - Social Watch

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RAPPORTS NATIONAUX

<strong>RAPPORTS</strong> <strong>NATIONAUX</strong>


AFGhaNISTaNIl ne peut pas avoir de développement durable sans paix ni sécuritéDes décennies de conflits armés et de troubles ont quasiment détruit les institutions et le territoire del’Afghanistan. Bien que le pays ait un nouveau Gouvernement et une nouvelle constitution, il doit faire face àde grands défis en termes de développement durable. Un de ceux-ci est de savoir comment garantir le droità l’éducation aussi bien pour les femmes que pour les hommes. Malgré les progrès remarquables dans lareconstruction du système éducatif, les efforts du Gouvernement ont été insuffisants et il reste encore beaucoupà faire. Les autres défis consistent en la résolution des problèmes environnementaux et la réhabilitation et lagestion des ressources naturelles du pays.<strong>Watch</strong> on Basic Rights Afghanistan Organization (WBRAO)Coordination of Humanitarian Assistance (CHA)Sanayee Development Organization (SDO)Après des décennies de guerre et de troubles civils,l’Afghanistan fait face à de nombreux défis, notammentla pauvreté et le manque de sécurité. Lesconflits armés ont laissé plus de 1,5 million de victimeset un système éducatif quasiment démantelé.En septembre 2000, lors du Sommet du Millénaireà l’Assemblée générale des Nations à New York, lepays encore déchiré par la guerre, n’a pas été enmesure d’y participer. Par la suite, le Gouvernementa signé le huitième des Objectifs du Millénaire pourle Développement (OMD) en mars 2004, mais a dûreporter les dates du calendrier mondial en raisondes dizaines d’années perdues et du manque d’informationsdisponibles. Alors que le reste de la communautéinternationale s’est fixée d’atteindre les OMDen 2015, sa date de départ étant 1990, l’Afghanistana établi ses objectifs pour 2020 et ses dates de départse situent entre 2002 et 2005 1 . Le Gouvernement aégalement indiqué que la paix et la sécurité jouent unrôle décisif dans la réalisation des OMD et a ajouté:« davantage de sécurité » en tant que neuvième objectif2 ; de fait, la paix et la sécurité sont des élémentsclé pour le développement durable et tout type deplanification à long terme.Les progrès dans l’éducationPendant longtemps, l’Afghanistan a connu des tauxextrêmement bas de fréquentation scolaire et destaux d’analphabétisme élevés. Cette situation s’estaggravée sous le régime taliban, les écoles ont étéfermées et détruites, les programmes d’études ontété restreints et les femmes se sont vu refuser l’accèsà l’éducation. Entre 1996 et 2001, les femmes et lesfilles ont été exclues de tous les aspects de la vieéducative, du primaire jusqu’à l’université ; concrètement,les écoles de filles ont été fermées et lesenseignantes ont été privées de travail 3 . Le taux brutde scolarisation des filles à Kaboul est tombé de 32 %1 PNUD Afghanistan, Afghanistan MDGs overview, .2 Ibid.3 BBC World Service, Case study: education in Afganistán,.Indice des Capacités de Base (ICB)100n/d0 n/dAccouchements assurés par dupersonnel médical spécialiséEnfants atteignantla cinquième annéed’école100 80 100Survivance jusqu’àl’âge de 5 ansen 1995 à seulement 6,4 % en 1999 4 . Les talibans ontégalement imposé de nombreuses restrictions surles établissements d’enseignement et ont exigé quela religion soit davantage mise en avant au détrimentd’autres matières 5 .Après cet effondrement éducatif et social, lepays est progressivement en voie de rétablissement,avec un effectif important d’étudiants inscrits depuisque le nouveau Gouvernement a pris ses fonctions.Durant les premières années qui ont suivi la chutedes Talibans, l’éducation a constitué une priorité pourle Gouvernement ainsi que pour les contribuables, lebut étant que les enfants retournent à l’école et enparticulier à l’école primaire 6 . Le Gouvernement s’efforceégalement d’atteindre l’OMD 3 (« promouvoirl’équité de genre et l’autonomisation des femmes») et s’est engagé à éliminer les disparités entre lesgenres à tous les niveaux de l’éducation en 2020.La nouvelle Constitution établit que l’éducation doitêtre gratuite pour tous les citoyens afghans, sansdiscrimination fondée sur le genre.Les recherches menées par 16 organisationslocales dirigées par Oxfam Novib révèlent que, bienqu’il y ait encore des obstacles majeurs à l’éducationdes filles, des progrès ont également été observés4 American Institutes for Research with Hassan Mohammad,Education and the role of NGOs in emergencias, Afghanistan1978–2002, (Agence américaine pour le développementinternational, 8 août 2006), .5 BBC World Service, op. cit.6 Oxfam International, “High stakes: Girls’ education inAfghanistan,” Joint NGO Briefing Paper, (Oxford: Oxfam GB,24 février 2011), .Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 15 100Éducation04L'autonomisation100 100Activité économiquedepuis 2001 7 . La campagne « Back to School » quia débuté en 2002, a significativement augmenté lascolarisation dans le secteur primaire, qui a été multipliéepar sept environ, allant de 900 000 en 2000 à 5millions d’inscrits en 2008 (voir graphique 1) 8 . Pourles filles, l’augmentation a été encore plus spectaculaire: le nombre d’inscriptions officielles a augmenté,passant d’environ 5 000 sous le régime taliban à 2,4millions de filles en 2010 9 .Selon les chiffres publiés par l’UNICEF, entre2005 et 2009, le taux de scolarisation pour l’enseignementprimaire était de 66 % pour les garçons etde 40 % pour les filles, alors que les chiffres pourl’enseignement secondaire étaient de 18 % pour lesgarçons et 6 % pour les filles. Le taux de scolarisationen secondaire, d’autre part, a été de 41 % pour lesgarçons et de 15 % pour les filles 10 .Toutefois, les efforts pour améliorer l’éducationen Afghanistan commencent à ralentir de nos jours.Le ministère de l’Éducation a sans doute fait des progrèsdans l’amélioration de la disponibilité et la qualitéde l’éducation, mais étant donné l’afflux importantd’étudiants ces dernières années, il a eu du mal àsuivre la demande. Avec des contribuables de plus enplus axés sur la stabilisation et la contre-insurrection7 The Human Rights Research and Advocacy Consortium,Report card: Progress on Compulsory Education grades1–9, (mars 2004), .8 République islamique d’Afghanistan, ministère del’Education, 1388 (2009–10) school attendance, (2010), .9 Ibid, 1388 (2009–10) school enrolment by grade, (2010),rapport inédit.10 UNICEF, Afghanistan: Statistics, .2517Rapports nationaux 60 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


plutôt que sur le développement et la détérioration dela sécurité dans de nombreuses régions du pays, lesprogrès réalisés pour améliorer l’éducation des fillesrisquent de se perdre.Les parents et les élèves sont avides d’uneéducation de haut niveau, mais sont de plus en plusfrustrés par l’absence de progrès. Si d’importantsinvestissements pour l’éducation post-primaire nesont pas réalísés, il existe le risque que ces élèves «soient laissés derrière, probablement déconnectés etque leur développement personnel, social et professionnelsoit interrompu» 11 .L’éducation et l’équité de genreSelon un rapport d’Oxfam publié en 2011, seulement6 % des femmes afghanes de 25 ans ou plus ontreçu une certaine éducation formelle et seulement12 % des filles et des femmes âgées de 15 ans etplus savent lire et écrire 12 . Parmi les personnesinterrogées, 41,2 % d’entre elles ont considéré lapauvreté comme l’obstacle principal pour que lesfilles accèdent à l’éducation et 39,4 % ont indiquéque le mariage précoce ou forcé constituait un autreobstacle. Les autres défis liés à l’équité de genre dansl’éducation sont, entre autres 13 :• Le manque d’enseignants pour répondre à lademande. Plus d’un quart des personnes interrogéesdans le cadre du rapport (26,4 %),ont cité l’absence d’une enseignante comme unobstacle majeur pour l’accès des filles à l’éducation.Plus des deux tiers des enseignants (68,4%) ont déclaré que leurs écoles n’avaient pasassez d’enseignants. Sur ces deux tiers, plusde la moitié (54,6 %) ont indiqué qu’ils avaientseulement besoin de davantage d’enseignantes,27,3 % ont dit qu’il était nécessaire d’avoir desenseignants hommes et femmes, 12,3 % ont ditqu’ils n’avaient besoin que d’enseignants et 5, 7% étaient indécis.• Le manque de centres éducatifs pour satisfairela demande. Près d’un quart des répondants(23,7 %) considère la distance pour aller àl’école comme un obstacle majeur pour l’accèsdes filles à l’éducation. La distance, ainsi que lascolarisation des filles dans des écoles mixtesou en interaction avec des enseignants de sexemasculin, deviennent de plus en plus problématiques,au fur et à mesure que les filles entrentdans l’adolescence, c’est- à-dire au moment oùles normes culturelles qui régissent leur comportementdeviennent plus restrictives.• De nombreuses écoles n’ont pas l’infrastructurenécessaire pour fournir une éducation dequalité. Les données du ministère de l’Éducationont révélé que 47 % des écoles manquaient11 J.K. Intili y E. Kissam, “How to do more, faster: The currentstatus of Afghanistan’s education system and a strategy toincrease service capacity while improving learning,” (AguirreDivision, JBS International, septembre 2008), .12 Oxfam International, op. cit.13 Ibid.d’installations adéquates 14 . Ces installationsvarient considérablement selon le site étudiéet sont particulièrement déplorables dans leszones rurales.Le manque de sécurité, la réclusion des femmes,les préjugés religieux, les tâches ménagères et lesmenaces des insurgés constituent les facteurs clépour que les filles abandonnent l’école. Les attaquesà l’acide et au gaz contre les étudiantes ont provoquéen 2010 un certain nombre de décrochages,cependant il existe un nouvel espoir pour que lesinscriptions des filles augmentent après l’annoncedes talibans de ne plus brûler les écoles ou de ne pluscréer d’obstacles à l’éducation des filles 15 .Les enjeux environnementauxAprès 30 ans de chaos politique et de conflits,l’Afghanistan doit faire face à une grave crise environnementale.Les principaux défis sont la dégradationdes terres, la pollution de l’air et de l’eau, ladéforestation, le surpâturage, la désertification, lasurpopulation dans les zones urbaines et la mauvaisegestion des ressources en eau douce 16 . Lesfactions militaires ont fait amplement usage du boiscomme combustible et ont également abattu desforêts pour éviter qu’elles soient utilisées commecachette pour les forces d’opposition 17 . L’abattageincontrôlé des forêts de conifères de l’Est entraînede graves impacts sur les conditions de la zone forestière18 .Dans la mesure où la forêt disparaît, le risque dedégradation environnementale augmente. La mauvaisegestion des forêts conduit à la désertificationet l’érosion des sols, ce qui réduit inévitablement laquantité de terres disponibles pour l’agriculture 19 .Si cette tendance n’est pas inversée et si le Gouvernementne met pas en place un modèle de développementdurable, la perte de terres agricoles auraun effet négatif sur la sécurité alimentaire dans unproche avenir.Les changements météorologiques extrêmeset les catastrophes naturelles ont également eu unimpact négatif. La sécheresse de 1998-2003, parexemple, a conduit à des pénuries alimentaires quiont provoqué la migration des habitants des principaleszones rurales vers les zones urbaines 20 . En2008, les conditions se sont aggravées : des pertes14 République islamique d’Afghanistan, ministère del’Éducation, 1388 (2009–10) schools infrastructure, 2010,(2010), rapport inédit.15 Graeme Paton, “Taliban “abandons” opposition to girls’education”, The telegraph, (14 janvier 2011), .16 Afghanistan en ligne, Environmental facts and issuesconcerning Afghanistan, .17 Wikipedia, Environmental issues in Afghanistan, .18 PNUMA, Afghanistan: Post-conflict environmentalassessment, (Nairobi, Kenia: 2003), .19 Ibid.20 Wikipedia, op. cit.généralisées de cultures de blé se sont produitesen raison d’une forte absence de précipitations eten raison des chutes de neige en hiver entraînantune chute significative de la production de blé 21 . Lesmêmes conditions ont été prévues pour 2011. Lesfaibles niveaux de précipitations signifient que lescultures ne peuvent pas être entretenues ce qui provoquedes déplacements de populations, un scénarioqui est destiné à se reproduire si les précipitations- comme on le prévoit - tombent en dessous desparamètres normaux 22 .Plus de 80 % des ressources en eau de l’Afghanistanproviennent des montagnes de l’Hindu Kush,mais le plus grand des glaciers de la région et lesmontagnes du Pamir se sont réduits de 30 % et certainsplus petits ont disparu 23 . Un peu plus de 2,5millions de personnes dans le pays sont touchéespar la sécheresse ou sont vulnérables aux effets dessécheresses récurrentes et de pénuries d’eau. Cenombre est susceptible d’augmenter en raison duréchauffement climatique et de l’aridité croissante 24 .ConclusionIl existe un besoin urgent de trouver une nouvelle approcheà la fois de la part du Gouvernement que descontribuables, si nous voulons maintenir les progrèsobtenus dans le domaine de l’éducation. Est-ce queles filles doivent ou non aller à l’école ? C’est unedécision qui est basée sur une variété de facteurs quidiffèrent d’une province à l’autre et même d’un foyerà l’autre. Il existe aussi une relation complexe entreles facteurs de la demande (tels que les attitudes descommunautés et les contraintes économiques) et lesfacteurs de l’offre (tels que les infrastructures scolaireset la qualification des enseignants). Toutes cesquestions doivent être abordées afin d’augmenterl’indice de fréquentation scolaire des filles 25 .La crise environnementale en Afghanistan esttrès préoccupante. Il faudra des décennies pourpouvoir faire face à ce défi et celui-ci ne pourra pasêtre abordé uniquement par le Gouvernement. L’aidefinancière et le soutien technique de la communautéinternationale seront également nécessaires 26 . n21 Ministère de l’Agriculture des États-Unis., Service extérieurde l’Agriculture, Afghanistan: Severe drought causes majordecline in 2008/2009 wheat production, (12 août 2008),.22 M. Ryan, “Hungry Afghanistan faces prospect of droughtin 2011”, Reuters, (11 février 2011), .23 National Environmental Protection Agency of the IslamicRepublic of Afghanistan (NEPA), Afghanistan’s Environment2008, (NEPA et UNEP, 2008), .24 Ibid.25 Oxfam Internacional, op. cit.26 UNEP, Afghanistan’s environmental recovery: A post-conflictplan for people and their natural resources, (Genève: UNEPPost-Conflict Branch), .<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>61Afghanistan


allemagneDe grandes attentes, des résultats limitésLe développement durable semble être largement accepté dans le pays. Cependant, il existe toujours des retardsintentionnels et de la résistance en la matière. Le changement climatique n’est pas pris en compte adéquatement et lessources d’énergies renouvelables dépendent toujours des subventions gouvernementales et des consommateurs.Par ailleurs, ces subventions sont en passe d’être réduites, en particulier pour l’énergie solaire, alors que la durée devie des centrales nucléaires est prolongée. De plus, la ligne budgétaire pour la compensation économique attribuéeaux pays affectés par le changement climatique a été éliminée du projet de budget 2011. En attendant, le clivageentre riches et pauvres continue à se creuser et les politiques sociales ne sont pas appliquées correctement.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> AllemagneUwe KerkowLe concept de durabilité est de nos jours en Allemagnefermement ancré dans la politique, la scienceet la recherche. Par exemple, les tâches principalesdu Conseil allemand pour le développement durable 1sont de contribuer à l’avancement de la stratégie dedéveloppement durable nationale 2 , proposer desprojets et domaines d’action et positionner le développementdurable comme sujet central des préoccupationspubliques. En outre, une stratégie dedurabilité nationale, adoptée en 2002, contient denombreuses références à la dimension sociale ainsiqu’aux implications de la durabilité, mais elle n’a pasété réactualisée depuis son adoption.En 2009, le Conseil allemand pour le développementdurable a effectué une évaluation arrivant àdes conclusions quelques peu ambivalentes sur lamise en œuvre du concept de développement durable: « Dans le domaine des idées, le concept dedéveloppement durable a été largement accepté entermes généraux. Mais quand il s’agit de questionsspécifiques et de niveaux sectoriels, il semble y avoirplus de réticence, de résistance et de méfiance 3 ». Et ilajoute : « le plus grand désajustement potentiel entreles objectifs pour 2050 et l’état actuel réside dans ledomaine du changement climatique 4 ».Une rubrique sur « la protection du climat,l’énergie et l’environnement » de l’accord de coalitionentre l’Union chrétienne démocrate (CDU), l’Unionchrétienne-sociale bavaroise (CSU) et le Parti libéraldémocrate (FDP) indique que la politique est façonnéepar le principe de durabilité. Cela inclut l’objectifde « limiter le réchauffement planétaire à un maximumde deux degrés Celsius » et « élargir en permanencele rôle des énergies renouvelables », tout enaugmentant « l’aide aux pays en développement pour1 Voir : .2 Gouvernement fédéral, Perspectives for Germany: OurStrategy for Sustainable Development, (2002), .3 Conseil allemand pour le développement durable, PeerReview on Sustainable Development Policies in Germany,(Berlin: 2009), p.15, .4 Ibid, p. 21.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9999+100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 anslutter contre le changement climatique et faire face àses conséquences 5 ».La durabilité dans la pratique :le secteur énergétiqueLa situation de la politique de développement durableen Allemagne est bien illustrée dans le domaine dela politique énergétique. D’une part, l’industrie allemandea un rôle important dans le secteur énergétique,en particulier dans la conception et la constructionde systèmes, d’autre part, les sources d’énergierenouvelable dépendent toujours des subventionsgouvernementales et des consommateurs.La décision du Parlement prise fin octobre 2010,de prolonger la durée d’exploitation des centralesnucléaires a marqué une rupture radicale avec la politiqueénergétique précédente 6 . En 2002, le Parlementavait voté l’élimination progressive de l’utilisation del’énergie nucléaire dans le long terme, la limitationde la durée de vie des centrales existantes à un maximumde 32 ans et la non construction de nouvellesusines. La décision de 2010 a prolongé la durée d’exploitationdes usines de 12 ans en moyenne 7 et ellea été mise en œuvre bien qu’aucune solution pourle stockage définitif des déchets nucléaires 8 n’ait étéenvisagée et que la plupart des Allemands s’oppose5 Growth. Education. Unity. The coalition agreement betweenthe CDU, CSU and FDP for the 17th legislative period, p. 17,.6 Gouvernement fédéral, Energy policy legislation,(Berlin: 2010), .7 Ibid, , p.18.8 Ibid.95100 10099+Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 80100062L'autonomisation100 10010078ÉducationActivité économiquesystématiquement aux centrales nucléaires depuisdes décennies 9 .Dans le même temps, les subventions destinéesaux sources d’énergie renouvelables, en particulier àl’énergie solaire 10 , ont été diminuées en dépit des solidespreuves qui démontrent que son utilisation réduitles coûts de production d’électricité 11 . Le Comitéconsultatif allemand pour l’environnement a concluqu’une offre d’électricité 100 % renouvelable seraviable en 2050 12 . A la suite de la catastrophe nucléairede Fukushima au Japon début 2011, le Gouvernementa fermé sept réacteurs nucléaires et a annoncéson intention d’accélérer la sortie progressive du nucléaire13 . Mais il reste à voir si cela permettra d’aboutirà un véritable changement de politique.La durabilité dans la pratique :la dimension socialeUne stratégie intégrale de développement durabledoit également prendre en compte la dimensionsociale. En 2010, la plus importante discussion sur9 Voir : Zeit Online, Schon wieder Ärger mit dem Volk, (2011),.10 Tagesschau.de, Solarförderung wird weiter gekürzt, (2011),.11 Energie und Klima-News, Erneuerbare verbilligen den Strom,(2011), .12 Comité consultatif allemand pour l’environnement, Wegezur 100 % erneuerbaren Stromversorgung Kurzfassungfür Entscheidungsträger, (2011), .13 Gouvernement fédéral, Energiewende beschelunigen,(2011), .Rapports nationaux 62 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


la politique sociale en Allemagne a eu lieu suite àune décision de la Cour constitutionnelle fédérale defévrier 2010 qui a stipulé que les prestations d’aidesociale devaient être calculées « de façon transparenteet prendre en compte les besoins réels, c’està-direqu’elles soient adaptées à la réalité » et que «l’estimation des prestations doit être justifiée sur labase de données fiables et de méthodes de calculconvaincantes ». Cette décision a forcé les décideursà revoir le système des prestations d’aide sociale 14 .Une étude de Diakonie, l’organisme de soutiensocial de l’Église protestante, estime qu’il faut uneaugmentation de 10 à 30 % des prestations d’aidesociale pour se conformer aux dispositions de laCour 15 .Pourtant, en février 2011, une décision a été prisede n’augmenter les prestations que d’environ 1,5 %,avec une augmentation prévue de 1 % en 2012 16 .Dans le même temps, le clivage entre riches etpauvres se creuse. Un rapport publié par l’Organisationde coopération et de développement économiques(OCDE) 17 établit que : « La distribution dessalaires bruts s’est considérablement élargie après1995 » et « le pourcentage de ménages sans emploia augmenté,..., de 19 %, le plus haut niveau au seinde la zone OCDE ». Il ajoute que les transferts sociaux« sont moins orientés vers les groupes à faible revenupar rapport à d’autres pays ».La durabilité dans la pratique :la politique de développementSelon les chiffres publiés par l’OCDE début avril2011, l’aide allemande au développement (APD) alégèrement augmenté en 2010, mais pas suffisammentpour s’aligner sur le programme de l’Union européennequi souhaite l’augmenter à 0,56 % du produitintérieur brut (PIB). En 2010, le pays a dépensé0,38 % de son PIB dans l’aide au développement, lefaisant stagner ainsi au même niveau qu’en 2008.Par ailleurs, en 2009 il est tombé à 0,35 %. En termesabsolus, le pays est passé de la deuxième place en2008, à la quatrième place sur la liste internationaledes pays donateurs après les États-Unis, la France etle Royaume-Uni, tandis que ses dépenses en APD deseulement 0,38 % du PIB, le classe 13ème parmi les23 pays donateurs occidentaux 18 .Le Gouvernement ne prévoit pas d’augmenterde manière considérable ses dépenses pour ​le développement.En fait, selon la planification financièreà moyen terme, les dépenses pour l’APD seront réduitesde plus d’un demi-milliard d’euros jusqu’en2015 19 .En outre, un changement de stratégie va changerla répartition des fonds et la coopération au développementbilatérale dépassera la coopérationmultilatérale. Il est également prévu de réduire lesoutien budgétaire et le nombre de pays partenairesde 58 à 50. Cependant, le noyau de la restructurationpolitique conservatrice et libérale repose sur lacréation de nouveaux partenariats avec le secteurprivé. À cette fin, le budget du ministère fédéral dela Coopération économique et du développement(BMZ, selon son sigle en allemand) destiné aux «associations pour le développement avec le secteurprivé » a déjà augmenté de 25 % en 2010 atteignantun montant actuel de 60 millions d’EUR 20 .Il existe également en Allemagne un manque definancement dédié au changement climatique. Selonl’ONG Terre des Hommes et la Welthungerhilfe,l’Allemagne doit contribuer à environ 7,6 milliardsd’EUR aux coûts d’atténuation du changement climatiqueet d’adaptation de l’hémisphère sud 21 . Celasignifierait trois fois plus de dépenses officielles pourla protection du climat mondial. En vue de la Conférencesur le climat à Copenhague, le Gouvernements’est engagé à contribuer pour un montant de 420millions d’EUR par an au financement rapide de l’UEpour le climat dans les pays en développement, pourun total de 2,4 milliards d’EUR par an entre 2010 et2012. Selon les termes de l’accord de Copenhague,il s’agit d’un fonds « nouveau et supplémentaire ».Cependant, l’Allemagne n’a pas respecté cet accordet a seulement attribué 70 millions d’EUR de sonbudget 2010. Par ailleurs, l’article a été complètementéliminé du projet de budget pour 2011 22 .La réticence à faire une contribution importanteà la protection du climat se traduit par le refus duGouvernement de contribuer à l’initiative Yasuni 23 enÉquateur en 2010, qui vise à « laisser le pétrole dansle sol », c’est-à-dire, de ne pas exploiter les réservesde pétrole du Parc national Yasuni dans le bassinamazonien. L’Équateur demande en retour une compensationà la communauté internationale d’environ1,5 milliard d’USD, équivalent à peu près à 50 % desrecettes perdues pour avoir décidé de ne pas forer 24 .PerspectivesEn raison de la crise financière et économiquemondiale et en vue de la Conférence de Rio +20en 2012, le débat sur le développement durable enAllemagne s’accélère. En novembre 2010, le Parlementa créé un comité pour étudier la croissance, lebien-être et la qualité de vie, comme voies d’accèsà l’activité économique durable et au progrès socialdans l’économie sociale de marché. Son but est «d’examiner le rôle de la croissance économique etde la société, d’élaborer une mesure intégrale pourle bien-être et le progrès et d’explorer les opportunitéset les limites pour découpler la croissance, laconsommation de ressources et le progrès technologique25 ». Il reste à savoir si ce groupe d’expertspourra impulser de manière significative le progrèsvers un développement plus durable qui se fait deplus en plus urgent. n14 Diakonie, Sachgerechte Ermittlung des Existenzminimums,p.1, .15 Ibid, p. 316 Gouvernement fédéral, Bildungspaket für Kinder, (2011),.17 OCDE, Growing Unequal?, (2008),


argentineLe long chemin vers le développement durableLe pays a besoin d’adopter un modèle de développement durable, mais sur le chemin pour y parvenir, il devraaffronter de grands défis. Il est nécessaire de s’assurer que l’information sur l’environnement atteigne le public.Tant le Gouvernement que la société civile doivent se rendre compte que les problèmes environnementaux del’Argentine proviennent d’une vision paradoxale qui favorise à la fois, l’investissement « à tout prix » tout enmanifestant le besoin de politiques de protection de l’environnement. Mais l’absence de ces politiques a eu unimpact négatif sur les groupes les plus vulnérables de la société: les paysans, les communautés autochtones etles personnes vivant dans des zones urbaines marginalisées.FARN, Fundación Ambiente y Recursos NaturalesIndice des Capacités de Base (ICB)Indice d'Equité de Genre (IEG)Selon le rapport de la World Wildlife Fund (WWF),Planète vivante 2010, l’Argentine occupe la neuvièmeplace parmi les 10 pays qui produisent 60 %des richesses naturelles de la planète 1 , une positionqui confère au pays un rôle stratégique en tant queprestataire de services environnementaux au niveaumondial. Cependant au cours des 40 dernières années,le pays a quasiment stagné en termes de mesuresde l’Indice de Développement Humain (IDH).Il s’est, en fait, moins développé que certains paysqui avaient, en 1970, un IDH similaire et qui étaientloin d’avoir l’abondance des ressources naturellesde l’Argentine (par exemple l’Espagne, la Grèce, l’Irlandeet Israël) 2 . Il est paradoxal qu’un pays avec unetelle abondance de ressources doive faire face à desindices de développement humain et de distributionde la richesse aussi inacceptables.La perte de biodiversitéUn des plus grands défis environnementaux du paysest la déforestation. Entre 1937 et 1987, 2 355 308ha (environ 23 553 km2) de forêts natives ont été détruiteset depuis 17 ans, ce nombre est passé à 5 321001 ha (53 210 km2). En effet, entre 1998 et 2006,250 000 hectares (2 500 km2) de forêt ont disparuchaque année, l’équivalent à 1 ha (10 000 m2) toutesles deux minutes. Parmi les causes de ce tableauplutôt sombre nous pouvons constater l’exploitationforestière irrationnelle, l’expansion de la frontièreagricole et l’absence de politiques publiques ou d’incitationsau reboisement avec des espèces natives 3par des acteurs privés.La déforestation, la déperdition des forêts nativeset le changement climatique sont intimementliés et l’adoption de mécanismes de protectionde l’environnement pourrait constituer une étapevers une mise en œuvre, ultérieure, du Fonds departenariat pour la réduction des émissions decarbone forestier des Nations Unies (UN-REDD).Le Gouvernement, cependant, ne dispose pas de1 Fonds mondial pour la nature, Planète vivante, Rapport 2010: biodiversité, biocapacité et développement..2 UNDP, El desarrollo humano en la Argentina (1970-2010):una mirada más allá de la coyuntura, (Buenos Aires: 2010).3 Greenpeace, Un arduo camino a la Ley de Bosques, .ICB = 98 10096 Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleIEG = 74100530 0L'autonomisation100 100100 68 10099 99100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialiséSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansÉducationActivité économiquemécanismes adéquats pour répondre à ces problèmeset il lui manque la volonté politique pourétablir des cadres juridiques pour le développementdurable.L’expansion de la frontière agricoleL’agriculture est l’un des principaux piliers de l’économieargentine. La hausse des prix internationauxdes matières premières a favorisé le renforcement dumodèle de production agricole à échelle industrielle,dans lequel prévaut actuellement la monoculture desoja et d’oléagineux 4 .Mais les conséquences négatives de ce processussont déjà visibles de nos jours. L’agricultureest la deuxième source d’émissions de gaz à effetde serre après le secteur industriel. Les émissionsde CO2 par habitant sont presque deux fois plus élevéesque le niveau moyen dans la région 5 . En outre,l’utilisation sans restriction de produits agrochimiquesa eu un impact négatif sur l’environnementet la santé de la population. L’Atlas du risque environnementalde l’enfance a indiqué qu’en Argentine« près de trois millions d’enfants vivent dans unesituation de risque environnemental causée pardes produits agrochimiques » 6 . Selon le rapportCarrasco, le glyphosate, l’agrochimique le plus largementutilisé dans le pays, peut causer des malfor-4 Jorge E. Weskamp, “Soja: más allá de lo económico”(Buenos Aires : Clarín, 15 juillet 2006).5 World Bank, Datos Argentina, .6 Defensoría del Pueblo de la Nación, Resolución sobre laclasificación de la toxicidad de los agroquímicos (BuenosAires : 12 novembre 2010).mations et il est dangereux pour plusieurs espècesvégétales et animales 7 .Pendant ce temps, la production agricole arepoussé ses frontières, envahissant les forêts natives.Cette invasion a touché les agriculteurs et lescommunautés agricoles qui sont forcés d’adopterdes systèmes de production qui vont à l’encontre deleurs coutumes et traditions, sans qu’il n’y ait aucuneforme de consensus préalable 8 .Pour inverser cette situation, le pays a besoind’un système législatif qui établisse des budgetsminimum pour intégrer des règles de durabilité dans ​l’utilisation de produits agrochimiques. Il est égalementnécessaire d’aller vers un processus d’aménagementenvironnemental du territoire et d’impositionde bonnes pratiques agricoles.Les avancées législativesAu cours des 10 dernières années, on a pu enregistrercertains progrès dans la promulgation de loisfavorisant le développement durable et la protectiondu droit des peuples à un environnement sain. Cependant,il y a de nombreux obstacles à la mise enœuvre, l’exécution et le suivi de conformité de cesrèglements. Les contradictions entre les lois et lesrèglementations, conjointement à la pression d’intérêtséconomiques et politiques, ont conduit à lapersistance des conflits environnementaux.Le secteur privé, la société civile et l’État nesemblent parvenir à un consensus qu’à travers de7 Primicias Rurales, Andrés Carrasco, autor de un estudiocontrovertido, advierte sobre glifosfato para los humanos (5avril 2009).8 Voir la Déclaration des Nations Unies sur les Droits desPeuples autochtones.Rapports nationaux 64 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


situations conflictuelles, comme le montrent des castonitruants qui sont arrivés peu à peu à faire inclurele développement durable dans l’agenda public. Àtitre d’exemple, il convient de mentionner les causesjudiciaires pour l’assainissement du bassin Matanza-Riachuelo, le conflit des usines de pâtes à papier surle fleuve Uruguay et plus récemment, le débat autourde l’application de la loi des budgets minimum pourla préservation des glaciers et de l’environnementpériglaciaire dans le cadre de projets d’exploitationsminières qui ont un fort impact social et environnemental.L’incorporation de l’article 41 de la Constitution,qui consacre le droit à un environnement sainet le devoir de le préserver, a contribué à placer lapierre angulaire pour le développement d’un statutbasé sur le développement durable. Depuis 2002, leCongrès a promulgué une série de règles destinéesà garantir un minimum de budgets pour la protectionde l’environnement, ce qui, conjugué avec l’actiondu pouvoir judiciaire – considéré comme un desacteurs clé dans l’application des normes environnementales– a permis d’intégrer la question de ladurabilité environnementale, sociale et économiquedans l’agenda public et privé.Il faut ajouter que fin 2007, après un long processusimpliquant des organisations de la société civile,le Congrès a adopté la loi des Budgets minimauxpour la protection de l’environnement des forêts natives.La promulgation de cette loi a signifié un grandprogrès pour la protection des forêts, mais elle n’amalheureusement pas été appliquée efficacement.L’exécutif national a retardé le règlement d’exécutionde la loi au-delà de la période stipulée dans le texteet certaines provinces n’ont pas encore établi l’Aménagementterritorial des Forêts Natives (OTBN, selonson sigle espagnol pour Ordenamiento Territorialde los Bosques Nativos), tandis que d’autres ontcontourné la nature participative de ce processus.L’état actuel de la question reste par conséquentcritique. Par exemple, la vulnérabilité des communautésautochtones et des petits producteurs locauxreste évidente face à l’exploitation forestière indiscriminée,cette vulnérabilité est palpable à travers lesrécentes affaires judiciaires en cours 9 .Le cas du bassin Matanza - RiachueloLes ressources hydriques en Argentine présententdes niveaux élevés de pollution, principalement causéspar le manque de contrôle des effluents industriels,le traitement nul ou défectueux des effluentsd’eaux usées, l’utilisation excessive de produitsagrochimiques et le développement non planifiédes zones urbaines. Parmi les conséquences surles ressources en eau de la croissance urbaine nonplanifiée, on peut constater la pollution causée parles bidonvilles situés près des cours d’eau aux alentoursdes villes, l’installation de décharges dans les9 Voir le cas de « SALAS, Dino et autres avec SALTA,Province de, et un autre sur une demande de «Amparo» »,actuellement en cours devant la Cour suprême de justice dela Nation (CSJN).cheneaux d’inondation des vallées, la pollution desaquifères par des déchets urbains et des produitsagrochimiques non contrôlés, le versement d’eauxusées non traitées et les montagnes de déchets solidesqui bouchent les canalisations et provoquentle débordement de l’eau contaminée sur de grandessurfaces 10 . La nécessité de coordonner les politiquesentre les divers organismes gouvernementaux et lesdifférents niveaux de l’État est un facteur crucial pourla bonne gestion des ressources en eau.Lorsque l’on aborde le problème de la pollutionet la difficulté de gérer les bassins versants en Argentine,on ne peut pas omettre le cas paradigmatiquedu bassin Matanza-Riachuelo (CMR, selon le sigleespagnol pour Cuenca Matanza-Riachuelo).Le CMR couvre environ 2 240 km2 et comprenddes juridictions de la Province de Buenos Aires, quatorzemunicipalités provinciales, la ville de BuenosAires (CABA, pour Ciudad Autónoma de BuenosAires) et la juridiction de l’État national. La zone dubassin est le foyer de plus de 3,5 millions d’habitants,dont 35 % n’ont pas accès à l’eau potable et 55 %n’ont pas de système d’égouts. En outre, plus de 10000 industries utilisant une technologie dépassée etne respectant pas les règlementations en vigueur ysont également implantées. Il existe 171 déchargesà ciel ouvert. Cela laisse 96,4 % de la populationdu CMR exposés à au moins une menace de risqueenvironnemental, alors que la plupart des habitantsdu bassin vivent dans des niveaux alarmants de pauvretéet d’indigence 11 .Le conflit du bassin Matanza-Riachuelo – quifigure parmi les trente endroits les plus pollués aumonde 12 – constitue un exemple du manque de volontépolitique et de force institutionnelle du pays.Cette problématique est arrivé devant la plus hauteinstance judiciaire et c’est la Cour suprême de justicede la Nation (CSJ), en tant qu’ultime garante de laConstitution, qui a dû prendre les rênes pour assainiret gérer le bassin.Les mines en conflitsActuellement, on peut observer des niveaux de tensionparticulièrement élevés des conflits autour del’exploitation minière extractive à grande échelle 13 .Personne ne peut nier l’énorme ampleur économiqueque représente l’industrie minière d’extraction,de la même manière qu’il est impossible d’ignorerson empreinte écologique et son impact sur ​lavie des sociétés directement liées aux gisements.C’est pour cela que l’on dit que « les conflits miniersont augmenté de façon exponentielle ces dernières10 Matelucci, Silvia D. y Morello, Jorge, «Singularidadesterritoriales y problemas ambientales de un país asimétrico yterminal», en Realidad económica N° 169 (Buenos Aires: 2000).11 Cfr Nápoli, Andrés, “Recomposición Ambiental De La CuencaMatanza-Riachuelo” en María Eugenia Di Paola y Federico Sangalli(eds), Informe Ambiental Anual 2010, (Buenos Aires: FARN).12 Voir : .13 Fundación Ambiente y Recursos Naturales (FARN) etFundación Cambio Democrático, Ciudadanía Ambiental yMinería: herramientas para la transformación democrática deconflictos socioambientales, (Buenos Aires, 2010), p. 11-20.années en suivant la courbe de croissance de l’investissement» 14 .Certaines des tendances identifiables dans laconfiguration des différents « conflits miniers » sont:• L’absence d’accord social préalable vis-à-vis dumodèle de développement local et de la gestionenvironnementale du territoire à travers un largeprocessus participatif. Souvent les autorités délivrentdes permis et des licences sans satisfaireaux exigences précédentes se trouvant dans leplexus de normes existantes.• Le manque d’efficacité des organismes de l’Étatqui doivent respecter et faire respecter le cadreréglementaire de l’activité, il n’y a pas d’évaluationet de contrôle environnementaux efficaces.• L’absence d’un accès adéquat du public aux informationsqui permettraient de réduire l’incertitudeet de permettre une participation informéedes citoyens.Considérations finalesLe chemin que l’Argentine doit poursuivre en quêtede l’adoption d’un modèle de développement durableest encore long. Jusqu’à ce que l’on parvienne à uneexécution réalisée avec sérieux et engagement, uneapplication adéquate et un contrôle d’exécution desréglementations existantes efficace, il sera difficile,voire impossible, de concevoir un véritable développementdurable et une véritable reconnaissance etréalisation des droits humains. Dans cette quête, ilsera essentiel d’inclure la participation de la sociétécivile, du milieu académique et une attitude active dela part des citoyens.Il est à noter que les lacunes et les absencesdans le domaine des politiques du développementdurable ont un impact plus significatif sur les groupessociaux les plus vulnérables, comme les paysans, lescommunautés autochtones, les habitants des zonesmarginales des grandes villes, etc., qui souffrent degraves effets sur leurs droits à la santé, la nourriture,le logement, l’emploi, l’eau et la terre.Les décideurs publics sont ceux qui ont laresponsabilité suprême d’intégrer dans leurs politiquesles questions environnementales et de développementdurable, en établissant un modèle quiredéfinisse le style de vie et de consommation. Poursa part, le secteur privé doit réaliser et prendre laresponsabilité de ses activités.Il est nécessaire de garantir aux personnes l’accèsà l’information environnementale, d’aller versdavantage de transparence, de consolidation et decoordination des institutions de l’État pour ses troispouvoirs. Du côté de l’État, il faudra travailler à la gestionet la prévention des multiples conflits environnementauxqui semblent surgir de la vision dissociéedes autorités qui proposent d’un côté, des politiquesd’investissement « à tout prix » et d’un autre côté,des politiques environnementales. n14 Lumerman, Pablo et al, “Análisis de la conflictividad socioambiental en Argentina. El conflicto minero: emergente dela nueva conflictividad socioambiental en Argentina”, dansInforme Ambiental Anual 2009 (Buenos Aires: FARN, 2009).<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>65Argentine


ARMéNIeL’atteinte à l’environnementL’Arménie continue à faire face à des enjeux économiques, sociaux et environnementaux. Le Gouvernementa lancé un programme de développement durable, mais il a réalisé, dans un même temps, d’importantsinvestissements dans le secteur minier et autres industries extractives. Le projet minier représente une menacepour l’environnement et le développement durable. Comme le Gouvernement n’a pas abordé les questionsde pollution, de déforestation, de dégradation des terres ni d’autres problèmes environnementaux, il devientessentiel de mettre en œuvre de manière effective et de respecter les lois environnementales, ainsi qued’accroître la transparence et la participation du public dans la formulation des politiques.Center for the Development of Civil Society, CDCS ArmeniaDra. Svetlana AslanyanLe « Programme pour le Développement Durable(PDD) pour la période 2009-2012» 1 de l’Arménie,adopté en 2008, comprend une série de mesures visantà réduire la pauvreté à travers: a) la stimulation dela croissance économique et l’amélioration du cadredes affaires, b ) le développement du marché de l’emploiet la promotion des petites et moyennes entreprises,c) l’accès accru aux services d’infrastructure,d) l’amélioration des programmes d’assistance socialepour les pauvres, e) l’élargissement de l’accès etla consommation de culture, f) des programmes pluslarges d’aide sociale pour les jeunes, g) une réductionde la corruption au sein de l’administration publique,des systèmes de santé et d’enseignement, du systèmejudiciaire et du Gouvernement local.La mise en œuvre du PDD a été retardée parl’impact de la crise économique mondiale de 2008-09. La réduction des investissements a causé desdommages aux petites et moyennes entreprises etla proportion de la population vivant en dessous duseuil de pauvreté a augmenté de 27 % à 47 %. Alorsque le PIB par habitant est passéUSD 3576 US USD11 916 USD de 2004 à 2008 2 , l’impact de la criseéconomique a été négatif (voir tableau), en particulierpour le développement durable. Bien que lacroissance économique se soit poursuivie en 2009et 2010 3 , dans la plupart des cas, elle a seulementaidé à réaliser les objectifs économiques à courtterme. Les politiques établies pour les domainesenvironnementaux et sociaux ont été négligées 4 et leGouvernement a décidé de se focalique uniquemenetdans certains domaines du développement durable.Les enjeux environnementauxUne des préoccupations environnementades lesplus urgentes du pays est son accès limité à l’eau1 Le texte complet est disponible sur : 2 Index Mundi, Armenia GDP real growth rate (%), (2010),.3 Ibid.4 Edita Vardgesyan, The exploitation of the Teghut Copper-Molybdenum Mining (Republic of Armenia) and the Conceptof Sustainable Development, (2009), Indice des Capacités de Base (ICB)Indice d'Equité de Genre (IEG)ICB = 96 100Enfants atteignantIEG = 7010091 la cinquième annéed’école0L'autonomisation74100 100100 10098 98100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialiséSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansÉducationActivité économiquepotable 5 . Dans de nombreux cas, la vétusté et lacorrosion des infrastructures permettent aux eauxrésiduelles de s’infiltrer dans les conduites d’eaudouce. Erevan, la capitale, n’a toujours pas de stationd’épuration fonctionnant correctement. Dans lenord du pays, les rivières telles que la Debed ont desniveaux alarmants de plomb, tandis que dans desendroits comme la vallée d’Ararat, la plus grandepartie de la pollution de l’eau provient des pesticidescontenant de l’arsenic et du cadmium 6 . Les expertsprédisent que le scénario le plus probable du changementclimatique entraînera une grave pénurie d’eaupotable dans les décennies à venir 7 .La pollution atmosphérique augmente égalementà un rythme alarmant. Erevan, par exemple,se trouve dans une dépression géologique où l’airstagnant aggrave la pollution lourde qui est produiteà 90 % par les véhicules 8 . Les 10 % restants sonttrès toxiques et proviennent de la fumée saturée endéchets de plastique brûlés dans des installationsindustrielles et minières près de la ville. L’atmosphèredans les autres villes est également fortementcontaminée. Alaverdi, par exemple, avait dans lesdernières années, 11,4 fois le niveau acceptable dedioxyde de soufre 9 . Entre 2001 et 2005, les cas de5 Policy Forum Armenia, The state of Armenia’s environment,(2010), .6 Ibid.7 Ibid.8 This Month in Armenia, Car emissions causing morerespiratory problems in Yerevan, (juillet 2009), .9 Policy Forum Armenia, The state of Armenia’s environment,(2010), op cit.0maladies respiratoires rapportés ont augmenté de45 % et les experts estiment que l’incidence réell desmaladies comme l’asthme est en réalité beaucoupplus élevé 10 .La pollution atmosphérique est exacerbée parunepratique fréquente de brûlage des déchets àl’air libre. Le brûlage non autorisé libère des dioxines,furanes et autres substances chimiques toxiquesqui peuvent causer un large éventail de problèmesde santé, y compris des troubles de la peau, desproblèfoiehépatiques, des dommages au systèmeimmunitaire et certains cancers 11 .La déforestation, qui a atteint des niveaux sansprécédent, est une autre préoccupation. Seulement7 % des terres sont encore boisées, très en dessousdes 35 % d’il y a deux siècles et la plupart des forêtssont dégradées. Les principales causes sontl’utilisation de bois pour le chauffage, en raison dumanque d’alternatives, et la décision du Gouvernementd’autoriser l’exploitation minière dans deszones écologiquement sensibles, ce qui démontre lemanque de reconnaissance officielle de l’importancedes forêts naturelles 12 .La corruption et l’environnementUne grande partie des problèmes environnementauxen Arménie est liée à la corruption, notamm en pource qui se réfère à la foresterie et le secteur minier.Par exemple, les règlements environnementauxne sont pas respectés dans la plupart des opéra-10 Marianna Grigoryan, Armenia: Environmental Change SpursRespiratory Diseases, (19 octobre 2006), .11 Ibid.12 Ibid.36Rapports nationaux 66 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


FIGURe 1PBI. Taux réel de croissance (%)1680-8-16-241999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2005 2005 2005 2005 2006tions minières. Pendant la période allant de 2001 à2007, le ministre de la Protection dela Nnature del’époque avoyé délivré plusieurs permis d’exploitationminière à des membres de sa familrès Selonl’opinion publique, nombreuses sont les affaires decorruption liées à des entreprises parrainées pardes hauts fonctionnaires du Gouvernement 13 . Sansdoute les actions du Gouvernement n’ont pas étécapables d’arrêter la destruction et la dégradationdes forêts causées par l’exploitation forestière illégale.En outre, de nombreuses zones forestièresont été reclassées et attribuées abusivement à desparticuliers. En 2007, par exemple,le Gouvernementa modifié le statut de la partie centrale de la RéserveKhosrov pour permettre des constructions privéeset des activités agricoles.Le Gouvernement a priscette décision sans consulte’es experts en la matière.Les montagnes Teghut: une étude de casd’exploitation non durableLe Gouvernement est en train de mettre en œuvreun modèle de développement basé sur l’extraction,comme en témoigne sa volonté de permettre desinvestissements massifs dans l’industrie minière. LeProgramme arménien du cuivre (PAC), par exemple,a accordé une licence de 24 ans pour l’exploitationminière du cuivre et de molybdène des montagnesTeghut. Le PAC est en train de développer une mineà ciel ouvert d’une superficie de 240 hectares, le toutdans des terres forestières 14 .13 Voir: y .14 Policy Forum Armenia, The state of Armenia’s environment,(2010), op cit.Source: IndexMundi.comLe village de Teghut, situé dans la région deLori dans le nord-est, possède 3 600 habitants dontbeaucoup dépendent de l’agriculture de subsistance.La forêt environnante est le foyer de nombreuses espècesde plantes et d’animaux menacés d’extinction,dont 260 types d’insectes, 86 espèces d’oiseaux, 55espèces de mammifères et 10 espèces de reptiles 15 .Le PAC a déjà construit de nombreux sentiers àtravers la forêt pour des sites de forage exploratoire,détruisant plusieurs zones de manière indistincte.Enfin, selon le PAC, le projet nécessitera 670 hectares,desquelles 510 sont actuellement boisées 16 .Le PAC a déclaré qu’il va compenser les dommagescausés, par la plantation d’arbres à Erevan,mais ce plan est inadéquat et peu réaliste. De nouveauxarbres ne peuvent pas remplacer les habitatsforestiers établis, les arbres matures ne peuvent passurvivre àmentdéplacement.L’exploitation minière va produire des déchetsde roches et des résidus pouvant contenir de l’argent,de l’or, du rhénium, du plomb, de l’arsenic,du cuivre, du molybdène, du zinc et des produitschimiques du soufre. Dans cet inefficace processusd’extraction qui sera mis en place, des métauxprécieux tels que le rhénium seront gaspillés, pireencore, des résidus qui contamineront l’eau et l’airlocaux seront laissés dans la natus leEn cas de fuite,des produits chimiques toxiques pourraient s’introduiredans la rivière avoisinante, la Kharatanots, déjàcontaminée par des décharges de déchets de cuivredans le village d’Agotala et source d’eau potable deplusieurs communautés.15 Ibid.16 Voir: y < news.mongabay.com/2008/0129-hance_armenia.html>L’impact environnementalement destructeurde la mine sera difficilement compensé par les avantageséconomiques. Les économistes du projet estimentque le minerai enfoui vaut plusUSD 20 milliardsd’ont pour lesquels le pays ne recevra que 1,2 à 1,7% en impôts et taxes et que les graves problèmesenvironnementaux engendrés à long terme coûterUSD6,5 millions d’USD. Jusqu’à présent il n’existeaucune analyse économique indépendante sur lesdommages potentisur causés à l’environnement 17 .D’après les planifications en cours, la constructionde l’usine de traitement de minéraux et l’exploitationde la mine de cuivre-molybdène enfreindront77 lois, ainsi qu’une série de traités internationauxsignés et ratifiés par la République d’Arménie, y comprisla Convention cadre des Nations unies sur lechangement climatique, la Convention des Nationsunies sur la diversité biologique, la Convention desNations unies pour combattre la désertification etla Convention européenne du paysage. Toutefois,leGouvernement a désigné l’exploitation minièreTeghut comme une grande priorité en raison de sacontribution au « développement économique », cequi révèle sa perspective à court terme ainsi que sespratiques de corruption. Ceci révèle également sonmanque d’expertise, de respect de la loi, de volontéde protéger l’environnement et d’intér àde rechercherun modèle de développement durable à longterme.ConclusionsLa croissance rapide de certains secteurs de l’économie,combinée à l’absence d’une administrationpublique adéquate ont causé de graves problèmeset des enjeux environnementaux. Pour promouvoirla durabilité, le pays doit concevoir la protection del’environnement comme une priorité.L’Arménie a ratifié de nombreuses conventionsinternationales sur des questions comme la biodiversité,le changement climatique et la désertification.Ces engagements, ainsi que la voix de la sociétécivile ont été largement ignorés. L’amélioration de lagouvernance environnementale exigera la mise enœuvre et l’application efficace des lois environnementalesexistantes, ainsi qu’une plus grande transparenceet participation du public dans la conceptiondes politiques. Ceci, à son tour, exigera un effortconcerté pour sensibiliser la citoyenneté sur lesquestions liées à l’environnement. n17 Ibid.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>67Arménie


AZERBAÏDJANLa disparition du modèle économique extractifCe pays est l’un des territoires les plus pollués au monde par les industries et il doit remplacer sa vieille économied’extraction dépendante des ressources par une économie durable. Un meilleur dialogue entre le Gouvernementet la société civile est également nécessaire. En outre, les abus contre la liberté d’expression sont fréquents, etle Gouvernement tente systématiquement de réduire au silence les dissidents politiques et les manifestants.Les élections ne respectent pas entièrement les normes internationales ; le Parlement est sous le contrôle duparti au pouvoir et le pouvoir judiciaire n’est pas indépendant. Les ONG ont été fermées ou leur création refusée.Public Finance Monitoring CentreKenan Aslanli 1Public Finance Monitoring CentreSamir Isayev 2Dans sa progression vers un développement plusdurable, l’Azerbaïdjan doit affronter de nombreuxobstacles, tous difficiles à surmonter. La dépendancedu pays envers le pétrole et les industries pétrochimiquescontinue de causer de graves dommages àl’environnement, allant de la contamination des solsà la pollution de l’eau et de l’atmosphère. Bien que leGouvernement ait pris certaines mesures positivespour remédier à ces problèmes, on ignore combiende temps encore cette situation risque de durer enl’absence d’une stratégie sérieuse de régulation.D’autres aspects de la durabilité, principalement liésaux droits humains, sont plus complexes, car le partiau pouvoir contrôle à la fois le Parlement et le pouvoirjudiciaire, la société civile est fortement surveillée etles dissidents politiques et les manifestants continuentà risquer de sévères sanctions.De sérieux défis environnementauxL’Azerbaïdjan doit affronter de très sérieux défisenvironnementaux de différentes sortes. Dans certainesrégions, le sol est fortement pollué par despesticides, tels que le DDT et les défoliants utiliséspour la culture de coton. La pollution de l’eau est trèsimportante et seulement un quart de l’eau polluéeest traitée. Près de la moitié de la population n’a pasaccès à des installations de tout à l’égout 3 . Les villesde Soumgaït et la capitale (Bakou) figurent parmi lesvilles les plus polluées au monde 4 . En outre, Bakou seclasse au plus bas de l’échelle mondiale en matièrede santé et d’assainissement 5 .L’économie extractive prédominante n’est pasétrangère à cet état de choses. L’Azerbaïdjan, undes berceaux de l’industrie du pétrole, a une longue1 Économiste en chef.2 Chercheur en chef.3 Instituto del Tercer Mundo, Guia del mundo 2011-2012,(Madrid: 2010).4 Super Green Me, Sumgayit, Azerbaijan: The Most PollutedCity in 2007, ; Nationmaster, EnvironmentAzerbaijan, .5 T. Luck, “The world dirtiest cities”, Forbes, (New York: 2008).Indice des Capacités de Base (ICB)Indice d'Equité de Genre (IEG)ICB = 93 100Enfants atteignantIEG = 6410092 la cinquième annéed’école0L'autonomisation100 100100 10089 9798Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialiséSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansÉducationActivité économiquehistoire de dépendance économique de l’extractiondu pétrole. Il a été démontré que le pétrole étaitutilisé pour le commerce au III e et IV e siècles av.J.-C., et les activités de raffinage à Bakou sont mentionnéesdans les écrits du savant et voyageur turcEvilya Celebi, au XVII e siècle .L’industrie du pétroleproprement dite a pris son essor au XIX e siècle avecl’émergence des soi-disant « barons du pétrole »,qui maîtrisaient les procédés d’extraction et ontcontribué à la modernisation et à l’industrialisationde Bakou.Actuellement, l’industrie pétrochimique demeurela plus importante du pays, bien qu’en 2010 elleait atteint son pic de production historique de 1,12 millionsde barils par jour. Certaines prévisions indiquentqu’il se produira une baisse massive des niveaux deproduction entre 2015 et 2025 (voir figure 1).Cependant, la production de pétrole s’est avéréenon seulement non durable en elle-même, maisaussi non durable pour l’environnement. La longuehistoire de l’Azerbaïdjan en tant que producteur depétrole a conduit à des niveaux élevés de pollution.Par exemple, pendant l’ère soviétique les quartiersrésidentiels de Bakou ont été construits au milieudes champs de pétrole et les opérations industriellesavaient lieu dans les villes intra-muros ville sansgrande, voire aucune, préoccupation environnementale.Dans de nombreux cas, l’industrie pétrolière del’ère soviétique a créé d’énormes lacs de pétrole quiont littéralement détruit la totalité de la biomasseenvironnante. Au cours de ces 150 dernières années,les rives de la mer Caspienne, notamment dans lapéninsule Abershon, ont subi une véritable catastropheécologique accumulant les déchets toxiqueschimiques et biologiques provenant de la Volga quine cessent d’augmenter.03264Changement de modèleCe scénario sombre reflète un besoin urgent de protégerl’environnement. Ainsi, en 2009, la Banquemondiale a publié un rapport soulignant l’importancede diversifier l’économie azerbaïdjanaise afinde réduire la dépendance des revenus pétroliers etgaziers et de développer une durabilité à long terme 6 .Cette conclusion a été reprise par la Banque asiatiquede développement dans le sondage annuel de 2010de ses États membres 7 et par le Conseil exécutif duFonds monétaire international (FMI).Selon le FMI, « étant donné que la productionde pétrole ne sera plus la principale sourcede croissance, il existe un besoin urgent d’accélérerla diversification économique ». Toutefois,jusqu’à 2010 les secteurs non pétroliers n’avaientpas expérimenté une croissance significative. Letaux de croissance dans les secteurs non liés auxindustries énergétiques a diminué de 16 % en 2008à 13 % en 2010, et les exportations non pétrolièresne représentent que 5 % des exportations totales dupays. Pour freiner cette tendance, le FMI a exhortél’administration du président Ilham Aliyev à soutenirle secteur privé en promouvant les échangescommerciaux, la modernisation du système fiscalet des services de douanes et la réduction des monopolesd’État. 86 World Bank, Country Brief 2009 Azerbaijan, (Bakou :novembre 2009), .7 News.az, Asian Bank Urges Azerbaijan to Develop the Non-oilSector, (23 avril 2010), .8 S. Abbasov, “IMF: The Party’s Over for Azerbaijan’s OilSector,” Eurasianet, (24 mai 2010), .Rapports nationaux 68 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


La réponse du Gouvernement a été d’investirdans une nouvelle usine de construction navale etdans des projets de télécommunications. Il a égalementpublié un décret réduisant le nombre d’inspectionsdes entreprises privées. En juillet 2010,dans une allocution dirigée au Cabinet des ministres,Ilham Aliyev a déclaré que, hormis la nécessité demaintenir les taux de production de pétrole, l’économiese développait d’une manière diversifiée etil a souligné que le développement du secteur nonpétrolier était une priorité majeure. 9Déjà en 2004, le Gouvernement avait instauréun programme axé sur la poursuite de la diversificationde l’économie, en mettant l’accent sur lessecteurs autres que le pétrole ainsi que sur l’améliorationdu niveau de vie de la population. Les résultatsobtenus jusqu’à 2011 ont été positifs, malgré unralentissement de la croissance économique après ledébut de la crise mondiale en 2008. Par exemple, enmars 2001, le Comité national des douanes a informéque les exportations agricoles avaient augmenté de1,38 points (de 20,1 % en 2010 à 21,38 % au coursde la période janvier-février 2011). 10Aujourd’hui, le Gouvernement fait égalementpreuve d’un engagement modeste envers la protectionde l’environnement. Le plus grand défi pour le Gouvernementet le secteur privé est de se débarrasser de l’ancienmodèle d’extraction et de favoriser les investissementset la recherche dans le domaine des technologiesrespectueuses de l’environnement. Le Gouvernement adésigné l’année 2010 comme « l’année de l’écologie »et a lancé des programmes pour la plantation d’arbres,la purification de l’eau et le développement de sourcesd’énergie alternatives et propres.Un autre effort encourageant a été le remodelagedes complexes de raffinage en dehors deBakou pour réduire les émissions de dioxyde decarbone près des zones d’habitations. Des travauxont également commencé pour réhabiliter les sitescontaminés. Par exemple, le groupe azéri d’électricité,Azerenerji, a reçu un financement de la Banqueeuropéenne pour la reconstruction et le développement(BERD) pour reconstruire la centrale thermiqueAzdres afin qu’elle puisse fonctionner en respectantle Mécanisme de développement propre (MDP) duProtocole de Kyoto.Un record décourageant dans le domainedes droits humainsPlusieurs associations des droits humains ont signaléque l’Azerbaïdjan est confronté à des défisimportants concernant les libertés fondamentales,les droits humains et la démocratie. Les élections nerespectent toujours pas les normes internationaleset il n’y a pas de séparation claire entre les pouvoirslégislatif et exécutif, puisque le Parlement est sousle contrôle du Parti dirigeant (Parti du Nouvel Azerbaïdjan).9 I. Alizex, Opening Speech at a Meeting of the Cabinet ofMinisters on the Result of Socioeconomic Development inthe First Half of 2010, (13 juillet 2010), .10 Freshplaza, Azerbaijan increased exports of fruits andvegetables by 21%, (31 mars 2011), .FIGURE 1Azerbaïdjan : profils de production à long terme 1870-2014140012001000800600400200018701875Mstb/dExploitation à petiteéchelle de filtrations depétrole et de gaz depuisl’époque de la préhistoire1872 : premièresdonnées dans lesarchivesgouvernementales1847/8 : Foragedu premier puitsen Azerbaïdjan18801885189018951900190519101915I e GM192019251930Article 19, une organisation des droits civiques,a publié un rapport en septembre 2010 qui décritcertaines des principales conclusions relatives à la libertéd’expression en Azerbaïdjan. Parmi différentestendances alarmantes, le rapport a identifié des actesde violence contre les journalistes, le harcèlement oula persécution des détracteurs du Gouvernement etl’abus du droit pénal à des fins politiques, y comprisl’emprisonnement de dissidents sur des accusationsde conduite désordonnée et de possessionde drogue. En 2009, plus de 50 personnes ont étéconsidérées comme des prisonniers politiques. 11Les attaques violentes contre les représentantsdes médias sont fréquentes. En 2005, le rédacteur enchef d’un magazine local a été tué par des assaillantsnon identifiés suite à la publication de plusieurs articlesqui critiquaient durement les autorités. Depuislors un climat de violence contre les journalistess’est installé dans lequel prévalent l’impunité desagresseurs, le harcèlement et l’emprisonnement desdétracteurs du Gouvernement. 12Le recours à la torture et aux mauvais traitementsdans les commissariats et les centres de détentiona également été signalé. Ces incidents n’ontpas fait l’objet d’une enquête sérieuse et les policierssoupçonnés d’avoir commis des actes de torturen’ont pas été poursuivis.Le Gouvernement a également fait preuve deviolence contre les manifestants. La police a violemmentdispersé des manifestations à la suite desélections présidentielles de 2003 et des électionslégislatives de 2005, et aucun des policiers impliquésn’a été sanctionné. En fait, depuis 2005 le Gouvernementa sévèrement restreint le droit des personnes àse réunir librement.11 Article 19, Dissident Kimi Yaşamaq, .12 Ibid.II e GM193519401945195019551960196519701975Pic d’ACG - 2010(1120 mbs/j)Phase 3 enfonctionnement 2008Azeri enfonctionnement 2005Chirag enfonctionnementnovembre 1997198019851990199520002005Future baisse des autres secteursévaluée à 3% annuel201020152020Source: WikipediaDes organisations de droits civils et d’autresONG ont été fermées ou leur création refusée. Desamendements d’une loi de 2009 ont permis au Gouvernementde mettre les ONG sous contrôle étroit. 13En avril 2011, Amnesty International a exhorté lesautorités à cesser leur répression contre la libertéde réunion, après la violente répression de manifestantsà Bakou. Le Comité de la Chambre publiquequi a organisé le rassemblement a affirmé qu’aumoins 150 personnes avaient été arrêtées dansla rue alors qu’elles étaient en train de manifestercontre le Gouvernement. Après le blocage de tousles accès menant au site, des centaines de policiersanti-émeute ont été mobilisés pour arrêter la manifestation,qui avait été organisée par les partis d’oppositionà travers Facebook. Plusieurs journalistesont reçu l’interdiction de photographier ou de filmerles événements, et après la manifestation, de nombreuxmilitants ont été enlevés à leur domicile. Aumoins sept personnes ont été reconnues coupableset condamnées, leurs procès se sont déroulés à huisclos et elles n’ont pas eu droit à une défense légale. 14« Le régime actuel d’Azerbaïdjan a une longuehistoire dans le domaine des interdictions et des obstaclesaux rassemblements publics », a déclaré JohnDalhuisen, directeur adjoint d’Amnesty Internationalpour l’Europe et l’Asie centrale. « La réaction desautorités aux manifestations d’aujourd’hui et auxprotestations qui ont eu lieu en mars de cette annéerévèle crûment leur refus catégorique à tolérer touteforme de protestation publique visible. » 15 n13 Human Rights House, A Common Statement onHuman Rights in Azerbaijan, .14 Amnesty International, Azerbaijan Protests Broken up asRiot Police Move in, (avril 2011), .15 Ibid.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>69Azerbaïdjan


BAHREÏNL’épuisement de deux ressources, la dégradation de l'avenirToute tentative de réaliser un développement durable dans ce royaume insulaire se heurte à l’effondrementproche et inévitable de son approvisionnement en eau. L'utilisation irresponsable de cette ressource nonrenouvelable et la pollution croissante des affluents en raison de l'industrialisation qui accompagne l’exploitationpétrolière, autre ressource qui s’épuise peu à peu, place Bahreïn au bord de la catastrophe. Face à cette situationoù le Gouvernement peine à trouver les réponses adéquates, les inégalités et le malaise social s’approfondissentet s’aggravent.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> BahrainAbdulnabi AlekryLe Gouvernement de Bahreïn a décidé de réprimeravec une extrême violence les manifestationsqui, dans le sillage du printemps arabe, ont eu lieuPlace de la Perle à Manama. Celles-ci exigeaient deschangements politiques et sociaux et la fin de la monarchie.Malgré la gravité du problème environnementaldu pays, les citoyens n'ont pas inclus dansleurs réclamations la garantie d’un développementdurable au travers d’une bonne gestion des raresressources naturelles, lesquelles signifient, littéralement,une question de vie ou de mort. D’aprèsla liste 2011 des pays connaissant des problèmesd'approvisionnement en eau dressée par la sociétébritannique d'analyse de risque Maplecroft 1 , l’Étatde Bahreïn occupe la première place, suivi du Qatar,du Koweït, de l'Arabie Saoudite et de la Libye. Celasignifie qu’au niveau mondial Bahreïn est la nationqui risque le plus une interruption totale de son approvisionnementen eau à court ou moyen terme.Une catastrophe en puissanceLa pénurie d'eau constitue le principal problème dupays et le principal obstacle pour son développementdurable. Selon l’Indice de pauvreté concernantl’accès à l'eau 2 , un pays souffre de pénurie d'eau sil'approvisionnement annuel par habitant est inférieurà 1 000 mètres cubes. En 2007, l'approvisionnementen eau par habitant à Bahreïn a été de 470,3 mètrescubes 3 . Dans les 665 kilomètres carrés du royaume(correspondant à une superficie inférieure à celle del’aéroport du roi Fahd chez son voisin saoudien) viventplus de 1,2 million de personnes, dont la moitiésont des résidents étrangers.Presque toute l’eau douce consommée dansle pays vient traditionnellement de trois aquifèresnon-renouvelables situés sous l’île principale de l’ar-1 Maplecroft, Maplecroft index identifies Bahrain, Qatar, Kuwaitand Saudi Arabia as world’s most water stressed countries,(25 mai 2011), .2 Peter Lawrence, Jeremy Meigh y Caroline Sullivan, “Thewater poverty index: An international comparison”, KeeleEconomic Research Papers 2002/19, .3 ChartsBin, Total Water Use per capita by Country, .Indice des Capacités de Base (ICB)Indice d'Equité de Genre (IEG)ICB = 97 100Enfants atteignantIEG = 5410094la cinquième annéed’école0 0L'autonomisation35100 100100 10097 9997Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialiséSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansÉducationActivité économiquechipel (Bahreïn est composé de 32 îles), Dammamétant le principal des trois. Depuis les années 70,le Gouvernement essaie de freiner, sans y parvenirtotalement, l’épuisement de ces réserves grâce à laconstruction d’usines de dessalement d’eau de mer,ou par le biais de diverses campagnes de réutilisationdes eaux usées domestiques non contaminées.Durant la Journée mondiale de l’eau en 2010, RehanAhmed, expert en environnement de la Commissionpublique pour la protection des ressources marines,l’environnement et la faune, a admis que, malgré lafaiblesse de l’approvisionnement, le citoyen moyende Bahreïn consomme environ 400 litres d’eau parjour, comparé à la moyenne mondiale qui est de 256litres, ou de 60 litres au Japon. Le taux de croissancede la consommation de l’eau est de 8 à 10 % annuel,alors que les niveaux des réserves d’eau souterrainessont en baisse 4 .Seulement pour l’irrigation des cultures, on estimequ’en 1998 la consommation en mètres cubesde l’aquifère de Dammam a été de 204 millions,lorsque les études environnementales estiment queles niveaux raisonnables d’extraction ne devraientpas excéder 100 millions par an, puisque la moyennedes précipitations dans le pays ne dépasse pas 80mm par an 5 , de loin insuffisantes pour remplacer cequi est consommé.Depuis les années 1970 l’un des engagementsmajeurs du Gouvernement pour stopper l’épuisementdes nappes aquifères dans la région a été la4 TradeArabia News Service, Bahrain Water ConsumptionSoars, (23 mars 2010), .5 A. Bashir et al, Development of water resources in Bahrain,.30construction d’usines de dessalement d’eau de mer.Le plan a débuté en 1974 et en 2000 le pays possédaitquatre usines produisant un total de 276 millionsde litres d’eau potable par jour 6 . Si l’on ajoute à celal’eau prélevée dans les nappes de l’île et celle qui estrecyclée pour l’irrigation, la production totale quotidienneest actuellement de 537 millions de litres, etla consommation quotidienne est de 529 millions delitres. Cela signifie que le pays n’a pas de réserves eneau potable. Les projets actuels du Gouvernementimpliquent la production croissante d’eau par le biaisde nouvelles usines de dessalement, pour atteindreainsi 916 millions de litres par jour en 2030. L’objectifest d’atteindre des réserves d’eau de 1589 millionsde litres, ce qui permettrait au pays trois jours d’approvisionnementen eau en cas d’urgence 7 . Il a étésuggéré l’utilisation de l’énergie éolienne pour fairefonctionner les nouvelles usines de dessalement 8 .Les solutions partielles que le Gouvernement atenté de mettre en place pour inverser la pénurie d’eaun’ont pas offert les effets escomptés ou ont généré denouveaux problèmes. En 1977, un ambitieux projet derecyclage des eaux usées pour les rendre utilisables aété mis en place. Pendant des décennies, ce programmea fonctionné en informant le public que l’eau ainsi obtenueétait impropre à la consommation humaine et6 Global Water Intelligence, “Bahrain to Scale up DesalinationCapacity”, (octobre 2000), .7 E. Baxter, “Bahrain plans to double water productionby 2030,” Arabian Business, (30 mai 2010), .8 WaterLink International, Wind-powered Desalination forBahrain, (8 février 2011), .Rapports nationaux 70 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


BANGLADESHMoins durable, plus vulnérableTrès peu de pays se trouvent aussi affectés par le changement climatique que le Bangladesh, qui n’émet pourtantqu’une quantité minime de carbone dans l’atmosphère. De plus, les efforts fournis par le Gouvernement pouraborder la durabilité ont été insuffisants. Les sujets gravitant autour de l’environnement comme la surpopulationet la dégradation des conditions de vie dans les villes principales ne sont pas abordés. Les migrants climatiquesdéstabilisent une économie qui, n’étant déjà pas durable, fait de ce pays l’un des plus vulnérables à la pénuried’aliments et aux catastrophes naturelles.Unnayan ShamannayMd. Akhter Hossain, ChercheurEquityBDRezaul Karim Choudhury, Modérateur en chefShamunnaySuzana Karim, Chercheur associéIndice des Capacités de Base (ICB)Indice d'Equité de Genre (IEG)ICB = 70 100Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleIEG = 5510055L'autonomisationDix-neuf ans après la Déclaration de Rio sur l’environnementet le développement de 1992 il est tempsde revisiter ses principes. Le deuxième principe signaleque : « Conformément à la Charte des NationsUnies et aux principes du droit international, les Étatsont le droit souverain d’exploiter leurs propres ressourcesselon leur politique d’environnement et dedéveloppement, et ils ont le devoir de faire en sorteque les activités exercées dans les limites de leurjuridiction ou sous leur contrôle ne causent pas dedommages à l’environnement dans d’autres Étatsou dans des zones ne relevant d’aucune juridictionnationale ». L’impact du changement climatique surle Bangladesh est évident, et il provient en définitivedu mauvais usage des ressources naturelles par lespays développés, auxquels il correspond d’offrir unecompensation.Le principe nº 8 établit que « Afin de parvenir à undéveloppement durable et à une meilleure qualité devie pour tous les peuples, les États devraient réduire etéliminer les modes de production et de consommationnon viables et promouvoir des politiques démographiquesappropriées ». Cependant, les styles de viedes pays développés s’appuient sur l’emploi de combustiblesfossiles et sont donc fondés sur un « modede production non viable ». Les ressources d’hydrocarburesnon seulement sont limitées, mais elles sontaussi l’une des causes principales de la dégradationenvironnementale et du changement climatique. Lesresponsables des politiques des pays développésn’ont pas su limiter les émissions, ni proposer des modèlesalternatifs de production durable et des modesde vie visant l’égalité des droits environnementaux detous les habitants de la planète.Une économie non durableLe pays a atteint ces dernières années de nombreuxobjectifs de développement. Par exemple :• Le revenu per capita s’est accru, atteignant 780USD en 2011 1 .1 Priyo, Per-capita income rises to $780 as GDP growth defiesrecession, (1er juillet 2011).018100 10095Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialiséSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ans• L’inscription à l’école primaire a atteint 90% aucours des dernières décennies 2 .• Le taux de mortalité infantile a baissé, passant de71,66 % en 2000 à 50,73 % en 2011 3 .• L’espérance de vie a augmenté, passant de 50 ans àplus de 65 ans au cours des 20 dernières années 4 .• Les exportations ont plus que triplé entre 1998et 2010, passant de 5,1 milliards d’USD à 16,24milliards d’USD 5 .Mis à part ces succès, le Gouvernement intérim deFakhruddin Ahmed (2007-09) suivit un modèle nondurable inapte à améliorer la sécurité alimentaire.Ses mesures adultératrices, par exemple, incitèrentde nombreux importateurs et commerçants à interromprel’importation et la distribution d’aliments 6 .De plus, le Gouvernement a fait de la Garde des frontièresdu Bangladesh (force de sécurité paramilitaireappelée autrefois « les Bangladesh Rifles ») la seuledistributrice d’aliments subventionnés aux personnesdémunies, malgré ses innombrables antécédentsde corruption (dans la contrebande surtout) et sonmanque d’expérience en la matière.Après qu’une série de subventions rende l’emploides pesticides et des fertilisants plus abordable, l’abus2 Trading Economics, Total enrollment; primary (% net) inBangladesh, (2011); Trading Economics, School enrollment;primary; female (% gross) in Bangladesh, (2011).3 Index Mundi, Demographics: Infant mortality rateBangladesh, (2011).4 Trading Economics, Life expectancy at birth; total (years) inBangladesh, (2011).5 Ibid.6 Auteur anonyme, “The impending food crisis in Bangladesh”,in D.Hulme, Food insecurity in Bangladesh: the other crisis,(University of Manchester, Ending world poverty, 2007).1006510081Éducation180Activité économiquede ces produits chimiques a non seulement réduit lafertilité des terres mais il a également menacé la santéde l’Homme 7 . La politique du Gouvernement s’avèreclairement non durable, puisqu’elle viole les préceptesde la planification à long terme et qu’elle ignore le rapportévident entre les fertilisants, l’épuisement du solet son érosion. Cette orientation impropre est particulièrementcruelle dans un pays aussi vulnérable auxcatastrophes naturelles et au changement climatiqueque le Bangladesh. Si ces politiques ne changent pasdans les années à venir, elles ne feront qu’empirer lesconditions de vie déjà déplorables du peuple bengali.Menaces environnementalesLa surpopulation est la cause principale de la dégradationenvironnementale 8 et de l’épuisement desressources 9 . Les menaces visent la déforestation etl’érosion du sol ; le manque d’eau potable qui est dûsurtout à la masse de population, à l’inadaptation dusystème d’épuration, et à la propagation des contaminantsnon traités 10 . Même à Dhaka, la capitale, ladistribution continue d’eau fait défaut. Dans certainsquartiers, l’eau n’est disponible que de deux à quatreheures par jour ; à la saison sèche, de janvier à mars,les coupures d’eau sont fréquentes 11 . En 1993, deschercheurs ont découvert que les eaux souterrainesdu pays (source d’eau potable pour 97 % de la populationrurale) étaient polluées de façon naturelle par del’arsenic ; malgré les efforts du Gouvernement, plus de70 millions de personnes en 2008 buvaient encore de7 Ibid.8 Encyclopedia of the nations, Bangladesh - Environment, (2011).9 DiscoveryBangladesh, Bangladesh: Environmental Issues, (2011).10 Encyclopedia of the nations, Bangladesh - Environment, (2011).11 Wikipedia, Water supply and sanitation in Bangladesh.Rapports nationaux 72 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


l’eau qui dépassait les valeurs limites permises 12 . L’eaurésiduelle à la superficie est souvent souillée par lesexcréments humains, ainsi que par les déchets urbainset industriels. Le système d’égouts reste insuffisant,le pays ne possédant qu’une seule usine d’épuration.Un enfer urbainLa migration des zones rurales vers les zones urbainespose un des plus gros problèmes du pays ; chaque année,500 000 personnes supplémentaires arrivent àDhaka. La ville n’a pas une infrastructure suffisante pouraccueillir ses résidents actuels, presque 45 % d’entreeux habitent dans des bidonvilles ou dans des quartiersoù les conditions de vie ne réunissent pas les exigencesd’habitabilité requises 13 . Cette migration est principalementdue aux catastrophes naturelles, à savoir, la sécheresse,les inondations, les cyclones, la perte de terresagricoles par l’érosion des rivières et l’absence d’unmarché du travail viable dans les zones rurales 14 . Raressont les émigrants qui améliorent leurs conditions devie dans les villes : le revenu des ménages moyen dansles zones urbaines représente à peine 1 USD par jour 15 .Cette situation insoutenable prend sa source dansl’absence d’efforts habituel en faveur du développementdurable et de planification à long terme. Au coursdes vingt dernières années, les gouvernements ont négligéla production agricole et mis en œuvre quelquesrares mesures destinées à planifier ou à contrôler lacroissance urbaine. Ils ont de plus encouragé la centralisation,se sont désintéressés du développementrural et ne sont pas arrivés à multiplier les opportunitésdans des villes autres que la capitale. Cela se traduitpar une accentuation du déséquilibre géographiquedes recettes : Dhaka contrôle environ 70 % de l’offremonétaire du pays et attire presque 60 % de l’investissementtotal 16 . Le Gouvernement a introduit quelquesmesures pour donner de l’élan à la production agricole,mais il n’a pas encore abordé le sujet de l’urbanisation,pourtant impérieux. Dhaka, à vrai dire, devient un enferurbain. La pollution atmosphérique, provoquéeen grande partie par les autobus et les camions, s’intensifie.Une foule de gens déambule dans les rues,formant une marée humaine, tandis que les crimes etla violence ne font que croître.RecommandationsIl devient impérieux d’aborder les droits des migrantsclimatiques énoncés dans la Convention cadre desNations-Unies sur les changements climatiques (CC-NUCC). Un nouvel organisme de l’ONU doit être constituéafin d’administrer la réhabilitation de ces droits.L’article 13 de la Déclaration de Rio décrète l’obligationde donner une indemnisation en cas d’effets néfastesdûs à la pollution ou aux dommages causés à l’environnement; le nouvel organisme peut agir en tant quecoordinateur pour gérer le fonds de compensation.Si l’on croit que tous les citoyens du monde ontdroit aux aliments, un nouvel ordre alimentaire mon-12 Ibid.13 A.Khan, “Migration to Dhaka”, The Daily Star, (26 septembre2009).14 Ibid.15 Ibid.16 Ibid.Changement climatique : à qui revient ce compte ?Le Bangladesh est responsable de moins d’un cinquième de 1 % des émissions de gaz à effet de serremondiales 1 . Cependant, d’après le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat(GIEC), c’est également un des pays les plus vulnérables à ses nuisances 2 . Dans les prochaines décennieson prévoit que ces effets nuisibles incluront des conditions climatiques extrêmes (par exemple,des cyclones tropicaux), un accroissement des précipitations, de la sédimentation et des températuresmoyennes; le débordement des rivières ; l’érosion côtière ; la fonte de la calotte glaciaire de l’Himalaya; et la hausse du niveau de la mer. Le Bangladesh serait menacé par chacune de ces catastrophes.Le PNUD signale que le Bangladesh est davantage enclin aux cyclones tropicaux. Par exemple,le cyclone Aila qui ravagea le pays le 25 mai 2009, emportant avec lui de grande quantités de terre,surtout dans les îles longeant la côte, provoqua le déplacement de plus 400.000 personnes 3 . Selonle Service d’aide humanitaire et de protection civile de la Commission européenne (ECHO), près de40.000 personnes durent émigrer de la région de Khulna, 30.000 de Paikgacha, 18.000 de Dacopeet 12.000 de Batiaghata upazila. Certaines personnes des zones côtières émigrèrent vers les paysvoisins, en Inde par exemple 4 .Le changement climatique réduira la production agricole et mènera à une pénurie certaine d’eaupotable, compromettant ainsi la capacité du pays à élever la croissance économique et à éradiquer lapauvreté 5 . Dans le pire des cas, la hausse du niveau de la mer déplacera des millions de personnes, àmoins de fortifier les polders côtiers existant et d’en construire de nouveaux. Il est primordial que leouvernement se prépare à ces défis et qu’il s’attache à penser et à planifier à long terme 6 .1 M.A.Hossain, “Bangladesh: more poverty, vulnerability and food insecurity,” («Bangladesh: plus de pauvreté, devulnérabilité et d’insécurité alimentaire «), <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> Report 2010, (Rapport de <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 2010. Montevideo:2010), p.66.2 M.L.Parry et al. (eds), Contribution of Working Group II to the Fourth Assessment Report of the IntergovernmentalPanel on Climate Change (New York: Cambridge University Press, 2007), (Contribution du IIe Groupe de Travail pour leQuatrième rapport d’évaluation du Panel Intergouvernemental sur le Changement climatique. Nueva York. Presses del’Université de Cambridge, 2007).3 Voir: 4 P. Gain, “Aila, Shrimp and failed mud walls”, The Daily Star 3, nº 1 (janvier 2010).5 Hossain, op cit.6 Ibid.dial doit être élaboré pour remplacer l’ordre alimentairemondial actuel fondé sur le marché et qui ne fait qu’accroîtrela faim dans le monde.Les pays développés sont historiquement responsablesdes dommages climatiques ; c’est particulièrementévident dans le cas du Bangladesh, carce pays est responsable d’une partie infime des émissionsmondiales de carbone, par contre il subit bienplus de dommages dûs au changement climatiqueque les pays qui contribuent le plus à l’effet de serre.Comme l’énonce clairement le principe nº 9 de la Déclarationde Rio, les pays développés doivent atténuerl’impact négatif du changement climatique en développantdes technologies durables et respectueuses del’environnement, et en les diffusant aux pays en voiede développement ou aux pays les moins développés.Fonds pour le changement climatiqueLe Gouvernement du Bangladesh a établi deux organismespour épauler économiquement la mise enœuvre de la Stratégie et du Plan d’action du Bangladeshsur le Changement climatique (BCCSAP, selonson sigle en anglais) visant des mesures à moyen etlong terme. Ces deux institutions sont le Fonds deRésilience au changement climatique du Bangladesh(BCCRF) et le Fonds Fiduciaire du Bangladesh pour lechangement climatique.Le BCCRF tire ses ressources des contributionsde quatre donateurs principaux : Le Royaume-Uni(avec un apport de 94,6 millions d’USD), le Danemark(1,8 millions d’USD), la Suède (13,6 millions d’USD) etl’Union européenne (11,7 millions d’USD). La Suissea apporté 3,8 millions d’USD. Les accords du BCCRFse sont parfaits dans un Guide de mise en œuvre aprèsun large débat entre le Gouvernement et les donateurs.Financer le changement climatique est un granddéfi pour un pays comme le Bangladesh dont la baseéconomique est faible. Le financement alloué par leGouvernement au BCCRF est puisé de l’investissementdans d’autres secteurs importants, tels que la santé,l’assainissement, l’éducation et la pauvreté.En définitiveDepuis de graves inondations jusqu’à une fonte rapidede la calotte glaciaire de l’Himalaya, les menaces liées auchangement climatique que doit affronter le Bangladeshsont graves et imminentes. Les atténuer et promouvoirle développement durable demande une action décisivedu Gouvernement gérée à travers un programme à longterme. Certes, ces efforts seront onéreux, surtout pourun pays aussi pauvre, mais les pays développés qui ontété les principaux responsables du changement climatiqueont l’obligation – exprimée dans la Déclaration deRio de 1992 – d’aider les pays comme le Bangladeshà affronter ses impacts. Si le Gouvernement promulgueun plan plausible de développement durable à longterme, il sera plus difficile pour les pays développés decontinuer à ignorer cette obligation. n<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>73 Bangladesh


BELGIQUERevendication d’une justice climatique pour tousLes politiques environnementales en vigueur en Belgique laissent fort à désirer. Le pays relèvera dans un avenirimmédiat des défis importants relatifs au changement climatique, entre autres la hausse des températures etla modification profonde de la distribution annuelle des pluies, mais il ne tient pas compte des engagementspris par la communauté internationale. Le dialogue entre les trois régions du pays, le secteur industriel et lasociété civile a été rompu et il ne pourra se renouer qu’à travers de fortes campagnes de sensibilisation sur lesproblèmes urgents qui menacent l’environnement et qui mettent en péril le bien-être de la société.CNCD-11.11.11Nicolas Van NuffelEntre 1993 et 1997 la Belgique a institué un Conseilfédéral du développement durable, formé par desreprésentants du patronat, des syndicats, de différentesONG et de la communauté scientifique 1 , l’ensembledes ministres fédéraux et les différents gouvernementsrégionaux étant également représentésen qualité d’observateurs. Dans le cadre d’une fortetradition de concertation sociale, la Belgique n’a passu faire le pas entre la mécanique institutionnelle etla mise en œuvre réelle d’une politique volontaristeen faveur du développement durable.Le défi du changement climatique, ainsi queses implications socio-économiques et environnementalesde vitale importance, en sont la preuve. Onpourrait évidemment argumenter que l’impact duréchauffement mondial touchera moins la Belgiqueque les pays en développement ou ceux qui ont deséconomies plus faibles, mais il est indéniable aussique ses conséquences ne seront pas négligeables.Ces retombées dépendront de l’ampleur, de l’orientationet de la célérité à laquelle seront mises en pratiqueces mesures destinées à réduire les émissionsde gaz à effet de serre et à combattre les impacts deschangements en cours.Chaleur, pluie, extinction et inégalité socialeSelon le rapport codirigé par le professeur Van Ypersele,vice-président du Groupe d’experts intergouvernementalsur l’évolution du climat (GIEC), et par PhilippeMarbaix, les températures en Belgique pourraients’élever jusqu’à 4,9 °C en hiver et 6,6 °C en été, au coursdu XXIe siècle 2 . Cela aura de graves conséquences surl’environnement, entre autres une perte importante dela biodiversité 3 . Quant à l’impact sur les ressources eneau, « les projections pour l’évolution des précipitationsd’ici la fin du XXIème siècle montrent une augmentationcomprise entre 6 et 23 % pour l’hiver […] et une baisse(en été) allant jusqu’à 50 % » 4 .1 2 Philippe Marbaix et Jean-Pascal van Ypersele, Impact deschangements climatiques en Belgique (Bruxelles, Greenpeace,2004), (version française)3 Ibid.4 Ibid.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9899+Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialiséEnfants atteignantla cinquième annéed’école99+Survivance jusqu’àl’âge de 5 ansCes perturbations pluviométriques pourraientavoir de graves répercussions sur l’économie dupays, comme celles qu’engendre la multiplication dephénomènes extrêmes tels que les inondations et lessécheresses. De plus, ces catastrophes, associées àl’élévation des températures, auront un fort impactsur la santé de la population ; en effet, la proliférationdes vagues de chaleur accroîtrait la mortalité et lamorbidité du pays 5 .La Belgique dispose a priori des moyens nécessairespour affronter ces conséquences négatives,surtout parce que d’autres effets à caractère positifpourraient – en partie – compenser l’étendue desdégâts. Par exemple, on s’attend à une hausse de laproductivité agricole, particulièrement dans le cas decertaines cultures (dont le blé), à condition toutefoisque les températures n’augmentent pas de plus de3 °C 6 . Cependant, les conditions pour affronter ceschangements ne sont pas les mêmes pour toutela population : « L’impact réel des changementsclimatiques sur la santé d’une population dépendlargement de sa vulnérabilité, qui dépend elle-mêmebeaucoup du niveau de vie, de l’accès aux soins, etde la capacité de cette population à s’adapter à denouvelles conditions climatiques » 7 .De toute façon, le réchauffement mondial n’estpas le seul défi environnemental auquel devra faireface la Belgique dans un avenir proche. Étant donnéque les ressources énergétiques domestiques sontlimitées à l’énergie nucléaire et au petit secteur (enhausse cependant) des sources d’énergie renouvelables,la Belgique est devenue extrêmement dépen-5 Ibid.6 Ibid.7 Ibid.100092100 100Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 79Éducation1000L'autonomisation79100 10098Activité économiquedante de l’importation de combustibles fossiles, parexemple du gaz importé de Hollande, de Norvègeet d’Algérie 8 . C’est pourquoi l’épuisement de cesressources pourrait avoir pour conséquence de fairegrimper les prix de l’énergie à des taux insoutenablespour les populations de moindre pouvoir d’achat.L’obstacle de la complexité institutionnelleLe développement durable ne peut être analysé si cen’est d’un point de vue international. Le Sommet deRio 1992 sur les changements climatiques a établile principe des responsabilités partagées mais différenciéesentre les pays les plus industrialisés et lesplus polluants et les pays les moins développés. LaBelgique, qui intègre la liste des pays devant réduireleurs émissions de gaz à effet de serre, a continuéd’en émettre des quantités alarmantes sans pourautant instaurer de programmes visant à réduireces émissions. De fait, dans le débat européen surla réduction des émissions de gaz à effet de serrepour l’après 2012, la Belgique se semble se trouverparalysée par ce défi. Tandis qu’un certain nombre depays de l’Union européenne se prononçait en faveurdu passage unilatéral vers une réduction de 30 % desgaz à effet de serre, la Belgique, pour sa part, n’a prisaucune décision claire à ce sujet.À cet égard, la complexité institutionnelle de laBelgique n’est pas un facteur positif. Étant donné quel’environnement est un domaine partagé entre l’Étatfédéral et les trois régions (les Flandres, la Wallonieet Bruxelles), ces quatre institutions doivent arriversystématiquement à un accord pour pouvoir adopter8 Commission européenne, Belgium Energy Mix Fact Sheet,61Rapports nationaux 74 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


une position commune dans les débats internationaux.Or, en ce qui concerne le problème concret dela réduction des émissions, l’absence d’un accordfavorise les vetos de facto exercés contre les propositionsdésireuses au moins de faire avancer le débatet d’assumer sérieusement les engagements pris.La Belgique garde donc une attitude expectativelors des débats internationaux et européens sur lesréductions des émissions de gaz à effet de serre,contribuant ainsi à maintenir l’ensemble de l’Europeen deçà des engagements recommandés par la communautéscientifique.Malheureusement, la société civile n’est pasunanime pour exiger l’acceptation de ces recommandations.Ainsi, la Fédération des Entreprises deBelgique (FEB) exerce un lobby intense contre toutetentative de révision unilatérale à la hausse des engagementsde l’Europe et, par conséquent, de ceuxde la Belgique. Dans une note publiée peu avant laConférence de Cancún, la FEB estimait que : « l’Europeest bien seule avec ses engagements unilatérauxpour une réduction des émissions de gaz à effetde serre. Il va de soi que cela a un impact négatif sur sa compétitivité.[…] À ce stade, le monde belge des entreprisesn’est pas favorable à un relèvement de l’objectifderéduction à ‐ 30 % car les conditions définiespar l’UE ne sont pas remplies » 9 .Mais est-il vrai que ces conditions ne sont pasremplies ? Une étude du Climate Action Network-Europe publiée en février 2011 montre que la Belgiquepourrait perdre de grandes sommes d’argentsi l’Europe refusait de passer à 30 % de réduction desémissions. Elle perdrait ainsi 2,8 milliards d’USD enrevenus de la vente aux enchères des droits d’émission,ainsi que 1,26 milliard d’USD d’économie dansle domaine sanitaire 10 .Qui plus est, investir dans la transformationdu modèle économique et énergétique de la Belgiquese solderait également par un impact positifà long terme sur l’économie belge. Il est clair quecette transformation exigerait des adaptations pourcertains secteurs émettant beaucoup de gaz à effetde serre, tels que la sidérurgie ou l’industrie automobile,et que ces adaptations devront s’accompagnerde fortes mesures sociales, mais elles sontincontournables.Leçons tirées de FukushimaLa catastrophe nucléaire de Fukushima au Japon – la plus grave depuis Tchernobyl –, qui a suivile tremblement de terre et le tsunami du 11 mars 2011, a amené plusieurs gouvernements dansle monde à reconsidérer leurs programmes de génération d’énergie nucléaire. Emboîtant le pas àl’Allemagne qui a décidé d’abandonner progressivement son programme nucléaire entre 2011 et2020, le Gouvernement belge a annoncé qu’il comptait réduire de façon significative à l’horizon2015 la production d’énergie nucléaire.Cet engagement inclut la fermeture de deux réacteurs dans la ville de Doel et un autre dans lacentrale atomique de Tihange. Ces trois unités font partie des centrales opératives les plus vétustesdu pays. Les réacteurs restants seront graduellement fermés au cours des dix prochaines années,jusqu’à l’arrêt total de la production nucléaire en 2025.Les dates proposées, néanmoins, ont été qualifiées de « souples » par l’administration actuelle.En même temps, tant que les objectifs de fermeture ne sont pas atteints, le Gouvernementpropose de considérer l’énergie nucléaire comme une source « provisoire » d’approvisionnement,et manifeste son engagement à redoubler ses efforts vis-à-vis du développement et de la miseen marche de sources alternatives d’énergie. Il a également été question d’instaurer un systèmed’impôts grevant plus fortement l’énergie nucléaire, de façon à promouvoir la recherche de sourcesalternatives 1 .1 Jonathan Benson, “First Germany, now Belgium: nuclear energy to be phased out b 2015”, Natural News, (4novembre 2011), .La résistance au changementLes changements climatiques et les mesures àprendre pour y faire face sont donc un excellentindicateur de l’engagement de la Belgique dansla voie du développement durable. Ce ne sont cependantpas les seules, loin de là. Des mesurestendant à améliorer l’accès au logement et le redéveloppementdes transports publics doivent êtremises en place. Elles sont menées de concert parles mouvements sociaux et environnementaux,mais la réponse des hautes sphères de la décisionpolitique se fait attendre. Ces mesures contribuentégalement au bien-être collectif de l’humanitépuisqu’elles réduisent les émissions polluantes,en particulier les gaz à effet de serre, et elle permettraientde lutter contre les inégalités en réduisantles coûts pour les usagers à faible revenu et endéveloppant une offre de qualité pour les transportsalternatifs à l’automobile.Ce ne sont pas les propositions qui manquentsur les bureaux des décideurs politiques, et laBelgique est un pays de collaborations multiplesentre les mouvements nord-sud, les ONG environnementales,les mouvements des agriculteurset les syndicats pour développer des alternativesau modèle actuel. Or, force est de constater quela résistance au changement est encore très fortedans bien des secteurs de la société. C’est pourquoiil ne suffit pas d’interpeller les décideurs, ilfaut aussi lancer des campagnes adressées aupublic en général. Celles-ci doivent permettre delui faire prendre conscience de l’impact social etenvironnemental et de lui montrer qu’un modèlealternatif est possible. Ce modèle doit encore êtredéfini, mais il est évident qu’il devra respecter davantageles droits de la population, ainsi que ceuxdes peuples les moins favorisés. Voilà pourquoien 2011 une campagne réunissant les ONG et lessyndicats sera lancée dans le but de renforcercette prise de conscience à tous les niveaux de lapopulation, sous la bannière : « justice climatiquepour tous ! ». n9 Fédération des Entreprises de Belgique, Politique climatiqueinternationale et européenne : état de la question et défisactuels. Bruxelles, 21 octobre 2010, .10 Climate Action Network Europe, 30%. Why Europe ShouldStrengthen its 2020 climate action. Bruxelles, février 2011.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>75Belgique


BÉNINSans dialogue ni planification il n’y a pas de développement durableLe Gouvernement n’a pas été en mesure de mettre en place un modèle de développement basé sur la planificationà long terme. L’économie décroît et les inégalités augmentent à un rythme alarmant, mais le Gouvernementgaspille le budget en publicité ou continue à multiplier les fonctionnaires. Les catastrophes naturelles quiaffectent l’agriculture, et la santé et l’éducation de la population, mettent en exergue le manque de prévision. Lesprogrès obtenus jusqu’à présent, tels qu’un meilleur accès à l’eau potable et un système d’assurance maladie,sont insuffisants. La mise en place d’un modèle de développement durable se fait de plus en plus pressante.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> BéninDieudonné HouinsouHugette DossaHyppolyte FalladeLe Gouvernement n’est pas parvenu à mettre enplace un modèle de développement durable. Négligeantle dialogue entre les différents secteurs dela société et faisant preuve d’un manque notabled’engagement pour promouvoir la transparence etéradiquer la corruption, ses stratégies pour faire faceaux problèmes économiques et environnementauxrévèlent une absence de planification à long terme etsont, non seulement incomplètes du point de vue dudéveloppement durable (puisqu’elles ne tiennent pascompte des problèmes environnementaux ou sociaux),mais aussi tout simplement vouées à l’échec.Par exemple, le taux de croissance de l’économiedu Bénin est passé de 5 % en 2008 à 3 %en 2010 1 . Les effets de la crise financière mondialeont été ressentis surtout à cause de la baisse desexportations et de la recette fiscale, et on constate degrandes disparités entre les différents départementsdu pays, avec une différence particulièrement sensibleentre l’Alibori, le département le plus pauvre etle département du Littoral, le plus riche 2 .Fonction publiqueCes dernières années il y a eu une augmentation notabledu nombre de fonctionnaires 3 . Cette augmentationpeut s’expliquer, entre autres, par l’absenced’une politique salariale adéquate en dehors des emploispublics, mais aussi par l’extrême politisationdu Gouvernement qui ne stimule pas la création denouveaux emplois dans le secteur privé. Cela a égalementdes implications sur les dépenses publiquescroissantes, avec un État qui n’hésite pas à utiliserses fonds à des fins de propagande ou à multiplierles postes dans les divers ministères.Prévoir les catastrophes naturellesLe Gouvernement a également fait preuve d’unmanque de planification et de prévision à l’égard1 Index Mundi, “Benin Economy Profile 2011”, .2 Swiss Agency for Development and Cooperation (SDC),Bénin, .3 BBC News, “Public Sector Growth Accelerating”.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 76 100 Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleIEG = 4110056100 10078Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé88Survivance jusqu’àl’âge de 5 ansde l’environnement et des catastrophes naturelles.Entre juillet et octobre 2008, de fortes pluies ontcausé des crues et des inondations en Afrique occidentale; le Bénin a été l’un des pays les plus touchés,avec au moins 150 000 personnes déplacées et unrisque important de choléra, de méningite et de fièvrejaune 4 . En outre, les inondations ont causé la perte derécoltes entraînant, de ce fait, une menace d’insécuritéalimentaire.En septembre 2010, cette situation s’est répétéeavec la crue anormale des rivières Queme etNiger. Parmi les dégâts causés par ces inondationson compte des centaines de maisons et d’écolesendommagées, des milliers de personnes sans abri,la destruction de nombreuses hectares de cultures,la mort du bétail et la propagation de maladies. Lesvictimes ont été logées dans des écoles et il a falluattendre fin novembre pour que l’eau se retire et queles gens puissent rentrer chez eux.Ces catastrophes ont eu un profond impact surl’éducation. Les routes d’accès aux écoles ont disparuou ont été inondées. Selon le rapport du Bureaudes Nations Unies pour la Coordination des AffairesHumanitaires (UNOCHA Bénin) publié en novembre2010, les inondations ont affecté plus de 425 écolesà travers tout le pays et plus de 91 000 élèves ontété touchés dans la mesure où leurs écoles ont étédétruites ou le matériel pédagogique a été emportépar la crue 5 .4 World Health Organization, Floods in West Africa raise majorhealth risks, (19 août 2008), .5 UNOCHA Benin, “Benin Floods Situation Report,” 8, no.4(novembre 2010), .Indice d'Equité de Genre (IEG)140 0ÉducationL'autonomisation4366100 100Activité économiqueLa réponse du Gouvernement a été insuffisante.Il a offert aux victimes une aide de 20 millionsde francs CFA (42 944 USD) consistant en moustiquairesimprégnées d’insecticide, médicamentset vêtements. Ultérieurement il a été nécessaire derecourir à l’aide internationale pour aider les victimes,alors qu’il est devenu évident que l’initiativedu Gouvernement avait négligé d’autres besoinsfondamentaux des personnes touchées, à tel pointque beaucoup d’entre elles ont été forcées de vendreles marchandises provenant du plan d’aide pourpouvoir subsister. Par ailleurs, la tâche de distributiondes dons provenant du secteur privé et de l’aidegouvernementale aux victimes a été assignée auxautorités, sans tenir compte des organisations dela société civile, telles que <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>. De plus,quelques observateurs ont dénoncé des manœuvresde détournement de fonds et des irrégularités dans lagestion des aides et des dons.Le changement climatiqueIl existe un large consensus au sein de la communautéscientifique affirmant que le changementclimatique augmente le risque de ce type de catastrophes.L’importance de l’activité humaine (parexemple, l’émission de gaz à effet de serre à l’échelleindustrielle) est aussi fermement établie comme unfacteur aggravant du réchauffement climatique. LeBénin est l’un des pays qui libèrent le moins de gaz àeffet de serre dans l’atmosphère, avec des émissionsqui variaient entre 0,3 et 0,6 tonnes par personne en2005, soit un total de moins de 2,6 millions de tonnespour toute l’année. Les pays les plus pollueurs – lesÉtats-Unis, la Chine, la Russie, le Brésil - ont atteintdes niveaux allant jusqu’à 69 tonnes par personneavec des chiffres globaux allant jusqu’à 7,2 milliardsRapports nationaux 76 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


de tonnes 6 . Il est donc clair que les pays ayant leséconomies le plus pauvres sont ceux qui paient leprix de l’activité polluante des pays les plus développés.D’autre part, à mesure que le changement climatiques’aggravera les inondations deviendrontun problème chronique et il faudra consacrer plusd’efforts à la planification à long terme. Un des principauxdéfauts du Gouvernement est précisément l’absencede vision à long terme. Pour cette raison, onpeut facilement prédire que le Bénin devra surtout releverle défi inhérent aux changements climatiques. Ilfaut non seulement trouver un moyen de prévoir lesfutures crues des fleuves afin de minimiser le pluspossible les dégâts, mais il faudra aussi chercherde nouvelles stratégies pour améliorer la productionagricole tout en réduisant l’impact environnementalet social.L’allocation des ressources pour les travaux dereconstruction après les inondations compliquera etretardera inévitablement les programmes de développement.Des fonds qui auraient pu être investisdans la recherche, le développement et la mise enœuvre de modèles de production plus efficace devrontêtre utilisés pour la reconstruction du pays.Agriculture circulaireLa contribution de l’agriculture à l’économie du Béninau cours des dix dernières années s’est traduitepar une moyenne de 35 % du PIB, ce qui la placejuste au-dessous du secteur des services. 45 %du total des travailleurs 7 appartiennent au secteuragricole. Parmi les problèmes liés à l’agriculture setrouvent la faible productivité et les niveaux élevésde pauvreté chez les travailleurs agricoles. En outre,une grande partie des terres disponibles n’est pasexploitée.Le Gouvernement a lancé au cours des dix dernièresannées trois plans de développement qui affecterontce secteur. Entre 2003 et 2005, la Stratégiede réduction de la pauvreté, et entre 2007 et 2009 leprogramme de la Stratégie de croissance, destiné àréduire la pauvreté ; tous deux abordent le problèmede l’agriculture selon une perspective générale. Cettesituation a changé avec le plan stratégique de réactivationde l’agriculture (PSRSA) de 2008, qui visaità atteindre la sécurité alimentaire d’ici 2015 tout enveillant à ce que l’agriculture contribue au développementéconomique et social du paysUn des inconvénients du PSRSA est que lemodèle de croissance de l’agriculture appliquéimplique un abus significatif du sol, de sorte quele risque de dégradation du sol peut, à long terme,compromettre les attentes concernant les niveauxde production. L’utilisation intensive d’engrais(nécessaires pour assurer le respect des quotasde production gérés par le programme) peutégalement causer des dommages importants àl’environnement (par exemple, l’érosion des sols,qui, entre autres, limite la capacité d’absorptiond’eau par le sol, augmentant ainsi le risque d’importantesinondations). Cela montre que les stratégiesmises en place par le Gouvernement sontvouées à l’échec à long terme et ne peuvent pasêtre considérées comme un modèle de développementdurable 8 .Il a été suggéré que le système de « l’agriculturecirculaire » développé en Chine à la fin des années1990 pourrait s’adapter au Bénin. Ce système estbasé sur un système dénommé Economie circulaire,et bien qu’à ce jour il n’en existe aucune définitionofficielle, ce modèle pourrait être caractérisé parl’utilisation efficace des ressources et des déchets enmettant l’accent sur le recyclage, créant de ce fait unflux circulaire de matériaux (un exemple pourrait êtrel’utilisation de la chaleur générée par certains processuspour en activer d’autres qui fonctionnent àune température inférieure). L’objectif de ce systèmeest de créer une économie plus efficace tout en étantmoins polluante. En ce qui concerne l’agriculture,l’utilisation efficace des ressources de la biomasse,dont les sources d’énergie, est la pierre angulaire dumodèle proposé.La mise en place de l’agriculture circulaireau Bénin requiert une étude approfondie des ressourcesnaturelles disponibles et une reformulationdes lois et des règlements en vigueur concernantla protection de l’environnement et l’utilisation desressources. D’autre part, le coût de l’acquisition destechnologies nécessaires peut entraver l’adoption dece modèle de production.Néanmoins, à travers des plans successifs, leGouvernement a agi dans le sens de la reconnaissancede l’importance de l’agriculture et de la créationd’un modèle de production plus efficace dans cesecteur. Jusqu’à présent, les plans mis en place sontinsuffisants et sans prévision à long terme, mais lespremiers pas ont été faits.Des progrès insuffisantsBien que les modèles de développement appliquéssoient loin d’être satisfaisants, en grande partie parcequ’ils ne tiennent pas compte du dialogue entre leGouvernement, la société civile et d’autres secteurssociaux, des progrès ont eu lieu concernant la couverturedes besoins essentiels.En ce qui concerne l’accès à l’eau potable de lapopulation rurale, par exemple, des efforts importantsont été faits et ont permis de passer d’un taux d’accèsde 36 % en 2003 à un taux de 55,1 % en 2009.Quoi qu’il en soit, il est inévitable de considérerque, de toutes les ressources mises à dispositionpar le secteur privé, le Gouvernement en a fait usagepour seulement 30 ou 40 % ; il est donc concevablequ’une planification plus efficace aurait pu conduireà une croissance plus importante.En ce qui concerne la santé, la mortalité maternoinfantilea considérablement diminué durant cettepériode. La mortalité maternelle est passé de 474,4décès pour 100.000 naissances vivantes en 2002 à397 par 100.000 naissances vivantes en 2007, tandisque la mortalité infantile est passée de 86 décès pour1000 naissances vivantes en 2003 à 63 décès pour1000 naissances vivantes en 2010 9 . De même, la prévalencedu VIH / SIDA, estimée à 1,8 %, est parmi lesplus basses de tous les pays d’Afrique de l’Ouest ; parexemple, par rapport aux chiffres enregistrés en Côted’Ivoire (7,1 %), au Nigeria (3,9 % ) et au Togo (3,2%) 10 . En dépit de ces réussites remarquables, la plupartdes indicateurs du secteur sont en retard par rapportaux Objectifs du Millénaire pour le Développement.ConclusionLe développement durable implique une planificationà long terme et doit tenir compte des relationsentre les divers secteurs de la société. Cependant,jusqu’à présent la politique du Gouvernement a éténon seulement limitée dans sa portée, mais aussiresponsable de l’appauvrissement de la populationet du ralentissement de la croissance économique.Il y a peu de dialogue entre le Gouvernement, lesorganisations de la société civile et les autres secteurs.Des organisations telles que <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>, quitravaillent activement pour dénoncer les erreurs duGouvernement, ont réussi à promouvoir certainesmesures positives, mais leur travail est souvent bloquéet elles sont souvent victimes d’intimidations dela part des pouvoirs de l’État. n6 Informations disponibles à Climate Analysis Indicators Tool(CAIT), .7 Journal of Sustainable Development, Sustainable Agriculturein Benin: Strategies for Applying the Chinese CircularAgriculture Model, .8 Ibid.9 Index Mundi, Benin Mortality Rate, (2011), .10 Instituto del Tercer Mundo (ITeM), Guía del mundo 2010,(Montevideo: éditions G3, 2009).<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>77Bénin


BIRMANIE / myanmarLe développement militarisé n’est jamais durableDes décennies de Gouvernement militaire ont favorisé un milieu politique répressif où les principesdémocratiques ne sont pas observés, les ressources publiques sont exploitées au bénéfice de l’élite militaireetoù les droits humains et les lois sont peu respectés. Sans les droits de base, les personnes sans voix du payssubissent les conséquences de la mauvaise administration économique qui dégrade l’environnement et quiretarde le développement durable. La Birmanie a besoin de façon urgente d’institutions démocratiques solidesqui favorisent le développement durable, la participation citoyenne et la responsabilisation.Burma Lawyers’ CouncilLeslie ChoiEn dépit de l’abondance de ressources naturellesdans le pays, la plupart des Birmans doivent faireface à des conditions de vie difficiles en raison de lamauvaise administration économique du Gouvernement.Plus de 32 % de la population vit en dessousdu seuil de pauvreté 1 . La Birmanie se trouve à la132 ème place parmi 169 pays en ce qui concerne l’indicede développement humain du PNUD 2010 2 . Lemanque de participation publique dans l’élaborationdes politiques économiques se reflète dans le faitque le Gouvernement n’accorde que 0,5 % du PIBpour la santé et 0,9 % pour l’éducation 3 .Alors que leGouvernement investit plus de 60 % de ses dépensesdans les entreprises d’État 4 .Le manque d’institutions démocratiques empêchele public de participer de façon efficace dansla prise de décisions au sujet des politiques économiques,sociales et environnementales. L’abusde pouvoir est endémique. Les projets de développementsont utilisés pour remplir les poches desfonctionnaires militaires au détriment des citoyens.Le régime militaire, connu comme le « Conseild’État pour la paix et le développement » (SPDC selonson sigle en anglais), a organisé une électionnationale en novembre 2010 – la première après 20ans – qui s’est caractérisée par de mauvaises loisélectorales et par la répression. Le SPDC continuede diriger le Gouvernement en Birmanie et les fonctionnairesfont régulièrement abus de pouvoir poursubvenir à leur propre intérêt. Les fonctionnairesne manifestent pas avoir peur des répercussionspuisqu’il n’existe pas de moyens pour les responsabiliserde leurs actes et que ces répercussions sonttrès peu probables.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 75 100 Enfants atteignantla cinquième année10070d’école37Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialiséLa Constitution de 2008 et les électionsde 2010La Constitution de 2008 a retranché le Gouvernementmilitaire grâce à la réserve d’un quart dessièges parlementaires nationaux et d’un tiers dessièges régionaux pour les représentants militairesdésignés par le commandant en chef 5 . L’armée anommé tous les membres de la Commission électoralede l’Union (UEC selon son sigle en anglais),l’organisme responsable de garantir des électionslibres et justes 6 . Les lois électorales ont interdit auxprisonniers politiques de s’affilier aux partis politiqueset ont établi des restrictions aux activités decampagne des partis politiques. En réponse aux loisrestrictives, la ligue nationale pour la démocratie(NLD selon son sigle en anglais) et d’autres groupesclé de l’opposition ont boycotté les élections, délégitimantplus tard les résultats 7 .Les élections ont aussi été marquées par l’intimidationdes électeurs, la fraude électorale et lacorruption 8 . Une des plaintes les plus fréquentesconcerne la manipulation des résultats d’électionpar le recueillement des suffrages avant les électionset par la fraude électorale 9 . Dans certaines régions,la population a été menacée de la confiscation deIndice d'Equité de Genre (IEG)0 0 n/d100 100L'autonomisation100 65 10093 97Survivance jusqu’àÉducationActivité économiquel’âge de 5 ansterres et de l’interruption des services publics s’ilsne votaient pas pour le parti que le régime soutient, leparti de l’Union solidaire et du développement (USDPselon son sigle en anglais) 10 .Le régime militaire a renforcé davantage sa positionpar le biais de lois qui entravent l’indépendancejudiciaire 11 . Le président a le pouvoir de nommer etde destituer les juges de la Cour suprême de justiceà son gré 12 . La Cour suprême n’a pas de juridictionsur les affaires militaires et constitutionnelles. Enplus, la constitution assure l’impunité aux membresdu régime militaire au pouvoir, empêchant ainsi quele pouvoir judiciaire fasse accomplir la loi dans lescas où les militaires puissent être impliqués 13 . Lacorruption généralisée endommage encore plus lalégitimité du pouvoir judiciaire ainsi que sa capacitéde protéger les droits des personnes et de responsabiliserles fonctionnaires du Gouvernement 14 .Dans la plupart des pays, les organisations dela société civile jouent un rôle fondamental dans lapromotion des principes démocratiques et aidentà assurer la transparence, la responsabilisation, ladéfense des droits humains et la participation publique.En Birmanie ces organisations sont étoufféespar des restrictions répressives ou par l’interdiction1 Economy <strong>Watch</strong>, Myanmar (Burma) Poverty Line, Gini Index,Household Income and Consumption, (Birmanie: 2011),.2 PNUD, The Real Wealth of Nations: Pathways in HumanDevelopment, (New York : 2010).3 Conseil des droits de l’homme de l’ONU, Progress report ofthe Special Rapporteur on the situation of human rights inMyanmar.4 Index mundi, Burma Economy Profile, (2010).5 Constitution of the Republic of the Union of Myanmar,(septembre 2008), art. 74, 109 et 141.6 Asemblée générale des Nations Unies. Situation des droitshumains au Myanmar, (15 septembrre 2010).7 M. Maung, “Ethnic leaders join NLD vote-boycott roadshow”,Mizzima News, (13 octobre 2010).8 J. Davies y H. Siddique, “Burma election observers reportvoter intimidation”, The Guardian, (8 novembre 2010).9 Burma Fund UN Office, Burma’s 2010 Elections: Acomprehensive report, (janvier 2011).10 Ibid.11 A.U. Htoo, “Analysis of the SPDC’s Constitution from thePerspective of Human Rights,” en Legal Issues on BurmaJournal, No. 30 (2008).12 Constitución de la República de la Unión de Myanmar,(septembre 2008), art. 299, 302, 308, 311, 327 et 334.13 Ibid, art. 44514 US Department of State, 2008 Country Report on Burma(Washington, D.C. : 25 février 2009).Rapports nationaux 78 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


des activités de la société civile 15 . Dans l’absenced’une société civile vigoureuse la junte militaire n’apas d’obstacles, pas de contrôle et pas de responsabilités.La triste facette du développement militariséLe SPDC a vendu aux pays voisins les droits d’exploitationdes ressources nationales, ce qui a rapportédes milliards de dollars ; le peuple birman n’en acependant pas vu les bénéfices économiques 16 . Parcontre, dans la recherche de leurs propres intérêtset en militarisant les projets de développement, leGouvernement a exploité la population locale et l’aexposée aux violations des droits humains.Les habitants sont systématiquement soumisà des travaux obligatoires non rémunérés par l’arméebirmane 17 . Par exemple lors de la constructiondu gazoduc de Yadana, en Birmanie orientale, uneassociation entre la société française Total et l’américaineUnocal (aujourd’hui propriété de Chevron), dessoldats du Gouvernement et des représentants degroupes militaires ont assuré la sécurité en obligeantles civils à couper des arbres, à servir comme gardeset à construire l’infrastructure militaire 18 .Ceux qui ontrefusé ont été battus, violés, torturés et assassinés 19 .La confiscation de terres à grande échelle estune autre forme fréquente d’abus du Gouvernement.Les habitants ne reçoivent qu’une rémunérationnominale, voire même aucune compensation pourles terres de culture confisquées. En 2010, presque10 000 m2 de terres au sud de la Birmanie ont étéconfisquées et distribuées à des entreprises forestières20 .Un grand nombre de birmans tirent principalementleurs moyens de subsistance de l’agriculture.Le travail obligatoire leur laisse moins de tempspour cultiver leur terre, alors que la confiscation lesprive complètement de leur source de nourriture etde revenus 21 . En plus, la militarisation des régionsoù se trouvent les projets de développement s’ac-15 Human Rights <strong>Watch</strong>, I Want to Help My Own People, (28avril 2010).16 EarthRights International, Energy Insecurity, (juillet 2010).17 Ibid, The Human Cost of Energy: Chevron’s Continuing Rolein Financing Oppression and Profiting From Human RightsAbuses in Military-Rule Burma, (Myanmar: avril 2008);Conseil des droits de l’homme de l’ONU, Rapport de situationdu Rapporteur spécial sur la situation des droits humainse àMyanmar, (10 mars 2010).18 R. Sisodia y A. Buncombe, “Burmese villagers forced towork on Total pipeline”, The Independent, (14 août 2009).19 EarthRights International, The Human Cost of Energy, op cit.20 S.Y. Naing, “Land Confiscation Reported in Dawei Project”,The Irawaddy, (15 décembre 2010).21 EarthRights International. Broken Ethics: The NorwegianGovernment’s Investments in Oil and Gas CompaniesOperating in Burma, (Myanmar : décembre 2010).compagne, habituellement, d’une augmentation nonofficielle des impôts pour les habitants, imposée parles soldats 22 . Ces pratiques corrompues augmententnon seulement l’insécurité alimentaire mais fermentaussi les portes à l’éducation.Impact environnementalLa grave détérioration de l’environnement qui la plupartdu temps est le résultat de ces projets aggravedavantage son impact économique et social négatif.L’exploitation forestière non durable, l’élevage decrevettes et les projets hydroélectriques ainsi que lesindustries d’extraction ont gravement endommagél’environnement. Par exemple, la pollution de l’airet de l’eau produite par une association entre desentreprises chinoises et birmanes pour l’extractionde charbon, dans l’État de shan a pollué les sourcesd’eau et a provoqué presque 2 000 cas de maladiesde la peau 23 . Cette association est le plus grand projetd’activité minière en coopération entre la Chine et laBirmanie dans la Division Sagaing. L’entreprise peutlibérer des produits toxiques pendant le processusde raffinage 24 .Les risques environnementaux associés auxprojets de développement ne sont pas présentés auxcommunautés touchées 25 et vu l’absence du respectde la loi, les victimes en rapport aux actions duGouvernement n’ont aucun recours légal viable. Laréglementation 1/99, qui interdit le travail obligatoirenon rémunéré, est à peine mise en place 26 . Lorsqueles personnes qui ont été soumises à des travauxobligatoires ou à qui on a confisqué leurs terres ontprésenté des recours en justice, le SPDC a pris desmesures de représailles contre elles et contre leursavocats en présentant des accusations criminelleset en les condamnant à des travaux obligatoires nonrémunérés 27 .Les lois environnementales du pays ne sontpas appliquées. Bien que la loi forestière insiste sur22 All Arakan Students’ & Youths’ Congress, Overview of LandConfiscation in Arakan State, (juin 2010) ; Karen Human RightsGroup, Pa’an District: Land confiscation, forced labour andextortion undermining villagers’ livelihoods, (11 février 2006).23 Pa-O Youth Organization, Poison Clouds: Lessons fromBurma’s largest coal project at Tigyit, (2011).24 J. Allchin, “China seals biggest Burma mining deal”,Democratic Voice of Burma, (30 juillet 2010).25 EarthRights International, China in Burma: The IncreasingInvestment of Chinese Multinational Corporations in Burma’sHydropower, Oil, and Natural Gas, and Mining Sectors,(septembre 2007).26 The Government of the Union of Myanmar, “Ordersupplementing Order No. 1/99,” in The Ministry of HomeAffairs , (27 octobre 2000).27 International Trade Union Confederation, 2010 AnnualSurvey of violations of trade union rights – Burma, (9 juin2010); M. Maung, “Lawyer arrested for defending labouractivist freed”, Mizzima News, (6 mars 2010); N.K, Kaew,“Army seizes 30,000 acres of farmland”, Democratic Voice ofBurma, (22 février 2011).l’importance de la conservation et de la protectiondes forêts birmanes 28 , entre 1990 et 2005 le pays aperdu presque 20 % de ses forêts 29 et pendant lesdernières années le taux de déforestation a continuéd’augmenter. Dans le même sens, bien que la loi desmines de Myanmar de 1994 exige l’autorisation desutilisateurs des terres avant de concéder un permisd’exploitation, dans la pratique la population n’estpas consultée et leurs terres sont généralementconfisquées 30 .En plus, il n’existe pas de loi qui exige aux entreprisesqui veulent investir dans des projets dedéveloppement en Birmanie de consulter les communautéstouchées. Même lorsque les entreprisesont eu l’initiative de le faire, les évaluations d’impactenvironnemental qui ont été envoyées étaient erronées,conduisant inévitablement à des conclusionsinexactes 31 .ConclusionsL’existence de solides institutions démocratiques quipromeuvent la bonne gouvernance est une réquisitionpréalable pour le développement durable. Cecicomprend le respect de l’ordre de la loi et des droitshumains, la participation publique effective, l’accèsà la connaissance et la responsabilisation dans lagestion des ressources publiques.Les principes démocratiques doivent être renforcésen Birmanie par le biais d’élections libres etjustes, d’un pouvoir judiciaire indépendant qui veilleau respect de la loi et d’une révision constitutionnellequi atteigne toutes les parties intéressées. La participationpublique doit aussi être intégrée dans toutesles phases de développement, de façon à ce que lesgens puissent façonner les politiques économiques,prendre pleinement conscience de l’impact social etenvironnemental de toutes les initiatives de développementet également responsabiliser les acteurs duGouvernement et les entreprises face à n’importequelle violation des droits. n28 The State Law and Order Restoration Council, The ForestLaw (The State Law and Order Restoration Council Law No8/92, (3 novembre 1992).29 The National Coalition Government of the Union of Burma(NCGUB), in Human Rights Documentation Unit, (novembre2009).30 Pa-O Youth Organization, Poison Clouds, op cit; The StateLaw and Order Restoration Council, The Myanmar MinesLaw No 8/94, (6 septembre 1994).31 EarthRights International, Getting it Wrong: FlawedCorporate <strong>Social</strong> Responsibility and MisrepresentationsSurrounding Total and Chevron’s Yadana Gas Pipeline inMilitary-Ruled Burma, (Myanmar, septembre 2009).<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>79Birmanie / Myanmar


olivieDes progrès et des reculs dans la défense de la PachamamaMalgré l’engagement exprimé par le Gouvernement actuel en faveur d’une politique cohérente sur le changementclimatique, le modèle mis en œuvre en Bolivie est axé sur le secteur de l’extraction. L’économie et les stratégiespour lutter contre la pauvreté sont basées sur la production du pétrole et du gaz, ainsi que sur la productionminière. Le soutien du Gouvernement au système de crédits de carbone et l’initiative REDD ont généré desérieux doutes en ce qui concerne la direction prise par l’administration Morales.Centro de Estudios para el Desarrollo Laboral y Agrario(CEDLA)Wálter ArteagaLa Bolivie accueille une très grande diversité decultures avec ses 36 peuples autochtones. La fauneet la flore sont également d’une grande richesse.L’étendue des forêts tropicales du pays occupe lasixième place et la couverture boisée la quinzièmeplace à l’échelle mondiale 1 . Environ 80 % des terresboisées se trouve dans la région des plaines ou« basses terres » comprenant les 3 sous-régionsAmazonienne, du Río de la Plata et du Gran Chaco,et coïncide avec les zones réservées aux populationsautochtones.Les politiques publiques du président Evo Moralesreconnaissent que les forêts sont des écosystèmesstratégiques ; de même, la Bolivie est devenue,depuis la dernière décennie et sous le leadershipd’Evo Morales, un des premiers pays à demanderen toute urgence le développement intégral en harmonieavec la nature. Cela signifie, en effet, que laPachamama, déesse mère des peuples autochtonesandins, qui est une combinaison de la terre et de lanature, possède effectivement des droits.Un pari douteuxSi le Gouvernement d’Evo Morales a exprimé sonengagement en faveur d’une politique sur le changementclimatique en accord avec sa ligne environnementaliste,le biais extractif du modèle mis enœuvre met en doute sa « véritable » adhésion auxprincipes du développement durable. Autrementdit, le pari gouvernemental est très incertain, étantdonné la forte divergence entre le discours en faveurde la Mère Nature et la philosophie de « garantir lebien-être » et de promouvoir la croissance de laligne extractive. La production pétrolière et l’activitéminière sont devenues la base de l’économie nationaleet des finances publiques 2 , et l’élément crucial1 FAO, Global Forest Resources Assessment. Progress towardsSustainable Forest Management, (Italie : Forestry Paper Nº147, 2005).2 Les données officielles révèlent que plus d’un tiers desrevenus des gouvernements départementaux sont issus desbénéfices des hydrocarbures (35,6 % en 2005, 43,3 % en2006 et 43,2 % en 2007), d’après CEDLA, Les Préfecturesn’utilisent pas les bénéfices des hydrocarbures pour ledéveloppement, (La Paz : 2010).Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 86 100 Enfants atteignantIEG = 6610084la cinquième annéed’écoleAccouchements assurés par dupersonnel médical spécialisépermettant de réduire l’extrême pauvreté qui touche60 % de la population 3 .De fait, les données officielles traitées par leCentre d’études pour le développement du travail etde l’agriculture (CEDLA selon son sigle espagnol)permettent d’établir qu’au cours des cinq dernièresannées l’économie est devenue de plus en plus dépendantedes exportations des matières premières.Les ventes à l’étranger des produits primaires dessecteurs du pétrole, du gaz et de l’activité minièrereprésentent près de 69 % des revenus de l’exportation,contrairement aux cinq années précédentesoù la distribution était plus équilibrée et ces secteursdétenaient seulement 47 % de part du marché 4 .L’analyse du CELDA soutient également que,lors de la dernière décennie, la croissance du produitnational est allée de pair avec la reprise rénovéedes industries de l’extraction d’hydrocarbures et deminerais. De 2001 à 2005, la croissance du PIB estliée notamment à l’augmentation de la productiond’hydrocarbures, et en particulier du gaz naturel. Enrevanche, lors des quatre années suivantes (2006-2009), c’est l’activité minière qui prend la tête en atteignantun taux moyen annuel pendant cette périodede plus de 20 % 5 .Les plans officiels prévoyant d’installer desméga-barrages hydroélectriques dans l’Amazoniebolivienne pour exporter de l’électricité au Brésil,3 Fundación Tierra, Cifras macroeconómicas no resuelvenpobreza en Bolivia, El Diario, (6 juin 2011), .4 CEDLA, Análisis del gasolinazo y de la política energéticaboliviana, (La Paz : 2011, inédit).5 Ibid.Indice d'Equité de Genre (IEG)0 0100 71100L'autonomisation64100 10095 92Survivance jusqu’àÉducationActivité économiquel’âge de 5 ans43avec la souscription aux projets routiers transocéaniquesde l’Initiative pour l’intégration de l’infrastructurerégionale sud-américaine (IIRSA) et la pressionpour monétiser la richesse forestière par le biais del’exploitation du bois sont bien d’autres facteurs quimettent en péril l’équilibre environnemental et écologiqueet les « droits acquis » par Mère Nature.L’expansion des activités extractives, avec ledommage environnemental inévitable et l’impactsocio-économique négatif sur les territoires et lescommunautés indigènes et paysannes montre quele discours du Gouvernement sur l’écologie et la protectiondes populations indigènes n’est que purerhétorique ou que, tout simplement, les politiquesde développement économique sont tout à fait inapplicables.Le marché du carboneL’un des défis de l’administration Morales est d’envisagerla manière de développer une structure institutionnelledans le cadre de la nouvelle ConstitutionPolitique de l’État qui respecte les droits des communautésautochtones autonomes dans l’État plurinational.Cela permettra à la Bolivie d’être éligible pourles mécanismes d’aide économique ayant été mis enplace pour les pays garantissant la préservation et ladurabilité de leurs forêts. Ceci est particulièrementimportant si l’on considère le rôle majeur des forêtspour diminuer les indices de dioxyde de carbonedans l’atmosphère, dénommé « la séquestration ducarbone » 6 .6 Kanninen, Markku, Secuestro de carbono en los bosques, supapel en el ciclo global, Depósito de documentos de la FAO,.Rapports nationaux 80 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


Le protocole de Kyoto a établi le mécanismede dépollution connu sous le nom de « crédits carbone», comme mesure pour réduire ou éviter lesémissions de gaz à effet de serre, responsables duréchauffement global. Chaque crédit équivaut à unetonne de CO2 n’étant plus émise ou étant absorbéepar la végétation grâce au développement du boisementou reboisement ; ces crédits reçoivent unevaleur monétaire et peuvent par conséquent êtrevendus 7 .Avec cette politique, la clé de la conception etde la portée des initiatives écologiques est de définirquels seront les mécanismes de distribution descompensations économiques issues de la séquestrationde carbone. Ce système peut avantager lespeuples autochtones et leur environnement ou, aucontraire, favoriser le marché capitaliste. La questioncruciale est de savoir qui paie les subventions, quipossède les droits des « crédits carbone » et quelsen seront les bénéficiaires directs.D’après la vision gouvernementale, ces compensationséconomiques devraient bénéficier lespeuples autochtones et les communautés paysannesdans le cadre d’un État plurinational. Il estévident que ce système de bonus ne libère pas lespays industrialisés de leur obligation de diminuerleurs émissions de carbone, bien que malheureusement,à l’heure actuelle, beaucoup d’entreprisespréfèrent acheter des crédits carbone plutôt que deréduire leurs émissions.Pour que cette proposition soit viable, le paysdevra adopter une nouvelle politique nationale desforêts lui permettant d’attaquer les causes du déboisementet de la dégradation, et envisager une stratégiespécifique pour ces mécanismes de compensation,connus sous le sigle REDD (réduction des émissionsde carbone résultant du déboisement et de la dégradationde forêts). Pour construire une politique publiquespécifique pour REDD, la Bolivie devrait aussi franchirdes barrières institutionnelles, légales et politiques, ycompris celles liées au développement de capacitésdes organisations nationales gouvernementales, desentités territoriales et de la société civile.Le Programme national des changements climatiquessera un composant essentiel du schémagouvernemental en termes de capacité et de finance-ment. Un programme renforcé permettra la mise enplace d’un système de contrôle des forêts et d’utilisationdes sols. Par ailleurs, la mise à jour des niveauxde référence des émissions de carbone permettrad’élaborer un plan d’action visant la réduction desémissions produites par le déboisement et la dégradationdes forêts.L’analyse de la vision gouvernementale montreque cette stratégie implique d’autres défis et d’autresproblèmes. Le Gouvernement devra :• Impliquer et intégrer les communautés et lespeuples autochtones dans ces initiatives.• Laisser participer d’autres acteurs.• Récupérer les connaissances et les expériencesdes initiatives REDD développées dans le pays.• Promouvoir l’assainissement des terres et lecadastre rural.• Définir les mécanismes de sorte que les bénéficeséconomiques du schéma soient gérés etadministrés comme des investissements publicset utilisés pour améliorer les conditionsde vie des communautés autochtones dans leszones où ces initiatives se concrétiseront.Somme toute, la conception de cette stratégie permettrad’établir si le Gouvernement bolivien est loinou près de mener à bien les postulats d’une cohabitationharmonieuse avec la nature et les possibilitésréelles d’une « garantie du bien-être » 8 .Perspectives et questionsL’examen détaillé des initiatives REDD révèle unesérie de coïncidences et de divergences par rapportà une perspective idéologique et à un modèlede développement qui s’inspire des pratiques et dessavoirs des populations autochtones en misant surla durabilité.Voici quelques exemples de coïncidences :• Les initiatives REDD encouragent la gestion durabledes forêts.• Grâce à ces initiatives les communautés indigènesauront l’opportunité de consolider leursdroits de possession sur leurs terres.Et des exemples de divergences :• Les initiatives REDD n’affecteront pas les causesdirectes de la dégradation forestière et de la déforestation.• Elles créeraient des conflits axés sur les droits depossession des crédits carbone.Les initiatives REDD ont aussi une dimensionspatiale puisqu’elles concernent les politiquespubliques qui régissent l’accès et l’utilisation desressources forestières. En fait, ces initiatives sontune manière d’analyser l’intention politique duGouvernement par rapport à l’exercice du droitsur les terres et les ressources naturelles despeuples et des communautés autochtones. Parconséquent, il est important de se demander dansquelle mesure les initiatives REDD contribuerontau développement des économies communautairesautochtones en ce qui concerne trois aspectsfondamentaux :• La récupération du domaine ancestral du territoirepar un gouvernement autonome.• La redistribution des ressources et des moyensde production dans les territoires autochtones.• L’administration et l’utilisation des ressourcesnaturelles.Plusieurs arguments ont été présentés à l’encontrede la mise en œuvre des REDD. Par exemple, celuid’affirmer que cette initiative est un mécanismedestiné à activer l’abattage illégal de forêts nativeset l’établissement de plantations de monocultures,y compris l’utilisation d’arbres transgéniques. Ainsi,les REDD ne favoriseraient pas seulement la privatisationde l’atmosphère 9 , mais elles soumettraientégalement les forêts du Sud à de nouveaux typesd’exploitation par des pollueurs ou par des spéculateursdu marché du carbone ou des services environnementaux10 .Cet argument repose sur la possibilité que tousles pays en voie de développement soient obligésd’appliquer ce mécanisme et, par conséquent, queles pays développés ne s’engagent pas suffisammentsérieusement pour lutter contre la réductiondes émissions de gaz à effet de serre. n7 Sanz, David, Créditos de carbono, Ecología verde, (10 juillet2010), .8 Le « Bien-être » est un paradigme de société durable. Voir9 Pour connaître le concept de « Privatisation del’atmosphère » voir : Barcena, Iñaki, Miñambres, Ignacio,Copenhague-2009, ¿fracaso de quién?, CONGD, .10 ALAI, REDD: Premio a la deforestación y usurpación masivade territorios, (2010), .<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>81Bolivie


BRÉSILL’Amazonie violéeLe Brésil est un mélange de grande prospérité et de terrible misère ; s’il était bien administré, son potentiel dedéveloppement serait presque illimité, (mais il souffre d’une iniquité sociale telle qu’elle semble insurmontable).Afin que le pays puisse parvenir à un développement durable, il lui faudra surmonter de nombreux obstacles,et l’obstacle majeur qui affecte non seulement le Brésil mais aussi le monde entier est la destruction de la forêtamazonienne, notamment son abattage indiscriminé. Les intérêts des propriétaires terriens et de bétail ainsique ceux des sociétés internationales ajoutés aux politiques environnementales insuffisantes et à la corruptioncroissante sont sur le point de détruire le « poumon du monde ».Institut d’études socioéconomiques (INESC)Alessandra CardosoAlexandre CiconelloPendant ces dernières années, le Brésil a établi etélargi un modèle de développement qui concentreles revenus et le pouvoir d’une élite politique et économique,liée aux grands capitaux agro-industriels etfinanciers. Ce modèle a plusieurs bases : l’exploitationagricole, notamment les monocultures telles que lesoja et la canne à sucre (production de sucre et d’éthanol)qui utilisent des semences transgéniques et quiabusent des produits agro-toxiques commercialiséspar des sociétés transnationales, ou les grands projetsd’infrastructure, énergie et activité minière de larégion amazonienne. Un autre aspect de ce modèlemacroéconomique est caractérisé par les taux d’intérêtélevés ; cela a représenté un sérieux problèmepour le Gouvernement qui, par exemple, entre 2000 et2007 a dû verser 430 000 millions de dollars au titred’amortissement et d’intérêts de la dette publique, soitune moyenne de 30 % du budget public par an.Ce modèle de développement est prédateur etnon durable vis-à-vis de l’environnement. Le Brésil estsur le point d’approuver des réformes significativesdans sa législation sur la protection de l’environnement(comme celles effectuées au Code forestier 1 ). Ces réformesvisent à protéger les intérêts privés des propriétairesruraux et des latifundistes, qui bénéficient d’unereprésentation excessive au sein du Parlement grâceaux distorsions du système politique qui les favorise.La pierre angulaire de la politique de développementactuelle du Gouvernement, cohérente avec lesstratégies des entreprises transnationales, est l’exploitationdu bassin amazonien par le biais de la générationd’énergie, des activités minières, des exploitations agricoleset du paiement de services environnementaux.Entre 2000 et 2010, les exportations des états d’Amazonielégale 2 ont augmenté de 518 % (de 5 milliards dedollars à 26 milliards) chiffre bien plus élevé que les 366% des exportations totales du pays 3 .1 Voir : .2 Secteur administratif qui comprend neuf états brésiliens dubassin de l’Amazone.3 Source : Ministère de l’Industrie et du commerce. Valeursnominales, exprimées en dollars américains.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 95100098Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialiséEnfants atteignantla cinquième annéed’école98Survivance jusqu’àl’âge de 5 ansEn 2010, l’état du Pará a généré 48 % (12,8milliards de dollars) des exportations de la région.L’analyse montre que les produits miniers occupentde loin la première place, suivis par les produitsagro-pastoraux, notamment la viande. Dans le casde l’état du Pará, les exportations à elles seules dessociétés Vale, Alunorte et Albrás (fer et aluminium)représentent 78 % de la valeur exportée (10 milliardsde dollars).Cette richesse apparente de l’Amazonie quiremplit les poches des actionnaires des sociétéstransnationales, entraîne l’inégalité et la non durabilité.La production d’aluminium, à elle seule,consomme presque 6 % de l’électricité produitedans tout le pays. Suivant le spécialiste Celio Bermann,« l’aluminium est vendu à un prix insignifiantsur le marché international et cette industrie crée peud’emplois. La main d’œuvre utilisée pour produirel’aluminium est 70 fois inférieure à celle utilisée parl’industrie des aliments et des boissons et 40 foisinférieure à celle de l’industrie textile ».La logique de l’intégration régionaleUn autre aspect de ce modèle extractif-exportateurrepose sur le fait que le Gouvernement autorise lessociétés brésiliennes et transnationales à augmenterleurs opérations dans le bassin amazonien. Cecia provoqué des transformations de plus en plusrapides dans le style de vie de la population et desconditions environnementales de la région, y comprisen Amazonie panaméricaine. Le Gouvernementfédéral, lors de différentes étapes, a augmenté l’investissementen logistique pour les ports et lesmoyens de transport terrestres et maritimes. Laplupart de ces ressources ont financé la constructionde grands barrages hydroélectriques comme89100 100Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 72Éducation100043L'autonomisation100 75 10098Activité économiquepar exemple Jirau, Santo Antônio et Belo Monte(au Brésil), et Inambari, Sumabeni, Paquitzapangoet Urubamba (au Pérou). Ces ressources ont égalementfinancé la construction de routes commele polémique tronçon Villa Tunari-San Ignacio deMoxos, en Bolivie, qui traverse le territoire autochtonedu Parc national Isiboro Sécure. Ces ouvragesont été réalisés par des sociétés brésiliennes et ontété financés au moyen de ressources publiques dela Banque nationale de développement économiqueet social.En même temps, le Gouvernement brésilien aélargi les incitations fiscales et aux crédit pour attirerle secteur privé dans la région, tout spécialementpour la génération, transmission et distributionde l’électricité. Ces mesures ont ouvert davantagel’Amazonie brésilienne aux capitaux publics et privés,nationaux ou associés à des capitaux internationaux,renforçant ainsi le modèle prédateur desressources naturelles.Changement climatique et question agraireLa déforestation de l’Amazonie et l’élevage de bétailsont les principaux responsables de l’émission deCO2 et de CH4 (67 % et 70 %) du total des émissions,respectivement, au Brésil 4 . Il existe une étroiterelation entre l’abattage et les incendies de forêt etla concentration des propriétés de terres dans larégion ; celles-ci sont clairement connectées avecla dynamique de l’expansion des exploitations agropastorales.Cette concentration des propriétés de4 Ecoportal.net. “Cultivando el desastre. Agricultura, ganaderíaintensiva y cambio climático”. .Rapports nationaux 82 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


terres augmente le risque que les politiques sur lechangement climatique tournent à l’avantage notammentdes grands propriétaires, car ce seront bieneux qui recevront toutes sortes de subventions, maisles communautés rurales et autochtones seront plusexclues que jamais.En dépit de cela, le Gouvernement n’a pris aucunemesure effective pour s’attaquer au cœur de ceproblème : établir une réforme agraire en Amazoniequi impose un nouveau modèle d’utilisation dela terre et de ses ressources, basé sur l’utilisationdurable des ressources naturelles et le respect desdifférents styles de vie des communautés traditionnelleset des populations autochtones qui, depuisdes siècles, cohabitent harmonieusement avec lanature.Une étude récente de <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 5 a calculél’Indice des compétences de base pour les différentsétats et communes de l’Amazonie, tel que cela avaitété fait à l’échelle nationale. Les résultats de l’étudeont confirmé le clivage énorme entre les régions lesplus riches et les plus pauvres du Brésil ; il faut signalerque les plus pauvres se trouvent dans le nord dupays. En bas de la liste de satisfaction des besoins debase de la population se trouvent les états de Pará,d’Acre et d’Amazonie. Si chacun des indicateurs étaitévalué séparément, la situation serait encore piredans le domaine de l’éducation avec l’état de Paráqui est de loin le plus désavantagé.FIGURE 1Causes de la déforestation de la forêt tropicale humide de l’Amazone.FIGURE 2Élevage, 65-70 %Agriculture de subsistance àpetite échelle, 20-25 %Agriculture commerciale àgrande échelle. 5-10%Abattage, légal et illégal, 2-3 %Incendies, activité minière,urbanisations, construction de routes,barrages, 1-2 %Source : Mongabay.comPourcentage des terres ayant souffert dernièrement de la déforestation pour êtreconverties à l’agriculture intensive.1980s 80%1990s 60%Source : Mongabay.comModifications du cadre juridiqueÀ plusieurs reprises on a essayé de flexibiliser lalégislation environnementale. L’attaque contre leCode forestier est le meilleur exemple du pouvoirdes intérêts liés aux exploitations agro-pastoralesau sein de cette campagne de flexibilisation et desa stratégie d’expansion de la frontière agricole del’Amazonie. Les propriétaires ruraux, par le biais duprojet de réforme présenté auprès de la Chambredes députés, visent à réduire de 80 % à 50 % la surfaceobligatoire que tous les propriétaires rurauxde l’Amazonie doivent maintenir comme réserveforestière.Le Gouvernement considère le complexe hydroélectriquedu fleuve Madeira comme un élémentfondamental pour équilibrer l’offre et la demanded’électricité à partir de 2010-2012, et le secteur degénération et de transmission d’énergie le considèrecomme « le fer de lance » de « l’avancée dela frontière électrique ». En fait, l’augmentation de5 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> / Observatório da cidadania “Índice decapacidades básicas – ICB Brasil”. 2009.6600 MW de puissance installée (3150 MW à SantoAntônio et 3450 à Jirau) va satisfaire une demandecréée artificiellement par le Gouvernement et le secteurélectrique lui-même. L’énergie du complexe Madeirasera destinée au centre économique du pays,la région sud-ouest, par le biais d’un système detransmission de 2375 km qui exige de gros investissements.Les investissements pour l’ensemble de projetsdu Complexe Madeira sont estimés à 21 milliards dedollars américains 6 . Jusqu’à présent, le financementapprouvé est de 9,3 milliards 7 , dont 8,6 milliardssont financés par la Banque nationale du développement(BNDES), entre opérations directes et indirectes,et 700 millions par la Banque de l’Amazonie(BASA), avec des ressources publiques du Fondsconstitutionnel du nord et du Fonds de développementde l’Amazonie.Des données de l’Observatoire des investissementsde l’Amazonie démontrent que, du point de6 Bank Information Center “Complejo hidroeléctrico del ríoMadeira” .7 Voir : .vue des risques inhérents au projet, à sa constructionet au processus d’autorisation environnementale,il existe une forte pression des secteurspublic et privé (avec la participation de banques,d’organismes publics, d’entreprises, de lobbyistes,d’administrateurs et d’intermédiaires) pour que nile calendrier de base des ouvrages, ni les travaux demise en service du projet ne soient affectés. Il existeun débat sur la faisabilité économique du complexeMadeira qui dépend du système hydroélectriqueet qui doit être opérationnel dès que possible. Enconséquence, le processus d’autorisation environnementalene considère pas à sa juste mesurel’impact environnemental et social des travaux dece mégaprojet.Entre temps, les travailleurs des deux chantierssont exploités (le ministère public du Travaila relevé plus de 2000 infractions) et, dans la régionle nombre d’homicides a augmenté de 44 %et l’exploitation sexuelle d’enfants (garçons, filleset adolescents) a augmenté de 18 % entre 2008 et2010. Le nombre de viols a également augmenté de208 % entre 2007 et 2010. Voici le modèle de développementfinancé par des ressources publiquesque le Brésil exporte dans d’autres pays d’Amériquedu sud, et dans des pays africains tels que l’Angolaou le Mozambique. Il s’agit d’un modèle favorisantles élites, mais qui détruit l’environnement et violeles droits humains. n<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>83Brésil


BULGARIEL’environnement est de retour sur l’agendaLes questions environnementales ont été très importantes dans la lutte du pays pour la démocratie.Aujourd’hui, après des années d’apathie croissante, de plus en plus de personnes sont impliquées dans lesquestions environnementales. L’introduction des organismes génétiquement modifiés (OGM) sur le marchéet les différentes défaillances dans la mise en place du programme NATURA 2000 pour la conservation desespaces naturels sont devenus deux des principaux défis que le pays doit relever. Pour mettre en marche undéveloppement durable le Gouvernement devra protéger l’environnement et satisfaire les besoins d’énergie etd’infrastructure du pays.Ecoforum for Sustainable DevelopmentBulgarian Gender Research FoundationVladimir GorbunovOn pourrait dire qu’en Bulgarie le processus de transitionvers la démocratie a démarré avec les motssuivants « au commencement, il y eut l’écologie ».L’environnement a été la question qui a le plus mobiliséles bulgares pendant les années 1980. Son rôlefondamental dans la lutte civile du pays a commencéavec ce qui semblait être un problème plutôt local : lapollution de l’air dans la ville frontalière de Roussé,causée par les émissions d’une usine de produitschimiques de la ville roumaine de Giurgiu.La « commission civile pour la protection environnementalede Roussé » a été la première grandeorganisation dissidente du pays depuis l’instaurationdu régime communiste. Pour la première fois enquarante ans, les citoyens ordinaires se sont unis àquelques intellectuels et même à des membres dela direction du Parti communiste de Bulgarie (PCB)dans une mobilisation indépendante.Cette campagne a donné à la transition bulgareune forte sensibilité écologiste ; le sujet principalde ce que l’on a nommé le « grand changement » aprécisément été l’air que nous respirons. Le mouvementécologiste est aussi devenu un catalyseur de laprolifération de partis et de mouvements verts.Malheureusement, après les changements démocratiquesde 1989, les « vieux » dissidents ontété mis en marge. Les gens s’inquiétaient davantagedu prix du pain que de la pureté de l’environnement.Ce changement de l’intérêt public s’est vu dans lesrésultats électoraux.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 98100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialiséEnfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansL’environnement de retour sur l’agendaC’est seulement maintenant, après des années d’absence,que l’écologie réapparaît dans la consciencedu public. Cette fois l’attention initiale s’est focaliséesur la législation concernant les organismesgénétiquement modifiés (OGM). Comme à Roussé,les parents sont en train de prendre le leadership,dans ce cas pour s’assurer que leurs enfants ne senourrissent pas d’aliments génétiquement modifiés.Une loi qui flexibilise la production et la vented’OGM a franchi la première étape parlementaireen janvier 2010. Ce projet de loi remplace l’interdictiongénérale des produits OGM par une autorisationgénérale, mais il établit que leur sortie environnementalesur le marché dépend de l’approbation duministre de l’Environnement et de l’eau, qui devraitdébattre cette question avec un panel de 15 scientifiques.Moins d’une semaine après, le 28 février, desmilliers de bulgares ont participé à une manifestationen face de la cathédrale Alexandre Nevski sous laconsigne « Pour une Bulgarie sans OGM. Maintenirla propreté de notre terre et protéger la santé de nosenfants. » Aux parents promoteurs de cette initiativese sont joints des producteurs organiques et traditionnels,des apiculteurs, des scientifiques et desécologistes. Cependant, les premiers jours de marsla loi sur les OGM a été approuvée ainsi que plusieursamendements nuisibles à l’environnement.Le 13 mars 2010 des dizaines de femmes réuniessur le forum Internet « grande maman » ontexigé la démission du ministre et du vice-ministre del’Environnement et de l’eau ainsi que la démission dela présidence du Parlement. Quatre jours après, lesactivistes se sont mobilisés dans une « manifestationnationale contre les OGM » à Sofia, à Varna, à Plovdiv,à Roussé et dans d’autres villes. Deux pétitionsont parcouru tout le pays : l’une pour interdire le maïshybride MON810 produit en Bulgarie par l’entrepriseMonsanto 1 et l’autre contre plusieurs amendementsde la loi sur les OGM 2 . Les activistes ont aussi crééplusieurs groupes contre les OGM sur Facebook. Cesmesures se sont achevées par des manifestations enface du Parlement et les manifestants ont obtenu lapromesse officielle de modifier la loi sur les OGM.En moins de trois mois, la campagne la plusforte et ayant eu le plus de succès dans l’histoire1 Consulter : .2 Consulter : .094100 10099+ 99Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 76Éducation1000L'autonomisation100 81 10099Activité économiquerécente de la Bulgarie s’est emparée de l’opinionpublique. Le Gouvernement a sanctionné, le 2 février2011, une interdiction totale de cultiver le maïs génétiquementmodifié MON810 remplaçant ainsi la loiprévue à l’origine qui ouvrait le pays aux OGM. Aveccette loi, approuvée grâce à l’initiative du ministre del’Agriculture, Miroslav Naydenov, la Bulgarie devientle septième pays membre de l’Union européenne(UE) — après l’Autriche (1999), la Grèce (2005), laHongrie (2006), la France (2008), le Luxembourg(2009) et l’Allemagne(2009) — qui impose une interdictiontotale 3 .Sites protégés et Natura 2000NATURA 2000 est l’initiative la plus importante del’UE pour la conservation de l’environnement et ledéveloppement durable des régions qui possèdentdes sites naturels. Chaque État membre doit établirson propre réseau de sites naturels protégés qui préserverales paysages, la faune et la flore d’importancecommunautaire.Les critères d’inclusion dans le réseau sont détaillésdans deux directives fondamentales de l’UEpour la protection de l’environnement : la Directive92/43/CEE du Conseil pour la conservation des habitatsnaturels et de la flore et de la faune sauvage (laDirective « Habitats ») et la Directive 79/409/CEE duConseil pour la conservation des oiseaux sauvages(la Directive « Oiseaux »).3 Droits humains des paysans. Nekazarien Eskubideak,Bulgaria bans MON810 and will not support GMcontamination of feed, (février 2011), .47Rapports nationaux 84 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


Malheureusement beaucoup de ces sites nesont protégés que sur le papier. Les bureaux duministère de l’Environnement et de l’eau ont arrêtéd’exécuter, dans plus de 300 cas, les procéduresd’évaluation environnementale exigées pour les projetssur les sites de Natura 2000, sites marins aussibien que montagneux.Un bonne illustration de cela est la réponseofficielle au projet d’agrandissement de la stationde ski à Bansko, dans les montagnes Pirin. Si leprojet aboutit, les pistes et les établissements deski occuperont 11 % du parc national de Pirin, parrapport à l’occupation actuelle de 0,2 %. En plus desnouvelles pistes de ski le projet, commandé par laMunicipalité de Bansko, prévoit plus d’hôtels, dontcertains dans la montagne, un aéroport, un spa etun réseau routier 4 .Lorsque le projet a été présenté en février 2011,il a été encensé par Tseko Minev, président de laFédération bulgare de ski, directeur de la Premièrebanque d’investissements et membre de la familledu concessionnaire de la station de ski, M. Yulen. Ila déclaré : « Promouvoir la Bulgarie en tant que destinationpour les skieurs est plus important que lesarguments écologistes populistes contre les stationstouristiques de montagne. N’importe quelle critiquecontre la station de ski perd de sa vigueur face à lapublicité que l’on peut faire à la Bulgarie en deuxheures, deux jours de suite, dans le monde entier[avec la transmission de la Coupe du monde de skialpin masculin]. Nous avons déjà écouté toutes lesmenaces qui demandent à Bruxelles d’entamer lesprocédures d’infraction» 5 .Skier loin des responsabilitésEn octobre 2009, la Commission européenne aentamé la procédure contre la Bulgarie pour avoirautorisé la construction dans la montagne de nouvellespistes de ski, travaux entrepris par M. Yulen. Lenouveau projet, beaucoup plus ambitieux et envahissant,comprend deux pistes de plus et un deuxièmetéléphérique. Les ministres du Développement régionalet de l’économie ont généralement soutenu ledéveloppement régional et ces investissements mais« suivant des paramètres durables, qui respectentaussi bien les normes que la montagne» 6 . Vue lagrandeur du projet, la réponse du Gouvernement sielle n’est pas hypocrite, est pour le moins ambigüe.Il est clair que l’État est en train de soutenir lesinitiatives de M. Minev en lui offrant de généreusessubventions publiques dans une période de criseéconomique et de grandes compressions des budgetsde la sécurité sociale. Le soutien de la populationde la région, qui compte avec l’aide de l’administrationlocale et des entreprises intéressées, a étoufféles protestations des organisations écologistes.Les turbines ou les oiseauxDans la région de Kaliakra prolifèrent les turbineséoliennes et les propriétés de vacances dans l’enceintedu site NATURA, en dépit des avertissementsdes écologistes dans le sens que leur constructiondétruit de façon irréversible les restes de la steppede Dobruja et ses habitats d’oiseaux, et menace lesroutes migratoires des oiseaux. Encore une fois leGouvernement – en particulier le ministère de l’Environnementet de l’eau – mais également les municipalités,ont choisi de sacrifier la nature aux intérêtsdes investisseurs.Jusqu’à présent les investisseurs ont proposé340 projets pour cette région ; certains d’entre euxont déjà été construits sur le site protégé. L’un d’entreeux est le parc éolien, un coprojet entre l’entreprisebulgare Inos 1 et Mitsubishi Heavy Industries auJapon. Selon la Société bulgare pour la protectiondes oiseaux (BSPB selon son sigle en anglais) sonmontant est d’environ 250 millions d’euros. Les 35turbines éoliennes troublent la migration des oiseauxet représentent une menace pour leur vie. Le parc aaussi détruit la steppe de la région, c’est pourquoi leministère de l’Environnement et de l’eau a imposéune amende de 5 000 euros. Plus de 200 autres parcséoliens sont prévus à Kaliakra ; le Gouvernementfonde son autorisation de construire dans un siteprotégé par sa volonté d’adhérer au Protocole deKyoto et par son engagement pris avec l’UE de généreren 2020 au moins 16 % d’électricité par dessources renouvelables 7 .Les écologistes, par contre, demandent depuisdes années l’approbation d’une stratégie nationalepour le développement de ressources énergétiquesrenouvelables, qui comprendrait une évaluation environnementaleobligatoire pour tous les projets deparcs éoliens. Jusqu’à présent aucune propositionde ce genre n’a été proposée.Il est probable que l’UE lance deux autres procéduresd’infraction contre la Bulgarie, l’une à causedes projets de Kaliakra et l’autre pour ne pas avoirprotégé l’habitat des oiseaux sauvages. En fait, laConvention de Berne a déjà déposé un dossier surles cas de Kliakra. Celui-ci est un des six sites NA-TURA désignés (sur un total de 114) qui ont subide graves dommages. Les autres sont le parc desBalkans centraux, la vallée du fleuve Lom, Rila, Pirinet les Rhodopes occidentales.Lors d’un congrès appelé « Stratégies par secteurspour attirer des investissements en Bulgarie »,tenu en mai 2011, le Gouvernement a annoncé quelsétaient les secteurs prioritaires pour le développementéconomique. La construction de routes et depistes de ski en faisaient partie, avec l’agriculture,l’industrie des aliments et des boissons, les soins desanté et le secteur de l’eau. La question clé pour l’environnementest de savoir si le Gouvernement réussiraà développer ces secteurs et en même tempsstimuler le développement durable. n4 Radio Bulgarie, Pirin National Park is again at the crossroads,(17 mars 2011), .5 Cité de M. Enchev, Dnevnik, (28 février 2011).6 Ibid.7 Osródek Studiów Wschidnich (OSW), Bulgaria: the role ofnuclear energy and renewable sources of energy emphasidedin the country’s energy strategy, (2011), <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>85Bulgarie


CAMBODGELes capacités humaines et sociales doivent être la prioritéLe pays est confronté à des défis économiques, sociaux et environnementaux de plus en plus difficiles, tels que lavulnérabilité croissante aux catastrophes naturelles et le manque d’un système d’irrigation approprié. Le Gouvernementne parvient pas à protéger les droits des peuples autochtones du pays, qui sont confrontés au rachat d’entreprises aunom du développement. Pour soutenir une croissance économique rapide, créer des emplois et réduire les niveauxde pauvreté, le Cambodge a besoin de diversifier son économie, mais, avant cela, il doit investir en capital humain.Promouvoir le développement économique sans prendre des mesures de base pour renforcer les capacités internessociales et humaines risque de condamner le pays à un clivage plus important entre les riches et les pauvres.SILAKAThida KhusAprès deux décennies de guerre civile et après lesélections de 1993 parrainées par les Nations Unies,le Cambodge a rejoint l’économie mondiale. Depuislors, le pays a adhéré à l’Organisation mondiale ducommerce (OMC) en 2000 et à l’Association desnations du Sud-Est asiatique (ANSEA) en 2009. Lepays a également adopté un processus d’ajustementstructurel qui comprend la privatisation des entreprisesd’État et des services publics; après 18 ans delibéralisation économique, le Cambodge a connu unecertaine prospérité principalement grâce à l’adoptionde nouvelles infrastructures modernes. Toutefois,des questions restent sans réponse, à savoir si lesmodèles de développement appliqués sont vraimentdurables et s’ils permettront de réduire le clivage quiexiste entre les riches et les pauvres.La croissance du PIB du pays a atteint son maximumde 13,4 % en 2007, puis a chuté à 7,2 % en2008, a atteint 10,1 % en 2009 et a atteint son pointle plus bas en 2010, avec -1,5 % 1 . Les secteurs cléde croissance ont été le tourisme, la fabrication devêtements et la construction, mais tous ont été durementtouchés durant la récente crise économiqueet financière.En outre, les bénéfices de la croissance nes’étendent pas à tous les secteurs. Par exemple, en2010 près de 4000 touristes par jour ont visité AngkorVat, apportant environ 4,5 millions d’USD derevenus mensuels 2 . Toutefois, ces bénéfices n’ontpas été ressentis par les pauvres ; même si l’industrietouristique du Cambodge a créé 10 000 emplois, unegrande partie de ses bénéfices ne parvient pas auxcommunautés locales. Selon les statistiques de l’année2010 du ministère de la Planification, 6 à 10 % dela population de 173 000 habitants de la ville de SiemRiep , par exemple, ne gagnent pas plus de 2,5 USDpar jour 3 . L’année dernière, 289 702 touristes sontvenus de Corée du Sud et 177 000 de Chine, mais1 Index Mundi, Cambodia GDP – real growth rate, (2011),.2 Khmer News, Angkor Wat revenues rise on Chinese flights,(2010), .3 Ibid.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 73 100Enfants atteignantla cinquième annéeIEG = 5510064d’écoleAccouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé044100 10091Survivance jusqu’àl’âge de 5 anscela ne représente qu’une aide minime pour l’économielocale 4 . Selon le quotidien the Cambodia Daily,« ils (les touristes sud-coréens et chinois) volentavec leurs propres transporteurs, dorment dans deshôtels pré réservés et mangent dans des restaurantsqui servent leurs propres plats nationaux » 5 .Vulnérabilité économique et écologiqueLe Cambodge est particulièrement vulnérable auxphénomènes météorologiques extrêmes et aux ralentissementséconomiques, car il lui manque unréseau de sécurité sociale adéquat. Une étude menéepar l’Association cambodgienne économique surplusieurs communautés pauvres dans les villagesciblés a montré qu’il existe une vulnérabilité croissanteà l’insécurité alimentaire parmi les populationsrurales pauvres 6 .Les stratégies adoptées par les communautéspauvres pour faire face à la baisse de leurs revenussont extrêmement nuisibles à leur dignité humaineet à leur bien-être. Par exemple, 55 % desCambodgiens dans cette situation ont tendance àréduire la quantité d’aliments consommés, ce quiest plus fréquent chez les femmes, puisque 64 %des mères et des filles réduisent leur consommationalimentaire, afin de laisser plus de nourriture auxautres membres de la famille 7 . Si l’on tient compteégalement de la qualité, ainsi que de la quantité de4 English People Daily Online, Cambodia sees Chinese visitorsas potential boost to tourism, (15 janvier 2011), .5 The Cambodia Daily, (24 février 2011).6 CEA, The Impact of Economic Downturn on Households andCommunities in Cambodia, (mai 2010).7 Ibid.Indice d'Equité de Genre (IEG)Éducation210L'autonomisation100 7173 100Activité économiquenourriture consommée par membre de la famille,75 % de la population des villages ciblés mettentsérieusement en danger leur nutrition, leur santé etleur qualité de vie.Secteur minierLa gestion de l’industrie minière a également étéun sujet de préoccupation récemment, non seulementparce qu’elle a un lourd impact sur l’environnementmais aussi parce qu’elle est une preuvede la mauvaise gestion économique et sociale duGouvernement. Par exemple, une mine de cuivredans la commune de Kvav (province de Siemreap)est pratiquement parvenue à être opérationnellesans que les habitants des villages voisins ne soientvéritablement au courant de son existence. Selonun article paru dans The Cambodia Daily, un fonctionnairea déclaré que les Forces armées royalescambodgiennes (ARC) et des hommes d’affaireschinois sont derrière l’industrie minière. Mais celaest maintenu secret. Un accord a été conclu entre leministère de l’Industrie, des mines et de l’énergie etla compagnie de construction chinoise Nim MengGroup, et par conséquent les données de l’exploration,de l’étude de faisabilité et de l’exploitationminière étaient toutes confidentielles » 8 .L’accord garantissait 80 km 2 à la fois pour l’extraction(6 ans) et pour l’exploration (jusqu’à 30 ans).Depuis l’année 2008, le favoritisme a toujours existéentre l’ARC et la communauté des affaires devenanten quelque sorte la politique officielle. Le problèmede la militarisation des mines du Cambodge a été diffusé,et à Siem Riep des journalistes ont été escortéshors de l’enceinte du site minier. La société a déclaré8 The Cambodia Daily, (1º mars 2011).Rapports nationaux 86 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


qu’elle allait construire un système d’irrigation pourles rizières et des routes, mais les six villages voisinsont déjà déposé des plaintes selon lesquellesl’entreprise s’est appropriée illégalement des terresappartenant aux villageois.Enjeux pour l’agriculturePour soutenir le secteur agricole, le Gouvernementdoit améliorer les services publics de soutien auxagriculteurs. Le système d’irrigation - qui dessertenviron un tiers des terres agricoles du pays - est entrain de s’effondrer car la gestion locale ne parvientpas à couvrir son entretien 9 . Par ailleurs, une étudede l’Agence de coopération internationale du Japona déclaré lors d’un récent séminaire à Phnom Penhque seulement 1 million d’hectares de terres arablesétait desservies par l’irrigation en 2009 ; aujourd’hui,des plans sont mis en œuvre pour augmenter la zoned’irrigation de 25 000 hectares par an.Les allocations budgétaires à l’agriculture ontété minimes, même si celle-ci est considérée commeune priorité. Entre 2005 et 2009, la part de budgetallouée à ce secteur ne représentait que 1,5 % à 2,5% du budget total 10 .Pillage des terres sacréesLe peuple Suy est un des plus petits groupes autochtonesdu pays. Près de 900 Suy vivent danscinq villages de la commune Treapang Chor, dansle district de O Ral, installés autour du sanctuaire dumont O Ral, établi en 1997. Ce sanctuaire comprendleurs terres agricoles et un forêt d’utilisation coutumièrequi est traditionnellement considérée commela maison de la déesse Te Suy Yeay 11 . En 2009, leGouvernement a attribué plusieurs concessions représentantplus de 10 000 hectares 12 sur les flancsdu mont O Ral, destinées à des plantations de maïset au tourisme ; sans demander la permission de lapopulation locale, ni le peuple Suy, qui a immédiatementprotesté, affirmant ses droit sur ces terreset ces ressources 13 . Malgré cela, on a commencé à9 The Cambodia Daily, 26, 27 février 2011.10 Ngo Sothath y Chan Sophal, Agriculture Sector Financingand Services for Smallholder Farmers, (Cambodia, NGOForum, Action Aid Cambodia, septembre 2010), .11 OMCT Action File, Cambodia: Suy Indigenous Peoples at Riskof Extinction, (2010), .12 Indigenous People Land and Resources, Ethnocide– Cambodia’s indigenous people under attack, 1ºmars 2010, .13 Ibid.planter du maïs en juin 2009. Neuf mois plus tard, leGouvernement a rendu 6000 hectares aux Suy, ce quine fut pas le cas pour la population non autochtone,laissant craindre qu’elle ne tente de s’installer violemmentdans la zone du peuple Suy 14 .Malheureusement, il ne s’agit pas d’un casisolé. Presque toutes les communautés autochtonesau Cambodge sont confrontées à de graves problèmesde terres, largement associés aux rachatsd’entreprises au nom du développement. Le Gouvernementcontinue d’ignorer ses propres lois surla reconnaissance juridique des terres communaleset des réserves, et faillit à son rôle de protecteur desdroits des peuples autochtones du pays. Il viole égalementles obligations internationales issues de laConvention internationale contre la discriminationraciale (CERD), de la Convention internationale surles droits économiques, sociaux et culturels, et dela Déclaration des Nations Unies sur les droits despeuples autochtones 15 .Le développement économiqueet la diversificationL’économie du Cambodge est tributaire d’un éventailrestreint de secteurs, tels que le l’agriculture baséesur le riz, les vêtements, le tourisme et la construction16 . La crise mondiale de 2008 a fait ressortir lavulnérabilité de l’économie limitée du Cambodge,et de nombreux experts sont d’accord sur le besoinde diversification. Le riz reste la culture principale,et bien que le poivre, le sucre de palme, la noix decajou et le caoutchouc offrent des perspectives intéressantes,la majorité des agriculteurs dépendentencore presque exclusivement de la production deriz. Le secteur de l’habillement a connu une croissancerégulière, et est maintenant un des principauxemployeurs industriels, en particulier pour lesfemmes. Cependant, il est très sensible à la demandeinternationale et a été très durement touché par unebaisse de la demande des États-Unis et de l’Unioneuropéenne lors de la crise 17 .14 Ibid.15 Ibid.16 V. Salze-Lozac’h, “Diversifying Cambodia’s Economy,Easier Said than Done”, In Asia, (The Asia Foundation, 15septembre 2010), .17 Ibid.Il est clair que pour maintenir une croissanceéconomique rapide, créer des emplois et réduire lapauvreté, le Cambodge a besoin de diversifier sonéconomie, mais ce n’est pas une tâche facile. Pource faire, le pays a besoin d’accroître sa compétitivitédans la région, et d’acquérir une plus grande technologieet davantage de savoir-faire. Cela impliquedes efforts importants en termes de ressourceshumaines, de gestion des ressources naturelleset de réformes structurelles. La recherche de diversificationdevrait également prendre en comptele potentiel des micro, petites et moyennes entreprisessur tout le territoire . Ces entreprises, avecl’agriculture, pourraient être de véritables moteursde la croissance économique, et devraient être intégréesà toute stratégie de diversification ayantcomme objectif un développement durable, unemeilleure sécurité alimentaire et une diminutionde la pauvreté.Les organisations de la société civile (OSC)La société civile cambodgienne a fait face à denombreux défis au cours de ces dernières années,entre autres, des lois spécifiquement conçues pourmettre en danger sa liberté de fonctionnement. Lapremière est la loi anti-corruption, qui exige queles rapports de cas de corruption fournissent denombreuses preuves et leurs sources. L’autre loiqui va directement affecter les organisations estcelle qui concerne l’inscription des OSC exigeantque tous les membres d’une OSC s’inscrivent avantde commencer une activité et également que toutesles OSC présentent une liste de leurs activités annuelleset leurs rapports financiers au Gouvernement.Cela risque de limiter fortement les initiativesdes citoyens et surtout d’affecter les organisationscommunautaires. Les villageois et les groupes autochtones(comme les Suy et le peuple Pnong) neseront pas en mesure d’agir tant qu’ils ne sont pasinscrits.Cette loi a été considérée comme une menacepour les droits humains et la démocratie, car elledonne carte blanche au Gouvernement pour clôturerles organisations sans procédure législative.L’aspect prometteur de la décentralisation estque le Gouvernement a commencé à introduire ladeuxième phase, donnant aux autorités locales laresponsabilité d’évaluer le développement démocratique.ConclusionsLe Cambodge a besoin de prendre le contrôle de sespropres ressources et d’en améliorer la gestion afinde favoriser le développement durable. Promouvoirle développement économique sans prendre des mesuresde base pour renforcer les capacités internessociales et humaines risquent de condamner le paysà un élargissement du clivage entre les riches et lespauvres. n<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>87 Cambodge


CAMEROUNPendant que le Gouvernement fait taire les protestations,l’alarme environnementale sonne de plus en plus fortDans un pays où plus de la moitié de la population est au chômage et où 51 % de la population vit avec moins dedeux dollars par jour, il est plus important que jamais que les ressources naturelles soient gérées d’une manièreintelligente et durable. Mais le modèle de développement du Gouvernement n’est pas durable. La désertificationet la perte de biodiversité sont de graves problèmes et s’ils ne sont pas abordés immédiatement, le bien-être dela population s’en verra encore plus affecté. Le projet de barrage de Lom et Pangar va déplacer des milliers depersonnes et ruiner un des écosystèmes les plus riches du pays.CRADEC (Centre Régional Africain pour leDéveloppement Endogène et Communautaire)Dynamique CitoyenneJean Mballa MballaIndice des Capacités de Base (ICB)ICB = 7310073Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleIndice d'Equité de Genre (IEG)100IEG = 41L'autonomisationLe Cameroun a bénéficié d’une augmentation du prixdu pétrole et du cacao au cours de l’an 2000, mais lahausse de l’inflation 1 et le fait que la richesse soit trèsinégalement répartie (le coefficient de GINI en 2005était de 44,6 2 ) signifie que l’économie est encoreplus vulnérable qu’auparavant. Selon les dernièresdonnées, 51 % de la population vit avec moins dedeux dollars par jour et 17 % avec moins d’un dollar3 . Le Gouvernement a annoncé des mesures pourrenforcer l’économie, mais il s’est engagé envers unmodèle de développement non durable.Un de ses projet, par exemple, est la constructiond’un barrage sur les fleuves Lom et Pangarqui, selon le Gouvernement, permettra d’atténuerla pénurie d’énergie du Cameroun et de stimuler lacroissance économique. Cependant, il semble quele principal bénéficiaire de ce projet sera l’entrepriseminière d’Alucam, qui consomme environ un tiers dela puissance électrique générée dans le pays. 4Ce barrage va déplacer des communautés entièreset provoquer une grave perte de biodiversité.Les habitats de nombreuses espèces animales, dontles gorilles et les chimpanzés, vont être submergésou annihilés lorsque de larges zones de forêts vontêtre abattues pour faire place à des routes qui doiventrelier le barrage aux villes voisines. Cependant, lapolitique officielle consiste à renforcer les capacitésdu pays en termes de production d’énergie au détrimentde l’environnement et le Gouvernement offrede nombreuses facilités aux entreprises engagéesdans des activités d’extraction non durables.1 Economy <strong>Watch</strong>, “Cameroon Economy,” .2 Institute of International Education, “Atlas of Student Mobility:Cameroon,” .3 Earthtrends, “Cameroon,” .4 N. Chimton, “La peur circule face au nouveau barrage,”IPS, 2009. disponible sur : .Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé059100 10085Survivance jusqu’àl’âge de 5 ansEn 2009, le nombre déclaré de personnespotentiellement déplacées par le projet de barrageest passé à 28 000, dont les minorités telles que lesBaka, qui ont une longue histoire de discrimination 5 .La tendance du Gouvernement à ignorer lesdroits des communautés a déjà été constatée en 2000,lorsque les travaux de l’oléoduc Tchad-Cameroun ontcommencé, un projet auquel participaient PetronasMalaisie, Exxon Mobil et Chevron. Selon un rapportd’Amnesty International de l’année 2005, le projetpourrait « geler la protection des droits humains pendantdes décennies pour des milliers de personnesqui vivent sur son tracé ». 6 Le projet de gazoduc a égalemententraîné le déplacement d’un grand nombrede personnes. Les agriculteurs de la région se sontplaints que l’accès à leurs terres leur était interdit etqu’Exxon Mobil refusait de répondre à leurs revendicationsou de leur verser une indemnité. Dans certainscas, cela signifiait que les communautés se sont vurefuser l’accès à leur seule source d’eau potable. 7Dans les contrats de projet signés par le Gouvernement,les entreprises en question n’avaientpas d’obligation concernant la protection les droitshumains ou de l’environnement, et les accords quiont précédé le début de ces travaux étaient protégéspar le secret commercial et n’étaient donc pas disponiblespour l’examen public. L’argument du Gou-5 Ibid.6 Amnesty International, Oleoducto Chad-Camerún: un nuevoinforme acusa a las empresas petroleras y los gobiernosde evadirse en secreto de sus obligaciones para con losderechos humanos, (septembre 2005).7 Ibid.44100 65100Éducation150Activité économiquevernement était que le projet était une opportunitéde développement qui allait permettre de construirede nouvelles écoles et de fournir une meilleure couverturemédicale à la population. Non seulement cespromesses n’ont pas été tenues, mais le Gouvernementa intimidé et arrêté plusieurs personnes quis’opposaient à l’oléoduc.L’imposition du silenceEn 2008, le président Biya a lancé une initiative visantà apporter des modifications à la Constitution de lanation et dans les principales villes, beaucoup de personnessont descendues dans les rues pour protester.Ces manifestations ont été violemment répriméeset une centaine de manifestants et de membres desforces de sécurité ont été tués. Les organisations de lasociété civile impliquées dans le mouvement de protestationont à maintes reprises affirmé que le régimeBiya, qui dirige le Cameroun depuis 1982, est autocratiqueet n’a pu conserver son pouvoir que par le biaisd’élections frauduleuses. 8 En février 2011, les forcesde sécurité de Biya ont violemment dispersé une manifestationde protestation dans laquelle deux des participantsétaient des figures de l’opposition majeures,Louis Tobie Mbida et Kah Walla, qui tous deux avaientl’intention de se porter candidats aux prochaines électionsd’octobre 2011. Mbida et Walla ont déclaré avoirété maltraités par les forces de répression, qui avaientété averties de la tenue de la manifestation peu detemps avant et avaient pu rapidement disperser lesmanifestants. Ce fut un coup dur pour de nombreux8 David Wallechinsky, Tyrants: The World’s 20 Worst LivingDictators, (New York: Regan Press, 2006).Rapports nationaux 88 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


groupes d’opposition qui avaient espéré qu’il y auraitune « révolution pacifique du peuple » qui amèneraitle régime Biya à sa fin. 9Le Gouvernement a fait de grands efforts pourréduire au silence l’opposition. Par exemple, en mars2011, il a bloqué un service SMS qui fournissait l’accèsau réseau social Twitter, qui avait été largementutilisé par les membres d’organisations de la sociétécivile pour organiser des activités de protestation. 10ChômageSelon une étude menée par l’Institut national desstatistiques, il y avait 12 millions de personnes auchômage en 2009. Ce nombre est absolument choquantétant donné que la population du pays n’estque d’environ 18,2 millions. 11Le Gouvernement a annoncé des plans pours’attaquer au problème, y compris un système pourcréer des emplois pour les jeunes qui quittent l’écolesecondaire, mais en avril 2011, il y avait pas moins de350 000 candidats pour les 25 000 emplois destinésà être créés dans la fonction publique. 12 Les groupesde l’opposition ont affirmé que le programme étaitune « immense fraude » créée pour obtenir desvoix aux prochaines élections présidentielles, et lescandidats ont également exprimé des doutes sur latransparence du système et sa fiabilité. 13 Comme unemission du Fonds monétaire international (FMI) etla Banque mondiale l’ont fait remarquer, il sera trèsdifficile pour l’État de trouver l’argent permettantde maintenir les nouveaux emplois créés dans lesecteur public. 14L’engagement initial de recruter au moins 25000 travailleurs a déjà été reporté. En mai, EmmanuelBonde, le ministre de la Fonction publique et des réformesadministratives, a déclaré que le programmeoriginal serait remplacé par un projet de « recrutementprogressif ». 15DésertificationAu début du XXI e siècle, le nord du pays avait étédurement touché par ce problème et les désertsmenaçaient d’empiéter sur les jungles de la régioncentrale 16 . Ces dernières années, la désertifications’est intensifiée et a entraîné avec elle la dégradationdes sols, l’insécurité alimentaire, la pauvreté grandissanteet des migrations massives hors des zonesarides du nord. 179 African News, “Brutal Suppression of Peaceful Protests inCameroon by Biya Thugs,” (24 février 2011).10 Afrol News, “Cameroon limits social media services,”(9 mars 2011), .11 Cameroon Today, “Cameroon Government News: Rampantunemployment in Cameroon,” (mai 2011).12 Ibid.13 Ibid.14 Theodore M. Ndze, “After Review Mission to Cameroon: IMF,World Bank, ADB Dissatisfied – Worried over 25,000 jobscreations,” The Star, (4 April 2011), .15 Cameroon Today, op. cit.16 J.N. Ndih, “Cameroon under threat.” Le Monde diplomatique,(2002), .17 W. Van Cottem, “Cameroon: Stemming the Tide of Desertificationand Land Degradation,” Desertification, (18 March 2010).Peu de progrès dans le domaine du DSCELe Document stratégique pour la croissance et l’emploi, qui vise à réduire la pauvreté à un niveau «socialementacceptable», a été établi en 2007. Les objectifs déclarés à long terme étaient d’élever le Camerounau statut de pays à revenu intermédiaire, de l’industrialiser, de renforcer son processus démocratique etde permettre ainsi l’unité nationale. Le plan visait à s’attaquer à cette tâche en phases successives de 10ans avec des objectifs globaux à atteindre d’ici 2035. Les objectifs du Gouvernement fixés pour la phaseinitiale étaient d’augmenter la croissance annuelle moyenne de 5 % pendant la période 2010-20, afin deréduire le secteur informel d’au moins 50 % en 2020, en créant des milliers d’emplois dans le secteurformel, et de réduire la pauvreté monétaire de 39,9 % en 2007 à 28,7% en 2020.Une analyse datant de 2011 concernant les progrès effectués vers les objectifs DSCE a montréque 41 % des objectifs à court terme avaient légèrement progressé, tandis que 23 % ne présentaientaucun progrès. Seulement 5 % des objectifs fixés pour 2010 ont été pleinement atteints. De même,environ 45 % des objectifs immédiats du développement humain n’avaient fait que de légers progrèset 6 % avaient réalisé des progrès raisonnables, mais 34 % des indicateurs ne reflétaient aucun changement.En ce qui concerne le développement humain, les secteurs les plus encourageants sont lalutte contre le VIH et le SIDA et l’initiative pour réduire la mortalité maternelle et infantile, mais aucunprogrès n’est constaté pour les objectifs tels que la promotion de la sécurité sociale ou l’optimisationdes mécanismes de financement des initiatives de solidarité sociale.En ce qui concerne l’emploi, 14 % des indicateurs ont stagné et il y a eu de légers progrès endirection de 72 % des objectifs, dont la promotion de l’emploi dans le secteur privé, l’auto-emploiet l’emploi formel. Cependant, aucun progrès n’a été accompli pour essayer de faire passer les travailleursdu secteur informel au secteur formel. On assiste à la même situation à l’égard des moyensde production : pratiquement aucun progrès n’a été accompli pour la plupart des objectifs (60 %), 14% des indicateurs ont stagné, 6 % ont connu une amélioration considérable et dans seulement 7 %des cas, le but était totalement atteint.Une des causes de la déforestation dans le paysest la culture du cacao. Les techniques d’exploitationde cette ressource impliquent depuis toujoursl’abattage des zones de forêt, et il ne fait aucun douteque la condition alarmante de la plupart des terres auCameroun d’aujourd’hui remonte aux années 1980lorsque le Gouvernement a favorisé l’exportation ducacao. Lorsque le prix du cacao sur les marchés mondiauxa diminué, la réponse du Gouvernement a étéd’accroître la production ; par conséquent davantagede forêts tropicales ont été abattues, et aujourd’huil’écosystème du pays subit les conséquences de cemodèle de développement non durable. 18Les principaux impacts de la désertification aujourd’huisont le fait que les sources d’eau potabledans plusieurs villes, dont Mbouda, Kumbo et deNkambe se tarissent ; mais elle provoque égalementl’érosion généralisée des sols et la perte de fertilité,ce qui augmente le risque de glissements de terrainet d’inondations (comme c’est le cas dans la ville deBamenda, par exemple) ; la région nord est affectéepar des inondations, des tempêtes de sable etde poussière ; la couverture végétale disparaît ; lesréserves d’eau sont polluées et les sols montrentdes niveaux élevés de salinité et d’alcalinité danstout le pays, y compris dans les régions tropicalesplus vertes. 19La désertification est aggravée non seulementpar le modèle de développement non durable du Gouvernement,mais aussi par l’exploitation forestièreinformelle des secteurs les plus pauvres de la population,qui a lieu même dans les réserves naturelles.18 Ndih, op cit.19 Van Cottem, op. cit.Perte de biodiversitéLa désertification n’est pas le seul défi environnementalauquel le pays est confronté car il y a aussi une graveperte de la biodiversité en raison d’un certain nombrede facteurs, dont le surpâturage, la pollution, le braconnageet la surpêche. 20 Quelque 40 % de l’écosystème dela mangrove ont été détruits, 32 espèces de mammifèresdans le pays sont en danger d’extinction sur untotal de 409 et 14 espèces d’oiseaux sur un total de 690vont bientôt disparaître, de même que 3 espèces de reptiles,une espèce d’amphibien, 26 espèces de poissonsd’eau douce et 67 espèces végétales. 21ConclusionIl est douteux que les objectifs du Document stratégiquepour la croissance et l’emploi (DSCE) (voir encadré)puissent être atteints, et il s’avère évident quele Gouvernement devrait élaborer un plan d’actionplus réaliste. Le manque d’information sur les objectifset les réalisations du DSCE devrait être résoluà travers une campagne efficace pour tenir le publicinformé. 22 Le manque de données pour effectuer lesuivi des progrès vers les objectifs DSCE représenteun sérieux obstacle. Les organisations de la sociétécivile devraient être autorisées à avoir davantageaccès à des indicateurs qui sont importants pour lesuivi des plans du Gouvernement et de leur mise enoeuvre. Globalement une plus grande transparenceest nécessaire. n20 Encyclopaedia of the Nations, .21 Ibid.22 Dynamique Citoyenne, DSCE: Un an après, Quel niveaud’appropriation?, (Yaoundé, 2011).<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>89Cameroun


CANADACroissance : pas une question de fins mais de moyenLe Gouvernement a fait de la croissance économique à court terme une priorité fondamentale de ses politiques.Or, le développement durable exige que la croissance à court terme ne s’effectue pas aux dépens d’unedévastation de l’environnement. L’environnement est dégradé à cause du manque de politiques et les droitsdes femmes et des minorités sont bafoués ; les femmes autochtones, par exemple, subissent des violencesà outrance. Les organisations de la société civile ont présenté une vaste gamme d’alternatives aux politiquespubliques, offrant des moyens viables et durables pour apporter le bien-être à tous les habitants du pays.Canadian Feminist Alliance for International ActionKate McInturffNorth-South InstituteJohn FosterCanadian Centre for Policy AlternativesArmine YalnizyanIndice des Capacités de Base (ICB)ICB = 99100Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleIndice d'Equité de Genre (IEG)100IEG = 80L'autonomisation57Alors que le Canada sort de la récession d’un pasmal assuré, le Gouvernement du président StephenHarper continue à appliquer des politiques économiquesnéolibérales qui incluent la réduction destaxes et des impôts, la diminution du déficit et les investissementsen projets d’infrastructure physique.Même dans un cadre néolibéral, les résultats ne sontpas allés de pair. La création d’emplois n’a pas suivile rythme de la croissance de la population active, etil n’y a pas eu non plus de croissance significative del’emploi permanent 1 . Les réductions des impôts surle revenu et des taux de crédits ont favorisé à l’excèsles personnes disposant des meilleurs revenus et offrantune aide économique à ceux qui en ont le moinsbesoin. La baisse des taxes et de l’impôt sur le revenudes sociétés n’a pas fait croître les investissementsen équipement et en infrastructure 2 . Parallèlementau retard des programmes sociaux sur l’inflation, ons’attend à une hausse importante des dépenses dansle domaine de la Défense et pour le système pénitentiaire,même si le taux de criminalité reste stable etqu’il est prévu de réduire la participation militaire duCanada en Afghanistan.Le Gouvernement de Stephen Harper a fait dela croissance économique à court terme une prioritéfondamentale de ses politiques publiques. On considèreque toute croissance est bonne, or la croissancedurable exige des investissements publics dans lesdomaines du développement du capital humain, dela recherche et du développement des politiques ;elle exige des mesures publiques dynamiques pourassurer que la croissance à court terme ne se solderapas par une dévastation environnementale à longterme. Au Canada les organisations de la sociétécivile se sont unies pour présenter une vaste gammed’alternatives aux politiques publiques, parmi lesquellesfigurent : le projet annuel Budget fédéral al-1 Canadian Centre for Policy Alternatives, Alternative FederalBudget: 2011, (Ottawa: 2011), p. 11.2 K.Howlett, “Corporate Tax Cuts Don’t Spur Growth, AnalysisReveals as Election Pledges Fly”, The Globe and Mail, (6 avril2011).0 n/d100 10099+ 99Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialiséSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansternatif du Centre canadien de politiques alternatives,la formation d’une large coalition d’organisationsappelée Voices, l’appel lancé par le Conseil canadienpour la Coopération internationale en faveur d’un« nouvel accord » entre le Gouvernement et les organisationsde la société civile 3 ; et la collaborationentre les experts et les organisations de femmespour faire une analyse de genre des priorités de ladépense publique 4 . Bien qu’il soit prouvé que lesorganisations ayant un solide programme de plaidoyeren matière de politiques publiques risquentde perdre le financement offert par le Gouvernementfédéral, la société civile canadienne continue à forgerdes politiques publiques critiques et innovantes.InégalitéSuite à la baisse des taxes et des impôts, le Gouvernementperdra 96,6 milliards de CAD (97,9 milliardsd’USD) de recettes entre 2008 et 2011 5 . Leprogramme des dépenses de relance de l’économietouchant à sa fin, le Centre canadien de politiques alternativesprévoit pour 2011-2012 une réduction de3,8 milliards d’USD des dépenses en programmesfédéraux, et que « vu son volume (en dollars américains),cette compression budgétaire sera la deuxièmeen importance depuis les années 1950 » 6 . Cesera probablement une continuité des compressionsqui ont débuté au milieu des années 1990 sur lesdépenses fédérales en matière de programmes sociaux.La politique économique du Gouvernement a3 .4 .5 Canadian Centre for Policy Alternatives, op cit., p.16, “Figure9: Cost of Tax Cuts Since 2006”.6 Ibid, p. 15.100 83 100100Éducation0Activité économiqueeu de gros impacts sur le bien-être des personnes.Les taux d’aide sociale au revenu n’ont pratiquementpas bougé dans tout le pays 7 . La plupart des revenusd’aide sociale resteront très en-dessous du seuil desbas revenus. L’indice général de la pauvreté est de9 %mais celle-ci touche tout particulièrement lesfemmes, les peuples autochtones et les personneshandicapées. Par exemple, au Canada une personnesur trois parmi les autochtones, ou ceux qui ne fontpas partie de la population blanche vit dans la pauvreté,de même qu’une personne handicapée surquatre ; même chiffre pour les immigrants et lesfemmes qui sont chefs de famille monoparentale.Dans toutes les catégories, les indices de pauvretésont plus élevés chez les femmes que chez leshommes.L’accès aux services est extrêmement inégal :souvent, les personnes les plus touchées par la criseéconomique sont les moins favorisées par les politiqueséconomiques nationales. Dans le secteurde l’Éducation, par exemple, on considère l’accès àl’éducation primaire comme un des succès du pays,mais de nombreux enfants des réserves des Nationsautochtones n’ont pas accès à des écoles sûres 8 . Lesenfants des Nations autochtones ne sont que tropprésents dans les circuits de protection de l’enfanceet ils ressentent très probablement les effets de lapauvreté et du manque de logement adéquat 9 .7 Canadian Feminist Alliance for International Action, “AppendixA: Provincial and Territorial <strong>Social</strong> Assistance Rates”.8 A. Rajekar y R. Mathilakath, (Office of the ParliamentaryBudget Officer, 2009).9 M. Mendelson, Why We Need a First Nations Education Act,Caledon Institute of <strong>Social</strong> Policy, (Ottawa: 2009).Rapports nationaux 90 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


Érosion des droits des femmesLes économistes ont démontré qu’en temps de criseéconomique les femmes sont celles qui généralementen reçoivent le plus l’impact 10 . Au Canada lesfemmes ont été les premières à réintégrer le mondedu travail après la récession, mais ce retour précocene se traduit pas par une augmentation du bien-êtreou par une plus grande stabilité économique, caril est probable que ces femmes qui reprennent letravail soient embauchées à mi-temps ou pour untravail non rémunéré 11 . De plus, elles restent victimesd’un des plus profonds écarts salariaux liés augenre de tous les pays de l’OCDE 12 .Des salaires plus bas et un travail temporaireimpliquent que moins de femmes que d’hommes réunissentles conditions nécessaires pour avoir droit àl’assurance-emploi et aux réductions d’impôts. Lesmères qui travaillent affrontent plus de défis 13 . Or, leGouvernement a annulé un plan national de servicede garde d’enfants qui aurait facilité l’accès de tousles parents qui travaillent à un service de garde pourleurs enfants sûr et accessible. L’érosion des droits aété particulièrement grave dans le cas des femmesqui n’ont pas de travail rémunéré, surtout celles quiplus vraisemblablement dépendent du service d’aidesociale, comme les mères célibataires et les mères autochtones.Les revenus de bien-être social sont si basque le président du Conseil national du bien-être socialles a qualifiés récemment de « honteux et moralementinsoutenables pour un pays riche » 14 .La violence envers les femmes varie considérablementselon les différents groupes et les régions ;les femmes sont la cible démesurée des actes deviolence. Lors des 40 dernières années plus de 500femmes autochtones du Canada ont disparu ou ontété assassinées 15 . Les femmes qui vivent dans descommunautés isolées du nord pâtissent aussi deplus grands indices de violence que celles qui viventdans des régions urbaines ou au sud du Canada, etelles ont moins accès aux services d’aide 16 . Face à detels niveaux de violence à leur encontre, il n’est pasétonnant que les femmes soutiennent résolumentles politiques contre les délits violents. Cependant,la « Loi sur l’adéquation de la peine et du crime » duGouvernement actuel semble vouloir résoudre unproblème qui n’existe pas, étant donné que les peinesimposées pour chaque type de crime ont à peine variépendant la dernière décennie 17 . La nouvelle loi aura davantaged’impacts sur l’économie que sur les peinesappliquées. Le Bureau parlementaire du budget du Ca-10 C. Sweetman y R. King, “Gender Perspectives on the GlobalEconomic Crisis”, (Oxfam International Discussion Paper, 2010).11 Statistics Canada, Women in Canada: Work Chapter Update,(Ottawa: 2007).12 OCDE, , (2010).13 Statistics Canada, “Paid Work”, en Women in Canada, op. cit.14 National Council of Welfare, Staggering Losses in WelfareIncomes, (Ottawa: 2006).15 Native Women’s Association of Canada, Voices of Our Sisters InSpirit: A Report to Families and Communities, (Ottawa: 2009).16 Statistics Canada, , (Ottawa: 2006).17 K. MacQueen, “Is Canada Tough On Crime Or Doing JustFine?”, revue , (7 septembre 2010).nada prévoit que la Loi sur l’adéquation des peines etdes crimes doublera le coût du système pénitentiairedans les cinq ans à venir – atteignant 9,5 milliards deCAD (9,7 milliards d’USD) – auxquels il faudra ajouter1,8 milliard d’USD pour la construction de prisons 18 .Contrairement aux dépenses concernant lesprogrammes sociaux, les dépenses dans le secteurde la sécurité vont croître considérablement. Lescalculs du Gouvernement lui-même indiquent queles dépenses militaires atteindront 22 milliards deCAD (22,4 milliards d’USD) en 2010-2011 19 . Néanmoins,les estimations des dépenses en équipementmilitaire et concernant une nouvelle législation pénaletrès dure ont été longuement discutées. Parexemple, les estimations du coût des chasseursbombardiers F-35 récemment acquis oscillent entre9 milliards d’USD, selon le ministère de la Défensenationale 20 , et 29 milliards d’USD, selon le Directeurparlementaire du budget 21 .Bien que le Canada se soit engagé à doubler sesdépenses en aide au développement en dollars absolus,l’Aide publique au développement (APD) en pourcentagedu Revenu national brut (RNB) ne représente quetoujours 0,3 %, aucun changement depuis 2005 22 . LaLoi sur la responsabilité en matière d’aide au développementofficielle (2008) exige que l’aide canadienne audéveloppement « contribue à réduire la pauvreté, tiennecompte du point de vue des pauvres et soit compatibleavec les normes internationales en matière de droitsde la personne » 23 . De nombreuses organisations dela société civile considèrent que cette loi est un mécanismetrès prometteur pour intégrer les affaires dedroits humains à la politique et aux programmes dedéveloppement international. Cependant, un rapportdu Conseil canadien pour la coopération internationale,une coalition de la société civile, indique que le Gouvernementne l’a pratiquement pas appliquée 24 .« L’égalité entre les femmes et les hommes » etla « durabilité de l’environnement » restent des sujetstransversaux pour l’Agence canadienne du développementinternational ; cependant, les ressourcespolitiques, humaines et financières destinées à cesobjectifs sont en diminution. Le terme « équité degenre » a disparu en grande partie des déclarationsofficielles du Gouvernement et de ses documentssur les politiques 25 . Le financement pour les pro-18 Bureau du Directeur parlementaire du budget du Canada, “TheFunding Requirement and Impact of the “Truth in SentencingAct” on the Correctional System in Canada”, (Ottawa: 2010).19 Ministère de la Défense Nationale, National Defence 2010–2011Report on Plans and Priorities: Part III Estimates, (Ottawa: 2010).20 Ibid, (Ottawa: 2011).21 K. Page, , Bureau du Directeur parlementaire du budget duCanada, (mars 2011).22 Agence canadienne de développement international,Statistical Report on International Assistance: Fiscal Year2009–2010, (Ottawa: 2011).23 Ministère de la Justice, Official Development AssistanceAccountability Act, (Ottawa: 2008).24 Conseil canadien pour la coopération internationale, ,(Ottawa: 2010).25 Canadian Labour Congress y FAFIA, , (Ottawa: 2010);M.Collins, “Gender Equality”, “Child Soldiers” and“Humanitarian Law” are Axed from Foreign PolicyLanguage”, revista Embassy, (29 juillet 2009).grammes destinés à l’équité de genre reste encoreinférieur à 2 % de l’APD canadienne 26 . Lors de laréunion du G8 en 2010, le Gouvernement de StephenHarper a engagé 1,1 milliard de dollars canadiens(1,12 milliard d’USD) pour de nouvelles dépensesen programmes de santé maternelle et infantile dansles pays pauvres. Les organisations de la sociétécivile se sont réjouies de cet engagement, mais nombreusesfurent celles qui critiquèrent la décision dene pas financer des services d’interruption volontairede grossesse comme partie de l’initiative, mêmedans les pays où ces services seraient légaux.Dégradation de l’environnementLes antécédents du Canada en matière de durabilitéde l’environnement furent la cible des critiques desautres pays lors du Sommet de l’ONU sur le changementclimatique de Copenhague. Depuis ce jour, leCanada a présenté son objectif de réduire les émissionsde gaz à effet de serre à l’horizon 2020 27 , maisen réalité celles-ci ne font qu’augmenter. D’après unrapport de 2011 du Penumbra Institute, l’Arctiquecanadien a déjà subi un réchauffement de plus 1,7 °Cet l’on prévoit une augmentation de 4 ou 5 °C 28 . Lescommunautés inuites signalent que leur accès auxsources traditionnelles d’alimentation s’est restreintet qu’il y a une dégradation générale de leur environnementet de leur bien-être 29 . Dans les régions septentrionaleset rurales cette dégradation s’aggraveà cause des industries minières et extractives. Bienque la qualité de l’eau partout au Canada reste bonne,plus de cent communautés des Nations autochtonesn’ont toujours pas accès à l’eau potable.L’industrie minière canadienne compte sur uneforte présence internationale et aussi nationale. Lesentreprises ayant leur siège au Canada constituentplus de 40 % de l’industrie extractive du monde. Bienque la société civile joue un rôle fondamental dansle suivi de l’industrie à travers des initiatives tellesque Publish What You Pay, le Canada n’a pas encoreadopté de règlement de protection des consommateurset n’a pas accepté non plus de respecter leslignes directrices de l’Initiative relative à la transparencedes industries extractives.Une question de moyensLa crise économique a poussé la société civile à relancerle débat sur les affaires de politique économique.Tant les acteurs gouvernementaux que les non gouvernementauxs’efforcent de voir comment résoudrele thème de la consécution de ses objectifs dans uncontexte de restrictions fiscales. Mais la façon de s’yprendre pour stimuler la croissance économique etgarantir la stabilité économique n’est pas une questionde fins, mais de moyens. En définitive, le centred’attention doit être la société qui se construit sur cettecroissance. n26 CSO Working Group on Women’s Rights, , (Ottawa: 2009),Tableau 1: Gender Equality Trends, Percentage of CIDA ODA.27 Environment Canada, “Canada Lists Emissions Target Underthe Copenhagen Accord”, (Calgary, Alberta: 1er février 2010).28 A. Morgan, (Waterloo, Ontario: 2011).29 S. Nickels, et al., Inuit Tapiriit Kanatami, (Ottawa : 2005).<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>91Canada


CHILIBeaucoup de promesses, peu d’engagement réelLe modèle de développement appliqué dans le pays est toujours régi par les préceptes de l’extractivisme,tandis que le Gouvernement persiste à miser sur les sources d’énergie comme le charbon, avec un fort impactenvironnemental. Alors que le Chili s’est engagé internationalement à adopter des politiques plus respectueusesde l’environnement, ces promesses ne se sont pas véritablement traduites par des faits. Le Chili a besoin demettre en œuvre de toute urgence une structure institutionnelle liée à l’environnement, la conception d’unepolitique énergétique nouvelle, la création de règlements liés à la biodiversité, la modification du modèleénergétique et l’inclusion de la société civile dans le débat sur ​le développement durable.Fundación TerramLuz M. FariñaFlavia LiberonaBien que, 20 ans après la Conférence des NationsUnies sur l’environnement et le développement tenueen 1992 à Rio de Janeiro (Rio 92), le Chili aitconnu des changements importants dans les domainespolitique, économique, environnementalet social, le modèle économique extractiviste esttoujours d’actualité. En conservant comme pilierde l’économie les exportations de ressources naturellesà faible valeur ajoutée, on a continué à miserfortement sur l’exploitation de l’environnement,en particulier pour les secteurs miniers, la pêche,l’aquaculture, l’agriculture et la sylviculture.Rio 92 a conçu une série d’engagements etd’accords ratifiés par plus de 100 nations, en proposantde réfléchir à des modèles durables de développement.Bien que le Chili ait signé tous les accordsconclus lors de la conférence, les progrès dans cesdomaines ont été pratiquement nuls. Par exemple,il a été impossible d’établir une loi pour protégerla biodiversité ; il n’existe pas de cadre réglementaireprotégeant le patrimoine phylogénétique et sesusages traditionnels, ni de registre des espèces menacéesou de plans de rétablissement de celles-ci.La faiblesse des réglementations a aussi permis l’introductionet la culture d’organismes transgéniquesqui ont une incidence négative (comme l’indiquentdes organisations telles que Greenpeace 1 ) sur la sécuritéalimentaire en raison du système de brevetsrégissant leur utilisation et, en outre, selon l’avis debeaucoup, ils constituent une menace pour l’environnementet la santé 2 .Les administrations successives de PatricioAylwin, Eduardo Frei Ruiz-Tagle, Ricardo Lagos etMichelle Bachelet (1990-2010) ont adopté un programmepro-croissance néolibérale favorisant desgrands groupes d’entreprises, renforçant ainsi le1 Greenpeace, “Transgénicos”, .2 EcoPortal, “Tema especial: transgénicos”, ; Persley, Gabrielle y Siedow, James,“Aplicaciones de la biotecnología a los cultivos: beneficios yriesgos”, (décembre 1999), ;GreenFacts, “Consensocientífico sobre los cultivos transgénicos y OMG”, .Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9899+100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansmodèle exportateur et accentuant le clivage social etéconomique dans le pays. La preuve en est que, bienque le pays avait en 2008, selon le Fonds monétaireinternational, le plus haut revenu par habitant ducontinent – près de 14 600 USD 3 - la distributionréelle de ces revenus - mesurée au moyen du coefficientde Gini – est une des plus inégales au monde,avec un coefficient de 0,55, selon Mideplan etl’enquêteCASEN en 2009 4 .Tout au long de la première décennie du siècleactuel, il s’est produit une « écologisation » de l’imagedu Chili, conséquence des exigences internationales,mais qui ne s’est pas traduite par un meilleur exercicede la démocratie ou par un plus grand respectpour l’environnement. Avec la promulgation de la loigénérale sur les bases de l’environnement (1994) etde la réglementation qui l’a rendue opérationnelle(1997), le système de gestion environnementaleaurait dû bénéficier d’une amélioration à travers ledéveloppement d’instruments de commande et decontrôle, tels que les normes de qualité et les rejetsdans l’eau, l’air et le sol. Toutefois, après plus d’unedécennie d’application de la loi, ces normes n’ont étéappliquées que dans un faible pourcentage. Aucunsystème conforme aux normes internationales pourla protection et la conservation des ressources naturelleset de gestion de la faune n’a été développé,comme exigé dans le rapport de l’OCDE de 2005 5 .3 Fond monétaire international, World economic Outlook(WEO): crisis and recovery, (avril 2009), 4 Gouvernement du Chili, Mideplan, CASEN 2009, .5 OCDE, Environmental performance reviews: Chile, (2005).95100 10099Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 72Éducation100056L'autonomisation1006010099Activité économiqueLa loi sur l’environnement, dans la pratique, a seulementgénéré un système de guichet unique pour délivrerdes autorisations environnementales pour desprojets d’investissements nationaux ou étrangers.En fait, la question se pose de savoir si la durabilitéest viable dans un pays livré au pillage, oùl’eau est distribuée gratuitement et à perpétuité à degrands consortiums d’entreprises étrangères, où lecuivre est extrait sans garanties environnementaleset où règne un modèle forestier basé sur des espècesexotiques qui ont même commencé à s’étendre àd’autres pays de la région.Pour ce qui est de l’eau, la législation chiliennela définit comme un bien public, mais elle est fourniepour son utilisation, sa jouissance et usufruità des parties prenantes privées, la transformantainsi en un bien échangeable, même si celles-ciont droit à la gratuité de l’eau à perpétuité pour leurconsommation. En attendant, le modèle forestierchilien s’est installé pendant la dictature par le décretde loi n° 701 qui subventionne les plantationsforestières et encourage les plantations de pinsexotiques et d’eucalyptus, subventionnées jusqu’à90 % par l’État.En ce qui concerne le cuivre, il y a encore uncertain nombre de règlementations en attente dansce secteur : le Chili ne perçoit pas de redevancemais seulement un impôt spécifique, les opérationsminières ne contemplent la fermeture de mine quedepuis l’entrée en vigueur totale de la législation environnementale(1997), il existe actuellement desprojet en marche qui n’ont jamais été évalués auniveau environnemental, il n’existe pas non plus deregistre public des sites contaminés par des minesni de plan pour prendre en charge les sites miniersfermés et/ou abandonnés.Rapports nationaux 92 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


La nouvelle structure institutionnellepour l’environnementUne des priorités pour le pays est la consolidationde la nouvelle structure institutionnelle liée à l’environnementgrâce à la loi 20 417, promulguée début2010 et créée par le ministère de l’Environnement,le Service de l’évaluation environnementale et dela Surintendance de l’environnement. Ce nouveausystème institutionnel élève le débat politique sur lesquestions environnementales, sépare les politiqueset les réglementations de l’évaluation environnementaledes projets d’investissement ; il crée égalementun organisme indépendant chargé de la fiscalisationenvironnementale et de nouveaux instruments degestion environnementale tels que l’évaluation environnementalestratégique.Cependant, la discussion sur la réforme n’a pasabordé les questions de fond, elle a été scellée parun accord politique entre parlementaires socialistes,conservateurs et le Gouvernement ; ceux-ci, en voulantprécipiter l’approbation, ont exclu des questionset des propositions des organisations de la sociétécivile ; mais également d’autres questions très importantespour le renforcement de la démocratieet la protection de l’environnement, entraînant parconséquent la création d’une norme qui manqued’outils pour assurer la protection du patrimoineenvironnemental du Chili, la participation citoyenneet, en définitif, la démocratie.Une énergie à contresensEntre 1999 et 2008, le secteur thermoélectrique aprogressé de 32 % en termes d’installations et de428 % en termes de production. En 1993, ce secteurgénérait 2162 MW, soit environ 40 % de la capacitétotale d’électricité ;en décembre 2008 cette capacitéatteignait 9251 MW, représentant 64,7 % du total,indiquant la dépendance du pays vis-à-vis des combustiblesfossiles entraînant un impact inévitablesur l’environnement. En outre, entre 2004 et 2008,l’utilisation du charbon comme source d’énergie aaugmenté de 72 %, tandis que l’utilisation du gaznaturel - qui signifie moins d’impact sur l’environnementpar rapport aux autres combustibles fossiles - achuté de 31 % 6 .Le secteur de la production d’énergie thermoélectriquene possède pas de cadre réglementaireprotégeant les aspects tels que les rejets dans l’eau,la vie utile des centrales, la qualité du carburant,l’implémentation de technologies de pointe ou l’examendes coûts environnementaux. En conséquence,l’État n’a pas la capacité de gérer et de planifier laproduction d’électricité à moyen et long terme, elledépend exclusivement de la planification des investissementspar les entreprises privées qui gèrent lesecteur de l’électricité au Chili.La vulnérabilité, le changement climatiqueet la désertificationLe Chili présente 7 des 9 catégories de vulnérabilitéétablies par la Convention cadre des Nations unies surles changements climatiques (CCNUCC) : des zonescôtières basses, des écosystèmes montagneux, desterritoires arides et semi-arides soumis à la sécheresseet à la désertification, des portions de territoiresujettes à la dégradation des forêts, des zones enclinesaux catastrophes naturelles, des zones urbainesfortement polluées et des écosystèmes fragiles 7 .Bien que les émissions de gaz à effet de serredans le pays aient atteint seulement 0,23 % du totalmondial, on enregistre la plus forte croissancepar habitant des émissions de CO 2par rapport auxautres pays d’Amérique latine (1,2 tonne par an en14 ans) 8 . Par ailleurs, selon l’Agence internationalede l’énergie, en 2008, le Chili est devenu le deuxièmepays, en pourcentage après la Chine, à avoir augmentéses émissions de CO 29. Si l’on ajoute à celales perspectives qui se présentent suite à l’engagementdu Gouvernement à utiliser du charbon commesource d’énergie, les perspectives sont loin d’êtreencourageantes. Le pays a assumé précocement unengagement vis-à-vis du changement climatique ensignant (1992) et en ratifiant (1994) les dispositionsde la CCNUCC et en signant (1997) et ratifiant (2002)le Protocole de Kyoto. La Stratégie nationale pour lechangement climatique adoptée en 2006 et le Pland’action sur le changement climatique 2008-2012sont également opérationnels. Cependant, malgrétout cela, la question n’est pas prioritaire dans leprogramme du Gouvernement.La désertification, l’une des conséquences duchangement climatique, constitue un des problèmessocio-environnementaux les plus graves : selon leschiffres officiels, 62,3 % du territoire (soit 47,3millions d’hectares) est touché par ce phénomèneconcentré principalement dans la moitié nord (dela Ière à la VIII Région) et dans la zone sud (dansles régions XI et XII) 10 . Bien que le Chili fasse partiede la Convention de lutte contre la désertification(UNCCD) depuis 1997, les principales causes de ladésertification dans le pays - la sécheresse, la déforestation,les feux de forêt, l’érosion et les changementsdans l’utilisation des terres - sont toujoursprésentes, il s’agit donc d’une bataille qui est loind’être gagnée.Les propositionsLes questions prioritaires que le Chili doit traiter sontles suivantes :• Renforcer la mise en œuvre des nouvelles structuresinstitutionnelles du pays pour l’environnement.• Mettre en œuvre une réglementation en matièrede biodiversité, il est urgent de doter le paysd’une loi sur la protection de la biodiversité nativeet le patrimoine phylogénétique.• Concevoir et mettre en œuvre une politique énergétiqueà moyen et long terme et générer deschangements dans la réglementation actuellepour que l’État soit en mesure de planifier la productiond’énergie et d’établir des sources et destypes de carburant pour le modèle énergétique.• Améliorer l’accès à l’information environnementaleet la participation citoyenne.• Faire avancer la mise en œuvre du Plan nationald’adaptation au changement climatique et la livraisonde la Deuxième communication nationale.• Approuver et/ou mettre en œuvre des plansde prévention et de décontamination. Les problèmesde qualité de l’air dans les régions ontaugmenté aussi bien dans le nord que dans lesud entrainant des conséquences graves pour lasanté des habitants. n6 Fondation TERRAM, Evaluación, Actualidad y Proyección delSistema Termoeléctrico Chileno”, (novembre 2009), .7 Gouvernement du Chili, Conama: “Plan de Acción Nacionalde Cambio Climático 2008-2012” (2008) p. 138 PNUD: “Informe de Desarrollo Humano 2007-2008. La luchacontra el Cambio Climático: solidaridad frente a un mundodividido” (2007)9 World Energy Outlook (2008), .10 Université du Chili, Institut des affaires publiques, Centred’analyse des politiques publiques: Informe País: Estado delMedio Ambiente en Chile 2008, (mars 2010), p.251.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>93Chili


CHYPREÀ la recherche d’écoles durablesLes systèmes éducatifs constituent des facteurs clé pour le développement durable. Malgré les efforts dupays pendant la première décennie du XXème siècle pour promouvoir l’« éducation environnementale », lemanque de plans et de mise en œuvre adaptés a relégué cette notion aux confins du système éducatif. En fait,plusieurs progrès réalisés en ce sens au cours des dernières années ont été générés par les organisationsnon gouvernementales du pays. Si Chypre souhaite participer à part entière au développement durable, il doitaccélérer l’expansion des « écoles durables » et augmenter, parallèlement, la participation de la société civile.CARDETSotiris ThemistokleousMichalinos ZemylasCharalambos VrasidasAu cours des dernières années la notion de développementdurable a provoqué des débats scientifiqueset publics dans le monde entier 1 . Dans ce contexte,il a été demandé au secteur de l’enseignement d’apporterune réponse en créant des cadres éducatifset des plans d’étude qui abordent la notion de développementdurable et ses possibles conséquences 2 .Le développement durable dans le domaine del’éducation ne se borne pas à la création d’unitéscurriculaires concernant l’environnement. Certes, ils’agit d’un processus inclusif et pluridimensionneltendant à reconsidérer et à modifier des idéologieset des pratiques relatives à notre rapport avec l’environnement3 . Il faut le considérer comme un discourset une pratique qui alignent le développement économiquesolide et la justice sociale, l’égalité et la protectionde l’environnement. Une philosophie éducativese fondant dans ce cadre se développerait dans unsens différent de celui d’une philosophie centréeexclusivement sur le développement économique 4 .L’éducation pour le développement durable chercheà transmettre des connaissances, des savoir-faire etdes pratiques capables d’inspirer les étudiants à êtredes citoyens engagés, qui travaillent pour promouvoirune meilleure qualité de vie pour l’ensemble despersonnes mais également pour l’environnement 5 .Écoles durables« Écoles durables » : voilà un terme très utilisé pourles institutions éducatives qui adoptent ce cadre.Son objectif principal est d’éduquer et d’orienter les1 Hopwood, B. y O’Brien, G., “Sustainable development:mapping different approaches” dans SustainableDevelopment, (Londres : 2005), p. 38.2 Tilbury, T. et al., Education and Sustainability: Responding tothe Global Challenge, IUCN – The World Conservation Union,(2002).3 Network for Ecological Education and Practice, Sustainableis more than able: viewpoints on education for sustainability,(2002), .4 Vrasidas, C. et al., ICT for Educational Development and <strong>Social</strong>Justice, (Charlotte, NC: Information Age Publishing, 2009).5 Saul, D., “Expanding environmental education: Thinkingcritically, thinking culturally”, dans Journal of EnvironmentalEducation 31, (Londres : 2000), pages. 5-8.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9999+100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansétudiants afin qu’ils travaillent en vue d’une meilleurequalité de vie en appliquant les principes du développementdurable pour améliorer les conditions de viede tous les êtres 6 . Pour ce faire, un facteur décisifconsiste à établir des liens avec les communautéslocales qui opèrent en tant que partenaires pour lapromotion du cadre du développement durable 7 .Au moyen de cette stratégie, les « écoles durables »allient les réussites éducatives de leurs élèves à laqualité de vie, aussi bien à l’école que dans la communautétoute entière, conformément aux valeurs dela conscience environnementale et de la citoyennetécritique 8 .Éducation environnementaleChypre a introduit les premiers éléments d’une éducationpour le développement durable en mettant unaccent particulier sur l’ « éducation durable » dansla décennie 1990. Cependant, l’absence d’un planéducatif structuré se rattachant à l’éducation environnementaleet à l’éducation pour le développementdurable a relégué ces idées aux confins du systèmeéducatif pendant presque une décennie. Dans ce lapsde temps, l’éducation environnementale et le développementdurable ont eu une présence plus limitée,au niveau de l’éducation formelle et informelle,6 Dimopoulou, M. et Mpampila, E., “The role of the principalin the operation of an eco-school – the challenge to theleadership of a sustainable school”, .7 Department of Education and Skills, Sustainable schoolsfor pupils, communities and the environment: Securing thefuture in delivering a UK sustainable development strategy,(Londres : 2005).8 Ibid.96100 10099+Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 68Éducation100032L'autonomisation100 76 10095Activité économiquepar rappor à beaucoup d’autres pays 9 . À Chypre, lesparties intéressées par le secteur de l’éducation ontcommencé depuis peu à intégrer des idées sur le développementdurable dans un cadre plus holistique liéaux objectifs d’une société meilleure, dans une ambianceplus saine. La ratification de la « Stratégie pourl’éducation et le développement durable en Europe »a constitué un progrès important en ce sens en 2005.Cependant, malgré cette ratification et la miseen place ultérieure du « Plan national d’Action pourl’éducation environnementale et l’Éducation pourle développement durable » en 2007, le systèmeéducatif du pays conserve une vision étroite surla question. Son approche « fragmentaire » tendprincipalement à fournir des connaissances et del’information concernant l’environnement et oublieles perspectives visant l’action qui sont basées sur ledéveloppement social 10 .Une recherche sur les « Guides transformateurspour des écoles durables », menée entre 2005 et 2007(période au cours de laquelle les deux plans susvisésont été introduits), a montré que 89 % des directeursd’écoles primaires à Chypre n’avaient jamais reçu d’informationsur des questions liées au développementdurable 11 . L’étude a précisé que l’une des principales9 Ministère de l’Agriculture, des ressources naturelles et del’environnement, Revised National Strategy for SustainableDevelopment, (Nicosie : 2010), .10 Mavroudi, E., “Insuficient Environmental Education,interview with Dr. Zachariou Aravella”, à Simerini, (Nicosie :2009). .11 Zachariou, A. et Kadji-Beltran, C., “Cypriot primary schoolprincipals’ understanding of education for sustainabledevelopment key terms and their opinions about factorsaffecting its implementation”, dans Environmental EducationResearch, (Abingdon, Royaume-Uni : 2009), pages. 315-334.Rapports nationaux 94 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


faiblesses réside dans le fait que les directeurs d’écoleétaient incapables de définir le développement durableen termes de cadre holistique incluant l’économie,la société et l’environnement 12 . La plupart de leursdéfinitions étaient centrées sur la « protection environnementale». Ce n’est qu’en 2009, lorsque leministère de l’Éducation et de la culture a publié unnouveau programme d’études pour l’éducation environnementaleet l’éducation pour le développementdurable, que de sérieux efforts tendant à appliquer lePlan National d’Action de 2007 ont été entrepris 13 .Tel qu’il est déclaré dans le document, c’est l’effortle plus complet du Gouvernement pour introduirele développement durable dans le système éducatif,un effort qui cherche spécialement à transformer lesunités scolaires en « écoles durables ».Le nouveau plan d’étude montre que le ministèrede l’Éducation et de la culture comprend maintenantl’importance du développement durable nonseulement dans le sens d’une discipline scolairemais d’une « philosophie » qui doit s’appliquer àtous les niveaux de l’éducation 14 . Un aspect importantde ce programme est l’accent particulier missur les éléments sociaux du développement, quiincluent des notions telles que la participation, l’inclusionet le multiculturalisme, outre le respect pourl’environnement. L’hypothèse sous-jacente à cetteperspective, au-delà de toute stratégie interdisciplinairequi puisse être nécessaire pour transmettre desconnaissances, est que le développement durabledoit s’enraciner dans les valeurs de la société. L’unedes conséquences est que le programme concernantles plans d’étude met particulièrement l’accent sur lacréation de liens étroits entre les « écoles durables »et les communautés locales.Cependant, le système éducatif fortementcentralisé et ses mécanismes de prise de décisionscontinuent de représenter un obstacle systémiqueaux transformations effectives comme celles-ci etlimitent la possibilité d’effectuer de grandes réformes.Par exemple, la transformation d’unités scolaires en« écoles durables » est très difficile si les écoles nejouissent pas d’une plus grande autonomie. En outre,il est nécessaire que les mécanismes de prise de décisionsintègrent les intéressés périphériques au systèmeéducatif : les conseils d’école, les associationsde parents, les organisations de la société civile etles autorités de la communauté locale 15 . Ces acteurs,outre le fait d’être plus proches de la communauté localeet de l’environnement, pourraient offrir des solutionsplus efficaces selon les besoins de chaque unitéscolaire et de son milieu social, économique et naturel12 Ibid.13 Ministère de l’Éducation et de la culture, Study Programmefor Environmental Education and Education for SustainableDevelopment, (2009), .14 Mavroudi, E., entretien avec Zachariou Aravella, op. cit.,(2009).15 Mpakas, T., “Organization and Management of theEducational System: The peripheral level of EducationLeadership - Weaknesses, Challenges and Potentials”, dansPrimary Education and the Challenges of our Era, séminairetenu à Loannina, Grèce, mai 2007.plus large 16 . Le ministre de l’Éducation et de la culturepeut continuer à proposer les objectifs et les buts nationauxau niveau général mais il peut également créerun réseau d’acteurs locaux qui puissent développerdes pratiques valables et efficaces intégrant les besoinsdes communautés dans un cadre plus holistiquepour le développement durable.Le développement des stratégiesAprès un an de discussion au niveau national entre lesacteurs du gouvernement, le Conseil des ministresa ratifié récemment la Stratégie nationale révisée dedéveloppement durable (2011-2015). Cette nouvelleStratégie a été présentée comme étant un progrèsvis-à-vis de la précédente, qui avait couvert la période2006-2010. En réalité, malgré l’introduction de nouveauxéléments dans des domaines tels que les ressourcesnaturelles, l’énergie, le transport durable et letourisme durable, la stratégie pour l’éducation est lamême que celle établie dans la Stratégie de 2007 pourl’éducation environnementale et l’Éducation pour ledéveloppement durable. Les faiblesses de ce document,à savoir un accent exagéré sur l’environnementau détriment d’autres aspects du développementdurable et l’absence de toute référence au rôle desacteurs non gouvernementaux, ont été incorporéesà la Stratégie nationale révisée de développementdurable 17 , conduisant ainsi à des inefficacités et àdes confusions qui rendent difficile la promotion dudéveloppement durable. Ces inefficacités semblentêtre liées aux processus de prise de décisions et demise en place de politiques du Gouvernement. Lesministères et les services publics qui travaillent dansles différents secteurs fixent leurs propres priorités etsuivent leurs propres stratégies, raison pour laquelle ilmanque souvent un cadre national général englobanttous les acteurs pertinents 18 . Les futures politiquesseraient plus efficaces si le Gouvernement établissaitdes mécanismes pour aligner tous les intéressés dansune stratégie commune ayant un véritable impact àtous les niveaux de la société.L’intégration de la société civile : un facteur cléLes avantages potentiels d’une implication des organisationsnon gouvernementales dans l’éducationpour le développement durable apparaissentavec évidence à travers l’évolution des Centres pourl’éducation environnementale de l’Institut pédagogiquede Chypre (Ministère de l’Éducation et de laculture). Une initiative privée est à l’origine du premiercentre, établi dans un petit village du sud-ouestde Chypre dans la décennie 1990 et qui a connu ungrand succès en ce qui concerne la recherche et ledéveloppement de pratiques et d’outils pour l’édu-16 Bass, S., Dalal-Clayton, B. et al., “Participation in Strategiesfor Sustainable Development”, Environmental PlanningIssues, International Institute for Environment andDevelopment, (Londres : 2005).17 Ministère de l’Agriculture, des ressources naturelles et del’environnement, Revised National Strategy for SustainableDevelopment, (2010). .18 Cyprus Research Promotion Foundation, Linking Scienceand Policy in Sustainable Development Research, (Limassol,Chypre : 2009). .cation environnementale. Malgré cela, ce n’est qu’en2004 que les autorités de l’État ont établi le premierCentre pour l’Éducation environnementale 19 . Denos jours, ces centres sont déjà considérés commedes pionniers de la promotion de la recherche etdu développement dans le domaine de l’éducationenvironnementale. Les progrès réalisés jusqu’à présenttémoigne des possibilités et des opportunitésque présente l’intégration des acteurs de la sociétécivile dans l’éducation formelle et informelle pour ledéveloppement durable.Si la Stratégie nationale révisée de développementdurable offre des lignes directrices pour l’intégrationde la société civile dans le processus généralde prise de décisions et le processus de préparationdes Stratégies et Plans de développement durable aété assez efficace, la mise en place et les effets surles citoyens et sur la société ont connu moins desuccès. 20 Afin de promouvoir et de mettre en placeun cadre plus holistique pour le développement durable,le Gouvernement devrait intensifier ses effortspour tirer profit de l’énorme vivier de connaissances,d’expérience, d’expertise et de mécanismes des organisationsde la société civile.PerspectivesDepuis 2005, lorsque la Stratégie d’éducation pourle développement durable a été ratifiée, Chypre afait de grands progrès dans son effort pour changerla perspective de l’éducation et l’orienter vers unsens plus holistique. Le pays a transformé plusieursunités scolaires en « écoles durables », a appliquéles bonnes pratiques pertinentes et a fourni de la formationaux instituteurs et à d’autres fonctionnaires.Cependant, pour que le cadre de développementdurable soit pleinement adopté il faut que le Gouvernementréussisse à faire participer activement lesacteurs locaux au processus de prise de décisionset aussi à la mise en place de stratégies éducatives.Pour avoir du succès dans la pratique, le « développementdurable » doit être étroitement associé à lacommunauté locale et aux acteurs sociaux 21 . Ces acteursnon gouvernementaux ont une capacité uniquepour proposer, développer et appliquer des pratiqueséducatives efficaces pour le développement durablequi correspondent aux besoins de leurs communautés.En outre, les citoyens sont davantage disposésà adopter des politiques et des pratiques dedéveloppement durable provenant des acteurs deleur propre communauté, comme ceux des écolesdurables locales 22 . D’ailleurs, l’intégration d’acteursnon gouvernementaux dans le processus de prise dedécisions donnerait une perspective pluridimensionnelleau développement durable, qui n’est pas encoreprésente dans le système éducatif général. n19 Zachariou, A., “Centres of Environmental Education andEducation for Sustainable Development: A Report on theNetwork of the Centres of Environmental Education inCyprus”, 4 th KEEPE, (Nafplio, Grèce : décembre 2008).20 Mavroudi, E., entretien avec le Dr. Zachariou Aravella, op. cit.,(2009).21 Uphoff, N., Local Institutions and Participation forSustainable Development, IIED, Gatekeeper Series, no. 3,(Londres : 1992).22 Ibid.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>95 Chypre


COLOMBIEL’extractivisme contre le bien-êtreLa planification économique promue par le président Juan Manuel Santos, qui ne remet pas en cause lemodèle extractiviste appliqué par la précédente administration d’Alvaro Uribe, constitue un choix erroné. Lamondialisation axée sur la libéralisation économique, la mobilité des capitaux sans contrôles efficaces, laperte d’autonomie politique, les programmes d’ajustement structurel de l’État et l’augmentation des dépensesmilitaires sous le prétexte d’un conflit armé interne font obstacle au développement. Le bien-être de lapopulation et de l’environnement sont en danger. La production de biocarburants a aggravé l’économie rurale,déplacé des populations entières et détruit les écosystèmes naturels.Corporación Cactus,Coordinación Nacionalde la Plataforma Colombiana de Derechos Humanos,Democracia y DesarrolloAura RodríguezIndice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9410084Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleIndice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 64100L'autonomisationAprès son élection en 2010, le nouveau présidentJuan Manuel Santos, qui avait été ministre de laDéfense pendant le Gouvernement d’Alvaro Uribe(2002-2010) a établi comme l’un des piliers de sonadministration « la durabilité environnementaleet la gestion des risques » 1 et un Plan national dedéveloppement. Le document officiel du plan établitune relation directe entre l’augmentation de lapauvreté et la dégradation environnementale, raisonpour laquelle il faut mettre en œuvre deux stratégiescommunes pour surmonter ces phénomènes : enpremier lieu, une politique économique axée sur lagénération de revenus et une augmentation de laproduction et ensuite, la conservation et la protectionde la biodiversité et des services écosystémiques quicontribuent au bien-être humain 2 .Concrètement, le Gouvernement estime quele secteur minier et énergétique et la production etle transport de l’électricité vont augmenter de 588%, les réserves permanentes d’hydrocarbures de335 %, la production de pétrole et de gaz de 79 %, laconstruction de pipelines et d’oléoducs de 78 %, laproduction de charbon de 70 % et la production d’orde 51 %. La première stratégie suppose que le paysse développera dans un futur proche de 1,7 point depourcentage par an, ce qui permettrait de réduirela pauvreté de 1,2 % et l’indigence de 1,0 %. À cetégard, nous devons nous rappeler que, si l’Amériquelatine est la région la plus inégalitaire au monde dansla distribution de la richesse, la Colombie est en têteen ce qui concerne l’inégalité dans la région 3 . Alorsque 50 % de la population la plus pauvre ne reçoitque 13,8 % des revenus, les 10 % les plus riches ontun revenu équivalent à 46,5 % du total 4 .1 Gouvernement de Colombie, Plan Nacional de Desarrollo2010-2014, Prosperidad para todos, p. 4202 Ibid, p. 4233 Bureau du Haut commissariat des Nations unies aux droitsde l’homme en Colombie, Informe sobre Colombia, A/HRC/16/22, (février 2011), párr. 99.4 Ricardo Bonilla et Iván Jorge (coordinadores), Bien-estary macroeconomía 2002-2006: el crecimiento inequitativono es sostenible, (Bogota, CID, Université nationale deColombie, Inspection générale de la République, 2006),pages 23 et ss.100 100100 71 10096 98 99Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialiséSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansÉducationActivité économiqueLa deuxième stratégie, de la conservation etde protection de la diversité, est basée sur la nécessitéd’intégrer les considérations environnementalesdans les processus de planification territoriale et degestion des politiques sectorielles. L’objectif fixé parle Gouvernement à cet égard est de réduire l’empreinteécologique de 1,9 hag / hab. Cette unité faitréférence à la demande humaine en ressources parrapport à la capacité de régénération de l’écosystème.Une empreinte de 1,9 hag / habitant signifieque la Colombie exploite son écosystème 1,9 foisplus vite que sa capacité à se renouveler, alors quel’indice de développement humain durable est de1,8 5 . La politique environnementale contient aussideux activités présentant un intérêt particulier pouraugmenter la croissance économique et, en parallèleet selon le plan officiel, pour améliorer les conditionsde l’environnement : une augmentation de la productionde biocarburants et des usages alternatifsdu charbon 6 .La base ne change pasLe changement de Gouvernement a plongé le paysdans une situation confuse. Dans certaines affaires(comme la relation avec le pouvoir judiciaire oul’opposition), le président Santos a marqué une distancepar rapport à son prédécesseur. En matière depolitique économique, cependant, comme pour lespolitiques de développement de l’environnement, lesdirectives de l’un comme de l’autre mandat, malgréles bonnes intentions annoncées, semblent être lesmêmes.5 Ibid, p. 4246 Ibid, p. 46300Pendant les deux périodes du Gouvernementd’Alvaro Uribe, selon la Mission pour la jonctiondes séries de l’emploi, la pauvreté et l’inégalité (ME-SEP, selon le sigle en espagnol pour Misión para elEmpalme de las Series de Empleo, Pobreza y Desigualdad),le chiffre correspondant à l’inégalité enColombie, mesuré avec le coefficient de Gini, étaitidentique à celui enregistré en 2002 (0,59) 7 . Le faitque cette inégalité soit au même niveau qu’en 2002révèle l’inefficacité des programmes Gouvernementauxmis en œuvre jusqu’à ce jour – et pourtant reprispar l’administration actuelle 8 .De même, l’un des piliers de la croissanceéconomique au cours des deux mandats d’AlvaroUribe, toujours en vigueur sous celui de Juan ManuelSantos, est l’augmentation de l’exploitation minière.Au cours de la décennie actuelle, les activités d’extractionminière se sont étendues au détriment de laproduction agricole. Avant 2001, par exemple, 80 à100 titres miniers avaient été octroyés par an, maisdepuis, plus de 400 titres en moyenne ont été émis 9 .Le renforcement de l’activité d’extraction au détrimentde la production, les changements drastiquesexercés sur le sol en raison des activités minières etla réduction du soutien à la production des petites7 Département national de planification, Misión para elEmpalme de las Series de Empleo, Pobreza y Desigualdad(MESEP) entrega series actualizadas al Gobierno Nacional,(24 août 2009), .8 Journal El Universal, Familias en Acción va a seguir y se va afortalecer, (Popayán, 5 mars 2011), .9 Houghton, Juan (éditeur), La tierra contra la muerte.Conflictos territori‘“ales en los pueblos indígenas, (Bogota,Centro de Cooperación al Indígena, 2008).21Rapports nationaux 96 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


exploitations agricoles sont les trois séquences d’unmême processus compromettant gravement les petitsproducteurs ruraux.Les biocombustiblesIl est inquiétant également que le chapitre sur l’environnementet le développement durable du Plannational de développement mette en relation laconservation et la protection avec l’expansion desbiocarburants. Ces dernières années, le soutien duGouvernement aux activités de monocultures industrielless’est accru au détriment de l’agricultureà petite échelle 10 , provoquant le déplacement de populationsentières.Les biocarburants ont été proposés par laBanque interaméricaine de développement commeune option d’énergie « propre », soi-disant sansconséquences négatives sur le plan environnemental11 . Dans le même temps, ils étaient présentéscomme la meilleure option productive pour lespays en développement, accompagnés d’une sériede stratégies commerciales en provenance deWashington, qui a vu la possibilité d’acheter desbiocarburants à faible coût aux pays d’Amériquelatine, un moyen pour résoudre certains de ses problèmesd’énergie sans avoir à détourner une partiede sa production alimentaire vers la production debiocarburants 12 .Entre octobre 2005 et mars 2006, cinq usinesd’éthanol se sont mises en marche en Colombie(Ingenio del Cauca, Providencia et Risaralda, ArdilaLulle ainsi que Mayaguez et Manuelita), produisant1,05 million de litres d’éthanol par jour qui alimentent60 % du marché national. Et les conséquencesnégatives ont été observables immédiatement.Pour commencer, la production de biocarburantsrequiert des monocultures à grande échelle desucre, maïs, palme à huile ou de soja et cette pratiqueproductive érode les sols et épuise les nutriments13 . En outre, les ressources hydriques sontcompromises en raison de la pollution produite parles procédés d’extraction et de raffinage, et l’étenduedes terres arables consacrées à la productionalimentaire diminue, entraînant l’augmentation duprix des aliments mais pire encore, entraînant l’aggravationdes carences nutritionnelles des secteursles plus pauvres de la société 14 .L’utilisation du soja et du maïs pour la productionde biocarburants, par exemple, affecte le prix deces produits sur le marché alimentaire. L’impulsiondonnée par les États-Unis à l’utilisation de l’éthanola provoqué des pics historiques du prix du maïs . En2007, l’International Food Policy Research Institute(IFPRI) a présenté un rapport contenant les possiblesrépercutions internationales de la croissancede la demande en biocarburants. Le prix du maïs, parexemple, pourrait augmenter de 41 % en 2020 et lesoja et le tournesol pourraient subir une hausse de76 % cette même année, tandis que le blé pourraitaugmenter de 30 % 15 .Aussi, parmi les nombreuses possibilitésd’utilisation de la biomasse, les biocarburantsconstituent l’une d’entre elles les moins attractivesen termes d’émissions de gaz à effet de serre. Bienque les émissions de CO 2soient réduites de manièresignificative grâce à l’utilisation des biocarburants,cela n’est pas le cas pour d’autres gaz à effet de serre,en particulier le méthane et ceux qui contiennentde l’azote et du soufre (NOx et SOx) 16 . Il est inutilede mentionner que, puisque la culture du palmier àhuile est de rendement tardif, le retour sur l’investissementinitial ne se produit qu’après cinq ans deplantation, n’offrant de rentabilité que dans le cas oùles unités de production sont supérieures à 50 ha ;par conséquence, ces cultures ne peuvent appartenirqu’à des grands et moyens propriétaires.La discrimination à l’encontredes AfrodescendantsEn outre, l’expansion des biocarburants a égalementaffecté gravement la population afrodescendante.Dans plusieurs cas, il a été possible de corroborerle fait que ces communautés ont été illégalementexpropriées par les entrepreneurs liés aux biocarburantset qui sont en contact avec des groupesparamilitaires. Dans des endroits comme Curba-radó, où il existe une grande majorité de personnesd’origine africaine, les peuples afros ont perdu 29000 hectares en raison des actions paramilitaires.Aujourd’hui, 7000 de ces hectares expropriées sontplantées de palmiers à huile 17 .La discrimination envers les Afrodescendantsconstitue un problème de longue date en Colombie.Ces communautés qui représentent 26 % de la populationdu pays, ont des conditions de vie considérablementinférieures à celles des autres Colombiens.Par exemple, 79 % des municipalités possédant unemajorité de descendants africains sont situées dansla plus faible frange de développement économiqueet social, avec près de 85 % de sa population vivanten situation de pauvreté, tandis que dans lesautres municipalités, cet indicateur ne dépasse pas38 %. De fait, on estime que 72 % de la populationafrodescendante appartient aux plus basses couchessocio-économiques de Colombie 18 , subissant untaux de mortalité infantile deux fois plus élevé quecelui enregistré au niveau national. Par ailleurs, lesAfrodescendants ont un accès restreint aux servicesde base comme l’éducation et la santé, ils se voientégalement refuser les meilleurs emplois et une possibilitéde participation à la vie publique 19 . Un rapportde la Commission interaméricaine des droits del’homme (CIDH) présenté en mai 2009, a critiqué lemanque d’éclaircissement judiciaire dans la majoritédes cas de violence commis contre de nombreuxAfrodescendants et ayant causé leur déplacement,alors que certains efforts du Gouvernement pouraméliorer cette situation ont été soulignés.Récemment quelques progrès à cet égard ontété observés. En mars 2011, par exemple, plus de25 000 hectares ont été restituées aux communautésde descendance africaine du bassin de Curvaradó etJiguamiandó, dans le nord-est. Ces terres avaient étéexpropriées pour la production de biocarburants parl’organisation paramilitaire Autodéfenses Unies deColombie, qui a été dissoute en 2006. Cette restitutionfait partie d’un programme de l’administration Santospour la restitution d’environ 2,5 millions d’hectaresexpropriées par les organisations paramilitaires 20 . n10 Journal El tiempo, “Ley para sufrir menos por el dólar”,(vendredi 24 juillet 2009), pag. 1-8.11 Álvarez Roa, Paula, “La política del Gobierno colombianoen la promoción de biocombustibles”, (2008),12 Valencia, Mario Alejandro, Los biocombustibles enColombia: El modelo de Robin Hood al revés y los precios delos alimentos, (2008), 13 Ecoclimático, “El monocultivo y sus consecuencias”,(novembre 2008), 14 Mouvement mondial pour les forêts tropicales,Biocombustibles, un desastre en potencia, 15 Greenpeace, Biocombustibles, 16 Ibid.17 Magazine Semana, “Los usurpados del Choco”, (RevistaSemana nº 1402, 16 au 23 mars 2009), pag 49.18 Romaña, Geiler, Afrocolombianos en busca de leyes contrael racismo y la desigualdad, (novembre 2005), 19 Globedia, Padece población afrodescendiente de Colombiamarginación, (15 mai 2009), 20 Vanguardia.com, Restituyen más de 25 mil hectáreasa colombianos afrodescendientes, (19 mars 2009),< www.vanguardia.com/actualidad/colombia/97218-restituyen-mas-de-25-mil-hectareas-a-colombianosafrodescendientes><strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>97Colombie


CROATIESociété civile : la seule défenseure de l’intérêt publicLa crise a durement touché l’économie croate. Alors que les taux de pauvreté et de chômage augmentent, leGouvernement continue à favoriser des approches non durables de développement. Les autorités semblentservir uniquement le secteur privé ; le bien-être des personnes n’est défendu que par des organisations dela société civile, comme l’a montré une campagne couronnée de succès contre l’extension d’un oléoduc versl’Adriatique. La Stratégie de développement durable du Gouvernement n’est pas adaptée et la législation encours concernant les terres, les eaux et les forêts est erronée et manque totalement de transparence. Le paysdoit embrasser la cause du développement durable.Croatian Law CentreInge Perko-Šeparović, Ph.D.Eko KvarnerVjeran PiršićLa crise économique mondiale de 2008 a eu un impactprofond et négatif sur l’économie croate. La croissances’est réduite de 2,4 % en 2008 à - 5,8 % en2009 et à - 1,4 % en 2010 1 . Dans le même temps, leservice de la dette externe avait atteint presque 100 %du PIB en 2010, venant ainsi aggraver la crise et limitersévèrement l’accès permanent au crédit externe 2 .L’un des principaux impacts négatifs de la crises’est manifesté par l’augmentation du chômage.Entre 2005 et 2008 la croissance économique a permisde créer un certain nombre d’emplois mais lacrise a bouleversé cette situation : en 2010 le taux dechômage (mesuré sur le pourcentage de la populationtotale) a été d’environ 17,6 % 3 .Les taux de pauvreté ont également augmenté.Entre 2005 et 2008 la pauvreté était surtout liée auchômage à long terme concentré majoritairementchez les travailleurs peu qualifiés, et à l’inactivité.Avec la crise, les choses ont changé. Certes, la réductionde l’emploi, la diminution des revenus réels et legel des salaires dans le secteur public ont fait basculerbon nombre de personnes en dessous du seuilde pauvreté. Résultat : les pauvres « émergents »reçoivent une meilleure éducation, ils sont jeunes etéconomiquement actifs.La défense de l’environnementLes intérêts publics et privés se heurtent continuellementen Croatie. L’intérêt public est défendu exclusivementpar la société civile alors que les élitespolitiques servent souvent exclusivement les intérêtsprivés. En 2009, le Parlement a approuvé la « Stratégiede développement durable de la République de Croatie», celle-ci ayant établi une série de lignes directriceset de politiques en matière de développement durableet ayant aussi fait mention de la situation environ-1 Countries of the World, Croatia Economy 2011, disponiblesur : .2 US Department of State, “Background Note: Croatia,” (6 avril2011), disponible sur : .3 Index Mundi, Croatia unemployment rate, disponible sur :.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9899+100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansnementale du pays 4 . Toutefois, cette stratégie a étéfortement critiquée par plusieurs organisations de lasociété civile qui ont signalé qu’elle n’établissait pasd’objectifs prioritaires et ne comportait aucun pointde référence ni d’indicateur de progrès.La crise a donné lieu à ce qu’on a dénommé la« faim d’investissement », une tactique sur laquellele Gouvernement s’est aligné en s’associant à desinvestisseurs privés et étrangers, au détriment dela communauté dans son ensemble. Les capitauxainsi attirés ne représentent pas une source viablede développement car ils dépendent de régulationsminimales de travail et environnementales et, en général,ils conduisent à la réduction et à la dégradationdes ressources naturelles du pays.Dans ce contexte, les problèmes tendent à s’accumuler.La tendance vers l’usage non durable (etl’abus) des ressources non renouvelables s’aggraveen raison de la mauvaise gestion du Gouvernement 5 .Il est absolument nécessaire d’obtenir un consensusnational sur la gestion des ressources, en particulierpour déterminer quelles sont celles qui doivent ou nedoivent pas être utilisées de manière plus intensiveactuellement sans mettre en danger l’environnementou compromettre les besoins des générations à venir.Questions relatives à la terreLa terre est une des meilleures ressources naturellesdu pays, spécialement sur la côte adriatique. Des stratégiesnationales sur l’usage de la terre ont été ap-4 Consulter : .5 Les coûts et les bénéfices de l’extraction des ressourcesen termes de développement durable et de bien-être descitoyens n’ont pas été évalués.94100 10099+Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 74Éducation100044L'autonomisation100 79 10099Activité économiqueprouvées par le Parlement et menées à bien à traversles services de plan urbain des gouvernements locauxet régionaux. Le contrôle d’élaboration de ces plans etla vérification de leur acceptabilité est du ressort duministère de la Protection, de la planification physiqueet de la construction environnementale mais celui-ciest dépourvu de lignes directrices générales. Celasignifie qu’il n’existe pas d’estimations d’impôts oude mécanismes de régulation qualifiés permettant deprévenir l’usage erroné ou nuisible de la terre.Une analyse indépendante des plans de développementurbain de la côte adriatique a établi queles projets actuels permettent d’héberger 17 millionsd’habitants. La région est habitée actuellement parmoins de deux millions de personnes, et par conséquentl’impact d’une construction massive de nouveauxlogements sera énorme. D’autres recherchesont démontré qu’au cours des 2500 dernières années,seuls 750 km (sur un total de 6.000 km) de la côte Estde la mer Adriatique ont été urbanisés, alors que lesplans actuels des villages et des villes cherchent àurbaniser 600 km de plus. Cela signifie que le mêmeniveau de développement atteint au cours de plus dedeux millénaires et demi pourrait presque être doubléen une décennie. Les terres agricoles sont réquisitionnéeségalement pour la construction, au titre duplan urbain des gouvernements régionaux et locaux.Forêts, eau et biodiversitéL’un des principaux aspects de l’administration forestièreest l’absence d’estimations officielles de labiomasse. Les chiffres varient de manière considérable: de 700 mille tonnes annuelles, selon l’entreprisepublique Hrvatske Šume (Forêts de Croatie) à2 millions de tonnes annuelles, selon la communautéacadémique. Pour sa part, Hrvatske Šume maintientRapports nationaux 98 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


Graphique 1Le chômage en Croatie mesuré comme étant le pourcentage de la forcede travail totale (1991-2010)Pourcentage du total de la force de travail2018161412108642019911992199319941995199619971998un prix élevé du bois mais livre des quantités insuffisantes,sapant ainsi l’industrie locale de traitementdu bois et terminant par engendrer chômage et paupérisation.Le bien commun, qui devrait être le soucimajeur du Gouvernement, est négligé pour favoriserles intérêts privés.Cette image s’assombrit encore davantage sinous nous référons à la gestion de l’eau. La Stratégiede développement durable 2009, par exemple, nedonne pas une définition claire du « droit à l’eau » 6 ,si souvent invoqué. Il y a eu également une série depropositions de privatisation ; la première a échouémais la crainte de la privatisation généralisée desressources hydriques perdure. Quelques ressourcesen eau ont déjà été transférées aux mains du secteurprivé par des contrats de concession qui sont toutsauf transparents.La biodiversité de la Croatie n’est pas protégée,comme on peut le voir par exemple avec l’introductiond’espèces étrangères dans les écosystèmes locaux.Cette situation est particulièrement urgente sur l’île deCres, où 30 sangliers, introduits par des chasseurs, sesont reproduits pour atteindre le nombre de 1000 en10 ans. Les sangliers non seulement nuisent à l’habitatmais ils attaquent les moutons et les agneaux et détruisentles moyens de subsistance des agriculteurs 7 .L’une des principales questions relatives à labiodiversité du pays est le manque d’informationfiable. La Croatie est un des rares pays européens àne pas posséder de listes actualisées des espècesou de guides de campagne spécifiques du pays.Les inventaires des espèces existantes (ainsi que laconnaissance sur la faune et la flore locales) sont in-6 Le droit à l’accès durable à l’eau potable et à l’assainissementde base.7 P. Ettinger, “The birds are on the money in Croatia,” WildlifeExtra, disponible sur : .Taux de chômage19992000Année2001200220032004200520062007200820092010Source: Trading Economics.suffisants au regard de nombreux objectifs, y comprisl’évaluation de l’impact environnemental. Les spécificitésde la faune souterraine sont également trèsrarement connues. Ce manque d’inventaires adéquatset de connaissances limitent, inévitablement, le rayond’action en ce qui concerne l’utilisation de la terre oula planification administrative des écosystèmes nécessairesaux projets de développement.Un autre cas de biodiversité en danger d’extinctionest dû à la production de monocultures,aussi bien en agriculture qu’en sylviculture. De nombreusesespèces endémiques ont disparu du fait deleur remplacement progressif par d’autres espècesétrangères, perçues par les entreprises agrairescomme plus attractives sur le long terme.Contrôles environnementaux mal appliquésLes procédés d’évaluation de l’impact environnementaleffectués pour les nouvelles constructions, demême que les conditions requises pour la délivrancede permis de sécurité pour l’extension des installationsou même pour la permanence du fonctionnementdans les installations déjà existantes, sont censés êtrestrictement régulés par la loi. Malheureusement, latotalité des installations peuvent échapper facilementau système de contrôle de l’État. Pire encore, étantdonné que les installations déjà existantes ne sontpas conformes aux normes de pollution européenne,leurs propriétaires s’octroient des extensions dans lebut d’effectuer des adéquations avec des périodes detransition allant jusqu’à 12 ans.Ces périodes de transition se négocient avecl’UE comme faisant partie des mesures obligatoirespour que la Croatie obtienne son adhésion au sein del’Union européenne ; cependant, il est permis à certainesde ces installations de continuer à fonctionnerjusqu’à la fin de leur cycle de vie. Un autre problèmeprovient de l’utilisation de matières premières dequalité inférieure, spécialement dans les raffineriesde pétrole, entraînant inévitablement une importantepollution atmosphérique dans les zones qui lesentourent. En 2004, le ministère a publié un ordonnanceobligeant les raffineries de pétrole à utiliserdes matières premières de meilleure qualité. Mêmesi cette ordonnance a été soutenue par une décisionde la Cour, elle est peu respectée par les raffineries.Exemples de bonnes pratiquesL’intérêt public n’étant pas protégé par le Gouvernementla plupart du temps, c’est la société civile qui aassumé cette tâche. S’il est vrai que son influence estencore faible, il faut toutefois faire mention de quelquesexemples d’interventions couronnées de succès.L’organisation Eko Kvarne s’est fermement opposéà la proposition d’extension du gazoduc DružbaAdria, le plus long du monde, qui transporte du pétroledepuis l’Est de la Russie vers le Belarus, la RépubliqueTchèque, l’Allemagne, la Hongrie, la Pologne, la Slovaquieet l’Ukraine, à travers la Croatie et la Hongriepour finalement parvenir à la mer Adriatique 8 . Letransfert de pétrole envisagé aurait mis en danger lapartie nord de la mer Adriatique et le bien-être desgens qui vivent dans cette région. Eko Kvarner a faitvaloir suffisamment de doutes sur la validité de l’évaluationde l’impact environnemental 9 pour s’assurerun refus des autorités concernant cette proposition.Le succès le plus récent fait référence à un terrainde golf proposé à Istrie. Deux organisations,Green Action (Action Verte) et Green Istrie (IstrieVerte), ont poursuivi en justice le ministère de laProtection, de la planification physique et de laconstruction environnementale pour avoir délivrédes permis d’extension pour un terrain de golf et cecien dépit d’une évaluation d’impact environnementaledéfavorable. Le Tribunal administratif a, par la suite,annulé les permis.ConclusionLa Croatie a besoin d’adopter d’urgence un modèlede développement durable. Investir davantage etmieux dans des sources d’énergie renouvelablespourrait être un bon début. Il est important deconstruire des installations touristiques environnementalesaccueillantes car le tourisme joue unrôle important dans l’économie croate et, en mêmetemps, il n’est pas viable sans un environnementpréservé et protégé. La politique officielle est censéepromouvoir la protection de l’environnement maisen réalité les intérêts économiques se voient favorisésau détriment des intérêts environnementaux etdurables. Il est nécessaire d’encourager les gouvernementslocaux à développer leurs propres projetsafin de promouvoir la durabilité et la protection del’environnement dans leur juridiction 10 . n8 Wikipedia, Druzhba pipeline, disponible sur : .9 OneWorldSEE, Eko Kvaner Announces Public Debate ofthe ‘Družba Adria’ Project, (16 avril 2004), disponible sur :.10 Jelena Lončar and Mladen Maradin, Environmentalchallenges for sustainable development in the Croatiannorth Adriatic littoral region, (Croatia: 2009), disponiblesur: .<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>99Croatie


EL SALVADORIl est temps de mettre en œuvre des stratégies environnementalesLe pays fait face à des défis environnementaux importants qui reçoivent toute l’attention du Gouvernement. Afind’assurer la durabilité environnementale, le Gouvernement doit faire approuver et établir plusieurs normes quiont fait l’objet de débats ces dernières années ; il doit aussi une fois pour toutes signer les accords internationauxen matière de protection de l’environnement. Les négociations autour du changement climatique qui se sonttenues à Durban peuvent représenter une chance unique de développement d’une stratégie nationale assurantla planification à long terme et œuvrant pour le bien-être des générations futures.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> El SalvadorSusana BarreraMagdalena CortezScarlett CortezAna María GaldámezOmar GarcíaMario PaniaguaIndice des Capacités de Base (ICB)ICB = 91Indice d'Equité de Genre (IEG)100Enfants atteignantIEG = 6210079 la cinquième annéed’école34L'autonomisationLe Salvador détient une immense richesse entermes de biodiversité. Si ces ressources étaientbien gérées elles pourraient bénéficier à l’ensemblede la population et elles permettraient deremédier à la pauvreté. À l’heure actuelle néanmoins,les ressources ne sont pas correctementgérées, le fort potentiel du pays fait donc l’objetd’un gaspillage.Une part importante de la population vivanten milieu rural vit sous le seuil de pauvreté, sesmoyens de subsistance dépendent de l’exploitationdes ressources naturelles. Le Gouvernementn’a pas de politique claire pouvant servir de guidetout en fournissant une assistance technique etfinancière aux établissements ruraux qui, pourmaintenir la tête hors de l’eau, ont contribué à uneaccélération de la déforestation, de la destructiondes sols et des ressources hydriques. Du pointde vue historique, l’absence, au niveau national,d’une politique environnementale a conduit au déversementirresponsable d’ordures, à la pollutiondes eaux et à la détérioration atmosphérique enraison de l’abondance de véhicules. Les grandesindustries et les exploitations agricoles ont égalementgénéré de la pollution dans différents espacesnaturels, aucun traitement adapté n’a étémis en œuvre pour faire face à l’afflux de déchetssolides ou liquides.L’environnement et les Objectifs du Millénairepour le DéveloppementD’après le Programme des Nations Unies pour leDéveloppement (PNUD), les projections pour lerespect des Objectifs du Millénaire pour le Développement(OMD) concernant le Salvador sont encourageantes.Par exemple, l’objectif de réductionde la pauvreté (OMD1) a été atteint ; il en est demême pour l’objectif qui concerne l’accès à l’assainissement(OMD7), certains indicateurs montrentque le pays est très près d’atteindre l’objectif d’accèsà l’eau potable (OMD7). Par rapport aux autresobjectifs, le Salvador est plus éloigné des objectifsAccouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0 0100 10084proposés mais, comme cela a été signalé, il s’inscritdans une trajectoire favorable 1 .Il convient de signaler que les objectifs concernéspar l’OMD 7 qui sont tout près d’être atteintsseraient :• Incorporer les principes du développement durableaux politiques et programmes nationaux etinverser la perte de ressources naturelles ;• Réduire les pertes de biodiversité en atteignantpour 2010 une diminution significative du tauxde perte ;• Réduire de moitié pour l’année 2015 le taux depersonnes n’ayant pas accès à l’eau potable et àl'assainissement ;• Avoir considérablement amélioré, pour 2020,la vie d’au moins 1 million de personnes vivantdans des logements précaires 2 .Le rapport présenté par le PNUD fait état que lesobjectifs visant à inverser la perte de ressources environnementaleset à diminuer de moitié le taux depersonnes n’ayant pas accès à l’eau et à l’assainissementont été remplis 3 .Concernant la diminution de la consommationde substances nuisibles pour la couche d’ozone, enparticulier les chlorofluorocarbones (CFC), le défi1 Programme des Nations Unies pour le Développement(PNUD), “Progression vers les OMD au Salvador”, dansObjectifs du Millénaire pour le Développement, .2 PNUD, Deuxième rapport Objectifs du Millénaire pour leDéveloppement, El Salvador, (2009), p. 39. Aussi : .3 Ibid.55100 10098 98Survivance jusqu’àl’âge de 5 ansÉducationActivité économiqueintégré au septième objectif (« Garantir la durabilitéenvironnementale ». 4 ), le progrès atteint est dû aufait que le pays a appliqué les engagements pris lorsdu Protocole de Montréal. Ceci a permis de réduireà 50% ces émanations en 2005, à 85% en 2007 etde viser une diminution de 100% pour le 1 er janvier2010 5 .Concernant les défis concernant l’accès à l’eaupotable et à l’assainissement, le panorama varie enfonction du critère utilisé pour l’évaluation du degréd’avancement. La part de la population ayant accèsà des sources améliorées d’approvisionnementen eau, selon le critère traditionnel (qui considèrecomme sources d’eau améliorée l’eau transitantdans des canalisations, les sources publiques, lespuits de forage ou par pompage, les puits protégés,les sources protégées et l’eau de pluie), est passéede 63,3 % (1991) à 83.9 % (2000) et finalementà 86,9 % (2007). Néanmoins, si la norme est plusstricte et que l’on prend en ligne de compte l’accèsaux sources d’eau améliorées par domicile, les donnéessont moins encourageantes car on part de 42,2% en 1991 pour arriver à 67,5 % en 2007 6 .Un autre objectif à atteindre consiste à diminueret arrêter la dégradation environnementale. Parrapport à cet objectif, proposé pour être atteint en2010, aucun rapport d’accomplissement n’a été publié.Néanmoins, le besoin de prendre en compte ladétérioration environnementale est de plus en pluspalpable.4 .5 PNUD, Deuxième rapport Objectifs du Millénaire pour leDéveloppement, El Salvador, (2009), p. 39.6 Ibid.Rapports nationaux 100 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


Un pas en avantUn important pas en avant s’est produit en mars2011 avec l’approbation de la loi sur l’Aménagementdu Territoire 7 . Cette norme est très importantelorsqu’on parle d’aménagement du développementdémesuré des grandes villes, elle encadre l’utilisationcorrecte des sols et le respect des bassins etespaces boisés encore disponibles.Le pays est également doté d’une Loi sur l’Environnementet d’un ensemble de Lois spéciales desoutien, entre autres la loi sur les espaces naturelsprotégés, la loi forestière et la loi de préservation de lavie forestière. Par ailleurs, le pays a souscrit le protocolede Montréal en assumant ainsi un engagementenvers la manipulation des matières dangereusesqui soit conforme aux normes internationales.Dans tous les cas, même si dans la pratique lebudget n’est pas encore bouclé pour que ces loisdonnent des résultats concrets, la concrétisationd’un cadre de régulation doit être considérée commeune avancée importante.Impact du changement climatiqueMalgré ces avancées, la question du développementdurable au Salvador doit comprendre, dès la définitionterminologique, un pari important pour la planificationà long terme. Dans ce sens, les scénariosd’avenir pour le pays et la région doivent prendreen considération le défi du changement climatique.Celui-ci représente une série de menaces pourles sociétés d’Amérique centrale de par la multitudedes impacts prévus sur la production, l’infrastructure,les moyens de subsistance, la santé, la sécuritéet l’affaiblissement de la capacité environnementaleà fournir les ressources et services vitaux.Concernant les ressources hydriques, parexemple, l’Amérique centrale est une région privilégiéequant à la disponibilité en eau mais sa répartition d’unpays à l’autre, d’une région à l’autre, entre les versantsorientés vers le Pacifique et ceux orientés vers l’Atlantiqueest très inégale, et on relève de fortes variationsintra et interannuelles. Si l’on prend en considération lesprojections du changement climatique sur l’utilisation,la demande en eau pourrait augmenter de 20 % dansun scénario où on prévoit dans un avenir proche detrouver des solutions locales par rapport à la gestionsous l’angle de la durabilité économique, sociale et environnementale,ce taux pourrait être porté à 24 % dansdes scénarios moins soucieux de l’écosystème 8 .Dans ce scénario, le pays serait particulièrementtouché. Il serait en effet le plus touché de larégion suivi par le Honduras et le Nicaragua 9 . Lesniveaux atteints par la demande sont supérieursau seuil de 20 % accepté à l’échelon internationalcomme seuil critique pour le stress hydrique, ce tauxest comparable à celui de pays tels que l’Égypte etcertains pays arabes 10 .Concernant le secteur de l’agriculture et de lapêche, même si certaines lignes de recherche sontparvenues à la conclusion que les effets contrairessont principalement liés à l’augmentation des concentrationsen CO2, aux changements de température, àla variabilité des modèles de précipitation et à la disponibilitéen ressources hydriques (lesquelles, commenous l’avons signalé, seraient fortement engagées), ila été suggéré que les cultures montrent des résultatsen fonction d’autres variables comme par exempleleur limite particulière de tolérance et de résistance.En guise de conclusionPour parvenir à une durabilité environnementale, lepays doit s’engager dans le cadre des traités internationauxsur l’environnement afin que ces accordspermettent de prendre les mesures de réduction desactivités portant préjudice à l’environnement. Il estde toute façon nécessaire que soit approuvées etexécutées des politiques nationales qui instaurentdes lignes d’action pour un franc respect de la viehumaine et des êtres vivants.Le Salvador a à l’heure actuelle une chanceunique à saisir pour aller de l’avant en ce quiconcerne ces défis, il devra conduire le groupe depays de toute la région lors des négociations sur lechangement climatique qui se tiendront à Durbanen 2011. À ce sujet, il convient de souligner que leministère de l’Environnement et des Ressourcesnaturelles élabore un processus de consultation etde coordination pour mettre au point une stratégienationale face au changement climatique, effort quion l’espère, participera à l’obtention d’une postureferme lors des négociations de Durban.Sont également indispensable la confiance etl’aide à l’élaboration de nouvelles politiques commepar exemple la « politique nationale des ressourceshydriques au Salvador » du ministère de l’Environnementet des Ressources naturelles (MARN) quicherche à assurer pour les générations présenteset futures une disponibilité en eau dans toutes sesexpressions et pour tous les usages. n7 El Salvador Noticias, El salvador con nueva ley deordenamiento territorial (Le Salvador avec une nouvelleloi d’aménagement du territoire), (12 mars 2011), .8 Commission Économique pour l’Amérique latine et lesCaraïbes (CEPAL) L’économie du changement climatique enAmérique centrale, (2010).9 Ibid.10 Ibid.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 101 El Salvador


ÉQUATEURExploitation minière à grande échelle : développementnon durable encore et toujoursL’entrée en vigueur de la Constitution de l’Équateur en octobre 2008 pose de nouveaux défis à l’État, car il adésormais l’obligation et le devoir suprême de respecter et de garantir l’exercice des droits humains reconnusconstitutionnellement. En plus des droits humains individuels et collectifs, elle reconnaît un nouveau sujetaux droits : la Nature ou Pachamama. Ce geste prometteur ne reflète cependant pas toute la réalité du modèleextractiviste équatorien.Francisco HurtadoCentro de Derechos Económicos y <strong>Social</strong>esL’Art. 71 de la nouvelle Constitution équatorienne reconnaîtà la Nature le droit à ce « que l’on respecteintégralement son existence ainsi que le maintien et larégénération de ses cycles vitaux, de sa structure, deses fonctions et de ses processus évolutifs » 1 , et ellelégitime la possibilité pour les personnes, les communautés,les peuples et les nationalités d’en exigerle respect aux autorités publiques. Par conséquent,l’État est obligé de garantir ces droits, d’en éviter la violation,et il est aussi responsable de la restauration desécosystèmes, indépendamment du droit qui garantitaux personnes, individuellement et collectivement,la réparation en cas de violation des droits humains.Ainsi, le concept même de la reconnaissancedu droit humain à vivre dans un environnement sainet écologiquement équilibré, et celui de gérer cetenvironnement en se fondant sur le principe du développementdurable se heurtent parfois, puisque lareconnaissance constitutionnelle des droits de la naturelui accorde des valeurs intrinsèques dépassantles biens et les services qu’elle fournit à l’humanité.Le développement durableL’exploitation des ressources naturelles, en accélérationconstante au cours des XIXe et XXe siècles,a permis de constater l’existence et le dépassementdes limites maximums d’exploitation de certainesressources naturelles, particulièrement les non-renouvelables,et elle a mis en relief les limites physiquesde la planète face à la croissance de la production etde la consommation des sociétés. D’un point de vueécologique, cela implique une dégradation sans cesseaccrue de différents écosystèmes aux quatre coinsdu monde, due au besoin d’appliquer des procédésd’extraction des ressources naturelles de plus en plusintensifs afin d’extraire un maximum. Il s’ensuit d’unepart une série de retombées affectant la dégradationdes sols, la disparition des espèces de la flore et dela faune, la pollution des eaux, des niveaux élevés depolluants atmosphériques, et la déforestation et ladésertification au niveau mondial. D’autre part, un im-1 Constitución Política del Ecuador (Constitution politique del’Équateur), Art. 71.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9080100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 anspact social et culturel s’exerce sur différents peuples etcommunautés dans le monde : l’extinction de peuplesaborigènes en est la preuve la plus dramatique.Au cours des années 70 et 80, le souci pour lapréservation de l’environnement face aux impactsprovoqués par l’activité humaine finit par gagner ledébat politique des organismes internationaux. Uneincorporation lente et graduelle de normes environnementaleseut lieu dans les systèmes juridiques desÉtats, dont le développement de la gestion environnementaleet le droit des hommes à un environnementsain et écologiquement équilibré. Il convient cependantd’analyser de quelle façon ce souci environnementals’inscrit dans le concept du développement.Le droit à un environnement sainet écologiquement équilibréLa naissance du développement durable n’a pas entraînépour autant de critique contre la logique d’accumulationcapitaliste, cause structurelle des impacts environnementaux,ni de revendication du droit à un environnementsain. Au contraire, elle s’est concrétisée parl’apparition de la gestion environnementale (chaquepays s’organisant à sa façon) qui met en place des processusd’évaluation de l’impact environnemental entant que mécanisme destiné à réduire et à éliminer desmoyens de production et de consommation non durables.Elle a même été jusqu’à incorporer l’éventuelleparticipation des citoyens dans cette gestion, à traversdes procédés d’information adéquate sur l’environnement,ainsi que la possibilité et l’opportunité de leurparticipation dans les prises de décision, fondementde ce que l’on appelle aujourd’hui en Équateur le droità la consultation environnementale.82100 10098Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 71Éducation100058L'autonomisation1005710097Activité économiqueOr, cette gestion environnementale ne recherchepas en soi la protection de la nature (des écosystèmeset de la population qui y habite) sous prétexte desvaleurs intrinsèques pour l’existence de la vie, maiselle conforte le discours du développement et parconséquent celui de la croissance économique, encherchant des mécanismes qui permettent d’assurerun usage plus efficace des ressources naturelles àtravers le temps, en encourageant le développementtechnique et scientifique qui, dit-on, permettra de produiredavantage avec moins de ressources naturelles.L’exploitation minière à grande échelleen ÉquateurEn Équateur, l’extraction des ressources naturelles,et plus particulièrement du pétrole, illustre la détériorationaccélérée des écosystèmes et des conditionsde vie des populations qui en subissent l’impact.D’après les données du Système d’Indicateurs sociauxde l’Équateur (SIISE) 2 , la plupart des populationsinstallées aux alentours des champs pétroliersdépasse la moyenne de pauvreté du pays 3 , et subit degraves impacts environnementaux 4 .2 On peut télécharger le SIISE depuis le lien suivant : .3 La moyenne nationale tourne autour de 53%, mais dans lecas de ces localités la moyenne de pauvreté frise 73,09%,sur un ensemble d’environ 200 mille personnes. Pablo Ortiz,“Protestas locales amazónicas y modelo petrolero en Ecuador”(protestations locales amazoniennnes et modèle pétrolier enÉquateur) .4 Esperanza Martínez, “Ecuador: contra la globalización de lastransnacionales” (L’Équateur, contre la mondialisation destransnationales).Rapports nationaux 102 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


Aujourd’hui, le démarrage imminent de la phased’exploitation des projets d’extraction minière métalliqueà grande échelle constitue l’un des processusles plus conflictuels de l’Équateur. Depuis les années90, les différents Gouvernements ont, disent-ils,aménagé les conditions aptes à leur développementen fonction de leur potentiel, afin de générer desressources essentielles pour l’État et de garantir ledéveloppement du pays.Aussi bien le Projet d’aide technique au développementminier et au contrôle environnemental(PRODEMINCA) que l’adoption de la Loi sur l’exploitationminière en 1991, processus parrainéstous deux par la Banque mondiale, ont marqué ledébut de la politique équatorienne du développementprogressif de l’exploitation minière à grande échelleen Équateur, dont le but principal était de créer desconditions favorables aux investissements privés.Depuis lors, plusieurs compagnies transnationalessont devenues concessionnaires de l’État pour lancerdes activités de prospection et d’exploration quiatteignaient 2,8 millions d’hectares en 2007, dont lamoitié correspondait à l’exploitation minière 5 .Il s’est ensuivi une réaction de la part de différentescommunautés paysannes et indigènesdirectement affectées par l’impact socio-environnementalproduit par les entreprises, pollution del’eau et de la terre entre autres, l’accaparement et letrafic des terres, et le contrôle inhérent sur le territoireconcédé. La résistance d’Íntag, dans la provinced’Imbabura, est emblématique : les membres deses communautés agricoles ont empêché dans unpremier temps les travaux de la compagnie japonaiseBishimetals (1997), puis ceux de la compagniecanadienne Ascendant Cooper (2006). Ces actes derésistance, auxquels s’ajoutent ceux qui ont eu lieudans les provinces de Zamora Chinchipe et de MoronaSantiago, ont même mené à l’interruption desactivités de plusieurs entreprises en 2007.Le démarrage de l’exploitation minière àgrande échelle et le processus de résistanceIl y a quelques années, bien que l’Assemblée nationaleconstituante ait publié le Mandat constituantN° 6 qui prévoyait la réversion des concessionsminières à l’État, le Gouvernement national, aprèsl’entrée en vigueur de la Constitution, a lancé unprojet de Loi minière voté par l’Assemblée nationale; il a défini de surcroît cinq projets d’exploitationminière à grande échelle comme étant5 CEDHU - FIDH, Intervención minera a gran escala en Ecuador yvulneración de derechos humanos: Caso Corriente Resources(Intervention minière à grande échelle en Équateur et violationdes droits humains: Cas Corriente Resources) (Ecuador:Comisión Ecuménica de Derechos Humanos y FederaciónInternacional de Derechos Humanos, 2010) 13-15.stratégiques pour la réalisation du Plan nationalpour le développement 6 .À l’heure actuelle, l’Équateur compte déjà sur lePlan national pour le Développement minier 2011–2015 qui prévoit environ 21 dépôts de minerais àgrande échelle dans plusieurs provinces à travers leterritoire. Ce plan décrit la participation de l’État dansles revenus miniers par le biais de droits et d’impôtsque les entreprises privées doivent payer, ainsi queles politiques de gestion environnementale et socialede ce secteur. De plus, l’État a consolidé l’ordonnancementjuridique nécessaire pour le développementde cette activité 7 et il est en train de négocier cinqcontrats d’exploitation minière avec des entreprisestransnationales ; l’une d’elles a déjà reçu l’agrémentenvironnemental pour la phase d’exploitation 8 .De leur côté les communautés indigènes et paysannesdirectement affectées par l’impact poursuiventleur mobilisation et leur résistance permanente,malgré la pression exercée par le Gouvernement nationaldans son discours sur le développement, où ilaccuse les communautés de primitivisme politique etde vouloir empêcher la génération de ressources pourle Budget de l’État, et par conséquent la croissanceéconomique de l’Équateur 9 ; ou encore lorsque celuiciagit à travers des stratégies plus directes commele recours à l’ordonnancement juridique pénal pourporter les conflits devant les tribunaux, poursuivant etcriminalisant la population accusée de commettre desdélits de terrorisme et de sabotage 10 .Un regard alternatif sur le développementLa mise en œuvre des projets d’exploitation minièremétallique à grande échelle en Équateur a provoquéet continuera à provoquer des actes de mobilisationsociale et de résistance face aux impacts réelset potentiels, sociaux et environnementaux, qu’elleimplique. Cette tension entre le Gouvernement et lescommunautés indigènes et paysannes affectées parl’impact vient de la bataille politique sur le modèle dedéveloppement proposé.6 Ministère des Ressources naturelles non renouvelablesde l’Équateur, “Proyectos Mineros Estratégicos” (Projetsminiers stratégiques) .7 Plan Nacional de Desarrollo Minero del Sector Minero 2011-2015 (Plan national de Développement minier du secteurminier 2011-2015) .8 “Ecuacorrientes cerca de obtener permisos ambientales”(Ecuacorrientes près d’obtenir l’agrément environnemental)Journal El Hoy, (6 octobre 2011), section Hoynegocios.9 “Presidente Correa defiende minería responsable” (LePrésident Correa défend l’exploitation minière responsable)Ecuadorinmediato.com, (25 septembre 2009), ..10 Francisco Hurtado, “Análisis sobre la criminalización actualen Ecuador” (Analyse sur la criminalisation actuelle enÉquateur) (Ecuador: Observatorio de Derechos Colectivosdel Centro de Derechos Económicos y <strong>Social</strong>es - CDES yOxfam, 2011).La Constitution Politique de l’Équateur de 2008inclut des dispositions qui méritent d’être analyséesintégralement, au-delà de leur interprétation ou deleur application juridique. Par exemple, garantir lesdroits de la nature en même temps que les droitshumains, individuels ou collectifs, constitue nonseulement un devoir inéluctable de l’État, mais celaoblige également à réfléchir et à forger une réponsealternative au modèle actuel de développement quicontemple l’extraction des ressources naturellescomme une option de croissance économique dela société.Le discours du développement durable ne peutdonc pas être considéré alternatif, et critique moinsencore, car il ne remet pas en question l’idéologiedu progrès. Il se limite à dissimuler sous une façadede préoccupation environnementale la continuité dumodèle capitaliste régnant, pour qui la nature continueà fournir les ressources naturelles, même si l’oncherche, soi disant, grâce aux avancées techniqueset scientifiques à en préserver la jouissance pour lesgénérations futures.De sorte que le démarrage de l’exploitationminière à grande échelle en Équateur réaffirme lediscours sur le développement durable, sa modificationpar rapport au projet néolibéral n’ayant d’autremotif que d’augmenter la participation de l’État dansles revenus qu’elle génère. Par contre, les procédésde cette activité n’ont pas été remis en jeu, carelle a été déléguée à des entreprises transnationalesprivées, responsables globalement des impacts lesplus agressifs envers des écosystèmes variés danslesquels plusieurs communautés recréent leurs vies,communautés qui exigent précisément de passer àde nouvelles alternatives qui garantissent une viedigne aux écosystèmes, aux espèces et aux être vivantsqui y habitent.En définitive, malgré l’image internationale qu’ila bâtie sur les éventuels débouchés post-extractivistes(la reconnaissance constitutionnelle desdroits de la nature et du sumak kawsay en tant qu’alternativesau développement, ou même l’intentionde garder le pétrole sous terre en échange d’unecompensation économique internationale expriméedans la proposition Yasuní-ITT 11 ), le Gouvernementnational insiste pour étendre la frontière extractive,minière dans ce cas précis, dévoilant un renforcementde la dépendance de l’Équateur vis-à-vis del’exploitation des ressources naturelles, et de là unsurcroît de la vulnération des droits humains despopulations affectées par ces activités, sous prétexted’obtenir des revenus pour l’État qui permettent d’atteindrele développement. n11 Voir à ce sujet : ; .<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>103 Équateur


ÉRYTHRÉELa mise en faillite d’un ÉtatPorté aux nues à une époque comme un des États les plus prometteurs d’Afrique, le pays est peu à peu devenu lavictime d’un régime autoritaire et militaire. L’Erythrée a rapidement atteint des niveaux intolérables de répressionpolitique d’où une extrême pauvreté et « l’anomie sociale », un environnement qui empêche de respecter lesengagements en termes de développement durable pris au niveau international, la croissance économique etle progrès. L’obstacle essentiel de la répression politique ne peut être renversé qu’avec l’aide de la pressionextérieure exercée sur le Gouvernement érythréen.Eritrean Movement for Democracyand Human Rights (EMDHR)Daniel R. MekonnenLors d’une conférence universitaire qui s’est tenue ennovembre 2010, le chercheur français Gérard Prunier,spécialiste de la Corne de l’Afrique et de l’Afriquede l’est, a décrit l’Érythrée comme une des « pires etdes plus difficiles dictatures au monde » et « commeun enfer sur Terre » 1 . Ceci ne fut pas une hyperbole.Le Gouvernement a déclaré la guerre à son proprepeuple. La pire manifestation de cette situation estla pratique importante du travail forcé sous couvertdu programme national du service militaire (sigle anglais: NMSP), qui a maintenu des centaines de milliersd’Érythréens sous un joug dictatorial intolérable.Malgré la menace de la crise économique, socialeet politique largement détaillée, le Gouvernement serefuse obstinément à reconnaître la réalité des faits.Bien au contraire, le président Isaias Afwerki a proclaméque le pays était le meilleur d’Afrique. Interrogé par lachaîne Al Jazeera quant à ses aspirations pour l’Érythrée,il a déclaré : « Nous nous efforçons de faire leschoses bien dans ce pays… Du moins, nous n’allonspas ressembler au Kenya, au Nigéria, à l’Éthiopie, à laSomalie ou au Soudan, nous sommes bien meilleurs.Nous sommes le numéro un sur ce continent » 2 . Néanmoins,l’Indice de la faim dans le monde 2010 proposeune vision quelque peu différente, il propose de classerl’Érythrée, avec le Tchad et la République Démocratiquedu Congo comme un des trois pays africains présentantdes niveaux de famine alarmants 3 . Dans ce contexte etau vu d’autres rapports dignes de foi, le commentaired’Afwerki doit être considéré comme un affront à lasouffrance que subit son peuple.Un laboratoire d’expériencescouronnées d’échecsComme nous l’avons déjà dit, la politique excessivedu Gouvernement concernant le service militaireobligatoire est la première cause de fragilité de1 Prunier, G., Eritrea and its Discontents, discours prononcé lorsde la Conférence de l’Association for the Study of the MiddleEast and Africa (ASMEA), (5 novembre 2010).2 Dutton, Jane, “Entretien avec Isaias Afwerki”, Al Jazeera TV,(19 février 2010).3 International Food Policy Research Institute (IFPRI), 2010Global Hunger Index, (2010), .Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 72Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé100Enfants atteignantIEG = 44100la cinquième annéed’école3895Survivance jusqu’àl’âge de 5 ansl’Érythrée. Même si aucun recensement n’a jamaisété organisé dans le pays, la part de la populationobligée de réaliser le service militaire semble êtreexcessivement élevée. Une étude récente a évaluéla population du pays à 3,6 millions d’habitants 4 . En2010, l’armée de l’Érythrée comptait environ 600000 soldats 5 , soit 16,6 % de la population totale. Ceservice militaire obligatoire pose des difficultés auxcitoyens ordinaires lorsqu’ils veulent réaliser leursprojets personnels, même s’ils ne sont pas directementtouchés par les violations abominables faitesaux droits humains et menées par ce Gouvernementtelles que la torture et l’emprisonnement.Depuis l’éclatement du conflit frontalier avecl’Éthiopie en 1998, le Gouvernement a allongé arbitrairementla durée du NMSP de 18 mois à unedurée indéterminée. Avec cette politique abusivetous les adultes, hommes et femmes, sont soumisjusqu’à l’âge de 45 ans à ce qui équivaut à un régimed’esclavage ou de travail forcé, installés dansdes campements militaires et des tranchées situéesà la frontière avec l’Éthiopie, ils travaillent sous unrégime militaire stricte pour des corporations appartenantà l’État ou à des généraux de l’armée.La situation actuelle pourrait être pire. On estimeque plus d’un million d’érythréens vivent en dehorsdu pays – une des communautés ayant la plusforte diaspora au monde. La population nationalepourrait donc être inférieure à 2,6 millions d’habitants.Ceci induirait donc une proportion de la popu-4 Russell, George, “Eritrea to UN: Take This Aid and Shove It, FoxNews, (30 mars 2011).5 Fondation Bertelsmann, Bertelsmann Transformation Index2010: Eritrea Country Report, 2 y 13.Indice d'Equité de Genre (IEG)ÉducationL'autonomisation0 0nd4558100 100100 10030Activité économiquelation intégrée à l’armée avoisinant les 23 %. D’aprèsle Groupe international de crise (sigle anglais : ICG),un groupe spécialisé dans les questions de sécuritédes hommes, la limite supérieure de mobilisation militaireest en principe estimée à 10 % de la populationtotale. Au-delà de ce pourcentage, la société cesse defonctionner normalement 6 .L’académicien Nicole Hirt définit « l’anomie sociale» comme un état où règne le désordre à grandeéchelle et où la désintégration de la société provient del’incapacité d’une grande partie de celle-ci à réaliserses aspirations personnelles 7 . Dans la même lignée,Tricia Redeker Hepner et David O’Kane ont enquêté surcette étrange situation en Érythrée à partir du conceptde biopolitique qu’ils définissent comme « un déploiementdes technologies disciplinaires dirigé par l’Étatenvers les individus et collectifs de populations » 8 .Cette étude signale que l’Érythrée est devenue le dernierlaboratoire pour l’expérimentation en politiqueséconomiques, sociales et politiques qui avaient été parle passé déclarées comme désastreuse dans une sériede régimes répressifs archaïques.Étant donné le niveau de mobilisation militaire,il n’est pas étonnant que le Gouvernement éryth-6 International Crisis Group (ICG), “Eritrea: The Siege State”,Africa Report No. 163, (21 septembre 2010), p. 13.7 Hirt, Nicole, “‘Dreams Don’t Come True in Eritrea’: Anomieand Family Disintegration due to the Structural Militarizationof Society”, GIGA Working Papers, 119/2010, (janvier2010), pps. 7-9; Merton, Robert K., <strong>Social</strong> Theory and <strong>Social</strong>Structure (New York: The Free Press, 1995) pps. 131–132,163.8 Redeker, Tricia, y O’Kane, David, “Introduction” in O’Kane,David, and Redeker, Tricia (eds.) Biopolitics, Militarism andDevelopment: Eritrea in the Twenty-First Century (Oxford &New York: Berghan Books, 2009).Rapports nationaux 104 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


éen soit accusé de soutien aux groupes armés allantd’Al Shabab en Somalie au Tigres Tamouls auSri Lanka. Le plaidoyer ci-dessus est soutenu pardes experts de l’ONU 9 , et a donné lieu à une sévèresanction adoptée en Conseil de Sécurité de l’ONU endécembre 2009 (Résolution 1907). Il est égalementimportant de prendre en compte le fait que l’Érythréeest actuellement dirigée par un Gouvernement quin’hésite pas à établir des liens entre les individus ougroupes condamnés pour leur participation à unesérie d’activités illicites.La recette pour mettre un État en failliteLe pays est sur le point de devenir un autre État enfaillite dans la Corne de l’Afrique, une région décritecomme la région la plus conflictuelle au monde depuisla fin de la Seconde Guerre Mondiale 10 . Au coursdes six dernières décennies, la guerre, le déplacement,l’extrême pauvreté et la répression ont été lesmarques de fabrique de cette région. Au cours des 20dernières années, la Somalie est tombée en faillite etil n’est pas improbable que l’Érythrée suive ses pas.L’ICG a posé cette possibilité dans un rapport datéde septembre 2010 qui l’a qualifié comme un dangerréel en l’absence d’une intervention internationaleefficace et adaptée. Deux des principaux facteursmentionnés sont « le manque généralisé de soutienpour le Gouvernement dans le pays et l’état de délabrementde l’armée dont la capacité, aussi bien pourmaintenir le régime d’Isaias Afwerki que pour géreravec succès la transition du régime, est de plus enplus remise en question 11 .»En refusant l’aide humanitaire, sous prétextede la confiance en eux-mêmes, le Gouvernement acondamné la population à une souffrance prolongée.Récemment, le Gouvernement a rejeté une offred’aide humanitaire dans le Plan cadre des NationsUnies pour l’Aide au développement (UNDAF). Ladécision a été annoncée officiellement dans unelettre du ministère des Finances en date du 25 janvier2011 12 . L’Érythrée occupe la troisième placedans le monde sa dépendance vis-à-vis de l’aide 13 ;la décision du Gouvernement de suspendre ou dumoins de réduire les activités de l’UNDAF survient àun moment où l’assistance est un besoin urgent pourle peuple érythréen.Exode massifTout au long de sa brève histoire, l’Érythrée a étél’un des principaux pays producteurs de réfugiés dumonde. Pendant la lutte armée pour la libération, lacause principale de l’exode massif a été la brutalité del’armée occupante éthiopienne. Après avoir obtenuson indépendance en 1991, l’émigration à diminuérapidement. Cette tendance s’est inversée à partir9 Voir les rapports périodiques de UN Monitoring Group onSomalia and Eritrea.10 Shinn, D.H., “Challenges to Peace and Stability in the Hornof Africa”, (California: World Affairs Council of NorthernCalifornia, 12 mars 2011).11 ICG, op cit., voir ci-dessus la note 6, ii.12 Fox News, Eritrea to UN: Take This Aid and Shove It, (30 mars2011).13 NationMaster, Aid as per cent of GDP.du conflit frontalier avec l’Éthiopie de 1998 à 2000.À partir de septembre 2001, le principal motif del’exode massif a été la brutalité du GouvernementÉrythréen. Nathaniel Meyers, qui s’est rendu dansce pays au milieu de l’année 2010, a cristallisé lasituation en observant que Prison Break 14 était devenueune des séries TV les plus populaires 15 . Cettemétaphore décrit la tragédie de l’Érythrée, qui estdevenu une gigantesque prison à l’air libre où chaqueérythréen se considère comme un prisonnier de plusalors que les membres de leur famille qui vivent àl’étranger sont considérés comme d’éventuels sauveurs.De la même façon, Gaim Kibreab décrit l’Érythréecomme une société très largement obsédée par« l’envie de migrer » 16 . L’exode massif débute en généralpar le passage de la frontière vers le Soudan oul’Éthiopie et se poursuit vers la Lybie pour atteindre lacôte italienne, première destination européenne pourde nombreux demandeurs d’asile. Ce voyage s’avèreextrêmement dangereux. La souffrance enduréepar les Érythréens lors de la traversée du Sahara(y compris le désert du Sinaï) et de la Méditerranéene peut être comparée qu’aux difficultés extrêmesprésentées dans les best-sellers ou dans les filmsd’aventure hollywoodiens. Le traumatisme psychologiqueest difficile à imaginer. L’incident le plus décourageants’est certainement produit en mars 2011lorsqu’une embarcation qui transportait 335 réfugiésfuyant le conflit libyen, avec 325 Érythréens à bord, asombré pour des raisons que l’on ignore. La totalitédes personnes à bord, des femmes enceintes et desenfants, ont péri 17 . Pour les érythréens, ce fut un desdésastres les plus terribles de ces derniers temps.Il n’y a pas de place pour les soulèvementspopulairesDepuis la fin de l’année 2010 et jusqu’au début del’année 2011, une vague de soulèvements populairessans précédent a renversé les régimes répressifsdans plusieurs pays d’Afrique du nord et du MoyenOrient. Certains observateurs ont pronostiqué quecette recrudescence pouvait s’étendre à d’autrespays qui sont toujours gouvernés par des régimestotalitaires. Will Cobbett signale que dans le cas del’Érythrée, il est peu probable que ceci se produisedans un avenir proche et ce, pour diverses raisons 18 :En premier lieu, la totalité de la population del’Érythrée est strictement contrôlée par un régimemilitaire totalitaire conséquence de l’interminableprogramme du NMSP. En second lieu, l’Érythrée ne14 Prison Break est une série TV américaine qui raconte l’histoired’une homme accusé par erreur d’un assassinat et condamnéà mort.15 Meyers, Nathaniel, “Africa’s North Korea: Inside Eritrea’sOpen-Air Prison,” Foreign Policy, (New York: 2010).16 Kibreab, G., “The Eritrean Diaspora, the War of Independence,Post-Conflict (Re)-construction and Democratisation” enJohansson Dahre, Ulf, (ed) The Role of Diasporas in Peace,Democracy and Development in the Horn of Africa (Lund:Lund University, 2007), p. 99.17 Assena.com, 335 Refugees Perished in the MediterraneanSea, (11 avril 2007).18 Cobbet, W., Tunisia, Egypt, Libya … Why Eritrea Won’t beNext, (2011).connaît aucune opposition officielle qui pourrait êtreà l’origine d’un soulèvement populaire comme l’aconnu la Tunisie, l’Égypte ou d’autres pays. En septembre2001, le Gouvernement a écrasé sans pitié lepremier mouvement de réforme post-indépendance.Depuis cette date, aucune opposition ou dissidenceinterne ne s’est manifestée.Troisièmement, un des principaux catalyseursdu changement survenu dans d’autres pays, Internet,est surveillé de près par le Gouvernement etl’Érythrée est un des pays où la pénétration d’Internetest parmi les plus faibles au monde, très en deçà despays d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient. Seuls4 % des Erythréens a accès à Internet et le Gouvernementpourrait rapidement bloquer cet accès :« Il n’est pas nécessaire qu’Isaias [Afwerki] fermeTwitter ou Facebook – mais il pourrait le faire s’il levoulait car il contrôle le monopole du fournisseurd’accès – 19 . »Quatrièmement, en contrôlant la seule chaînede télévision, la seule station de radio et le seul journal(diffusé et imprimé dans chaque langue nationale),le Gouvernement a le monopole complet del’information. D’après Reporters sans frontières et leComité pour la protection des journalistes, l’Érythrées’est positionnée comme le dernier pays au mondeconcernant la liberté de la presse et plus de journalistesy ont été incarcérés que dans aucun autre paysd’Afrique 20 . C’est aussi le seul pays d’Afrique sansun seul journaliste ou tout autre média indépendant.Néanmoins, la possibilité d’une rébellion populairene peut être totalement écartée.La voie à suivreAvec la réduction de l’espace politique, la suppressionde toute marge de manœuvre pour une oppositionofficielle ou de toute forme de dissidence,l’Érythrée a également connu une aggravation deson isolement international. Dans ce cadre, que l’IGCa décrit comme un état de siège, le pays peut difficilementrespecter son engagement international visà-visdu développement durable. La croissance économiquedurable et le progrès ne peut être atteint quesi le problème crucial de la répression politique estimmédiatement résolu. Ceci demanderait que soitexercée une pression suffisante pour contraindre leGouvernement à ouvrir un espace politique. Le principalpartenaire du développement du pays, l’Unioneuropéenne (UE), est fortement influent aux niveauxdiplomatique et politique. Une voie qui pourrait êtreutilisée serait de soumettre la future aide au développementà l’abolition du NMSP, à la tenue d’électionsnationales trop souvent promises, à l’instaurationd’une constitution trop souvent différée et à la remiseen liberté des prisonniers politiques et autresprisonniers. Telles sont quelques-unes des mesuresles plus importantes qui doivent précéder la planificationà long terme pour le développement durable. n19 Ibid.20 Comité pour la Protection des Journalistes, Iran, ChinaDrive Prison Tally to 14-Year High, (2010); Reporters sansfrontières, 2010 Press Freedom Index, (Paris: 2010).<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 105 Érythrée


ESPAGNEMots rebattus, politiques creusesLe soutien du Gouvernement au développement durable ne se traduit pas dans les faits. Tant pour les politiquesd’égalité des sexes, que pour celles de l’énergie et de la coopération au développement, la société civileespagnole a entendu bien des promesses et vu bien peu de résultats. Par voie de conséquence, il n’y a pasactuellement de politiques solides qui garantissent l’égalité des genres, qui s’engagent à une économie durableayant pout but de réduire les émissions de gaz à effet de serre et misant sur des sources d’énergie renouvelables.Plataforma 2015 y másAna BustinduyPablo Martínez OsésAu cours de l’année 2011, le Gouvernement s’estéloigné encore davantage des postulats du développementdurable en misant sur des politiques économiquesayant pour but l’ajustement et la réductionde la dépense publique. En dépit de nombreusesprotestations, il reste sourd aux propositions alternativesqui mèneraient à une réforme fiscale, à unchangement de modèle de production et à l’emploide politiques anticycliques encourageant une sortiede la récession centrée sur le droit des personnes.Ce virage économiciste annonce la fin d’un cyclepolitique.Nous centrons ce rapport sur l’analyse de l’évolutionde trois politiques publiques qui se voulaientun défi particulier d’encouragement pour le passagevers la durabilité du modèle de développement enEspagne : la politique d’Égalité, la politique Environnementaleet la politique de Coopération au développement.Égalité des sexes : promesses en l’airPendant la première législature du Gouvernementsocialiste (2004- 2008) une initiative a été lancée enfaveur de l’égalité de genre basée sur deux piliers dechangement social : d’une part, la visibilisation del’inégalité profonde des droits des femmes à traversdes campagnes publiques d’information et de communication.D’autre part, la mise en marche d’unlarge cadre législatif.Rendre visible le manque de justice de genrea ouvert de nombreux espaces de débats dans lasociété espagnole où des paradigmes patriarcauxsubsistent ; les lentes avancées réalisées pour venirà bout de la tolérance sociale face aux conduites discriminatoireset pour obtenir un changement socialvers l’égalité, ont fait l’objet d’un débat qui montraitclairement que dédier des ressources publiques etdes espaces politiques à l’égalité des sexes s’avéraitnécessaire.D’autre part, simultanément aux campagnesd’information et de visibilisation, un ensembled’initiatives institutionnelles ont été promues pourtenter de promulguer un cadre légal prometteur etcohérent avec la stratégie d’égalité recherchée. Ceteffort législatif a été constant du début de la premièreIndice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9999100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 anslégislature à la fin de la deuxième. Citons notammentla Loi intégrale contre la violence de genre, la Loi surl’avortement et la dernière initiative, le Projet de Loisur l’Égalité de traitement et la non-discriminationqui n’est pas allé au bout de la procédure législative.La création du ministère de l’Égalité réunissaitces deux mécanismes, visibilisation et institutionnalisation,et elle supposait un appui tangible à la volontéde faire de l’égalité de genre le pilier du reste despolitiques publiques. De même, l’intention publiquede nommer des gouvernements paritaires (c’est-àdireun cabinet ayant le même nombre d’hommesque de femmes) lança le débat sur l’utilisation dequotas pour pouvoir rompre les plafonds de verrequi affectent les femmes du pays, et on y abordades sujets tels que l’écart salarial, les conditions detravail précaires qui frappent certaines femmes et ladifficulté de concilier vie privée et vie professionnelle.L’information est aujourd’hui plus accessible etmieux traitée, et elle montre une situation généralede persistance de la discrimination liée au genre.Par exemple, en ce qui concerne la discriminationsalariale de l’année 2008, le salaire annuel le plusfréquent chez les femmes (13 494 EUR, soit 18 370USD) représentait 86,9 % du salaire le plus fréquentchez les hommes (15 522,9 EUR, soit 21 131,6USD). Sur le salaire moyen ce pourcentage représentait79,2 % et sur le salaire moyen brut 78,1 %. Sil’on considère les salaires annuels pour des journéesà temps plein, le salaire des femmes représentait86,3 % du salaire des hommes, et sur des journées àtemps partiel le pourcentage était de 84,8 %.Cette discrimination, comme tant d’autres relativesau genre, demandent un effort institutionnel,politique et économique de longue haleine. Surmonterles causes de la discrimination exige l’impulsion99100 10099+Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 81Éducation100L'autonomisation100 71 10099Activité économiquede larges secteurs sociaux, éducatifs et culturels quiauront besoin de tout l’appui public pour produire unvéritable changement culturel.Cependant, la politique de compression budgétaireentreprise en 2010 a touché aussi les politiquesde genre. Le remaniement du Gouvernementeffectué en octobre 2010, incluant la suppression duministère de l’Égalité, mettait clairement en évidencele changement de priorités. « Mettre de nouveau lespolitiques d’égalité sous la dépendance du ministèrede la Santé convertit à nouveau la situation dela femme en une question sanitaire, ou sociale, etcausera une grande déception dans de nombreuxsecteurs » 1 . La suppression du ministère lors duremaniement du gouvernement incite à penser quesa création, coûteuse en termes de structure, deressources humaines, d’investissement personnelet d’innovations, n’avait été qu’un simple symbole.L’incapacité du Gouvernement pour faire adopterla Loi d’Égalité de traitement permet de dévoilerses contradictions. Un an plus tôt le Gouvernementavait voté une réforme du travail de type libéral ; peuaprès, ce même Gouvernement, sous la pression del’ECOFIN, du FMI et des agences de qualification,avortait la procédure de gestion d’une loi exigeantle nivellement des salaires hommes-femmes et l’allongementdu congé de paternité à quatre semaines,pour ne citer que deux des modifications les plusconnues proposées dans le texte présenté par leGouvernement.Entre le sentiment de solidarité vis-à-vis desvictimes d’abus évidents et la rationalité politique1 El país, (20 octobre 2010), .073Rapports nationaux 106 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


qui suggère d’employer des institutions, des mécanismeset des budgets pour obtenir un changementprofond dans notre société éradiquant les expressionsde discrimination de genre, il y a le même écartque celui qui existe entre les politiques traditionnellesde la droite et les politiques progressistes dela gauche envers la cause féministe. Les différencessont désormais insignifiantes puisque les deux représentationsparlementaires ont coïncidé pour faireprimer sous forme d’ajustement l’orthodoxie libéraleéconomique. Il semble que l’égalité devra attendre.Le vide environnemental : des énergiesnon durablesLe Gouvernement socialiste a essayé de caractériserune partie de sa politique internationale en misantfortement sur les mécanismes multilatéraux d’encouragementà la durabilité environnementale. José LuisZapatero a été reconnu pour son discours au Sommetde Copenhague qui fut applaudi et commenté :« Nous devons réussir à unir le monde pour sauverla Terre, notre Terre, sur laquelle vivent des pauvres,trop pauvres, et des riches, trop riches. Mais la terren’appartient à personne, si ce n’est au vent » 2 .Les mesures de politique intérieure en matièrede lutte contre le changement climatique et la réductiondes émissions de CO2 avaient formé l’axedu discours gouvernemental et de la démonstrationde leur coresponsabilité dans les défis actuels. Lesintentions explicites du Gouvernement de légiférerpour faciliter le passage vers un nouveau modèlede production, moins vulnérable et plus conformesavec les principes du développement durable ont vule jour en octobre 2009 lors de la présentation del’avant-projet de loi relatif à l’économie durable. Ila fallu plus d’un an et demi d’une procédure législativemouvementée pour qu’il soit approuvé en mars2011. Le contenu final de cette loi très large — 114articles et 60 amendements additionnels sur plus de200 pages — a été très influencé par la crise économique,et proposait des mesures sans grand rapportentre elles, voire même contradictoires.Cela s’est concrétisé par la perte de la possibilitéd’établir une législation comprenant des mesuresplus cohérentes et efficaces pour s’engager sur lechemin du développement durable. De sorte quele débat public que préconise la Loi sur l’Économiedurable n’a pratiquement pas eu lieu ; cette loi,d’ailleurs, a été présentée comme étant l’exempled’un discours creux de la part du Gouvernement. Ladémarche coïncidait avec des décisions politiquesinspirées du programme d’ajustement et de compressionde la dépense publique, de sorte que la loipouvait difficilement répondre au concept d’économiedurable. De fait, dans l’article 2 le conceptd’économie durable est défini comme étant « unmodèle de croissance qui concilie le développementéconomique, social et environnemental avec uneéconomie productive et compétitive ». La référenceprincipale au «modèle de croissance» prouve que la2 Discours prononcé lors du Sommet sur le Changementclimatique, (17 décembre 2009), Copenhague,.structure et le développement de ce qui a été légiférépoursuit avant tout une croissance économique àpeine adoucie par des critères environnementauxau lieu d’un changement de modèle fondé sur lesprincipes et les limites naturelles et humaines. De cefait, la Loi n’incorporera pas, par exemple, certainsdes objectifs de réduction jugés essentiels par lacommunauté internationale.En fait, le Plan d’Énergies renouvelables (PER)2011-2012 présenté par le Gouvernement a reçu descritiques, car il ne fait aucun cas des objectifs de productionélectrique de source renouvelable. D’aprèsla proposition de l’IPCC, la réduction intérieure desémissions de CO2 dans des pays comme l’Espagnedevrait être de 40 % en 2020 par rapport à celles de1990. Le Gouvernement espagnol, néanmoins, a décidéde se limiter à 30 % en 2020 3 . À cet engagementinsuffisant en matière d’énergies renouvelables segreffe le fait que l’Espagne est l’un des cinq pays européensqui seront responsables des deux tiers de lahausse des émissions de CO2 dans un avenir proche,à cause de l’investissement du Gouvernement enagro-combustibles qui produiront 9,5 millions detonnes de CO2 supplémentaires 4 .La promesse de fermeture des centrales nucléairesn’a pas été tenue non plus. Au cours de l’année2011 le débat public sur la sécurité a été relancé,suite à la tragédie de Fukushima, mais le Gouvernements’est montré réticent à planifier la fermeture définitive.Pire encore : il insiste pour introduire comme« source de production autochtone » l’énergie nucléairedans le bilan énergétique, sans tenir comptedu fait que tout le combustible utilisé — uraniumenrichi — est importé, ce qui fausse la donnée du degréd’autonomie électrique et complique l’intégrationde l’énergie renouvelable dans le réseau électrique.En définitive, les politiques cohérentes avec ledéveloppement durable semblent elles aussi avoirété vidées de leur contenu politique à cause du changementde cap économique, et n’avoir représentéque des débours lors de l’embellie, au lieu de profiterde la crise pour montrer leur capacité à transformerle modèle de développement.Le vide dans les politiques de coopérationLes promesses de réforme institutionnelle et d’uneAPD de qualité atteignant 0,7 % du RNB en 2012n’ont pas été tenues. On observe avec une forteinquiétude deux tendances de la part des organisationssociales :D’une part, les réductions effectuées à partir de2009 dans les fonds publics de la coopération n’ontpas été proportionnelles aux compressions budgétairesgénérales. Au contraire, les réductions dubudget de coopération ont été surdimensionnées,3 Greenpeace, Comentarios de Greenpeace al borrador del PER2011-2012, .4 Institute for European Environmental Policy, AnticipatedIndirect Land Use Change Associated with Expanded Useof Biofuels and Bioliquids in the EU – An Analysis of theNational Renewable Energy Action Plans, (Mars 2011)p. 19, .baissant de 20 % entre 2010-2011 tandis que la dépensepublique globale ne l’a fait que de 6 % environ 5 .D’autre part, le Gouvernement a également renforcéle rôle du secteur privé des entreprises en matièrede coopération au développement, encourageant leurcapacité d’investissement et de financement des actionsde développement sans pour autant établir d’élémentrégulateur de ces investissements. Il sembleraitque n’étant plus capable d’assurer la cohérence et leniveau d’une politique publique naguère prioritaire, leGouvernement doive aujourd’hui demander au secteurprivé de l’aider pour augmenter le financement pourle développement. À cet effet, il a renforcé au niveaulégislatif les possibilités d’internationalisation desentreprises et créé un nouveau fonds remboursablepour la réalisation d’investissement de capital dans lesfonds destinés au développement des entreprises. Cetoutil peut être essentiel dans un proche avenir car soncaractère remboursable lui permet de maintenir desniveaux d’investissement sans production de déficits; mais pouvoir établir que cet instrument sera utile auxobjectifs de développement des récepteurs et qu’il seraadapté aux objectifs de la politique de coopération espagnole,c’est une autre affaire.En mai 2011 une sous-commission parlementairea été créée pour élaborer un rapport surles perspectives de l’aide au développement enEspagne. Les organisations de la société civile ontexprimé leur grogne devant le résultat final de ce rapport,approuvé par la commission de coopération duCongrès, qui concède une part significative au secteurprivé lucratif et renferme la possibilité implicitede perdre de vue la lutte contre la pauvreté, objectifqui avait guidé les réformes et les améliorations dansla politique de coopération et compté sur le soutien etle consensus des acteurs sociaux et des institutionsimpliquées dans la coopération internationale.ConclusionTout laisse à penser que l’égalité de genre devra attendre.De même, les politiques cohérentes vis-à-visdu développement durable semblent s’être vidées deleur contenu politique à cause de la crise économiqueet du changement de cap effectué par le Gouvernementpour affronter la situation. On a l’impression que lespolitiques qui étaient encourageantes au départ ont davantagesupposé des déboursements lors de l’embellieéconomique. De même, les engagements rejetés quantà la réduction des émissions de CO2 et à l’investissementen sources d’énergie renouvelables ont déçu ceuxqui espéraient que le soutien au niveau discursif offertpar le Gouvernement à la durabilité et à la lutte contrele changement climatique se reflèterait dans les faits.De plus, vider la politique publique de coopération deson fil conducteur, la lutte contre la pauvreté, même enpermettant l’entrée d’autres acteurs aux conceptionsmoins strictes sur le développement durable, peut représenterun pas en arrière aux conséquences imprévisiblespour une politique qui se définit comme étantl’expression solidaire de la citoyenneté espagnole. n5 Voir le rapport annuel de la Plataforma 2015 y más intituléBalance de la cooperación española: crisis, estancamiento ydebilidad política, en Las Política Globales Importan, Plataforma2015 y más, (2011), p.45-56, .<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 107 Espagne


ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUEObjectif : une nouvelle économie et un nouveau contrat socialLes multiples crises auxquelles sont confrontés les États-Unis et le monde découlent de la priorisation de lacroissance économique aux dépens du bien-être humain. Il existe un consensus croissant selon lequel lespriorités économiques actuelles et les modèles de consommation non durables sont profondément erronéset injustes et compromettent les droits humains et le bien-être des générations futures aux États-Unis etailleurs dans le monde. Le mouvement Occupons Wall Street a donné une voix au Américains qui sont deplus en plus nombreux à demander un nouveau contrat social et une approche complètement différente del’économie.Global-Local Links ProjectTanya DawkinsCenter of ConcernAldo Caliari & Julia WartenbergInstitute for Agriculture and Trade PolicyKaren Hansen-Kuhn & Alexandra SpieldochIndice des Capacités de Base (ICB)ICB = 99100Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleIndice d'Equité de Genre (IEG)100IEG = 72L'autonomisation47Depuis le printemps arabe jusqu’au mouvementOccupons Wall Street, des millions de citoyens dumonde élèvent leurs voix pour réclamer des droitshumains, une démocratie réelle, un traitement digneet un ordre économique juste. Ensemble, ils trouventle moyen d’exploiter les forces de la technologie etde la mondialisation pour communiquer et promouvoirles revendications d’un nombre croissant decitoyens, marginalisés par un modèle économiquequi n’a jamais priorisé leurs intérêts et n’est pas capablede le faire.L’impact humain et social de la crise de 2008 etde ses politiques économiques est en train de s’intensifierà mesure que l’accès aux besoins fondamentauxpour vivre est refusé à un nombre croissantd’Américains. Le taux d’extrême pauvreté, c’est àdire, le pourcentage de la population ayant des revenusinférieurs à la moitié de ce qui correspond auseuil de pauvreté, est en hausse aux États-Unis. Lenombre de personnes en situation d’extrême pauvretéest passé à 20,4 % en 2010, soit une hausse de25 %, ou de 4 millions de personnes, depuis 2007 1 .Dans le cadre de ce que certains appellent la« décennie perdue » en Amérique 2 , le recensementréalisé aux États-Unis en 2010 dépeint un tableau terrifiantde la détérioration du patrimoine des famillesde travailleurs, des enfants, des jeunes, des femmeset des minorités au cours de ces dix dernières années.En 2009, plus d’un tiers des enfants noirs (35,7%) et près d’un tiers des enfants d’origine hispanique(33,1 %) vivaient dans la pauvreté. En 2009, le tauxde familles (avec enfants) dirigées par des mèrescélibataires atteignait 38,5 %. Sur les 6,6 millions defamilles vivant dans la pauvreté, 3,8 millions étaientsous la responsabilité d’une mère célibataire. Pendantcette même période, le revenu des habitantsafro-américains a chuté de 4,4 %, et 3,7 millions de1 Voir : 2 Elise Gould et Heidi Shierholz, A Lost Decade: Poverty andincome trends paint a bleak picture for working families.(Rapport basé sur les indicateurs de l’Institut de politiqueéconomique, 16 septembre 2010).0 n/d100 100100 69 10099 100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé99Survivance jusqu’àl’âge de 5 anspersonnes de plus sont passées en dessous du seuilde pauvreté faisant passer le taux de pauvreté de13,2 % à 14,3 %, le chiffre le plus élevé depuis 1994 3 .Accès à une alimentation sainechez soi et ailleursL’accès à une alimentation appropriée est apparuecomme un problème sérieux de gravité croissanteaux États-Unis. Les politiques agricoles et alimentairesont créé ce que les médecins appellent un environnement« obésogène », dans lequel la plupartdes aliments offerts aux consommateurs est à la foisriche en matières grasses et en calories et faible enéléments nutritionnels. Les aliments transformés,la viande et les produits laitiers sont devenus relativementmoins chers que les fruits et les légumesplus nutritifs, ce qui contribue à des taux croissantsd’obésité et à une détérioration de la santé chez lesenfants et les adultes. On trouve actuellement auxÉtats-Unis le taux d’obésité le plus élevé du monde(33 %), suivi de près par son partenaire de l’ALENA,le Mexique.L’écrasante majorité des programmes d’aideagricole encouragent la production de céréales destinéesaux aliments transformés, de viande et debiocarburants, ce qui limite le choix des consommateurs.Les prix pour les agriculteurs sont instables etle nombre de fermes, petites mais commercialementviables, a diminué de 40 %, passant de la moitié dunombre total de fermes en 1982 à moins d’un tiersen 2007. Pour compenser la hausse des revenusdes ventes, les charges ont augmenté et, comme lesaides gouvernementales sont liées à la baisse des3 Données du recensement américain fournies par l’Institut depolitique économique.Éducation0Activité économiqueprix, beaucoup ont diminué. Avec la récession, les revenusprovenant de sources non agricoles ont considérablementdiminué ce qui fait que les ménagesagricoles sont dans une situation plus difficile qu’aumoment où les coûts des cultures étaient faibles.Aux États-Unis, il existe un mouvement croissantd’activistes alimentaires qui sont orientés versune production locale durable centrée sur des alimentsplus sains. La Loi agricole de 2008 a élargi lesprogrammes afin d’encourager l’achat de fruits et delégumes cultivés selon des techniques d’agriculturedurable dans les programmes de repas scolaires.L’effort de la Première dame, Michelle Obama, poursensibiliser le public sur la nécessité de se nourriret de vivre plus sainement y a fortement contribué.Au niveau international, l’administration Obamaa poursuivi ses programmes de soutien pour renforcerla production alimentaire en mettant l’accentsur les femmes et les petits agriculteurs. L’initiative« Fonds pour alimenter le futur » et le Programmemondial d’agriculture et de sécurité alimentaire (unfonds en fiducie administré par la Banque mondiale)ont continué de fonctionner malgré les contraintesbudgétaires actuelles. Les gains potentiels pour lespetits agriculteurs et pour la production d’alimentssains aux États-Unis et partout dans le monde nepeuvent être maintenus que si l’offensive de l’Administrationdestinée à doubler les exportationsaméricaines rompt avec les politiques commercialesdu passé.La débâcle du plafond de la dettea masqué les vrais enjeuxJusqu’à présent, l’élévation du plafond de la dettea plutôt été une question de politique administrative.Cette année, les menaces des républicains auRapports nationaux 108 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


Congrès de mettre le pays en situation de défaut depaiement a déclenché un long débat partisan qui amaintenu le Congrès américain dans une impassesur la scène mondiale pendant plusieurs mois.Il n’est donc pas surprenant qu’avec des niveauxhistoriques de pauvreté et d’inégalité et undébat sur la dette qui a principalement tourné autourde la préservation des réductions d’impôt de l’èreBush et d’une réduction draconienne des dépensessociales, une proportion inouïe de la population américaine(84%) désapprouve la façon dont le Congrèstraite les questions économiques.Il est certain que sans la loi américaine derécupération et de réinvestissement de 2009, larécession aurait été encore pire. Maintenant, alorsque les états et les collectivités ne se sont pas encoreremis du cycle plus récent de compressionsbudgétaires de programmes vitaux mis en œuvrepar le Gouvernement fédéral, un soi-disant « Supercomité» du congrès a été chargé d’élaborerune législation qui recommandera des réductionssupplémentaires de fonds discrétionnaires et dedépenses directes de l’ordre de 1 500 milliardsd’USD jusqu’en 2021.Être réalistes en ce qui concerne la protectionsociale et le contrat socialUn rapport récent a révélé que 65,7 millions d’Américainsfournissent des soins non rémunérés à unmembre de leur famille et que la majorité de cesaidants sont des femmes (66,6 %). En outre, lestrois-quarts de ces personnes ont un emploi en plusde leur activité comme aides-soignants. La valeurestimée de ces services est de 375 milliards d’USDpar an. Malgré ces chiffres, 47 % des aidants quitravaillent et aident une personne de leur famille déclarentavoir dû utiliser leurs économies pour couvrirles coûts élevés des soins.Les États-Unis peuvent et doivent aller au-delàdu débat actuel basé sur le court terme portant surce qu’on appelle les dépenses obligatoires et prendreconscience du fait qu’investir dans des secteurs telsque l’enfance, les communautés, les soins des aînéset les soins médicaux en général sont des traitsfondamentaux d’une démocratie moderne et d’uneéconomie solide et résiliente. Un rapport récent del’Organisation internationale du travail (OIT) signaleque la garantie des protections sociales fondamentalespeut représenter un outil puissant pour assurerune croissance durable, lutter contre la pauvreté etatténuer l’impact de la crise économique. Le rapportsignale aussi que la protection sociale est autantun droit qu’un besoin humain. Ces approches audéveloppement économique basées sur les droitssont susceptibles de trouver une répercussion dansl’environnement actuel.Prendre la durabilité au sérieuxL’objectif principal de la politique économique etde développement nationale et internationale doitêtre d’assurer la prospérité et non simplement lasurvie des individus et de la communauté dans sonensemble. Repenser le modèle économique aveccette vision est une tâche dont la portée est nationale,communautaire et mondiale. Elle exige, par exemple,FIGURE 1Augmentation des revenus après impôts, par groupes de revenus, 1979-2007(en dollars de 2007)30025020015010050016%20 % InférieurMoins de20.50023% 25%Deuxième 20% plus bas20.500- 34.30020 % moyen34.300-50.00035%Quatrième20 %50.000-74.70095%20 %plus haut74.700+125%10 %plus haut102.900+160%5 % plus haut141.900+281%1 % plus haut352.900+Source : Bureau du budget du Congrès américain, moyenne des revenus familiaux après impôts, juin 2010,rédigé par www.inequality.orgde repenser la confiance croissante que les sociétésaméricaines ont dans les chaînes d’approvisionnementmondiales dont le seul objectif est d’obtenir unmaximum de profit.Le risque inhérent et potentiel de violation desdroits humains et d’altération des écosystèmesmondiaux dans les chaînes de production mondialesa relancé l’intérêt pour la relocalisation etd’autres pratiques commerciales plus durables.La récente tragédie au Japon et la flambée des prixdu pétrole pendant la période 2007-08 ont promuune réévaluation de ces tendances dans la communautécommerciale. L’époque où l’on se demandaitsi les États-Unis et le monde pouvait se permettrede poursuivre des objectifs principalement baséssur la maximisation des profits est révolue depuislongtemps.L’intérêt pour l’économie solidaire et pourune activité commerciale responsable, pour lesentreprises détenues par les travailleurs et les coopérativesqui offrent des emplois permettant unsalaire assurant une meilleure qualité de vie et écologiquementdurables à leurs communautés est entrain d’augmenter. Des villes comme Cleveland etDetroit, durement touchées par une politique commercialeà court terme et par la récession, sont entrain de réinventer leurs économies en se concentrantsur l’objectif explicite de créer des richesseset des emplois décents et d’ancrer le capital dans lacommunauté. D’autres explorent les avantages desinitiatives communautaires de sécurité alimentaire,de création de banques appartenant à la communautéet de budgets participatifs. Des mesures fiscaleset de politiques monétaires qui encouragentces tendances sont nécessaires afin d’élargir laportée de ces efforts.La modification des modes de consommationaméricains est essentielle pour parvenir à un développementdurable et faire face aux effets dévastateursdu changement climatique, autant à l’échellenationale qu’internationale. La population qui vit auxÉtats-Unis représente 5 % de la population mondiale,et cependant elle consomme 25 % de l’énergiemondiale et est responsable de 22 % des émissionsde dioxyde de carbone industriel mondiales, une desprincipales causes du réchauffement climatique. AuxÉtats-Unis, la consommation de pétrole équivaut à19,15 millions de barils par jour ; elle est par conséquentsupérieure à celle de toute l’Europe et équivautà deux fois celle de la Chine.Les États-Unis ont la responsabilité et la possibilitéunique de faire des efforts substantiels etpositifs visant au développement de politiquesnationales et internationales orientées vers le bienêtredes Américains et des autres habitants de laplanète.Les citoyens doivent être les principauxprotagonistesIL existe un consensus croissant selon lequel lesmodèles économiques actuels sont profondémenterronés, approfondissant et reproduisant des inégalitésnuisibles. Le mouvement Occupons Wall Street,les mouvements de droits humains nationaux etd’autres mouvements citoyens ont donné une voixau nombre croissant d’américains qui réclament uneapproche complètement différente de l’économie etun nouveau contrat social.La tâche de construire et de repenser une nouvelleéconomie est urgente et ne sera pas accompliepar le biais du simple rafistolage d’un modèle ratéresponsable de la crise actuelle. Dans la mesure oùles citoyens continuent de réclamer et d’occuper laplace qui leur revient dans le processus démocratiqueet politique, il restera encore un espoir pourl’avenir des États-Unis. n<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 109 États-Unis d'Amérique


FINLANDELes politiques de durabilitéLe pays doit reconnaître qu’il n’existe pas de solutions technologiques faciles et durables. La réduction de laconsommation d’énergie et de l’empreinte écologique pourrait débuter par une loi imposant des réductionsannuelles des émissions de 5 %. Le temps est venu de redéfinir le programme du développement durable poury inclure davantage que les seuls intérêts de l’État et des hommes d’affaires. Les mouvements sociaux peuventutiliser le programme de la durabilité pour pousser les gouvernements et les entreprises. Il est temps de discuterde manière ouverte sur les questions fondamentales du bien-être, de l’égalité et du développement, y comprissur la nécessité d’abandonner la quête constante de croissance matérielle.KEPA - Service Centre for Development Cooperation, FinlandOtto BruunEn 2002, le Premier ministre finlandais de l’époque,Paavo Lipponen, avait défini l’orientation de son paysvis-à-vis de la durabilité de la manière suivante: «Bien que le Rapport Brundtland se soit centré sur lesbesoins des générations présentes et futures, la Finlandemet l’accent sur ​les possibilités » 1 . Toutefois, lesmouvements environnementaux et sociaux soutiennentque cette approche centrée sur les « possibilités» a généré une vision étroite de la durabilité. Alors quela Finlande souhaite être perçue comme le pays quirésout les problèmes de durabilité du monde, son bilanà cet égard est loin d’être convaincant.Le pays affiche un intérêt croissant pour la recherchede nouvelles formes de compréhension du bienêtreet pour la possibilité de complémenter le produitintérieur brut (PIB) dans le système de comptabiliténationale par d’autres statistiques. Les mouvementssociaux et les universitaires ont suggéré l’adoption del’Indicateur de progrès véritable (IPV), par exemple, etle Gouvernement a convenu qu’un indicateur de la sorteserait nécessaire 2 . Alors que le PIB ne mesure quela croissance économique, l’IPV distingue une bonnecroissance d’une croissance indésirable. Comme lescoûts des questions négatives sont soustraits, l’épuisementdes ressources et les coûts générés par lacriminalité et la pollution sont comptabilisés commenégatifs 3 . Cet indicateur met l’accent sur l’égalité deschances de chaque individu pour satisfaire ses besoinset couvrir ses dépenses en éducation.Les revers du développement durableDans le cas de la Finlande, l’IPV offre une surprise désagréable:le bien-être a augmenté dans les années1980, mais a sensiblement diminué depuis 1990,malgré une forte croissance économique durant lapériode 1995-2008 4 . Ce phénomène est dû au fait quela croissance économique était de forte intensité enterme de ressources mais les bénéfices ont été dis-1 Discours du Premier ministre Paavo Lipponen, président de laComission finlandaise pour le développement durable, (2002).2 Gouvernement finlandais, Programme 2010, (Helsinki : 2010).3 J. Talberth, C. Cobb and N.Slattery, “A Tool for SustainableDevelopment. Redefining Progress”, in The Genuine ProgressIndicator 2006, (Oakland, California: 2006).4 V. Ylikahri (ed), Onnellisuustalous (Helsinki: Visio, 2010).Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9999+100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 anstribués de façon moins équitable qu’auparavant. Parconséquent, l’IPV indique qu’en fait la Finlande a reculépendant la période du programme pour le développementdurable.Un autre indicateur de la durabilité tout à fait intéressantest l’empreinte écologique, qui met en évidencel’impact des êtres humains sur l’écosystèmemondial. L’empreinte, qui est basée sur une combinaisond’émissions de CO2 et d’indicateurs pourl’utilisation des terres, est comparée à la capacité denotre planète à se renouveler. La Finlande a toujoursété parmi les pays du top-10, ou presque, ayant la plusgrande empreinte par personne et ceci depuis 2007,date des données disponibles les plus récentes : elle seclasse 12ème sur 199 pays. Si chaque personne dansle monde consommait comme un Finlandais moyen,c’est-à-dire, l’équivalent d’une superficie au sol de 6hectares par habitant, nous aurions besoin de trois planètespour vivre 5 . C’est pourquoi certains mouvementsenvironnementaux et sociaux cherchent à imposerl’objectif politique de la décroissance planifiée dansl’hémisphère Nord, ou croissance matérielle négative,au cœur du programme du développement durable etde la Conférence Rio +20 6 .Les politiques énergétiques dansla quête de durabilitéLes politiques énergétiques constituent un aspect clédu développement durable. En Finlande, la consommationd’énergie par habitant est relativement élevée.Ceci est quelque peu atténué par le fait positif que le5 Living Planet Report (Washington, DC: WWF, 2010).6 Voir les activités organisées par J. Nissinen dans “Rio+20:NGOs participating for a green de-growth economy”, 97100 10099+Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 88Éducation1000L'autonomisation100 10010087Activité économiquepays utilise les déchets de biomasse de l’industrie dela pulpe et du papier pour produire de l’énergie. En2010, les énergies renouvelables (principalement labiomasse) représentaient 25 % de la consommationd’énergie primaire 7 .Récemment, la politique énergétique finlandaises’est de nouveau concentrée sur l’énergie nucléaire. LaFinlande est considérée comme un précurseur de larenaissance du nucléaire dans le monde, car en 2010le Parlement a pris la décision de construire deux nouvellescentrales nucléaires. Si elles sont construites,ces plantes produiront un volume d’énergie qui dépasseraplusieurs fois les besoins de consommation. Ainsila Finlande exportera son énergie nucléaire ou renforcerasa position en tant que siège européen des industriesintensives en énergie. Il est important de soulignerque malgré le fait que les accidents nucléaires causéspar le tsunami au Japon ont quelque peu changé lediscours des partis politiques, les questions liées à lasécurité et aux problèmes sociaux et environnementauxassociés à l’extraction d’uranium dans les pays duSud ont largement été ignorés jusqu’à présent.Dans le cadre de la résolution sur l’énergie nucléaire,le Gouvernement a annoncé un « paquet demesures » concernant les énergies renouvelables.Toutefois, une lecture attentive montre qu’avec cesmesures, la Finlande pourra seulement atteindre lesobjectifs obligatoires fixés par l’Union européenne.Les écologistes ont critiqué le pays d’avoir tenter defaire accepter la tourbe finlandaise comme ressourceénergétique à renouvellement lent, une position quel’Union européenne rejette. Du point de vue climatique,la tourbe est bien pire que la combustion du charbonet son renouvellement prend des centaines d’années ;7 Statistiques sur l’énergie finlandaise. 76Rapports nationaux 110 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


de plus, l’extraction de celle-ci pose des problèmesenvironnementaux.Le Gouvernement soutient que ses politiquesénergétiques, avec sa tourbe « renouvelable » et sescentrales nucléaires à «faibles émissions en carbone» sont énergétiquement durables. Ces politiques accordentpeu d’attention à l’économie d’énergie et àl’efficacité, elles ne répondent qu’aux intérêts économiquesà court terme. En outre, les chercheurs et lesactivistes écologistes affirment qu’une solution pourl’énergie renouvelable décentralisée permettrait deréduire les impacts environnementaux et les risques,tout en améliorant le bien-être des municipalités entermes d’emploi 8 . Un récent rapport commandé parles Amis de la Terre soutient que le pays pourrait raisonnablementéliminer le charbon et le nucléaire, sanseffets drastiques, contribuant ainsi pour sa part audéfi climatique.Les droits des peuples autochtonesDes différends autour de la durabilité ont égalementsurgi concernant les droits des peuples autochtones,y compris le conflit dans les régions nordiques surl’utilisation des terres et les forêts entre l’État et lepeuple Sami, qui se poursuit toujours 9 . La Finlande n’apas ratifié la Convention 169 de l’OIT pour garantir lesdroits à la terre des Sami, qui font valoir un droit historiqueà l’élevage de rennes nomades. D’une perspectiveglobale, il s’agit là d’une regrettable lacune dans laréalisation des droits des peuples autochtones.Les conflits liés à la Laponie ou aux forêts desSami ont commencé dans les années 90, lorsque lesentreprises finlandaises qui se consacrent au commercede la pulpe et du bois, comme Stora Enso, ontacheté du bois à la compagnie forestière de l’État, ycompris celui provenant des quelques forêts naturellesencore intactes. Cela a constitué une menacepour la subsistance des Sami en mettant en dangerles pâturages d’hiver des rennes qui dépendent deslichens des sols et des arbres n’existant que dans lesforêts primaires 10 .Suite à la campagne internationale menée par leséleveurs de rennes Sami et Greenpeace Internationalà l’encontre de Stora Enso et ses acheteurs de papier,et lorsque la société était sur ​le point de perdre saréputation et sa position en tant que cible des investissementsdes différents fonds d’investissement éthiques,elle a cessé le déboisement des forêts Laponeset les négociations ont commencé. En 2009 et 2010,plus de 80 % des zones en question ont été protégéesou interdites d’exploitation forestière. Cependant,l’élevage des rennes est aujourd’hui menacé par lesflux touristiques et les concessions minières, de plusen plus préjudiciables, qui bénéficient du soutien del’État. La reconnaissance juridique des droits des Samien Finlande n’a jamais été effective.Les changements dans la politiquede développementL’Aide publique au développement (APD) finlandaisea progressivement augmenté ces dernières annéeset en 2010 elle a atteint 0,55 % du PIB (elle devraitatteindre 0,58 % en 2011). La plupart des partis politiquesse sont engagés à atteindre l’objectif de 0,7 %du PIB en 2015 11 . Toutefois, la pratique actuelle quiconsidère le financement de la lutte contre le changementclimatique dans les pays en développementen tant qu’APD, sape l’intégrité des engagements del’APD et réduit la confiance dans les négociations multilatéralessur le changement climatique.La politique de développement finlandaise a subiun changement marqué en 2007 lorsqu’elle a insistésur le développement durable 12 . Toutefois, elle a égalementintroduit des règles telles que : « La Finlandea des connaissances et la technologie pour répondreaux besoins des pays en développement » 13 .Le ministèrede l’Emploi et de l’économie veut renforcerla compétitivité finlandaise à travers l’APD et il veutqu’elle serve à créer des emplois et de nouveaux marchéspour les entreprises finlandaises. Cela impliqueun nouvel élan pour les services de la connaissance etde la technologie des entreprises finlandaises grâce àdes fonds de l’APD.Cette ligne de pensée a provoqué un changementimportant dans la coopération finlandaise pour le développementvis-à-vis des projets qui se rapportent àl’eau, la foresterie et l’énergie, domaines où la Finlandepense être bonne concurrente. La question reste desavoir si les connaissances finlandaises en foresteriepeuvent être exportées de manière utile vers les tropiques.L’accent mis sur les intérêts propres soulèveégalement la question de l’appropriation par les payspartenaires. Les objectifs de réduction de la pauvretésont de plus en plus relégués et tous ces changementsvont entraîner une coopération au développementimprévisible et donc moins durable 14 .Les entreprises finlandaises dans les pays du SudEn plus de l’APD, le Gouvernement mesure officiellementsa durabilité mondiale en mesurant le montanttotal des investissements directs étrangers desmultinationales finlandaises 15 . Actuellement, il existeplusieurs exemples de grandes entreprises finlandaisesqui prétendent être les leaders mondiaux en matière dedurabilité et qui ont établi des monocultures d’eucalyptusà grande échelle (Stora Enso, UPM) et des planta-tions de palmiers à huile (Neste Oil) dans les pays duSud, ce qui contribue au déplacement de communautéset à l’expropriation de terres à grande échelle.Bien qu’elle ait reçu plusieurs récompenses pourson éthique d’entreprise et sa durabilité à travers lemonde, la société finlandaise productrice d’huile,Neste Oil, a été choisie comme l’entreprise la moinsdurable aux Public Eye Awards 2011. Le capital decette société est majoritairement étatique et sonobjectif stratégique est de devenir le leader mondialdans ce qu’elle appelle les « biocarburants verts, dedeuxième génération et durables » 16 . Récemment,elle a annoncé l’ouverture des deux plus grandes raffineriesau monde de biocarburants issus de l’huilede palme, avec une capacité totale de 2 millions detonnes par an 17 , avec comme principaux fournisseursd’huile de palme, la Malaisie et l’Indonésie 18 . La demandeen huile de palme conduit à la conversion desterres et à la déforestation des forêts tropicales et dela tourbe qui pourraient être considérées comme lesplus importantes réserves de carbone au monde. Cesforêts sont également importantes en termes sociauxpuisqu’elles abritent des populations autochtones etreprésentent des zones clé de biodiversité 19 .Neste Oil affirme que d’ici 2015, elle n’achèteraque des matières premières en provenancede plantations autorisées de palmiers à huile. Lasuperficie totale des plantations nécessaires à l’approvisionnementde ses raffineries est estimée à700 000 hectares. Les chercheurs ont déterminéque même les effets indirects pour répondre à lademande croissante en huile de palme conduisentà la déforestation tropicale 20 . Bien que Neste Oil aitsoutenu que ses matières premières pour l’huile depalme peuvent être tracées, elle n’a pas divulguéses sources d’approvisionnement, ce qui constitueune tendance inquiétante dans le contexte decorruption auquel est en proie l’Indonésie. La seulesource connue en Malaisie de Neste Oil pour l’huilede palme a été condamnée en 2010 pour ne pasavoir respecté les droits territoriaux des autochtoneset pour convertir les forêts tropicales.Cet exemple montre que la campagne visantà produire des « carburants à faibles émissions decarbone » au nom du développement durable n’estpas uniquement problématique du point de vue écologiqueet social, mais elle peut aussi miner les effortsvisant à créer des moyens de subsistance durablesdans de nombreuses régions du monde en développement.La totalité des émissions de gaz à effet deserre des biocarburants issus de l’huile de palme d’Indonésieest probablement plus élevée que celle descombustibles fossiles. n8 P. Lund, The link between political decision-making andenergy options: Assessing future role of renewable energyand energy efficiency in Finland, (2007).9 Voir K.Mustonen y T. Mustonen, Drowning Reindeer,Drowning Homes (Helsinki: Snowchange, 2010).10 Voir le film documentaire “Last Yoik in Sami Forests”.11 Ministère de l’Environnement, Facts on EnvironmentProtection, (novembre 2010).12 Ministère des Affaires étrangères, Finland’s DevelopmentPolicy Programme, (2010).13 Ibid, Development Policy Forestry Guidelines, (Helsinki: 2009).14 Commission finlandaise pour le développement, The State ofFinland’s Development Policy 2009, (Helsinki: 2009).15 Web de la commission finlandaise pour la durabilité, Criteriafor sustainability.16 Neste Oil, Neste Oil Annual Report 2009.17 Ibid, Neste Oil celebrates the grand opening of its ISCCcertifiedrenewable diesel plant in Singapore, (Neste OilPress, 8 mars 2011).18 Neste Oil, op. cit.19 Programme des Nations unis pour l’Environnement, The LastStand of the Orangutan, (2010).20 C.Bowyer, Anticipated Indirect Land Use Change Associatedwith Expanded Use of Biofuels and Bioliquids in the EU.Institute of European Environmental Policy, (2010).<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 111 Finlande


FRANCEMoins d'inégalité et un peu plus de fraternitéLa crise économique mondiale a frappé assez durement la société française. L'économie s’est quelque peu récupérée,mais le chômage et l’inégalité se sont aggravés et la société est devenue plus compétitive au détriment de valeurscomme la fraternité et la solidarité. Le pays a aussi des problèmes environnementaux pressants, tels que la pollutionde l'air et de l'eau et une perte d'écosystèmes. L'État a pris des engagements pour continuer à mettre en œuvre ledéveloppement durable, et ceux-ci devraient désormais être réexaminés non seulement du point de vue national oueuropéen, mais en termes de leur impact sur le reste du monde. La date des élections présidentielles approche et c'estune occasion pour les organisations de la société civile française de faire entendre leur voix dans le débat.Secours Catholique-/ Catholic AidGrégoire NiaudetLa France a été sérieusement touchée par la criseéconomique mondiale. Son système de protectionsociale a dans une certaine mesure atténué les effetsnégatifs, mais le chômage, qui est ce qui inquiète leplus les Français, a considérablement augmenté ettouche maintenant 10 % de la population économiquementactive. La dette publique a aussi augmentéde façon inquiétante impulsée par le déséquilibre quiexiste depuis longtemps en France dans la balancedu commerce extérieur et du fait que sa productionn’est pas vraiment compétitive. Les conséquencessociales se traduisent par le fait que les secteurs lesplus fragiles de la population glissent vers la pauvretéet que l’inégalité s’accentue parce que les secteursles plus riches ont été relativement moins touchés.Dans le préambule de la Constitution de 1946,les droits sociaux sont établis comme étant les prérogativesde tous les citoyens. L’appareil de sécuritésociale de l’État, qui possède un système d’aide socialeet dont le financement est basé sur la fiscalité,a été conçu pour offrir des prestations égales à tousles membres de la société. Au cœur de ce modèlede redistribution, les principaux moyens d’accèsaux droits étaient le travail. Cependant, depuis lesannées 1970, lorsque le chômage massif est apparu,l’État-providence traverse une crise qui n’est passeulement financière, mais aussi liée à sa légitimitéet à son efficacité. Le mécanisme de redistributionhorizontale est moins efficace quand une partiecroissante de la population est incapable de contribuerau système d’assurance sociale. Aujourd’hui,l’incertitude en ce qui concerne l’avenir augmentela pression non seulement sur les milieux professionnels,mais aussi sur les individus. Le travail n’estplus synonyme de bien-être. De plus, la demandetoujours plus grande de productivité et d’efficacitécrée un climat de tension et de stress permanentlaissant place à un monde du travail extrêmementdur, exclusif et exigeant.L’inégalité croissanteIl y a eu une reprise économique en 2011, maisseules les couches aisées de la société ont bénéficiédes avantages de cette nouvelle croissance et les inégalitéss’aggravent. Un rapport publié par l’InstitutIndice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9999100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0n/dEnfants atteignantla cinquième annéed’école100 10099+Survivance jusqu’àl’âge de 5 ansnational de la statistique et des études économiques(INSEE) paru en avril 2011 montrait qu’au cours dela période 2004-2007 les revenus les plus élevés ontaugmenté plus rapidement que ceux de l’ensemblede la population. Pour 90 % de la population, le revenua augmenté d’un peu moins de 10 %, mais pour1 % de la population dont le revenu est supérieur à84 500 € (115 798 USD), la hausse a été de 20 à 40%. Pour que la richesse soit redistribuée de manièreplus équitable il faudra effectuer une réforme fiscalequi devra inclure l’impôt sur le capital et la réductionou la suppression de certaines niches fiscales.Les raisons pour lesquelles les inégalités secreusent dans les pays développés sont claires : lesIndice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 77ÉducationLes problèmes environnementaux100051L'autonomisation100 79 100100Activité économiquesystèmes impositifs ont été modifiés et le fardeausur les plus riches s’est allégé, les revenus dansle monde de la finance ont connu une expansionénorme et la production a été réorganisée. La criseactuelle accentue ces tendances car, afin de maintenirles prérogatives du secteur financier, les Étatsont absorbé la plupart des coûts en faisant des prêtsénormes aux banques. Le revers de la médaille estque les gouvernements dans de nombreux pays mettentactuellement en œuvre des politiques d’austérité,et cela pèse lourdement sur les secteurs les plusvulnérables de la société et exacerbe les inégalités.Les solutions qui ont été avancées telles que ledéveloppement social – depuis 30 ans – et le déve-Certains des écosystèmes les plus dégradés en France sont ceux des régions côtières. La pollutionen général, et celle causée par les métaux lourds et les hydrocarbures en particulier, a endommagéla flore et la faune des eaux côtières, notamment les oiseaux de mer, les mollusques et les algues.Plus de la moitié des zones côtières de France ont été urbanisées, ce qui provoque une perte encoreplus grande de la biodiversité, et de fait il ne reste presque plus aucun endroit sur la côte qui n’aitpas été affecté par la présence des êtres humains.Un autre problème grave qui ne peut être ignoré est le fait que l’eau est de plus en plus rareet que sa qualité se détériore. L’agriculture à grande échelle consomme environ 44 % de l’eaudisponible, et les quantités massives d’engrais que ce secteur utilise sont en train de polluer sérieusementles réserves en eaux souterraines du pays. Dans l’avenir, il faudra construire davantaged’installations de production d’eau potable et de traitement de déchets.Un quart du territoire français est recouvert de forêt ce qui représente la plus grande zone boiséede l’Union européenne, mais cette biosphère est menacée par différents types de dégradationde l’environnement dont la plupart proviennent de la pollution atmosphérique.Rapports nationaux 112 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


Engagements au niveau mondialLe monde a profondément changé depuis laConférence de Rio de 1992. L’économie et lesfinances sont devenus totalement globaliséeset deux tendances parallèles ont émergé, ledécollage économique des pays émergents etune crise dans le système qui touche principalementles pays industrialisés et possède desaspects économiques, sociaux, écologiques etpolitiques. Dans ce contexte, il devient de plusen plus clair que nous avons besoin d’un systèmecommun pour gérer la planète, afin de nousdéfendre contre le changement climatique, deprotéger la biodiversité et d’établir un accès pluséquitable aux ressources naturelles.• Les premières priorités sont la réductiondes inégalités et l’éradication de la pauvreté.Il est évident que même si les pays ontconnu une croissance économique, ils ontété incapables de tenir leurs engagementsconcernant les Objectifs du Millénaire pourle Développement (OMD). Les inégalitésaugmentent et un milliard de personnes surla planète souffrent de la faim.• Un nouveau système de protection socialequi profite à toutes les personnes dans lemonde doit être créé. Il faut que le secteurindustriel reste compétitif, mais la mondialisationéconomique entraîne une sélectioncompétitive entre les travailleurs du mondeentier et érode les systèmes de protectionsociale, lorsqu’ils existent.• Une autre priorité est la lutte internationalecontre la crise sanitaire parce que les maladieschroniques sont en augmentationpartout. Elles remplacent les maladies infectieusesdu siècle dernier, un phénomèneappelé « transition épidémiologique ». Cettecrise frappe non seulement la société maisaussi les économies des pays et elle augmentela pression sur la santé et sur les systèmesd'assurance santé, lorsqu’ils existent.La mondialisation économique dans uncontexte de concurrence déréglementée setraduit par l'accroissement des inégalités. Celaprend des formes diverses : la sélection compétitiveentre les agriculteurs dans des conditionsinégales, l'effondrement économique des régionset des États qui ont perdu leurs industries,les écarts de revenus qui, dans la plupart descas, se creusent entre les différents secteursde population, les inégalités dans l'accès auxservices de santé et de soins, la marginalisationde certains groupes de population et l'affaiblissementdes systèmes de protection socialepartout. Cette tendance généralisée à la dégradationde certains groupes sociaux soulèvedes questions politiques et éthiques, mais elleconstitue également un fardeau considérablepour les économies des pays parce qu'ils doiventcontrebalancer les inégalités et aider lesgens qui sont en situation de crise à renoueravec la vie active, ce qui devient de plus en plusdifficile. Malheureusement, les coûts de cesmaux sociaux sont indirects, ce qui signifiequ'ils peuvent être transmis aux générationsfutures ou laissés à d’autres acteurs pour qu’ilss’en occupent, mais ces autres acteurs sontla communauté, et en fin de compte ceux quiportent le fardeau sont les contribuables.Le développement durable et le développementsocial concordent en ce sens que tousdeux cherchent à atteindre un équilibre similaire,s’intéressent aux mêmes problèmes sociauxet partagent des objectifs communs. Si nousvoulons effectuer une transition vers un avenirmeilleur pour tous, nous devrons négocier unnouveau contrat social qui implique le partagedes responsabilités, revendiquant les droits humainset renouvelle la solidarité envers les autreset envers les générations futures.loppement durable – pour ces 15 dernières années– ne sont pas suffisamment efficaces pour résoudreces problèmes dans le contexte actuel. La visionsociale du développement durable doit être baséesur une série de priorités, notamment le fait de réaffirmerles droits fondamentaux, de se demander dequoi nous avons vraiment besoin et de chercher lacoopération des acteurs impliqués ; par ailleurs, chacundevrait contribuer à enrichir les projets locauxet, dans un sens plus large, aider à renouveler lespolitiques publiques locales.Dans le contexte de la crise, ces idées devraientêtre la base pour définir des priorités de développementdurable social. La voie pour atteindre cetobjectif doit être celle d’adopter une vision holistiquedes problèmes sociaux, environnementaux etéconomiques, de redistribuer la richesse et de donnerà chacun une part raisonnable. Les problèmesactuels de la société et de la démocratie devraientévoquer des réponses construites autour de nouvellesperspectives collectives et un plan pour unavenir commun tenant compte de chaque individu.Dans le modèle de développement durable chaquepersonne aura un rôle pour aider à construire l'aveniret aura les moyens de développer ses proprestalents dans une société dotée d’une forte dimensionrelationnelle.L'aggravation de l'inégalité, la dégradation dessystèmes de protection sociale, et l'individualisationdes risques et des incertitudes quant à l'avenir seconjuguent pour rendre tout le monde profondémentindividualiste car il n'y a pas de stratégie claire quantà la façon dont nous pouvons agir collectivement. Laréponse nécessaire pour relever les défis du changementclimatique est un engagement collectif, et celaimplique de repenser complètement nos habitudesde consommation et nos modes de vie afin que lasociété dans son ensemble avance vers le développementdurable.Les élections présidentielles qui auront lieu enFrance au cours du premier semestre 2012 et le faitque le pays assume actuellement la présidence duG20 signifient pour les organisations de la société civileune occasion de contribuer au débat. C'est aussiune opportunité pour ouvrir de nouvelles perspectives,pour reformuler les objectifs et les stratégiesde développement économique et de progrès social,changer de cap et orienter la société vers un nouveaumodèle axé sur un changement de paradigmeconcernant les questions sociales et écologiques.La justice sociale et la cohésion sociale devront êtrereconstruites et considérées comme un moyen desurmonter la crise mondiale et non pas comme unluxe que certains possèdent. n<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 113 France


ghanaPolitiques de Changement climatique et Droits des citoyensAborder le changement climatique est essentiel pour le développement durable du pays. Depuis 1992 des effortsont été effectués au niveau national pour respecter les décisions de la Convention cadre des Nations Unies sur lechangement climatique (CCNUCC), mais les possibilités bilatérales et multilatérales de financement pèsent surla façon d’aborder les vrais préoccupations des citoyens, astreintes par un cadre néolibéral. Les organisationsde la société civile doivent redoubler leurs efforts d’activisme pour assurer la promotion de justice sociale,d’équité de genre et de développement durable.NETRIGHTDe même que d’autres pays africains, le Ghana a déjàreçu les premiers impacts du changement climatique: climat plus torride, réduction ou augmentation despluies saisonnières, changements dans les modèles depluie, inondations, houle, raz de marée et une haussedu niveau de la mer qui provoque des inondations etl’érosion côtière. Il résulte de tout cela une baisse de lasécurité alimentaire, l’augmentation de la transmissionde maladies propagées par l’eau, d’importantes perteséconomiques dues à la crise climatique et le déplacementde la population motivé par les inondations, lasécheresse et la hausse du niveau de la mer.Cependant, depuis la Conférence sur le Développementdurable de Rio de Janeiro en 1992, suite àlaquelle le Ghana adopta la Convention cadre des NationsUnies sur le changement climatique (CCNUCC)et le Protocole de Kyoto en 1997, le Gouvernements’est impliqué dans le thème du changement climatiqueà tous les niveaux, aussi bien mondial que local.Initiatives institutionnelles et politiquesAprès avoir ratifié l’ensemble des Conventions deRio sur l’environnement – la CCNUCC, le Protocolede Kyoto, la Convention sur la diversité biologique(CDB) et la Convention des Nations Unies sur la luttecontre la désertification (CNULD) – , le Ghana a établicomme points focaux de politique différentes institutionsnationales, dont le ministère de l’Environnement,des sciences et de la technologie (MEST),l’Agence de la Protection Environnementale (APE)et l’Autorité du Ghana pour l’Environnement et leChangement climatique (GECCA).Néanmoins, la position acritique de ces institutionsenvers les décisions de la CCNUCC et duPK est problématique. Le Ghana était dans les 23premiers pays d’Afrique à adhérer en 2009 à l’Accordde Copenhague alors que les pays africains s’étaientinscrits collectivement contre celui-ci. Il semble quele pays ait adopté cette position pour avoir accèsaux nombreux guichets de financement disponiblespour des mesures d’adaptation et d’atténuation surle changement climatique. Toutefois, depuis ce jourle Ghana a échafaudé une Stratégie nationale d’adaptation,créé un Comité national pour le changementclimatique et il a élaboré un document de débat surun cadre de politique nationale relatif au changementclimatique (NCCPF, d’après le sigle anglais).Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 77Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé100Enfants atteignantla cinquième annéeIEG = 6210061 d’école059100 10093Survivance jusqu’àl’âge de 5 ansDans ses Évaluations nationales de communication(NCA), l’Agence de Protection environnementaledu Gouvernement a fourni des renseignementsutiles sur l’effet des différents scénariosdu changement climatique sur certains secteurséconomiques, et leur impact sur les moyens desubsistance de la population. Cependant, l’étudedes retombées sur les femmes se fonde sur la vulnérabilitéde celles-ci au lieu de se fonder sur lesdroits humains ou le développement humain 1 . LeProgramme des Nations Unies pour le développement(PNUD) a signalé dans son évaluation despays qui développent les plans d’action nationauxd’adaptation (PANA):En général, les PANA considèrent les femmescomme des victimes qui n’ont aucune compétencepour participer à des négociations ou àla planification stratégique. De plus, un grandnombre de plans ne reconnaissent même pasque les femmes puissent contribuer avec leursconnaissances aux processus d’adaptation ouqu’elles doivent être le groupe central des programmesd’adaptation 2 .1 I. Dankelman, “Climate Change: Learning from GenderAnalysis and Women’s Experiences of Organising forSustainable Development”, en Gender & Development,Vol. 10 (2002):21-29; Dankelman, et al., Gender, ClimateChange and Human Security Lessons from Bangladesh,Ghana and Senegal, (Ghana: Women’s Environmentand Development Organization (WEDO), ABANTU forDevelopment, Action Aid Bangladesh y ENDA en Senegal,2008), .2 PNUD, Guide de Ressources sur l’égalité entre les genres etle changement climatique, (New York: 2009).Indice d'Equité de Genre (IEG)Éducation190L'autonomisation100 79100Activité économiqueLe document de débat sur le NCCPF offre un autremotif de préoccupation. Ses objectifs —1. Encouragerune croissance faible du carbone ; 2. Adaptationeffective au changement climatique ; 3. Développementsocial— semblent tous les trois louables,mais leur mise en place et les retombées politiqueslaissent fort à désirer. De même que pour des propositionsantérieures, le NCCPF est intégré dans uncadre d’options orientées vers le marché, telles quedes projets de commerce de carbone, y compris laRéduction des émissions issues du déboisementet la dégradation forestière (REDD). Le NCCPF secentre sur des schémas de financement disponiblespour les pays en développement qui se montrentdisposés à mettre de côté le critère d’adaptation etd’atténuation promu par le marché.L’engagement de la société civileÉtant donné qu’au Ghana le NCCPF s’est fondé surune ample consultation faite à une série d’acteurs, ycompris des groupes de la société civile tels que LesAmis de la Terre et ABANTU pour le développement,les centres d’intérêt n’ont pas été suffisamment articulésdans le document du débat. Le sujet de l’égalitédes femmes en est un bon exemple, puisqu’il estdébattu à l’intérieur de l’objectif « développementsocial » du NCCPF. Même si le document reconnaîtla contribution des femmes et le besoin d’aborder lesrisques qu’elles pourraient courir en raison du changementclimatique, la prescription politique mentionnetout juste la nécessité « de mesures telles quela protection sociale pour atténuer les inégalités » 3 .3 Ministère de l’Énergie, des sciences et de la technologie (MEST,selon son sigle en anglais), Ghana Goes for Green Growth:National Engagement on Climate Change, (Accra, 2010), p. 13.88Rapports nationaux 114 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


Tableau 1Tendances de la masse forestière duGhana 1990-2005AnnéeMasseforestière(Hectares)Indice deDéforestation1990 7.448.000 -2000 6.094.000 -18,2%2005 5.517.000 -9,5%Moyenne annuelle -1,8%Source: Rainforest Alliance, 2006/FAOFigure 1Accès à l’assainissement amélioré par région en 20083025201510Changement climatiqueLes données de 1960 à 2000 mettent en relief unehausse progressive de la température et une diminutiondes précipitations moyennes annuelles danstoutes les régions agro-écologiques 4 . Les estimationsrévèlent que la température continuera à monter danstoutes les régions agro-écologiques en moyenne « de0,6 ºC (degrés centigrades) environ, de 2,0 ºC et de3,9 ºC pour les années 2020, 2050 et 2080, respectivement», à part la zone de forêt tropicale où la pluiepourrait augmenter. Les données disponibles révèlentaussi une hausse du niveau de la mer de 2,1 mm paran au cours des 30 dernières années, ce qui supposeraune augmentation de 5,8 cm, 16,5 cm et 34,5 cmen 2020, 2050 et 2080, respectivement 5 .Tandis que 23 % de la population urbaine et 51,6 %de la population rurale vit sous le seuil de la pauvreté 6 , ilconvient de signaler que les données de l’Enquête 2008sur les niveaux de vie au Ghana (GLSS) révèlent quele nombre de personnes vivant en situation d’extrêmepauvreté a diminué de 8,6 points, passant de 26,8%en 1998-1999 à 18,2% en 2005-06 7 . Néanmoins cettetendance pourrait s’inverser, car étant donné la forte dépendancedu pays vis-à-vis de l’agriculture et de la sylviculture,les conditions climatiques changeantes ont degraves conséquences sur le niveau de vie des femmeset des hommes dans ces communautés. On a déjà lapreuve que les ressources économiques vitales – zonecôtière, agriculture et eau – sont touchées par le changementclimatique, ce qui se répercute négativementsur les droits des femmes, la pauvreté, la santé et lesmoyens de subsistance. Les personnes vivant dans descommunautés dont le taux de pauvreté est élevé vontêtre celles qui en subiront le plus négativement l’impact.En 2007, les inondations survenues dans larégion nord du pays ont démontré que l’impact duchangement climatique sur les efforts de développementest impressionnant. On calcule que 317 000personnes ont été touchées ; 1 000 kilomètres deroutes ont été détruites ; 210 écoles et centres desoin ont subi des dégâts et 630 installations d’eaupotable ont été endommagées ou contaminées.4 Modern Ghana, “Climate Change Ghana’s Threat to CocaProduction”, (22 août 2008), .5 LWF Youth Blog, “Youth challenge leaders on climate changeat UN”, (septembre 2007).6 Le seuil de pauvreté au Ghana a été établi en 2006 sur labase des besoins caloriques pour la nutrition définis dans lesseuils de pauvreté.7 UNDP, Human Development Report, (Accra, 2007).50NordHaut Ghana orientalHaut Ghana occidentalBrong AhafoDepuis lors, la variabilité du climat continue à frapperdifférents groupes sociaux et zones géographiques,ralentissant les efforts entrepris pour atteindre les Objectifsdu Millénaire pour le Développement (OMD). LesOMD se sont incorporés à la Stratégie de réduction de lapauvreté au Ghana (GPRS, 1-2003-2005 et GPRS 11-2006-2009), mais l’impact du changement climatiquemontre déjà clairement que l’Objectif du Millénaire nº 7(OMD-7) — garantir la durabilité de l’environnement— ne sera pas atteint. Qui plus est et vu le caractèremercantiliste des politiques du Gouvernement menantl’action sur le changement climatique, on voit mal commentles tendances actuelles pourraient s’inverser pouratteindre l’OMD-7.Les quatre objectifs convenus pour l’OMD-7sont les suivants :• Inclure les principes de développement durabledans les politiques et les programmes nationaux etinverser la perte des ressources à l’horizon 2015 ;• Réduire la perte de la biodiversité, pour arriverà une baisse significative du taux de perte en2010 ;• Réduire de moitié le taux de personnes sans accèsdurable à l’eau potable et à l’assainissementpour 2015 ;• Obtenir une amélioration significative de la vied’au moins 100 millions d’habitants des quartiersmarginaux à l’aube de 2020.En ce qui concerne l’indicateur de l’objectif de biodiversité,le pourcentage de la superficie couvertepar les bois, on calcule que les forêts du Ghana ontdiminué de 8,5 points entre 1990 et 2005, passantde 32,7 % à 24,2 % (voir Tableau 1). La superficieforestière était estimée à 7 448 000 hectares et ellen’a cessé de diminuer chaque année, descendant à 5517 000 hectares en 2005 8 .8 Ministère de l’Énergie, des sciences et de la technologie (MEST,selon son sigle en anglais), Ghana Goes for Green Growth:National Engagement on Climate Change, (Accra, 2010).VoltaAshantiCentreOuestSource: Enquête démographique et de santé au Ghana 2008Un autre indicateur mesurant les progrès versl’OMD-7, celui des « populations sans accès durableà l’eau potable ni aux assainissements élémentaires», montre qu’il est improbable que l’objectifsoit atteint en 2015. Les données disponibles del’Enquête démographique et de la santé au Ghana(GDHS) révèlent que la couverture nationale de l’assainissementamélioré a augmenté de 8,4 points,passant de 4 % en 1993 à 12,4 % en 2008 9 . Il existecependant suivant les régions de profonds écartsquant à l’accès à un assainissement amélioré. Dansla région du Grand Accra et dans les régions orientalesle pourcentage de population ayant accès auxservices d’assainissement dépasse la moyenne nationalede 12,4 % ; les régions occidentales sontégalement proches de la moyenne nationale (VoirFigure 1). D’autres régions, y compris Ashanti etles régions occidentales, restent en dessous de lamoyenne nationale, alors que pour les trois régionsdu nord (Nord, Haut Ghana occidental et Haut Ghanaoriental), qui vivent la pire pauvreté, il est moins probablequ’elles aient accès à des installations amélioréesd’assainissement 10 .Le Gouvernement, confronté dès à présent augrave impact du changement climatique, a instaurédes institutions nationales chargées de relever ledéfi. Les solutions politiques, cependant, sont endéphasage avec la détérioration écologique et ellesobéissent de préférence aux besoins du marché,de sorte qu’elle ne permettent pas de traiter avec lasensibilité et la spécificité nécessaires les sujets quipréoccupent la société civile. n9 Le Service statistique du Ghana (Ghana Statistical Service)etle Service de santé du Ghana (The Ghana Health Service), The2008 Ghana Demographic and Health Survey, (Accra, 2008).10 Les zones rurales des trois régions septentrionales du Ghanasont très loin d’avoir atteint l’objectif visant l’accès auxservices élémentaires d’assainissement. Voir: Commissionnationale de planification du développpement, GhanaObjectifs du Millénaire pour le Développement 2007, (PNUD,2007).EstGrand Accra<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 115 Ghana


guatemalaAux portes de la mort environnementaleHistoriquement, l’économie du Guatemala s’est structurée autour du modèle d’extraction, ce qui a provoquél’appauvrissement de la population rurale et la dégradation de l’environnement. L’industrie de la canne à sucre acontribué, par exemple, au déboisement, en entraînant le déplacement de communautés entières dont les droits ontété laissés de côté en faveur des intérêts économiques timidement régulés par l’État. Les gouvernements successifsont contourné la responsabilité de créer des institutions respectueuses de l’environnement et des besoins de lapopulation. La société civile doit exiger une participation majeure dans la prise des décisions ; elle doit prier instammentle Gouvernement de laisser de côté les modèles destructifs d’extraction en faveur d’un développement durable.Coordinación de ONG y Cooperativas de GuatemalaCONGCOOPNorayda Ponce SosaHelmer VelásquezDepuis le début du XVIème. siècle, lors de la conquêteespagnole, l’économie du Guatemala a été basée surl’agriculture et l’exploitation intensive de la terre soitpar de grands domaines agricoles (latifundia) consacrésaux monocultures pour l’exportation soit par depetites exploitations de production de subsistance etd’infra subsistance. Pendant la dernière décennie, lepays a connu une nouvelle menace à la biodiversité, àsavoir des licences octroyées par l’État à des sociétésd’exploration minière dans presque tout le territoire.L’exploitation du fer et de l’or a provoqué la présencede substances chimiques comme le cyanure parexemple, utilisé dans l’industrie de l’or, qui produitdes dommages irréparables aux sources d’eau. Cesindustries consomment de grandes quantités d’eauce qui met en danger l’accès des communautés localesà cette ressource.Le pouvoir acquis par ces grandes industriescontraste avec des institutions publiques instables,incapables de contrôler les activités industrielleset de promouvoir un modèle alternatif de durabilité.Les modèles de développement mis en placeau Guatemala manquent absolument d’un planningà long terme et mettent en danger l’environnement.En outre, ils ont plongé la moitié de la population ensituation de pauvreté. En milieu rural, plus de 72 %de la population vit dans la pauvreté et 40 % dansl’extrême pauvreté, alors que 55 % des communautésindigènes souffrent d’extrême pauvreté 1 .Le ministère de l’Environnement et des ressourcesnaturelles et le ministère de l’Agriculture,de l’élevage et de l’alimentation, tous deux responsablesde réguler et d’administrer l’environnement,les ressources naturelles et l’agriculture, manquentde capacité financière et leur poids politique sur lesdécisions de l’État est faible. En fait, le pays n’a pasla capacité pratiquement de planifier et contrôler lessecteurs agraires et de l’environnement sur lesquelss’appuie la durabilité économique, sociale et environnementaledu Guatemala. Un rapport du Gouvernementaffirme que le pays se trouve « face à une1 Plataforma Agraria, Propuestas políticas, (juillet 2008), .Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 80Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialiséIndice d'Equité de Genre (IEG)100Enfants atteignantIEG = 49100la cinquième année70 d’écolesituation socio-environnementale dégradée, dontles principaux indicateurs sont mis en évidence parla croissante dégradation des structures sociales découlantde la marginalisation de vastes secteurs de lapopulation. Cet effroyable panorama est directementlié à l’environnement et à la pauvreté. La populationrurale est à ce jour plus pauvre qu’auparavant, quelorsqu’elle pouvait accéder aux fruits de la nature ».” 2L’environnement et la non-durabilitéL’industrie de la canne à sucre, responsable de ladéprédation et de l’abattage des forêts pour cultiverla canne à sucre, est un exemple de la non-durabilitédu modèle actuellement mis en place. Basée sur lepouvoir économique et politique de ses propriétaires,cette industrie a même réussi à changer lecours des rivières pour assurer l’irrigation de sescultures. Des inondations plus fréquentes pendantl’hiver et une plus grande sécheresse pendant l’étésont les conséquences environnementales de cephénomène. « Environ 90-95 % de la canne à sucrecultivée sur plus de 200 000 ha sont brûlés commeconséquence du processus industriel. Chaque hectarebrûlée libère 50 kilos de CO 2dans l’atmosphèrece qui représente environ 9000 tonnes de dioxyde decarbone par an ». 3L’agriculture et les industries d’extraction plus récentesont exploité les forêts en négligeant la mise enplace de processus de reboisement sérieux et durables ;le bois a été utilisé non seulement pour la constructionmais aussi comme source d’énergie. Suite à cela, lesforêts naturelles ont été anéanties. Le taux de déboisementatteint 82 000 ha environ par an. Si l’exploitation2 Informe Ambiental Gobierno MARN.3 Ibid.051100 10060L'autonomisation1005010096 89Survivance jusqu’àl’âge de 5 ansÉducationActivité économiquecontinue à ce rythme, toutes les forêts naturelles duGuatemala auront disparu d’ici 2040. 4Une terre très vulnérableLe pays est menacé par des phénomènes météorologiqueset tectoniques car il est situé sur la route des ouragansde l’océan Atlantique et de l’activité sismique del’océan Pacifique. En outre, le corridor sec qui traversela partie centrale du pays est menacé par la sécheresseet la désertification. Le changement climatique a intensifiéles effets de ces deux phénomènes. 5En 2010 les pertes matérielles, suite à latempête tropicale Agatha et à l’éruption du volcanPacaya, ont atteint environ 950 milliards d’USD etprovoqué des centaines de morts. La vulnérabilité dela population rurale s’est avérée évidente. Le manquede planification et de vision à long terme du Gouvernementainsi que l’exploitation non régulée de l’environnementcréent un cercle vicieux qui provoque desérieux problèmes au pays, aggravés encore plus parla catastrophe naturelle suivante.Développement durable et développement ruralLes paysans – victimes de la répression du Gouvernementpendant les 36 ans de conflit armé et sesconséquences – ont été affectés négativement par lesmesures d’ajustement structurel et l’ouverture commercialemises en place ces dernières années.Le 30 avril 2008, après un long processus deconsultation, l’Alliance pour le développement ruralintégral (ADRI), constituée par des organisations indigènes,paysannes, écologistes, syndicalistes, des4 Palma, Gustavo, Taracena, Arturo, Baumaister, Eduardo,Cambios en la tenencia de la tierra: tendencias históricas,(Guatemala : PNUD, 2004).5 Informe Ambiental Gobierno MARN.Rapports nationaux 116 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


centres de recherche et des organisations non gouvernementales,a conclu avec le Gouvernement l’Accord-cadrepour le processus de dialogue national pourle développement rural intégral et la résolution de laconflictualité agricole, du travail et de l’environnement.En novembre de cette même année, les mêmes organisationssociales – avec les représentants du Gouvernementet la présence des conseillers politiques de la présidencede la république -, ont soumis au président de larépublique la proposition de Loi du système national dedéveloppement rural intégral accordée par consensusà travers le processus de dialogue qui couvre par laloi « la population rurale en situation de pauvreté etd’extrême pauvreté, donnant la priorité aux populationset communautés autochtones et paysannes ayant desterres insuffisantes, improductives ou sans terre ; auxfemmes indigènes et paysannes ; aux salariés permanentsou temporaires, aux artisans, petits producteursruraux, petits et moyens entrepreneurs ruraux ». 6 Troisans après sa présentation, cette proposition de loiencore bloquée au Parlement, est devenue le parfaitexemple du manque de volonté politique de trouverdes solutions réelles aux problèmes de l’agriculture età l’utilisation des ressources naturelles au Guatemala.En attendant, les communautés locales résistent àl’installation de mégaprojets sur leurs territoires, questionignorée par les entreprises et par l’État. Frustrées,des populations entières abandonnent leurs terres ancestralesen quête de nouveaux moyens de subsistance.La résistance indigènePour la population maya, l’opposition non-violente aux projets de développement qui les concernentainsi que la « territorialité » sont une question de principes. Selon l’activiste Leonor Hurtado,appartenant au Front national de résistance à l’activité minière du Guatemala, ceci est « directementlié à la liberté et à la dignité. Ce genre de résistance permet d’affronter l’agression de manièrepacifique et active, de promouvoir l’unité de la communauté avec un objectif commun, de stimulerl’organisation et la mobilisation basées sur les propres valeurs et sur l’identité culturelle ». 1 .Lors d’une interview avec Hurtado, les « Principaux » (leaders indigènes) ont expliqué à SanJuan Sacatepéquez que leur attitude de résistance pacifique implique de « respecter notre mèrela Terre et que sa force nous dise quoi faire »… « Voici notre résistance, écouter et faire ce quenos grands-parents nous ont appris, ce qu’ils ont fait depuis toujours. Nous ne pourrons jamaisaffronter une menace avec des armes parce que les armes signifient la fin, la mort… les armestransforment les gens qui deviennent plus faibles et méprisables. Nous, les peuples autochtones,venons de la nature et nous résistons en silence, sans nous fâcher ; nous savons que nous sommesdignes et que nous avons raison. Ces valeurs nous ont permis de survivre et de résister pendantdes siècles ; elles nous permettent aussi de savoir que nous avons la capacité et les connaissancespour nous défendre et pour contribuer ».Un autre « Principal » de Sipacapa, a déclaré à Hurtado que : « L’or est plus utile et sa valeur estplus grande ici, dans nos montagnes. L’or est la structure de la montagne : il la supporte, il lui donnesa forme, son énergie et son équilibre pour que la vie existe. S’il est extrait, la montagne est détruite.Et même si par la suite on essaie de tout arranger, ce ne sera jamais pareil ».Un géologue a dit à Hurtado que le leader indigène de Sipacapa « a tout à fait raison. L’or faitpartie de la structure de la montagne, et la structure est indispensable pour que la vie existe ».1 Hurtado, Leonor, Explotación minera: Una herida en la tierra y en la sociedad, Revista Pueblos, Madrid, juin 2006.Exploitations minières et résistanceLa Banque mondiale estime que le crédit octroyé parla Corporation financière internationale (CFI) à la sociétécanadienne Glamis Gold Corporation pour ouvrirla Mina Marlin dans le département de San Marcos,projet qui affecte les communes de San Miguel Ixtahuacánet Sipacapa, est un apport au « développementnational ». Ni l’institution financière ni le Gouvernementn’ont analysé la possibilité d’utiliser les revenusobtenus de l’exploitation de l’or pour mettre en placeun plan de développement régional durable qui soitapproprié du point de vue culturel et environnemental.Ils n’ont pas non plus évalué les coûts et les bénéficessociaux, environnementaux et économiques du projetpour établir la durée et la manière d’exploiter la mine.Un mouvement social contre l’exploitation minièreà grande échelle a accusé le Gouvernementd’imposer un projet comme un fait accompli alorsqu’en fait, il n’avait pas consulté la population dela région comme le prévoit le droit international.Conformément aux dispositions de la Convention169 de l’Organisation internationale du travail (OIT),l’État doit « consulter les gens intéressés par le biaisde procédures appropriées et, en particulier, à traversses institutions représentatives, lorsque des mesureslégislatives ou administratives susceptibles deles affecter directement seront prévues ». 7Bien que la convention ait été ratifiée par le Gouvernement,beaucoup de mécanismes manquaient à6 CNOC, CNP-T, CNAIC, CONGCOOP/IDEAR, “Comunicado dePrensa: El Gobierno debe cumplir sus compromisos en relacióna la Política y la Ley de Desarrollo Rural Integral”, février 20097 ILO, Indigenous and Tribal Peoples Convention 169, (1989),.sa mise en œuvre. La loi d’exploitation minière estaussi en contradiction avec le Code municipal et laLoi de Conseils de développement urbain et rural.Un regard vers l’avenirPour renverser les processus de dégradation de l’environnementet de la qualité de vie de la population, leGouvernement doit adopter un modèle de développementdurable le plus tôt possible. Il est urgent d’imposerun système capable de protéger l’accès démocratiqueà la terre et son utilisation tout en respectant la nature.Le Guatemala doit préserver son énorme richesseen termes de biodiversité. Il est nécessaire d’établir desplans de récupération de la terre pour protéger et soutenirles surfaces destinées à la production d’aliments.Ces plans doivent impliquer l’ensemble de la société,et notamment les populations affectées, dans un vasteprocessus de planification nationale. Les communautéslocales doivent prendre les décisions-clé sur la manièrede changer l’environnement de leurs territoires etsur les moyens à utiliser pour y parvenir. Ces importantesdécisions doivent être basées sur les valeurs, lavision du monde et les aspirations de développementdes populations locales. Les plans de développementdoivent être construits autour des écosystèmes du payset des intérêts des habitants de la région.La durabilité doit se baser sur un modèle de développementrural orienté vers la terre elle-même et ladistribution équitable de la richesse. Les modèles envigueur sont centrés sur les entreprises privées et leurpillage des terres. Si l’on veut réussir dans le domainedu développement rural, il faudra se baser sur l’agricultureà petite échelle, sur l’exploitation familiale. Ce n’estqu’à partir de ce modèle que les familles paysannespourront accéder aux crédits, à l’assistance technique,à l’éducation, à la technologie et l’infrastructure nécessaires.Les programmes de recherche agro-écologiquequi travaillent sur la manière de réduire au minimumabsolu l’utilisation de produits chimiques qui nuisentau sol doivent être établis et soutenus. Il faut prendreles mesures pour protéger les écosystèmes. La communautéet l’État doivent veiller à protéger les semencesnatives, notamment les graines.Il est aussi urgent de reprendre les Accords depaix signés en décembre 1996. Ces accords, ajoutésà l’Accord-cadre pour la mise en place, doivent être labase des engagements de l’État. Les gouvernementsdoivent reconnaître que le Guatemala est un paysmulticulturel, multilingue et multiethnique. Les Accordsde paix reconnaissent que la participation descitoyens est un facteur clé pour la prise de décisionsvisant à la transformation structurelle du pays.La participation de la population doit aussi envisagerle domaine du développement durable. Il est nécessairede considérer tout spécialement les mesures àprendre pour que les communautés ayant été déplacéessuite au conflit armé puissent être réinstallées. Il faut définirles critères qui régissent la production et la gestiondurable des ressources ainsi que la sélection des terrespropices, la récupération des terres polluées, la gestionde l’eau, l’infrastructure et l’assainissement. À son tour,un accord sur l’identité et les droits des populationsindigènes renforcera les aspects liés à l’environnement,à l’utilisation rationnelle des ressources naturelles, dela science et la technologie pour préserver l’environnementet la gestion durable des ressources naturelles. n<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 117 Guatemala


hondurasUne violence insoutenableLe principal obstacle au développement durable au Honduras est la violence qui atteint presque toutes lescouches de la structure sociale, dans les secteurs urbains et ruraux. La population en général, et les femmesen particulier sont les victimes d’un déferlement de crimes violents qui provoque le taux d’assassinats le plusélevé du monde. Malgré d’autres questions urgentes y compris la dégradation de l’environnement, l’iniquitééconomique, les faibles performances éducatives et l’accès limité aux services de santé, la priorité doit viser àréduire les effrayants niveaux de violence existants. La plupart des victimes étant des femmes, il est impératifd’aborder cette question à partir d’une approche genre.Centro de Estudios de la Mujer-HondurasMercedes Elena FloresCristina UrbinaÀ l’heure actuelle, le principal défi pour le Honduras estd’attaquer le haut degré de violence qui accable sa populationet qui est mis en évidence par les données concernantla criminalité qu’il est prévu de réduire d’ici 2038« au niveau de la moyenne internationale ». Suivant unrapport du PNUD 1 , le taux d’assassinats de l’ensembledes pays d’Amérique centrale est de 44 pour 100 000habitants, ce qui représente 11 fois la moyenne mondialede 4 assassinats pour 100 000 habitants. En 2010,le taux d’assassinats au Honduras a atteint 77,5 pour100 000 habitants. Suivant l’Organisation mondiale dela santé, le taux considéré normal est de 9 homicidespour 100 000 personnes ; ce taux est considéré commeune épidémie à partir de 10 homicides 2 .La violence, phénomène endémique dans le pays,a sensiblement augmenté après le coup d’état de juin2009. Après le renversement institutionnel, des activistesde genre des Amériques, réunies dans l’Observatoireféministe (Observatorio feminista) ont constaté àTegucigalpa la « participation massive des femmes auxmobilisations » contre le Gouvernement de facto où ungrand nombre d’activistes ont été victimes « d’abussexuels » par des membres de l’armée 3 et qu’un bonnombre a été « attaqué à coups de gourdin sur différentesparties du corps, notamment les seins et lesfesses » et que ces femmes ont souffert d’ « agressionsverbales » telles que « putes, rentrez chez vous ».Dans certains cas, les intimidations fréquentesont mené les femmes à s’éloigner de leurs familles« pour protéger leurs enfants et éviter des violationsde domicile », notamment dans les départements deTegucigalpa et San Pedro Sula. Un autre aspect de cescénario cruel montre une « recrudescence du fémicide»; rien qu’au mois de juillet, après le coup d’état,on a pu constater 51 assassinats de femmes alorsque les sévères statistiques historiques atteignaientdéjà un homicide par jour 4 .1 PNUD. Rapport sur le développement humain pourl’Amérique centrale 2009/2010.2 OMS. Rapport mondial sur la violence et la santé : résumé.3 Observatorio Feminista, Semana de los Derechos Humanosde las Mujeres en Honduras, communiqué de presse,Tegucigalpa, (20 août 2009).4 Observatorio Feminista, op cit.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 86Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialiséIndice d'Equité de Genre (IEG)100 100Enfants atteignantIEG = 6379 la cinquième annéed’école0100 67100Le président actuel, Porfirio Lobo Sosa estarrivé au pouvoir après les élections controverséesdu 29 novembre 2009 ; et par la suite, la situationdes femmes a continué de se détériorer. Le 16 mai2010, une coalition d’organisations dénomméeRésistance féministe (Feministas en resistencia)a assuré qu’ « il y avait eu une augmentation de laviolence contre l’exercice plein des droits établisaussi bien par les institutions internationales quepar notre Constitution ». 5 . Un an après le coupd’état, le Centre d’études de la femme (Centro deestudios de la mujer – CEM-H) a confirmé l’assassinatde sept femmes lors d’une mobilisationcontre la dictature 6 .Un pays tâché de sangPour parvenir à atteindre le développement durable,dans 30 ans ou plus, le premier enjeu deshonduriens est d’arrêter le massacre et la haineentre eux. En janvier 2010, une commission gouvernementalea produit un long document destinéau Parlement national dénommé Vision du pays2010-2038 et Plan de nation 2010-2022 7 . Ce documentidentifiait plusieurs questions sensibles surle thème de la recherche pour un avenir de développementdurable. Les niveaux élevés d’extrêmepauvreté, les faibles performances scolaires, lechômage et l’informalité croissante du marché detravail, la haute vulnérabilité face aux catastrophes5 Feministas en Resistencia, “Ante el agravamiento de larepresión en Honduras”, (16 mai 2010).6 CEM-H, Pronunciamiento público: A un año del golpe de Estadolas mujeres seguimos resistiendo, Tegucigalpa, ( 28 juin 2010.7 Voir : .L'autonomisation100 52 10097 100Survivance jusqu’àl’âge de 5 ansÉducationActivité économique0naturelles, sont des éléments, entre autres, qui ontbesoin de fortes politiques à long terme pour êtrecorrigés. Le rapport représente un grand effort : ilidentifie les faits et les chiffres et établit des ciblesréalistes à moyen et long terme pour obtenir deschangements.Violence contre les paysans et fémicideLes causes et les victimes de la violence dans le payssont nombreuses. La violence entre bandes rivales(maras) est fréquente et leurs batailles sont absolumentsauvages. Suivant les manifestations de Custodio,la décapitation, l’une des formes de violenceutilisées par les maras, « est devenue habituelle alorsqu’auparavant elle était vraiment rare, ce qui veutdire que l’on s’habitue de plus en plus à des actesd’agression contre le corps humain » 8 .Les cas de violence contre des communautéspaysannes se sont aussi multipliés pendant ces dernièresannées. Entre janvier 2010 et début octobre2011, 40 personnes liées à des organisations paysannesde la région de la vallée du Bajo Aguán ontété assassinées. 9Le visage féminin d’un pays insoutenableIl n’y a aucun espoir dans un pays avec un tel degré deviolence. Si l’on considère la problématique générale,la violence de genre atteint des niveaux aberrants,notamment contre la femme ; il y a eu également uneaugmentation alarmante des cas de violence contredes citoyens transsexuels, suivant les dénonciations8 El Informador. “Violencia en Honduras ha alcanzado nivelesde epidemia. Derechos Humanos”.9 La vía campesina. “Honduras: Violencia extrema contracomunidades campesinas en el Bajo Aguán”.39Rapports nationaux 118 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


de la Commission interaméricaine des droits humains10 et l’ONG Human Rights <strong>Watch</strong> 11 .Au Honduras, le fémicide augmente de plusen plus. Entre 2003 et 2010 il y a eu 1464 victimes.Les femmes entre 15 et 29 ans représentent 44% des assassinats féminins. Rien qu’en 2010 ily a eu plus de 300 cas, dont à peine 22 sont arrivésdevant la justice (7,3 %) 12 . Sur un total de944 assassinats de femmes entre 2008 et 2010, lajustice n’a condamné que 61 meurtriers (6,4 %) 13 .Le corps des femmes fait l’objet des agressions deshommes qui démontrent ainsi leur pouvoir et leursdésirs de vengeance, profitant de l’impunité et sansque le Gouvernement n’applique aucune mesure desécurité ni de justice.Ajouté à tout cela, la situation de la femme honduriennemontre de sérieux désavantages dans tousles domaines. Les femmes représentent 51,7 % des7 869 089 d’habitants du Honduras et 41 % de sapopulation économiquement active ; outre cela, ellesconcentrent 91,1 % du travail domestique des familles.Pour différentes raisons, le chômage chez lesfemmes (3,7 %) est plus faible que chez les hommes(4 %) 14 . Le chômage est plutôt concentré chez lesplus jeunes : 52,6 % des 101 296 chômeurs du paysont moins de 24 ans 15 .Les crises économiques qui ont frappé le paysdepuis la fin du XXème. siècle ont obligé des milliersd’hommes et de femmes à migrer dans le paysou même à l’étranger à la recherche de meilleuresconditions de vie et pour envoyer de l’argent à leursfamilles. 16 . Suite à ce phénomène, plus la désintégrationdes familles et la violence domestique, quatrefoyers honduriens sur dix dépendent d’une femme.Quarante pour cent de ces foyers connaissent l’extrêmepauvreté, contre 35 % des foyers qui dépendentd’un homme. 17 .Avant le coup d‘état de 2009, le Honduras vivaitdéjà un lent processus de réduction de la pauvretéqui atteignait, en 2005, 63,7 % des foyers et 58,8 %en mai 2009. Toutefois, la population entre 20 et 59ans a plus de risques d’être pauvre, notamment dansles secteurs ruraux où ce chiffre atteint 68,5 % desfemmes. Pour atteindre les Objectifs du Millénairepour le développement des Nations Unies d’ici 2012,10 Comisión Interamericana de Derechos Humanos. “CIDHobserva con profunda preocupación asesinatos deintegrantes de la comunidad transgénero en Honduras”.11 Human Rights <strong>Watch</strong>. “Se Exhorta al Presidente PorfirioLobo Sosa Investigar Muertes Recientes de MujeresTrangénero en Honduras”.12 CEM-H, Día de la Mujer Hondureña: Más que una celebraciónexigimos una patria libre, communiqué de presse,Tegucigalpa, (25 janvier 2011).13 Source : Estadísticas de las Unidades de Delitos contra laVida de las Mujeres, de la Fiscalía Especial de la Mujer. 2010.14 Programa de Cooperación Internacional de la Junta deAndalucía, Programa Operativo País Prioritario Honduras2010-2011, Tegucigalpa, 2010.15 Encuesta Permanente de Hogares de Propósitos Múltiples.EPHPM, INE. Mai 200916 L’argent reçu en moyenne par les familles est de 313,50 USDpar mois, une réduction de 1 % par rapport au même mois de2009 (rapport de la Banque centrale du Honduras, août 2010).17 Programa de Cooperación Internacional de la Junta deAndalucía, op cit.il faudrait réduire la pauvreté du pays de 3,6 % par anet l’extrême pauvreté de 1,6 % par an.L’économie du Honduras est basée, notamment,sur les remises d’argent reçues des migrants ;ces envois de fonds représentent 21 % du PIB, cequi dépasse les revenus obtenus des exportations,maquilas et tourisme. Cet argent reçu par les famillesest le principal soutien pour beaucoup de foyers.Discrimination sur le marché du travailLe marché de travail féminin est caractérisé par lestravaux temporaires et les faibles revenus ; il n’existeaucune politique d’État orientée vers l’éradicationde la discrimination des femmes sur le marché dutravail.Dans les maquilas (zones franches de traitementdes exportations), les femmes travaillent dansdes conditions de précarité et d’exploitation. Laplupart des employés sont des femmes jeunes, de17 à 25 ans. Pendant les trois dernières années, lesmaquilas ont connu des réductions de personnelsystématiques. La crise financière internationale,démarrée en 2008, a eu un impact sur les établissementstextiles et des vêtements dont les exportationsse sont réduites de 10 %. En même temps, la crisepolitique a remis à plus tard les investissements prévus,ce qui a aussi eu des conséquences sur la maind’œuvre féminine.Le parlement a aussi approuvé la création de« régions spéciales de développement » ou « villesmodèle » qui constituent en fait une continuité approfondiedes paradis fiscaux, où la force de travailféminine sera éliminée, de la même façon que dansles maquilas 18 .Les femmes constituent la plus grande partie dela force de travail et elles n’ont pas accès aux bénéficessociaux. Leur présence est aussi énormémentmajoritaire dans des secteurs tels que les servicessociaux, de personnels et celui du travail domestique.En général, ces travaux exigent de travaillerau-delà des huit heures règlementaires et, fréquemment,ils présentent des risques pour la sécurité et lasanté, ainsi que des salaires réduits et l’embauchetemporaire. Par contre, le marché du travail masculinoffre des emplois plus sûrs et mieux rémunérés.Éducation, santé, justiceParmi les plus de 15 ans, 15,6 % sont analphabètes,à savoir 15,8 % des hommes et 15,5 % desfemmes. La situation de l’enseignement s’est beaucoupaméliorée pendant ces dernières années ; il y apourtant d’énormes difficultés à surmonter commepar exemple les frais de transport (très élevés), leprix des uniformes et des fournitures scolaires. Lesfemmes consacrent 7,1 ans à leur formation dans lesystème éducatif contre 6,8 ans chez les hommes.Le taux de redoublement des filles est de 8,8 % etcelui des garçons de 12,3 %.D’autre part, la Cour suprême de Justice a reçu,pendant les dernières périodes, une moyenne de 20000 dénonciations par an pour des motifs de vio-18 CEM-H, Día de la Mujer Hondureña: Plutôt que de célébrer,nous exigeons une patrie libre, communiqué de presse,Tegucigalpa, le 25 janvier 2011.lence domestique. La plupart des victimes (41,5 %)sont des femmes entre 19 et 30 ans. Ce phénomèneatteint toutes les classes sociales. Ces agressionscontre les femmes ne font pas fréquemment l’objetde plaintes car elles sont perçues comme « des problèmesinternes du couple ».Les taux élevés de morbidité féminine mettenten évidence les sérieuses déficiences des servicesde santé pour ce qui est de la santé reproductive etla sexualité. Le taux de morbidité maternelle atteint110 sur 100 000 millions d’enfants nés vivants, suivantles données de l’UNICEF, rassemblées par laCEPAL 19 . Suivant ces statistiques, à peine 66,9 %des accouchements ont été à la charge de personnelsanitaire spécialisé en 2006. La situation mérited’être traitée en urgence dans un pays où 38 % desadolescentes de 19 ans étaient déjà mères en 2001.Accès aux ressourcesL’inégalité de l’accès à la propriété des terres etaux revenus provenant de leur exploitation montreencore une fois la discrimination contre la femmehondurienne dont les droits à la propriété ne sontpas reconnus et, par conséquent, n’est pas en mesured’accéder au crédit productif. Ceci limite sonautonomie ainsi que sa capacité de prendre desdécisions, même celles qui correspondent à leurpropre foyer.En 2010 il y a eu quelques progrès quant à l’enregistrementdes propriétés. Entre février et août, lesautorités ont émis 1487 titres de propriété indépendante,dont à peine un tiers (482) correspond à desfemmes paysannes. En même temps, les femmesont reçu 150 titres de propriété de terrains agricoles(28,40 %), alors que les hommes en ont reçu 528(71,60 %). Étant donné le manque d’accès et decontrôle que les femmes ont sur les ressources productives,la plupart ne peuvent pas accéder au crédit.Les mêmes difficultés apparaissent dans le casde la propriété des logements. Suivant l’Enquête nationaledes conditions de vie (ENCOVI), le secteur urbainprésentait, en 2004, le plus grand pourcentagede logements en location (86,2 %) 20 . Les migrationsde la campagne vers la ville ont provoqué une croissanceexplosive des constructions déficientes à SanPedro Tula et à Tegucigalpa. Suivant l’Institut nationaldes statistiques, dans ces deux villes, la populationqui habite dans des bidonvilles est passée de 90 000en 1990 à 1 283 843 en 2010.En général, les logements ne réunissent pasles conditions minimales et ils constituent un dangerpour les familles. Ceci du fait de la qualité desmatériaux utilisés et de l’incidence des phénomènesclimatologiques qui favorisent les glissementsde terrain, les inondations et la destruction desconstructions. Le taux d’entassement est de 19,6pour 20 % de la population à plus faible revenu ; cetaux se réduit sensiblement pour arriver à 1,5 pourles 20 % suivants. n19 Base de données et publications statistiques de la CEPAL surwww.eclac.cl.20 Les Objectifs du Millénaire pour le développement Honduras2010. Troisième rapport de pays.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 119 Honduras


HONGRIELes inégalités sociales augmententAu cours des 20 dernières années, le pays a connu des changements significatifs dans les domaines del’éducation, l’emploi et l´inégalité sociale. La pauvreté et l’exclusion sociale ont conduit à une très grandetension, mais les tendances démographiques, les problèmes dans la santé et la sécurité alimentaire ontégalement créé des difficultés. La pauvreté infantile est sévère, les familles avec plusieurs enfants, notammentdes parents isolés, ont tendance à vivre dans la pauvreté. Parmi les Roms, qui sont particulièrement exposés à ladiscrimination, le risque de pauvreté a augmenté, comme cela s’est produit parmi les chômeurs, les travailleursnon qualifiés et ceux qui vivent en zones rurales.ATTAC HongrieMatyas Benyik 1En 2008, alors que 17 % de la population de l’Unioneuropéenne (UE) vivait dans le risque de tomberdans la pauvreté 2 , l´indice de pauvreté officiel enHongrie n’était que de 12,4 %. Parmi certainsgroupes cependant, ce chiffre était beaucoup plusélevé. Par exemple, entre 2005 et 2009 l´indice depauvreté du groupe d’âge des moins de 18 ans étaitde 20 %. Un enfant sur cinq, une famille sur troisavec trois enfants ou plus et près d’un chômeur surdeux vit dans la pauvreté aujourd’hui, ainsi qu´unRom sur deux 3 . En outre, les personnes pauvres enHongrie sont beaucoup plus pauvres que celles desautres États membres de l’UE. La plupart des expertsnationaux conviennent qu´environ 14 % de lapopulation vit en dessous du niveau de subsistance 4 .Mesurées selon le niveau de vie, les niveaux derevenu, de santé, d’éducation et d’accès aux servicespublics, les inégalités sociales ont augmenté sensiblement.Et ce qui est encore plus critique, c´est quela concentration spatiale de la pauvreté et la ségrégationont également augmenté. Environ 12 % dela population vit en dessous du seuil de pauvreté 5 .Et parmi les Roms – qui représentent environ 10% de la population de la Hongrie - le niveau de vie,les conditions de logement, l’état de santé, l’emploiet l’éducation sont bien en dessous de la moyennenationale 6 . Leur taux de chômage est trois à cinqfois plus élevé, tandis que le nombre de personnesmaintenues par un salarié est trois fois plus élevé quechez les non-Roms 7 .Mais outre la situation particulière des Roms, laprincipale caractéristique du marché du travail hon-1 Président d´ATTAC Hongrie2 Eurostat, Living conditions in 2008: 17% of EU27 populationat risk of poverty, (Eurostat Communiqués de presse, 18janvier 2010).3 RT, Poverty pushes Roma into crime in Hungayr, (12 juillet2010).4 IndexMundi, Hungary population below poverty line, (2011).5 Global Edge, Hungary statistics, (Michigan State University,2009).6 BBC News, Amnesty accuses Hungary of failing to protectRoma, (10 novembre 2010).7 Hungarian Central Statistical Office, Labour market stuation,2009. Statistical reflection,Vol.4, no.9, (2 juin 2010).Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 98Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialiséEnfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansgrois est son faible taux d’emploi et de participationde la main d´oeuvre. Par exemple, le faible niveaud’emploi du groupe d’âge de 15 à 64 ans (55,4 %en 2009) est accompagné d’une augmentation duchômage (10,1 % en 2009) avec un taux particulièrementélevé – quoiqu´en baisse - de personneséconomiquement inactives (38,5 % en 2009) 8 . Letaux d’inactivité est le plus élevé parmi les jeunes etles personnes âgées. Une population vieillissante etdes taux de fertilité en berne ont conduit à une baissealarmante de la population économiquement active,ce qui a remodelé le marché du travail du pays.Par ailleurs, la structure de la pauvreté n’a paschangé : les familles nombreuses et les familles monoparentalesont tendance à vivre dans la pauvretéet la pauvreté infantile reste très sévère. Les groupessociaux économiquement actifs les plus pauvressont caractérisés par une structure plus grande queles familles typiques, désavantagés en termes delieu de résidence, avec des problèmes familiaux, desdifficultés de cohabitation, des problèmes de santéet ethniques 9 .Économie et environnementDurant la première moitié des années 90, le produitintérieur brut du pays a chuté de près de 20 %.La part du PIB en agriculture, pour l’industrie et laconstruction a diminué alors que la part du secteurdes services a augmenté de façon dynamique. Le déclindu secteur productif et l’expansion des servicesa contribué à une moindre utilisation des ressourcesnaturelles et à réduire la pollution de l’air et de l’eau.Dans les zones où l’exploitation minière et la métal-8 Ibid.9 Ibid.99+100094100 10099Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 73ÉducationL'autonomisationActivité économiquelurgie se sont réduites ou ont fermé, comme dansle Nord-Est, la pollution de l’environnement a diminuéen raison de la faible consommation d’énergie.Dans les zones agricoles, l’utilisation excessive deproduits chimiques dangereux a considérablementdiminué. Dans le même temps, l’efficacité énergétiquea été améliorée et les systèmes de gestionenvironnementale et des produits respectueux del’environnement se sont progressivement étendus 10 .De cette façon ambiguë, l’objectif de dissocierla croissance économique de l’augmentation descharges sur l’environnement a apparemment étérempli. Ce résultat, cependant, n’est pas dû à unepolitique économique ou environnementale. Aucontraire, il apparaît comme un sous-produit desprocessus spontanés qui ont suivi le changementsystémique déclenché par l’effondrement de l’Unionsoviétique.Dans les dernières décennies, les structuresde production et les modèles de consommation ontconsidérablement changé en Hongrie. Comme indiqué,les tendances favorables sont observablesen ce qui concerne les charges environnementalesde la production, mais les inégalités entre groupessociaux ont augmenté rapidement et, en général, denombreux effets néfastes sur l’environnement et lesmodes de vie ont été amplifiés.La structure de la consommation en Hongrie estdevenue de plus en plus semblable à celle des paysd’Europe occidentale. Cependant, l’augmentation dela consommation intérieure cache des contradictions.L´expansion soutenue de la consommationintérieure par habitant a été de plus en plus financéepar des prêts bancaires fournis principalement en10 Ibid.100040100 82 10098Rapports nationaux 120 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


Les Roms, toujours relégués au dernier planLes Roms sont également connus sous le nom de « Tsiganes ». Des études génétiques modernesont montré que l’origine des Roms remonte au sous-continent indien, probablement à l’actuelterritoire du Rajasthan et qu´ils auraient migré plus tard vers la région du Pendjab. Une étude de2004 a conclu que la plupart des Roms descendent d’un groupe de peuples qui existaient depuisenviron 40 générations 1 . Des peuples de Roms ont été identifiés au XIVe siècle en Crète, on les aappelés les Atsiganoi (« intouchables » en grec). Au cours des deux siècles suivants, ils sont arrivésen Allemagne, en Suède et dans la péninsule ibérique.Parmi les différents sous-groupes des peuples des gens du voyage en Europe, nous trouvonsles Roms, concentrés en Europe centrale et orientale et dans l’Italie centrale, les Kalés ibériques, lesKalés Finnois, le romanichels du Royaume-Uni, les Sintés germaniques et les Manouches français.Pendant la Seconde Guerre mondiale, les nazis et le groupe fasciste croate Ustaše se sontengagés dans une tentative systématique d’élimination des Roms, un processus génocidaire appeléPorajmos en langue romani. Les Roms ont été définis comme « ennemis de l’État fondés sur la race» par les lois de Nuremberg 2 . Le nombre total de victimes a été estimé entre 220 000 et 1,5 milliard depersonnes 3 . Certaines sont mortes immédiatement et d’autres ont été condamnées aux travaux forcéset à l’emprisonnement dans des camps de concentration. En Hongrie, 28 000 Roms ont été tués 4 .Selon le recensement de 2001, 190 000 personnes sont classés « Roms » en Hongrie, bienque certaines estimations donnent un nombre beaucoup plus important, d´environ 10 % de lapopulation totale 5 . Les Roms hongrois doivent faire face à des défis multiples en comparaison avecle reste de la population, tels que la pauvreté, la discrimination, le manque d’accès à l’éducation etles taux élevés de chômage. Actuellement, sur un total de 22 membres du Parlement européen, il ya seulement un Rom. Cependant, il existe un certain nombre d’organisations de Roms hongrois, ycompris la Coalition sociale des Roms et l´Independent Interest Association of Roma.1 D. Angelicheva et al., Mutation History of theRoma/Gypsies, (Perth, Australia: University of Western Australia, 2004).2 J.Barsony, “Facts and Debates: The Roma Holocaust,” en J.Barsony y A.Daroczi (eds), Pharrajimos: The Fate of theRoma During the Holocaust, (Nueva York: International Debate Education Association, 2008), p.1.3 I.Hancock, “Romanies and the Holocaust: A Reevaluation and an Overview”, en D. Stone (ed), The historiography ofthe Holocaust, (Nueva York: Palgrave-Macmilan, 2004).4 M.Verdofer, Unbekanntes Volk Sinti und Roma (Südtirol: Kennenlernen Informationsheft für Jugendische Gesellschaftfür bedrohte1 Völker, 1995), .5 Romani World, Economics, (European Committee on Romani Emancipation [ECRE] 2003).francs suisses, ce qui a conduit à un endettementcroissant. Alors que les ménages ont contribué àréduire la consommation d’énergie et d’eau, ils ontégalement contribué à augmenter la circulation automobileet à accroître les taux de production desdéchets. Parallèlement, la production et la consommationde produits et de services qui répondent auxexigences de la durabilité, qui est apparue vers lamoitié des années 90, ont montré peu de progrèsà ce jour.La consommation d’énergie en déclinAu cours des 20 dernières années, des changementsstructurels dans l’économie ainsi quel´accroissement du prix de l’énergie ont conduit àce que la consommation d’énergie diminue de plusde 20 % 11 .Comparé à 1989, la production domestiquede sources d’énergie a diminué de 35 % avec unehausse modeste des importations d’énergie. Les importationsd’énergie ont historiquement représenté50 % de la consommation d’énergie. Pour 2009,la consommation d’énergie importée, cependant,est parvenue à 62 %, tandis que les importations11 The Titi Tudorancea Bulletin, Hungary: total primary energyconsumption,(2010).d’électricité ont diminué de façon importante 12 . Laproportion de la production nationale de gaz naturela montré une augmentation significative tandis quele charbon a connu une forte baisse 13 .Les 20 dernières années ont également connuune croissance dans l´utilisation d’énergie solaire etéolienne, ainsi que dans l´utilisation d’énergie renouvelableplus traditionnelle comme le bois et l’énergiegéothermique. L’utilisation de sources d’énergie renouvelables,aussi bien dans l’extraction que dansl’utilisation, a augmenté, mais n´a représenté que3,6 % de la consommation d’énergie en 2003 et 5,2% en 2005 14 .Malgré ces tendances positives, la privatisationprédatrice de certains secteurs a augmenté le risqued’un désastre environnemental. Une catastrophe dela sorte a eu lieu en octobre 2010, lorsque la paroid´un réservoir privé contenant des déchets de boues´est rompue et a entraîné l´inondation de trois coloniesdans le comté de Veszprém déversant environ12 Trading Economics, Energy Imports; (% of energy use) inHungary, (2009).13 Index Mundi, Hungary Dry Natural Gas Production by Year,(2009).14 Hungarian Central Statistical Office, Hungary 1989-2009,(Budapest : 2010), p. 49.un million de mètres cubes de boue rouge toxique,enterrant 500 maisons, tuant neuf personnes et en enblessant 150 autres 15 . Les conséquences sanitairesde la catastrophe ont été graves et n’ont pas encoreété rendues public.Le défi de la sécurité alimentaireLa Hongrie vient de terminer sa Stratégie nationalede développement durable (SNDD) en 2007 16 . Enintégrant tous les secteurs nationaux, le SNDD estun plan cohérent avec des stratégies et programmesdu secteur. En dépit de leur cohérence, cependant,la mise en œuvre des objectifs sociaux de la durabilitésoulève de sérieuses préoccupations quant àla planification de l’agriculture et celle de la sécuritéalimentaire.Depuis 1990, l’agriculture hongroise a subid’énormes changements à conséquence des modificationsfondamentales survenues dans la structurede la propriété et la production, les conditions deproduction du bétail et la structure de la consommationalimentaire et le commerce extérieur. Parconséquent, une partie importante des terres cultivées(300 000 hectares environ) ont été retirées de laproduction 17 . Les transformateurs d’aliments et lesdétaillants multinationaux dominent en ce momentle marché hongrois alors qu´à petite échelle, les agriculteursfamiliaux traditionnels doivent faire face à lapropriété foncière fragmentée, le manque de capitalet le manque de connaissances en marketing. Leprix réduit des transformateurs de produits alimentaireset des chaînes de supermarchés ont conduità des protestations d’agriculteurs à travers le payset ont soulevé de sérieuses préoccupations quant àl´origine et la sécurité des aliments.La mauvaise santé des HongroisSelon les normes internationales, la santé des hongroisest extrêmement mauvaise en raison de facteurshistoriques, sociaux, économiques et culturels,y compris les habitudes des personnes et leur modede vie en général. L’alcoolisme est très répandu etle nombre d’usagers de drogues est de croissancerapide. L´espérance de vie à la naissance est faible,bien qu’elle ait augmenté autant chez les hommesque chez les femmes. En 1990, elle était de 65,1 anspour les hommes et de 73,1 pour les femmes. En2008, elle était de 69,8 ans pour les hommes et de77,8 ans pour les femmes.La population hongroise avait le troisième tauxde mortalité le plus élevé de l’UE, avec une moyennede 13,1 pour mille entre 2005 et 2009. La Hongrie seclasse deuxième, après les États baltes avec le tauxde mortalité le plus élevé dû aux maladies cardiaqueset des vaisseaux sanguins cérébraux, des tumeursmalignes et des maladies du système digestif. Le tauxde mortalité pour cause de cancer du poumon correspondpresque au double de la moyenne de l’UE. n15 Ministry of Rural Development, Current Status Report aboutthe Red Sludge Catastrophe, (Budapest : 9 novembre 2010).16 Government of the Hungarian Republic, National SustainableDevelopment Strategy, (Budapest : juin 2007).17 G. Nagy, Country /Pasture Resource Profile-Hungary, (Roma:FAO, 2001, 2006).<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 121 Hongrie


INDELa croissance non durable mène à la catastrophe environnementaleLe manque de planification à long terme qui a caractérisé les Gouvernements de l’Inde se perçoit clairementdans sa croissance démographique et dans l’augmentation des émissions de CO2. Les « missions » récemmentproposées (ou initiatives en faveur du développement durable) non seulement sont insuffisantes mais leurefficacité, même minimum, reste à prouver. Les récents amendements à Loi sur l’Acquisition des terres de 1984,longuement critiquée, manquent de clarté et leur façon d’aborder les problèmes législatifs laisse à désirer. LeGouvernement doit encourager pleinement les sources d’énergie renouvelables et inclure dans la planificationdu développement la gestion du risque climatique. S’il ne le fait pas, tous les horizons du pays seront sombres.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> IndiaHimanshu JhaL’Inde affronte différents défis sociaux, tels que lacroissance économique inégale, la mauvaise gestiondes ressources naturelles, l’exclusion d’une grandepartie de la population dans la prise de décisions etdans l’accès aux services élémentaires, la dégradationconstante de l’environnement, et des institutionsqui ne sont pas capables de prendre suffisammenten compte les considérations environnementales etle développement social dans les objectifs de la politiqueéconomique. Au cours de la dernière décennie,l’Inde a souffert une série de catastrophes naturellesqui ont lésé sérieusement l’économie et épuisé lesressources naturelles, mettant ainsi en péril l’alimentationde millions de personnes. Actuellement,77 % de la population vit sous le seuil de la pauvreté.Le pays est particulièrement vulnérable aux catastrophesnaturelles, telles que les cyclones et lesinondations annuelles à la période des moussons. Sil’on ajoute à cela une gestion des ressources pratiquementinexistante, une infrastructure inadaptée etdes pratiques non durables, l’avenir du pays semblesombre. Le réchauffement mondial a déjà eu desretombées : augmentation de l’activité cyclonique,hausse du niveau des mers et de la température ambiante; quant aux précipitations des changementsont été enregistrés, qui s’accentueront dans un avenirproche. La hausse des températures surtout vaaltérer les modèles de la cryosphère (neige/glace)de l’Himalaya, ce qui aura un impact énorme sur lesécosystèmes de la région et sur la biodiversité, ainsique sur les moyens de subsistance de millions depersonnes.On estime que la population du pays augmenterade 1,2 million environ en 2016 1 , ce qui supposeraune forte pression sur les ressources naturelles,et l’on prévoit qu’il s’ensuivra une pénurie d’eau,l’épuisement et l’érosion des sols, la déforestation etla pollution de l’eau et de l’air.Les missionsLe changement climatique est dû en grande partieaux modèles non durables de consommation despays riches industrialisés qui sont responsables de1 Wikipedia, Environmental issues in India, .Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 7647100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansplus de 70 % de la totalité des émissions mondialesde CO 2et qui consomment 75-80 % des ressourcesmondiales, alors qu’ils n’abritent que 25 % à peinede la population. Tandis qu’un habitant de l’Inde émetl’équivalent de moins de deux tonnes de carbone paran, un habitant des USA émet l’équivalent de plus de20 tonnes 2 . Cependant, malgré sa pauvreté relative,l’économie indienne a déjà des impacts sur le climat.En 2008 l’Inde était le quatrième émetteur de CO 2auniveau mondial 3 .Le Gouvernement a proposé un Plan d’Actionnational pour réduire les émissions de CO 2, et il aégalement élaboré le programme «Missions», unensemble de stratégies pour le développement durablequi serviront de législation nationale en matièrede climat dans un futur immédiat. Or, ces politiquesobéissent davantage à des impératifs d’adaptationet à des modèles de développement non durablesqu’à une orientation réaliste et adéquate de la durabilitéenvironnementale. D’ailleurs, l’Inde, comme leG77 et la Chine, comptent sur le fait que le mondedéveloppé s’accorde sur une réduction de 40 % desémissions de CO 2à l’horizon 2020 pour que les paysen voie de développement obtiennent « l’espaceatmosphérique » approprié, nécessaire à leur développement4 .Les missions envisagées comprennent uneMission solaire nationale (visant à générer 20 0002 Citizens Report on Governance and Development 2010,(Sage Publications, 2010), .3 Wikipedia, Liste des pays par émissions de dioxydede carbone, .4 Citizens Report on Governance and Development, op.cit.62100 10093Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 37ÉducationL'autonomisationActivité économiqueMW d’énergie solaire en 2020), une Mission nationalepour un Habitat durable (ciblant l’efficacité énergétiquedes immeubles résidentiels et commerciaux,et l’amélioration de la gestion des déchets solides),une Mission nationale de l’Eau (destinée à améliorerla gestion de l’eau et la conservation des rivières),une Mission nationale pour l’Inde verte (centréesur la reforestation), et une Mission nationale pourl’Agriculture durable.La première à avoir été lancée, c’est la missionsolaire ; les autres ont été approuvées mais ellesn’ont pas encore été mises en œuvre, et tous lesprojets des documents des missions sont prêts.Néanmoins, on ignore encore si ces missions serontproposées par le Gouvernement comme stratégieprincipale pour réduire les émissions de CO 2du pays.Le ministre de l’Environnement et des Forêts a déjàassuré que l’Inde promulguera un standard obligatoirede combustible efficace en 2011 et qu’il a pourobjectif de fournir 20 % de son électricité grâce à desénergies renouvelables en 2020. Le Gouvernementaspire aussi à réduire l’intensité énergétique du paysde 15-20 % au cours des 20 prochaines années et àétendre de 15 % la surface couverte par les forêts oupar les arbres afin de piéger le carbone de l’atmosphère.Cela se traduira par une déviation de plus de9 % par rapport à la façon habituelle de mener lesaffaires, selon le calcul des ONG locales 5 .L’impact des projets d’infrastructureà grande échelleIl existe un besoin urgent de reconcevoir les projetsd’infrastructure à grande échelle dans un cadre dedéveloppement durable et de prendre en compte5 Ibid.1000 12 33100 66100Rapports nationaux 122 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


la politique existante ainsi que le cadre régulateurde tels projets. « Vu la définition d’une trajectoirede développement économique durable et faibleen carbone, il est important de ne pas considérersimplement les projets d’infrastructure à grandeéchelle comme quelque chose à inclure en faveurde l’environnement et de la société » 6 . Parmi les initiativespolitiques actuelles figurent le Plan nationald’action sur le changement climatique et le Pland’action nationale appropriée d’Atténuation pourl’énergie faible en carbone, la Loi relative à l’Électricité2003, la Notice d’impact sur l’environnement,la Loi relative à l’air de 1981 pour la régulation desémissions et la Loi nationale du Tribunal vert, pouren citer certaines.Malgré le cadre de règlementation légale envigueur, les solutions légales relatives à la pollutionont été faibles. Comme le signalait en 2002une évaluation de la Commission de Planificationdu Comité national de contrôle en matière depollution : «La non installation de mécanismesd’atténuation de la part des unités de pollution estla conséquence directe du manque absolu de mécanismesefficaces de sanction et de dissuasion encas d’infraction.»Une autre analyse souligne que la plupart deslois et des règlements environnementaux de l’Indesont d’ordre procédural et manquent de directivespolitiques claires. Leur façon d’aborder la pollutionse centre davantage sur la prévention que sur l’applicationde la législation en vigueur 7 . D’autre part,la plupart des projets d’infrastructure sont gérésà travers des procédures non judiciaires, et sontde plus en plus résolus à coups de contrats ou demesures législatives ou exécutives. Une révisiondes projets de l’Autorité nationale des routes del’Inde a détecté que les entrepreneurs n’intègrentpas la gestion de l’environnement dans leurs programmeset que l’adoption volontaire de bonnespratiques de gestion environnementale est quasimentinexistante 8 .Ravitaillement en eau et assainissementMalgré les efforts du Gouvernement, le réseau deravitaillement en eau et d’assainissement demeureinsuffisant. En 2008, 54 % seulement de la populationurbaine avait accès aux services d’assainissement,y compris le raccordement aux conduitesd’égouts publiques et à un système septique, demême qu’à des latrines à siphon hydraulique etdes latrines à fosse ventilée, tandis que dans les6 V. Upadhyay, Infrastructure Regulation For the Low CarbonEconomy: Survey of Key Issues and Concerns, IndiaInfrastructure Report, .7 K. Priyadarshini y G. K. Omprakash, “Compliance toEnvironmental regulations: The Indian Context,” InternationalJournal of Business and Economics, Vol.2, No.1 (2003): 9-268 Videh, op.cit.Le problème de l’acquisition des terresL’acquisition de terres par l’État est devenue un sujet primordial. Le Gouvernement a pris environ147 millions d’hectares de terres agricoles pour le développement urbain, et 2,81 millions d’hectaresont cessé d’être fertiles en raison de l’industrialisation et de l’urbanisation. Le ministère duCommerce a confisqué plus de 200 000 hectares pour des projets de développement, obligeant àse déplacer plus de 21 millions de personnes.La Loi relative à l’Acquisition des terres de 1894, promulguée pendant l’époque coloniale, resteencore la principale législation en vigueur. Cette loi autorise le Gouvernement à acquérir des terrainsprivés à des fins publiques, y compris des centres de résidence pour les personnes pauvres et lessinistrés, mais la compensation économique s’est fondée sur l’estimation de la valeur du terrainagricole qui peu à peu s’est dépréciée ; l’acquisition de nouvelles terres par les anciens propriétairesdevient dès lors particulièrement difficile.La Loi sur l’Acquisition des terres a été critiquée par une foule d’activistes, de politiques etd’économistes. En 2007 un amendement a été inclus, ainsi qu’une Loi de Réhabilitation et deRéinstallation, mais elles ont toutes les deux échoué dans leur mise en œuvre en 2009 pour êtrefinalement reformulées et réintroduites – par les membres du Conseil du gouvernement national –en mai 2011. Cette modification a redéfini le concept d’ « utilité publique » comme servant à des finsdéfensives ou à tout autre projet « utile pour le public en général » ; cependant la définition d’ « utilitépublique » reste encore bien vague.zones rurales le nombre atteint le taux alarmantde 21 % 9 .Les institutions chargées de fournir et d’entretenirl’approvisionnement en eau et l’assainissementsont souvent perçues comme étant inefficaces, etmanquent le plus souvent des moyens financiers nécessaires.La situation, malgré tout, s’améliore peuà peu : en 1980, on estimait à 1 % le taux d’accès dela population rurale aux services d’assainissement,et en 2008 il est monté à 21 %, comme mentionnéci-dessus.La contamination du Gange et l’extractionminière illégaleLe Gange, fleuve sacré des Hindous, est terriblementpollué et regorge de déchets chimiques, d’eauxsouillées des égouts et de restes humains et d’animaux.Une des causes de cette pollution provientde l’extraction minière illégale, surtout dans la zoned’Haridwar où se concentre grande partie de la triturationde pierres et des opérations minières illégales,ce qui saccage le lit du fleuve et pollue ses eaux de décombreset de déchets. L’extraction minière de sableet de pierres (principalement destinée au Bâtiment) aaccru le risque d’inondations et provoqué une gravedéforestation 10 . L’extraction minière illégale a été la9 Wikipedia, Water supply and sanitation in India, .10 NDTV, Exposing the illegal mining in Haridwar, (16 de juniode 2011), .source de controverses dans tout le pays. Dans certainscas (la concession minière à Andhra Pradesh,par exemple) des membres du Gouvernement setrouvent impliqués 11 .RecommandationsFace aux menaces planant sur le développementdurable, le Gouvernement doit prendre d’urgence lesmesures suivantes :• Effectuer une évaluation détaillée de l’efficacitéénergétique à l’échelle nationale pouvant servirà soutenir les efforts du Gouvernement central ;• Encourager l’énergie renouvelable par le biaisd’exemptions fiscales, d’aides économiques,de meilleures conditions de marché, de créditssouples de la part des institutions financières, etc. ;• Intégrer la gestion du risque climatique dansles programmes nationaux de développement ;• Établir un comité de coordination de donneursmultiples afin de promouvoir des actions climatiquesd’atténuation et d’adaptation ;• Rendre l’information climatique disponible etaccessible aux différentes communautés pourqu’elles puissent communiquer leurs analyses,et soutenir l’identification de solutions durables,et assurer en même temps que la Réductioneffective des risques de catastrophe reste fondéesur la connaissance locale et construite surl’analyse participative au niveau local des vulnérabilitéset des capacités. n11 Wikipedia, Illegal mining in India, .<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 123 Inde


iraqLa société civile gagne du terrainAprès des décennies de guerre, de négligence et de mauvaise administration, la situation sociale etenvironnementale de l’Irak est grave. Le pays lutte toujours contre un gouvernement instable, la corruptionet de très graves violations des droits humains, telles que des attaques contre des groupes minoritaires. Il estnécessaire de parvenir à de meilleures conditions de paix et de sécurité pour que le pays puisse avancer dansla création et l’utilisation d’un modèle de développement durable favorable. Alors que le pays jouit d’une plusgrande participation de la société civile et de la démocratie, il est nécessaire de contrôler la répression et lesviolations des droits humains pour assurer l’avenir démocratique.Masarat for Culture & Media Development (MCMD)Sa’ad SalloumL’Irak continue de relever d’importants défis suite àdes années de conflits sociaux et de guerre. Les manifestationsqui ont secoué le pays en février 2011,exigeant l’élimination de la pauvreté, du chômage et dela corruption, montrent le nouveau rôle que les citoyensiraquiens commencent à jouer dans une société où laparticipation démocratique a été réprimée avec violenceou complètement étouffée. En dépit d’une atmosphèred’insécurité et de libertés publiques très déficientes, lesorganisations de la société civile sont en train de grandiret jouent un rôle chaque fois plus important pour ledéveloppement démocratique du pays.Le rôle fondamental de la société civileLes citoyens iraquiens ont été appelés aux urnes le 7mars 2010 et ont voté pour 325 nouveaux membresdu parlement devant les représenter au Conseil desreprésentants. Malheureusement, contrevenant laconstitution, la première séance du parlement le 14juin 2010 a été ouverte sans avoir élu de présidentni de députés. Cette paralysie politique et constitutionnellea conduit à les organisations de la sociétécivile à enclencher l’Initiative citoyenne pour la préservationde la constitution (ICPC), en présentant unrecours devant la Cour suprême fédérale. La Courfédérale a donné l’ordre au Président intérimairede demander aux parlementaires de reprendre laséance et de choisir un Président et deux députés 1 .Les observateurs de la société civile ont soulignéque la décision est un signe de l’indépendance et del’impartialité du pouvoir judiciaire. Cet événementmontre aussi que la séparation des pouvoirs est laclé de voûte d’une démocratie réussie.Cependant, la conclusion la plus importante quel’on peut tirer de la décision de la Cour est le rôle fondamentalque la société civile iraquienne est capable dejouer dans le processus de construction d’un Etat civilmoderne. Le recours a été suivi d’une autre campagnede l’ICPC pour recueillir des signatures et faire pressionsur les blocs politiques afin qu’ils tiennent leurspromesses électorales. D’après les données de l’ICPC,plus de 800 ONG, d’associations et de syndicats, ainsique des personnalités reconnues dans divers milieux1 Cour suprême fédérale, Nº 55 Federal 0.2010.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 8780100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialiséEnfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansculturel, académique et social de différentes régionsde l’Irak, ont participé à la campagne 2 .L’ICPC est devenu un cadre civique qui permetd’atteindre différents objectifs, parmi lesquels : accélérerla formation d’un gouvernement d’alliancenationale fondé sur la sincérité, la compétence et l’intégrité; élaborer un programme visant à renforcer lasécurité et la stabilité politique ; réformer l’infrastructureinstitutionnelle ; renforcer le processus politiquepar le biais de la loi des partis politiques ; modifier laloi électorale ; respecter l’indépendance du pouvoirjudiciaire ainsi qu’augmenter son efficacité ; offrirdes services publics ; améliorer l’effectivité des organismesgouvernementaux ; assurer la protectiondes droits humains et des libertés publiques grâceaux garanties constitutionnelles et légales, y comprisla liberté d’expression, d’association, de presse etd’accès à l’information ; aborder les questions dela pauvreté, du chômage, des délocalisations et dediscrimination des groupes minoritaires 3 .Les minorités en dangerBien que les délocalisations de population se soientstabilisées ces dernières années, une violente attaqueterroriste contre une église catholique à Bagdad le31 octobre 2010 a obligé certaines communautésminoritaires à envisager de s’installer ailleurs. En novembre2009 près de 350 000 des délocalisés sontretournés dans leur région d’origine – dont 60 % àBagdad – alors que la plupart des rapatriés étaientarabes (sunnites et chiites), raison pour laquelle ils nesont pas considérés comme faisant partie d’un groupe2 Voir : .3 Ibid.076100 10096Indice d'Equité de Genre (IEG)Éducation100230n/dL'autonomisation61100 100Activité économiqueminoritaire. Les informations de l’Organisation internationalepour les migrations (OIM) ont montré queseulement 52 % du total des personnes déplacéesà l’intérieur du pays désirent repartir vers leur lieud’origine, alors que 20 % souhaite s’installer ailleurs 4 .Selon les données du ministère de la Délocalisation etde la migration (MDM) et le Gouvernement régionaldu Kurdistan (GRK), le nombre de personnes délocaliséesen Irak est d’environ 2,8 millions, la plupartsont arabes (chiites et sunnites), et un total de presque250 000 individus d’origine chaldéenne, assyrienne,arménienne, sabéenne mandéenne, kurde faïli, yézidiet des groupes de la minorité shabak 5 .A défaut d’une action gouvernementale efficacepour traiter les problèmes des minorités ethniquesdu pays, les organisations de la société civile ont dûfaire pression pour exiger davantage d’actions contrela discrimination et les attaques contre les minorités.L’ICPC, par exemple, a organisé des tables rondes surles minorités, démontrant ainsi que la société civilepeut et doit participer dans les affaires importantes dupays. Les discussions de l’ICPC ont souligné le besoind’augmenter la participation des minorités dans le domainepolitique, et d’éliminer les politiques éducativesracistes et les autres méthodes de désinformation quicontribuent à la discrimination fondée sur l’ignorance.Les discussions ont également permis de constaterque depuis 2003 de nombreuses minorités ont quittél’Irak et l’on prévoit qu’elles continuent à abandonnerle pays pour les raisons suivantes : le manque de sé-4 L. Mumtaz, , Minority Rights Group International, p.19.5 IDMC, , (le 4 mars 2010),disponible sur : .Rapports nationaux 124 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


curité, de protection constitutionnelle, de lois contrela discrimination, de représentation dans le Gouvernementet au parlement ainsi que la prédominanced’une culture d’exclusion dans une société régie par ladiscrimination et l’ignorance.Protestations massives et répressiondu GouvernementL’Irak n’a pas échappé aux manifestations de masseconnues sous le nom de « printemps arabe » en 2011.La lenteur dans la constitution d’un gouvernement(plus de sept mois de dures négociations), la détériorationdes services publics, ajoutés à l’augmentationcroissante des niveaux de pauvreté et de chômageont suscité les premières étincelles de protestation.Les protestations ont commencé dans les quartierspauvres et oubliés du nord de Bagdad. Pendant lemois de février des manifestations ont eu lieu dansles villes de Kut, Diwaniya, Bassorah et Anbar et dansd’autres villes également. Dans la riche ville pétrolièrede Bassorah, au sud de l’Irak, des voix se sont peu àpeu fait entendre pour exiger de mettre fin à la corruption,avec des manifestants qui portaient des cartonsjaunes (comme ceux qui sont utilisés par les arbitresde football) pour exprimer l’insatisfaction publique enversle Gouverneur et certains fonctionnaires locaux.Le même esprit a surgi dans les autres provinces enraison du manque de services de plus en plus fréquent.Les critiques soulevées contre les restrictionsdes libertés publiques, la corruption et les salaires élevésdes parlementaires sont devenues des consignespopulaires inscrites sur des pancartes de protestation.Plus important encore, les manifestations ont permisd’abroger la loi qui exigeait une autorisation légalepour avoir le droit de manifester, procédure qui avaitfrustré auparavant des centaines de manifestations.Comme résultat des grandes protestations populaires,le premier ministre Nuri Al-Maliki a émisune directive en février 2011 pour réduire de moitiéson salaire mensuel. Ceci est une reconnaissance del’écart disproportionné entre les salaires des hautsfonctionnaires, ceux du personnel moins qualifié etles salaires des Irakiens moyens ; ceci a conduit àune révision de tous les salaires des hauts fonctionnairesdu Gouvernement et à la réduction du budgetdes trois présidences — de la République, du Conseildes ministres et du Parlement — qui représententune grande proportion du budget de l’État. A l’instard’autres pays arabes, de grandes manifestations ontété convoquées pour le vendredi 25 février, 24 heuresavant que le premier ministre convoque en réunion lesleaders de la société civile. L’ICPC a envoyé au premierministre un message dur, exigeant l’élimination de lapauvreté, du chômage et de la corruption gouvernementale6 . En raison de la vague de protestation quimenaçait, le Gouvernement a mis en alerte tous lesservices de sécurité mais outre le fait d’utiliser la forcepour disperser les manifestations, quatre journalistesqui y participaient ont été arrêtés et torturés 7 .Les soulèvements de février ont mis en marcheun mouvement inédit afin d’établir les organisations6 Entretien avec Hanaa Edgar, Secrétaire de IAA, (25 février2011).7 Entretien avec les journalistes arrêtés (Bagdad, 4 mars 2011)guerre et environnementAprès la première guerre du Golfe, le Gouvernement de Saddam Hussein a commencé une sériede grands travaux destinés à la dessiccation des Marécages mésopotamiens, une zone humidesituée au sud du territoire où vivent des peuples tels que les Arabes des marais, région qui abriteune grande diversité de vie sauvage. Le drainage des marécages a commencé, en fait, en 1950 ets’est poursuivi jusqu’en 1970 afin de récupérer des terres pour l’agriculture et l’exploitation dupétrole, mais, pendant la présidence de Saddam Hussein, les travaux ont pris plus d’ampleur et sesont accélérés, marquant surtout des représailles contre le soulèvement manqué des chiites ; onpensait alors que les dissidents chercheraient refuge dans la région des marécages. Les opérationsde dessiccation ont compris l’ouverture de trois canaux (le Troisième fleuve, le Canal de la Gloireet le Canal de la Prospérité), construits de façon à reconduire l’eau du Tigre vers l’Euphrate. Vers lafin des années quatre-vingt-dix, les marais centraux étaient totalement asséchés ; en 2000 le Programmedes Nations Unies pour l’environnement a estimé que 90 % des marais avaient disparu 1 .L’impact environnemental a été considéré comme catastrophique 2 . Des zones de migrationd’oiseaux ont disparu et plusieurs plantes et espèces animales endémiques de la région ont égalementdisparu. La salinité du sol s’est accrue, ce qui s’est traduit par une diminution de la productionlaitière, de la pêche et de la culture du riz. Plus de 19 000 Km 2 de la région se sont transformés endésert. La plupart des Arabes des marais ont été délocalisés dans des zones proches, et on estimequ’entre 80 000 et 120 000 d’entre eux ont fui vers les camps de réfugiés en Iran 3 . Après l’invasiondes États-Unis en 2003, des terre-pleins et des systèmes de drainage ont été endommagés etouverts, et les marécages ont commencé à s’inonder à nouveau, mais la récupération — et la nouvellepoussée de la végétation des marais naturels — a été lente. Les secteurs les plus sévèrementtouchés n’ont montré aucun signe de régénération 4 .Mais après deux décennies de guerre la perte de l’écosystème du marécage n’a pas été laseule conséquence négative pour l’environnement. Par exemple, selon le Programme des NationsUnies pour l’environnement (PNUE) 5 , le pays subit actuellement une sévère pollution du sol, del’eau et de l’air provenant des substances toxiques libérées par la destruction des armes de guerreet des usines. De plus, le Tigre et l’Euphrate, qui fournissent la plus grande partie de l’eau, tantpour l’irrigation que pour l’eau potable, sont actuellement des égouts ouverts, couverts de déchetsindustriels et hospitaliers, qui recueillent le ruissellement des fertilisants pour l’agriculture et lesdéversements de pétrole. La restauration des systèmes de distribution d’eau et d’assainissement,le nettoyage des principaux points de pollution et des lieux souillés par les déchets ainsi que laprévention de l’érosion des sols et la désertification, sont quelques-uns des problèmes environnementauxles plus immédiats en Irak 6 .1 Wikipedia, , disponible sur : ; , disponible sur: ; and , .2 The Mesopotamian Marshes of Southern Iraq, (Mars2003), disponible sur : .3 Wikipedia, , disponible sur : .4 Voir : .5 Ibid.6 Ibid.de la société civile et les réseaux et pour permettre decontrôler les activités du Gouvernement et des droitshumains ; le rôle important que les citoyens irakienspeuvent jouer pour assurer un développement démocratiquenational a également été souligné.RecommandationsPour que la vision des soulèvements de février devienneréelle, il est nécessaire de réaliser plusieurs objectifs :• Préparer le terrain pour la participation desfemmes au Gouvernement et mettre en œuvreles mesures nécessaires à l’élimination de la violencefamiliale et sociale liée au genre.• Traiter l’impunité relative à la corruption financièreet à la fraude, traduire en justice les responsablesdu terrorisme et du crime organisé et enquêtersur les récidives d’évasion de plusieurs criminels.• Mettre en œuvre une stratégie nationale de réductionde la pauvreté. L’immense majorité descitoyens subit la pauvreté et le chômage ainsique l’accentuation de la crise économique, socialeet des services, en particulier concernantla distribution d’eau, de produits alimentaires,d’énergie, de logements et la mauvaise qualitédes soins de santé.• Accélérer la procédure législative concernantles affaires politiques, civiles, économiqueset culturelles, plus particulièrement en ce quiconcerne la régulation des partis politiques, lesélections, la production de pétrole et de gaz. n<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 125 Iraq


ITALIELe développement durable n’est pas la priorité du GouvernementLes engagements pour lutter contre la pauvreté et contre l’exclusion sociale, et pour atteindre l’égalité de genren’ont pas été respectés ; en outre les politiques appliquées conspirent contre la disponibilité et la prestationde services essentiels. Bien que le développement durable ne fasse pas partie des priorités du Gouvernement,quatre référendums réclamés par la société civile auquel ont participé près de 27 millions d’Italiens, ont pousséle pays dans la bonne direction. Il est indispensable de revoir l’ensemble des politiques publiques et d’établirun nouveau modèle de développement centré sur le respect des droits humains fondamentaux, la durabilitéenvironnementale et la réduction des inégalités sociales.Coalition italienne <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>Le débat public en Italie sur un modèle de développementdurable qui introduise les indicateurs sociauxet environnementaux de bien-être, en plus des variableséconomiques, n’est pas encore parvenu àinfluencer les décisions politiques. Ces paramètresn’ont pas été introduits dans un système nationald’indicateurs, bien que l’Institut national de statistique(LSTAT) et le Conseil national de l’économie etdu travail aient annoncé la création d’une « table dedialogue » vers un ensemble commun d’indicateurset qu’en 2009 le Parlement ait approuvé un projetde loi visant à réformer le système de comptabilitépublique (loi 196/2009), qui prévoit que le Gouvernementdevrait réviser les indicateurs en tenant comptede la durabilité environnementale.Pour leur part, les indicateurs économiquestraditionnels sont loin d’être encourageants : uneaugmentation du PIB en 2010 de seulement 1,1 %par rapport à 2009 1 et une dette qui a continué decroître de 4,5 % pour atteindre 18.432 billions d’euros,contre 17.639 billions en 2009 (26.563 billionsd’USD contre 25.425 billions d’USD), ce qui donneun ratio d’endettement de 118,6 % 2 . Le taux d’emploide 56,7 %, fortement déséquilibré entre les femmes(45,8 %) et les hommes (67,6 %), représente unenouvelle baisse (-0,8 % ou 176.000 employés demoins qu’en 2009) 3 . Le taux de chômage est de 8,5%, mais atteint 29 % chez les jeunes de 15 à 24 ans.En 2010, l’Italie a atteint un record en ce quiconcerne les fonds de redondance requis par lesentreprises, avec un montant de 1,2 milliard d’euros(1,7 milliard d’USD) 4 . Au cours des deux dernièresdécennies, le taux brut d’épargne familial a diminuéde façon constante de plus de 30 % dans la premièremoitié des années 80 jusqu’à 14 % en 2009. Enmême temps, le pouvoir d’achat a baissé de plus de5 % depuis 2006. Les derniers chiffres disponiblesmontrent une diminution de la capacité d’épargne de1 Istat, Preliminary Estimate of GDP, IV Quarter of 2010,communiqué de presse, (11 février 2011).2 Banque d’Italie, “Supplement to the Statistical Bulletin,” PublicFinance and Debt Requirements, No. 8, 14 (février 2011).3 Istat, Employment and Unemployment, III Quarter of 2010,communiqué de presse, (21 décembre 2010).4 Base de données du National <strong>Social</strong> Security Institute (INPS),.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9999100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ans0,9 % pour le troisième trimestre de 2010 par rapportà l’année précédente 5 .L’inaction du GouvernementL’enquête concernant les infractions présumées commisespar le Premier ministre (extorsion et prostitutiond’enfants), associée à la paralysie parlementaire, ontlaissé les principaux problèmes du pays sans réponse.Ainsi, la ville de L’Aquila, frappée par un séisme en 2009,est encore une ville fantôme. Dans le conflit entre ladirection de Fiat, le plus grand constructeur automobileitalien, et la FIOM, le principal syndicat des métallurgistes,le Gouvernement a été virtuellement absent ets’est avéré incapable d’élaborer une politique industrielleefficace. Par ailleurs, l’utilisation continue des« pouvoirs extraordinaires » pour répondre à des besoinsurgents qui sont souvent chroniques a remplacéla légalité et la protection de l’environnement et la santé.La faiblesse de l’État est particulièrement problématiquedans des domaines sensibles, tels queles normes environnementales pour la gestion desdéchets, où il existe de forts intérêts du crime organisé.En 2005, environ 107,5 millions de tonnesde déchets dangereux (dont 5,9 millions de déchetsextrêmement dangereux) ont été produites en Italie,mais seulement 87,8 millions de tonnes ont été éliminéesde façon appropriée 6 .Par conséquent, les19,7 millions de tonnes restantes ont très probablementété éliminées illégalement.En octobre 2010, la Commission européennea averti l’Italie qu’elle recevrait des sanctions éco-5 Istat, Income and Household Savings, III Quarter of 2010,communiqué de presse, (janvier 2011).6 National Environment Protection Agency and National WasteObservatory, Waste Report 2007, (Rome: 2007).98100 10099+Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 70Éducation100045L'autonomisation100 66 10099Activité économiquenomiques si elle n’arrivait pas à gérer la crise desordures en Campanie, la deuxième région la pluspeuplée et l’une des plus pauvres du pays. La criseest le résultat de décennies de mauvaise gestion desdéchets industriels et municipaux.Politiques de travail et protection socialeEn 2010, le Gouvernement a approuvé un budget de24 milliards d’euros (34,6 milliards d’USD) centré surla diminution des dépenses publiques. Les politiquesde protection sociale, l’éducation, la recherche, l’aideau développement officielle (ADO) et les transfertsaux collectivités locales sont les secteurs les plus touchéspar les réductions, qui dans certains cas ont étéinférieures à celles prévues dans le budget grâce auxpressions exercées par certains groupes de la sociétécivile et par les autorités locales. Par ailleurs, presquerien n’a été fait pour réduire les inégalités sociales.Le budget d’austérité (appelée « loi de stabilité»), adopté en 2011 montre une tendance similaire.Le gel des contrats des employés publics jusqu’en2013 et le blocage de l’ancienneté ont particulièrementaffecté un système scolaire déjà limité parles réductions d’effectifs mises en œuvre par le ministèrede l’Éducation : 67.000 travailleurs ont étééliminés au cours de l’année scolaire 2009/2010 et40.000 au cours de 2010/2011.Globalement, les 10 fonds sociaux financés en2008 avec 2,5 milliards d’euros (3,6 milliards d’USD)ont pu compter sur seulement 349 millions d’euros(507 millions d’USD) en 2010 7 . Pour soutenir les7 Voir les actes de la Conférence sur les niveaux universelet local : Institutions and Third Sector Together for a NewWelfare System, (Bologne : 25–26 novembre 2010), .Rapports nationaux 126 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


familles à faible revenu, il reste la « carte sociale »(40 euros/58 USD par mois), une mesure charitableétablie en 2008 et refinancée en 2011 avec l’ajoutde nouvelles dispositions clairement discriminatoires: les citoyens étrangers résidents, les jeunestravailleurs et même les retraités dont les revenussont légèrement supérieurs au minimum vieillessen’y ont pas droit. Si elle est adoptée, la réforme fédéraleactuellement en discussion au Parlement mettraen péril la garantie de normes minimales pour la sécuritésociale dans toute la nation.En termes de coopération au développement,pour que l’Italie puisse atteindre l’objectif internationalementconvenu d’assigner 0,7 % du PIB à l’ADOd’ici 2015 8 , il faudrait consacrer une plus grandepartie de l’aide à la coopération internationale (ycompris à travers des mécanismes de financementinnovants) et les ressources devraient être fourniesd’une façon plus prévisible et transparente.L’Italie continue d’avoir un niveau élevé mais largementignoré de discrimination contre les femmesdans les domaines du travail, de la politique et des ménages,et en ce qui concerne la violence domestique 9 .La campagne de l’Italie concernant la Convention surl’élimination de toutes les formes de discriminationà l’égard des femmes (CEDAW) fournit des preuvesde la « persistance de la représentation dégradante etsexiste des femmes dans les médias ainsi que dansl’arène politique » et signale l’absence d’outils adéquatspour lutter contre cette tendance 10 .Environnement et développement durableL’Italie est l’un des rares pays en Europe qui ne possèdepas de stratégie visant à réduire les émissionsde dioxyde de carbone ou à atteindre les objectifseuropéens de réduction d’ici 2020. Le seul plan existant,datant de 2002, est très insuffisant et ne respectepas les engagements de Kyoto pour la période2008-2012. Une stratégie nationale de réduction desémissions de dioxyde de carbone sur le long terme(2050) devrait être adoptée rapidement. Les étapesintermédiaires devraient être en ligne avec les objectifseuropéens et avec la nécessité de renforcer etd’accélérer la transformation de l’économie actuelleen une économie zéro carbone.Depuis l’accord sur la sortie du nucléaire obtenulors du référendum de 1987, l’Italie ne possède plus decentrales nucléaires actives. Toutefois, un programmepour la relance du nucléaire a débuté en 2009, prévoyantla construction de 8 à 10 nouvelles centralesélectriques de 1000 à 1500 MW, pour un coût totalde 40 à 50 milliards d’euros (58-73 milliards d’USD)au détriment des investissements dans les énergiesrenouvelables, dans l’efficacité énergétique et dansdes ressources visant à économiser de l’énergie.Bien que l’Italie soit le pays le plus riche d’Europeen termes de biodiversité, avec 57.468 espècesd’animaux – 8,6 % endémiques (qui se trouvent seulementen Italie) et 12.000 espèces de flore – 13,58 Ibid.9 Work in Progress - 30 years of CEDAW, produit par ungroupe de défenseurs des droits des femmes italiennes et del’égalité de genre, .10 Ibid.%, endémiques -une grande partie de ce patrimoineest en train de disparaître : actuellement 68 % desvertébrés terrestres, 66 % des oiseaux, 64 % desmammifères et 88 % des poissons d’eau douce sonten situation à risque. Une stratégie nationale pourla biodiversité, finalement approuvée le 7 octobre2010, doit être pleinement mise en œuvre en assignantdes fonds suffisants à la gouvernance nationale(avec la contribution des régions).Initiatives de la société civileOn assiste à une mobilisation générale de la part descitoyens italiens :• 1,4 million de signatures ont été remises à laCour suprême le 19 juillet 2010 appelant à un référendumsur la gestion publique de l'eau aprèsque le « décret Ronchi » en 2009 ait déterminéque le service de l'eau – ainsi que d'autres servicespublics tels que la gestion des déchets, letransport public, etc. – serait confié à des entreprisesprivées ou serait privatisé à hauteur d’aumoins 40 %. Les 12 et 13 juin 2011, les citoyensitaliens ont voté contre cette décision.• La question du nucléaire a conduit une grandepartie de la société civile à s’unir pour la défensede l’énergie renouvelable, propre et sûre. Les Italiensont également été appelés à voter un autreréférendum et ils ont rejeté la détermination deréintroduire les centrales nucléaires après lesavoir interdites en 1987 par vote populaire. Laquestion du nucléaire a déterminé qu’une grandepartie de la société civile se mobilise pour la défensed’une énergie renouvelable, propre et sûre.Ces référendums (avec un autre référendumpour annuler la loi d’ « empêchement légitime »introduite par le Gouvernement Berlusconi, qui apermis aux membres exécutifs du Gouvernementd’éviter de comparaître devant la cour lorsquel'on cite leurs engagements professionnels) ontabouti à une réponse claire (plus de 95 % desvotants) des Italiens en faveur de l'abolition de ceslois. En outre, les résultats des référendums ontobligé le Gouvernement à planifier une stratégieénergétique nationale pour 2011 qui devrait inclureun financement spécifique pour l'efficacitéénergétique et les ressources renouvelables.• Un grand mouvement d'étudiants, d’enseignantset de chercheurs des écoles secondaireset des universités ont manifesté pendant le deuxièmesemestre de 2010 contre les réductionsde budget dans les secteurs de l'éducation et dela recherche, et des centaines d'écoles et d'universitésont été occupées dans tout le pays.• Les habitants de L'Aquila, les associations bénévoleset les mouvements sociaux ont travailléafin de libérer le centre historique de la ville desdécombres produits par le tremblement de terre etont organisé des activités culturelles et solidairesdans le cadre de la reconstruction sociale de la ville.• Les accusations d'extorsion et de prostitution infantileportées contre le Premier ministre Silvio Berlusconiont déterminé qu’un million de femmes etd'hommes se mobilisent pour manifester dans lesrues en février 2011, non seulement pour revendiquerla dignité et les droits des femmes mais aussipour contester les pratiques politiques, culturelleset sociales qui tendent à réduire les femmes à desobjets sexuels ou à les représenter comme tels.ConclusionLa révision globale des politiques publiques est unemesure urgente et essentielle. La priorité devrait êtredonnée à l’établissement d’un nouveau modèle dedéveloppement centré sur le respect des droits humainsfondamentaux, sur la réduction des inégalitéssociales et sur un réel engagement envers la durabilitéenvironnementale.Dans le domaine économique, des politiques publiquesdevraient être adoptées pour stimuler l’emploi,notamment pour les jeunes, en incluant des incitationspour les entreprises qui embauchent de nouveauxtravailleurs, pour stimuler le développement de laconsommation et de la production vertes et la conversionécologique de la production industrielle dont l’impactsur l’environnement est élevé, et pour soutenirles entreprises qui investissent dans les zones de forteproduction, les compétences, la recherche et l’économiede la connaissance. Une plus grande équitéfiscale est également nécessaire – par exemple, enintroduisant une taxe de 0,05 % sur les spéculationsfinancières, ainsi qu’un impôt sur la fortune.Dans le domaine social, il est urgent de se consacrerà l’augmentation des ressources allouées à l’assistancesociale ; à lutter contre la pauvreté et à améliorerles services offerts aux enfants et aux personnesdépendantes, l’éducation publique, les prestations desécurité sociale et les contributions pour l’inclusionsociale des citoyens étrangers. Des mesures doiventêtre prises pour remédier à la situation de 5,2 % deménages italiens qui selon les statistiques de l’Istat de2009 vivent dans une extrême pauvreté 11 . En outre, ladéfinition des niveaux de base des prestations sociales(prévus dans l’article 22 de la loi 328/2000) doit êtreréaffirmée. Si ce n’est pas le cas, la réforme fédéraleactuellement en discussion au Parlement pourraitmettre en péril la garantie de normes minimales deprotection sociale au niveau national.En termes d’environnement, un système decontrôle devrait être adopté pour fournir des informationsessentielles et assurer la transparence et laresponsabilité des mesures du Gouvernement dansle domaine du développement durable. La prioritédevrait être donnée aux infrastructures à petite échelle,auxquelles le Gouvernement a consacré 800 millionsd’euros (1.164 millions d’USD) en novembre 2009 ;ces fonds devraient être destinés aux zones urbaineset utilisés pour la réparation et la modernisation desinfrastructures stratégiques (principalement deschemins de fer), plutôt que pour la construction denouvelles infrastructures. Afin de mettre en œuvre la« directive relative à la protection de l’environnementpar le droit pénal (Directive 2008 / 99/CE)», le code pénalitalien devrait inclure la définition de « délits environnementaux» et les sanctionner plus sévèrement. n11 Economy News, Around 3.8 Million Italians Living inAbsolute Poverty, Disponible sur : .<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 127 Italie


KENYAL’heure de la décisionAprès plusieurs années de lutte, les Kenyans ont réussi à négocier une constitution révolutionnaire en 2010.Son approche orientée vers les droits fondamentaux, la responsabilité des citoyens et les services publicsétablit les bases qui définissent le rôle central de l’État dans la construction d’une économie qui remplisse lespromesses d’équité, de participation et des droits fondamentaux. En faisant de la participation populaire et dela prestation de services, la base de la politique de développement durable, les personnes se transforment enune nouvelle force révolutionnaire. La nouvelle Constitution établit également le droit de tous les Kenyans à unenvironnement propre et sain.<strong>Social</strong> Development Network (Réseaupour le développement social)Prof. Edward Oyugi, Philip Thigo,John Kipchumbah, Ayoma MatungaCampagne du Millénaire des Nations Unies (UNMC)Charles AbugreKenya Treatment Access Movement(KETAM, Mouvement du Kenya Treatment Access)James KamauSEATINIOduor Ong’wenKENDRENWahu KaaraDaraja Civic Initiatives Forum(Forum des initiatives civiques de Daraja)Esther NziokaCLAN- MigoriWilliam Oloo JanakLa réalité de l’aideVitalice MejaEn décembre 2010, après des années de lutte en quêtede citoyenneté et de souveraineté, le peuple kenyana réussi à négocier un nouveau contrat social sousforme du renouvellement de sa constitution. Le cheminvers la Constitution de 2010 a été sinueux et cahoteuxet la réforme constitutionnelle avait constituéle sujet principal depuis l’indépendance du pays. Lestentatives visant à modifier la Constitution de 1963se sont intensifiées vers la fin des années 1990 et audébut des années 2000, mais n’ont abouti qu’après ledéclenchement des violences postélectorales au débutde 2008 et l’intervention de l’Union africaine grâceà la médiation du Secrétaire général de l’ONU, KofiAnnan. La Constitution a été présentée au ministrede la Justice le 7 avril 2010, elle a été publiée officiellementle 6 mai 2010 et soumise à un référendum le 4août 2010. Elle a été approuvée par 67 % des électeurskenyans et promulguée le 27 août 2010.La nouvelle constitution promet un programmede transformation qui, s’il est réalisé en totalité, se traduirapar un nouveau cadre politique et économiquequi permettra au pays de rompre avec le systèmenéo-patrimonial (dans lequel les mécènes utilisentles ressources publiques pour assurer la fidélisationde la clientèle dans la population en générale) héritédu colonialisme. Ses quatre caractéristiques transformatricessont les suivantes : une charte des droitsélargie et la promesse de lutter contre les inégalités etla marginalisation 1 , une décentralisation très poussée1 La Déclaration des droits va au-delà des droits civils et politiqueshabituels et incluent les droits économiques, sociaux etculturels. New Constitution of Kenya (Nairobi: 2010), p. 4.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 7744100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansde l’autorité publique, un chapitre sur le leadership etl’intégrité sur la base des principes du service publicdésintéressé, la discipline et la responsabilisation etun système de valeurs basé sur la souveraineté dupeuple et la culture des droits humains.Si elle est correctement mise en œuvre, la Constitutionoffrira aux Kenyans une occasion unique d’offrirdes réponses justes à deux anciennes questions quiont donné lieu, jusqu’à aujourd´hui, à des conflitsviolents et intermittents au niveau sous-national :quel est le sens concret d’être un citoyen du Kenyaet qu’est-ce que l’État offre à la majorité du peuple ?L’approche de la Constitution 2010 axée sur les droitsfondamentaux, la participation, la responsabilisationdes citoyens et le service public désintéressé créeaussi un contexte pour définir le rôle central de l’Étatdans la construction d’une économie qui remplisse lespromesses d’équité, de participation et les droits debase aussi bien sociaux qu’économiques.Cela permettra au Kenya de se libérer de l’emprisedes politiques néolibérales imposées par diversmoyens, y compris les conditions de l’aide au développement,les pressions politiques, les obligationsmultilatérales asymétriques et la connivencedes intérêts locaux avec les priorités des étrangers.Elle permettra également d’aborder la question dela corruption généralisée. Par exemple, les récentsaudits sociaux montrent que les bénéfices tant pourle Fonds d’affectation spéciale pour les autorités locales(LATF, pour son sigle en anglais ) et pour leFonds de développement des circonscriptions (CDF,pour son sigle en anglais) n’arrivent que difficilementaux groupes d’intérêts primaires. La plupart desfonds leur étant destinés ont été détournés par lesmembres du Parlement et leurs acolytes qui devaientgérer ces fonds au nom des citoyens.78100 10092Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 58Éducation100L'autonomisation14 0100 75 10086Activité économiqueQu’est-ce que la nouvelle Constitutionest en mesure d’offrir?La nouvelle Constitution présente une approcheholistique et basée sur les droits qui garantit undéveloppement social équitable fondé sur la capacitéproductive de la société, comme alternative aumodèle actuel fondé sur la recherche de profits. Elleimplique une nouvelle politique économique se basantsur la participation populaire, pas seulementdans les mécanismes de la politique, mais aussi dansle façonnage de l’économie et la distribution desbénéfices de la production de la valeur ajoutée. Cettepolitique visera à rééquilibrer les intérêts du secteurde l’entreprise avec les objectifs de développementdes citoyens et l’obligation de l’État à fournir un soclede protection sociale pour tous les secteurs de lasociété. Elle suggère que le nouvel État soit démocratiquemais qu’il soit également développeur.Un État démocratique développeur séparera ledomaine privé du domaine public de sorte que ceuxqui fournissent des services publics ne puissent pasintégrer le secteur privé. Cela est essentiel afin d’éviterles conflits d’intérêt et pour que l’État puisse équilibrerl’intérêt public et la motivation pour le profit. UnÉtat démocratique développeur éloignera l’économiede la captation de revenus improductifs et guideral’économie vers une production de valeur ajoutéefondée sur la promotion de la capacité productivede ses citoyens. Il interviendra pour assurer que lesbénéfices proviennent de l’activité productive et del’innovation et dans ce processus, non seulement illes réorientera mais il les réformera. Il mettra l’accentsur la création d’emplois, et pas seulement sur ​lacroissance globale et s’assurera que le processusde croissance soit en lui-même distributif et orientéà l’amélioration du bien-être. Il utilisera les taxesRapports nationaux 128 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


comme principale source de financement du développement,comme outil de redistribution et de réorientationdes mesures incitatives et comme moyend’améliorer les organismes civiques.La nouvelle constitution semble égalementfavorable aux questions environnementales. Parexemple, la section 42 de la partie 2 (« Droits fondamentauxet libertés ») établit : « Chacun a le droit àun environnement propre et sain, cela inclut le droit à1) un environnement protégé pour le bien de générationsprésentes et futures (...) et 2) à avoir des obligationsenvers l’environnement... », alors que l’article69 prévoit que « l’État doit (...) garantir l´exploitation,l’utilisation, la gestion et la conservation durable desressources naturelles et écologiques et doit assurerune distribution équitable des bénéfices qui endécoule 2 ». Cela constitue un progrès considérablepour un pays avec autant de défis environnementauxtels que la désertification, l’érosion des sols, la déforestation,la pénurie et la contamination de l’eau 3 . Parexemple, environ 16,8 millions de personnes (43 %de la population) n’ont pas accès à des sources d’eauaméliorée 4 , tandis que 80 % des zones arides et semi-aridesdu pays sont en train de se transformeren déserts, principalement en raison de la mauvaisegestion des ressources naturelles 5 .Le Kenya avant la Constitution : la crisealimentaire, financière et du carburantLes accusations d’irrégularités durant l’électionprésidentielle de 2007 ont ​déclenché une vagued’agitation politique, économique et sociale, lesquelles,combinées à la crise financière mondiale,ont ravagé le pays au cours des années qui ontsuivi. Plus de 500 millions d’USD ont été perdussur le marché des actions rien que durant la premièrejournée de 2008 et les chefs d’entrepriseont également accusé la perte de millions de dol-2 M. McDermott, “Kenya Grants Environmental Rights inNew Constitution,” Tree Hugger, (janvier 2011), .3 P. Orengo, “Parts of Kenya Slowly Turning into Desert,”The Standard, (16 août 2010), www.standardmedia.co.ke/InsidePage.php?id=2000016338&cid=4>; EcoMerge,Kenya’s Soil Erosion Leads to Famine, (31 Mai 2010),;Mongabay.com, Kenya Forestinformation and Data, ; Water.org, Kenya, ; AllAfrica.com, Kenya: RampantPollution of Rivers Worries Ngilu, (23 mars 2011), .4 Water.org, op. cit.5 P. Orengo op cit.; EcoGeneration, Desertification in Kenya,(29 novembre 2009), .lars 6 . La violence dirigée à l´encontre des minoritésethniques s´est intensifiée et la population estdescendue dans les rues à travers tout le payspour protester contre la manipulation électorale.Suite à cela, le produit intérieur brut (PIB) par habitantde cette année a été négatif et l’impact de lacrise financière s´est immédiatement répercutésur les prix alimentaires, le commerce (les importationset les exportations ont fortement diminué)et l’investissement, avec l’effondrement de l’investissementbrut qui a chuté davantage encore parrapport à son niveau précédent, déjà très mauvais.Les conséquences sociales de ce choc multiple ontété encore plus désastreuses, entraînant une haussedu chômage (65 % en 2010 7 ) et une forte croissancede la pauvreté monétaire, la faim et la malnutrition(au moins 100 000 enfants risquent une malnutritionextrême 8 ). Alors que les pauvres souffraient, les propriétairesde biens immobiliers, les banquiers et lesfournisseurs de services de télécommunications ontconnu une période de grande croissance 9 , mettantdavantage en évidence l’irrationalité du capitalismenéolibéral qui protège les riches contre les aléas descrises conjoncturelles et punit les pauvres avec leurstructure de rémunération déséquilibrée.La réponse à la crise a suivi une tendance similaireavec une injection de capital importante etimmédiate par l’État dans le système financier, lahausse rapide des prix des actions et le développementdes transactions immobilières à haute valeurajoutée, tandis que les investissements dans les infrastructuresà caractère social et pour améliorer lesconditions de vie des pauvres se sont fait au comptegouttesou n’ont jamais été réalisés.La « réglementation légère » promue par laBanque mondiale au Kenya ainsi que la mauvaisegestion des politiques liées au compte de capital ontentraîné la perte de soutien par le système financier6 CNN World, Civil unrest damaging Kenya’s economy, (3janvier 2008), .7 M. W. Muthee, Tackling Youth Unemployment in Kenya,(Washington, DC: Woodrow Wilson International Center forScholars, septembre 2010), 8 T. McConnell, “Recession Worsens Kenyan Famine,”Global Post, (2 avril 2009), .9 Blog de biens immobiliers au Kenya, Analyzing the RealEstate Sector in Kenya, ;Kenya Buzz, Kenya’s Very HealthyBanking Sector, ; C. Mungai,“Is Kenyan African Silicon Valley?”, Talk Afrique, (26 février2011), .du pays pour le secteur productif ou les petites etmoyennes entreprises. L’effet déstabilisateur desflux de capitaux à court terme et le comportementimprévisible des marchés ont laissé l’économie nationaleà la merci des aléas du capital spéculateur. Lacrise a révélé que le modèle actuel du développementnéolibéral est motivé exclusivement par les intérêtsdes grandes entreprises et leur capacité multilatéraleà favoriser une croissance inégale qui conduit àl´augmentation du chômage.Le rétablissement des limitesde la participationLa nouvelle Constitution garantit la participation publiquedans la gouvernance, un élément essentielde la politique sans lequel la démocratie est sapée.Il s´agit d´une approche de responsabilisation descitoyens qui est en train de devenir un élément essentielde la théorie et de la pratique de la démocratie.Elle s´inspire de l’esprit de la Charte africainesur la participation populaire au développement et àla transformation et, dans le cas du Kenya, dans lanouvelle Constitution récemment promulguée, lesprincipes de base indispensables à l’engagementdes groupes d´intérêts communiquent les discoursde gestion des sociétés durables.En tant que principe central de la conceptiondes politiques publiques, la « participation publique» suppose que tous les paliers du Gouvernementcherchent à renforcer l’engagement des citoyens etdes groupes d’intérêt vis-à-vis de leurs processusrespectifs et leurs activités de conception de politiques.Cela signifie briser les frontières artificiellesentre les hommes de loi et les citoyens ordinaires.La véritable citoyenneté consiste essentiellementen une relation politique qui exige le respect du biencommun et un rôle spécifique dans la société fondéesur la responsabilisation envers le système politiqueplutôt qu´envers des intérêts particuliers.Il est temps pour les citoyens de réclamer leursouveraineté en tant qu´agents concepteurs de politiquesqui puissent couvrir leurs besoins en matièrede développement social en s´éloignant des intérêtshégémoniques et en se rapprochant de la volontépopulaire.Il faut forcer l’État à enlever son masqued´exécuteur neutre de la volonté publique et il fautle forcer à devenir un instrument au service des secteursproductifs de la société et qui ne protège pasles intérêts parasites des classes dirigeantes. Enfaisant de la participation populaire et de la prestationde services la base de la politique de développementdurable, le peuple réussira, en même temps,à réduire l’écart grandissant entre les tâches queles citoyens ordinaires doivent remplir et celles quisont considérées comme les prérogatives des élites.Grâce à la participation et à l’action collective, lesKenyans se transformeront en une nouvelle forcerévolutionnaire. n<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 129 Kenya


MALAISIELe développement au détriment de la durabilitéÀ partir d’un effort pour atteindre le statut de pays développé en 2020, le Gouvernement met en œuvre unmodèle de développement non durable. Par exemple, une forêt vierge toute entière a été inondée et au moins 15communautés ont été déplacées pour construire un énorme barrage hydroélectrique ; une gestion irresponsabledont les conséquences seront la perte d’espèces endémiques et l’augmentation du mécontentement social.Pendant ce temps, le droit de la population à participer à la gestion des ressources naturelles est pratiquementinexistant. Ce n’est qu’à travers l’autonomisation de la population et la garantie de l’accès à l’information que leGouvernement sera capable d’aborder le développement durable.Friends of the Earth MalaysiaSahabat Alam MalaysiaEn 1991, Mahatir bin Mohamed, alors Premier ministre,a introduit le concept de Wawasan 2020, ou« Vision 2020 ». Ce concept est basé sur l’idée quela Malaisie pourrait se transformer en un pays développéd’ici 2020, de nouveaux enjeux stratégiquesqui ont dû être surmontés, ont été établis, à savoir,entre autres, garantir une société économiquementjuste, une économie concurrentielle et dynamiqueainsi que l’inclusion des minorités ethniques et lacréation d’un sentiment d’unité nationale 1 .Par la suite, ce plan a été ajusté. En 2009, lePremier ministre actuel, Najib Tun Razak, a déclaréqu’il avait fallu redéfinir les stratégies notammentdu fait que, pour atteindre les objectifs économiquesde Wawasan 2020, il fallait atteindre un taux decroissance économique d’environ 8 % 2 , alors que lamoyenne de la période 2000-2010 est à peine arrivéeà 1,20 % et en 2009 le chiffre a atteint le minimumhistorique avec 7,8 %, suivi d’un maximum de 5,9% pendant la même année avec une estimation pour2011 de 3,2 % 3 . Selon le Premier ministre, l’autre raisoninvoquée est qu’ « une nation développée n’estpas seulement définie par sa richesse. Il existe d’importantesmesures sociales et de qualité de vie dontil faut tenir compte à l’heure de prendre en considérationnos objectifs et nos réussites » 4 .Cette idée est partagée par le ministre du Commerceinternational et de l’industrie et par le membredu parlement en fonction, Rafidah Aziz, qui a manifestéson optimisme sur la possibilité d’atteindrele statut de pays développé en 2020. Il a signalé :« Nous travaillons pour que notre société devienneune société développée, à notre façon, ce qui signifiequ’en 2020 notre société pourra être multiraciale,1 M. Mohamad, The way forward (Kuala Lumpur : Bureau duPremier ministre, 2008). Voir aussi : .2 R. Pakiam et S. Adam, “Malaysia Must Expand Faster to BeDeveloped Nation, Najib Says”, Bloomberg News, (28 août2009), .3 TradingEconomics.com, Malaysia GDP Growth Rate, 2011,.4 R. Pakiam et S. Adam, op cit.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9899+100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 anscohésive, tolérante, respectueuse des autres et sanspolarisations » 5 .Malgré les bonnes intentions et le fait que dansles années 1970 la Malaisie a été pionnière dansl’établissement d’un cadre pour la gouvernance del’environnement 6 , à ce jour il y a très peu d’actionsayant été entreprises en faveur de l’adoption d’unmodèle de développement vraiment durable, notammentpour ce qui est de l’évaluation des problèmesenvironnementaux. Ainsi, par exemple, l’accomplissementdes accords de Rio 92 par la Malaisie aété, en général, décevant. À partir de cette année-là,l’industrialisation, l’urbanisation et l’infrastructureont connu un plus grand développement avec pourconséquence la perte de la biodiversité et d’écosystèmesessentiels, notamment des mangroves et desforêts des basses terres. D’autre part, malgré lesdispositions de nombreuses lois, les habitants deszones affectées ne sont pratiquement pas consultéset le Gouvernement garde toujours le secret lorsqu’ils’agit de projets de développement.En fait, le modèle de développement mis enœuvre par le Gouvernement a été centré sur le développementfinancier et industriel sans tenir compte del’environnement. Ce développement a été caractérisépar la consommation débridée et par le gaspillage del’eau et de l’électricité provoquant la dégradation del’environnement et des problèmes de santé.5 The Malayisian insider, Rafidah says Malaysia canbe developed nation by 2020, (18 mai 2020), .6 A. A. Hezri et M. Nordin Hasan, Towards sustainabledevelopment? The evolution of environmental policy inMalaysia, (2006), .92100 10099Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 56Éducation1000L'autonomisation1004010098Activité économiquePerte de la biodiversité et lois permissivesLa Malaisie possède une flore et une faune extrêmementriches et diversifiées, avec environ 25 000espèces de plantes 7 , 746 espèces d’oiseaux, 300espèces de mammifères, 379 espèces de reptiles,198 espèces d’amphibiens et 368 espèces de poissons8 . Parmi la flore et la faune, il y a 2199 espècesendémiques 9 . D’après l’Union internationale pourla conservation de la nature (UICN), Liste rouge de2010, la Malaisie occupe la troisième place au niveaumondial parmi les pays ayant le plus grand nombred’espèces menacées (1180) 10 . De ce chiffre, 488 sontdes espèces animales, dont 47 appartiennent à la catégorie« danger critique ». En outre, 188 des 692 espècesde plantes sont en danger critique et il y a quatreespèces de plantes endémiques qui ont disparues 11 .La dernière plante ayant été déclarée disparueest la Shorea kuantanensis, après l’abattement de ladernière forêt où elle se développait, la Réserve forestièrede Bukit Goh, située à Kuantan, pour cultiver despalmiers à huile. Les deux autres sont des espèces defougères et l’arbuste à floraison Begonia eromischa.Les forêts tropicales de Malaisie sont riches enbois, en plantes médicinales, résines, engrais et fournissenten outre de l’eau douce, protègent le sol del’érosion et de la perte de nutriments et conserventune grande biodiversité. En fait, la Malaisie est connue7 Ibid.8 Mongabay.com, Malaisie, (2006), ).9 Voir : 10 Voir : .11 Ibid.31Rapports nationaux 130 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


comme l’un des 12 pays mégadivers du monde 12 . Celasignifie qu’elle a la grande responsabilité de sauvegardersa diversité biologique. Malgré l’existence de certaineslois qui régulent l’exploitation des ressourcesnaturelles et la protection de l’environnement, leur miseen œuvre et leur application sont toujours insuffisantes.Il existe de nombreuses lois qui doivent être révisées; mais étant donné que le développement économiquesans une perspective durable a prévalu, lesefforts pour renforcer les lois inadéquates passent souventà un deuxième plan. Par exemple, la propositionpour modifier la loi de qualité environnementale de 1974a été débattue pendant presque dix ans et une loi de protectionde la faune sauvage de 1972 a été remplacée parla loi de conservation de la nature 2010, après environquinze ans de délibérations. D’autre part, les nouvelleslois n’abordent pas les questions clé, négligées par lesvieilles règlementations, celles-là mêmes qui ont contribuéau douteux statut du pays comme étant un centrerégional pour le trafic d’espèces sauvages.Un autre point faible est la séparation claire despouvoirs entre les gouvernements fédéraux et de l’Étatpar rapport aux ressources telles que la terre, les forêtset l’eau. Alors que la plupart des politiques ayant traità la biodiversité (par exemple, la politique nationalede la biodiversité, la politique forestière nationale etla politique nationale des terres) ont été établies auniveau fédéral ; l’adoption de ces politiques est demeuréefaible au niveau de l’État où, justement, il estnécessaire d’envisager une mise en œuvre efficace.Extraction des ressources et déboisementJusque dans les années 1970, l’économie de la Malaisiedépendait, en grande mesure, des ressourcesnaturelles du territoire. Par exemple, les grandes plantationsde caoutchouc ont été un pilier très importantde l’économie du pays depuis l’époque coloniale. Parconséquent, la perte vertigineuse de la forêt tropicalependant le XXème siècle peut être clairement liéeaux modèles d’extraction mis en place par les administrationssuccessives 13 . De grandes surfaces deterres cultivables ont été déboisées pour produire ducaoutchouc et du palmier à huile, et un grand nombred’arbres ont été coupés pour pouvoir répondre à lademande en bois des marchés nationaux et internationaux: par exemple, en 1985, le secteur forestier arapporté plus de 15 % des revenus d’exportation dupays 14 . D’après quelques études, le taux de déboisementde la Malaisie s’accroît plus rapidement que nullepart ailleurs 15 . En fait, le taux de déboisement annuel aaugmenté de presque 86 % entre 1990 et 2005, et laperte de la surface occupée par les forêts à diminué de140 200 hectares par an depuis l’an 2000 16 .Il a été dit que, bien que la Malaisie possède « enthéorie » l’une des meilleures politiques de protectiondes bois tropicaux en développement en Asie, ilexiste un grand fossé entre la loi, sa mise en place etson application, de sorte que le déboisement repré-12 Hezri et Nordin Hasan, op cit.13 Ibid.14 Ibid.15 Mongabay.com,op cit.16 Ibid.sente toujours une menace pour l’intégrité des forêtstropicales. En fait, pendant les deux dernières décennies,la gestion durable des forêts a été inexistante 17 .Alors qu’un cadre juridique et administratif a étéétabli au début des années 1970, les impacts environnementauxdu développement agricole et les pratiquesd’extraction ont augmenté considérablement,y compris le déboisement qui, à son tour, a augmentéde manière significative 18 .Les conséquences du déboisement et de la mauvaiseutilisation du sol sont nombreuses : érosion dusol, changements hydrologiques, pollution des eauxsuperficielles à cause de l’utilisation d’insecticides,ainsi que la perte de la faune et de la flore locales. Demême, le risque d’inondations et de glissements deterre augmente 19 , et pour les peuples autochtones, quiont toujours dépendu de la forêt pour la médecine, lelogement et la nourriture, la destruction de leur principalesource de subsistance implique également laperte de leur forme de vie traditionnelle : dès que laforêt aura disparu, leur culture disparaîtra aussi.Mégaprojets, méga destructionPendant les deux dernières décennies, la Malaisiea été témoin d’une série de projets publics et privéscontroversés. Leurs impacts socio-environnementauxsont encore en cours d’évaluation.Le projet le plus polémique est le projet hydroélectriquede Bakun, de 2400 MW dans l’État de Sarawak(dans l’île de Bornéo) où une surface d’environ 695 km 2(équivalente à la surface de Singapour) sera inondée.Considéré comme étant le deuxième barrage de briselamesen enrochement en béton le plus haut du monde,le projet a été critiqué car il néglige les questions environnementaleset aussi en raison de sa douteuse justificationvis-à-vis de la demande croissante d’énergie.En fait, on dit que la plupart de la demande provientde la presqu’île de Malaisie au lieu de l’est de la Malaisie,où est situé le barrage. Mais certaines personnes ayantémis des critiques pour ce projet ont signalé qu‘il y a surabondanced’électricité dans la Malaisie péninsulaire,ce qui rend inutile ce projet hydroélectrique 20 .Après deux tentatives frustrées de constructiondu barrage, le projet a été privatisé en 1994 en faveurde la société Ekran Berhad, une entreprise du boisn’ayant pas d’expérience dans ce domaine ; l’achèvementdes travaux était prévu pour 2003. Lors de lacrise financière asiatique de 1997, le Gouvernementde la Malaisie a repris le projet et la société Ekran, quiavait complété 50 % des travaux de génie civil, a reçuune « compensation ».Le processus d’inondation a démarré le 13octobre 2010. Outre l’inondation d’une vaste forêttropicale, qui suppose la perte d’une grande partie dela biodiversité (comprenant de nombreuses espècesendémiques), 15 communautés indigènes ont dûêtre réinstallées en aval. Ce déplacement forcé a provoquéun grand mécontentement parmi la populationde la région ; à cela s’ajoutent des réclamations pourdes indemnités non perçues, la perte des moyens17 Ibid.18 Hezri et Nordin Hasan, op cit.19 Voir : 20 Voir : de subsistance, et une infinité d’autres problèmessociaux. Plusieurs communautés ayant rejeté le plande déplacement ont présenté conjointement uneplainte contre le Gouvernement en raison de la pertede terres qui leur appartenaient depuis toujours. Laquestion n’est pas encore résolue. De plus, il y a eudes rapports récents concernant les pratiques deconstruction non sécurisées – et même illégales – quisemblent une question quotidienne dans le métierde la construction à cause des faibles mesures desécurité.Un centre d’industries polluantes ?Certains groupes de la société civile et quelques fonctionnairesgouvernementaux sont inquiets sur les ambitionsd’industrialisation du Gouvernement (malgré la réclamationdes « verts ») qui pourraient transformer la Malaisieen un aimant attirant toutes les industries polluantes.Il y a encore quelque chose de plus inquiétant: le long de la côte du pays, notamment dansla presqu’île, il est prévu d’installer un centre pétrochimiquequi sera accompagné de la constructionde ports afin de faciliter l’exportation des produitsfinaux. Ces industries intensives d’énergie exigentaussi la construction d’usines d’énergie électriqueà charbon comme celle qui se trouve dans la régionen développement d’Iskandar, dans l’État de Johor.Ce type de développement côtier à grandeéchelle détruit constamment les forêts de mangrovesdu pays. Ces forêts sont des sites de frai des poissonset la base de la pêche artisanale côtière depuis desgénérations. Les autorités ont fait la sourde oreilleaux plaintes des communautés locales concernantles captures décroissantes ; les promoteurs du projetet le Gouvernement ont octroyé de très faiblescompensations. Dans certaines régions, le développementcôtier favorisé par l’industrie de l’aquiculturea diminué la surface consacrée aux cultures pouvantentraîner de ce fait des conséquences sur la sécuritéalimentaire du pays pendant les années à venir.En général, la résistance au calendrier de développementnon durable du Gouvernement a étélimitée par la censure aux médias et par l’applicationde plusieurs lois qui limitent la liberté de presse, ycompris la loi de la sécurité interne, la loi des secretsofficiels, la loi de la sédition et la loi de la police.Toutefois, une campagne bien organisée, dirigéepar les communautés affectées, a démontré queles citoyens bien informés peuvent devenir une forceimportante pour défier les plans de développementnon durable du Gouvernement. Dans ce sens, il existedeux cas exécutés avec succès, à savoir la clôture del’usine de terres rares malaise/japonaise, dans l’Étatde Perak (fin 1990), et l’abandon de l’incinérateur dedéchets situé à seulement 40 km de la capitale.À ce jour, le défi majeur pour le développementdurable en Malaisie est l’autonomisation de la population,de l’aider à connaître ses droits en garantissantl’accès à l’information et en créant des mécanismesde participation authentiques, de sorte que laformulation des politiques nationales et les décisionsportant sur le développement de projets puissentêtre vraiment analysées sur la base de l’économie, lasociété et l’environnement, c’est-à-dire, sur les troispiliers du développement durable. n<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 131 Malaisie


MALTEIl est temps de se réveillerLes Maltais doivent commencer à se concevoir comme étant des « dépositaires et des administrateurs » del’environnement plutôt que ses « propriétaires » afin de promouvoir ainsi le développement durable. Les citoyensdoivent prendre conscience de la dégradation de l’environnement et de la distribution inégale des ressources qui sontles conséquences directes de leur égoïsme, leur indifférence et leur autosuffisance. Les Maltais doivent apprendreà utiliser les ressources naturelles limitées de façon plus prudente. Pour prendre soin de l’environnement il fautappliquer le principe de subsidiarité — principe qui est associé à la décentralisation du pouvoir et à la provision d’unmilieu favorable — qui doit se traduire par une intégration et une coordination plus efficaces des responsables.Kopin MaltaJ.M. SammutL’engagement de Malte envers les idéaux des NationsUnies, en particulier envers les questions environnementales,est notoire suite au rôle de leader que le paysa joué en 1967 lorsque il a introduit le concept de biencommun de l’humanité à propos des fonds marins desmers internationales et des océans et de leur sous-sol.Ceci a conduit à l’approbation de la Convention des NationsUnies sur le droit de la mer en 1982 et à l’initiativede 1989 sur la protection du climat mondial pour toutesles générations, présentes et à venir, de l’humanité.Cependant, bien que le pays ait été un des premiersà reconnaître l’existence de problèmes environnementauxmondiaux, sa première stratégie nationale pour ledéveloppement durable n’a été publiée qu’en décembre2006 1 . Ce sont les nombreuses ONG nationales qui sesont occupées habituellement des différents problèmesenvironnementaux. Certaines d’entre elles sont en activitédepuis 1960 et continuent encore aujourd’hui àrelever les défis que représente la croissante demandecommerciale et nationale pour la terre, la mer et l’air dupays. Les recherches montrent que s’agissant d’un petitarchipel densément peuplé, Malte doit utiliser ses ressourcesnaturelles limitées avec beaucoup de prudenceet de façon éthique 2 . Le rythme effréné du marché et unstyle de vie hyper-consumériste, centré sur l’obtentionde bénéfices et la satisfaction des besoins individuels,peuvent nuire au bien-être social de la société maltaise,non seulement actuellement mais aussi à l’avenir.Changement climatiqueLa température moyenne annuelle de l’air à Malte a augmentéde 0,23°C par décennie lors des 50 dernièresannées 3 . Il est prévu que le réchauffement mondial provoqueun climat extrême et hasardeux dans le pays,avec des vagues de chaleur prolongées provenant duSahara, des périodes de pluie plus courtes et intenseset des saisons sèches plus longues, climat qui sera nui-1 Commission nationale pour le développement durable, ASustainable Development Strategy for the Maltese Islands2007–2016, (2006).2 Autorité d’aménagement du territoire et de l’environnement deMalte (MEPA), The Environment Report 2008, (2008), ; S. Martin, The Environmental Deficit: TheReform of MEPA and Other Environmental Regulatory Authorities,(La Valette : Institut de Politiques publiques actuelles, 2008).3 MEPA, op. cit.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9799+100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé088Enfants atteignantla cinquième annéed’école100 100Survivance jusqu’àl’âge de 5 anssible aussi bien aux habitants qu’à l’industrie touristique.L’augmentation de la température s’accompagnera d’ungrave manque de précipitations en raison de la réductiondrastique des pluies dans la Méditerranée centrale.Les émissions de gaz à effet de serre de Malteont augmenté de 2,1 % par an depuis 1990 jusqu’en2008. La plus forte augmentation s’est produite en1991, où on a enregistré une hausse de 8,7 %. Lesannées 1995, 2004 et 2008 ont été les seules avec uneréduction de ces émissions 4 . Le secteur de l’énergiea été le plus grand responsable des émissions de gazà effet de serre depuis 2000 jusqu’en 2008, avec uneémission moyenne de 90,4 % du total. Les industriesde génération d’énergie, avec une moyenne de 73,5 %des émissions, étaient à la tête du secteur, suivies parles transports qui enregistraient une moyenne de 19,8% du total du secteur. Malte possède 721 véhiculesrecensés par 1000 habitants 5 . Afin de réduire les émissionset la grande dépendance des automobiles privées,un nouveau système de transport public a été mis enplace en juillet 2011 6 . Le Gouvernement offrira aussides incitatifs pour l’achat de voitures peu polluanteset découragera la demande de voitures qui polluentdavantage comme le font les vieux modèles.La Stratégie nationale pour les politiques et lesmesures de réduction concernant les émissions degaz à effet de serre 7 établit qu’en tant que membre de4 Eurostat, Greenhouse Gas Emissions.5 Bureau national des statistiques, Malta in Figures 2010, (LaValette : 2010).6 D.Lindsay, “New Public Transport System Unveiled,” TheMalta Independent, (7 de novembre 2010).7 Ministère des Ressources et des affaires rurales, NationalStrategy for Policy and Abatement Measures Relating tothe Reduction of Greenhouse Gas Emissions, (La Valette :septembre 2009), .99Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 63Éducation1000L'autonomisation10058100100Activité économiquel’UE, Malte doit atteindre en 2020 une réduction de 20% du niveau de dioxyde de carbone (CO 2) enregistréen 1990 et garantir que 10 % de l’énergie soit généréepar des sources alternatives propres. Dans les secteursdes transports, de l’agriculture et de la gestiondes déchets l’objectif est qu’en 2020 les émissions degaz ne dépassent pas de 5 % au maximum celles de2005. Le pays doit scrupuleusement mettre en œuvreles mesures établies par le Comité pour le changementclimatique 8 , rechercher une utilisation plus efficacedes ressources dans la génération d’énergie et s’engagerfortement vers l’utilisation maximale des sourcesrenouvelables d’énergie telles que l’énergie éolique ouphotovoltaïque, afin de réduire les émissions de CO 2.Si ces objectifs ne sont pas atteints, les conséquencesseront négatives aussi bien pour l’économie que pourle secteur social.Utilisation de la terreMalte possède un territoire de 314 km 2 et environ412 970 habitants (1307 personnes par km 2 ), l’îlereçoit la visite de 1,2 million de touristes par an 9 .Les statistiques indiquent que 27,7 % du territoireétait urbanisé en 2005 10 . Le développement excessifest le problème environnemental le plus urgent quia produit une grande perte de la biodiversité, desressources naturelles et aussi de terres pour l’agriculture11 . Ainsi même, le recensement de populationet de logement de 2005 a révélé qu’il existait plus de8 Ibid.9 Bureau national des statistiques, Malta in Figures 2010,(La Valette : 2010), op. cit.10 Bureau national des statistiques, Sustainable DevelopmentIndicators for Malta 2010, (La Valette : 2010).11 Ibid.31Rapports nationaux 132 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


53 000 propriétés non occupées. Plus d’un quart deslogements de Malte sont vides 12 .L’Autorité de l’aménagement du territoire etde l’environnement (MEPA) règlemente l’utilisationde la terre et dirige aussi l’agence de protection del’environnement. Beaucoup de violations au pland’aménagement du territoire se sont produites, particulièrementen ce qui concerne les constructionsen dehors de la zone officielle de développement(ZOD) 13 . L’Autorité a été la cible de beaucoup de critiquesà cause de sa réaction face à ceux qui violentles dispositions, sévère avec les plus faibles et laxisteavec les plus puissants 14 . L’extension des zones deconstruction la veille d’une élection parlementairedisputée 15 et accompagnée d’une série d’incidentstrès médiatiques donne la perception qu’il existe uneinterférence politique dans le processus d’aménagementdu territoire ce qui a pour effet de discréditerla MEPA.La construction et les démolitions produisentpresque 90 % des déchets annuels du pays 16 . Enoutre, elles entraînent des problèmes liés à la générationde fines particules qui polluent l’air 17 . Lerecyclage et la réutilisation de pierres, de blocs debéton et des plafonds n’ont pas encore été abordés.Le manque de terres oblige à une gestion minutieusedes constructions qui assure la meilleure qualité devie possible avec le moindre risque pour la santéhumaine, et qui stimule l’identité culturelle et socialedes populations. Les ONG environnementalesde Malte insistent dans leurs réclamations face auxhommes politiques et aux autorités publiques ausujet de la dégradation du patrimoine naturel 18 .Le personnel de la MEPA doit suivre le code deconduite 19 présenté aux directeurs et employés de laMEPA en 2008 et élaborer des systèmes et des procéduresqui assurent la transparence, l’efficacité et laresponsabilité de l’utilisation durable de la terre ainsique l’élimination de la spéculation de la terre. Il estessentiel que les membres du conseil d’administrationde la MEPA ne soient pas des hommes politiquesmais plutôt des spécialistes de l’aménagement duterritoire, des écologistes et d’autres membres dela société civile qui se soucient du problème environnemental.Seulement de cette façon pourra-t-onconsidérer que la MEPA protège l’environnement.12 Bureau national des statistiques, Census of Population andHousing 2005: Preliminary Report, (La Valette : 2010).13 Bureau national des statistiques, Sustainable DevelopmentIndicators for Malta 2010, op. cit.14 Sciluna, op. cit.15 Ibid.16 Bureau national des statistiques, Solid Waste Management:2004–2008, (25 janvier 2010).17 Ibid.18 Nature Trust Malta, “Rape of Natural Heritage Continues,” GozoNews, (juillet 2007), ;The Times, 2,500 OutsideDevelopment Zone Permits Issued in Two Years, (24 mars 2008),;Nature Trust Malta, NTM Amazed on What Grounds MEPA Issuedthe Permit to a Fish Packing Factory at Imgiebah, (2011).19 MEPA, Good Conduct: A Code of Ethics and Code of Practicefor MEPA Staff and Appointees, (2008).L’eauL’eau est une marchandise rare dans le pays. Lamoyenne annuelle des précipitations est de 600mm 20 . La qualité ainsi que la quantité d’eau superficiellesont en risque principalement à cause de lasurexploitation de la distribution publique de l’eau etdu pompage privé non contrôlé 21 . C’est ainsi qu’augmententla salinité et aussi la pollution par excès denitrates et d’autres pollueurs liés à l’agriculture.Plus de la moitié de la production d’eau est réaliséepar osmose inverse dans des usines de désalinisationqui sont très coûteuses et qui contribuent àl’émission de gaz à effet de serre 22 . Récemment il ya eu des ajustements périodiques des tarifs qui ontcontribué à la diminution de la demande généraled’eau. Le pays possède trois usines de traitementdes eaux usées qui produisent un volume importantd’eau de deuxième qualité. Alors que l’usine de traitementla plus ancienne, qui fonctionne depuis 1980,distribue cette eau aux agriculteurs pour l’irrigation,les usines de traitement plus récentes déversentcette eau à la mer 23 . Il faudrait cependant utilisercette eau pour l’agriculture ou pour les industries quidemandent de grandes quantités d’eau.Signes positifsPendant trois ans la MEPA a publié des rapportsenvironnementaux annuels montrant des signespositifs de durabilité environnementale. Le rapportenvironnemental 2008 24 indique que 99 % des zonesde baignade autour de Malte et de Gozo respectentles standards de l’UE pour les eaux de baignade (selonla directive européenne concernant les eaux debaignade) 25 .Le rapport souligne aussi que la tendance généraledepuis l’an 2000 est au découplage entre laconsommation d’énergie et l’activité économique,indiquant ainsi que l’économie du pays est de plusen plus efficace du point de vue énergétique. L’efficacitéen ce qui concerne l’utilisation des matériauxs’est également vue accrue. Les prévisions initialesmontrent que la consommation intérieure de matériauxde Malte, qui mesure la quantité de matériauxconsommés par l’économie nationale, a diminuéentre 2004 et 2006, ce qui est un indice de l’accroissementde l’efficacité de l’utilisation des matériauxemployés dans l’activité économique.ConclusionUne gestion des ressources plus intégrée afin deconserver l’environnement pour les générations àvenir est nécessaire. Le pays doit saisir les occasionséconomiques émergentes créées par la science et la20 Bureau national des statistiques, Malta in Figures 2010, (LaValette : 2010), op. cit.21 K. Sansone, “Farmers Extract More Groundwater than WSC,”The Times, (23 mars 2010).22 Bureau national des statistiques, World Water Day 2009, (LaValette : 2009).23 M. Cremona, “Averting a Water Crisis,” Malta Today, (7 mars2010); J. Debono, “Malta Dumps 6,500 Cubic Metres ofWater a Day,” MaltaToday, (12 octobre 2008).24 MEPA, op. cit.25 European Commission, The 2006 Bathing Water Directive,(2006).technologie et favoriser les techniques de développementdurable et le travail éventuel qui en découle. LeGouvernement doit attribuer des fonds aux diplômésuniversitaires dans le domaine de la recherche et dudéveloppement ainsi qu’aider l’industrie à développerdes produits et des processus innovateurs.La prise de conscience publique et l’éducationjouent aussi un rôle fondamental pour assurer lerespect et la conservation de l’environnement. Lesrecherches environnementales doivent occuperune place importante dans les plans de recherchenationaux. Il est aussi nécessaire de créer des programmesd’éducation tout au long de la vie, centréssur la possibilité d’avoir de précieuses expériencesd’apprentissage stimulant une conduite durable, dansles institutions éducatives, sur les lieux de travail, dansles familles et dans la communauté. Le Gouvernementdoit créer différents points de prise de consciencepour que tous les secteurs de la population bénéficientde l’éducation formelle et non formelle pour ledéveloppement durable. La diffusion de l’information,la communication et l’éducation peuvent aider lescommunautés à identifier les sujets importants, à reconnaîtreles problèmes et à développer les solutions.Une plus grande connaissance permet aux citoyens dechoisir leurs attitudes, leurs comportements et leursstyles de vie de façon responsable et informée.La politique joue un rôle important dans la promulgationdes directives et des lois pour un environnementdurable. Les standards environnementaux ne serontpas accomplis à moins qu’ils soient soutenus par deslois promulguées par le parlement. La participation deshommes politiques a quelquefois entravé les actionsdes agents de la MEPA et des ONG environnementalesvisant à faire respecter les directives 26 . Les tribunauxdoivent assurer que l’administration de la justice reflètela gravité des délits. Le principe de « qui pollue paye »,qui s’applique déjà dans certaines régions, doit êtreétendu 27 . Les impôts environnementaux et les contributionsécologiques doivent être utilisés pour stimuler unchangement de comportement par le biais de la pénalisationdes grands pollueurs, et il faut investir cet argentdans des sources d’énergie propre et renouvelable oudans la recherche sur le développement durable. Maltedoit réduire les émissions de gaz à effet de serre pouraccomplir ses objectifs en tant que membre de l’UE.Tout le monde joue un rôle important dans lapromotion du développement durable. La représentationet la participation de la société civile doivents’appliquer à tous les niveaux de la prise de décisions.Les représentants des organismes de la sociétécivile, nommés par leur propres entités, doiventparticiper au conseil d’administration des institutionsnationales telles que la MEPA, le conseil pourle développement économique et social de Malte(MCESD), l’autorité des ressources de Malte (MRA)et l’autorité des transports de Malte (MTA). n26 Sciluna, op. cit.; F. Vella, Mistra Development: Calls for JPOto Resign, While He Waits for Police Inquiry to End, MaltaIndependent, (19 mars 2008); P. Cachia y N. Laviera, DCC, MepaChairman Reacts to Auditor’s Report on ‘Irregular SupermarketPermit, Di-ve News, (28 février 2008), .27 MEPA, Polluter Pays Principle, .<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 133 Malte


MAROCUn futur assoifféLa biodiversité est en péril en raison de la mauvaise gestion des ressources en eau qui se traduit par des pertesde 35 % de l’eau au niveau des canalisations et par la pollution des réserves par les déchets industriels et urbains.La perte de terres cultivables à cause du manque d’eau et de l’érosion du sol a un effet direct sur la pauvretérurale, d’autant plus que le clivage entre les secteurs les plus riches et les plus pauvres de la population s’estaccentué ces dernières décennies.Espace AssociatifDe par sa situation stratégique et son contexte historico-géographique,le Maroc possède une grandediversité bioclimatique, biologique, socioculturelle etpaysagère. Le territoire renferme une grande variétéde zones climatiques, entre autres la zone méditerranéenneau nord de la chaîne de l’Atlas, une zonemaritime au climat tempéré à l’Ouest et une zonedésertique à l’Est, qui réunissent une large gammed’écosystèmes comprenant des forêts méditerranéennes,des forêts de conifères, des prairies et desdéserts 1 . Cette richesse faunistique et floristiquefait du Maroc le deuxième pays méditerranéen leplus riche en biodiversité. Cependant, malgré cetatout, le pays n’a pas atteint un développement véritablefavorisant tous ses citoyens. Les défis doiventêtre affrontés sous un angle nouveau, intégré audéveloppement, prenant en compte les exigenceséconomiques, l’égalité sociale, le respect de l’environnement,la diversité culturelle, qui permette à sontour une vision participative de la population locale.Le modèle de développement appliqué par leGouvernement, ciblé sur la croissance économiqueet l’urbanisation, a accentué la crise environnementaledont souffre le pays. Parmi les menacesqu’affrontent actuellement les Marocains figurentl’épuisement des ressources et la détérioration del’habitat. Tout ceci influe sur le coût de la vie 2 . Ledéséquilibre entre la demande croissante d’eau etla pénurie de cette ressource, auquel il faut ajouterla surexploitation des forêts et des sols, a causé laperte de terres utilisables pour l’agriculture ; le coûtde cette détérioration environnementale, par ailleurs,a été estimé à environ 350 millions d’USD 3 .La perte de terres cultivables due au manqued’eau et à l’érosion du sol a un effet direct sur la pauvretérurale. Sur les quatre millions de Marocains quivivent sous le seuil de pauvreté, trois millions habi-1 Voir: Wikipedia, List of ecoregions in Morocco, ; Maroc– Climat, < http://fr.wikipedia.org/wiki/Maroc#Climat >.2 IndexMundi, Morocco Environment – Current issues, .3 The Global Mechanism, Increasing finance for sustainableland management Morocco, (2008), .Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 8263100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 anstent en zone rurale. À son tour, 75 % de la populationrurale pauvre dépend de l’agriculture pour vivre ; lamajorité a tout juste accès à une petite portion deterre non irriguée au potentiel de culture par conséquentminime 4 .D’autres défis environnementaux urgents auxquelsle pays doit faire face dernièrement se situentau niveau des inondations, des pluies anormalementintenses et des chutes de neige qui ont affligédifférentes régions au cours des dernières années,laissant un bilan de plus de 30 morts et exposant desmilliers de personnes à la misère et à la pauvreté 5 .Un pays assoifféLes ressources en eau sur lesquelles compte le Marocsont limitées. On estime à 22 milliards de m 3 /an les ressources en eau renouvelables, soit à peineplus de 730 m 3 /hab./an. Les ressources qui peuventtechniquement et économiquement être mobiliséesne dépassent pas 20 milliards de m 3 /an 6 . L’agricultureest l’activité économique qui consomme le plusd’eau, soit 80 % de la consommation générale nationale.Les 20 % restants se répartissent entre lesecteur industriel et la consommation des ménages.D’un autre côté, les ressources en eau sontsoumises à des variations cycliques extrêmes. Lescycles de sécheresse aiguë ont des impacts importantsau niveau de l’économie nationale, et surtout4 Rural Poverty Portal, Rural poverty in the Kingdom ofMorocco, .5 Voir : .6 Wikipedia, Eau potable et assainissement au Maroc, .67100 10096Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 40Éducation100190L'autonomisation29100 72100Activité économiquedans le secteur agricole (en particulier pour la chutede production des céréales).À ces pressions exercées sur les ressources eneau s’ajoutent une détérioration croissante et chaquefois plus grave de leur qualité : en ce qui concerne l’eaupotable, le taux de connexion dans le milieu urbain estde 83 % (1998), tandis que dans le milieu rural le tauxd’accès, qui représentait 14 % en 1994, est passé à environ40 % en 2001 grâce à l’exécution du programmePAGER d’approvisionnement groupé en eau potabledes populations rurales, mis en œuvre en 1996. 7Quoi qu’il en soit, l’utilisation et la gestion peurationnelle de cette ressource ont aggravé la pénurie ;par exemple, la détérioration des réseaux de distributiond’eau potable dans les villes suppose des pertesde 35 % de l’eau employée dans le système.D’autre part, l’envasement des barrages est unfacteur qui compromet le rendement de l’approvisionnementen eau et qui se traduit – dans le cas de lapresse d’Al Wahda, par exemple, comme on le verraplus bas – par la perte de plus de 60 millions de m 3de capacité de stockage par an. Hormis la quantité,les ressources en eau subissent une dégradation dela qualité en raison des différentes voies de pollution: le déversement des déchets industriels et domestiquessans traitement préalable nuit à la qualité descours d’eau et du milieu marin. L’emploi intensif deproduits phytosanitaires et d’engrais constitue égalementun moyen de pollution ciblant surtout lesnappes souterraines, elles-mêmes adultérées par laminéralisation que provoque l’invasion de l’eau demer en raison de la surexploitation. 87 Ibid.8 Wikipedia, Al Wahda Dam (Morocco), .Rapports nationaux 134 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


La grande concentration d’activités dans desespaces réduits génère aussi une pollution qui dépassela capacité d’auto-purification des milieuxaquatiques et des cours d’eau, déjà affaiblis par lessécheresses répétées et par les installations hydrauliques9 . La comparaison entre les ressources hydriquesdisponibles et les besoins de l’agriculture,de l’industrie et de la population laisse prévoir unesituation de crise à l’horizon 2020 10 .Défis de l’environnementLes problèmes concernant l’état des sols au longdu territoire englobent la perte de fertilité et la disparitiondes couches arables à cause de l’érosionhydrique et éolienne, l’envasement des barrages àcause de l’érosion, la salinisation, la désertification,le développement des zones urbaines en détrimentdes terres agricoles, l’accumulation des sables dansles zones arides et les oasis, et une situation généralede détérioration par l’exploitation minière et lescarrières.Le problème de la pollution atmosphériqueest aussi particulièrement pressant ; elle se doit engrande partie à la mauvaise qualité des combustiblesutilisés, au parc automobile trop archaïque et auxémissions de gaz industrielles non traitées.La destruction des écosystèmes et l’exploitationexcessive de la flore ont mis en péril différentesespèces, tant animales que végétales 11 . L’environnementcôtier est spécialement détérioré par laconcentration de l’activité humaine sur le littoral,la dégradation des ressources halieutiques et lesdéchets industriels et domestiques non traités. Ilexiste un grand risque de disparition des oasis, ainsique d’augmentation de la salinité et de l’érosion desterres que la surexploitation des ressources aggrave,par le dessèchement naturel ou artificiel des zoneshumides et par le manque d’infrastructure dans leszones montagneuses 12 .Le développement anarchique des villes a eu unimpact négatif sur le bien-être des forêts, en raisondu déboisement indiscriminé et de l’exploitation àdes fins énergétiques. De même, la planification urbanistiqueminimale ou inexistante a contribué à l’apparitionde grandes décharges publiques sauvages,que complique encore le ramassage insuffisant desordures domestiques, l’absence de traitement desdéchets spéciaux (toxiques, hospitaliers, pesticides)et le vieillissement des réseaux d’assainissementurbain.La région de Garb-Chrada Beni HsenLa région de Garb-Chrarda Beni Hsen est une desplus riches du pays. Elle dispose de ressources eneau considérables, d’une vaste plaine de 4 200 km 2et d’une superficie boisée de 124 614 ha. Cependant,ces ressources sont en péril, car la gestion inefficacedu gouvernement pour les projets de développementn’a fait qu’aggraver la dégradation de l’écosystème.L’un des principaux problèmes environnementauxde cette région concerne la pollution liée à l’activitéindustrielle. Les industries les plus polluantessont les sucreries (Dar Gueddari, Mechraa Bl Kseriy Sidi Allal Tazi), les huileries, la raffinerie de SidiKacem, et l’industrie de la pâte de Sidi Yahya, responsablede 50 % de la pollution industrielle organiquede la région. Un autre problème important à résoudreest la façon de gérer les 80 millions de m 3 d’eauxusées domestiques générées par an dans la région.L’activité agricole, assez développée dans cetterégion et surtout dans la plaine du Garb, est uneautre source importante de pollution, surtout pourles nappes d’eau souterraines. Le problème majeurlié à ce genre de pollution vient de l’augmentation dela teneur en nitrates, qui est une grave menace pourla santé des consommateurs.De même, la région est une des plus touchéespar l’érosion hydrique, principalement le bassin del’Uarga, qui en raison de sa topographie accidentée,présente une dégradation moyenne de 2070 t/km 2 /an. Dans le bassin du Sebou, en revanche, la détériorationest de 600 t/km 2 /an. De plus, le risque d’érosiondans la région reste très élevé, ce qui rend lazone vulnérable aux inondations. Cette situation estaggravée par le mauvais fonctionnement du barraged’Al Wahda, le plus grand du pays (et le deuxièmed’Afrique), inauguré en 1997. À l’heure actuelle, enraison de son fort taux de sédimentation, le barrageperd environ 60 millions de m 3 de capacité de stockagepar an 13 .Le milieu urbain présente aussi un taux importantde dégradation. La plupart des agglomérationsont une gestion de l’assainissement liquide déficiente ;de fait, soit les centres urbains sont dépourvus desystèmes d’assainissement, soit ils sont vétusteset mal calibrés, ce qui provoque des inondations, dela pollution et des odeurs nauséabondes. La plupartdes déchets, qui plus est, sont déversés dans lescours d’eau de surface.La gestion des résidus solides dans la régionprésente aussi des lacunes au niveau du ramassageet de la décharge, surtout parce qu’il n’existe aucunprotocole de gestion des déchets solides. Letri sélectif est insuffisant, surtout celui des déchetsmédicaux et industriels qui, une fois mélangés auxdéchets ménagers, entraînent un risque de pollutionimportant.Dégradation du littoral et des zones humidesLa région du littoral s’étend sur 140 km et subit desdégradations de tout genre liées à la forte concentrationde la population – due au déplacement desactivités et des investissements vers le littoral – et autourisme anarchique 14 .Les zones humides, surtout, sont extrêmementsensibles aux agressions externes et elles sont touchéespar la pollution industrielle, urbaine et agricole,qui augmente le niveau de toxicité de l’air, des solset de l’eau. L’activité touristique dans les zones humides,de plus, est en plein essor, ce qui constitueun facteur important de stress sur ces zones. Quantaux lacs de la région, hormis celui de Sidi Boughabaqui a le statut de zone forestière, aucun d’entre euxn’a de réglementation claire concernant leur gestionet leur protection.Les Objectifs du MillénaireLes Objectifs du Millénaire pour le Développement(OMD) restent la référence principale pour les citoyenset les organisations de la société civile dupays. Le Haut Commissariat au Plan soutient qu’à sixans de l’échéance de 2015, la performance du Marocfait de lui l’un des pays capables d’atteindre les OMDà la date prévue 15 . Cet optimisme, malheureusement,ne semble pas justifié. Les principaux obstacles àvaincre pour y parvenir sont les suivants :• La lenteur dans la promulgation et l’applicationdes lois relatives à l’environnement ;• Les impacts du changement climatique qui demeurentimprévisibles ;• Le stress important auquel sont soumises lesressources naturelles ;• Le manque de sensibilisation et d’engagementdes citoyens.ConclusionsÀ l’heure de gérer les ressources il faut abandonner lelaxisme avec lequel cette tâche a été abordée lors desdernières décennies ; le pays est d’ailleurs soumis àun impératif écologique dont la gravité n’a pas encoreété déterminée.Les modèles de développement mis en œuvrepar le Gouvernement –et leur manque de projection àlong terme – ont favorisé les inégalités. De fait, l’indicateurGINI, qui mesure les écarts dans la répartitiondes richesses, s’est élevé ces dernières décennies.A l’horizon 2011 il était estimé à presque 41 points,alors qu’au début des années 1990 il se maintenaità 39 16 . Dans l’actualité, le clivage existant entre lesriches et les pauvres est plus que manifeste, surtoutsi l’on tient compte des conditions de vie terriblesqui sont le lot des secteurs les plus démunis de lasociété. n9 Voir : Index Mundi, Morocco – Water pollution, .10 Voir : < http://www.socialwatch.org/fr/node/13112 >.11 Voir : .12 Voir le film vidéo : ¿Están los oasis marroquíes en vías deextinción?, sur YouTube, .13 Wikipedia, Al Wahda Dam (Morocco), .14 Voir : .15 Morocco Business News, Morocco to achieve MDGs by2015, HCP, (14 Avril 2010), .16 Trading Economics, GINI index in Morocco, (2011), .<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 135 Maroc


MEXIQUEUn chemin non durableLes progrès atteints par le pays en matière de droits humains et de développement durable sont en danger. LeGouvernement passe outre avec insistance sur certains accords et cadres légaux afin de poursuivre la miseen place de mégaprojets hydroélectriques et routiers qui non seulement ont un impact sur l’environnement etdéplacent des milliers d’individus de leur terre d’origine mais qui mettent aussi en évidence des politiques d’Étatà la fois irresponsables et totalement étrangères à une approche intégrale des droits humains. Le Mexique,malgré les protestations de la population et les organisations de la société civile semble s’être cantonné à unevoie de développement très éloignée de la notion de durabilité.DECA Equipo PuebloAreli Sandoval TeránInstituto Mexicano para el Desarrollo Comunitario – IMDEC(Institut Mexicain pour le Développement Communautaire)María GonzálezHIC-ALSilvia EmanuelliMembre : ESPACIO DESCIndice des Capacités de Base (ICB)ICB = 96100093Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleIndice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 64100L'autonomisation370Le pays a signé l’Agenda 21 de la Conférence desNations Unies sur l’Environnement et le développementqui s’est tenue à Rio de Janeiro en 1992 et quirevendiquait que les êtres humains soient au cœurdes préoccupations relatives au développement durable,qu’ils aient droit à une vie saine et productiveen harmonie avec la nature et que la protection del’environnement fasse partie intégrante du processusde développement.La solidité et l’équilibre entre les facteurs environnementaux,économiques et sociaux, les piliersdu développement durable d’un pays devraient s’exprimerau travers de la création et de la réalisation depolitiques, programmes et projets élaborés dans unecertaine logique et garantissant la vie et le bien-êtredes générations présentes et futures. Néanmoins,l’État mexicain soutient des projets qui violent le droità un environnement sain et autres droits humains.Cette politique contredit non seulement l’Agenda 21et les autres obligations légales basées sur le droitinternational mais elle va à l’encontre de la Constitutionet de la réglementation sur la protection del’environnement en vigueur dans le pays.Le cas du barrage El ZapotilloParmi les nombreux cas aujourd’hui dénoncés parles communautés et organisations civiles et socialesmexicaines, on remarque le Projet du barrage ElZapotillo dans la région des Altos de Jalisco, stimulépar le Gouvernement fédéral par le biais de laCommission Nationale de l’Eau (CONAGUA) et lesgouvernements des états de Jalisco et Guanajuatosous prétexte qu’il sera bénéfique au développementlocal et régional en approvisionnant en eau potablela ville de León, 10 communes des Altos de Jalisco etla ville de Guadalajara.Néanmoins, dans toute stratégie et projet en lienavec le droit au développement, la fin ne peut justifierles moyens. El Zapotillo impliquera la constructiond’une digue de gravité en béton destinée à stocker911 millions de mètres cubes d’eau ; soit un barrage100 10094 98Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialiséSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansoccupant un espace de 4.500 hectares, un aqueducde 145 kilomètres pour un coup total estiméà 8,01 milliards de pesos mexicains (soit environ680 millions d’USD), pour une durée de vie estiméeà seulement 25 ans. Par conséquent, le lit natureldu Verde sera détruit et trois localités qui datent duVIème siècle (Temacapulín, Acasico et Palmarejo)seront inondées. Près de 700 personnes vivent dansces localités dont une majorité de femmes et de personnesâgées qui sont déjà menacées d’expropriationet confrontées à la disparition de la culture et del’histoire de leurs communautés.Depuis 2005, date de l’annonce du projet debarrage, les communautés ont exprimé leur rejet etse sont organisées pour une revendication pacifiquede leurs droits. Tout au long de ces années de résistance,elles ont subi harcèlement et menaces du faitqu’elles s’opposaient au projet pour en demanderle retrait, qu’elles exigeaient la suspension de tousles chantiers et actes pouvant affecter de façon irréversibleleurs droits fondamentaux et parce qu’ellesdemandaient une expertise indépendante validéepar les communautés sur l’impact social, culturel etenvironnemental du projet, celui-ci ayant perturbésous différents aspects leur vie y compris en termesde santé psychosociale en raison de la pression exercéepar les autorités et de la menace de disparitionde leur habitat.Outre l’impact communautaire, le barrage ElZapotillo portera gravement atteinte à l’écosystèmedu Verde, il fera disparaître en les inondant, les zonesde culture et favorisera l’augmentation de la salinitéde la terre, il affectera des espaces où la faune et laflore présentent une richesse inestimable. Tout ceciaura une incidence directe sur la vie d’environ 5000personnes et une incidence indirecte sur celle d’un1005610098ÉducationActivité économiquenombre de personnes bien plus élevé, il aura égalementun impact sur la surexploitation et la pollutionde la Cuenca Lerma, Chapala, Santiago, Pacifico avecune montée en puissance des conflits sociaux etcombats pour l’eau vécus dans la région.Comme pour d’autres projets pharaoniquesd’infrastructure hydraulique au Mexique, les autoritésfédérales et nationales ont violé les droits à l’information,à la participation et à la consultation descommunautés concernées, elles ont omis de procéderà une évaluation des impacts sociaux qui impliquentdes violations au droit à un environnementsain, à un logement correct, à l’alimentation, à l’eau,à la santé, à la terre, au libre arbitre, au travail entreautres droits économiques, sociaux et culturels.Les habitants de Temacapulin ont gagnéplusieurs recours juridiques pour empêcher laconstruction de ce barrage mais les autorités n’ontpas respecté les décisions de justice. Face à la poursuitedu chantier, la communauté s’est organiséeen mars dernier pour le stopper et cette action a eupour effet qu’à partir du 1 er avril 2011, après plusde 6 ans de chantier, un processus de dialogues’est ouvert entre le Secrétariat du Gouvernementfédéral, la Commission nationale de l’eau et le ComitéSalvemos Temacapulin, Acasico y Palmarejo 1 .Néanmoins, deux mois plus tard, lors de la réuniondécisionnelle qui s’est tenue le 1 er juin dernier, les autoritésont confirmé qu’elles poursuivront le barrageavec une fin de travaux fixée en 2012 et ont discréditéles opposants sous prétexte qu’ils sont une minorité,lesquels ayant épuisé tous les recours nationauxpossibles vont se pourvoir devant la Commissioninteraméricaine des droits de l’homme.1 .Rapports nationaux 136 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


L’impact des MégabarragesDepuis plus d’une décennie, la Commission mondialedes barrages 2 a fait état des graves impactsenvironnementaux et sociaux provoqués par lesgrands barrages de par le monde. Concernant notrepays, un autre mégaprojet hydroélectrique, le barrage« La Parota », a fait l’objet d’une attention et derecommandations formulées à l’État mexicain d’unepart par le Comité des Droits économiques, sociauxet culturels des Nations Unies (ONU), et d’autre partpar trois rapporteurs spéciaux de l’ONU mandatésen matière de droit à l’habitat, droit à l’alimentationet des droits des peuples indigènes et enfin par leTribunal latino-américain de l’eau.La construction de La Parota est envisagée surle fleuve Papagayo dans l’État de Guerrero, parmises impacts sociaux et environnementaux les plussévères, il y aurait l’inondation de 17.000 hectaresde terres cultivables, routes, ponts et communautésentières, avec le déplacement consécutif de 25.000personnes sur le site même et 75.000 personnes enaval. Comme pour le Zapotillo, le manque d’informationset de consultations des communautés quiseraient touchées, des éventuels impacts sur l’environnement,sur le développement et les droits humainsde milliers de personnes sont des constantes.Malgré les recommandations internationalesémises et la longue et difficile lutte sociale et légaledéployée par les communautés opposées et les organisationsassociées, le Gouvernement de FelipeCalderón n’envisage pas de revoir ni de modifiersa politique prise sur un modèle de développementqui dégrade l’environnement et augmente l’injusticesociale de sorte que le projet « La Parota » n’a pasencore été annulé. En avril de cette année, les communautésopposantes ont obtenu le cinquième jugementen leur faveur par l’annulation d’une assembléeagricole de 2010 par laquelle le Gouvernement fédéralessayait d’obtenir la demande d’expropriationpour les terres sur lesquelles il souhaitait construirele barrage et imposer par-là même le projet de manièreillégale. Depuis le mois de mai, plusieurs organisationset réseaux ont lancé une campagne pourfaire pression sur le gouverneur de l’état mexicainde Guerrero, fraîchement élu, afin que ce derniers’engage aux côtés des communautés et pousse leGouvernement fédéral à annuler définitivement ceprojet hydroélectrique.Développement non durabledans la Ville de Mexico, DFLes politiques et projets qui défient le développementdurable au Mexique ne sont pas le seul fait dumilieu rural. La pression énorme que les villes exercentsur les ressources naturelles – en raison desfortes densités de population mais aussi des décisionsde politique publique qui sont prises au niveaulocal, pour lesquelles une approche intégrale desdroits humains fait défaut – s’avère de plus en plussévère et dangereuse pour les générations actuelleset futures. Une des situations les plus préoccupantespour les organisations civiles et sociales mexicainesest celle du modèle de développement stimulé parl’actuel Gouvernement du District fédéral (GDF) de laville de Mexico, qui est en totale contradiction sur denombreux points avec les droits humains.En 14 ans de gouvernement de gauche et departicipation citoyenne, les droits humains ont étémieux garantis et reconnus dans le District fédéral(DF), le seul district des 32 unités fédérales àdisposer d’un Diagnostic et d’un Programme desdroits humains (PDHDF), élaborés selon le principede la participation de 2007 à 2009 sous l’égide dubureau mexicain du Haut commissariat aux droitsde l’homme des Nations Unies, les deux chapitres visentle droit à un environnement sain, le droit à l’eau,le droit à la santé, au logement, entre autres choses 3 .C’est le seul organisme qui dispose depuis 2010d’un Système de suivi et d’évaluation à caractère intersectorieldans lequel divers secteurs, y comprisla société civile, se sont organisés pour surveillerl’exécution du PDHDF. C’est aussi le seul districtplacé sous une loi du PDHDF – votée et promulguéerespectivement en février et mai 2011 – ce qui obligeles organismes publics de la ville à déterminer lespolitiques publiques sous une approche des droitshumains. Il se démarque également par l’élaborationparticipative de la Charte de la Ville de Mexico pour leDroit à la ville – à l’initiative des associations populairesurbaines – cette charte comprend la projectiond’une ville durable, habitable, saine ainsi qu’une séried’engagements qui ont été souscrits en juillet 2010par les pouvoirs politiques, exécutifs, législatifs etjudiciaires au niveau local 4 .Lors du Sommet mondial des Dirigeants locauxet régionaux qui s’est tenu l’année dernière,le Responsable du GDF, Marcelo Ebrard, a présentéaux maires des autres pays ses programmes enmatière de sécurité, protection civile, mobilité nonmotorisée, citoyenneté et environnement maisaussi ses projets immobiliers et de développementurbain bâtis ou en voie de construction commedes éléments de l’avancement sur les sept axes del’agenda environnemental : sol préservé, habitabilitéet espace public, eau, mobilité, qualité de l’air,gestion des déchets et changement climatique…un agenda de travail qui reflètera que la priorité accordéeà l’environnement exigera la mise en placede réformes visant à retrouver de la durabilité dansle développement de la ville 5 .Néanmoins, dans cette ville d’avant-garde, lescontradictions sont exacerbées. Au cri de : « Marcelo,écoute, la ville n’est pas à vendre » 6 , ce sontprès de 3.500 personnes qui ont défilé en février2011 pour s’opposer aux différents mégaprojets quiimpliquent, entre autres choses, l’abattage d’arbreset la destruction d’espaces verts ce qui serait définitivementpréjudiciable pour le poumon de la ville, ladestruction du sol ayant une forte valeur écologiqueen raison de la construction dans des zones préservéesmais encore un fort impact sur les zones derécupération des aquifères.Un de ces chantiers est le réseau routier deponts, tunnels et échangeurs au sud-ouest de laville de Mexico (Supervia oeste). En janvier, la Commissiondes Droits de l’homme du District fédéral(CDHDF) a publié un rapport qui dénonçait les violationsdes droits humains lors de la construction del’ouvrage, avec parmi elles des violations aux droitsà la protection juridique, à l’information et à la participationcitoyenne et, concernant ces violations,l’impact sur les droits à un environnement sain, àl’eau et à un logement adapté pour les habitants deces délégations.L’Ombudsman de la capitale a conseillé au chefdu gouvernement d’ordonner l’arrêt de la constructionde l’Autoroute Poniente jusqu’à ce qu’uneenquête publique ait été réalisée pour garantir uneparticipation du plus grand nombre, qui prendrait encompte les préoccupations, les opinions et les propositionsdes personnes concernées par ce chantier.Par ailleurs, cette recommandation évoque le besoinpour le Gouvernement d’évaluer certaines alternativesde déplacement durables dans le sud-ouest dela ville et qu’il modifie le Règlement d’Impact environnementalet des risques pour qu’il soit cohérentavec la loi sur l’Environnement du District fédéralconcernant l’obligation d’effectuer une enquête publiquepour l’évaluation de l’impact sur l’environnement7 . Les habitants et associations civiles vont plusloin encore et exigent l’annulation du chantier.Les associations civiles et sociales demandentau GDF de faire preuve d’une congruence absoluevis-à-vis des engagements pris dans le PDHDF, saloi respective et la Charte de la ville de Mexico pour leDroit à la ville ainsi que l’annulation de toute mesurelégislative ou de politique publique régressive enmatière de droits humains, en effet en imposant cetype de projets, les autorités de la ville exposent nonseulement la population à un risque environnementalet social élevé mais ils démantèlent également lesavancées démocratiques qui avaient été accomplieset ils affaiblissent les institutions d’échange, de dialogue,de débat et de proposition.Pour conclure, ce type de mégaprojets de développementencouragés par les autorités fédérales etlocales partout à travers le territoire, révèlent des politiquesd’État irresponsables et non fondées sur uneapproche globale des droits humains qui conduisentle Mexique sur un chemin dangereux, celui du développementnon durable. n2 Établie par la Banque mondiale et l’Union mondiale pour lanature en 1998 face à l’opposition grandissante aux grandsbarrages. Plus d’informations sur .3 Voir : .4 Voir : .5 Voir : .6 Voir : ..7 Voir : .<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 137 Mexique


MOZAMBIQUEUne administration irresponsableLe Gouvernement a démontré non seulement son incapacité à lutter contre la pauvreté et les inégalités sociales,mais aussi son incapacité à présenter un plan convaincant pour améliorer la vie des citoyens. Les bénéfices dela croissance économique n’ont pas touché les personnes le plus dans le besoin alors que les pauvres le sontchaque fois davantage. Il est clair que le modèle appliqué n’est pas durable et le Gouvernement n’est pas préparéà gérer les ressources naturelles ni leur exploitation ni leur concession en faveur de la citoyenneté. Malgrécertains progrès dans le domaine de la corruption, celle-ci reste l’un des problèmes majeurs s’interposant entrele Mozambique et le bien-être.Liga de Derechos HumanosCentro de Integridad PúblicaCentro de Apoyo a la Justicia InformalCustódio Duma, CoordinateurLe Mozambique possède une richesse non négligeableen ressources naturelles telles que le gaz naturel, lecharbon végétal, l’aluminium et l’argent ainsi qu’un littoralde plus de 2 500 kilomètres de long, des rivières etdes forêts, du bois et un potentiel touristique énorme 1 .Toutefois, l’éventuelle contribution de ces ressources àla réduction de la pauvreté dans le pays reste éloignée,principalement parce que la politique nationale qui inciteles méga projets est irresponsable et non durable.De fait, certaines études suggèrent que le Gouvernementn’est pas prêt à gérer les ressources naturelles,ni leur concession ni leur exploitation au bénéfice del’économie nationale et des citoyens en général, unesituation qui contribue à ruiner les opportunités de promotiondu développement du pays 2 . Depuis fin 2010,des économistes, des représentants de la société civile etmême la Commission des évêques catholiques du Mozambiquecherchent à persuader le Gouvernement qu’ilrevoie les exonérations fiscales accordées aux mégaprojetsalors que le fardeau fiscal des citoyens augmente.Le rapport du Mécanisme africain d’examen parles pairs (MAEP) 3 , publié en novembre 2009, affirmeque le service public mozambicain est politisé et qu’ilest difficile de distinguer l’État du Frelimo, le partiau pouvoir depuis 1975, année de l’indépendancenationale. Outre que cette situation constitue uneforme discriminatoire de gérer le secteur public, lacollusion entre le parti et l’État sape la planificationde politiques publiques et tend à politiser tous lesprocessus de développement socio-économique.De plus, avec ses discours vides et ses mesuresfrustrées, le Gouvernement a démontré non seulementson incapacité à lutter contre la pauvreté et les inégalitéssociales mais aussi son incapacité à présenter un planconvaincant pour améliorer la vie des citoyens.1 Maps of the World, Mozambique Natural Resources,.2 C. N. Castel-Branco, “O que é que a ITIE faz bem e o que éque não faz? Uma proposta de agenda de trabalho sobre osrecursos naturais em Moçambique,” (25 février 2011), .3 African Peer Review Mechanism, “Country Review Report:Mozambique”, APRM Country Review Report No. 11, (juin2009), .Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 6855100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansUne fausse croissanceRécemment, le Fonds monétaire international (FMI)a classé la croissance économique du Mozambiquecomme étant l’une des plus élevées de la région 4 et aégalement prédit une croissance réelle du PIB de 7,25% en 2011 et de 8 % à moyen terme. Cependant, cesbénéfices économiques n’aident pas les pauvres, qui,eux, continuent à s’appauvrir de plus en plus. De fait,le salaire minimal au Mozambique est de 2700 Metical(90 USD), qui ne répond seulement qu’à 35 % des besoinsfondamentaux des familles, selon les syndicatset les organisations de travailleurs 5 . Une étude réaliséepar PriceWaterhouseCoopers, a également montréque le salaire des mozambicains n’a augmenté cetteannée que de 9,8 % alors que l’inflation s’est située à15 %, signifiant ainsi une perte de 5,2 %.C’est pour cette raison que plusieurs économistesne manquent pas de croire que la croissanceéconomique du pays est fausse étant donné queplus de 50 % du budget des administrations publiquesest financé par les pays donateurs et que 80% de l’investissement national provient de sourcesexternes 6 . Aucun des facteurs liés à l’économie,comme la balance des paiements, le budget de l’État,4 MacauHub, IMF says Mozambican economy post growthof 6.5 pct in 2010, (11 avril 2011), .5 Empresas e Negócios, Salários mínimos são marcada pobreza em Moçambique, (26 mars 2011),.6 Canalmoz, Estabilidade económica de Moçambique éfalsa, intervient avec João Mosca, (12 avril 2011), .51100 10086Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 58Éducation1000L'autonomisation59100 68 100Activité économiquecertains investissements et le contrôle de l’inflation,ne serait déterminé par la richesse nationale ou lefonctionnement et l’équilibre interne, le marchéintérieur ou la production nationale, mais par lesressources externes.Bien que la forte inflation frappant le pays soitune conséquence directe de la hausse internationaledes prix des produits alimentaires et du pétrole brut,il faut avouer que le Mozambique n’a pas la capacitéd’exploiter son potentiel et de produire de la nourritureet autres intrants pouvant même être exportéset contribuer ainsi à réduire la dépendance externe.Mais la situation économique difficile du pays estprincipalement liée à des modèles de croissance nondurables ou irréalistes.La lutte contre la corruptionMalgré le fait que Transparency International ait informéque le pays avait connu une amélioration dans lalutte contre la corruption, passant de la 130 e positionen 2009 à la 116 e en 2010 sur un total de 178 pays 7 ,ce problème demeure un des obstacles majeurs pourle développement du pays, étant donné que plusieursfacteurs combinés se sont accentués, tels que la faiblessedes procédures de gestion, le manque de transparencedans l’administration publique, l’impunité desinfracteurs et les lois désuètes en la matière.Néanmoins, l’amélioration du score de l’incidencede la corruption est due aux procès de deuxcas importants de détournement de fonds publicspour une valeur avoisinant 10 millions d’USD impliquantdeux anciens ministres, l’un de l’Intérieur7 Transparency International, Corruption Perceptions Index2010 Results, .48Rapports nationaux 138 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


et l’autre des Transports et des communications,ainsi qu’un président du Conseil de l’administrationaéroportuaire. Même ainsi, la décision finale desaffaires judiciaires 8 a simplement démontré le degréde manipulation du système judiciaire par le pouvoirpolitique.La question de la transparence a constitué l’undes principaux points du programme national 2010-2011, dans le domaine de l’industrie extractive. Pendantle premier trimestre 2011, le Mozambique aaccompli la première étape pour devenir un paysconforme à l’Initiative pour la Transparence dansl’industrie extractive (ITIE) au niveau international,en publiant le premier rapport annuel comprenantles déclarations des paiements effectués par les entreprisesdu secteur des industries extractives etles montants respectifs reçus par l’État 9 . D’aprèsl’analyse des organisations de la société civile participantau processus de l’ITIE, elles ont été unanimesà considérer ridicule (moins de 1 % du budget) lacontribution finale des six entreprises sélectionnéespour faire partie du premier rapport concernantl’exercice 2008 10 .Selon les analyses de certains experts, ce rapportmontre comment l’État mozambicain perd surdeux tableaux lorsqu’il octroie l’exploitation des ressourcesnaturelles : en premier lieu en octroyant desincitations fiscales superflues aux multinationales etensuite, en sous-évaluant les richesses 11 .La pauvreté et le mécontentementMalgré l’optimisme manifesté par le discours politiqueofficiel, des études récentes montrent quele coût de la vie est de plus en plus élevé au Mozambique.En l’absence de mécanismes de dialoguecontinu et constructif, il est possible que les émeuteset les soulèvements populaires de 2008 et 2010 serépètent pour exprimer le mécontentement.Les « émeutes » du 5 février 2008 et du 1er et2 septembre 2010 ont paralysé la capitale, Maputo,ainsi que la ville de Matola située à seulement 20kilomètres de celle-ci. Ces émeutes ont égalementaffecté les provinces de Gaza, Manica et Nampula,laissant un bilan d’une vingtaine de morts et de 200blessés. Le Gouvernement n’a réussi à mettre fin auxtroubles qu’en promettant, à deux reprises, des subventionsaux carburants, au transport semi-collectifde passagers - connu comme « plaque 100 » - et,récemment, à certains aliments, avec la promessed’un « panier familial ».8 The Boston Globe, “Sentence Reduced in MozambicanCorruption Case,” 24 mai 2011. Disponible sur : .9 Iniciative de Transparência na Indústria Extractiva, PrimeiroRelatório da Iniciativa de Transparência na IndústriaExtractiva em Moçambique sobre a Reconciliação dePagamentos e Recebimentos na Indústria Extractiva, .10 T. Selemane and D. Nombora, Implementação da ITIE,gestão de recursos naturais e urgência da renegociação epublicação dos contratos com mega projectos: O caso deMoçambique, (Maputo: Centro de Integridade Pública, mai2011), .11 Castel-Branco, op. cit.Depuis 2007, le président a déclaré publiquementà plusieurs reprises que le problème de lapauvreté dans le pays était d’origine psychologiqueet que la population devait être plus optimiste etcommencer à combattre sa « pauvreté mentale 12 ».Pour cette raison, la stratégie précédente pour luttercontre la pauvreté absolue, appelée PARPA (Pland’Action pour la Réduction de la Pauvreté Absolue),a été rebaptisé depuis mai 2011, le PARP, car il estentendu que la pauvreté des Mozambicains n’estplus absolue.Cependant, le Troisième rapport d’évaluation dela pauvreté n’est pas arrivé aux mêmes conclusions: selon celui-ci, la pauvreté absolue touche environ52 % des Mozambicains 13 , avec une plus grandeincidence dans la zone centrale du pays. C’est pourcette raison que le Mozambique ne sera pas en mesured’atteindre un des Objectifs du Millénaire pourle développement qui consiste à réduire son tauxde pauvreté qui était de 80 % en 1990, à 40 % en2015. De plus, le taux de chômage atteint 21 % de lapopulation active 14 .En outre, des évaluations indépendantes réaliséesaprès cinq ans de PARPA II, achevé en 2009, ontdémontré que moins de 50 % des objectifs ont été réalisés.Le retard dans le développement du nouveau pland’action a compromis la prochaine phase du PARP,également d’une période de cinq ans, qui aurait dû commenceren 2010. Le Gouvernement vient de conclure etd’approuver le PARP en mai de cette année, alors quedurant l’exercice 2010-2011, il s’était basé sur des plansgénériques et des mesures improvisées.L’indice de développement humain (qui estdéterminé en fonction de l’espérance de vie à lanaissance, l’accès au savoir et le niveau de vie décent)a situé le Mozambique en 2010 au 165 ème rangmondial, avec un indicateur de 0,284, tandis quel’Indice des capacités de base de <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> de2010 (déterminé en fonction de la mortalité infantile,du pourcentage d’accouchements assistés pardu personnel qualifié et du pourcentage d’enfantsatteignant la cinquième année de l’enseignementprimaire) donne au Mozambique une valeur de 71,ce qui le place dans la catégorie des pays ayant unniveau de développement faible 15 .Des indicateurs de santé faiblesLa mortalité infantile dans le pays est de 79 pour1000 naissances vivantes 16 . L’accès aux services desanté est limité et 50 % de la population vit à plus de12 Government of Mozambique, A luta continua pelaindependência completa, (25 juin 2010), .13 Ministério da Planificação e Desenvolvimento, Pobreza eBem-Estar em Moçambique: Terceria Avaliação National,(octobre 2010), .14 Index Mundi, Economia: Taxa de desemprego, .15 UNDP, Human Development Report 2010; <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>, The2010 Basic Capabilities Index: Slowing Down, (Montevideo,2010).16 Index Mundi, População: Taxa de mortalidade infantil, .20 km du centre sanitaire le plus proche ce qui signifie,dans la pratique, qu’il n’a pas d’accès à ces services.Par ailleurs, le pays est affecté négativementpar une série d’épidémies qui sont, pour le moment,loin d’être combattues :• Le VIH/SIDA (16 % de la population est séropositive).• Le paludisme représente environ 30 % de tousles décès. La prévalence de cette maladie chez lesenfants de deux à neuf ans varie entre 40 % et 80 %,tandis que 90 % des enfants de moins de cinq anssont infectés par les parasites du paludisme danscertaines zones. Le paludisme est également unproblème majeur affectant les femmes enceintesdans les zones rurales. Environ 20 % des femmesenceintes sont infectées par le parasite, les mèresprimipares sont les plus touchées, avec un taux deprévalence de 31 % 17 .• La tuberculose est une cause majeure de morbiditéet de mortalité, elle touche les groupesles plus vulnérables, particulièrement les jeunesadultes, les enfants et les personnes vivant avecle VIH/SIDA. Depuis 1993, le Mozambique estsur la liste des 22 pays considérés comme les« pays gravement affectés », avec une morbiditétrès élevée et se trouve au 18 ème rang dansle classement de l’Organisation mondiale de laSanté (OMS).• La lèpre. Le Mozambique est le pays qui a la plusforte prévalence de cette maladie en Afrique etl’un des six pays les plus touchés dans le monde,avec un taux de prévalence de 1,4 pour 10 000habitants 18 .• Le choléra. L’année dernière, selon le ministèrede la Santé, le choléra a causé 36 décès sur 1968cas signalés 19 .ConclusionTant que le Gouvernement ne changera pas sa manièrede considérer la pauvreté, il lui sera impossibled’aborder le problème de manière adéquate.De même, s’il continue de croire en la validité desmesures de développement du pays à travers des indicateurstels que la croissance du PIB, il ne sera pasen mesure de répondre correctement aux problèmesurgents qui affligent les Mozambicains et le modèlede développement qui sera implémenté ne respecterapas les principes de durabilité. La croissanceéconomique à elle seule, comme on le sait, n’est passuffisante. Ainsi, des projets tels que le PARPA et sondérivé, le PARP, n’ont pas apporté d’amélioration à lasituation du peuple et pour cela, le mécontentementcontinue de croître. n17 Ministério da Saúde, Programa Nacional de Controlo deMalária, .18 Ministério da Saúde, Lepra, .19 Ministério da Saúde, Cólera, .<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 139 Mozambique


NÉPALUn développement non durable : causes et conséquencesL’instabilité politique, les violations des droits humains et la corruption constituent certains des défis majeursdu pays. Le Gouvernement doit aussi composer avec la perte de la biodiversité et la mauvaise gestion desressources agricoles, au-delà de la protection des droits de l’homme et de l’éradication de la corruption politiqueà tous les niveaux. La discrimination fondée sur la classe sociale, la caste, l’ethnie, la religion et le genre fomentela création et la persistance de la pauvreté, la faim, la destruction ou la dégradation de l’environnement et lesconflits. Si ces problèmes ne sont pas abordés efficacement, le développement durable n’aura été qu’unechimère.Rural Reconstruction Nepal (RRN)Sarba Raj KhadkaSuite à dix ans de conflit armés (1996-2006) et l’éliminationde la monarchie instaurée depuis 240 ans, unerépublique démocratique fédérale du Népal est établieen 2008. Actuellement, des efforts sont faits pour institutionnaliserune forme républicaine de Gouvernementà travers une restructuration de l’État, une nouvelleconstitution et l’achèvement du processus de paix.Au fil du temps, le Gouvernement a introduit unesérie de politiques, plans et cadres juridiques pourla conservation de la biodiversité, la protection del’environnement et le développement durable vouésà bénéficier et à autonomiser les populations locales.Les principaux instruments sont la Stratégie nationalede conservation de 1988, le Plan directeur pourle secteur forestier de 1988, le Plan d’action politiqueet environnemental de 1993 et 1996, le Plan agricolede 1995, la loi sur la Protection environnementale de1996, la Stratégie népalaise pour la biodiversité de2002 et le Programme de développement durable de2003 1 . Toutefois, leur application a été limitée.En outre, le Népal a ratifié plusieurs instrumentset accords internationaux en matière de droits humains,y compris la Convention-cadre des Nationsunies sur le changement climatique, la Conventionsur la diversité biologique, l’Agenda 21 et la Déclarationdu Millénaire des Nations Unies et a préparé unProgramme national d’action pour faire face aux problèmesdu changement climatique. La mise en œuvrede ces accords internationaux a également été limitée.Les défis pour le développement durableIl existe plusieurs obstacles à la réalisation du développementdurable au Népal. Le plus grave est lemanque de stabilité politique, surtout en raison deschangements du système politique dans les années90 puis en 2008 et de la situation actuelle de transitionpolitique. Aussi bien la rédaction de la nouvelleConstitution que la finalisation du processus de paixavancent très lentement et le processus de transformationsocio-économique durable est au pointmort. Dans le passé, presque tous les changementspolitiques et les efforts de développements socio-1 S.R. Khadka, Biodiversity Conservation in Nepal: Policiesand Ground Realities, (Saarbrücken, Allemagne: LambartAcademic Publishing, 2011).Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 6810019Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 anséconomiques ont été dominés par des élites qui ontfavorisé leurs propres intérêts au lieu d’aider les plusdémunis. La discrimination fondée sur la classe sociale,la caste, l’ethnie, la religion et le genre a apportéla pauvreté, la faim, la destruction ou la dégradationde l’environnement et les conflits. À défaut de réussirà remédier aux violations des droits humains et àl’exclusion socioéconomique de manière efficaceet dans le cadre d’un calendrier précis et réaliste, ledéveloppement durable ne sera pas possible.Le processus de mondialisation et d’adhésion àun modèle néolibéral de développement économiqueconstitue un barrage permanent à un développementcentré sur les personnes, respectueux de l’environnementet économiquement viable. Les conditionscommerciales déloyales -parmi lesquelles, l’impositionde barrières douanières et d’autres sortes,de mesures sanitaires et phytosanitaires sans tenircompte des accords commerciaux préférentielssontégalement contre-productives pour le développementdurable dans un pays comme le Népal.Ainsi, le pays se dirige lentement vers des approchesde développement centrées sur le profit et dirigéespar le marché y compris le modèle controversé departenariat entre les secteurs public et privé.Le développement durable et les questionsenvironnementalesBien que la contribution du Népal aux émissionsmondiales de gaz à effet de serre soient minimes(1,977 kg par habitant par rapport à la moyennemondiale de 3,9 tonnes par habitant) 2 , il est l’un des2 Le Gouvernement du Népal et l’équipe des Nations Uniesau Népal, “Nepal Millennium Development Goals, ProgressReport”, (Katmandou, 2010).46100 10095Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 47Éducation100210L'autonomisation6556100 100Activité économiquepays qui subi le plus les effets désastreux du réchauffementclimatique et du changement climatique.Les précipitations irrégulières, insuffisantes ouexcessives dues au changement climatique ont eudes effets négatifs sur les moyens de subsistancedes personnes. Les systèmes fluviaux originairesde la chaîne himalayenne fournissent de l’eau deconsommation et pour l’assainissement et l’irrigationdans tout le sous-continent sud-asiatique. Laneige est en train de fondre plus rapidement et ilest prévu que cela entraîne des pénuries d’eau danstoute la région. Il existe également le danger imminentdu débordement de lacs glaciaires. Un autrerisque du changement climatique est la désertificationprogressive des zones agricoles. Les politiqueset programmes destinés à répondre aux impacts duchangement climatique offrent une aide très limitéeet leur mise en œuvre est inefficace. Ils traitent lessymptômes plutôt que les causes profondes.Le Népal est l’un des pays au monde quiconsomment le moins d’énergie, donc sa contributionà la dégradation de l’environnement à travers laconsommation d’énergie est également minime. En2007, le niveau de consommation d’énergie a été de7,16 tonnes d’équivalent en pétrole par an et étaitlargement basé sur des sources d’énergie traditionnellescomme le bois (72 %), les déchets agricoles (5%) et le fumier (7 % ) 3 . Les 16 % restants ont été couvertspar des sources commerciales (charbon 2,4 %,pétrole 9,9 % et électricité 2,7 %) et les énergies renouvelablesont été inférieures à 1 % 4 . Les personnes3 Ministerio de Finanzas, Encuesta de Seguimiento de laDeclaración de París, Informe País: Nepal, (Katmandú,2011).4 Ibid.Rapports nationaux 140 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


pauvres et vulnérables vivant principalement dansles zones urbaines ont un accès limité, voir nul, àl’énergie alternative car les technologies nécessairespour la produire demandent beaucoup de capital.Le déclin de la biodiversité et la croissantedestruction et dégradation génétique constituentaussi des menaces pour le développement durable.Consciente de l’importance de la protection de l’environnement,l’Organisation des Nations Unies aconvoqué en 1992 la deuxième Conférence sur l’Environnementet le développement, qui a égalementadopté la Convention sur la Diversité biologique(CDB). Selon l’article 1, les objectifs de la CDB sontles suivants : la conservation de la diversité biologique,l’utilisation durable de ses composantes et lepartage juste et équitable des avantages découlantde l’utilisation des ressources génétiques. La CDBest entrée en vigueur au Népal le 21 février 1994.En tant qu’État-partie de la Convention, le paysa élaboré des politiques et des plans pour la conservationde la biodiversité, y compris la Stratégie népalaisepour la biodiversité en 2002. L’objectif de cettestratégie est de développer un cadre stratégiquepour les programmes de conservation de la biodiversité,le maintien des processus et des systèmesécologiques et le partage équitable des bénéficesgénérés. Le pays est le foyer de 118 écosystèmes,75 types de végétation et 35 types de forêts avec uneprésence significative des espèces et de la diversitégénétique 5 . Cependant, il existe des menaces surla biodiversité au niveau des écosystèmes, des espèceset des ressources génétiques 6 .La perte des écosystèmes est due à la transformationde l’environnement naturel (forêts, prairies etmilieux humides) pour d’autres usages humains. Parexemple, on rapporte que l’habitat forestier se réduità un rythme annuel de 1,7 %, et si la tendance sepoursuit, il est probable que l’écosystème forestierse dégrade à un rythme accéléré 7 . Les ressourcesgénétiques sont en voie d’épuisement à cause de ladestruction des habitats naturels, du surpâturage, dela fragmentation des terres, de la commercialisationde l’agriculture, l’augmentation des variétés à haut5 Gouvernement de Sa Majesté du Népal, ministère des Bois etde la conservation des sols, Deuxième rapport national sur lamise en œuvre de la Convention sur la diversité biologique auNépal, (Katmandou: 2002).6 T.M. Maskey, “State of Biodiversity in Nepal”, in Pie Shengji(ed.), Banking on Biodiversity: Report of the RegionalConsultation on Biodiversity Assessment in the Hindu KushHimalayas, (Katmandou: International Centre for IntegratedMountain Development (ICIMOD), 1996).7 Programme des NationsUnies pour l’environnement(PNUE, Nepal: State of the Environment, ministère de laPopulation et de l’environnement de Sa Majesté du Népal,South Asia Cooperative Environment Programme, ICIMOD,Organisation norvégienne de Coopération au développementet PNUE, (Bangkok : 2001).rendement et de l’utilisation sans discernement depesticides 8 . La pollution, les incendies, l’introductiond’espèces exotiques, la chasse et le commerceillégaux, outre la forte incidence de la pauvreté dansles populations qui continuent à croître, constituentégalement des causes importantes de l’appauvrissementde la biodiversité. D’autres problèmes tels quel’érosion des sols et les glissements de terrain, quisont plus prononcés dans les zones écologiques decollines et de haute montagne pendant la moussond’été sont dues à l’absence de sensibilisation de lapopulation et à l’utilisation inappropriée des terrespar les agriculteurs.L’agriculture et la mauvaise gestionL’utilisation sans scrupules et fragmentaire de latechnologie de la révolution verte 9 , constitue un desautres problèmes du pays dont l’économie reposesur l’agriculture: plus de 65 % de la population économiquementactive au Népal travaille à la culturede la terre, pour autant que les parcelles soientpetites. Bien que l’utilisation de la technologie dela révolution verte ait amélioré la situation d’insécuritéalimentaire et la pauvreté dans les régionsdu pays, même temporairement, elle a détruit lessystèmes traditionnels autochtones. La plupart desrecherches ont été axées sur les solutions à courtterme et non pas sur les solutions durables et stablesqui constituaient la base des connaissances et descompétences autochtones. En outre, l’agricultured’aujourd’hui est presque entièrement basée surles intrants importés qui doivent être remplacésfréquemment. Les mécanismes de régulation sontd’une telle inefficacité que les entreprises multinationalesfaisant le commerce des intrants tels que lessemences, ont un accès direct aux paysans du Népal.Les Népalais sont très dépendants des ressourcesnaturelles pour leur subsistance et les niveauxextrêmes de pauvreté ont conduit les gens àutiliser des ressources marginales de manière nondurable. Par exemple, ils n’ont peut être pas d’autrechoix que de cultiver sur des côteaux instables oud’envahir avec leurs plantations des zones qui étaientdestinées à d’autres usages. Ils ont, en outre, desniveaux d’investissements trop faibles pour être enmesure d’augmenter la production.8 Khadka, op. cit.9 Les initiatives technologiques et de recherche de la fin desannées 1960, visaient à accroître la production agricole parle développement de variétés de céréales à haut rendement,l’expansion des infrastructures d’irrigation, la modernisationdes techniques de gestion et la distribution de semenceshybrides, d’engrais de synthèse et de pesticides auxagriculteurs.La corruption et le manqued’éducation adéquateUne culture de l’impunité et la corruption croissantereprésentent également des défis pour le développementdurable du Népal. Selon le rapport 2010 deTransparency International, le pays est à la 148 èmeplace avec un score de 2,2 dans l’Index des perceptionsde la corruption. Il est évident que les autoritéssont plus intéressées par leur fortune personnelleque par la qualité et la durabilité de leurs actions enfaveur du développement.L’engagement politique de plus en plus faibledans la cause nationale et les systèmes locaux représenteencore un autre défi. L’aide au développementest canalisée sans tenir compte des besoins et desintérêts spécifiques des individus et par conséquent,des mécanismes qui seraient les plus appropriées.Le manque d’éducation et de sensibilisation adéquatemenacent aussi le développement durable,tandis que le système éducatif favorise le consumérismeet les modes de vie insoutenables qui privilégientles marchés et le profit.Conclusion et recommandationsLes graves violations des droits humains, l’exclusionsocio-économique, le manque de justice socialeet le manque de gestion efficace des ressourcesnaturelles sont parmi les principaux obstacles audéveloppement durable au Népal. Par conséquent,nous recommandons les mesures suivantes pourremédier à cette situation et faire de la durabilité uneréalité et pas seulement un rêve:• Promouvoir la démocratie, la paix et la justice.• Protéger, respecter et garantir les droits humainsdes individus.• S'attaquer aux causes profondes de la pauvretéet des conflits.• Promouvoir la participation significative de lapopulation dans tous les aspects de la gouvernancede l'État.• Stopper la corruption politique à tous les niveaux.• Favoriser une culture où l’on sache faire face auxbesoins et non pas une culture de l'avidité.• Mettre en œuvre des mesures efficaces pour luttercontre les effets du changement climatiqueet réduire les émissions de gaz à effet de serre.• Assurer un investissement adéquat en matière derecherche, de développement et de sensibilisationpour faire avancer le développement durableen fonction des besoins et des priorités du pays.• Impliquer les populations locales dans la planification,la mise en œuvre et le suivi de la gestiondes ressources naturelles.• Investir dans l'utilisation de sources d'énergiealternatives. n<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 141 Népal


nicaraguaFiscaliser pour un avenir meilleurLe pays ne pourra pas accéder à un modèle de développement durable s’il ne remédie d’abord à l’appauvrissementactuel des ressources. Les sols sont surexploités, les ressources halieutiques marines sont pratiquementépuisées, la déforestation ne fait que croître à cause de l’abattage immodéré et des pratiques agricoles nondurables, et la dépendance envers la culture du café est nuisible, entre autres, aux ressources en eau. Or lescoffres de l’État sont vides. Une vaste réforme du système fiscal s’impose qui permette de percevoir des fonds etde les reverser de façon plus juste et efficace et d’investir dans le domaine de l’éducation et dans des méthodesde production moins agressives pour l’environnement.Coordinadora CivilDr. Adolfo José Acevedo VoglLe pays requiert un volume de ressources bien plusimportant pour mettre en œuvre des politiques publiquesqui encouragent le développement durable ;pour cela une modification du système fiscal s’avèreindispensable. Et elle est également nécessaire pourcontrecarrer la tendance à la baisse de la coopérationexterne, en termes absolus et en pourcentage du PIB.Pour que l’État puisse compter sur le financementnécessaire au maintien des niveaux correctsd’investissement en capital humain, en infrastructureélémentaire et en protection sociale, et pourobtenir les effets attendus en matière d’équité, il estfondamental que la structure de financement de cettedépense repose avec une force relative plus importantesur les couches sociales ayant des revenusplus importants, au lieu de le faire sur les couchesmoyennes ou basses (voir dans l’encadré la propositionde la Coordination civile).En même temps, ce besoin de financement répondà un besoin élémentaire de l’économie qui estcelui de la justice intergénérationnelle, définie en1974 par James Tobin en ces termes : « Les administrateursdes institutions dotées de fonds sontles gardiens de l’avenir contre les réclamations duprésent. Ils ont pour tâche en administrant leurs fondationsde préserver l’équité entre les générations » 1 .Défis environnementauxL’absence d’un modèle de développement durablese fait particulièrement sentir lorsque l’on considèrel’insuffisante gestion des ressources naturelleseffectuée par les gouvernements successifs. Les réservesd’eau, par exemple, ont diminué à cause de lapollution et de la déforestation, enchérissant ainsi lecoût des investissements destinés à assurer l’accèsde la population à cette ressource, et réduisant dumême coup le volume d’eau destinée à l’agricultureet à la production d’énergie hydroélectrique 2 .1 James Tobin, “What Is Permanent Endowment Income?”American Economic Review, (Mai 1974), p. 427.2 Clima y ambiente de Nicaragua, Un cambio de actitud en eldía de la Tierra (22 avril 2009), .Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 84Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialiséIndice d'Equité de Genre (IEG)100Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleIEG = 7410060100 74100Quant au déboisement, le pays perd chaqueannée 75 mille ha de forêt en raison de l’abattage illégal,des pratiques non durables du secteur agricoleet des incendies souvent dus aux brûlis agricoles.L’utilisation du bois comme combustible a aggravé lasituation : actuellement, 76 % de l’énergie destinée àla cuisine provient du bois 3 . Qui plus est, le dommageinfligé aux forêts a contribué à l’érosion des sols, cequi met l’agriculture en péril.En juin 2011 le Gouvernement a montré sa préoccupationface au problème et il a annoncé que letaux de déforestation avait pu être réduit de 50 % 4 .Néanmoins, sur 12 millions d’hectares de forêt, plusde 8 millions restent dégradées.La surexploitation des ressources halieutiquesmarines met en relief le modèle non durable de croissanceéconomique mis en œuvre dans le pays. Lapêche à la langouste, par exemple, a été pratiquéejusque là pour plus du double de la capacité régénérativede l’espèce. Le Gouvernement n’a pas su nonplus mettre en œuvre les mesures appropriées pouréviter la pêche sauvage 5 .L’industrie de la crevette, qui plus est, a détérioréles écosystèmes de la mangrove et les zoneshumides de la côte Pacifique, et elle a pollué égalementles étendues d’eau par le déversement desdéchets et des substances chimiques toxiques.De même, le manque de traitement des déchetssolides dans les villes a accentué le problème des3 Ibid.4 Diario Web Centroamérica, Nicaragua logró reducir ladeforestación en 50 por ciento, (7 juin 2011), .5 Ibid.0L'autonomisation1005810097 100Survivance jusqu’àl’âge de 5 ansÉducationActivité économique064décharges dans les zones où la population est plusdense, là où le manque de planification urbaine aaggravé la vulnérabilité des secteurs les plus pauvresde la population aux maladies et aux désastres environnementaux.Cette augmentation de la vulnérabilitéplace également le pays dans une situationdélicate face aux différents modèles de changementclimatique 6 .Mais le problème principal du pays en ce quiconcerne la détérioration environnementale c’estsa dépendance à l’égard de la culture du café. AuNicaragua, 26 % des établissements agricoles s’yconsacrent, occupant 15 % des terres cultivables,et 25 % de la surface réservée aux cultures exportables7 . D’après América Economía: « Le Centre dedémarches pour l’exportation du Nicaragua (Cetrex)a annoncé que le café avait produit 154 millionsd’USD pendant les cinq premiers mois de la récolte2010-2011 (octobre-février), ce qui représente environ85 millions d’USD de plus que pour la mêmepériode de la récolte 2009-2010 » 8 . Le problèmeréside dans le fait que la culture intensive du café estextrêmement agressive envers l’environnement, carelle entraîne la déforestation, la perte de la biodiversité,la pollution agrochimique, l’érosion du sol et6 Ibid.7 Nicabilingüe, “El Café Nicaragüense”, Luis Castrillo,.8 América Economía, “Cosecha de café en Nicaragua crece8,6% y reporta US$154 millones”, (22 mars 2011), .Rapports nationaux 142 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


La proposition de système fiscal de la Coordination civileLa proposition fiscale de la Coordination civile 1 repose sur trois principesfondamentaux:• Le principe de généralité des impôts. Pour pouvoir financer l’augmentationde la dépense d’investissement en capital humain, en infrastructurede base et en protection sociale il faudra dilater au maximumla base taxable du système. Cela veut dire qu’en principe tous ceuxqui résident dans le pays et qui sont économiquement capables d’enassumer le coût doivent contribuer au financement des services queprête l’État. De même, les non-résidents qui obtiennent des revenusdans le pays sont tenus de contribuer. Ce qui précède impliqueraitune profonde révision du système d’exemptions et d’exonérations,trop étendu et généreux, qui met hors d’atteinte du système fiscal dessecteurs entiers de l’économie, généralement les plus dynamiques etles plus rentables.• Le principe d’équité verticale. Les personnes ayant une capacitécontributive plus élevée doivent faire un apport relatif plus importantque les personnes de moindres recours. Cela obligerait à revoir letraitement préférentiel que reçoivent les revenus et les rendementsde capitaux concentrés surtout dans les couches de la population auxrevenus les plus élevés.• Le principe d’équité horizontale. Les personnes ayant une mêmecapacité économique doivent être traitées de la même façon par lesystème fiscal : on considère qu’il est injuste que deux personnesayant la même capacité contributive soient imposées différemment(une plus que l’autre, ou une moins que l’autre) ou que l’une soitimposée et pas l’autre.Pour matérialiser ces principes, on propose une profonde réforme desdeux piliers élémentaires du système fiscal, l’impôt sur le revenu et la taxesur la valeur ajoutée.1 Voir: .Dans le premier cas, la proposition suggère que le régime des impôtssur le revenu soit modifié par rapport au régime fiscal actuel fondé sur untraitement séparé et préférentiel des revenus passifs du capital (ce quiest terriblement discriminatoire vis-à-vis des revenus salariaux, qui sontles seuls à rester soumis au barème des taux marginaux progressifs)en faveur d’un système d’imposition de caractère global ; et qui passeégalement du critère juridictionnel territorial au principe juridictionnel durevenu mondial.Adopter un système d’imposition globale sur le revenu cela veutdire qu’en principe chaque contribuable devrait inclure ou ajouter dansson assiette fiscale toutes ses formes de revenu, quelles qu’en soient lasource. L’adoption d’un principe juridictionnel du revenu mondial signifieque les contribuables résidents doivent inclure dans leur assiette fiscaletoutes leurs formes de revenu, quelles aient été obtenues sur le territoireou à l’extérieur. Ceci permettra à l’imposition sur le revenu d’appliquerpleinement le principe de capacité contributive, ce qui non seulementdonnerait un rendement bien meilleur que celui qui est obtenu à traversle régime actuel et ferait augmenter la capacité de redistribution de cetimpôt, mais permettrait aussi d’obtenir une plus grande équité, aussi bienhorizontale que verticale.Dans le cas des revenus des non-résidents, le procédé suivrait latendance internationale qui veut que l’on se fonde sur le principe dubénéfice pour justifier l’imposition à la source des non-résidents et surle principe de capacité contributive pour la contribution des résidents.Il s’agit de répartir le pouvoir fiscal entre les deux principes, comme ilapparaît de façon sous-jacente dans le contexte des Accords destinés àéviter la double imposition internationale.Pour ce qui est de la modernisation de la conception de l’Impôt surle Revenu, on propose d’inclure des règles conformes à l’ouverture financièreet commerciale effectuée pendant les dix dernières années, telles quedes normalisations sur les prix des transferts entre parties apparentées, lasous-capitalisation et les transactions avec les paradis fiscaux.surtout l’épuisement des ressources d’eau à causede la grande quantité d’arrosage que demande saculture et son traitement 9 . L’environnement nicaraguayen,agressé et ravagé depuis plus d’un sièclepar l’exploitation agricole fruitière, ne pourra passupporter éternellement la croissance et l’expansionde la culture caféière si des politiques agricolescontrôlant les techniques de culture et permettant larécupération du sol ne sont pas appliquées. On nepeut espérer aucune croissance durable d’un terrainstérile et tari.La détérioration du système éducatifLe développement durable implique le legs des biensde la génération présente à celles qui la suivent. Pource faire, il est indispensable d’offrir aux citoyens unenseignement qui leur donne la capacité d’exploiterau mieux les ressources humaines et naturelles dontils ont hérité, mais le Nicaragua offre également àce sujet un tableau déplorable. Une enquête publiéeen mai et menée par le cabinet-conseil M&R révèleque la plupart des personnes interrogées considèreque le système éducatif s’est gravement détérioré,et cette vision d’un enseignement fort appauvri etdéphasé ne fait qu’en entraver l’accès. À cela vientse greffer le fait que les enseignants perçoivent unsalaire bien inférieur au salaire moyen national. 10De fait, 78,9 % des sondés pensent que l’infrastructurescolaire est dans un état précaire, voirelamentable, et 70,8 % qualifie de la même façon laqualité de l’enseignement donné. Quant au salairedes professeurs, 91,8 % des sondés pensent demême des rémunérations perçues par les maîtresdes écoles publiques primaires, tandis que 89,4 %qualifie aussi de mauvais ou très mauvais le salairedes enseignants des écoles publiques secondaires.De même, les personnes interrogées s’accordentpour dire qu’une augmentation significative del’investissement public dans l’éducation primaire etsecondaire (en l’amenant à 7 % au moins du PIB)pourrait améliorer la situation et garantir une plusvaste couverture et une meilleure qualité de l’enseignement.D’après 92,8 % des sondés, le Gouvernementdoit augmenter notablement le budget réservéà l’Éducation.De plus, 93,5 % signalent que le pays a besoind’établir un grand pacte national à long termequi garantisse, indépendamment de l’orientationpolitique du Gouvernement au pouvoir, le respectet la continuité de toute politique visant à améliorerl’éducation. L’éducation et le développementdurable ne peuvent être abordés qu’à partir d’uneréforme fiscale qui permette de destiner des fondsdont l’État ne dispose pas aujourd’hui. Les premiersobjectifs à atteindre sur le chemin de la durabilitédoivent être les suivants : Fiscaliser, préserver etenseigner. n9 Noarys Pérez Díaz, Raisa Castillo Ramos, Leila CarballoAbreu, José Ángel Veliz Gutiérrez, Impacto ambientalen el cultivo y procesamiento del café y su repercusiónsocial, (Cuba : Université de Pinar del Río), .10 Voir : .<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 143 Nicaragua


NIGÉRIARepenser le développementLes initiatives de développement du Gouvernement n’ont pas réussi à faire diminuer la pauvreté ni à diversifierune économie basée sur l’industrie pétrolière qui utilise un modèle d’extraction non durable. Ce modèle aconduit à une grave détérioration de l’environnement à savoir une tendance alarmante à la désertification et àl’érosion. Le Gouvernement doit revoir ses stratégies et adopter des politiques de planification à long terme quisoient respectueuses de l’environnement et qui s’appuient sur des sources d’énergie renouvelables ainsi quesur une gestion environnementale adaptée. Il faudrait donner du pouvoir aux pauvres et les autoriser à prendrepart à la gestion de l’environnement et des ressources naturelles.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> NigeriaRay OnyeguBien que le pays dispose d’abondantes ressourcesnaturelles comme la bauxite, l’or, l’étain, le charbon, lepétrole et les forêts et qu’il génère des revenus importantsdu secteur pétrolier, il est encore peu développé.L’Indice de Développement Humain 2010 place leNigeria parmi les pays ayant le plus faible développementhumain, avec un score à 0,423 ce qui le place àla 142 ème place sur 169 pays 1 . La situation s’est empiréesuite aux efforts ne s’inscrivant pas dans une démarchede durabilité au cours de la dernière décennie.Entre 2003 et 2007, le Gouvernement a tentéde mettre en place un programme intitulé Stratégienationale de développement et d’autonomisationde l’économie (NEEDS, pour son sigle en anglais),conçu pour élever le niveau de vie par une série deréformes englobant la libéralisation et la privatisationdes biens de l’État 2 . Le Gouvernement a estimé quele NEEDS créerait 7 millions de nouveaux emplois,diversifierait l’économie, stimulerait les exportationsnon énergétiques et améliorerait la productivité agricole.Néanmoins, en 2010, soit trois ans après samise en place, 92 % de la population vivait encoreavec moins de 2 USD par jour alors que près de 70 %survivait avec moins d’1 USD par jour 3 .Le développement stagnant du Nigeria estattribué à différents facteurs dont les politiquesmacroéconomiques inadaptées, la faible croissanceéconomique, les effets négatifs de la mondialisationet les faibles rémunérations dans le secteur informel,les défaillances du marché du travail qui limitent lacroissance de l’emploi et conduisent au chômage,une croissance démographique élevée, le faible développementdes ressources humaines, l’augmentationdes délits et de la violence et la dégradation del’environnement liée non seulement au changementclimatique mais aussi à l’activité humaine.Cette situation s’aggrave encore davantage dufait du modèle de développement de l’extraction que1 UNDP, Rapport sur le développement humain 2010: The RealWealth of Nations, (New York : 2010), 2 Bibliothèque du Congrès – Federal Research Division,Country Profile : Nigeria, (2008), p.11, .3 AllAfrica.com, UNESCO on Poverty in Nigeria, (27 janvier2010), .Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 6439100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansmet en place le Gouvernement. C’est pourquoi, malgréle fait que les indicateurs récents aient montréun progrès économique avéré (le PIB est passé de5,6 % en 2010 à 6,8 % en 2011) 4 , le pays continueà être très dépendant de l’industrie des hydrocarbures5 , des ressources non renouvelables et doncinadaptées au développement durable. Le défi le plusimportant que doit relever le pays est la pauvreté,celle-ci est liée aux problèmes environnementaux dupays, causés en grande partie par les pratiques d’extraction: désertification, inondations, dégradationde l’environnement et perte de la biodiversité.DésertificationTous les ans, presque 350.000 hectares de terrescultivables sont perdues face à l’avancée du désert 6 .Les causes naturelles sont, entre autres, le mauvaisétat physique des sols, la végétation et la topographieainsi que des terres de plus en plus sèches et unevariabilité climatique extrême qui est en partie inhérenteà la région comme le prouvent les sécheressespériodiques. On assiste également à une surexploitationpar l’homme, trop de pâturage, la déforestationet une mauvaise irrigation, tous liés à des facteurscomme la croissance démographique, les migrationset les conditions socioéconomiques de pénuriedans lesquelles vit la population 7 .4 IndexMundi, Nigeria GDP – real growth rate, .5 Economy<strong>Watch</strong>, Nigeria economy, .6 N. Medugu, “Nigeria: combating desertification anddrought”, AllAfrica.com, (2 juin 2009), .7 Ibid.45100 10086Indice d'Equité de Genre (IEG)Éducation1000 n/dL'autonomisation3860100 100Activité économiqueLa demande en bois pour l’habitat, le combustible,l’industrie de la pêche et autres usages ainsique l’élimination des arbres, arbustes, plantes herbacéeset de la couverture herbacée accélèrent ladégradation du sol et sa désertification. Les bergerscoupent aussi du feuillage pour nourrir leurs animauxet utilisent les branches pour construire desenclos. Parmi les autres raisons de la désertificationcroissante du Nigeria on trouve les incendiesd’arbustes par les villageois pour créer de nouvellesterres cultivables, les incendies provoqués par leschasseurs pour débusquer des animaux, les feuxallumés par les éleveurs pour supprimer les pâturagessecs et stimuler la croissance de bourgeonsainsi que la culture dans des zones écartées lorsqueles périodes de pluie sont supérieures à la normale.L’utilisation intensive des écosystèmes fragileset marginaux a conduit à la dégradation progressivedes terres agricoles marginales même lors desannées où les précipitations sont dans la norme 8L’apport en eau, insuffisant dans la majeure partiedu Nigeria, en raison des sécheresses, a conduit àune plus forte pollution des sources en eau restanteset entraîne une augmentation des maladies qui setransmettent par l’eau comme le typhus, l’hépatiteinfectieuse et le choléra. On craint que les dommagescausés par la sécheresse et la pression exercée par lapopulation n’aient déjà causé la perte génétique d’ungrand nombre d’espèces végétales 9 .8 Desertification, Desertification in Nigeria, (9 mars 2007),.9 Gouvernement du Nigeria, Country Profile: Implementationof Agenda 21, présentée devant la Commission de l’ONU surle Développement Durable, (New York : avril 1997), .Rapports nationaux 144 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


InondationsPlus le Nigeria subit des épisodes de sécheressegénéralisée, plus il devient particulièrement vulnérableaux inondations. Ce phénomène adopte troisformes : côtières, fluviales et urbaines. Les premièresse produisent sur la bande située au niveau de la merdans la mangrove et sur les barrages d’eau douce àproximité du littoral, comprenant le débordementde la plage Lagos Bar sur l’océan Atlantique 10 . Lesinondations fluviales se produisent périodiquementdans les plaines inondables des cours d’eau les plusimportants et, dans le delta du Niger, on assiste égalementà des crues soudaines et courtes sur les coursd’eau moins importants pendant la saison des pluies.Les inondations urbaines surviennent dans les villessituées sur les terrains plats ou bas, en particulierlà où la prévention n’a pas été suffisante en ce quiconcerne le drainage des eaux de surface ou encorelà où les égouts sont obstrués par les déchets municipaux.Les fortes précipitations imprévues et autresmanifestations climatiques extrêmes sont quelquesunsdes risques du changement climatique dû auréchauffement, le pays est donc plus vulnérable faceaux catastrophes naturelles.En 2010, les graves inondations ont entraîné ledéplacement de presque 2 millions de personnes dansle nord du pays 11 . De nombreux autres pays d’Afriquede l’Ouest – entre autres le Bénin, le Ghana et le Niger– ont également été concernés par la catastrophequi s’est produite après une sécheresse d’envergureet une période de famine, cette situation a aussiconcerné le Sahel (zone de transition entre le Saharaet l’Afrique centrale) et le bassin du fleuve Sénégal.Les états du Nord, le Challawa et le Tija ont été lesplus touchés par les inondations qui ont égalementcontraint quelque 2 millions de personnes à se déplacerdans l’état de Jijawa. Le Gouverneur de Jijawa ainvoqué le fait que les inondations avaient été causéespar l’ouverture irresponsable des vannes des barragesde Challawa et Tiga, sans en avoir informé les habitantsde la région. Bien que le Gouvernement ait reconnuqu’un des barrages avait débordé, il a soutenu que cecine pouvait pas expliquer en totalité les inondations etil a plutôt accusé les pluies intenses d’être à l’originedu désastre 12 . Des cultures entières ont été perduespar ces inondations qui se sont produites juste avantla récolte alors même que les fermiers n’avaient plusle temps de replanter entraînant un risque aggravé decrise alimentaire et de famine.Dégradation de l’environnementet perte de la biodiversitéLes pratiques agricoles inadaptées ainsi que la destructiondes bassins hydriques et la suppression dela végétation des berges et autres espaces critiques10 A. Raufu, “Africa underwater: Nigeria’s coastline is besiegedby global warming”, The Environment Magazine, (mars-avril2002), .11 BBC News Africa, Northern Nigeria flooding displaces twomillion, (24 septembre 2010), .12 TerraDaily, Agency denies opened dams caused Nigeria floods,(26 septembre 2010), .ont généré un dépôt de sédiments sur les lits descours d’eau et la perte de plusieurs cours d’eau.L’utilisation non contrôlée de l’agrochimie et lesproblèmes liés à la présence de produits chimiquesdans le sol en zones humides et l’encroûtement dusol en climat aride ont contribué à la destruction devastes surfaces agricoles. En outre la prospectionpétrolière – avec les problèmes de pollution qui endécoulent, comme les déversements, les éclatementsde puits de pétrole, les décharges par explosionset l’élimination inadaptée des boues de forage– a entraîné des problèmes comme des dégâts surla faune marine, la modification de l’écosystèmeavec la disparition d’espèces et un retard dans l’apparitiond’une flore et d’une faune nouvelle, unediminution des ressources pour la pêche et la pertede la valeur esthétique des plages naturelles enraison des taches de pétrole 13 .La faune du Nigeria est en rapide diminutionen raison de la perte des habitats, d’une pressionaccrue des chasseurs légaux et des braconniers etdes incendies volontaires en brousse. Le guépard,l’hippopotame pygmée, la girafe et le rhinocéros noiront disparu du pays. Les incendies de brousse menacentle développement des arbres et de la fauneet diminue la diversité écologique. L’extraction degraviers destinés à la construction aggrave le problèmede l’érosion et des ruissellements de surfacealors que le déversement de particules des sites deconstruction pollue et un envasement. Les zonesdésignées sont en cours de transformation en ceinturesvertes et aires de loisirs sur les emplacementsdes chantiers 14 .Pollution et déchets industriels 15Le Nigeria compte 5000 établissements industrielsdéclarés et quelque 10 000 industries àpetite échelle qui agissent illégalement dans deszones résidentielles. Dans des sites comme Kano,Kaduna et Lagos, on déverse des effluents chargésen métaux lourds, chauds et colorés – émanant enparticulier de l’industrie du textile, de la peinture etdes tanneries – directement dans les déversoirsouverts et les canalisations d’eau, représentant undanger pour les usagers de l’eau, et pour la flore etla faune en aval. Une autre pratique inquiétante semanifeste par certains établissements industrielsqui enterrent les substances chimiques usagéesainsi que les déchets chimiques dangereux sur leurpropre terrain, mettant en danger la qualité de l’eaudes nappes phréatiques.Les cheminées des industries émettent desgaz et des particules qui entraînent des problèmesrespiratoires et cardiaques graves. Dans différentesrégions de Lagos, Kano, Enugu et Port-Harcourt lesnuages industriels peuvent dissimuler le soleil pen-13 P. O. Bankole y A. Surajudeen, Major environmental issuesand the need for environmental statistics and indicatorsin Nigeria, article présenté au nom de la délégationnigériane lors de l’Atelier ECOWAS sur les StatistiquesEnvironnementales, (Abuya : 19 au 23 mai 2008).14 Gouvernement du Nigeria, op. cit.15 Ibid.dant plusieurs heures. L’inversion thermique avec sabrume consécutive et une réduction de la visibilité àmoins de 20 mètres est devenue une des caractéristiquesquasi permanente de la zone médiane (OkoBaba) du Troisième Pont de Lagos où les scieriesbrûlent de la sciure et des copeaux.On rencontre un phénomène similaire au niveaudu péage d’Oregun sur l’autoroute Lagos-Ibadan,où la fumée des décharges voisines pollue l’air produisantune odeur nauséabonde. Les montagnes dedéchets en provenance des villes sont répanduesdans différents quartiers des villes principales, bouchantles rues, ruelles et chemins. Ces déchargesdésagréables se caractérisent par :• la présence de différents produits pétrochimiquesnon biodégradables à usage domestiquecomme des sacs en polyéthylène, des récipientsplastiques, des emballages en polystyrène et despneumatiques ;• le déversement irresponsable d’huile de moteuren provenance d’ateliers de mécaniques,d’industries, de centrales électriques et de commercesdirectement dans les déversoirs et leseaux de surface, polluant ainsi les eaux de surfaceet les nappes phréatiques ;• Les bâtiments publics et les résidences sontsitués en zones inondables tout près des déchargesnon équipées d’un système de recyclageadapté. Il est fréquent que ces zones écologiquementsensibles soient transformées en terrainsconstructibles pour y bâtir des logementset bâtiments publics comme des marchés.ConclusionUne gestion environnementale adaptée est essentiellepour le développement durable et, parconséquent pour la diminution de la pauvreté. Lacroissance économique actuelle du Nigeria durerapeu en raison de sa forte dépendance à l’industriedes hydrocarbures mais aussi en raison de la nonpréservation de l’environnement et des ressourcesnaturelles. Par le passé, les dégâts sur l’environnementet les ressources naturelles étaient dûs àla déforestation, à des pâturages excessifs et à lapêche intensive. Les pauvres en milieu rural doiventvivre sur des terres fragiles et à proximité de sourcesd’eau fragiles qui requièrent une gestion particulièreen raison de la dégradation croissante alors qu’enville les pauvres sont exposés à des maladies liées àl’entassement, à des services de base inadaptés et àla vie dans un environnement pollué. Pour faire faceau problème de la pauvreté, le Gouvernement devraconférer du pouvoir aux pauvres et les autoriser àprendre part à la gestion de l’environnement et desressources naturelles. n<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 145 Nigéria


PAKISTANGaspillage du potentiel pour un véritable développementLa stratégie de développement du Pakistan est presque entièrement centrée sur la croissance économique et elle ne sesoucie presque pas des questions environnementales et sociales. Le pays possède le potentiel pour fournir l’énergieà sa population, mais il n’a pas de planification assurant que ceux étant les plus affectés par les mégaprojets soientégalement pris en compte. La pénurie d’eau est une question à aborder immédiatement au cas où le fleuve Indus seretrouverait à sec, provoquant une sévère sécheresse. Il devient urgent de disposer de données fiables sur le nombrede travailleurs en régime d’esclavage existant dans le pays, pour que les fonctionnaires du gouvernement ne puissentplus nier les droits à ces travailleurs hautement exploités alors que l’économie profite des bénéfices de leur travail.Civil Society Support Programme (CSSP)Hannah CampbellConseillère du développementLes inondations massives de 2010 ont dévasté une surfaced’environ 160 000 km 2 et ont affecté environ 20 millionsde personnes au Pakistan dont la plupart vivaientet travaillaient dans le secteur agricole. Ces personnesont perdu non seulement leurs maisons mais aussileurs moyens de subsistance. Suivant les estimations,plus de deux millions d’hectares de cultures ont étéperdues lors des inondations ; par conséquent, les fruitset les légumes doivent maintenant voyager pendant desheures pour arriver dans les régions qui, auparavant,avaient beaucoup de produits frais. Tout cela, ainsi quel’augmentation du prix du pétrole, a provoqué une augmentationsignificative du prix des produits périssables,dont l’effet a été dévastateur sur les communautés déjàpauvres du Pakistan 1 .Les mécanismes de survie développés pendantles dernières décennies par les communautés riverainesont également été minimisés par la haute croissancedémographique et par la pauvreté persistanteainsi que par une série de facteurs concernant l’administrationdu sol, y compris le déboisement, l’intrusiongraduelle de l’eau dans les zones proches de la rivière,le développement d’infrastructures physiques et lamaintenance du fleuve et des barrages du canal.En raison de plans et de politiques d’infrastructureinadéquats, la saison de la mousson de 2011 aaussi dévasté le pays, en laissant une grande partiede la région de Sindh sous l’eau.Réponse d’urgence : succès et échecsEnviron deux millions de familles affectées par lesinondations ont reçu du Gouvernement des « cartesWatan » d’approvisionnement dont chacune garantitl’accès à 100 000 PKR (environ 1170 USD). Leprogramme a comporté une faille importante. Il aété décidé d’attribuer ces cartes aux chefs de famillehommes à travers le système du Document nationald’identité électronique (DNIE). Ceci a provoqué l’exclusionautomatique des orphelins, des familles dontle chef est une femme et de centaines de milliersd’hommes et femmes ayant émigré des zones affectéesavant les inondations et qui n’étaient pas inscritsdu fait que leurs DNIE appartenaient à d’autres dis-1 Voir : .Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 6839100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 anstricts. Les niveaux de fraude ont été élevés ; ceux quiétaient enregistrés dans plus d’un camp de réfugiésinondés ont obtenu plus d’une carte Watan. La populationn’a pas reçu de formation pour utiliser lesdistributeurs automatiques et le nombre de distributeursdisponibles était insuffisant. Il a été fréquentde voir des victimes des inondations qui vendaientleurs cartes pour de l’argent comptant (jamais pourla valeur totale). Des engrais et des semences ont étédistribués gratuitement aux agriculteurs. Cependant,le projet a reçu des plaintes à cause de la mauvaisequalité des semences et du manque d’accès au programme.La distribution de l’aide destinée aux personnesaffectées par les inondations a été viciée et corrompue.Des milliers de sinistrés sont restés sans accèsà des droits de base tels que la santé, l’éducation,le logement, la nourriture et la dignité. La situations’est encore aggravée en raison de l’existence de travailleursen régime d’esclavage. Ceux qui travaillaientdans le secteur agricole se sont retrouvés non seulementsans leurs maisons, mais aussi avec leur zoned’habitat et de travail sous l’eau. Par conséquent,leur capacité à payer cette dette déjà interminable estdevenue de plus en plus délicate.Les organisations de la société civile ont émisune Charte des Citoyens qui établit que les politiques« sociales, économiques, commerciales et cellesayant trait à la sécurité nationale et extérieure du paysfavorisent, toutes, de par leur nature, l’expulsion etexigent un nouveau développement ainsi que l’incorporationd’un calendrier de développement et deprogrès en faveur de la population » 2 .2 Voir : .41100 10091Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 29Éducation100140L'autonomisation100 55100Activité économiqueÉcorégion et questions concernantle delta de l’IndusLes glaciers tibétains se replient à un rythme inquiétant; dans le court terme, cela provoquera l’augmentationde la taille des lacs, des inondations et des avalanchesde boue ; dans le long terme, une fois que les glaciersauront disparu, l’approvisionnement d’eau au Pakistansera en danger 3 . En 1984, la Banque mondiale adémarré le programme Canal de drainage de la rivegauche (Left Bank Outfall Drain – LBOD) qui inclut lacréation d’un canal de drainage de 300 km depuis l’estde la province du Sindh jusque dans la mer. Au début,cela a amélioré l’agriculture le long de la zone nord dudrainage et de nombreux agriculteurs qui auparavantavaient quitté la région pour trouver du travail dans leszones urbaines sont revenus.Néanmoins, en 1999 un cyclone provoqué parla mousson a déclenché la fracture du drainage et adévasté des milliers d’hectares consacrés à l’agriculture.Quatre ans plus tard, les inondations ont provoquédes dégâts encore plus importants : 50 habitants y onttrouvé la mort et environ 50 000 personnes ont été déplacées.À cause du haut niveau de salinité des eauxsouterraines, dû aux inondations, l’eau potable a commencéà manquer et la détérioration d’un nombre significatifd’hectares consacrées à l’agriculture a provoquéd’énormes pertes économiques 4 . Les défaillances techniquesdu projet LBOD s’expliquent du fait que, afind’éviter de traverser la frontière avec l’Inde, le lien demarée a été conçu contre la pente naturelle du terrain etle drainage traversait les terres humides et luttant contreles puissants vents de la mousson.3 Voir : .4 Voir : .19Rapports nationaux 146 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


Au Pakistan, un système artificiel d’irrigation etde drainage a mené à l’élimination sans contrôle deseffluents et des déchets chimiques des usines du LacManchar qui, à leur tour, débouchent dans la mer. Lesgrands canaux de la région nord, tels que le Chashmaet le Tausa, sont aussi responsables de la pénuried’eau douce. Ils ont été conçus pour être utiliséspendant les périodes d’inondations ; cependant, depar la mauvaise administration et la corruption, ilssont constamment utilisés pour le moment. Cecia réduit non seulement la quantité d’eau dans lesfleuves et les canaux du sud ; en aval, le secteur deconservation du delta n’a plus suffisamment d’eaupour maintenir ses régions humides, habitat pour ungrand nombre de crevettes et de poissons, outre leurrôle fondamental lors de l’arrivée des catastrophesnaturelles. Le Delta Kotri est aussi une région oùstationnent les oiseaux migratoires qui viennent deSibérie, reconnue au niveau mondial ; cependant, àcause du manque d’eau, à l’heure actuelle il ne resteque quelques mouettes.À mesure que ces fleuves se terminent avant dedéboucher dans la mer d’Arabie, l’absence de limona provoqué une intrusion dangereuse de la mer dansles terres. La mer a déjà gagné plus de 8100 km2de terrain et a obligé les communautés côtières àmigrer vers l’intérieur en détruisant l’industrie de lapêche. Il faut réaménager de toute urgence les rivesdes fleuves et corriger le cours de l’eau, mettre enplace un système de désenvasement des fleuves etarrêter le mauvais usage des canaux qui ravagent lesterres humides.Les familles qui ont vécu et travaillé depuis desgénérations sur les rives de l’Indus luttent maintenantpour que leur pêche puisse garantir leur survie.On estime que la pêche a diminué d’environ 70-80 %dans certains villages et de nombreux agriculteursont remplacé la production de riz par celle du tournesoldemandant moins d’eau et dont les bénéficessont presque les mêmes ; mais cela signifie aussiqu’il y a moins d’aliments disponibles. Le manqued’eau dans les fleuves représente aussi une gravemenace pour les dauphins de l’Indus qui sont maintenanten danger d’extinction.Charbon : menaces et opportunitéspotentiellesLe district de Tharparkar, dans la province du Sindh,est riche en ressources naturelles y compris degrandes mines de charbon (parmi les cinq réservesde charbon les plus importantes du monde), avec unmillion et demi d’habitants. Un projet de Gazéificationdu charbon souterrain (GCS) a été proposé pourla région. Cette méthode pourra générer 5000 MWd’électricité pendant au moins 800 ans.La plupart des résidents de Tharparkar appartiennentaux minorités indigènes. Ces groupes sontdoublement désavantagés au sein de leur sociétécar ils sont non seulement hindous, mais aussi dalits,appelés aussi parias, une auto désignation depersonnes considérées traditionnellement intouchables.Ce sont des gens dépourvus de biens, dépendantde l’agriculture non irriguée et de l’élevage,et qui désirent tout simplement que leurs moyens desubsistance et leurs traditions soient respectés. LeurEffets du changement climatique au PakistanLe Pakistan, tout comme la plupart des pays en voie de développement, contribue très peu aux émissionstotales de gaz à effet de serre. Cependant, leurs effets sont considérables. Par exemple :• La fonte des glaciers dans l’Himalaya augmentera les inondations avant d’affecter les ressourceshydriques au Pakistan lors des deux ou trois prochaines décennies.• Il est prévu que la disponibilité d’eau douce diminuera, ce qui provoquera aussi bien une pertede la biodiversité que la pénurie d’eau potable.• Les zones côtières qui longent la Mer d’Arabie représenteront un grand risque pour la montéedes niveaux des mers.• Il faut s’attendre à ce que les rendements des cultures diminuent en provoquant un haut risquede famine et d’insécurité alimentaire.• La morbidité endémique et la mortalité vont augmenter en raison des maladies associéesaux inondations et aux sécheresses, alors que la hausse de la température des eaux côtièresaugmentera l’incidence du choléra.• Les inégalités sociales liées à l’utilisation des ressources deviendront de plus en plus profondesprovoquant ainsi instabilité, conflits et déplacement de la population et des modifications dansles mouvements migratoires 1 .1 Voir : .inquiétude, en partie, découle d’une augmentationdramatique de la population du Thar qui provoqueun niveau de pauvreté plus élevé et une plus grandepénurie des ressources. En outre, pour le projet GCS,on vise à sous-traiter un service externe au lieu d’embaucherles résidents locaux.Pour le moment, le Gouvernement n’a rien proposéde solide ni pour la réinstallation des résidentsdu Thar ni pour prendre en compte leur bien-être.Pour cette raison, en 2010, la Banque mondiale s’estretirée du projet, ce qui a représenté un coup durpour le développement durable du pays.Travail sous le régime d’esclavageEn dépit de nombreuses dispositions légales visantà réduire le travail en esclavage, cette pratique s’appliquenotamment dans des régions où il y a desfours à briques, des fabriques de tapis et minières,lapêche, l’industrie minière, le broyage de pierres etde briques, la fabrication de chaussures, des toileriesmécaniques, le tri des déchets et l’agriculture.Cette pratique est adoptée dans toutes les provincesmais notamment au Sindh et au Punjab. Il existe ungrand manque de données fiables concernant leschiffres, voilà la raison pour laquelle le problèmen’est toujours pas abordé 5 . L’OIT a révélé qu’en 1993,près de 20 millions de travailleurs se trouvaient enconditions d’esclavage au Pakistan ; et en 2009, seulement1 700 000. Cependant, les ONG affirment queseulement dans la province du Sindh il y a environ1 million trois cent mille personnes qui travaillenten esclavage 6 .5 G. M. Kundi et B. Shah, Bonded Labour and Constrained Roleof Pakistan Government in its Eradication, Department of PublicAdministration, Gomal University, Dera Ismail Khan, 2006.6 Voir : .Solutions à long termeLe Gouvernement doit concevoir un plan globalpour protéger les communautés locales, la pêcheet l’agriculture, ainsi que pour conserver des zonesenvironnementales importantes, telles que les terreshumides. Le plan doit comprendre la réactivationde l’agriculture et la fourniture d’équipements améliorésde pêche pour les personnes affectées par lamauvaise gestion du fleuve, l’incitation à l’élevageet à la production de lait, aux activités génératricesde revenus, l’approvisionnement d’eau potable et unplan à long terme pour la réactivation de l’éducationet des centres sanitaires dans la zone 7 .Toute l’eau polluée rejetée dans la Mer d’Arabiedevrait être traitée et contrôlée périodiquementafin de préserver la vie marine. Il est nécessaire deconcevoir un plan pour éviter l’intrusion de l’eau demer dans les terres humides. Et pour faire face auproblème de la pénurie d’eau, il faudrait mettre enplace un système intégral de recyclage de l’eau et decollecte d’eau de pluie. Construire une série de petitsbarrages sur l’Indus peut s’avérer plus efficace queles grands canaux existants.Étant donné que le Pakistan est fréquemmentaffecté par des catastrophes naturelles, il est crucialde mettre en œuvre un système efficace de réductiondes risques de catastrophes et de cartographie desrisques, en impliquant et en formant tous ceux ayantplus de probabilités de se voir affectés par des crisesmajeures afin d’assurer que le degré de dévastationet de destruction soit aussi faible que possible.Les autorités de l’Administration de catastrophes dechaque province devraient renforcer leurs efforts etimpliquer les universités locales dans la réalisationde recherches sur le changement climatique. n7 Voir : .<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 147 Pakistan


PALESTINEPas de développement durable sous occupationL’occupation israélienne porte atteinte à l’environnement palestinien et minimise toute possibilité de mettreen œuvre un développement durable. Des taux de chômage alarmants, des institutions faibles et inefficaceset une forte dépendance des recettes douanières et des contributions financières des pays donateurs mettenten évidence le caractère insoutenable de l’économie palestinienne. Par ailleurs, les conditions désastreusesdes installations d’approvisionnement en eau, principalement en raison des lois imposées lors de l’occupationisraélienne de 1967, représentent un risque alarmant pour le bien-être des Palestiniens.Le réseau des ONG palestiniennesLa Palestine est un cas tout à fait inhabituel en termesde développement durable. Pour traiter cette questionnous devons examiner un certain nombre deproblèmes, le plus important étant le manque de souverainetéet de contrôle des ressources, l’absence delégislation ou de plans politiques pour un quelconquetype de développement et l’importance croissante dufinancement des pays donateurs aux économies dela Cisjordanie et la bande de Gaza.L’absence de législation et de politiques, notammenten matière de durabilité, est liée à l’occupationisraélienne qui détient les pouvoirs ultimes en ce quiconcerne la compétence et l’étendue géographiquedes législations potentielles. L’occupation est égalementla cause de l’instabilité politique.La réalité de l’occupation impose par conséquent,la nécessité de garder à l’esprit que de nombreuxindicateurs de développement sont inadéquatslorsqu’ils sont appliqués à la situation palestinienne.Cela ne signifie pas qu’il faille exclure la Palestinedes statistiques du développement, mais certainsindicateurs largement utilisés ne sont pas nécessairementvalables à l’égard de ce pays et il faudra,donc, envisager d’autres façons de mesurer son développement.* Pas de données disponibles pour le ICB et le IEG.Le chômageLe rapport 2011 de la Banque mondiale sur l’actuellesituation de pauvreté en Cisjordanie et à Gaza décrit lasituation palestinienne comme étant sans communemesure. Il souligne que le taux de chômage dans lepays est l’un des plus élevés au monde en raisonprincipalement du manque d’opportunités et conclutque la situation est étroitement liée à l’occupationisraélienne.Selon le rapport, 19 % de la population était auchômage en 2011, bien que les données officiellesrévèlent que 780 000 personnes travaillaient sur leterritoire palestinien au premier trimestre de 2011,c’est-à-dire, 130 000 de plus que l’année dernière.Cela signifie une baisse du taux de chômage d’environ21,7 %. Les jeunes ont été particulièrementtouchés par cette situation, puisque le taux de chômagedans ce secteur de la population était, en 2009,plus élevé de 10 % par rapport au taux de chômageglobal 1 .Les problèmes sociaux et environnementauxLa situation des soins de santé est décourageante.Il existe 25 hôpitaux publics sur le territoire, et lenombre d’habitants par lit atteint 1349. Les conditionsmisérables des établissements dispensateursde soins de santé obligent à transférer un nombresignificatif de patients vers les pays voisins pour lestraiter. Cela a engendré un surcoût d’environ 1 484200 000 NIS (403 702 400 USD) en 2010 en raisonde l’absence d’une planification judicieuse et d’unegestion adéquate. En fait, si les ressources existantesétaient correctement gérées, le ministère pourraitconstruire des installations médicales équipées dela technologie de pointe qui rendrait ces transfertsinutiles.Le blocus de la bande de Gaza de 2007 à 2011a eu des conséquences désastreuses sur l’approvisionnementen eau et l’assainissement, en particulieren raison des graves dommages infligés aux infrastructures.La plupart des équipements de pompaged’eau et d’assainissement sont hors service à causedu manque d’électricité et de carburant, entraînantune pénurie d’eau et le débordement des servicesd’assainissement dans les zones urbaines 2 . Le blocusa empêché la fourniture de pièces détachées,empêchant les installations d’être réparées.L’agriculture consomme 70 % de l’eau palestinienne,suivie par l’usage domestique (27 %) etles usages industriels. Selon le rapport 2009 de laBanque mondiale, l’approvisionnement résidentielen eau en Cisjordanie a été estimé à 50 litres par personnepar jour 3 . En 2009, 60 % de la population de1 Voir “Amid Palestinian statehood push, a grim World Bankreport,” Christian Science Monitor, (14 septembre 2011),.2 Banque mondiale, Gaza Strip Water and Sanitation Situation,(2009), .3 Wikipedia, Water supply and sanitation in the Palestinianterritories, .la bande de Gaza n’avait pas accès à l’eau courante 4 .En Cisjordanie, seulement 13 000 m3 (sur un totalde 85 000 m3) des eaux usées ont été traitées en2009, tandis que dans la même année, 65 000 m3ont été traitées (sur un total de 110 000 m3) dans labande de Gaza 5 .Cette même année, Amnesty International arapporté que dans les communautés rurales environ200 000 Palestiniens manquaient de tout accès àl’eau courante et que l’armée israélienne les empêchaitde collecter les eaux pluviales, tandis que lescolons israéliens possédaient des piscines et desinstallations d’irrigation pour leurs exploitations. Enfait, les 450 000 colons dénombrés dans ce rapportconsomment la même quantité d’eau que toute la populationde la Palestine. Pour faire face aux pénuriesd’eau et au manque d’infrastructures, de nombreuxPalestiniens sont contraints d’acheter de l’eau descamions citerne, de qualité douteuse et à un prixtrès élevé 6 .En 1993, la Banque mondiale a publié un rapportintitulé “Developing the Occupied Territories: Aninvestment in Peace” (Le développement des territoiresoccupés : un investissement dans la paix) quidécrivait l’insuffisance des prestations des servicespublics dans les territoires occupés, en raison de laquasi-absence d’installations d’approvisionnementen eau, d’élimination des déchets solides et des eauxusées. La mauvaise gestion des déchets a contribuéà la dégradation de l’environnement, celle-ci remonteà l’administration israélienne de 1967 à 1993. Malgrédes investissements de nombreux bailleurs de fondsinternationaux, peu de progrès ont été accomplispour la reconstruction de ces installations, principalementen raison des lacunes et des ambiguïtés del’accord d’Oslo, en particulier à cause de son interprétationpar les autorités israéliennes. L’escalade dela violence a empiré la situation 7 .4 Centre d’actualités de l’ONU, Gaza water crisis prompts UNcall for immediate opening of crossings, (2009), .5 Banque mondiale, op.cit.6 Amnistie Internacionale, Israel rations Palestinians totrickle of water, (27 octobre 2009), .7 A. Gray, Environmental justice for Palestine, (23 mars 2007),.Rapports nationaux 148 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


Lorsqu’Israël a occupé la Cisjordanie en 1967,il a déclaré toutes les ressources en eau propriétésde l’État d’Israël et depuis lors, plusieurs ordres militairesont réduit le développement de l’approvisionnementen eau en Palestine par le biais de quotas depompage, de l’interdiction de réhabiliter des puitset d’en forer de nouveaux sans autorisation, et enconfisquant et même en détruisant toutes les stationsde pompage palestiniennes le long du fleuveJourdain. En même temps, Israël a augmenté sonexploitation des ressources en eau de la Cisjordanieen forant 38 puits. En conséquence, en 1993, lesPalestiniens ne pouvaient accéder qu’à 20 % de l’eaudes aquifères souterrains de la Cisjordanie. L’accordd’Oslo n’a rien fait pour améliorer la situation en Palestine.En fait, il a été convenu que « les proportionsd’utilisation existantes » devaient être maintenues,de sorte que 80 % de l’exploitation de l’aquifère a étératifiée en faveur d’Israël 8 .On ignore encore quel sera l’effet du changementclimatique sur les territoires palestiniens, maiscertains experts prédisent une hausse des températuresmoyennes et une diminution des précipitations,ce qui représenterait un grand danger pourl’approvisionnement en eau déjà précaire dans labande de Gaza et en Cisjordanie 9 .Selon un rapport publié par l’Institut de recherchessur le Moyen-Orient, plusieurs ONG palestinienneset israéliennes estiment qu’« un processusintégral de paix aiderait à résoudre les violationsisraéliennes contre l’environnement palestinien. Leprocessus de paix actuel n’est pas perçu comme uneaide à l’environnement » 10 . Il est clair que l’environnementne peut pas attendre que les pourparlers depaix deviennent sérieux.Les problèmes de législationLa loi palestinienne est extrêmement complexe etcontradictoire. Certaines lois, par exemple, datentde l’époque de l’Empire ottoman et du mandat britannique,mais aussi de la période sous le contrôlejordanien et égyptien à travers l’occupation d’Israël,qui comprennait des ordonnances militaires qui nefaisaient pas partie de la législation mais qui sonttoujours en vigueur. Les lois promulguées après lacréation de l’Autorité nationale en 1994 ne représententque 12 % de la législation actuelle.La situation juridique et législative est clairementliée à l’instabilité politique du pays. La séparationentre la Cisjordanie et la Bande de Gaza, parexemple, a stoppé les discussions sur plus de 50propositions de lois.En outre, les lois actuelles n’ont pas abrogé leslois précédentes, dont certaines sont contraires à lajuridiction géographique de la loi d’arbitrage adoptéepar la Chambre de commerce et d’industrie de Jérusalem.Il existe un pressant besoin d’actualiser lalégislation concernant le secteur privé, par exemple,pour surveiller, promouvoir et renforcer le cadre desaffaires, mais aussi en termes de soins de santé.On peut dire que l’occupation reste un facteurdécisif dans l’obstruction d’une législation efficaceet dans l’affaiblissement de sa capacité à fournir uncadre pour le développement.En fait, aussi bien le système législatif que judiciairesouffrent de l’occupation continue, mais aussipar le fait que la Cisjordanie et la Bande de Gaza restentdivisées. C’est l’un des principaux obstacles enmatière de développement durable, car il n’y a pas depolitique environnementale en raison de l’absencede dialogue. Un autre facteur qui mine la durabilitéest que la faiblesse institutionnelle ne permet pasde mesurer ou d’améliorer l’efficacité des efforts definancement des pays donateurs.Les donations, la politique et la durabilitéLes différences d’opinion sur l’affectation et lagestion des fonds des donateurs sont une sourceconstante de conflit. Par conséquent, il est fréquentque les projets choisis n’arrivent pas à obtenir defonds auprès des pays donateurs et des entreprises.Ces conflits sont généralement exacerbés par la politisationdes services fournis.Il convient de noter que les donateurs cherchentà remédier à cette situation en favorisant la responsabilisationet la transparence par le renforcementdes institutions palestiniennes, mais les résultatssont menacés par la politisation croissante de la sociétépalestinienne. En fait, de nombreux dons ontdes conséquences négatives, car ils accroissent ladépendance à ce type de financement, spécialementen ce qui concerne les dons à des fins politiques, ycompris les fonds fournis pour les activités visantà normaliser les relations avec Israël. Ce type dedépendance agit également contre les profondesvaleurs sociales telles que le bénévolat, la dignitéet l’altruisme. Tout cela n’a servi qu’à approfondir lemalaise social.Les donateurs ont également cherché à améliorerla capacité des différentes institutions de lacommunauté palestinienne, fait devenu évident dansle cas des institutions de la société civile et égalementau sein Gouvernement. L’amélioration de latechnologie qui a gagné les institutions, comme lesordinateurs et les technologies de la communication,n’a pas engendré de changement dans les habitudesde travail des employés et des gestionnaires de cesinstitutions, surtout à la lumière d’un environnementpolitisé. L’adoption tardive des critères de mérite autravail n’a pas aidé à améliorer l’efficacité des servicespublics.Conclusions et recommandationsIl est clair qu’un développement durable ne sera paspossible en Palestine tant qu’elle se trouvera sousl’occupation israélienne. Toutefois, à moyen termeil sera nécessaire de prêter une attention particulièreaux points suivants afin d’atténuer les souffrances dela population palestinienne et de réduire les tensionspolitiques :• Accroître le soutien à l’application des lois électoralesainsi comme à l’adoption de la représentationproportionnelle pour augmenter laparticipation.• Promouvoir le respect des bailleurs de fondspour les choix de la société palestinienne etabandonner leurs politiques de renforcement dustatu quo par le biais de l’assistance au développementdes programmes politiques.• Harmoniser et aligner les politiques des donateursavec les priorités nationales et améliorerleur contribution à l’harmonie sociale.• Réviser les lois existantes et leur mise en œuvrede manière à ce qu’elles contribuent à un développementplus inclusif et durable.• Accroître la responsabilisation des institutions etdu Gouvernement non seulement vis-à-vis desbailleurs de fonds, mais du public également.• Assurer une répartition claire des rôles et une complètecoordination des acteurs du développement.En ce qui concerne la société civile, il faut égalementprendre plusieurs mesures, notamment :• Reconnaître les ONG comme étant la voix légitimedes institutions de la société civile et nepas exiger qu’elles restent éloignées de tout rôlepolitique.• Identifier les priorités fondées sur l’évaluationdes besoins et des capacités.• Soutenir les initiatives visant à renforcer la sociétécivile palestinienne et l’autonomisation desONG.• Coordonner les stratégies des donateurs poursoutenir, renforcer et développer la société civile. n8 Ibid.9 EMWIS, A war on water, (2009), .10 Voir: < vispo.com/PRIME/enviro.htm>.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 149 Palestine


PANAMALa croissance économique ne suffit pasLa croissance économique enregistrée lors des dernières années n’a pas contribué à élargir les capacités etles libertés qui permettent aux Panaméens de mener une vie digne, et n’a pas permis non plus l’adoption depolitiques de réduction de la pauvreté efficaces. En outre, elle ne s’est pas non plus traduite en politiques deconservation et de protection environnementale plus efficaces. Les décisions politiques erronées qui ont étéprises depuis 2009 ont porté un coup à la gouvernance et à la tranquillité des citoyens. Pour atteindre un modèlede développement durable, le Gouvernement doit concevoir et mettre en place des politiques plus adaptées etaméliorer l’investissement social pour pouvoir lutter contre l’inégalité alarmante qui sévit parmi les Panaméens.Centro de la Mujer PanameñaCecilia Moreno RojasL’économie du pays a vécu une embellie lors des dernièresannées et en 2010, elle a atteint un sommet avec7 % de croissance annuelle 1 stimulés par les investissementsde travaux publics, l’élargissement du canalet d’autres services. Ceci a été signalé par exempledans des rapports de la Banque mondiale, du FMI etde l’ONU, qui sont tombés d’accord pour établir quePanama possède le revenu par habitant le plus élevéd’Amérique centrale. Avec un PBI de 24,71 milliardsd’USD et un revenu par habitant de 6 570 USD en 2009,le pays est en outre, selon la Commission économiquepour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPAL), le plusgrand exportateur et importateur de la région.Cette tendance à la croissance s’oppose cependantau panorama social de pauvreté, à la distributioninégale du revenu et à l’inégalité de genre. Il existeencore d’énormes défis à relever pour parvenir à éradiquerles inégalités sociales et les clivages en matíèrede distribution de revenu sont très importants, enparticulier lorsque les différences apparaissent enfonction des caractéristiques de la région, de la conditionethnique ou du genre. Par exemple, l’indice GINIpour le pays est d’environ 55, selon les données de2005 2 , ce qui indique une forte inégalité.La croissance de l’économie panaméenne est baséesur des modèles de développement non durablesqui sont guidés par des indicateurs économiques etdédaignent les problèmes sociaux et environnementauxles plus pressants. Ceci pose un défi complexeà la société civile panaméenne, surtout en raison ducaractère nettement autocratique et de la tendanced’extrême droite du Gouvernement imposé par le présidentRicardo Martinelli.De plus, tout semble indiquer que le pays soitréinventé tous les cinq ans ; c’est-à-dire que l’on pratiquele « on efface tout et on recommence » dans lecadre des politiques publiques. Par exemple, entre2004 et 2005 l’Administration du pouvoir nationalpour l’environnement (ANAM, pour son sigle en es-1 ABC.es, Panamá: Crecimiento económico del 7% en el 2010,(16 décembre 2010), .2 Trading Economics, GINI index in Panama, .Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9489Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé100Enfants atteignantIEG = 7610090la cinquième annéed’école0100 10098Survivance jusqu’àl’âge de 5 anspagnol) en coordination avec une équipe de spécialistesinterinstitutionnels, a élaboré sept politiquespubliques environnementales autour de thèmes prioritairescomme les ressources hydriques, le changementclimatique, la production plus propre, la supervision,le contrôle et la fiscalisation, les déchets solides,l’information environnementale et la décentralisationde la gestion environnementale. Ces politiques ont étéannoncées en 2007 mais n’ont jamais été appliquéesen raison du changement de Gouvernement en 2009.Actuellement, le pays ne dispose pas d’une politiqueenvironnementale. Les nouvelles autorités del’ANAM ont complètement ignoré les progrès réalisésen la matière et le président Ricardo Martinelli, contrairementà toute attente, a décidé, un an et demi aprèsavoir assumé ses fonctions, d’imposer plusieurs réformesà la Loi générale sur l’Environnement, avec lesoutien de son cabinet et la majorité à l’Assemblée nationale,éliminant ainsi la demande faite aux entreprisesd’effectuer des études d’impact environnemental 3 . Deplus, ces réformes permettaient aux proches du Gouvernementde réaliser toutes sortes d’investissementsdans le secteur de la construction et des exploitationsminières sans être obligés de les soumettre à la consultationpublique. L’ANAM a gardé le silence et maintenuune attitude passive en faisant profil bas pendant toutela durée du processus. Ceci a été sévèrement critiquépar les groupes environnementaux qui l’ont qualifié de« faible » et manquant d’une « voix haute et claire » pourorienter la politique environnementale du pays 4 .Cette situation conjuguée aux protestations desgroupes syndicalistes contre les réformes du Code du3 Voir : .4 Voir : .Indice d'Equité de Genre (IEG)Éducation0L'autonomisation100 69 10099Activité économiquetravail qui attentaient au droit de grève – et d’autresorganisations sociales contre des réformes similairesqui constituaient une violation des droits humains– a créé dans le pays un climat d’agitation. Le refusgénéralisé de la population et la réaction en chaînede la société civile, mais plus particulièrement desorganisations environnementales, a plongé le paysdans un état de crise pendant trois mois en raison demanifestations publiques permanentes provenant desecteurs très différents. Finalement les réformes ontété abrogées en octobre 2010, en conséquence dequoi « le droit de grève des travailleurs, les cotisationssyndicales ont été rétablis, l’impunité que l’onprétendait offrir aux policiers a été suspendue et lesenvironnementalistes sont parvenus à faire valoir lesétudes d’impact environnemental » 5 .Détérioration des ressources naturellesL’autre défi important pour le développement durableà Panama est la détérioration croissante descouloirs biologiques du pays et d’une grande partiedes ressources naturelles en raison de l’exploitationinconsidérée de la couverture forestière, de l’élevageintensif et de la pollution environnementale causéepar l’industrie minière «à ciel ouvert» par des compagniestransnationales. Tout ceci,conjugué aux effetsdu changement climatique, pourrait avoir des conséquencesregrettables sur la détérioration de la santé, lebien-être des individus et l’environnement.Panama enregistre de sévères problèmes d’érosionet de détérioration des sols, avec un processuslent et croissant dans presque tous les bassins, solset eaux, entraînant la désertification et la perte de la5 Voir : .60Rapports nationaux 150 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


capacité productive. En fait, une grande partie desterres couvertes par les forêts ont déjà été déforestées,fondamentalement en raison des activités agricoles.Le niveau d’urbanisation a également montréune augmentation considérable et désordonnée enraison des flux migratoires en provenance des zonesrurales vers les centres urbains 6 .Selon les chiffres du Système d’information environnementalede l’Administration du pouvoir nationalpour l’environnement (ANAM), le processus de déboisementest alarmant puisque le taux de couvertureforestière atteignait 70 % en 1970 et a été réduite àenviron 35 % en 2011. Le dernier rapport exhaustifsur le sujet a été élaboré en l’an 2000 et indique qu’en1992 il existait une couverture forestière de 49 % alorsqu’en l’an 2000 cette surface avait été réduite à 45 % 7 .Pollution de l’eauLes organisations environnementales ont égalementdénoncé la pollution d’importantes sources d’eaudouce situées très près du bassin hydrographiquedu Canal de Panama, suite à l’établissement de deuxcompagnies minières pour l’extraction de l’or et ducuivre dans les régions de Petaquilla et de Molejones,à 100 km de la capitale. Sur l’initiative des organisationsenvironnementales elles-mêmes, la situation aété mise sous surveillance et il a été effectué des analysesdes sources d’eau et des sédiments proches del’emplacement des mines. Les études ont indiqué desniveaux élevés de solides suspendus et une turbiditéélevée dans l’eau altérant peu à peu l’environnementde manière sévère 8 . À plusieurs occasions le pouvoira été alerté face à la possibilité de l’augmentation dansles rivières de substances potentiellement dangereusespour l’environnement et la santé de l’homme.Pourtant, plutôt que de prêter attention à cette situation,la politique gouvernementale n’a fait qu’inciterdes activités polluantes et non durables – commepar exemple les activités minières – comme stratégiede développement économique. En réalité, le Gouvernementa promu une série de réformes du Codeminier qui ont facilité l’entrée dans le pays à différentesentreprises minières transnationales 9 .Accès à l’eau potableUn rapport sur le respect des Objectifs du Millénairepour le développement (OMD), préparé par les NationsUnies au Panama, indique qu’il existe dans le pays degrands secteurs de la population qui n’ont pas accèsà des sources d’eau potable. Les limitations les plusimportantes se concentrent dans les zones rurales, indigèneset dans certaines zones urbaines marginalisées6 Ibid.7 Vidal Berrío, Leoncio, “Cobertura boscosa se reduce 50%”,Capital, ( 6 juin 2011), .8 Théorème environnemental, “Advierten sobre el riesgo decontaminación de agua en Panamá”, Teorema Ambiental,Revista Técnico Ambiental.9 Dans une déclaration aux médias, le ministre du Commercea indiqué que “De darse la adecuación (del Código Minero),una de las naciones interesadas en invertir en la mina decobre que se desarrolla en Donoso, provincia de Colón, esla República de Corea, ya que en el numeral 1, artículo 4 delDecreto Ley 23, indica que se prohíbe el otorgamiento deconcesiones mineras a gobiernos o estados extranjeros.”. EnLa Estrella.com.pa, (1er septembre 2010).TABLeau 1Incidence de pauvreté par zone (%)DétailIncidence de la pauvreté générale (%)1997 2003 2008Total Pays 37,3 36,8 32,7Urbaine 15,3 20,0 17,7Rurale totale 64,9 62,7 59,7Rurale non indigène 58,7 54,0 50,7Rurale indigène 95,4 98,4 96,3qui se situent dans les périphéries des villes, avec uncomposant majoritaire de population d’origine africaineet métissée. Une situation similaire a lieu concernantl’accès aux services d’assainissement améliorés, avecune distribution qui se fait de manière inégale au détrimentdes zones rurales et indigènes.Dans le rapport mentionné, il est indiqué en outreque les personnes vivant dans des étabissementsprécaires sont bien loin de pouvoir satisfaire leursbesoins de base. Dans la plupart des cas, il s’agit defamilles acculées par la pauvreté et le chômage et quine trouvent pas d’autres solutions pour remédier àleur problème habitationnel. De même, on reconnaîtqu’il existe un lien étroit entre l’analphabétisme et lapauvreté qui se traduit ensuite par encore plus d’inégalités,telles que des limitations d’accès à la santé,au logement, à l’équité de genre, à la participationpolitique, à la protection de l’environnement.Selon l’Enquête sur les Niveaux de vie (ENV)réalisée au Panama en 2003, environ quatre personnessur 10 vivent dans la pauvreté. De plus, 16,6% de la population vivait en situation d’extrême pauvreté.En 2008 une étude similaire a enregistré unelégère amélioration : la pauvreté s’est réduite à 32,7% et l’extrême pauvreté, à 14,4 % 10 .En ce qui concerne les zones urbaines, la pauvretétotale et l’extrême pauvreté ont atteint respectivement20,0 % et 4 % de la population. En ce quiconcerne les zones rurales non indigènes, un peuplus de la moitié de cette tranche de population continueà vivre dans la pauvreté (54,0 %) et une personnesur cinq (22,0 %) se trouve en situation d’extrêmepauvreté. Pour les zones rurales indigènes, lepanorama est encore plus critique étant donné que laquasi totalité de la population vivant dans ces zonesse trouve en état de pauvreté (98,4 %) et d’extrêmepauvreté (90 %) 11 .Inégalité de genre et pauvretéL’inégalité sociale et de genre représente un des défisles plus importants auquel le pays doit faire face pourvaincre la pauvreté et l’exclusion sociale. Actuellement,la pauvreté génère une plus grande vulnérabilitéet davantage d’exclusion parmi les femmes lesplus pauvres et leurs familles et leur donne moins de10 Ministère de l’Économie et des finances, Encuesta Niveles deVida, (Panama, Ville de Panama : 2008).11 Ibid, La Pobreza En Panamá, Encuesta de Niveles de Vida –2003 Principales. Resultados (Edición Revisada), (2005).Source: Enquête de Niveaux de vie, 2008. Ministère de l’Économie et des finances, Panamachances, comparativement aux hommes pauvres,de surmonter la situation. Les niveaux de pauvretédeviennent encore plus inquiétants si l’on considèreles caractéristiques et l’impact différentiel que celle-cia sur les hommes et les femmes selon leur tranched’âge ou leur condition ethnique.Les inégalités de genre sont exprimées surl’ensemble du marché du travail. Selon les chiffresofficiels de 2009, le revenu des femmes par rapport àcelui des hommes était équivalent à 57 %. Bien qu’elleconstituent pratiquement la moitié de la population, ilexiste encore un grand nombre (51,7 %) de femmesd’âge productif qui se trouvent en dehors de l’activitééconomique formelle, facteur important sans nuldoute en situation de pauvreté. Elles continuent d’êtrele groupe le plus vulnérable sur le marché du travail etla plupart de leurs activités ne reçoivent aucune rémunération.Selon l’enquête auprès des foyers réaliséeen 2009, la composition de la population masculineéconomiquement active atteignait 80,9 % alors que laféminine représentait seulement 48,3 %. En 2009, letaux de chômage chez les femmes adultes atteignait9,27 % alors que chez les hommes il était de 5,25 % 12 .Concernant l’éducation, les registres révèlent unmeilleur résultat pour les femmes, avec une moyennede 2 points en pourcentage, supérieure aux hommesen ce qui concerne l’accès à l’enseignement. Lesnouvelles générations de petites filles ont un meilleuraccès à l’éducation que celui de leurs mères et de leursgrands-mères ; cependant, il existe encore des zonesindigènes où l’indice de scolarité des femmes est inférieurà celui des hommes. 13ConclusionL’approche du développement économique de Panamaignore la durabilité et a conduit à la fois à unedégradation de ses ressources environnementales età un impact minimum sur l’amélioration de la vie dela plupart de ses habitants. Déforestation, désertification,pollution de l’eau, accès limité à l’eau potableet installations sanitaires inadaptées sont des problèmesqui portent atteinte à l’environnement et à lasanté des panaméens. Les femmes en particulier sontdurement touchées par les modèles économiquesdestinés avant tout à avantager une élite privilégiée,ses associés et les investisseurs internationaux. n12 Ministère de Contrôle de Panama, Encuesta Continua deHogares 2009.13 Atlas de Desarrollo Humano y Objetivos del Milenio, (2010).<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 151 Panama


PARAGUAYLe pays est à refonderLes modèles de développement appliqués jusqu’à présent dans le pays ont échoué dans leur objectif desatisfaire les besoins de la population. L’environnement est toujours soumis à la dégradation et les inégalitésentre les différents secteurs de la population augmentent. Un nouveau plan de développement est nécessaireafin de mieux articuler les actions de l’État, de la société civile etldu marché tout comme pour refonder le paysdans le sens du bien commun. Il faut alors passer de la protestation à la proposition et démontrer qu’il estpossible, avec la participation de tous, de construire un pays meilleur.Décidons, Campagne pour l’expression citoyenneJosé Guillermo Monroy PeraltaLes modèles de développement mis en place auParaguay ont historiquement dépendu de l’agroexportation.Leurs buts étaient nettement économiqueset ils faisaient toujours appel à la monoculture,à la déforestation constante pour étendreles surfaces de production, à la concentration desrichesses entre peu de mains, à l’appauvrissementet à l’expulsion d’une partie de la population versd’autres pays. Tous ces modèles ratés se sontavérés incapables de résoudre les besoins d’unegrande partie de la population ou de contenir lesgraves dégâts de l’environnement. Leurs échecspeuvent être interprétés comme le résultat de l’articulationinadéquate et incomplète entre l’État, lasociété civile et le marché.Une économie qui appauvritL’économie du Paraguay s’est fondée sur l’exploitationet l’exportation de produits primaires. Cemodèle de développement centré sur l’agriculture,avec une forte dépendance de l’extérieur, a conduità une répartition inégale des terres. C’est ainsi quele recensement agricole de 2008 montrait que lespetites exploitations agricoles de jusqu’à vingt hectaresconstituent 84 % du total, alors que les exploitationssupérieures à 50 hectares représententseulement 9 % du total des unités de productionrurales 1 . L’exode rural constant vers les villes aconduit à l’augmentation des ceintures de misèreautour des grandes villes du pays. Parallèlement lesmouvements paysans ont renforcé leurs demandesenvers l’État et ont exigé la mise en œuvre d’uneréforme agraire.En novembre 2008, le Gouvernement a créé– par le biais d’un décret présidentiel – l’organe Coordonateurexécutif pour la réforme agraire (CEPRA)dont les principaux objectifs sont de coordonneret de promouvoir le développement économique,social, politique et culturel ainsi que de stimuler lagestion des politiques publiques dans les établissementscréés et de contribuer au succès de la réforme1 Gouvernement de la République du Paraguay, Recensementagricole national 2008 Tome I, (San Lorenzo, Paraguay,2009).Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9497100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé083Enfants atteignantla cinquième annéed’école100 100Survivance jusqu’àl’âge de 5 ansagraire. Cependant ses réussites ont été nulles oupratiquement inexistantes 2.L’économie a bénéficié d’une croissance importantependant la période 2003-2008, avec un tauxmoyen annuel de 4,8 %, mais il existe toujours unedistribution inégale des richesses. Pendant cettemême période le chômage a diminué de seulement1,6 %, alors que le sous-emploi a augmenté, passantde 24,2 % à 26,5 %. Ces incohérences entre lacroissance de l’économie et la diminution de certainsindicateurs montrent que la croissance économiquen’a pas généré suffisamment de postes de travail etn’a pas réduit le travail informel 3 .Une société inégaleLes Paraguayens sont environ 6,4 millions, 60 %d’entre eux ont moins de 30 ans et 1,7 % sont indiens; ce sont eux qui souffrent le plus des conditionsd’inégalité dans le pays 4 . Entre 1997 et 2008la pauvreté a augmenté, passant de 36,1 % à 37,9%. Dans les régions rurales la pauvreté a diminué,passant de 51,6 % à 48,8 %, mais la pauvreté urbainea augmenté, passant de 22,5 % à 30,2 %. Lamoitié des personnes considérées comme étantdes pauvres (1,16 million) vit dans des conditions2 Gouvernement de la République du Paraguay, Présidence dela République, Deuxième rapport devant le Congrès national.Période 2009-2010, (Juillet 2010).3 Borda, Dionisio, “Effets macroéconomiques et impact socialde la crise mondiale”, dans le Programme des Nations Uniespour le développement - Secrétariat Général Ibéro-américain,Politiques sociales en temps de crise. Mémoire du SéminaireIbéro-américain (Asunción, Paraguay, les 6 et 7 août 2009).4 Programme des Nations Unies pour le développement.Rapport national sur le développement humain 2008. Égalitépour le développement (Asunción, 2008).98Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 73Éducation100049L'autonomisation100 70 10099Activité économiqueextrêmes 5 . Environ 500 000 Paraguayens ont dûémigrer vers d’autres pays. Selon les données duProgramme des Nations Unies pour le développement(PNUD), pendant 2001-2007 presque 280 000personnes ont émigré principalement vers l’Argentineet, ces derniers temps, vers l’Espagne 6 .L’environnement en dangerLors de la première décennie du siècle, le Gouvernementa mis en place une série de mesures pourrépondre aux besoins environnementaux, parmi elles,le Programme national du changement climatique(2001), la Stratégie nationale et le Plan d’action pourla conservation de la biodiversité 2004-2009 (ENPAB)(2003) 7 , la Politique environnementale nationaledu Paraguay (PAN) (2005) et la Loi des ressourceshydrauliques du Paraguay (2007). En dépit de cesplans et de ces programmes les problèmes environnementauxne cessent de se multiplier. Par exemple,on a enregistré une importante perte de la couvertureforestière, principalement dans la Région Orientale quien 1945 représentait 55,1 % des forêts et qui s’est vue5 Gouvernement de la République du Paraguay, DirectionGénérale des statistiques, enquêtes et recensements, a)Dernières statistiques sur la pauvreté. Enquête permanentedes foyers 2007, (Asunción, août 2008); et b) Gouvernementde la République du Paraguay, Direction Générale desstatistiques, enquêtes et recensements, Amélioration dela méthodologie de mesure de la pauvreté au Paraguay.Résultats 1997-2008, (Asunción, 2009).6 Programme des Nations Unies pour le Développement,Rapport national sur le développement humain 2009. Élargirles horizons. Émigration internationale paraguayenne,(Asunción, 2009).7 SEAM- PNUD, Conservation de la diversité biologique auParaguay: Une proposition du secrétariat de l’environnementpour la gestion des actions, Vol 2, (Asunción, 2006)Rapports nationaux 152 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


éduite à 7,56 % en 2005, entraînant la diminution corrélativede la biodiversité 8 . La leçon à tirer est que lespolitiques environnementales ne peuvent pas servir àgrand-chose dans un contexte de fragilité institutionnelleet de manque de ressources économiques ethumaines, insuffisantes non seulement pour établirles contrôles nécessaires mais aussi pour appliquer laloi et les peines qui s’imposent.Plans de développement 2003-2013Au début de notre décennie, le Gouvernement deNicanor Duarte Frutos (2003-2008) avait établi unplan nommé “Agenda pour un meilleur pays” quienvisageait quatre objectifs stratégiques :• Récupérer la confiance dans les institutions etleurs représentants.• Promouvoir une participation citoyenne activedans la construction des institutions de la démocratie.• Relancer l’économie et générer du travail dansun nouveau modèle de développement durable.• Combattre la pauvreté, la corruption et l’insécurité.Les objectifs ont été regroupés en 14 axes de programmation: 1) Modernisation de l’administrationpublique ; 2) un milieu économique confiable etprévisible pour les investissements ; 3) croissanceéconomique durable ; 4) révolution de l’éducationpour améliorer le capital humain ; 5) priorités et politiquesde santé ; 6) travaux publics et constructionde logements économiques ; 7) énergie pour le développement; 8) défense de l’environnement ; 9)établissement d’un nouveau modèle des relationsinternationales ; 10) développement de nouveauxespaces : État et société ; 11) respect des droits humains; 12) combat contre la pauvreté et l’exclusionsociale ; 13) lutte contre la corruption, et 14) modernisationdes forces de sécurité.Pour mettre ce plan en oeuvre, le Gouvernementa lancé en 2006 la Stratégie nationale de luttecontre la pauvreté. En conséquence de quoi l’investissementpour le développement social est passé de400 millions d’USD en 2002 à 1,507 milliard d’USDen 2007 9 . Le Gouvernement a essayé de moderniserl’administration publique et a atteint une croissanceéconomique moyenne de 4,8 %.Le Gouvernement a également pris en comptel’agriculture dans son Plan national pour le relancementde l’agriculture familiale (2003-2008), qui comprennaitun Programme de soutien pour le développementde petits établissements cotonniers (PRODE-SAL) et un projet appelé Sécurité alimentaire. En 2007le ministère de l’Agriculture et de l’élevage (MAG) amis en place le Fonds de soutien à l’agriculture familiale,qui a non seulement pourvu des incitatifs financiersmais a aussi introduit le Certificat agronomique.Ce programme a permis un soutien direct aux familles8 Ibid.9 Gouvernement de la République du Paraguay, Présidencede la République, Secrétariat Technique de la planification-Secrétariat Général de la Présidence-Secrétariat Privé de laPrésidence, Rapport présidentiel auprès du Congrès de laNation, (Juillet 2008).de paysans, grâce au transfert de 8,43 millions d’USDà 88 948 bénéficiaires 10 .Les efforts réalisés dans ce sens n’ont pas eules effets attendus. En 2005 le Gouvernement a selectionné66 districts prioritaires pour appliquer desprogrammes visant à combattre la pauvreté. En août2008, à la fin de l’administration de Duarte Frutos,ces programmes ne touchaient que 12 000 familles.Pendant cette même période, le chômage a diminué,passant de 7,3 % en 2004 à 5,7 % en 2008, cependantl’emploi informel a augmenté, passant de 24,2% à 26,5 % 11 .En août 2008, Fernando Lugo, de l’Alliance patriotiquepour le changement qui venait d’être créée,assumait la présidence du pays et mettait fin à plusde 60 ans de différents gouvernements du PartidoColorado. Le mois suivant, on établissait le Plan stratégiqueéconomique et social 2008-2013 (PEES),dont l’objectif était d’améliorer les conditions de viede tous les habitants du pays. Ses objectifs stratégiquesse montaient à six 12 :• Poursuivre la voie de la croissance économiqueet augmenter la création de travail.• Renforcer les institutions de l’État afin d’améliorerl’efficacité des politiques publiques.• Augmenter et améliorer les investissementsdans le secteur social, principalement dansl’éducation et la santé, en engageant les dépensespubliques dans le combat contre l’extrêmepauvreté.• Encourager la diversification de la structure deproduction tout en préservant l’environnementet en améliorant l’utilisation des ressourcesénergétiques et humaines du pays.• Stimuler la participation de la société civile et dusecteur privé dans l’économie pour renforcer lesmicro et petites entreprises ;• Harmoniser et coordonner les actions du gouvernementpour soutenir le développement régionaldécentralisé.Après 2010, le Gouvernement de Lugo a élaboré unPlan dénommé “Le Paraguay pour tous et pour toutes2010-2020”. Ce plan comprenait une série d’initiativeset de ressources destinées à résoudre les besoins dela population et à favoriser l’exercice et la jouissancedes droits des citoyens du Paraguay. Dans le cadrede cette politique, un système de protection sociale,nommé “Saso Pyahu”, a été élaboré en tant que stratégiepour atténuer et surmonter l’extrême pauvreté.Pour cela on a établi une série de politiques publiquesdestinées à réduire la vulnérabilité et à améliorer laqualité de vie des familles, principalement dans lescirconscriptions les plus pauvres.10 Gouvernement de la République du Paraguay, Présidence de laRépublique, Secrétariat Technique de la planification-SecrétariatGénéral de la Présidence, Pour un Pays meilleur. 400 jours,Quatrième Rapport de gestion, (juillet-septembre 2004)11 D. Borda, op cit., (le 6 août 2009).12 Gouvernement de la République du Paraguay, ÉquipeEconomique Nationale, Plan Stratégique économique etsocial –PEES- 2008-2013. Propositions pour une croissanceéconomique inclusive socialement au Paraguay, (Paraguay,2008).La priorité du Gouvernement a été d’approfondirles politiques sociales, surtout celles qui sont enrapport avec la lutte contre la pauvreté et la réductiondes inégalités. Les programmes de lutte contre lapauvreté comme Tekoporá, qui réunissait des fondspour le soutien économique des familles dans descommunautés sélectionnées, ont immédiatementété étendus. Le nombre de personnes ayant bénéficiéde ces programmes est passé d’environ 14 000familles en 2008 à 112 000 familles en juin 2010 (uneaugmentation de 80 %) 13 .Jusqu’en 2008 les services de santé du payss’avéraient insuffisants (le système couvrait 65-70% de la population). En août 2008 le modèle dessoins de santé primaires a été défini comme ligne detravail prioritaire. Ceci a permis la construction de503 unités de médecine familiale, donnant accès àla santé à environ 1 500 000 habitants qui en étaientprivées auparavant.Construire un meilleur paysBien qu’aucun développement national contemporainne puisse se passer (particulièrement dansles pays latino-américains) du rôle prédominantde l’État, selon le sociologue et politologue chilienManuel Antonio Garretón 14 , nous nous trouvons actuellementface à l’émergence de développementsplongés dans un contexte transnational. Ceci transformeles relations entre l’État et la société et affaiblitle rôle dirigeant des états. Mais d’un autre côté celaoblige à réactualiser ce rôle si l’on veut garder l’idéede développement et de projet d’un pays. Lors de laconstruction du «Projet de Pays» une grande articulationentre les acteurs sociaux capables de laisserde côté leurs prétentions sectorielles et prêts à s’unirau grand effort de refonder le pays, devient alorsnécessaire. Le cadre des fêtes du bicentenaire del’indépendance du Paraguay peut être une bonneoccasion de le faire.De cette façon, il se peut que l’État paraguayens’engage à résoudre les grands besoins de sa population.La clé de cette construction se trouve dans lesens du bien commun, du destin commun et aussid’une meilleure articulation entre l’État, la sociétécivile et le marché. Pour cela il faut progresser versun agenda plus étendu et plus inclusif, passer de laprotestation à la proposition, et surtout démontrerqu’il est possible de construire un pays meilleur sitout le monde y participe. n13 Sont incorporés de nouveaux bénéficiaires tels que lespersonnes âgées de plus de 65 ans, des handicapés , etc.Source : Gouvernement de la République du Paraguay,Inspection Générale de la République, Direction Générale duContrôle des Ressources <strong>Social</strong>es, Rapport Final. Inspectionau secrétariat d’action sociale “ Programme Tekoporá”,Exercice fiscal 2007, (Asunción, juillet 2009); et Secrétariatd’Action <strong>Social</strong>e. Direction Générale de la Protection <strong>Social</strong>eet du Développement Humain. Programme de transfertsmonétaires dans la coresponsabilité, Rapport Trimestriel 1º,Rapport Trimestriel 2º, (2009).14 Garretón, Manuel Antonio, “Le lien indispensable etproblématique entre partis et démocratie en AmériqueLatine”, dans Programme des Nations Unies pour ledéveloppement. La Démocratie en Amérique Latine. Vers unedémocratie de citoyennes et de citoyens. Contributions audébat, (Buenos Aires : Alfaguara, septembre 2004).<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 153 Paraguay


PÉROUUn désastre environnemental et des efforts minimumsLe modèle mis en œuvre jusqu’à présent, traversé par diverses crises, a saccagé l’écosystème, appauvri la population etgravement pollué l’environnement. L’approche sectorielle et désordonnée de la gestion environnementale et du contrôlede la pollution est faible et limitée. Des mesures structurelles et pratiques ainsi que des normes sont nécessaires dansles régions rurales et urbaines pauvres. Il est nécessaire de renforcer la capacité institutionnelle des acteurs clé, desoutenir les services environnementaux et d’affiner les mécanismes de coordination entre les organismes donateurs.Le Gouvernement doit servir les intérêts de la population et non pas ceux des sociétés transnationales, c’est seulementsous cette condition que le pays pourra surmonter les défis environnementaux qui l’attendent.Conferencia Nacional por el Desarrollo <strong>Social</strong> (CONADES)Héctor BéjarLes oligarchies dominantes à travers l’histoire péruvienneont mis en place des modèles extractifs quiont pillé et saccagé l’extraordinaire diversité écologiqueet les ressources naturelles du pays. La crisedu guano en constitue un exemple. Elle a mis fin àla première période de prospérité économique enraison d’un processus d’exploitation qui a causé,pendant l’administration du président Manuel Pardoy Lavalle (entre 1872 et 1876), une crise majeureen raison de l’épuisement des ressources, entraînantla ruine économique et la paupérisation de lapopulation. La détérioration de l’industrie du guanoa conduit à l’augmentation d’extraction de sel dansla région sud. Ceci a précipité la guerre du Pacifique(1879-1883), dans laquelle le Pérou et la Bolivieont fait cause commune contre le Chili, considérécomme un rival dans la production et l’exportationdu salpêtre. Les Alliés ont perdu la bataille et le Péroua dû céder à son voisin du sud les provinces d’Arica,de Tarapaca et d’Antofagasta. A cours du XXe siècle,les mêmes schémas d’exploitation ont été employéspour la production du cuivre, du caoutchouc, duplomb et du zinc 1 .La surexploitation de ces ressources déclencheinvariablement un boom et un bien-être économiqueà court terme suivie irrévocablement d’un effondrement,mettant en évidence le manque de durabilitétotale de ces pratiques extractives. La situation s’estaggravée car ce qui incite et maintient les modèlesutilisés par le Gouvernement n’est pas la préoccupationpour le bien-être de la population péruvienne,mais la spéculation des puissances mondiales sur ​les prix internationaux, soudoyant les politiciens etfaisant taire toutes les protestations.L’extractivisme de nos joursAujourd’hui, comme au XVIe siècle, les conquistadoresavides d’or, de cuivre, de bois et de feuillesde coca sont confrontés aux Indiens. Mais les vainqueursne sont pas venus avec des chevaux, deschiens et des arquebuses, mais avec de l’argent, desforeuses et des pelles mécaniques pour trancher les1 Instituto del Tercer Mundo (ITeM), “Pérou”, dans Guía delMundo 2010 (Montevideo: Editions G3, 2009), p.443.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 92100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’école100 10083Survivance jusqu’àl’âge de 5 ansmontagnes et dévorer les lacs. L’allié des entreprises,Alan Garcia, l’actuel président du Pérou, a ordonné àl’armée et la police de « tirer d’abord et de réfléchirensuite », si quelqu’un protestait 2 .Plus de 274 millions de tonnes de poissons ontété pêchées entre 1950-2001 3 , provoquant la quasidisparition de l’”anchoveta”, un poisson de la famillede l’Engraulidae (qui comprend également différentsanchoix). À son apogée (dans les années 1970), lepays était devenu la première puissance de pêcheau monde, multipliant les usines de farine et d’huiled’anchoveta qui ont gravement détérioré l’environnementpar leurs déchets. La pêche intensive a finipara épuiser les stocks jusqu’aux limites de l’extinction;durant les décennies suivantes, l’arrêt de lapêche industrielle a permis à de nouveaux bancs depoisson de se reformer dans l’océan. Actuellement,la production de farine d’anchoveta est en augmentation,ce qui provoque un nouveau recul du nombrede ces poissons, mais également, une pollution desusines qui est en train d’atteindre des niveaux alarmantssurtout dans les provinces de Paracas, Paita,Chimbote et Parachique 4 .2 Ardito Vega, Wilfredo, Perú: la criminalización de laprotesta en el gobierno de Alan García, (Servicios enComunicación Intercultural Servindi, 2008), .3 Banque mondiale, Análisis ambiental del Perú: retos para undesarrollo sostenible, (Lima: Unité pour le développementdurable - Région d’Amérique latine et les Caraïbes, Mai2007).4 Quesquén, Mercy, El caso de la anchoveta en Perú, < www.monografias.com/trabajos45/mercado-anchoveta-peru/mercado-anchoveta-peru.shtml>.8698Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 69ÉducationL'autonomisationActivité économiqueA l’heure actuelle, pratiquement toute l’industriede la pêche s’est lancée dans la production de farineet d’huile. Cependant, puisque ce poisson est richeen vitamines A et D, en plus de l’iode et de l’oméga3, il pourrait aider à résoudre les problèmes alimentairesde la population, y compris la malnutrition infantile.La pêche ne représente que 8 % des besoinsalimentaires du pays, mais cela est indéfectiblementlié à l’utilisation de cette ressource à d’autres fins,indiquant une fois de plus que le modèle de développementqui est mis en œuvre ignore les besoins dela population et de l’environnement, se révélant ainsinon durable à long terme 5 .Dans le même temps, de grandes rivières dela jungle sont draguées afin d’y trouver de l’or, desmontagnes d’ordures reposent sur les Andes et dedangereux dépôts de plomb polluent le principal portdu pays. Les réserves marines disparaissent à causede l’installation de ports destinés à l’industrie minièreet du gaz. Les rivières sont empoisonnées par leseaux usées urbaines sans parler de l’arsenic et dumercure utilisés pour précipiter l’or, du kérosène,ainsi que l’acide sulfurique qui précipite la pâte decoca pour fabriquer de la cocaïne.Les défis environnementauxL’Amazonie, avec ses 68 millions d’hectares de forêtsnaturelles couvrant 35 pour cent du territoire péruvien,est la huitième étendue forestière du monde etla deuxième d’Amérique latine. En outre, 300 000hectares de forêts naturelles subsistent toujoursdans les hauts plateaux andins. Cependant, après5 Ibid.100430100 69 10096Rapports nationaux 154 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


des décennies de consommation de charbon de boispour les foyers et les restaurants, et d’agriculturesur brûlis par les paysans, la couverture forestièrede la mangrove et de la forêt sèche et sub-humideest épuisée. Le taux de déforestation est de 150 000hectares par an 6 .Le pays est situé dans une des zones sismiquesles plus actives de la planète et est affectée par lesconditions océaniques et atmosphériques causéespar El Niño. Ce courant chaud des régions équatorialesprovoque une évaporation, des pluies prolongéeset des inondations. L’ignorance du danger et lemanque de planification dans l’aménagement territorialfait que les personnes s’installent dans les litset sur les berges des rivières, au pied des montagnesenneigées ou sur leurs pentes. En conséquence,l’incidence des inondations, des tremblements deterre, de la grêle, de la neige et de la sécheresse estpresque multipliée par deux par rapport au restede l’Amérique latine, tandis que le taux de mortalitéest le plus élevé du continent. Selon un rapportde la Banque mondiale, plus de deux millions depersonnes ont été touchées par des catastrophespendant la période 2000-2004 7 .La réponse du GouvernementDepuis 1940, plusieurs entités ont été créées et rénovéesdans le but de traiter les problèmes de santéenvironnementale. Actuellement, la Direction généralede la santé environnementale (DIGESA) est leseul organisme gouvernemental ayant un mandatrégulateur pour traiter les problèmes de santé environnementale.Un ministère de l’Environnementa été créé et des études d’impact environnementalsont devenues obligatoires pour l’approbation desactivités économiques.Durant les dernières années des lois exigeantdes évaluations d’impact environnemental (EIE) ontété adoptées, tout en renforçant le cadre juridiquedu secteur forestier. Le Système national des zonesnaturelles protégées (SINAP comprend par exemple61 espaces naturels et couvre 17,66 millions d’hectares,représentant 13,74 % de la superficie totale dupays. Le Fonds des zones naturelles protégées parl’État (PROFONANPE), créé en 1992, a collecté desfonds et les a utilisés pour mobiliser des ressourcessupplémentaires estimées à 90,6 millions d’USD,qui sont canalisés chaque année pour les effortsde conservation (ministère de l’Environnement).Toutefois, l’absence de mécanismes systématiquespour identifier les priorités persiste.Le cadre institutionnel péruvien attribue lesresponsabilités réglementaires du contrôle de la pollutionet de la gestion environnementale à des unitéscréées dans le secteur Énergie et Mines qui élaboredes normes basées sur l’utilisation des Évaluationsd’impact environnemental (EIE), la Gestion environnementaleet les Plans de conformité et de gestionde l’environnement (PAMAS), les Limites maximalesadmissibles (MPLS) et les normes environnementalesspéciales dans les sous-secteurs de l’électricitéet des hydrocarbures. Des unités environnementalesau sein des ministères de la Production, du Transportet des Communications, du Logement, de laConstruction et de l’Assainissement ont égalementété établies.Mais cela ne représente pas grand chose par rapportà l’enjeu de la détérioration continue et de la destructiondu pays causée par d’énormes puissancesmondiales. Malgré ces efforts, l’approche sectorielleet désordonnée du Pérou vis-à-vis de la gestion environnementaleet du contrôle de la pollution, restefaible et sa capacité institutionnelle est limitée. Il y aun manque de coordination globale et de clarté dansl’adoption des processus environnementaux.Ce qui est attenduDepuis 1980, les glaciers du Pérou ont perdu uncinquième de leurs calottes glaciaires. Dans cinquanteans, il n’y aura plus assez d’eau pour boireou pour irriguer les champs, le système hydroélectriqueactuel qui approvisionne en énergie les villeset les industries ne sera plus soutenable 8 . En raisonde l’augmentation des températures de la mer, lephytoplancton et les anchovetas, qui constituent ledébut et le maintien de la chaîne alimentaire, vonts’enfoncer dans les profondeurs à la recherche defraîcheur ou vont migrer vers d’autres zones de laplanète, ce qui pourra causer l’extinction de nombreusesespèces. L’altitude où se produisent lespluies va également se modifier, il ne pleuvra plussur les sommets mais uniquement sur les versants,provoquant des inondations, des endiguements etdes glissements de terrain incontrôlables. Les ni-veaux élevés de l’eau vont recouvrir les criques despêcheurs et les plages de plaisance et en raison desdéséquilibres dans les températures et des taux deprécipitation, une grande partie de la forêt amazoniennedeviendra désertique 9 .Pour minimiser l’impact de ces catastrophesattendues, il est nécessaire de fournir une réponseintégrée aux catastrophes naturelles en mettant l’accentsur la prévention, régulant les activités de l’exploitationminière formelle et informelle ainsi que del’exploitation forestière et de la pêche. Ces activitéssont entre les mains de grandes sociétés ou danscelles de centaines de milliers de mineurs « informels». Pour réduire la vulnérabilité face aux catastrophesnaturelles, il est recommandable d’adopterimmédiatement des mesures structurelles, des techniquesde construction appropriées, des pratiqueset des normes dans les zones urbaines pauvres etparmi les populations rurales.Le Pérou peut produire de l’électricité d’originehydraulique et éolienne, il peut passer des combustiblesfossiles au gaz naturel ainsi que gérer lesdéchets, conserver les forêts et éviter la poursuitede la déforestation. Il sera nécessaire d’étudier lesimpacts potentiels du changement climatique enprenant comme référence les dommages et lesconséquences des diverses variantes telles que ElNiño et ses effets. Il est nécessaire de renforcer lescapacités institutionnelles des acteurs clé en définissantclairement les rôles et les fonctions du ministèrede l’Environnement, de soutenir les efforts nationauxpour valoriser la biodiversité et les services environnementauxen s’appuyant sur l’avantage comparatifdu Pérou en matière de biodiversité et d’affiner lesmécanismes de coordination entre les organismesdonateurs.Le Fonds national pour les aires protégéespar l’État (PROFONANPE) doit être complété parle Fonds général de l’environnement subventionnépar les impôts payés par les entreprises. L’INRENAdevrait mener ses activités à travers des « Conseilsdes bassins » impliquant les organisations de base.Toutes ces réformes nécessitent une déterminationet une volonté politique, le Gouvernement devrait seconcentrer sur le présent et sur l’avenir du pays plutôtque de servir les corporations et de criminaliserles protestations des communautés indigènes. n6 El Comercio, «Le Pérou perd annuellement 150 millehectares de forêts en raison de la déforestation », (juillet2010), .7 Banque mondiale, op.cit.8 Vargas, Paola, El cambio climático y sus efectos en elPerú, (Lima: Banque centrale de réserve du Pérou, SérieDocumentos de Trabajo, juillet 2009).9 Ibid.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 155 Pérou


PHILIPPINESOuvrir la voie vers la durabilitéLutter contre la vulnérabilité de l’environnement déjà dégradé du pays est aussi important que de faire croîtrel’économie. En outre, les Philippines ont dépassé depuis longtemps les 0,4 hectares par personne requispour satisfaire la capacité alimentaire optimale. Les efforts de décentralisation visant à créer des centres decroissance en dehors de Manille sont encore incapables de briser la structure de pouvoir et de ressourcescentrée sur l’élite urbaine. Le Gouvernement doit faire les efforts nécessaires pour trouver des façons - encoopération avec les agriculteurs, les ONG, les médias, les écoles et le système national de recherche agricole– de garantir la sécurité alimentaire et la durabilité environnementale à long terme.Mouvement philippin de reconstruction rural (PRRM)<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> PhilippinesIsagani R. SerranoEn 2010, inspirée par le second inventaire d’émissionde gaz à effet de serre des Philippines, la présidente GloriaMacapagal-Arroyo avait annoncé pompeusementque le pays était désormais une véritable décharge decarbone. L’intensité carbone, exprimée par les émissionsde CO2, peut être un indicateur relatif du niveauet de la nature du développement, mais il y a beaucoupd’autres facteurs à considérer. Les indicateurs varientlargement selon ce que les gens apprécient le plus.La faible émission de CO 2est un indicateur imprécisde développement durable. Un indicateur isoléplus sensible du bien-être d’une société est probablementle taux de mortalité infantile, qui révèle laqualité de la nutrition et des soins de santé. En outre,le taux de mortalité infantile est lié à d’autres indicateursde base, tels que la qualité des ressourcesen eau, le logement et l’éducation et, notamment, leniveau d’éducation des femmes. Il peut égalementêtre un indicateur de l’échec de l’État 1 .Dans le casdes Philippines, les indicateurs de mortalité infantilesont décourageants : le taux de mortalité des enfantsde moins d’un an était de 26 pour 1000 en 2009 etcelui correspondant aux enfants de moins de cinqans était de 33 pour 1000 2 . Bien que ces chiffresmontrent une certaine amélioration par rapport auxdonnées de 1990 (41 pour 1000 3 et 34 pour 1000 4 ,respectivement) ; comme on peut le voir ci-dessous,les problèmes du pays restent structurels.Pauvreté et inégalité : toujours la mêmehistoireMalgré le rétablissement de la démocratie en 1986et l’ultérieure succession des régimes qui ont promisd’éradiquer la pauvreté et de réduire les inégalités,et bien que l’économie ait connu une certainecroissance, le pays montre encore un taux élevé de1 G. King and L. Zeng, “Improving Forecasts of State Failure,”World Politics, Vol.53, (juillet 2001), pp. 623-58.2 UNICEF, At a Glance: Philippines, .3 Ibid.4 Organisation mondiale de la santé, Mortality Country FactSheet 2006: Philippines, .Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 8662100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé081Enfants atteignantla cinquième annéed’école100 100Survivance jusqu’àl’âge de 5 anspauvreté et une forte inégalité associés a une dégradationpersistante de l’environnement.Alors que la pauvreté est passée de 42 % en1991 à 32,9 % en 2006, les poches de pauvreté n’ontpas changé : les personnes en milieu rural, les sansterre, les communautés autochtones/tribales, les musulmanset les femmes. L’inégalité a à peine diminuépendant cette même période : elle était de 0,4680 en1991 et elle est de 0,4580 en 2006 5 .Ce chiffre est élevépar rapport à la plupart des voisins asiatiques des Philippinesindiquant en cela que le pays est légèrementmieux loti que la plupart des pays d’Amérique latine(la région la plus inégale de la planète). En outre, ilexiste des inégalités importantes entre les différentesrégions, provinces et municipalités du pays.L’écart entre les 20 % les plus riches et les pluspauvres se creuse en dépit de l’adoption de mesurescomme la réforme agraire et l’autonomie locale. Les régionsoù la distribution des revenus est la plus inéquitablesont la partie centrale et la partie orientale de Visayas, lapéninsule de Zamboanga, le nord de Mindanao et Caraga.Ces régions ont des coefficients de Gini supérieurs à 0,44.Plus de 50 % des 20 provinces les plus pauvres appartenaientà Mindanao en 2003 et 2006, et en 2006 le taux depauvreté le plus élevé se trouvait à Tawi-Tawi.Dette et corruption - les cauchemarsdu développementLe Gouvernement obtient les deux tiers de ses revenusprincipalement des taxes sur les salariés à revenufixe. Depuis de nombreuses années le Gouvernement5 Les inégalités ou les disparités de revenu sont généralementmesurées par le coefficient de Gini. Un coefficient de Gini dezéro indique une égalité parfaite alors qu’un coefficient de 1signifie une inégalité totale.97Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 76Éducation100061L'autonomisation100 67 100100Activité économiquegénère systématiquement plus de dépenses que derecettes. Il établit d’énormes budgets annuels et compenseles déficits par le biais de l’emprunt. Il a pourobjectif de plafonner le déficit budgétaire de 2011 à3,2 % du produit intérieur brut (PIB), ce qui équivaut àenviron 290 milliards de PHP (6,69 milliards d’USD).L’augmentation progressive de la dette et duservice de la dette est un fléau pour le développementaux Philippines. La formidable dette du pays estpassée de 701 milliards de PHP en 1990 à 4 400 milliardsde PHP en 2009 (16,2 millions d’USD à 101,5milliards d’USD) avec une augmentation constante,à l’exception d’une légère baisse en 2006 et 2007.Cela équivaut à plus de 50 % du PIB du pays. Le ratiodette/PIB demeurait élevé et atteignait 57,7 % à lafin de 2009, même s’il avait été de 63,8 % en 2006. 6. En septembre 2010, chacun des 92,2 millions dePhilippins devait 47.039 de PHP (1091 USD) auxcréanciers locaux et étrangers.Environ un tiers du budget national est consacréau paiement des intérêts et du capital principal de ladette croissante du pays. Cela signifie la perte d’untiers des ressources qui pourraient être consacréesà lutter contre la pauvreté. En outre, la corruption aété systématique et a déclenché la plupart des changementsde régime depuis l’époque du présidentMarcos. En 2004, Macapagal-Arroyo a déclaré quela corruption était en train d’étrangler les Philippineset a appelé les citoyens à « unir leurs efforts pourextirper ce mal ». Cependant, ce fléau est loin d’êtreéradiqué et il continue à entraver le développementdes Philippines.6 C. M. Reinhart and K. S. Rogoff, “Debt to GDP Ratios” inThis Time is Different: Eight Centuries of Financial Folly(Princeton: Princeton University Press, 2009), .Rapports nationaux 156 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


Le besoin de briser la structure centréesur le milieu urbainLa géographie économique du pays montre un développementtrès inégal et une distribution inéquitabledes richesses. Les villes principales absorbent laplupart des ressources. Par conséquent, Il n’est passurprenant que les petites sommes d’épargne déposéesdans des banques rurales lointaines finissent engénéral dans les grandes banques à Makati 7 et soientensuite prêtées à de gros emprunteurs qui préfèrentinvestir dans des zones déjà très développées.Le conflit de Mindanao est représentatif de la situationgénérale de développement du pays. La violence aéclaté pour la première fois dans les années 1960 lorsquela minorité musulmane - connue comme « les Moros »- a déclenché une lutte armée pour l’indépendance desa patrie ancestrale, dans le sud. Les combats se sontintensifiés en 2008 après un processus de paix qui a duréune décennie, mais en juillet 2009 une trêve a été signée.Il est important de souligner qu’une grande partie dela violence est alimentée par la pauvreté profondémentenracinée après des décennies de sous-investissement.Mindanao, une région extrêmement riche et très rarementaffectée par les typhons, pourrait parvenir à la prospéritépar ses propres moyens, mais elle a échoué dansquelque chose d’aussi fondamental que les Objectifs duMillénaire pour le développement (OMD), domaine danslequel elle n’a fait aucun progrès. La pauvreté et les inégalitésqui continuent de ravager cette région, notammentles zones de Moro et Lumad (communautés autochtones),sont enracinées dans des injustices historiqueset des discriminations qui remontent au passé colonial etsont perpétuées par une succession de régimes post-coloniaux.Ces régions sont paralysées par des structureséconomiques, politiques et socioculturelles injustes quidoivent être modifiées sans délai.La structure de croissance et la création de richessedans les Philippines est en contradiction avecle mantra d’une croissance étendue et inclusive. Lestentatives visant à créer des centres de croissanceéloignés de Manille n’ont aucune chance de réussir àmoins que le Gouvernement ne modifie la structureactuelle du pouvoir et des ressources centrés sur lesélites urbaines. Bien qu’il s’agisse d’un cap juridiquehistorique, le Code du Gouvernement local de 1991n’a pas encore abouti à la décentralisation du pouvoirélitiste. Les ressources et l’autorité doivent êtredélibérément transférées des régions riches vers lesrégions les plus pauvres.Croissance démographique et vulnérabilitéLa capacité de charge est un problème réel dans un archipelmontagneux avec une population qui est passéede 62 millions en 1990 à environ 95 millions en 2010,et qui devrait dépasser les 100 millions en 2015. Bienque le taux de croissance de la population ait diminuéet soit passé de 2,36 % par an en 2000 à 2,04 % lors durecensement de 2007, il est encore l’un des plus élevésd’Asie. Ce taux de croissance démographique élevérend le pays vulnérable. Pour chaque personne, 0,004hectare serait nécessaire pour satisfaire les besoinsalimentaires de manière optimale, et cette possibilité7 Le centre financier des Philippines et une des villes quiforment la région métropolitaine de Manille.TABLeAu 1Incidence de pauvreté sur la population (%), par région, 1991-2006Région 1991 1994 1997 2000 2003 2006Philippines 45.0 40.6 36.8 33.0 30.0 32.9Région de la capital nationale 16.7 10.5 8.5 7.8 8.9 10.4Région administrative de la Cordillera (RAC) 55.4 56.4 50.1 37.7 32.2 34.5Région I, Ilocos 55.3 53.6 44.1 35.3 30.2 32.7II, Vallée du Cagayan 48.9 42.1 38.0 30.4 24.5 25.5III, Luzon central 35.5 29.2 18.5 21.4 17.5 20.7IV-A CALABARZON19.1 18.4 20.943.2* 34.9* 30.0*IV-B MIMAROPA 45.3 48.1 52.7Région V Bicol 61.3 60.8 57.0 52.6 48.6 51.1VI, Visayas occidental 52.9 49.9 45.9 44.5 39.2 38.6VII, Visayas central 46.7 37.5 38.9 36.2 28.3 35.4VIII, Visayas oriental 47.1 44.8 48.5 45.1 43.0 48.5IX, Péninsule de Zamboanga 54.4 50.6 45.5 44.8 49.2 45.3X, Nord de Mindanao 57.4 54.1 52.7 43.8 44.0 43.1XI, Région Davao 51.6 45.6 44.3 33.3 34.7 36.6XII, SOCCSKSARGEN 63.1 58.7 55.8 46.8 38.4 40.8XIII, Caraga -** -** -** 51.2 54.0 52.6Région autonome dans la partie musulmanede Mindanao (RAMM)56.0 65.3 62.5 60.0 52.8 61.8*La Région IV n’a pas encore été divisée entre les Régions IV-A et IV-B. ** Caraga a été créée le 23 février 1995.Source: NSCB, 2011 9 .est depuis longtemps dépassée 8 . La question démographiqueest également un reflet de la pauvreté et del’inégalité. Ceux qui ont plus d’argent et un avenir plussûr ont tendance à avoir moins d’enfants ; les pauvresont davantage d’enfants et dépendent de leur descendancequi forme un actif productif et la garantie d’unsystème de retraite traditionnel pour leurs vieux jours.Bien que les terres aptes à la culture soient en diminution,l’agriculture durable pourrait être en mesure denourrir ces millions d’habitants. Pour que cela soit possible,le Gouvernement doit travailler en collaborationavec les agriculteurs, les ONG, les médias, les écoles etle système national de recherche agricole pour trouverdes façons de parvenir à la sécurité alimentaire et à ladurabilité environnementale à long terme.ConclusionLutter contre la vulnérabilité de l’environnement déjàdégradé des Philippines est aussi important que lacroissance économique. Le choix entre développementet environnement est une fausse alternative.Les besoins humains ne peuvent pas être satisfaitsdans un environnement appauvri, et les êtres humainsen situation de pauvreté ne se soucient pas deprotéger l’environnement.Pour un archipel comme les Philippines, le faitde ramener la couverture forestière du pays, actuelle-8 L’empreinte écologique (EE) est un indicateur deconsommation des ressources naturelles renouvelables parune population humaine. L’EE d’un pays est la superficietotale de terre productive ou de mer nécessaire à laproduction de toutes les cultures, viande, fruits de mer, boiset fibre qu’il consomme pour soutenir sa consommationd’énergie et développer ses infrastructures. Pour calculerle nombre d’hectares disponibles par habitant, il fautadditionner les terres biologiquement productives parhabitant dans le monde entier (la terre arable, les pâturages,les forêts, les terrains bâtis et l’espace maritime), en excluantl’espace nécessaire aux 30 millions d’espèces avec lesquellesl’humanité partage la planète.ment réduite à 27 %, à la proportion idéale de 40 % estessentiel. L’exploitation minière et d’autres industriesextractives devront être mises en attente ou fonctionnersous le contrôle le plus strict. A condition que leur étatde dégradation actuel soit amélioré, les zones côtièreset marines offrent des possibilités qui pourraient aiderla nation à se récupérer de catastrophes qui affectentla sécurité alimentaire et les établissements humains.Le fait de maintenir la dette à un niveau soutenableet de contrôler l’hémorragie résultant de sonremboursement sont des facteurs essentiels pourrégler la question de la source des fonds nécessairespour le développement. Le Gouvernement empruntedes sommes importantes pour financer ses engagementsenvers les OMD. Ses principaux programmesanti-pauvreté, comme le transfert monétaire conditionnel,dépendent de l’argent emprunté et contribuentà aggraver la situation fiscale du pays. La corruptionest également symptomatique de l’état degouvernance, et les mesures permettant d’y mettre finreprésentent donc une part très importante de la solutionau problème de développement aux Philippines.Entre 1972 et 2010, les Philippines sont passéesde la démocratie à la dictature pour revenir ànouveau à la démocratie. La participation populairea été un facteur clé. Cette participation a prisdifférentes formes qui consistent en mouvementspour la plupart pacifiques abordant de nombreusesquestions, y compris un changement de régime.Pourtant, il semble qu’après tous ces changementsla situation reste la même. Le pays n’a pas encoreconnu de véritable autonomisation des masses quisoit au niveau de celle de l’élite. Lorsque ce momentarrivera, il y aura une meilleure garantie de gouvernancepour un développement durable. n9 National Statistical Coordination Bureau, 2009 PhilippinesPoverty Statistics, (8 février 2011), .<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 157 Philippines


POLOGNENouveau Pacte VertLe Gouvernement prône un nouveau modèle de développement néolibéral qui mène à une stratification socialeprogressive et à une augmentation de la pression exercée sur l’environnement. Le Nouveau pacte vert pourraitreprésenter une alternative ayant pour objectif d’aborder le réchauffement global et les crises financièresmondiales à travers la mise en œuvre d’une série de mesures politiques destinées à assurer le développementdurable au niveau mondial. La croissance écologique et les programmes de protection environnementaledoivent agir comme des catalyseurs pour offrir des emplois décents et des moyens d’existence durables auxcitoyens polonais les plus défavorisés.ATD Fourth World PolandPierre KleinMonika KalinowskaThe Green InstituteDariusz SzwedIndice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9810096Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleIndice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 76100L'autonomisation52Introduction 1La Pologne est l’un des rares pays ayant inclus leconcept de développement durable au niveau constitutionnel.Conformément à l’article 5 de la Constitutionpolonaise : « La République de Pologne sauvegardel’indépendance et l’inviolabilité de son territoire, garantitles libertés et les droits humains et du citoyen ainsique la sécurité des citoyens, sauvegarde le patrimoinenational et assure la protection de l’environnement ens’inspirant du principe de développement durable ».Paradoxalement, la Pologne est également unpays où les allusions au concept de développement durabledans le débat politique sont rares. En juillet 2000,par exemple, la stratégie « Pologne 2025 – Stratégie àlong terme de développement durable » a été adoptéepar le Conseil des ministres avec une intention évidentede « garantir la croissance du bien-être des famillespolonaises ». Selon certains experts, néanmoins, sonimpact général est très réduit : « Elle n’a reçu aucuneréponse de la société et aujourd’hui personne ne semblese souvenir de son existence. Le citoyen moyen neconnaît pas le concept de développement durable, etn’a pas la moindre idée de savoir de quoi il s’agit ». Lesauteurs sont allés jusqu’à dire que même les personnesqui ont entendu parler du développement durable nele conçoivent souvent que comme un synonyme deprotection environnementale 2 .En juillet 2009 le Gouvernement a publié Pologne2030. Les défis du développement 3 , qui a été conçuen tant qu’analyse principale et ligne stratégique pourcibler le développement des 20 prochaines années.Rédigé dans un jargon difficile à saisir, ce documentfavorise « le modèle de polarisation et de diffusion »au détriment du modèle de développement durable.Élaboré par une équipe de conseillers stratégiquespour le Conseil des ministres dirigé par le ministre Mi-1 Ce rapport est fondé en partie sur D. Szwed, “¿Green NewDeal in the World, in Europe, in Poland?” in D. Szwed (ed.),The Green New Deal in Poland, (2011), .2 K. Kostrzewa y R. Piasecki, “Approaches to SustainableDevelopment in Poland”, L’Europe en formation nº 352, (2009).3 Disponible sur : .99Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0100 100Survivance jusqu’àl’âge de 5 anschal Boni, ce rapport n’a pas été discuté dans sa phaseinitiale et des projets alternatifs n’ont pas non plus étéenvoyés, de sorte que les consultations devenaientinutiles. La faculté de définir l’orientation de l’avenirpays est donc revenue à un petit groupe 4 . D’autre part,dans une interview pour Polska l’un des co-auteurs adéclaré que la création de ce nouveau modèle a pourpoint de départ l’observation suivante : « en réalité, ledéveloppement durable n’est qu’un mythe » 5 .La non durabilité et le modèle néolibéralLe manque de mise en œuvre (ou plutôt de compréhension)du principe de développement durable figurantdans la Constitution polonaise peut s’illustrer par le faitque les gouvernements ultérieurs ont supposé l’existenced’un conflit entre l’environnement et l’économie,ou entre l’environnement et la société. Les voies d’approchede la situation actuelle, du moins telles qu’ellesont été présentées par les principaux politiques, semblentavoir été peu nombreuses. « L’économie d’abord,mon sage compatriote », a déclaré Bronislaw Komorowski,l’actuel président de la Pologne, lors d’un débatsur l’avenir de l’économie polonaise et européenne 6 .Dans ses explications du modèle de polarisation-diffusion«, Pologne 2030 a déclaré que « en plusd’encourager la croissance des polarités (c’est-à-diredes processus de polarisation), nous devons avanttout créer les conditions pour la diffusion, absolumenttout ce qui peut épauler le processus d’égalisation des4 E. Charkiewicz, “Rozwój społeczny – próba diagnozy,” RaportKrajowy Polskiej Koalicji, (<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>, 2009).5 A. Koziński, “Wojnarowski: Zrównoważony rozwój kraju totylko mit,” interview réalisée dans Polska, (29 juin 2010).6 Lors de l’inauguration du IIe Congrès économique européen,(31 mai 2010).99100 75 100100Éducation0Activité économiquechances en termes d’éducation, améliorer l’accessibilitédes transports partout dans le pays, éliminer la menacede l’exclusion numérique, améliorer les niveaux d’intégrationsociale, structurer et appuyer une solidaritégénérationnelle, et offrir un sens de la capacité poursatisfaire les ambitions individuelles » 7 . Toutefois,les auteurs ont aussi défini la croissance économiquecomme étant une base solide pour le développement dela Pologne, comptant sur « une administration efficaceet un potentiel démographique », et ils signalent que« la politique actuelle de l’UE, en matière d’énergie etde sécurité climatique, est axée vers la consolidation del’Europe comme leader mondial dans le domaine du développementdurable. Cela ne peut se faire, cependant,au détriment de l’économie polonaise » 8 .C’est ici que réside le plus grand leurre de la stratégiede développement du Gouvernement : les polonaisdoivent se serrer la ceinture pour obtenir dans 20 ans unétat d’équilibre économique et social. Mais ce modèle aen fait provoqué une plus grande stratification sociale,une diminution du capital social et une pression accruesur l’environnement mesurée par l’usage total des ressourcesénergétiques et non renouvelables 9 .L’idéologie dominante a été parfaitement décritepar Edwin Bendyk dans l’épilogue de Écologie : guide7 Équipe de conseillers stratégiques du chef du gouvernement,Poland 2030. Development challenges: Report summary(Pologne 2030. Défis du développement, Rapport annuel), p.4.8 Ibid.9 Un des indicateurs de l’utilisation de l’énergie totale, c’estl’empreinte écologique. En 2007 il y avait 1,8 hectares globaux(hag) de l’espace biologiquement productif pour chaque habitantde la Terre. Entre 2003 et 2007 l’utilisation en Pologne est passéede 3,3 à 4,35 gha – soit une moyenne de 241 % de l’écoespacedisponible au niveau mondial pour chaque pôle. Si tout le mondeconsommait ainsi, l’humanité aurait besoin de 2,5 planètes.Rapports nationaux 158 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


de la critique politique. Tenant compte du fait que lediscours dominant sur le développement repose surle néolibéralisme et le post-colonialisme, Bendyka écrit : « Le premier [le néolibéralisme] signifie lasuprématie d’une politique de croissance se servantdes outils du marché comme d’un espace pour desnégociations de préférences privées, juste protégéessans être façonnées par l’État qui, lui, se libère autantqu’il le peut de l’administration des relations interpersonnelles.En tout cas, cela ne peut se produireque sous l’influence d’engagements externes. Cetavis, exprimé par des idées comme celles du programmeclimatique et énergétique ou Natura 2000,est traité comme s’il s’agissait d’un châtiment divin,le prix à payer pour devenir membre du club des paysdéveloppés. En fait, nous sommes un pays postcolonialen développement qui a été historiquementdétérioré et qui continue à l’être par le Centre quiessaie d’appliquer des solutions préjudiciables auxaspirations et qui se voient reflétées dans le désir demaintenir la croissance économique » 10 .Les notions néolibérales d’un marché sansrestrictions et d’une croissance économique infiniemesurée sur le PIB commencent à être usées. Le PIBne reflète pas la réalité, car il ne tient pas compte dufaible niveau de capital social du pays, du travail domestiquenon rémunéré (effectué généralement parles femmes) et de l’augmentation de la stratificationdu revenu. Il ne tient pas compte non plus de la dévastationenvironnementale, de l’extinction de planteset d’animaux, de la croissance démographique ni duplus grand défi du XXIe siècle — le besoin de mettreen œuvre un accord climatique mondial, investissementmajeur pour notre avenir commun, ainsi que l’asignalé l’économiste Nicholas Stern 11 .Le nouveau pacte vert : une alternativeLe concept de Nouveau pacte vert a surgi pour la premièrefois dans un rapport de la Fondation NouvelleÉconomie 12 en juillet 2008 en réponse à la crise économiqueimpulsée par les bulles du crédit, le changementclimatique mondial et la hausse des prix du pétrole.Les auteurs indiquaient que pour éviter une profonderécession comparable à la Grande Dépression, ils’avérait nécessaire de procéder à des changementsstructuraux-clé dans les systèmes financiers nationauxet internationaux, y compris le système fiscal,et d’effectuer également des investissements stablesdans les économies énergétiques et dans la productiond’énergie provenant de sources renouvelables.Le Nouveau pacte vert émet un ensemble de propositionspolitiques qui invitent à aborder des sujetstels que le réchauffement mondial et les crises financières,en garantissant le développement durable eten créant une économie de faible émission. Il soutientaussi le développement de technologies modernesrespectueuses de l’Homme, de l’environnement et du10 E. Bendyk, “Ekologia Polityczna dla Polski, czyli w stronęZielonego Okrągłego Stołu,” in Ekologia: Przewodnik KrytykiPolitycznej, Wydawnictwo Krytyki Politycznej, (Varsovie. 2009).11 N. Stern, Globalny Ład. Zmiany klimatu a powstanie nowejepoki, postępu i dostatku, Wydawnictwo Krytyki Politycznej,(Varsovie. 2010).12 Green New Deal Group, A Green New Deal, New EconomicsFoundation, (2008).climat, visant l’amélioration de l’efficacité énergétiqueet une meilleure utilisation de l’énergie renouvelable, lamodernisation du secteur du bâtiment et la promotiond’édifices autonomes et durables, le développementde systèmes ferroviaires respectueux de l’environnementdans le continent et le changement des prioritésde la Politique agricole commune de l’UE. De mêmeque les réformes des années 30, le Nouveau pacte vertprête un rôle actif aux pouvoirs publics dans la miseen œuvre des politiques, de développement durabledans ce cas précis.En mars 2009 avant les élections du Parlementeuropéen, le Parti vert européen a publié son manifeste,Un Nouveau Pacte vert pour l’Europe, qui développede façon significative ce concept. Le résumé signaleque : « Puisque les défis économiques, sociauxet environnementaux que doit affronter actuellementl’UE sont étroitement liés entre eux, ils doivent êtreaffrontés en bloc comme faisant partie d’un paquetcomplet, car c’est ce que représente pour nous le Nouveaupacte vert. ... [C’]est le seul moyen d’obtenir devéritables changements dans notre mode de vie et detravail, se répercutant ainsi sur la réduction des émissionsde gaz à effet de serre qui, comme la science l’adémontré, s’avère nécessaire si nous voulons éviterdes retombées catastrophiques du changement climatique». Il signale encore que les bénéfices irontbien au-delà de l’environnement « pour donner unnouvel élan à l’économie, conduire à un développementéconomique durable et aboutir à la création demillions de nouveaux emplois de «cols verts» dansle domaine de l’énergie renouvelable et d’autrestechnologies orientées vers l’avenir ». Il ajoute que leNouveau pacte vert garantira que les droits sociaux etdroits du travail ne seront pas sacrifiés au nom de lacompétitivité et que les biens et services publics serontfournis de façon à ce que l’ensemble des citoyenspuissent jouir d’une bonne qualité de vie. « Les Vertscontinueront à défendre l’égalité des droits pour tousà l’intérieur et à l’extérieur du lieu de travail, à luttercontre toutes les formes de discrimination et d’intoléranceet à prendre les mesures urgentes nécessairespour aider les plus défavorisés de la société » 13 .Le Nouveau pacte vert en Pologne signale égalementqu’on ne peut pas continuer « à faire commed’habitude » car c’est justement ce qui pousse la croissanceéconomique à poursuivre son essor au détrimentde la dégradation de la société et de l’environnement 14 .Construire un développement durableTout le monde s’accorde en général à dire que lespersonnes qui vivent dans l’extrême pauvreté sontles plus vulnérables aux conditions environnementalesdangereuses. Un des principaux problèmesauxquels sont confrontées les personnes les pluspauvres de Pologne, par exemple, a trait à la qualitédu logement. Roofs Over Heads (« Des toits sur lestêtes ») 15 , une coalition de 15 ONG dirigée par Habitatfor Humanity Poland, a lancé en 2008 une cam-13 European Green Party, A Green New Deal for Europe(Summary of Manifesto).14 Pour une analyse complète du Nouveau pacte vert et de sespossibilités de mise en œuvre en Pologne.15 Voir le site Internet de la coalition : .pagne destinée à la sensibilisation des conditionsprécaires des logements dans le pays. Il n’existe pasde politique nationale ciblée sur la construction delogements pour les groupes aux faibles revenus, nid’aides prévues pour les aider à payer des réformes.Environ 12 millions de Polonais – presque un tiersde la population – vivent dans des foyers confinés.Plus de 60 % des logements ont besoin de réformesimportantes et plus de la moitié des logementsexistants ont été construits il y a plus de 40 ans. Lamauvaise qualité des matériaux de construction etune mauvaise isolation se soldent par de grossesfactures mensuelles en dépense énergétique, quigrèvent encore plus les maigres budgets des famillesqui ont besoin d’améliorer leurs conditions de vie.Les personnes en situation d’extrême pauvretésont souvent considérées comme responsables desdommages environnementaux et donc comme unobstacle au développement durable. Il faut que celachange ; en fait, les personnes vivant dans l’extrêmepauvreté doivent être incluses à tous les niveauxde la prise de décisions. C’est pourquoi la réponsepolonaise et internationale au défi du développementdurable doit garantir que les nouvelles technologieset les programmes d’atténuation et d’adaptationprofiteront aux personnes et aux populations lesplus défavorisées et qu’elles seront élaborées enfonction de leurs capacités et de leurs efforts. Lespersonnes vivant dans l’extrême pauvreté sont souventà l’avant-garde des initiatives de développementdestinées à transformer leurs conditions de vie parl’amélioration des installations d’eau, d’assainissementou de chauffage.ConclusionCertains acteurs pensent que la recherche d’un modèlealternatif de développement « est primordialpour définir avec précision les objectifs de développementéconomique, pour améliorer l’environnementet la cohésion sociale » 16 . Cela mène à l’essencemême du développement durable. AmartyaSen soutient que le fait d’éliminer la pauvreté et depréserver l’environnement pourrait se subdiviser en« différentes parties d’une tâche intégrée » 17 . Celaveut dire que les programmes de protection environnementalepourraient servir à l’obtention d’un emploidécent et à offrir une formation aux groupes les plusdéfavorisés tout en respectant les cultures locales.La Croissance verte doit jouer le rôle de catalyseurpour créer des emplois décents et des moyensd’existence durables pour les populations les plusdéfavorisées, en s’appuyant sur les efforts déjà entrepris.Celle-ci est en accord avec le thème prioritairede la prochaine Conférence des Nations Unies sur leDéveloppement durable, « une économie verte dans lecontexte du développement durable et de l’éliminationde la pauvreté » (Rio +20), Brésil (2012). n16 X. Godinot, Th. Viard et H. de Courtivron, “Extrême pauvreté etgouvernance mondiale”, Cahiers de propositions, Forum pourune nouvelle gouvernance mondiale, (Décembre 2010).17 A. Sen, “Environment and Poverty: One World or Two?”,discours prononcé lors de la Conférence Internationale surl’Énergie, l’environnement et le développement, (Bangalore,Inde. 16 décembre 2006).<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 159 Pologne


RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINEPrincipales tendancesToutes les prévisions indiquent des perspectives plutôt sombres pour le pays. La population est confrontéeà une série de menaces, dont l’avancée du désert, la déforestation, un accroissement de la pauvreté et lesous-emploi. Aucune mesure n’est prise pour redresser la situation. Le pays n’a pas instauré de politique dedéveloppement durable. Les instances gouvernementales ne coordonnent pas leurs politiques. Il n’est pasdifficile de voir que le pire est encore à venir.Groupe d’action pour la paix et l’éducation pour le changement(GAPAFOT)Pastor Clotaire Rodonne SiribiL’économie de la République centrafricaine dépendprincipalement du secteur agricole, qui emploie environ68 % de la population active et qui a généré en2005-06, 54 % du produit intérieur brut (PIB). 1 Lepays compte environ 15 millions d’hectares de terresarables, mais moins de deux millions d’hectares-3,2 % de cette surface totale – sont effectivementcultivés. 2 Ses 16 millions d’hectares de prairies sontaussi sous-exploités, avec seulement 2,9 millionsde têtes de bétail alors que le potentiel s’élève à cinqmillions. 3 Certains produits agricoles sont exportés(coton, café et tabac), mais la majeure partie de laproduction est destinée à une agriculture de subsistance.Les méthodes de culture traditionnelles utilisentcouramment la technique du brûlis, contribuant ainsià l’érosion des sols et à la déforestation. 4 Le systèmele plus répandu est la polyculture semi-itinérante,une méthode qui implique la rotation des cultures decoton, de manioc et de céréales dans la savane ; decafé et de manioc dans les forêts et de céréales dansla région du Sahel. Bien que les conditions agro-écologiquessoient favorables, les rendements agricolessont extrêmement faibles.Le bois : principal combustibleUne analyse du processus d’urbanisation et de lasituation dans les grandes villes révèle plusieurs problèmessérieux concernant l’exploitation actuelle desressources environnementales et humaines du pays.La dépendance envers le bois, qui représente 90 %du combustible utilisé pour la cuisson des aliments,est à l’origine de la déforestation.L’urbanisation et la concentration de populationà l’intérieur et autour des villes ont entraîné des pro-1 World Bank, Agriculture, .2 ITeM World Guide, Central African Republic: Indicators, .3 J.J. Ndewana, General Panorama of the CAR, .4 Mongbay.com, Central African Republic, .Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 62 100Enfants atteignant100la cinquième annéed’écoleAccouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé83Survivance jusqu’àl’âge de 5 ansblèmes environnementaux tels que la constructionanarchique de logements sur d’anciennes terresagricoles, la concentration de polluants, la dégradationdes sols, l’altération du système hydrogéologique,l’expansion de la savane et la pré-désertification.Dans 91,7 % des ménages de la capitale,Bangui, le bois est le principal combustible pour lechauffage et il est utilisé dans presque tous les foyerspauvres (96 %) tandis que les plus riches utilisent unTABLeAu 103853100 100Indice d'Equité de Genre (IEG)ÉducationLiens entre la consommation d’énergie et la pauvretéL'autonomisation26100 69 100Activité économiquemélange de bois (84,5 %), de charbon (10,5 %) et degaz (2,5 %). Seulement à Bangui, entre 750 et 1400tonnes de bois sont consommées chaque jour, cequi correspond à 280 000 à 500 000 tonnes par an.Problèmes environnementauxLes problèmes environnementaux les plus pressantspour le pays sont la pollution de l’eau, la désertificationet la perte de la biodiversité. Les sécheressesCatégorie socio-économiqueÉnergie pour la cuisson Plus pauvres Pauvres Moyen Riche Très riche TotalBois 96.4 94.0 93.0 90.8 84.5 91.7Charbon 2.7 4.1 4.5 5.9 10.5 5.5Pétrole 0.5 1.4 1.7 2.2 1.3 1.4Gaz 0.1 0.2 0.3 0.5 2.5 0.7Électricité 0 0.0 0.0 0.2 0.8 0.2Autres 0.3 0.3 0.5 0.5 0.3 0.4Total 100.0 100.0 100.0 100.0 100.0 100.0Catégorie socio-économiqueMode d’éclairage Plus pauvres Pauvres Moyen Riche Très riche TotalPétrole 97 89.9 76.2 53.3 14.7 65.5Gaz 0.2 0.3 0.3 0.3 0.3 0.3Électricité 2.0 9.3 23.0 45.9 84.5 33.7Bois 0.2 0.2 0.2 0.3 0.4 0.3Autres 0.5 0.3 0.3 0.2 0.1 0.3Total 100.0 100.0 100.0 100.0 100.0 100.00 n/dSource : RCA-MÉPCI 2005bRapports nationaux 160 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


sont maintenant fréquentes dans le nord, le nordestet les régions orientales, des régions qui dansle passé étaient connues pour leur production agricole.Il est de plus en plus évident que les réservesd’eau souterraines sont épuisées, entraînant uneforte réduction de la productivité. 5 Pire encore, laRépublique centrafricaine se trouve avec le Zaïre etle Nigeria parmi les pays africains ayant les sols lesplus sévèrement érodés. 6 Les ravages de la jungle etdes forêts causés par les agriculteurs et les coupeursdu bois destiné à être utilisé comme combustible,conduit directement à la désertification et la déforestation.Le pays a désormais perdu près de 29 600hectares de forêt tropicale.La biodiversité est devenue un autre problèmecritique. La population d’éléphants, par exemple, alongtemps été menacée. Au milieu des années 90, ona estimé qu’au cours des 30 années précédentes, 90% des éléphants du pays avaient été exterminés, etque 85 % des massacres avaient eu lieu après 1985.La chasse à l’éléphant est maintenant interdite, maisles braconniers les tuent toujours illégalement, demême que les rhinocéros noirs et blancs.figure 1Impact de la croissance de la ville de Bangui pendant les 20 dernières années sur laforêt au sud-ouest de la ville et sur la région frontalière avec la RDCRecui moyenne de forêt20001986BanguiCentre Ville1986 - 2000: 275 m * ann- 12000 - 2003: 300 m * ann- 11Urbanisation et pauvretéLe mythe selon lequel aller vivre en ville procure unrevenu supérieur et une plus grande sécurité ne s’estrépandu en République centrafricaine que récemment.Le taux d’urbanisation annuel prévu pour lapériode 2010-15 est de 2,5 % et ces nouveaux citadinssont majoritairement très pauvres 7 . Les analystesattribuent cette évolution de la population àune variété de facteurs, parmi lesquels un taux denatalité élevé, l’exil rural croissant et un afflux deréfugiés causé par les conflits armés et l’instabiliténon seulement en République centrafricaine même,mais aussi dans les pays voisins (Congo, Soudan etTchad). Cependant les conditions de vie en ville sontloin d’être bonnes et dans certains quartiers de Bangui,par exemple, les habitants n’ont l’électricité quequatre jours par semaine et l’accès à l’eau potable estextrêmement limité. 8Selon le recensement général de 2003 de lapopulation et du logement, 2,6 millions de per-5 “Central African Republic – Environment”, in NationsEncyclopaedia. Disponible sur : .6 FAO, Land and environmental degradation and desertificationin Africa, .7 ; Indexmundi, Central African RepublicUrbanization, .8 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>, “Central African Republic. The Reduction ofPoverty: a very distant objective,” in People First, <strong>Social</strong><strong>Watch</strong> Report 2009, (Montevideo: 2009), p. 146.1 5 10km2003sonnes, 62,7 % de la population, vivent en dessousdu seuil de pauvreté. Le taux de pauvreté global estde 60 % dans les villes et de 72 % dans les zonesrurales. 9Étant donné que la croissance de la populationde Bangui est due à la migration des zones rurales,la structure du paysage urbain et l’utilisation de l’espacesont des questions clé pour le futur développementde la ville. Par ailleurs, le travail mal rémunéréet les moyens de subsistance précaires, comme lacollecte du bois de chauffage, aggravent la pauvretéurbaine.Le taux de chômage est évalué à seulement 2%, mais dans 64 % des cas, les nouvelles possibilitésd’emploi sont des activités très mal rémunérées,telles que l’agriculture à petite échelle, etfont souvent partie du secteur informel; seuls 10 %des emplois appartiennent au secteur formel. 10 Lapauvreté urbaine est particulièrement sévère pour lespersonnes travaillant dans les domaines de l’agricultureet de la pêche9 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>, “Many obstacles and slow progress,”in Afterthe Fall, <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> Report 2010, (Montevideo: 2010),p.154.10 Ibid.Source: Drigo 2007Le pire reste encore à venirL’État n’offre pas de solutions et ne semble avoiraucune volonté d’agir. Il ne met en place aucune planificationà long terme, ni de politique de développementet n’a pris aucune mesure pour s’attaqueraux problèmes les plus urgents ; les ministères,qu’ils soient de l’Agriculture ou de l’Environnement,interviennent à titre individuel sans aucune sorte decoordination.Si les tendances actuelles persistent, les forêtscontinueront à diminuer, de plus en plus de terresse transformeront en savane favorisant l’érosion dusol, privant peu à peu de leur principale source derevenus les gens qui cultivent des lopins de terresou qui coupent du bois, et les risques d’inondationne feront que croître. Les conflits liés au choixd’utilisation des parcelles de terre urbaines et semiurbaines (construction ou production agricole) neferont qu’augmenter.À long terme on peut s’attendre à une augmentationdes prix des produits agricoles et du bois, et àune pauvreté accrue dans les villes et leur périphérie.Plus inquiétant encore, les modèles climatiques prévoientque les températures moyennes augmenterontet que les sécheresses seront plus fréquentes.Cela conduira à une augmentation marquée de ladésertification et entraînera d’autres catastrophes enchaîne qui dégraderont progressivement le pays. n<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 161 République Centrafricaine


RÉPUBLIQUE DE CORÉEL’étroitesse de la conception gouvernementale de « vert »Les plans du Gouvernement pour la croissance économique n’ont aucune considération pour les questionssociales ou environnementales. La tendance à s’approcher d’un modèle néo-libéral ne tient pas compte de ladistribution des richesses, de la préservation des écosystèmes naturels ni de la participation de la société civile.En attendant, l’économie est de plus en plus dépendante des marchés et des investisseurs étrangers. Le paysne parvient pas à offrir un niveau de vie de qualité minimale pour les secteurs pauvres de la société, un systèmede protection adéquat pour les personnes âgées, des installations adéquates pour la prise en charge des enfantsni un système de santé publique performant.Coalition des citoyens pour la justice économiqueKyehyun KoIl existe au moins deux obstacles principaux au développementdurable en République de Corée : uneforte dépendance à un modèle économique basé surles exportations et une infrastructure de protection socialefaible. Selon un rapport de 2010, la République deCorée est le pays le plus dépendant des exportations etdes importations au sein du G20, et les exportationsreprésentent 43,4 % de son produit intérieur brut (PIB)1. La même étude a indiqué que la République de Coréeest aussi le pays le plus dépendant des investissementsétrangers parmi tous les membres du G20 (88 %). Laseule préoccupation de l’administration du présidentLee Myung-bak est de satisfaire les besoins économiquesdes propriétaires des grandes entreprises.L’obsession du Gouvernement pour renforcer lesecteur des exportations a entraîné des inégalités profondesentre les grandes entreprises et les petites oumoyennes entreprises. L’économie est dominée parquelques conglomérats, tels que Samsung et Hyundai,et le fossé creusé entre eux et leurs fournisseurs estde plus en plus grand. Alors que les grands conglomératsforment l’épine dorsale de l’économie du pays(par exemple, Samsung est responsable à elle seulede 20 % des exportations), les petites et moyennesentreprises sont la source d’emplois de plus de 80 % dela population active, de sorte que leur santé est crucialepour l’économie. Pourtant, le nombre de petites entreprisesest en baisse 2 . Quarante-six pour cent d’entreselles sont des sous-traitants qui ne possèdent ni capitalpropre ni technologie indépendante et, par conséquent,sont subordonnées aux grandes entreprises.Des inégalités croissantesCette situation a conduit à l’augmentation des troublessociaux et syndicaux et a contribué à affaiblir la demandeintérieure à cause du nombre croissant detravailleurs irréguliers et de chômeurs. Au sein despetites et moyennes entreprises, il existe une forte prévalencede travailleurs informels ou irréguliers. Le tauxde chômage du pays pour 2011 est passé de 3,6 % en1 KBS World, Korea’s dependence on foreign trade, (14septembre 2010), .2 L. Williamson, “South Korea’s small businesses fight forsurvival,” BBC News: Business, (17 août 2011), .Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 99Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialiséFIGURE 1Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansjanvier à 4 % en février, selon les données publiées parle Département de statistiques du Gouvernement 3 .Letaux de chômage est plus élevé chez les jeunes (8,5%), et 50 % des récents diplômés universitaires neparviennent pas à trouver d’emploi.L’écart de revenu entre les travailleurs formels etinformels est en augmentation. En 2010, 2,1 millionsde travailleurs avaient un revenu inférieur au salaireminimum (767 USD par mois) 4 . Le coefficient d’Engel(part des dépenses totales correspondant auxdépenses alimentaires) trimestriel a affiché le chiffre3 BBC News Business, South Korea’s unemployment raterises to year high, (16 mars 2011), .4 Hong Seock-jae, “S. Korea claims highest rate of low-wageemployment in OECD,” The Hankyoreh, (16 février 2011),.Indice d'Equité de Genre (IEG)ÉducationCorée du Sud- Emission de CO 2(en tonnes métriques par tête)11109876599+100098100 10099+IEG = 59L'autonomisationActivité économique1992 1995 1998 2001 2004 2007Source : Trading Economics, .100026100 68 10084le plus élevé en sept ans : 13,92 % 5 . Engel a observéque plus le revenu d’une famille est faible, plus lapart du revenu consacrée aux dépenses alimentairesest élevée. Un coefficient croissant suggère une plusgrande paupérisation et une augmentation de l’inégalitéentre riches et pauvres.Problèmes environnementauxUne des principales préoccupations environnementalesdu pays est la pollution atmosphérique dansles grandes villes (83 % de la population vit dansles zones urbaines) 6 . La décharge d’égouts et les ef-5 KBS World, Engel’s coefficient highest in seven years, (20août 2011), .6 CIA, The World Factbook: Korea, South, (27 septembre2011), .Rapports nationaux 162 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


fluents industriels ont provoqué la pollution de l’eau,y compris sous la forme de pluies acides.L’estuaire de Saemangeum - qui abrite 25 espècesd’oiseaux migrateurs et des milliers d’espècesd’animaux et de plantes et représente un moyen desubsistance pour plusieurs communautés de pêcheurs- est une des zones les plus gravement menacées dupays. Le Gouvernement a construit un barrage afin defournir de l’eau aux exploitations agricoles du littoral etactuellement les sédiments du fleuve sont en train demodifier considérablement l’écosystème. Les oiseauxmigrateurs ne peuvent plus nicher dans la région, cequi a un impact énorme sur la chaîne alimentaire locale.Bien que la plupart des études destinées à évaluerl’impact environnemental ne soient pas accessibles aupublic dans les phases initiales du projet, dès le départ,plusieurs groupes environnementaux ont exprimé lacrainte que le Gouvernement n’ait pas adopté les mesuresnécessaires pour offrir de nouvelles zones de nidificationaux oiseaux. Le barrage a été achevé en 2006et l’estuaire a commencé à se remplir des sédimentsapportés par les rivières à proximité. Non seulementl’eau de ces rivières était si polluée qu’elle ne pouvaitpas être utilisée pour l’agriculture du littoral, mais les sédimentsassociés étaient tellement saturés de produitschimiques toxiques que la riziculture était égalementimpossible. La région devra donc être utilisée à d’autresfins, mais les dommages de l’environnement sont déjàune réalité. La plupart des espèces d’oiseaux localessont en danger d’extinction 7 .Des préoccupations ont également surgi ausein des organisations environnementales concernantles efforts du Gouvernement pour stimulerl’investissement dans l’énergie nucléaire. En 2010,le pays espère satisfaire plus de 50 % de ses besoinsénergétiques avec l’énergie nucléaire et obtenir seulementun petit pourcentage d’énergie de sourcespropres et renouvelables 8 .Le projet des quatre principaux fleuvesLe projet des quatre principaux fleuves a été lancéen 2009 comme partie intégrale du nouvel ensemblede mesures politiques « vertes » adoptées par leGouvernement dans le cadre du programme « Bascarbone, croissance verte » (LCGG selon le sigleen anglais) (voir encadré). Ce projet représente 38% du budget du programme LCGG et il est composéde trois éléments principaux : la revitalisationdes fleuves Han, Nakdong, Geum et Yeongsan (les« quatre principaux fleuves ») ; un ensemble de travauxsur les 14 affluents et la restauration d’autrescours d’eau moins importants. Les objectifs déclaréssont la sécurisation des ressources en eau, la miseen œuvre de mesures globales de lutte contre lesinondations, l’amélioration de la qualité de l’eau etla création d’espaces qui respectent l’environnementpour le tourisme. Pour atteindre ces objectifs,le cours de nombreux affluents et ruisseaux devraêtre modifié et les quatre fleuves principaux seront7 Asia Pacific Business & Technology Report, Korea:environmental problems & solutions, (1er février 2010),.8 Ibid.Qu’est-ce que l’on entend par « vert » ?Depuis que le président Lee Myung-bak a annoncé le programme Bas carbone, croissance verte (LCGG)comme un paradigme de développement national en août 2008, tous les ministères du pays développentdes projets liés à la « croissance verte ». Mais que signifie « vert » dans ce contexte ? La législationcoréenne définit ce terme comme « une croissance durable avec moins d’émissions de gaz à effet deserre et un moindre degré de dégradation de l’environnement », et fournit également des définitionsspécifiques pour « bas carbone » (qui dans ce contexte signifie une réduction de la dépendance descombustibles fossiles ; l’expansion de l’utilisation d’énergie propre et, par conséquent, la réduction desémissions de gaz à effet de serre jusqu’à des niveaux acceptables grâce à des mécanismes tels que lestockage de carbone) et la « croissance verte » (définie comme une croissance économique qui chercheà être « en harmonie avec l’environnement » en réduisant la dégradation environnementale). Selonle Gouvernement, l’utilisation d’énergie bas carbone contribuera à la sécurité énergétique, réduira lesémissions de gaz à effet de serre et par conséquent servira à lutter contre le changement climatique.Toutefois, le sens de « vert », tel que défini par le Gouvernement, est différent de celui conféré àce mot dans le domaine de l’écologie politique, où il englobe également des préoccupations socialestelles que la justice de genre, la démocratie directe et la solidarité. Dans la mesure où le Gouvernementinterprète ce terme comme signifiant simplement la réduction des émissions de CO 2et d’autres polluantsde l’environnement, il pourrait proposer l’énergie nucléaire comme source d’énergie « verte », car ellegénère des émissions de CO2 relativement faibles (dans la mesure où l’on ne considère pas le problèmede l’évacuation du combustible usé). Le concept de « vert » n’est promu que quand il s’agit d’activités quicontribuent à la croissance économique, ce qui semble être le seul véritable objectif du Gouvernement.Cela est évident dans les grands projets gouvernementaux, tels que le barrage de l’estuaire deSaemangeum et le projet des quatre fleuves principaux. Ce dernier est une oeuvre d’ingénierie de grandeenvergure qui comprend la construction de 16 barrages comme préparation pour la communicationentre les fleuves par le biais de canaux. Ce projet a été proposé comme une stratégie « verte » pour faireface au changement climatique ; néanmoins, cette approche est généralement considérée comme nonviable, car il est universellement reconnu que la meilleure stratégie environnementale est l’élimination desbarrages et des digues pour permettre que les rivières récupèrent leur cours naturel.De cette manière, le paradigme du développement durable est remplacé par celui de la « croissanceverte », qui est non seulement indifférente à l’équité sociale et à la participation citoyenne,mais possède aussi une capacité très limitée à protéger réellement les écosystèmes du pays.le site de barrages et de réservoirs qui vont changerradicalement les écosystèmes concernés 9 .Le projet a attiré les critiques de groupes environnementauxlocaux et internationaux tels que les Amisde la Terre (Friends of the Earth). Avant de commencerles travaux, il n’y a pas eu d’évaluation de l’impactenvironnemental ni d’autres types de dialogue avecla société civile, qui, elle, n’a reçu aucune informationsur le projet 10 . En effet, le projet est mis en œuvre sansaucun égard pour l’opinion publique, puisque 70 %des Coréens critiquent le projet, non seulement parcequ’il n’est pas destiné à restaurer les écosystèmes,mais parce qu’il va carrément les tuer 11 .En outre, les quatre provinces qui accueillent leprojet ont beaucoup moins de problèmes d’approvisionnementen eau que d’autres régions du pays. Lesécologistes ont déclaré qu’en raison du grand nombred’opérations de dragage, la flore et la faune rares devrontêtre relocalisées et que les réservoirs vont forcerle déplacement des communautés et causer des dégâtsdans des sites considérés comme faisant partie du pa-9 J. Card, “Korea’s Four Rivers Project: Economic boost orboondoggle?,” Environment 360, (Yale School of Forestry& Environmental Studies, 21 septembre 2009), .10 Ibid.11 Sun-Jin Yun, “Not So Green: A Critique of South Korea’sGrowth Strategy,” Global Asia 5(2), (été 2010), .trimoine culturel. Par ailleurs, le projet est soupçonnéavoir violé plusieurs lois, dont la Loi de la Korea WaterResources Corporation et les lois relatives à la politiqueenvironnementale, à l’évaluation de l’impact et à la protectiondu patrimoine culturel 12 . Il existe également desdoutes quant à la viabilité économique du projet.ConclusionLe modèle économique du pays doit passer du principede « la croissance économique d’abord » à unedémarche de développement durable, d’une orientationaxée sur les grandes entreprises à la promotiondes petites et moyennes entreprises et de politiquesfavorisant les riches à des politiques favorisant lespauvres. En somme, le pays devrait abolir les politiquesnéolibérales et se concentrer sur les besoinssociaux et environnementaux.Le Gouvernement doit réduire sa dépendance enversl’étranger pour favoriser le développement des petiteset moyennes entreprises à travers le dégrèvementsd’impôts et des avantages financiers. L’expansion de lafonction publique pourrait être la clé d’un processusde création d’emplois qui va jouer un rôle importantdans l’amélioration de la qualité de vie en Corée. Il estégalement nécessaire de favoriser une plus grande participationde la société civile dans les projets et dans lespolitiques qui exercent un impact sur l’environnement. n12 Ibid.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 163 République de Corée


RÉPUBLIQUE DOMINICAINEL’inégalité : un obstacle majeurLa violence de genre et contre les immigrants haïtiens, la dégradation de l’environnement et notamment lesinégalités du système éducatif mettent en doute la capacité de l’État pour atteindre un développement humain etéconomique durable à moyen terme. Malgré quelques progrès, le pays a besoin, en toute urgence, de politiquessociales beaucoup plus approfondies et engagées pour parvenir à un changement réel afin d’assurer son avenir.Sans une démocratisation radicale de l’éducation, il est fort improbable que la République dominicaine puisseatteindre un développement durable.FEIMesa Nacional para las MigracionesRed Nacional de EmergenciaADIMJOFEDOCOMINMOSCTHAWilliam CharpantierRuth PaniaguaLuisa María JoséFernando ValdezIndice des Capacités de Base (ICB)ICB = 90Indice d'Equité de Genre (IEG)100Enfants atteignantla cinquième annéeIEG = 7210071 d’école0044L'autonomisationLe Gouvernement de la République dominicaines’est engagé à atteindre les Objectifs du Millénairepour le Développement. Toutefois, les politiquespeu efficaces dans des domaines fondamentauxtels que l’investissement social, la redistributionde la richesse, la récupération de l’environnementet notamment l’éducation, sont des obstacles quiempêchent d’atteindre ces objectifs. Tel que détailléci-dessous, des études officielles et indépendantesmontrent que le pays est très loin d’atteindre lesobjectifs 1 (éradication de l’extrême pauvreté et dela faim), 2 (éducation universelle) et 3 (équité degenre). À tout ce qui vient d’être mentionné, s’ajoutentles progrès négligeables en matière de durabilitéde l’environnement, fortement dégradé par desdécennies de surexploitation ce qui met en questionla capacité du Gouvernement de développer une économiedurable.En 2006, le Gouvernement a créé le ministèrede l’Économie, de la planification et du développement(MEPYD, en espagnol) chargé de surveiller lespolitiques de développement social et de réformede l’État. Ce ministère a établi un document de basepour la stratégie nationale pour le développement2010-2030, intitulé « Un voyage de transformationvers un pays meilleur » 1 , qui vise à créer un consensuspermettant de suivre les étapes pour que la Républiquedominicaine devienne une nation plus justeet équitable.En 2010, le PNUD (Programme des NationsUnies pour le développement) a défini le payscomme « un pays aux revenus moyens en voie dedéveloppement qui dépend principalement du secteurdes services et des envois de fonds de l’étranger.À ce jour, l’activité économique est 12 fois plus1 Document base de la proposition de Stratégie nationale pourle développement 2010 – 2030. (Saint-Domingue : 2010).100 100100 71 10098 97 100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialiséSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansÉducationActivité économiqueimportante qu’en 1960 et la moyenne annuelle dutaux de croissance a été de 5,4 % pendant les 48dernières années. Les revenus en devises pour lesexportations, le tourisme et les envois de fonds sont15 fois plus élevés qu’il y a quarante ans » 2 . Toutefois,malgré ces indicateurs positifs et les changementsinstitutionnels, l’investissement socialest encore très faible et le système éducatif n’a pasconnu d’amélioration, signifiant par conséquent quele pays se trouve encore loin des objectifs visés parle Gouvernement.Inégalités persistantesLa République dominicaine a réalisé d’importantsprogrès dans plusieurs OMD. Des indicateurs telsque la mortalité infantile ou maternelle ou l’espérancede vie à l’accouchement ont beaucoup progressé cesdernières années. Mais des données du ministère del’Économie de la planification et du développementmontrent que dans un pays de presque 10 millionsd’habitants, les niveaux actuels de pauvreté (34 %)et d’indigence (10 %) sont très élevés, bien que cesindicateurs aient chuté considérablement depuis lacrise économique de 2003 lorsqu’ils avaient atteint43 % et 16 % 3 .Le Rapport mondial sur le développement humainde 2010 du PNUD a conclu que l’inégalité estle plus grand obstacle au développement du pays 4 .Par ailleurs, le rapport indique que la richesse parhabitant et l’éducation n’ont pas augmenté dans la2 Voir : .3 Voir : .4 PNUD. Rapport sur le développement humain 2010, .même proportion que la santé. Le PNUD, suivantson indice de développement humain, octroie à laRépublique dominicaine le 88 ème rang sur un total de169 pays, la moyenne de l’indice de développementhumain étant de 0,663 5 .À son tour, l’État mondial de l’enfance 2006de l’UNICEF signale que « les progrès sociaux enRépublique Dominicaine, mesurés en fonction del’espérance de vie à l’accouchement, de la mortalitéinfantile, des nouveaux-nés avec un faible poidsde naissance et de l’indice d’alphabétisation desadultes, sont insuffisants par rapport à ceux obtenuspar d’autres pays de la région avec une croissanceéconomique similaire » 6 .Un rapport de la CEPAL (Commission économiquepour l’Amérique latine et les Caraïbes) indiqueque, depuis 2004, le pays occupe la troisième placeparmi les états américains ayant un faible investissementen politiques sociales, ce qui se reflète principalementdans l’accès restreint de la populationaux services de santé, d’éducation et d’assistancesociale 7 .Violence et discriminationDans son rapport 2010, Amnesty International adénoncé la République dominicaine pour sa discriminationpersistante contre les immigrantshaïtiens et leurs descendants. Ces gens sont lesvictimes de nombreux crimes de haine, y comprisles lynchages, et l’exploitation des immigrants sanspapiers sur le marché du travail. Selon des estima-5 Voir : .6 Voir : .7 Voir : .Rapports nationaux 164 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


tions officieuses, le nombre de Haïtiens vivant enRépublique dominicaine atteint 800 000 personnes,presque toutes étant installées dans les régions lesplus pauvres 8 .En 2007, en vertu d’une directive du Conseilcentral électoral, les autorités ont refusé de délivrerles pièces d’identité de centaines de citoyens, la plupartd’origine haïtienne. Ce refus implique l’impossibilitéd’accéder aux services de santé et à l’éducation,du droit au travail et du droit de vote. Les personnessans pièces d’identité peuvent être arrêtées arbitrairementet expulsées du pays. Cette règlementationest toujours en vigueur.La violence de genre est un autre problème endémique,notamment dans le cas des mineurs. Enmai 2009, le ministère public de Saint-Dominguea révélé que 90 % des dénonciations pour violencesexuelle concernaient des jeunes filles de moins de18 ans 9 .Dégradation environnementalePendant la deuxième moitié du XX ème siècle, les ressourcesnaturelles ont été surexploitées entraînant ladévastation de la plupart des forêts et des récifs decorail ; à ce jour, 80 % des bassins des fleuves sontsévèrement dégradés 10 . De plus, dans une grandepartie du pays, il n’existe pas de réseau d’assainissementapproprié et la distribution d’eau potable seheurte à d’enormes difficultés augmentant de ce faitle risque de crise sanitaire. Une pauvreté aussi généraliséesignifie qu’un vaste secteur de la populationdépend des ressources alimentaires naturelles deson territoire, ce qui contribue à diminuer les réserveset à favoriser la dégradation de l’écosystème.Déficit éducatif et inaction gouvernementaleUn aspect décourageant de la situation actuelle estle peu de volonté officielle envers les politiques enmatière d’éducation, fondement d’une future améliorationsociale, économique et environnementale.L’éducation représente le pilier indispensable pourqu’une société puisse construire ses valeurs ; elle estaussi un facteur clé du développement humain durablepuisqu’elle permettra aux futures générationsde gérer les ressources sociales et naturelles du paysde manière adéquate.Incapable d’augmenter l’investissement enéducation, l’État faillit au respect de la loi sur l’éducationde 1997 (Loi 66-97 qui dans son article 197établit qu’à partir de 1999 les dépenses publiquesannuelles du secteur devraient être d’au moins 16% du total des dépenses publiques ou de 4 % du PIBestimé pour l’année en cours, en tenant compte du8 IPS, La violence contre les haïtiens augmente, .9 Rapport 2010 d’Amnesty International, Human Rights inRepública Dominicana, .10 Guide du monde 2010. “República Dominicana”. Page 468.plus élevé des deux) 11 . Les dépenses en éducationont augmenté de 1,9 % à 2,9 % du PIB entre 1996et 2002 mais, suite à la crise économique, elles ontchuté à 1,5 % en 2004 avec une augmentation atteignantà peine 1,9% en 2005, et elles n’ont jamaisdépassé 3 % du PIB.Le ministère de l’Éducation a calculé qu’aucours de la période 2000-2005, la portion du systèmeéducatif financé par l’État avait été réduite de52 % et celle financée par les familles des étudiants,de 39 % ; l’OCDE estime que cela a été compensépar des ressources externes (donations et prêts) etpar l’apport d’entreprises privées 12 . Dans le mêmetemps, les institutions privées, qui accueillent 24 %des étudiants, garantissent mieux que l’État l’exercicede ce droit fondamental.Face à cette réalité, le Gouvernement envoiedes signaux confus. Le président Leonel Fernándeza semé le doute sur son engagement vis-à-vis dela loi 66-97 quand il a affirmé qu’il n’existait pas decorrélation entre les montants investis en éducationet les résultats académiques obtenus. D’après leprésident, l’augmentation du pourcentage du PIBalloué à ce secteur ne garantit pas une éducation debonne qualité et équitable 13 .Après les déclarations de M. Fernández, des organisationsde la société civile se sont rassembléesà la Coalition éducation digne pour exiger du Gouvernementqu’il respecte son obligation légale. Elles ontmême reçu le soutien du milieu des entreprises ; parexemple la Fédération des associations industrielles(FAI) a soutenu la campagne de la coalition. La FAIet d’autres organisations similaires ont déclaré que« l’industrie dominicaine ne pourra pas être concurrentielleavec une force de travail peu qualifiée. Telque le président l’a manifesté, nous croyons qu’il estnécessaire d’entreprendre une réforme du systèmepédagogique et des contenus éducatifs, mais celas’avèrera impossible si les ressources sont insuffisantes» 14 .L’inégalité dans la salle de classeConformément au rapport de 2008 du Laboratoirelatino-américain d’évaluation de la qualité de l’éducation(LLECE) la République dominicaine a « unmodèle éducatif à deux vitesses : les groupes lesplus aisés peuvent accéder à une éducation de qualitéalors que les plus pauvres n’ont accès qu’à uneéducation très déficiente ; culturellement, cela estperçu comme étant l’ordre naturel des choses » 15 .Des enquêtes indépendantes et des études officielles11 Voir : 12 Éditions OCDE, Rapport sur les politiques nationalesd’éducation : République dominicaine, (Paris : 2008).13 “Iberoamérica alcanza logros en educación”, en ListínDiario, (5 décembre 2010), .14 DiarioDigitalRD, “Industriales piden reforzar campaña afavor del 4% para la Educación”, .15 PNUD – République dominicaine, Política social: capacidadesy derechos-Análisis y propuestas de políticas sociales enRepública Dominicana, Vol. 1, (Saint-Domingue : 2010).montrent clairement que la situation n’a pas évolué,contribuant de ce fait au caractère endémique del’inégalité.L’enquête démographique et sur la santé(ENDESA) a détecté en 2007 des inégalités en matièred’éducation déterminées par les revenus : Vingtpour cent de la population la plus riche a un indiced’analphabétisme de 2 %, alors que dans les milieuxdéfavorisés, il atteint 26 % 16 .Une autre évaluation, celle de la Deuxième étuderégionale comparative et explicative des apprentissagesdes étudiants de l’Amérique latine et des Caraïbes(SERCE) a conclu en 2008 que « le niveau desélèves en mathématiques et en langue du troisièmeau sixième degrés est très inférieur à la moyenne del’Amérique latine et des Caraïbes » 17 .Dans le secteur public, les enseignants, malformés, sont surchargés de travail et mal rémunérés.Pour pouvoir obtenir un salaire digne ils doiventcumuler une grande quantité d’heures, ce qui rendimpossible une bonne préparation des cours.Ceci les empêche de respecter les programmesétablis et de transmettre les contenus éducatifs demanière efficace. D’autre part, à peine 43,1 % des enseignantsactifs lors de l’année scolaire 2005-2006avaient obtenu un diplôme d’enseignant. Le resten’était pas qualifié.Il est évident que le système éducatif de la Républiquedominicaine n’offre pas une éducation dequalité. Lors des dix dernières années, le nombred’élèves a augmenté mais la performance académiqueest toujours très pauvre et par conséquentbien des jeunes finissent leurs études sans lesconnaissances indispensables pour arriver sur lemarché du travail ; leur possibilité d’obtenir un travaildigne s’en trouve ainsi limitée.ConclusionEn général, malgré quelques progrès pour atteindreles objectifs nationaux de développement, notammenten ce qui concerne l’augmentation de l’espérance devie et la réduction de la mortalité infantile et maternelle,la République dominicaine doit adopter dès quepossible une stratégie pour garantir le développementdurable. Il faudra franchir beaucoup d’obstacles, laplupart liés à cette inégalité si élevée et croissante.Cela est particulièrement évident en termes d’accèsaux services de santé et à l’éducation qui affectent laproductivité de la force de travail, mais également ence qui concerne la violence et la discrimination contreles immigrants haïtiens et les femmes.En particulier, si la qualité de l’éducation n’estpas améliorée de manière radicale, si la populationn’a pas le droit d’y accéder, il sera alors difficile que leGouvernement puisse réunir les conditions permettantle développement durable du pays. n16 Centre des études sociales et démographiques (CESDEM) etMacro International Inc, Encuesta Demográfica y de Salud2007, (Saint-Domingue, République Dominicaine : CESDEMet Macro International Inc).17 PNUD – République dominicaine , op. cit..<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 165 République Dominicaine


RÉPUBLIQUE TCHÈQUEUn changement est nécessaireLe pays dépend de plus en plus des exportations vers les pays voisins alors que le déficit annuel ne semble pas avoirdiminué. Le Gouvernement insiste pour mettre en place un modèle néolibéral non durable qui sape le bien-être social et ilrefuse de prendre en considération des politiques à long terme. À l’heure actuelle, la République Tchèque est confrontée àdes menaces telles que l’appauvrissement de groupes sociaux appartenant à la classe moyenne et des personnes à faiblerevenu, l’augmentation du chômage et l’inégalité croissante de genre. La perte de la biodiversité et la pollution radioactivesont quelques-uns des défis environnementaux devant être évalués de manière immédiate. L’engagement croissant dela société civile vis-à-vis de ces questions donne l’espoir de trouver une réponse à cette quête de changement.ÉditeurTomáš Tožička (Ekumenická akademie, Prague)ÉconomieIlona Švihlíková (Alternativa zdola)GenreMarcela Adamusová (Forum 50 %)Linda Sokačová (Gender Studies, o.p.s.)Kateřina Machovcová, (Evropská kontaktní skupina ČR)Écologie et énergieMilan Štefanec (Nesehnutí)Milan Smrž (eurosolar.cz)La République Tchèque dépend de plus en plus del’économie de ses voisins, notamment de l’Allemagne.Les exportations du secteur industriel quiont augmenté de 10,5 % en 2010, ont produit unecroissance du PIB de 2,3 % selon les données préliminairesdu Bureau tchèque des statistiques (CzechStatistical Office - ČSÚ) mais les années précédentesfont apparaître un déficit commercial avec des paysn’appartenant pas à l’Union européenne et le granddéficit en rapport avec la Chine dépasse largementl’excédent avec l’Allemagne. Les véhicules à moteursont toujours le principal produit d’exportation etils produisent le surplus le plus élevé ; par ailleurs,le déficit provient notamment de l’importation depétrole et de gaz naturel, mais aussi des produitspharmaceutiques 1 .Cette économie déséquilibrée semble se trouverpratiquement au bord du gouffre, tout spécialementconcernant les secteurs de la population les plus vulnérables.Une déclaration récente du Gouvernementindiquerait que celui-ci ait décidé de poursuivre lesréformes néolibérales sans tenir compte des questionssociales 2 . En fait, le Gouvernement ne perçoitpas les risques évidents de cette stratégie car il netient aucun compte des facteurs qui l’ont poussé audésordre de l’économie et à la diminution des obligationsfiscales des secteurs de la population à plus hautrevenu. Menacé par l’exemple grec et par une possiblebanqueroute, le Gouvernement a réussi à prioriser larestriction de la dette et il est notamment centré surla réduction des dépenses sociales. Par conséquent,il laisse de côté des questions importantes comme1 Bureau tchèque des statistiques, Ekonomické Údaje ZaRok 2010, produkce, obchod, zaměstnanost, (2010)..2 Disponible sur : .Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9899+100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansle chômage (7,0 % au 4 ème trimestre 2010, selon lesestimations de l’OIT et 8,9 % selon le ministère duTravail et des affaires sociales), l’inégalité de genreet les menaces environnementales (telles que l’empoisonnementradioactif et la perte de la biodiversité).Réduction budgétaire et corruption incessanteDepuis le début de la crise mondiale de 2008-2009,la stratégie du Gouvernement a été de réduire lesdépenses sociales. Ces réductions ont été présentéescomme des réformes, mais les réductions desdépenses ne sont pas accompagnées d’une nouvelleconception du système social de la Républiquetchèque. En outre, ces réductions n’ont pas étéétayées par des analyses d’impact, même si l’on saitque la plupart des mesures mises en place aurontune incidence, notamment sur les groupes à faiblerevenu et la classe moyenne. Voici un signe de latendance persistante à ne pas vouloir considérer lesdépenses sociales comme un investissement pour lefutur développement de la société.Les réductions touchent également les allocationsparentales et les aides pour les handicapés.En outre, tout indique que les subventions pour laprestation de services sociaux, comme par exempleles subventions dénommées «prise en charge précoce»destinées à aider les familles avec des enfantshandicapés aient diminué 3 . Ceci aura un fort impactnégatif sur les familles monoparentales, notammentsur celles dirigées par des femmes. Cependant,même avant l’existence de ces changements, lesstatistiques révélaient que 40 % des familles mono-3 Středisko pro ranou péči, Šetření na nepravém místě můžeovlivnit poskytování služby rané péče, (2011),.91100 10099+Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 73Éducation100046L'autonomisation100 74 100100Activité économiqueparentales avec des enfants étaient menacées par lapauvreté et les mauvaises conditions de vie; environla moitié de ces familles se trouve 1,5 fois en dessousdes moyens minimum de subsistance. Dans l’avenir,il faudrait s’attendre à une augmentation de la populationmenacée par la pauvreté.La chute des salaires et l’augmentation des vaguesde licenciements dans le secteur public, quitouchent un grand nombre de femmes, est une autreétape dans le cadre des « réformes ». Outre l’augmentationdes chômeurs, cette mesure impacterafortement sur le niveau des pensions et sur l’aidefinancière destinée aux enfants des femmes qui travaillentdans le secteur public.De plus, la corruption qui sévit tout au long dela filière des contrats publics, surcharge le budget del’État de dizaines de milliards de CZK par an, mêmed’après les estimations les plus optimistes 4 . Un ministrea dû démissionner parce qu’il était suspectéde corruption ; un autre membre du Gouvernement aété suspecté de manœuvres illicites pendant la présidencetchèque de l’Union Européenne. Les problèmesd’évasion fiscale internationale ne sont presque paspris en compte; l’attention est centrée principalementsur les petits entrepreneurs évadeurs d’impôts, enpremier lieu ceux appartenant à la communauté vietnamienne5 . Par ailleurs, et malgré les critiques reçuesdes ONG depuis plusieurs années, le serveur du gouvernementBusinessinfo.cz offre des informations quifacilitent l’évasion fiscale internationale.4 Voir : .5 NašePeníze.cz, Vietnamští obchodníci způsobují miliardovédaňové ztráty, (7 avril 2011), disponible sur :.Rapports nationaux 166 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


Genre : femmes sous-représentéesLors des élections de mai 2010, grâce au scrutinproportionnel (qui a permis de voter pour quatrecandidats de la liste d’un parti et de les faire remonterensuite sur la liste), les femmes ont gagné 12 siègessupplémentaires à la chambre des députés par rapportà ceux qu’elles auraient pu obtenir à partir deslistes conçues par les partis politiques. De toutesmanières, les femmes sont insuffisamment représentéesdans les postes les plus importants pour laprise de décisions.En ce qui concerne le pouvoir judiciaire, parexemple, alors que dans l’ensemble il y avait plus defemmes que d’hommes (environ 20 % en moyenneà long terme), leur représentation diminue dramatiquementau niveau de la hiérarchie supérieure. Outrela Hongrie, la République Tchèque est le seul pays del’Union européenne dont le gouvernement ministérieln’est composé que d’hommes.Détérioration de la situation des immigrantsL’insatisfaction répondant à la crise et l’augmentationdes coûts pour la classe moyenne et la populationà plus faible revenu ont accru les tensionssociales. Le respect du contrat social devient deplus en plus difficile alors que l’inégalité croissantede la distribution des revenus entraîne une recrudescencede la xénophobie, du racisme et la dégradationde la solidarité sociale. De ce fait, la criseéconomique a provoqué une attitude négative plusradicale contre les immigrants, et plus particulièrementcontre les femmes.Les problèmes que les immigrants doivent affronterquant à l’assurance santé de leurs enfantsn’en sont qu’un exemple. Un employé étranger adroit au système de la sécurité sociale mais, si aucundes deux parents ne sont résidents permanents enRépublique Tchèque, leurs enfants ne peuvent pasêtre assurés avant la naissance et les soins médicauxreçus à la maternité des hôpitaux doivent être réglésen espèces. En cas de problèmes de néonatalogie,les compagnies d’assurance peuvent même refuserd’en octroyer une 6 . Dès le début, une femme entrepreneurétrangère est limitée au système d’assurancescommerciales et elle peut passer un contratavec une compagnie d’assurances pour l’accouchementet les soins postnataux immédiats en payantdes frais supplémentaires (environ le double d’unsalaire moyen).6 Inbáze Berkat est chargé de gérer un cas particulier. Voir :.Environnement: abattons les arbres,construisons des centres commerciauxLa protection de l’environnement est une autre questioncruciale pour la République tchèque. Début 2010,une nouvelle loi sur la préservation de la nature et lepaysage est entrée en vigueur et a réduit la protectiondes arbres et d’autres espèces pour l’industrie du bois.Étant donné que l’autorisation des autorités localesn’était plus nécessaire, des villages, des villes et mêmedes rues entières ont subi un abattage extensif. En2010, le ministère de l’Environnement n’a publié aucundécret destiné à réduire cet état de choses 7 .D’autre part, le ministère de l’Agriculture a tenté– à plusieurs reprises et en dépit des manifestationsdes organisations écologistes et des petites sociétésde l’industrie du bois – de transmettre le concept «adjudication des forêts » dans les forêts domaniales(17 % de la surface du territoire) ce qui favorise lesgrandes sociétés de l’industrie du bois, en orientantles fonctions publiques des forêts administrées parl’État (loisirs, protection contre l’érosion, rétentiond’eau, écosystèmes pour les plantes et les animaux)vers la production de bois et le profit.Malgré la crise économique persistante, laconstruction de grands centres commerciaux s’estpoursuivie en République tchèque, détenant ainsi lechiffre record par habitant de centres commerciauxdans toute l’Europe centrale et l’Europe de l’est 8 .Pendant les sept dernières années, les chaînes demagasins se sont énormément développées et 80000 parkings ont été construits ; soixante trois pourcent de ces parkings l’ ont été dans des secteurs nondéveloppés (terres destinées aux cultures, champs,prairies et vergers), et les arbres ont été abattus dans62 % des cas, entraînant ainsi pour 25 % de cessecteurs des incidences négatives sur des zones environnementalesprotégées (aussi bien pour garantirla stabilité écologique que pour protéger les biotopesdes animaux) 9 . La disparition des petites épiceries,le débordement des centres commerciaux en rasecampagne, le dépeuplement des centres urbains etdavantage de voitures particulières en circulationsont quelques-unes des conséquences de l’expansionillimitée des chaînes de magasins.Tournant à 180 degrés pour les sourcesd’énergie renouvelablesL’importance des énergies renouvelables n’est pasabordée de manière adéquate dans le cadre stratégiquepour le développement durable, ratifié par leGouvernement en 2010, bien que cette importance7 Ekolist.cz, Trvá období téměř volného kácení stromů.Chybí novela vyhlášky, (Prague : 2010), .8 Hospodářské noviny, Diskontům a hypermarketům sedaří i v krizi, (30 mars 2010), .9 Voir : .soit évidente si nous considérons qu’elle lie les principesdes mesures adoptées sur le climat à la diminutionde l’importation d’énergie et à la diminutiondes coûts externes du système énergétique actuel.En 2010 l’État a décidé de stopper la mise enmarche d’usines d’énergie photovoltaïque. Il sembleraitque, dans l’avenir, seules des installations de30 KW maximum seront autorisées, ce qui signifieun frein important au développement de la générationde cellules photovoltaïques. D’autre part, de nouvellesdémarches ont été entreprises pour achever laconstruction de l’usine d’énergie nucléaire de Temelin.Il est prévu que la construction se termine en 2025 etl’usine devrait être opérationnelle jusqu’en 2070.La dernière mine d’uranium en Europe centrale,située à Rožná, est toujours opérationnelle et ellecontinuera à l’être au moins jusqu’en 2013. La mineaurait dû être fermée, mais le Gouvernement a décidéqu’elle resterait en activité. La situation des habitationscontaminées par du radon à proximité desvieilles mines d’uranium (par exemple à Jáchymov)n’a toujours pas été résolue.Réaction des citoyensLe mouvement ProAlt, une initiative citoyenne quicritique les réformes proposées et les alternativesde soutien, est né pour apporter une réponse auxpolitiques insensibles du Gouvernement au niveausocial. ProAlt rassemble des individus de toutes lesprofessions, générations et styles de vie qui s’opposentaux réductions généralisées effectuées sansétat d’âme. Le mouvement « Alternative zdola » encouragela participation des citoyens à la vie politiqueainsi qu’à la vie économique des communautés àtravers des consultations, l’éducation, la création deréseaux et les actions politiques.La campagne de la « Česko proti chudobě » (RépubliqueTchèque contre la pauvreté), met constammentl’accent sur le besoin d’augmenter l’efficacitéde la coopération pour le développement et critiquel’incapacité du pays de respecter sa promesse d’augmenterles ressources de l’Aide publique au développement(APD). La standardisation graduelle etla transparence accrue sont un aspect positif de lacoopération pour le développement de la Républiquetchèque. Une des contributions de l’APD tchèque estcentrée sur les ressources d’énergie renouvelablespour les régions pauvres.L’augmentation de la participation de la sociétécivile en politique donne au moins quelque espoir :la population exigera la remise en ligne des politiqueset sa colère ne se retournera pas contre lesplus pauvres, accusés par l’élite politique d’être lesresponsables du gaspillage et de l’endettement del’État. La participation de la population, centrée surla sphère politique corrompue qui est financée par lecapital mafieux, est l’une des dernières chances depouvoir assurer la démocratie avec un minimum deréglementations sociales. n<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 167 République Tchèque


SÉNÉGALUne bombe sociale et écologique à retardementLe pays, gravement touché par la crise économique mondiale, est confronté à des défis importants, notammentau manque de transparence de ses institutions gouvernementales et à l’absence de planification à long terme.Cela augmente sa vulnérabilité vis-à-vis des catastrophes naturelles pour lesquelles le Gouvernement n’a pasproposé de systèmes de protection ou de prévention efficaces. Outre cela, la déforestation, due principalement àla consommation d’énergie, constitue une bombe écologique à retardement. Pendant toute l’année 2010, diverssecteurs de la société se sont prononcés contre le manque de bonne gouvernance.Cultural Association for Educational and <strong>Social</strong> Self-Promotion(ACAPES); National Associations for the Disabled ofSenegal (ANHMS); Democratic Union of Teachers (UDEN);Youth and Environment Action (AJE); Enda Graf Sahel; Pan-African Youth Organizations (OJP), a member of the AfricanYouth Coalition against Hunger; Syndicate of Professors ofSenegal (SYPROS); Collective of Pikine Ouest AssociatedGroups (COGAPO); Association for the Economic, <strong>Social</strong> andEnvironmental Development of the North (ADESEN); AGIR/SEN; ECO/PN; MARSA-FOOT; AJAPPO; CLJ/PO; ASC; CITE;SOTIBA; AES; PENCOO; JECK PENC.Le pays a mis en œuvre en 2003, le Document destratégie pour la réduction de la pauvreté (DSRP),constituant le cadre de référence pour la politiqueéconomique et sociale pour la croissance et la réductionde la pauvreté et la réalisation des Objectifs duMillénaire pour le Développement (OMD).Les effets de la crise mondiale ont atteint leurpoint culminant en 2010, lorsque l’économie etles finances publiques ont été considérablementaffectées par la difficile situation énergétique, alimentaireet financière, rendant leur vulnérabilitéparticulièrement visible. Pour 2011, la croissancedu PIB a été estimée à 4,2 % 1 , cependant, poursurmonter la situation d’urgence économique etatteindre les objectifs en vue de l’éradication de lapauvreté, il est essentiel que le taux de croissanceatteigne 10 %, croissance qui, outre le fait qu’elledoive être soutenu, doit également être en phaseavec les principes du développement durable.La situation économique s’est, de fait, aggravée. Parexemple, les coupures dans la production d’électricitécausées par le manque de fonds nécessaires àl’exploitation et à la maintenance des centrales électriques,ont eu un impact négatif sur la croissanceéconomique, estimée pour 2010 à environ -1, 4 % 2 .Le taux de chômage, l’inéquité sociale et la vulnérabilitéont augmenté.Un cadre de gouvernance confusLes OMD constituent une nouvelle référence pourmesurer le niveau de développement d’un pays,ainsi que pour établir des paramètres d’évaluationdes progrès en vue d’un développement durable.De ce point de vue, les résultats sont encore insuffi-1 Selon les données du ministère de l’Économie et des finances– Direction de la prévision et des études économiques.2 Données de la Direction de prévention et des étudeséconomiques.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 7052100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 anssants au Sénégal en termes de politiques et de stratégiesde développement, en particulier en ce quiconcerne les services sociaux essentiels et l’équitéde genre. Ceci constitue une invitation pour que leGouvernement et tous les autres acteurs redoublentleurs efforts et fassent converger leurs actions autourd’objectifs spécifiques, partagés et ciblés.Si nous analysons l’Indice de développementhumain (l’Indice des inégalités de genre et l’Indicede pauvreté), ainsi que l’Indice des capacités de base(ICB) 3 , il est clair que le pays n’a pas encore assisles bases d’un développement durable. En 2010, defait, il a été classé 144ème parmi 169 pays 4 . En fait,le chemin vers l’adoption d’un modèle de développementdurable au Sénégal est miné par des défisque le Gouvernement et son volontarisme inefficacen’ont pas encore su affronté jusqu’à présent.Bien que depuis 2006 les sources officiellesd’information concernant le processus de réductionde la pauvreté monétaire indiquent que des évolutionsont été observées, l’évolution de la pauvreténon monétaire (l’accès aux services sociaux essentiels,à une alimentation adéquate, aux sources d’eaunon polluées, au logement décent et à un environnementsain) est trop lente pour atteindre les OMDd’ici à 2015.Au niveau institutionnel, la multitude d’agencesexistantes couplée à une superposition de ministèresqui se chevauchent, contribuent à rendre floule cadre de gouvernance des programmes visant àaméliorer la situation. L’actuelle structure du secteur3 Pour plus de détails sur la description de l’ICB, veuillezconsulter le rapport 2011, compris dans ce volume.4 Programme des Nations unies pour le développement(PNUD), La véritable richesse des nations.44100 10091Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 50Éducation100028L'autonomisation6357100 100Activité économiquepublic n’est pas la mieux apte à assurer un développementefficace. La bonne gouvernance, la transparenceet la lutte contre la corruption, absentes dela configuration actuelle de l’État, sont essentiellespour assurer des résultats décisifs.La pauvreté continue à toucher des frangesimportantes de la population des villes et des campagnes,en particulier les femmes chefs de ménages,dont le nombre augmente. Les dépensespubliques assignées à la constitution de filets desécurité et d’assurance sociale ont été estiméesrécemment à environ 1,16 % du PIB, en-dessousde la moyenne africaine qui est de 1,44 % (selonle ministère de la Famille, des Groupementsde femmes et de la Protection de l’enfance).Le manque de coordination des interventions, les actionsrépétées et les programmes inefficaces rendentles résultats dans ce domaine largement insuffisants.La non-application de la Loi sur l’orientation sociale(concernant la promotion et la protection des droitsdes personnes handicapées), qui a été approuvéepar la citoyenneté en 2010, n’a pas permis à ce jourde mettre en œuvre le cadre institutionnel nécessairepour la prise en charge et l’intégration socio-économiquedes personnes handicapées.Le mécontentement socialLe climat social a été perturbé de manière constantepar d’importants mouvements revendiquant demeilleures conditions de vie, de travail et de sécurité,et qui se sont traduits par des manifestationsde rue contre la vie chère, l’inaction du Gouvernementface aux inondations et aux coupuresd’électricité. Ce climat social tendu vécu duranttoute l’année a entrainé des mouvements de revendicationavec une série de grèves dans lesRapports nationaux 168 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


secteurs de l’éducation, de la santé et de la justice.En provenance de la banlieue de Dakar et soutenuspar les chefs religieux (imams et prêtres), cesmouvements se sont étendus à travers le pays. Cependantle Gouvernement n’a pas tenu compte deses ferventes protestations, qui se sont répanduesgrâce à un vaste mouvement social qui dénonçaitle coût de la vie élevé, les coupures d’électricitéet la dégradation des valeurs républicaines etdes conditions de vie des populations en général.Les mouvements se sont diversifiés, y compris lesmarches de protestation menées par des imams etdes prêtres en 2009 et les protestations des mouvementsde jeunesse «Y’ en a marre », conduites pardes musiciens de Hip Hop. D’autres associations detravailleurs et groupes sociaux se sont joints à cesmouvements, incitant à des grèves de la faim et desmanifestations face au palais présidentiel.Le déficit environnementalIl existe des problèmes structurels d’assainissementet d’aménagement du territoire liés à la croissancenon durable des villes et à l’échec du système d’assainissement,malgré les fonds assignés en faveurdu secteur de la propreté (ce qui fait dire à certainsqu’ « il y a de l’or dans les déchets »). En outre, ilexiste plusieurs problèmes liés à l’hygiène publique,la déforestation et l’érosion côtière qui menacent descommunautés entières. De fait, la résurgence desinondations, exacerbée par le manque de planificationet de mesures palliatives, est devenue un fléau danstoutes les régions du pays, avec 521 968 personnesaffectées 5 et la perte de plusieurs vies humaines dansdes villes comme Kolda (au sud) et Kaffrine (à l’est).Rien que dans la région de Saint Louis, au nord, 5661familles ont été ravagées ; 4 354 latrines ont égalementété détruites provoquant par conséquent un impactnégatif sur la santé des populations. La productionagricole a été affectée car des milliers d’hectaresde terres agricoles cultivées ont été submergées.Ce sombre tableau s’inscrit dans un cadre de pénuriechronique d’infrastructures dans les campagnes, cequi explique pourquoi la société civile appelle à investirdans les infrastructures routières en zones rurales,ainsi que dans des mesures visant à stimuler l’économierurale des régions périphériques et à accélérer leprocessus d’intégration avec les pays voisins.Un bilan décevantQuelques progrès ont été atteints notamment en cequi concerne des objectifs tels que la réhabilitationdes ressources naturelles et des terres, le développement,la récupération de la biodiversité, la gestiondes ressources transfrontalières et la lutte contre lapollution. En ce sens, le pays est sur ​la bonne voie,La déforestation intensive, une bombeécologique à retardementLes forêts de la région du sud disparaissent à un rythme soutenu. Dans un rapport intitulé « Lapoudrière environnementale », présenté par la Commission du Conseil Rural de Kandion Mangana,le pillage de la végétation au sol est décrite comme une véritable extermination. Cette attaque à laflore remonte à plusieurs décennies dans la partie nord de la région de la Casamance, en particulierdans le département de Bignona, mais elle est plus soutenue depuis 2005. Les raisons se trouventprincipalement dans Les troubles constants causés par le Mouvement des Forces Démocratiquesde Casamance (MFDC), un groupe de guérilla qui depuis plus de trois décennies réclame l’indépendancede cette partie sud du Sénégal, sont les principales raisons de cette dégradation.Une des conséquences de ce processus de déforestation, par brûlage de végétation, est l’augmentationdes émissions de gaz à effet de serre responsable du réchauffement global de la planèteet du changement climatique.D’autres raisons de la dégradation des forêts sont les suivantes : la recherche de nouvellesterres agricoles entraînant le déboisement; la production de charbon de bois pour répondre auxbesoins énergétiques des populations ; et la production de bois destinée à la construction, ce quimenace les espèces nobles exploitées (en général le bois ligneux dur et à croissance lente).Afin de réduire ce processus de déforestation, les mesures suivantes sont devenues nécessaires: restaurer les forêts et les formations en dégradation ; évaluer les programmes dedéforestation et mettre en œuvre des stratégies appropriées ; rechercher et adopter des pratiquesdurables vis-à-vis des ressources ; protéger les forêts, principalement par le biais de la lutte contrele brûlage de broussaille ; promouvoir l’utilisation de sources d’énergie alternatives ; protéger lessols et contrôler plus strictement l’exploitation forestière en vertu d’une politique de régénérationet de protection de certaines espèces.du moins en ce qui concerne l’inversion de la tendancede dégradation de l’environnement. Il disposeégalement d’une stratégie nationale d’adaptation auxchangements climatiques.Toutefois, de graves problèmes sont à signalerdans les domaines de la santé.Par exemple, les investissements dans cesecteur sont réalisés de manière tout à fait inégale,privilégiant le secteur urbain au détriment des zonesrurales, en particulier en termes d’ouverture et d’entretiende centres de santé et de maternités. Les hôpitauxrégionaux et nationaux et les établissements desanté spécialisés reçoivent davantage de ressourcesfinancières que les services de santé de base, plusproches des populations pauvres. Le discours officieldu Gouvernement indique cependant que lescentres de soins de base sont une priorité, ce qui,malheureusement, ne concorde pas avec la réalité.En outre, la couverture du secteur en termesde personnel médical est relativement faible, en particulierdans les zones rurales. L’accès inégal despopulations aux soins, conséquence directe de cettesituation, affecte principalement les plus pauvres etles personnes défavorisées. En fait, plus de la moitiédu personnel qualifié se concentre sur deux régions,Dakar et Thiès, qui rassemblent 52 % des médecins,69 % des obstétriciens/nes et 31 % des infirmiers/ères.Toutefois, il est important de préciser que lalutte contre le VIH SIDA a connu des résultats satisfaisants.Certaines régions et groupes de population(travailleurs/ses du sexe, routiers), cependant,continuent à atteindre des taux de plus de 7 %.Bien que les efforts soient visibles, la proportiond’accouchements assistés par du personnel qualifiéest faible (66,9 % en 2009) et les taux de mortalitématernelle et infantile sont encore élevés par rapportà l’objectif de 2015.L’éducation, d’autre part, est l’un des secteursqui bénéficie d’une allocation plus généreuse enressources. Cependant, le pays connait toujoursun certain retard dans ses résultats par rapport à lamoyenne africaine, en grande partie en raison de tauxbruts de scolarisation encore faibles (3 à 4 % au niveaupréscolaire dans certaines régions par rapportà la moyenne nationale de 9,8 %) , d’un taux élevé dedécrochage scolaire en Secondaire, du faible nombred’enseignants disponibles pour les disciplines scientifiques,et de la marginalisation de l’enseignementtechnique et de la formation professionnelle. n5 Données de la Croix rouge sénégalaise.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 169 Sénégal


SERBIELois et stratégies en attente de leur mise en placeLes graves problèmes environnementaux du pays constituent des enjeux clé pour le développement durable etla réduction de la pauvreté. Ces dernières années un nouveau cadre juridique et politique a été mis en place pourla gestion environnementale. Cependant, sa mise en œuvre effective constitue toujours une forte préoccupation.Une stratégie nationale de développement durable, élaborée avec la participation d’organisations de la sociétécivile, a été adoptée. Le succès pour aborder les enjeux clé de la protection de l’environment dépend dudéveloppement des capacités pour la mise en œuvre et la surveillance ainsi que d’une prise de conscience accrueet de l’obtention de soutien politique pour la gestion environnementale.Association Technology and SocietyMirjana Dokmanovic, PhDDanica Drakulic, PhDÀ partir de la crise économique des années 1990,la plupart des investissements indispensables pourprévenir la pollution, construire l’infrastructured’assainissement et de provision d’eau n’ont pasété réalisés 1 . Lors des dernières années, le pays afait beaucoup de progrès en matière de développementdes politiques formelles et d’établissement desbases juridiques pour la gestion environnementale,notamment à travers l’harmonisation de la législationavec l’acquis communitaire (la législation cumulée,les actes juridiques et les décisions des tribunauxconstituant la base de la législation de l’UnionEuropéenne) 2 . Pour la période 2009-2017, la Stratégienationale pour le développement durable (NSDS,pour son sigle en anglais) a été développée avec laparticipation de la société civile et a été adoptée enmai 2008 3 . La NSDS est basée sur trois facteurs clédu développement durable : le développement économiquedurable, le développement social durableet la protection de l’environnement par le biais del’utilisation rationnelle des ressources naturelles. Cedocument stratégique a identifié, en Serbie, les problèmesclé suivants concernant l’environnement :• Pollution de l’eau : voici le problème environnementalmajeur du pays. Seulement 63 % dela population peuvent accéder aux services publicsd’eau potable, alors que seulement 35 %sont connectés à un réseau public d’égouts. Engénéral, la qualité de l’eau potable n’est pas satisfaisante.Seulement la moitié de la populationpeut accéder à l’eau potable dans des systèmesd’approvisionnement d’eau contrôlés. Lescontrôles montrent que dans la région centralede la Serbie, plus de 40 % des échantillons d’eauétaient pollués par des germes, alors qu’en Voïvodine,une province autonome, le problème1 D. Slunge, A.Ekbom et E. Dahlberg, Serbia Environmentaland Climate Impact Analysis, School of Economics andCommercial Law, (Göteborg : 2008).2 Gouvernement de la Serbie, National SustainableDevelopment Strategy, (Belgrade : 2008).3 Journal officiel de la République Serbe, Nº 57/08.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 98100Enfants atteignantIEG = 75la cinquième annéed’école99Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé095100 100Survivance jusqu’àl’âge de 5 ansprincipal reste la pollution chimique 4 . La plupartdes centres industriels et des grandes villesne possèdent pas d’usines de traitement deseaux usées. Voici la raison pour laquelle, 44 000tonnes d’agents toxiques sont versées, par an,dans les lacs et les rivières 5 . La Serbie est le principalagent de pollution du Danube, alors que leCanal Danube-Tisa-Danube est le point le pluspollué de l’Europe 6 .• Pollution de l’air : les principaux agents de pollutionde l’air sont les installations de productiond’énergie et les usines industrielles possédantune technologie de nettoyage de l’air peu efficace.La production d’électricité et de chaleursont les responsables de l’émission d’environ345 000 tonnes de SO 2(dioxyde de soufre) paran, ce qui représente 98 % du total des émissionsde SO 27. L’air est pollué dans toutes lesgrandes villes ; cela est dû, notamment, au transportà base d’essence au plomb encore utilisée.• Gestion inadéquate des déchets : alors que l’efficacitéénergétique de l’industrie représente untiers de la moyenne mondiale, la production dedéchets est extrêmement élevée et le recyclagedes déchets et la sécurité de la gestion est faible.Les déchets municipaux collectés représentent60 % (2,2 millions de tonnes par an) du total.4 Slunge et collaborateurs, op. cit., p. 2.5 Site web du ministère de la Protection de l’environnement,(2011), .6 Gouvernement de la Serbie, Sustainable DevelopmentStrategy Is One of the Preconditions for Serbia Entering theEU, (Belgrade : le 5 décembre 2007), .7 Slunge et collaborateurs, op. cit., p. 2.99Indice d'Equité de Genre (IEG)Éducation100051L'autonomisation100 75 10098Activité économiqueEn général, les sites d’évacuation des déchetsne respectent pas les exigences techniques.Il existe 3251 sites de décharge de déchets illégaux,notamment dans les zones rurales 8 . Iln’existe pas de données fiables concernant lesdéchets dangereux produits par l’industrie, maisil n’existe pas non plus de plans de traitement oude sites de décharge pour ce genre de déchets.• Dégradation du sol : les terres agricoles couvrent60 % de la Serbie centrale et 82 % de Voïvodine.La qualité du sol est affectée par l’utilisationd’eaux polluées pour l’arrosage, par la pollutionchimique produite par les usines industrielles,par le déversement de déchets et par l’érosion.• Gestion forestière non durable : les forêts couvrent27 % du territoire du pays. Pourtant, lacroissance et la qualité des forêts sont menacéespar la surexploitation agricole, l’abattage illégalet la mauvaise gestion.Les liens entre l’environnementet la santé publiqueSuivant une étude menée par l’Organisation mondialede la Santé (OMS) dans laquelle on a analysé l’expositionde la population à différents facteurs environnementauxet suivant les données statistiques nationalespubliées en 2007, on estime que 27 % de la populationdu pays est atteinte par des maladies produites par desfacteurs environnementaux 9 . Compte tenu de ce qui8 Gouvernement de la Serbie, “Chapitre 27 : Environnement”dans Responses to the European Commission Questionnaire,(Belgrade : 2011), p. 150. Disponible sur : .9 Ibid, p. 92.Rapports nationaux 170 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


précède, et compte tenu du fait que les enfants sont legroupe le plus sensible aux répercussions négativesde l’environnement sur la santé, le Gouvernement aadopté, le 1 er octobre 2009, le Plan d’action sanitaireet de l’environnement pour les enfants. Les principalespriorités de ce plan sont d’augmenter l’accès àl’eau potable en zone rurale, d’augmenter l’accès à unassainissement adéquat, de réduire les accidents decirculation, la pollution de l’air, le contact des enfantsavec la fumée du tabac et d’arrêter, et plus tard interdire,l’utilisation d’essence au plomb.Les romanichels et les déplacés internes sontparticulièrement exposés aux risques de l’environnementen raison du manque de logements appropriéset d’accès à l’eau potable. D’autre part, la dégradationdu sol contribue à la pauvreté dans les zones rurales.Le premier et le deuxième rapport de progrès surla mise en place de la stratégie de réduction de lapauvreté ont conclu que : « les investissements eninstallations d’approvisionnement d’eau, en usinesde traitement d’eaux usées et en programmes exceptionnelsde nettoyage de l’environnement onteu un impact direct sur la réduction de la pauvreté.Indirectement, ces activités ont également contribuéà l’embauche de travailleurs semi-qualifiés etd’indigents » 10 .En 2009, l’Assemblée nationale a approuvé laLoi de Santé Publique. Cette loi reconnaît l’impactde l’environnement sur la santé comme l’un des domainesprioritaires à aborder en matière de santépublique. En outre, la Stratégie de Santé Publique 11 ,également adoptée par le Gouvernement en 2009,établit un ensemble d’activités stratégiques visant àprotéger la santé de la population des effets environnementauxnégatifs.Tendances économiques et problèmesenvironnementauxLors des dernières années le besoin d’élaborer unelégislation nationale de protection de l’environnementet de respect de la politique de l’UE a pousséà adopter un grand nombre de lois et de documentsnormatifs 12 abordant les enjeux identifiés (qualité del’air, gestion des déchets, qualité de l’eau, protectionde la nature, contrôle de la pollution industrielle etgestion du risque, produits chimiques, changementclimatique, bruit et protection civile), tel qu’indiquédans les réponses du Gouvernement au questionnairede la Commission Européenne (2011).Cependant, financer la mise en œuvre de laNSDS est un enjeu clé compte-tenu des tendanceséconomiques défavorables. Étant donné que le tauxde croissance a augmenté de 5,6 % entre 2001 et2008, les trois dernières années ont été caractériséespar un ralentissement de l’activité économique etdu développement des opérations de change, suivipar une diminution de la demande externe et interneet de l’investissement étranger. En 2010 le produitintérieur brut (PIB) a augmenté de 1,5 % 13 , alors quependant la même période les prix chez le consommateuront augmenté de 10,3 % et le coût de la vie de6,8 %. Le solde négatif du commerce extérieur a étéde 58 % et son déficit a grimpé à 4,3 milliards d’EUR(6,1 milliards d’USD) en 2010. La dette extérieurea atteint 80 % du PIB et l’entrée d’investissementsétrangers directs (IED) ont continué de chuter : ilsont atteint 654 millions d’EUR (931 millions d’USD)en 2010. De petites entrées d’IED et l’émission nettede crédit ont provoqué une dégradation de la balancedes paiements. La dette publique a atteint 36 % duPIB 14 . Les réserves obligatoires ont diminué et letaux d’intérêt de référence a augmenté, passant de9 % à 9,5 % en octobre 2010. Le dinar serbe a subiune dépréciation nominale de 10,7 % qui a été enréalité de 4,8 %.En 2010, le taux officiel de chômage a atteint20 % mais l’estimation du nombre réel de genscherchant du travail a été supérieure et le taux dechômage a diminué peu à peu. Le taux de travail surle marché noir a été élevé (20,6 %) en comparaisonavec le nombre total de travailleurs ayant un emploirégulier 15 .Le Gouvernement prévoit une légère relance del’activité économique grâce à une combinaison deplusieurs circonstances y compris la récupérationde l’économie de l’UE, la rectification réussie desaccords avec le FMI, l’accord des banques étrangèresles plus importantes du pays pour maintenirleurs niveaux d’exposition au risque de crédit afin destabiliser les marchés financiers, et les mesures depolitique économique adoptées. Cependant, début2011, les indicateurs macroéconomiques ont prévuune chute ultérieure de l’activité économique à lasuite d’un recul des industries, telles que les industriesmanufacturières et d’énergie électrique, ainsiqu’une diminution de la production agricole.Ayant hérité des problèmes économiques telsque l’insolvabilité des entreprises, les tendancesnégatives du marché du travail, l’augmentationcontinue du chômage, les mauvaises perspectivesquant à la croissance et l’augmentation de la pauvreté,cette crise devient non seulement plus profondemais également chronique. Le Gouvernements’est montré insensible face aux conséquences dela crise, raison pour laquelle il doit faire face à unmécontentement social de plus en plus grand. Dé-but 2011 le manque de mise en place des réformeset la dégradation des conditions de vie – notammentpour des groupes vulnérables tels que leschômeurs, la population rurale, les romanichels, lespersonnes handicapées et les retraités 16 – ont rendula situation encore plus compliquée du fait de laréorganisation du Gouvernement et de l’instabilitépolitique. Le mécontentement social et l’insécuritéaugmentent à cause du manque d’accès à l’emploiet à un travail digne. En même temps, l’avenir destravailleurs est de plus en plus incertain 17 en raisonde la faillite incessante des entreprises, de l’énormeendettement interne 18 et d’un processus de privatisationmal géré ayant entraîné un nombre accru degrèves en 2011 19 . Un grand nombre de nouveauxpropriétaires de sociétés privatisées avaient décidéde les racheter pour spéculer sur leur revente au lieude maintenir la production. Les syndicats estimentque le salaire moyen mensuel diminuera en 2011 de435 USD à 350 USD 20 .Les prévisions du Gouvernement pour 2011(une croissance du PIB de 3 %, un taux d’inflation de5,8 %, un taux de chômage de 20 %, la participationdes déficits de compte courant de 8,2 % du PIB, audessusde 40 % du PIB et la dette extérieure de 74,2% du PIB) sont déjà incertaines.ConclusionLe Gouvernement se trouve tout simplement en étatde déni par rapport aux tendances de l’économieréelle et à la chute évidente du niveau de vie de lapopulation, et il se borne à réaliser des déclarationsoptimistes pour le court terme. Cependant, le besoinde changer le cours préalable au développementet à la croissance est de plus en plus urgent car lasituation actuelle est insoutenable. Le modèle decroissance économique doit être changé et l’économiedoit viser le développement et l’augmentationde l’investissement et de l’exportation au lieu de secentrer sur la consommation.La Serbie devra faire de très grands efforts pouraccomplir les objectifs établis dans la NSDS : atteindrele PIB prévu. Actuellement, seul 0,3 % duPIB est destiné à protéger l’environnement. Ces modestesressources sont insuffisantes. Pour satisfairecette priorité, on estime qu’il est nécessaire d’obtenirun financement complémentaire des ressources de1,02 % en 2011. Le succès pour aborder les enjeuxenvironnementaux clé dépend du développementdes capacités pour la mise en œuvre, la surveillanceet l’exécution, ainsi que d’une prise de conscienceaccrue et de l’obtention de soutien politique pour lagestion environnementale. n10 Gouvernement de la Serbie, First Progress Report onthe Implementation of the Poverty Reduction Strategy inSerbia, (Belgrade : 2005) ; Second Progress Report on theImplementation of the Poverty Reduction Strategy in Serbia,(Belgrade, 2007).11 Ibid, National Strategy on Public Health, (Belgrade : 2009).12 Par exemple, la Stratégie nationale d’intégration de laRépublique Serbe dans les mécanismes de productionpropre du protocole de Kyoto dans le domaine de la gestiondes déchets, Agriculture et Forêts, la Stratégie nationale desanté publique, la Stratégie nationale sur l’introduction d’uneproduction propre. Consulter : .13 La source de toutes les données de ce paragraphe, saufen cas d’indication d’une autre source, est le Ministry ofFinance, Revised Memorandum on the Budget and EconomicFiscal Politics for 2011, with projections for 2012 and 2013,.14 B. Mijatovic, “The European View on Serbia”, Fokus,(Belgrade : Centre des Études démocrates-libérales, 2011).15 Gouvernement de la Serbie, <strong>Social</strong> Connection Control inSerbia, (2010), .16 Gouvernement de la Serbie, First National Report on <strong>Social</strong>Inclusion and Poverty Reduction in the Republic of Serbia,(Belgrade : mars 2010).17 Confédération des Syndicats Autonomes de la Serbie,250,000 Dismissals in Serbia in Last Two Years, (février2011), .18 Ibid. En 2010, la somme totale due aux banques était de27,17 milliards d’USD.19 Confédération des Syndicats autonomes de la Serbie.Consulter : .20 Ibid, 250,000 Dismissals… op. cit.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 171 Serbie


SLOVÉNIELa spirale descendante se poursuitEl fracaso del actual modelo socioeconómico del país es evidente. Los problemas sociales más acuciantes sonel desempleo creciente, la reforma del sistema de pensiones y la nueva legislación sobre el trabajo flexible demedio tiempo, que sustituye al sistema anterior de trabajo estudiantil. La bancarrota de muchas compañías ypequeñas empresas, la corrupción generalizada, la violación de los derechos de los trabajadores y la explotaciónde los trabajadores inmigrantes, junto con una nueva y controvertida central térmica a carbón han llegadoa los titulares. El país también ha enfrentado importantes sanciones de la UE por su deficientes políticasmedioambientales.Društvo HumanitasRene SušaLe manque de politiques économiques, environnementaleset sociales conduit le pays dans une spiraledescendante où l’exploitation de l’environnementet des individus continuent à affecter sérieusementle bien-être de la population. Ainsi, le pays va poursuivrela construction d’une nouvelle centrale électriqueau charbon, bien qu’il soit déjà tenu de payerdes pénalités s’élevant à 80 millions d’EUR (environ113 millions d’USD), conséquence de la violationdes normes de Kyoto. La crise économique a révéléde nombreuses contradictions et incertitudessous-jacentes dans la société slovène où le débatpublic tourne autour des questions liées à l’emploi,la solidarité intergénérationnelle, la répartition desrichesses et l’environnement.Durant la transition vers une économie de marché,la Slovénie est passée d’une situation sans pratiquementaucune différence sociale vers une autreoù, d’une part, il existe une élite bien déterminéequi détient une part importante de l’économie nationaleet d’autre part, un nombre record de personnespauvres et de chômeurs. L’élite économique s’estconsolidée par le biais d’achats d’actions, réalisésde manière contestée, par les propres dirigeants desentreprises. Certains auteurs de ces acquisitions (etautres comportements frauduleux) sont actuellementtraduits en justice, l’un des cas compromettantle premier ombudsman slovène devenu par lasuite le directeur d’une importante compagnie decombustible et qui est actuellement en procès pourblanchiment d’argent.La fracture sociale se reflète également dansles services de base accessibles à la population. Parexemple, la division des soins de santé en systèmespublics et privés a entraîné une détérioration dela qualité dans le système public avec des tempsd’attente atrocement longs. Il arrive souvent qu’unmême médecin qui donne ses rendez-vous avec plusieursmois d’attente dans une clinique publique,reçoive ses patients immédiatement lorsque le rendez-vousest pris dans sa clinique privée.La solidarité intergénérationnelleLe système des retraites est basé sur le concept desolidarité intergénérationnelle car la population activeactuelle contribue avec ses impôts à payer laIndice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9999+100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 anspension des retraités. Cependant, avec la montée duchômage et un nombre de retraités qui augmente enraison du vieillissement de la population, ce modèles’écroule. De nouvelles lois, comme celle que nousprésentons ci-dessous sur le travail flexible à mitemps,tendront à faire diminuer les contributionsau fonds de pension car les employeurs préfèrerontembaucher des travailleurs « flexibles » allégeantainsi le poids des charges sociales.Les jeunes et les chômeursIl y a eu une augmentation de 15,6 % du nombrede chômeurs inscrits entre janvier 2010 et janvier2011 1 , représentant 11,8 % de la population active 2 .Le nombre réel est estimé entre 160 000 et 200 000personnes. Environ 25 % des jeunes n’appartenantpas au système d’éducation formelle, sont au chômage3 .En même temps, près de 75 % des personnesentre 20 et 24 ans étaient inscrites dans les programmesd’études secondaires ou tertiaires en2010 4 . Il est devenu courant que les jeunes s’inscriventà des programmes d’études de troisièmecycle pour maintenir leur assurance maladie ettoucher certaines prestations (nourriture et aide aulogement) et pour arriver à trouver un travail par lebiais du réseau étudiant de l’emploi. Les difficultés1 ZRSZ, Trg dela v številkah, .2 ZRSZ, Stopnja registrirane brezposelnosti, .3 Milan Lavrič et al., Mladina 2010, (Liubliana: URSM,2010), p.109, .4 Ibid,p. 110.98100 10099+Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 75Éducation100047L'autonomisation100 79 100100Activité économiquerencontrées par les jeunes diplômés lors de leur recherched’emploi se confirment lorsque l’on constateune augmentation de 240 % entre 2000 et 2010 dunombre de jeunes chômeurs ayant une éducationtertiaire. Il existe également une forte disparité degenre, puisque le pourcentage de jeunes femmes auchômage est le double de celui des hommes 5 .Emplois à temps partiel : un problèmeà temps pleinLa proposition de loi sur le travail flexible à tempspartiel est liée à la question du chômage. Ce typede contrat de travail permet aux employeurs de réduireleurs coûts, car ils ne sont pas tenus de payerdes cotisations de retraite, congés maladie, etc. Lepourcentage total des impôts et autres contributionspour cette catégorie de travail se monte à 17% du coût du travail 6 , de deux à trois fois moins quedans une situation normale. Puisque le travail esteffectué strictement à la journée, il existe une grandeflexibilité pour embaucher et licencier. Beaucoupd’étudiants qui obtiennent leur travail par le biais desagences de placement d’étudiants perdent leur emploiune fois leurs études terminées tout simplementcar les élèves inscrits coûtent beaucoup moins cheret sont plus flexibles par définition. Le mécanismedes agences influence fortement le marché du travailparce qu’il exerce une pression à la baisse sur lessalaires et augmente la précarité de l’emploi.5 Les données officielles ne montrent pas cet écart : de fait,elles montrent que le chômage chez les femmes est plusfaible que chez les hommes. Voir ibid, pp.113–16.6 Mladi podjetnik, Koliko delodajalca stane delo prekštudentske napotnice, Rapports nationaux 172 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


La nouvelle loi sur la flexibilité du travail (approuvéen octobre 2010 et qui est entrée en vigueuren janvier 2012) aborde le problème du travail desélèves en limitant le nombre d’heures à un tempspartiel, auparavant illimité, à 60 heures par mois etelle fixe aussi une limite de 6.000 EUR (8 492 USD)de revenu annuel, qui était lui aussi illimité auparavant.Elle augmente aussi considérablement lesgroupes de personnes autorisées à travailler seloncette modalité, à savoir : les retraités, les chômeurs,les demandeurs d’asile et d’autres personnes nonactives 7 . En outre, l’employeur n’est pas tenu depayer la totalité des cotisations de la sécurité sociale(1 heure de travail ne compte seulement que pour40 minutes de travail « normal »). Les organisationsd’étudiants et les syndicats ont lancé une campagnemassive contre cette législation et la tenue d’un référendumaura lieu au printemps 2011.Réforme des retraites et conditions de travailUn autre référendum est prévu pour contemplerla réforme proposée pour le système des retraitesfondée principalement sur une prolongation de lapériode de travail à un minimum de 38 ans (40 anspour les hommes) avec une retraite à l’âge de 65ans 8 . Selon une récente étude d’Eurofound, seulement13,5 % des travailleurs slovènes ont réponduaffirmativement à la question de savoir s’ils seraienttoujours en mesure d’accomplir leur travail à 60 ans,comparativement à une moyenne de 44,1 % dans lesautres pays de l’Union européenne. En outre, 59,2% des répondants ont dit qu’ils avaient continué àtravaillé tout en étant malades au cours des 12 moisprécédents, comparativement à une moyenne de39,2 % dans l’UE ; près de 75 % ont déclaré avoirtravaillé à un rythme très soutenu ; seulement 13,5% ont affirmé être très satisfaits de leur travail, comparativementà la moyenne européenne de 25 %.Le problème de l’exploitation des travailleursimmigrés pour les travaux physiques les plus pénibles(surtout dans le secteur de la construction)a été révélé l’année dernière lors de la faillite denombreuses entreprises. Cependant, dans de nombreuxcas (par exemple, celui de la SCT, l’entrepriseslovène la plus importante dans le domaine de laconstruction), la société mère a survécu en sacrifiantdes milliers de travailleurs qui n’ont jamais reçul’intégralité de leur salaire 9 . Invisible Workers of theWorld (IWW, les travailleurs invisibles du monde)10estime que quelque 14 000 travailleurs migrantssont retournés dans leur pays d’origine au cours destrois dernières années sans jamais avoir touché leursalaire. Il a été fait état d’heures supplémentairesobligatoires et restées impayées, des cas de résidenceforcée dans les logements des entreprises, demenaces de déportation et d’autres formes d’abus.Charbon : une ressource du XIXe sièclepour la société du XXIe siècleIl est difficile de croire que le plus gros investissementde la politique énergétique slovène sera,semble-t-il, une centrale à charbon de EUR 1,2 milliardsd’EUR (1,7 milliard d’USD) à Otanj. On estimeque la nouvelle centrale proposée, qui dépenddu lignite pour produire de l’électricité, va générerenviron 3 500 GWh par an, soit environ la mêmequantité que la vieille centrale qu’elle remplacera. Leprojet proposé a été sévèrement critiqué en raisonde possibles défaillances environnementales, économiqueset juridiques. Il n’est pas toujours pas clairencore si l’accord pour sa construction est valablecar il n’y a pas eu d’appel d’offre public 11 .Le coût du projet a plus que doublé depuisl’analyse préliminaire. Les coûts de construction,pour chaque MW installé, sont également estimésau double par rapport à des projets comparables enBosnie-Herzégovine et en Allemagne 12 . En outre, ilexiste d’évidentes inquiétudes environnementalescar on estime que l’usine produira plus de 100 millionsde tonnes de CO2 sur toute sa durée de vie. LaSlovénie dépasse déjà de deux à quatre fois le niveauacceptable d’émissions de gaz à effet de serre etd’épuisement des ressources naturelles 13 . L’objectifde l’UE de 2 tonnes de CO2 par personne jusqu’en2050 est la quantité que la centrale d’Otanj produiraà elle seule. Ceci ne permettra pas à la Slovénie d’atteindrel’objectif commun.Quelques lois mais sans ordreLe brûlage illégal de déchets à la cimenterie Lafargede Trbovlje représente un autre problème urgent caril a des effets graves sur la santé des personnes etl’environnement local. La bataille juridique à ce sujetsemble avoir été gagnée mais la société continue àignorer les arrêtés judicaires 14 . Cela n’est guère surprenantdans un pays où les entreprises publiquesse considèrent encore au-dessus de la loi, comme entémoigne l’abus constant du secteur de la constructiondans lequel de nombreuses entreprises sont (dumoins partiellement) détenues par l’État.Un rapport récent d’Umanotera, la Fondationslovène pour le développement durable, cite « lemanque de mise en œuvre des programmes déjàacceptés comme étant le plus grand problème de lapolitique environnementale slovène 15 ». Le trafic, lagestion des déchets et la politique énergétique sontcités comme étant particulièrement problématiques.Le pays produit 435 kg de déchets par personne etn’en recycle que 25 % environ. Le programme desurveillance nationale pour la protection de l’environnementest apparemment inefficace puisque seulement14 sur les 188 indicateurs ont été marqués 16 .Parmi les nombreuses entreprises qui ont faitfaillite et qui exploitaient les travailleurs, les plus malnotées sont celles qui rencontraient précédemmentun succès certain et qui ont été impliquées dans lerachat de sociétés par leurs propres dirigeants. Ellesont bénéficié de prêts bancaires massifs provenantde banques slovènes ​partiellement étatiques. La sécuritéde ces emprunts s’appuyait sur les propresactions rachetées par les dirigeants, entraînant ainsile pire des copinages, car la plupart des banquiers ethommes d’affaires slovènes ont été impliqués dansces acquisitions.ConclusionLa Slovénie doit faire face à des sanctions significativesde l’UE concernant sa politique environnementale,mais l’élite dirigeante ne semble pas vouloirrépondre aux défis de la protection de l’environnement.L’énorme centrale thermique au charbon etl’investissement qu’elle implique laissent peu deplace pour de futures sources d’une énergie efficaceet renouvelable. Bien que l’efficacité énergétiquepuisse réduire les émissions, même à court terme,elle ne parvient pas à recevoir un soutien suffisantdu Gouvernement 17 .Les programmes d’efficacité énergétique pourraientégalement créer et maintenir des emplois etavoir des retombées économiques, sociales et environnementalesà long terme. En revanche, il estprobable que la nouvelle loi sur la flexibilité du travailfasse baisser les normes, augmente le nombre depersonnes pauvres même avec un emploi, intensifieles pressions sur les emplois « normaux », augmentel’insécurité de l’emploi et cause la perte desbénéfices des salariés à long terme 18 . Le fait qu’il yait tellement de jeunes chômeurs ainsi que beaucoupde personnes qui commencent à travailler à un âgeavancé, sape les bases financières du modèle de solidaritéintergénérationnelle sur lequel est construitle système des pensions de l’État. La réforme desretraites proposée, qui ne parle que de l’allongementde l’âge de la retraite et du nombre d’années de travailnécessaires pour prendre sa retraite, ne traite pas leproblème principal. n7 DZ RS, Zakon o malem delu, Uradni list RS no. 102-01/10-28/87 EPA 1133-V, .8 DZ RS, DOPOLNJEN PREDLOG ZAKONA o pokojninskem ininvalidskem zavarovanju (ZPIZ-2), druga obravnava, .9 Seules les filiales ad hoc se sont déclarées en faillite, ellesn’ont pratiquement aucun actif propre.10 IWW, Nevidni delavci sveta, .11 RTVSLO, Bi morali dobavitelje za TEŠ 6 izbrati na razpisu?,.12 M. Dodevska, “TEŠ 6 za telebane”, Delo.si, (19 décembre2010), .13 D. Plut, Trajnostni razvoj med mavrico teorij in skromnoprakso, (2010), .14 EKO KROG, Sodba v imenu ljudstva, .15 Umanotera, Ogledalo vladi 2010: Nevladni zeleni monitor,.16 Ibid,pp. 9-1117 Focus, Sporočilo za javnost: Ne zaklenite nam prihodnosti!Poziv vladi pred odločanjem o TEŠ 6, .18 ZRSS, Malo delo – miti in dejstva, .<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 173 Slovénie


SOMALIELa quête de stabilitéLes dernières institutions nationales du pays se sont effondrées en janvier 1991, lorsque le défunt président SiadBarre a fui la capitale. Depuis lors, la lutte entre les factions et la formation de fiefs et de mini-États ont remplacéle gouvernement unifié. A l’heure actuelle, coexistent au moins cinq autorités et divers groupes qui luttent pourune raison ou une autre. L’instabilité et l’insécurité ont conduit le pays dans la pauvreté malgré sa faible densitéde population et ses importantes ressources naturelles. Il y a beaucoup à faire pour rétablir la stabilité et l’Étatet pour rendre possible un développement efficace.SOCDAHussein Hassan MohamoudIlyas Ibrahimm MohamedKhadija Abukar AhmedAbdirashiid Saleiman YusufAbdullahi Ahmed MohamedDepuis l’indépendance en 1960 et malgré l’abondancede ressources sur le territoire, le manque depolitiques de développement efficaces de la partdes gouvernements successifs, a contribué à uncycle de pauvreté continu qui a souvent conduit àl’insubordination. En 1969, par exemple, un coupd’état a installé des officiers militaires au pouvoir eta conduit à un régime pro-socialiste qui a érodé lesdroits humains. Le malaise social a permis qu’ungroupe rebelle défie en 1980 le régime militaire defeu le général Mohamed Siyad Barre, situation quis’est aggravée en janvier 1991 lorsque les milicesrebelles ont renversé le régime mais sans jamaisréussir à colmater le vide du pouvoir. Lorsque lesfactions rebelles ont retourné leurs armes les unescontre les autres, il s’en est ensuit une longue luttepour le pouvoir qui dure depuis déjà deux décennies.Des structures de gouvernement sont apparuespar la suite dans le Somaliland et le Puntland dans lenord, offrant ainsi un certain niveau de stabilité et de repriseéconomique. Toutefois, ces structures de gouvernementn’ont démontré aucune inquiétude au sujet desquestions environnementales et le territoire potentiellementriche de la Somalie est marqué par la dégradation.Cependant, malgré l’instabilité, la Somalie amaintenu une économie informelle saine qui reposeprincipalement sur l’élevage du bétail, les envois defonds de l’étranger et les télécommunications. Leniveau de vie, en fait, s’est amélioré depuis le débutde 1990, plus rapidement en Somalie que dans lamoyenne des pays d’Afrique subsaharienne 1 . Le plusintéressant de ce succès relatif, c’est qu’il a été atteinten l’absence de tout gouvernement central effectif.Néanmoins, environ 43 % de la population vit encoreavec moins d’1 dollar par jour, un chiffre qui s’élèveà 53 % dans les zones rurales où l’extrême pauvretéest plus répandue 2 . Le pays reste de toute façon fortementdépendant de l’aide internationale.1 B. Powell, “Somalia: failed state, economic success?”Freeman 59(3), (Avril 2009).2 Rural Poverty Portal, “Poverty in Somalia”, .Indice des Capacités de Base (ICB)33100Accouchements assurés par par du dupersonnel médical spécialisé0ndEnfants atteignantla cinquième annéed’école100 10082Survivance jusqu’àl’âge de 5 ansL’économieEn raison de l’absence de statistiques officielles et dela récente guerre civile, il est difficile d’estimer la tailleou la croissance de l’économie. Le CIA World Factbooka évalué le PIB à 5,61 milliards d’USD en 2008,5,75 milliards d’USD en 2009 et 5,89 milliards d’USDen 2010, avec un taux de croissance réel de 2,6% 3 .L’agriculture constitue le secteur économique leplus important : il représente environ 65 % du PIB etemploie 71 % de la main d’œuvre disponible. L’élevagereprésente environ 40 % du PIB et plus de 50 % desrecettes des exportations 4 . Les autres exportationsprincipales sont le poisson, le charbon, les bananes etle pays est également un important fournisseur d’encenset de myrrhe au niveau mondial. Les principauxproduits importés sont le sucre, le sorgho, le maïs, leqat (Catha edulis, un stimulant naturel) et des biensindustriels. Les importations totales représentent environ798 millions d’USD par an, tandis que les exportationstotalisent environ 270 millions d’USD, laissantapparaître un énorme déficit commercial.Ce déficit, cependant, est largement compensépar les envois de fonds de la diaspora somalienne.Les sociétés d’envois de fonds (les hawalas) se sontconverties en une industrie majeure dans le paysavec une estimation d’envois annuels de 1.600 millionsd’USD, soit 71,4 % du PIB, transférés vers larégion par le biais des sociétés de transfert d’argent 5 .3 CIA World Factbook, Somalia, (2011), .4 Ibid.5 PNUD Somalia, “Sustainable partnerships with the SomaliDiaspora forged”, .Profitant de la situation du pays, proche de lapéninsule arabique, les commerçants somaliens ontcommencé à contester 100de plus en plus la dominationtraditionnelle de l’Australie sur les marchés du bétailet de la viande dans le golfe Persique. En réponse àcela, les États arabes ont réalisé des investissementsstratégiques dans le pays, 32 en construisant des infrastructurespour l’exportation0de bétail par l’Arabiesaoudite et l’acquisition de vastes étendues de terresagricoles par les Émirats arabes unis 6 . En outre, desflottes 100de pêche d’Europe et d’Asie 67ont réalisé 100 des accordscommerciaux 100 relatifs à la pêche dans la régiondu nord du Puntland. Cette région est considéréecomme l’une des régions en matière de pêche lesplus riches au monde, ce qui a conduit à un grandnombre de navires étrangers à pêcher illégalementdans les eaux somaliennes 7 .D’autre part, le secteur industriel basé sur lesproduits agricoles ne représente que 10 % du PIBde la Somalie 8 . Les entreprises manufacturièresmoyennes et grandes se sont effondrées en raisondu conflit. Toutefois, grâce aux importants investissementslocaux issus de la diaspora somalienne,de nombreuses petites usines ont rouvert et denouvelles ont été créées. Il s’agit de conserveriesde poisson et de transformation de la viande dans lenord, ainsi que près de 25 usines dans la région deMogadiscio qui fabriquent des produits tels que l’eauminérale, les pâtes, les bonbons, les sachets en plastique,les lames, le cuir et les fourrures, le détergentet le savon, l’aluminium et les matelas en mousse 9 .Selon le PNUD, l’investissement dans l’industrielégère s’est également développé à Bossasse etHargeisa, démontrant la confiance des entreprisesen la croissance de l’économie 10 . En 2004, une usined’embouteillage de Coca-Cola de 8,3 millions d’USDa ouvert ses portes à Mogadiscio grâce à des investisseursde différents groupes en Somalie. Le6 C. West, “Africa a poor alternative to Aussie exports”,Farm Weekly, (12 août 2010), .7 Partnership Africa Canada (PAC), “Peace and developmentin northern Somalia: opportunities and challenges”, (2009),.8 CIA, op. cit.9 M. Yuusuf, “Somalia: The resilience of a people”, The AfricanExecutive, (2011),10 AfricanSeer, Economy in Somalia, .Rapports nationaux 174 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


dynamisme du secteur privé a également attiré lesinvestissements étrangers de sociétés comme GeneralMotors et Dole fruits 11 .Les télécommunicationsLe secteur des télécommunications reçoit un grandsuccès en Somalie. Le nombre de téléphones enlignes fixes a montré une amélioration spectaculaireen passant d’environ 2 pour 1 000 habitants en 1990à 25 pour 1000 en 2011. Environ neuf opérateursprivés offrent des services de télécommunicationsconcurrentiels dans presque tous les recoins du pays.Une recherche a indiqué que la Somalie est passée du29 ème poste au 8 ème parmi les pays africains étudiés 12 .Financées par des hommes d’affaires somalienset soutenues par l’expertise de la Chine, la Coréeet l’Europe, les entreprises de télécommunicationsémergentes offrent également, à un prix abordable,des services de téléphonie mobile et d’Internet 13 .La Somalie occupe une position de premier plan enmatière de téléphonie mobile (n° 16 en Afrique) et enutilisateurs d’Internet (n° 11), tandis qu’elle est classésà la 27 ème position pour le nombre de ménagesayant un téléviseur 14 .La déforestation et l’érosion des solsSelon le Réseau pour la gestion des ressources dela Somalie (RMSN, selon son sigle anglais pour ResourceManagement Somali Network) et d’autresagences locales de l’environnement, l’environnementest l’un des secteurs du pays qui a soufferten raison de l’anarchie et en particulier à cause del’absence d’un gouvernement fonctionnel.Les peuples côtiers, par exemple, se sontplaints du déversement de déchets dangereux et lesbergers ont dénoncé l’augmentation du recul des forêts.Le pays est marqué par une pénurie d’eau due àde très faibles précipitations (250 mm par an), tandisque l’évaporation est généralement très élevée (plusde 2000 mm par an) 15 . Les fréquentes sécheresses,surtout dans le sud, ont de graves répercussions surles communautés rurales dont la subsistance dépendfortement de la disponibilité des eaux de pluie.Ces sécheresses sont souvent suivies d’inondationsdévastatrices 16 . L’élagage des arbres, le surpâturageet la déforestation contribuent à l’érosion des sols età d’autres problèmes environnementaux.La déforestation en Somalie est étroitementliée à la production de charbon à usage local et pourl’exportation. Elle exerce une sévère pression surles ressources en bois, surtout dans un pays dontseulement 9 % du territoire est couvert par des forêtsde basse densité. Selon la Banque mondiale, 55 %de la surface de la Somalie est appropriée pour le pâturage,tandis que l’Organisation des Nations Unies11 Ibid.12 Powell, op. cit.13 A. Mohamed and S. Chidress, “Telecom firms thrive inSomalia despite civil war, shattered economy”, The WallStreet Journal, (11 mai 2010).14 Powell, op. cit.15 A. Saidyhan, Somalia’s Degrading Environment, (11 octobre2001).16 Ibid.pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) estime queseulement 29 % montre un certain degré d’aptitudeà la production de bétail 17 .La terre est également affectée par des méthodesd’irrigation inefficaces qui conduisent à desconcentrations accrues de sel, ayant ainsi un effetnégatif sur les terres agricoles.Le déversement de déchetsLes personnes vivant sur ​la côte se plaignent souventdes déchets rejetés en mer. Au début du mois d’avril2011, par exemple, les résidents du quartier de Hobyo,situé à 660 km au Nord-est de Mogadiscio, ont pu voirtrois grands containers en forme de tambour qui étaientbalayés sur la plage par la marée haute. Les résidentsavaient peur que ces containers puissent contenir desdéchets dangereux ou des produits chimiques industrielsauxquels ils reprochent une série de problèmesde santé survenus dans la région. Ce cas a relancé d’ancienssoupçons selon lesquels le milieu marin serait entrain d’être détruit par des navires étrangers, lesquels,profitant de la confusion politique du pays et de l’absenced’un gouvernement central, déverseraient desdéchets dangereux dans les eaux somaliennes 18 .Le Programme des Nations Unies pour l’environnement(PNUE) et d’autres organismes s’étaientengagés dans le passé à évaluer le problème du déversementillégal de déchets, cependant, le manquede sécurité provoqué par la guerre dévastatrice dela Corne de l’Afrique a entravé les efforts locaux etinternationaux 19 .Les services sociauxOutre les défis environnementaux et économiques,toutes les régions somaliennes doivent faire face àde réels défis en termes d’accès, de disponibilité etde qualité des services sociaux essentiels.Le taux de scolarisation, par exemple, est l’un desplus mal notés en Afrique. seulement un peu plus de20 % des enfants d’âge scolaire fréquentent une écoleet les filles ne représentent qu’un tiers de ce pourcentage.Ceci s’accompagne d’un taux élevé d’abandondes femmes. Tant la qualité que la quantité des ressourcesvitales et des matériaux d’enseignement sontinsuffisantes, même dans les régions relativementplus stables telles que le Somaliland et le Puntland.En l’absence d’un gouvernement pleinementfonctionnel et suite à l’évaluation générale des besoinsréalisée durant la période 2005-2006 20 , de nombreuxgroupes ont soutenu le système d’éducation publique,y compris les organismes des Nations Unies (dansle cadre de la Stratégie d’assistance en Somalie de17 A.E. Mohamed, Somalia’s Degrading Environment: Causesand Effects of Deforestation and Hazardous Waste Dumping inSomalia, (2001), .18 A. Khalif, “Suspicious containers wash up on Somalia’scoast”, Africa Review, (8 avril 2011).19 Ibid.20 ONU, “Somali Joint Needs Assessment: <strong>Social</strong> Servicesand Protection of Vulnerable Groups Cluster Report,”(«Évaluation conjointe des besoins des Somaliens : rapportécrit sur ​les services sociaux et la protection des groupesvulnérables») texte intermédiaire, (14 septembre 2006),.l’ONU), des fondations, des banques internationaleset régionales, des ONG et autres associations. Cesgroupes ont également contribué à l’amélioration dela santé, de l’eau et de l’assainissement. Ces servicesse trouvent clairement entre des mains privées nonréglementées ou dépendent de ressources traditionnelleset, dans la plupart des cas, les familles pauvresn’ont pas la possibilité d’y accéder 21 . Outre les guerresinterminables et une culture de l’impunité qui augmenteet qui a érodé la capacité des gens à jouir deleurs droits civils et politiques, l’absence d’un gouvernementcentral effectif a également sapé les droitséconomiques, sociaux et culturels.L’inéquité de genreLes femmes représentent 50 % de la population maisse trouvent reléguées en ce qui concerne l’accès auxressources et services. Des politiques sont nécessairespour assurer l’accès à l’éducation et à la santé desfemmes et d’autres groupes défavorisés, notammenten matière de santé maternelle et de planification familiale.Davantage de recherches et d’améliorations sontnécessaires dans les domaines du VIH / sida et à l’égardde la mutilation génitale féminine (MGF). Celle-ci estprofondément enracinée dans la culture somalienne,ce qui nécessite des mesures fortes afin d’éliminer oudu moins minimiser son impact sur la société dans sonensemble et sur les femmes en particulier.La prestation équitable de services sociaux exigedes politiques et des ressources adéquates, ainsiqu’une législation. L’instabilité en Somalie, causée pardeux décennies de luttes pour le pouvoir, a entravé lacapacité du pays à autonomiser les femmes à traversla formation et les incitations et à apporter des améliorationssignificatives en matière d’égalité des genres.ConclusionLes événements survenus en Somalie sont la preuveque le développement est lié à la paix et la stabilité. Misà part les factions claniques, les autorités autoproclaméeset les miliciens en guenilles, de nombreux opportunistessont présents pour piller la propriété privée, lesressources naturelles et l’environnement. Concernantce dernier, des activistes de la société civile insistent surle fait qu’il faut inverser cette tendance négative. Aucunecoordination centrale ne s’est chargée de la protectionde l’environnement, même sous le dernier Gouvernementd’avant janvier 1991 et il nécessaire d’arriver à unegestion saine. Le Gouvernement fédéral de transition abesoin faire de nouvelles tentatives pour mettre en placeles ministères appropriés. Des politiques publiques devraientêtre mises en œuvre pour protéger et améliorerl’environnement.Une façon d’inverser les tendances négativesest de renforcer la coopération pour le développementsous l’objectif 8 des Objectifs du Millénairepour le développement et des autres programmesde développement afin d’encourager une coopérationplus étroite entre la Somalie et ses partenairesau développement. Il est temps de transformer lesrisques en opportunités et défis pour stabiliser etreconstruire un pays et une société déchirés par desannées de guerre civile. n21 Ibid.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 175 Somalie


SOUDANDeux pays, des défis supplémentairesLa sécession du Sud-Soudan causera de graves impacts tant dans l’État du nord que dans celui du sud. Lesprojets de développement du Nord-Soudan seront menacés en raison de leur dépendance des recettes dupétrole, tandis que le Sud-Soudan doit faire face à des pénuries économiques et sociales importantes quipourraient faire de lui un état défaillant. Bien que certains indicateurs d’égalité des sexes aient progressé, labrèche entre les femmes et les hommes est loin d’être fermée. La signature de l’Accord de paix global en 2005a préparé le terrain pour que les organisations de la société civile jouent un rôle efficace dans le contrôle desélections.National Civic ForumMdani Abbas MedaniAfaf AwadL’histoire politique du Soudan a marqué un pointd’inflexion en 2010. Des élections présidentielleset parlementaires ont eu lieu et des préparatifs ontété entrepris en vue du référendum sur l’indépendancedu Soudan du Sud, incluant un recensementpour déterminer la composition et le nombre del’électorat. Le référendum s’est déroulé du 9 au 15janvier 2010 et les résultats publiés le 7 février ontmontré que 98% des votants étaient favorablesà l’indépendance. Par conséquent, il a été décidéque la République du Soudan du Sud serait déclaréeofficiellement État souverain en juillet de cettemême année.D’après une enquête sur la pauvreté effectuéeen 2009, 46,5% de la population soudanaise vit actuellementsous le seuil de pauvreté 1 . Les problèmesfondamentaux sont, entre autres, les conflits, lesdéplacements de population et l’insécurité alimentaire,dûs principalement aux catastrophes naturelleset à celles dont les hommes sont en partie responsables,telles que la sécheresse, la désertification etles inondations 2 .Brève histoire des conflitsDepuis son indépendance le Soudan a essuyé deuxguerres civiles, la première entre 1955 et 1972 et laseconde (considérée comme un prolongement de lapremière) entre 1983 et 2005. Les racines du conflitremontent à l’époque coloniale, lorsque les anglaisétablirent des administrations distinctes pour lazone nord, plus ressemblante à l’Égypte islamique,et la zone sud, analogue au Kenya et au Tanganyika(l’actuelle Tanzanie). Le processus d’indépendancese déroula sans la participation d’émissaires du sud,1 Ministère du Bien-Être et de la Sécurité sociale etConseil national de la population, Sudan MillenniumDevelopment Goals Progress Report 2010 (Rapport2010 sur la réalisation des Objectifs du Millénaire pourle Développement), .2 Programme des Nations Unies pour l’environnement(PNUE), Sudan: Post-Conflict Environmental Assessment(Soudan : Rapport d’évaluation environnementale postconflit), (Nairobi, 2007), .Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 6949100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé049Enfants atteignantla cinquième annéed’école100 100Survivance jusqu’àl’âge de 5 ansde sorte qu’on ne prit pas en compte leurs revendications,ni leurs besoins. Cela mena à la PremièreGuerre civile soudanaise, qui a débuté lorsque leGouvernement a attaqué des manifestants et desdissidents politiques du sud, déchaînant ainsi unerecrudescence de la violence et des mutineries quiont dégénéré en une guerre à grande échelle. Cettephase du conflit s’est conclue par la signature del’Accord d’Addis-Abeba qui devait octroyer au sudun certain degré d’autonomie.Cependant, les termes de l’accord ne furent pastotalement appliqués et la Seconde Guerre civile soudanaisea éclaté. Elle a pris fin officiellement lors de lasignature en 2005 de l’Accord de paix global (APG)entre le parti du gouvernement, Parti national duCongrès (NCP, selon son sigle en anglais), et le Mouvementde libération du peuple soudanais (SPLM,selon son sigle en anglais). Dans la période qui asuivi, le référendum sur l’indépendance du Soudandu Sud a été proposé.89Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 40Éducation100200L'autonomisation100 76100Activité économiqueDéfis environnementauxLe territoire soudanais doit faire face à des défisenvironnementaux particulièrement graves, entreautres l’érosion du sol, la dégradation des terres, ladéforestation et la désertification, qui compromettentsérieusement les possibilités d’une paix à longterme et d’un développement durable. Par exemple,les camps de déplacés —de plus en plus étendus—mettent déjà les forêts en péril. Pratiquement 75 %de l’énergie provient des combustibles traditionnelstels que le bois, ce qui (conjointement à la demandede charbon végétal) a mené à la destruction denombreuses forêts. Ceci accélère le processus dedésertification et le Sahara poursuit sa progressionvers ce qui était naguère des terres arables et forestières3 . Le Programme des Nations Unies pourl’Environnement (PNUE) a identifié également deuxautres causes essentielles de la désertification : laconversion de zones semi-désertiques en zones désertiquesen raison du changement climatique ; et ladégradation, par les activités humaines, des milieuxambiants existant dans le désert, dont les oueds etles oasis 4 .Bien que pratiquement 4 % des terres ait été déclaréessites protégés par le Gouvernement, il existeencore beaucoup de braconnage dans tout le pays, cequi met en danger les populations animales. De nombreuxefforts de conservation ont été tronqués par lesconflits civils, en grande partie parce que les militairesavaient pris le contrôle des forêts du Sud-Soudan,d’une grande richesse écologique 5 . Selon le PNUE, ilexiste des liens indéniables entre les problèmes environnementauxet les conflits soufferts par le pays : «La concurrence dont font l’objet les réserves de gaz etde pétrole, les eaux du Nil et le bois, ainsi que les problèmesliés à l’utilisation des terres agricoles sont autantde facteurs qui contribuent à attiser ou à perpétuerle conflit au Soudan. Les controverses sur les terrainsde pâturage et les terres agricoles non irriguées dansles zones les plus arides du pays sont une illustrationparticulièrement frappante de la relation entre la raretédes ressources naturelles et les conflits violents 6 ».3 Countries Quest, Sudan, Land and Resources, EnvironmentalIssues, .4 UNEP, op. cit.5 Countries Quest, op. cit.6 UNDP Sudan, Environment and Energy for SustainableDevelopment , (2011), .25Rapports nationaux 176 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


Malgré la grave pénurie d’eau, les inondationssont fréquentes – aussi bien les crues soudaines queles inondations plus générales causées par le débordementdu Nil et de ses affluents – et qui provoquenten conséquence des dommages généralisés, allantjusqu’à l’érosion des berges et la perte des culturesqui en découle 7 .Nouveau défis pour les deux SoudanLe Soudan du Nord et le Soudan du Sud poursuiventdes négociations sur des sujets non encore résoluscomme celui de la démarcation des limites, particulièrementpour la région pétrolière d’Abyei, quia fourni en 2003 plus d’un quart de la productiontotale de brut du pays, alors que les volumes ontchuté récemment et que certaines études suggèrentque les réserves de la région seraient pratiquementtaries 8 . Un référendum sera organisé pour décider siAbyei formera partie de la région de Bahr El Ghazaldu Sud-Soudan ou de la région du Kordofan-Sud duNord-Soudan. L’idée première avait été de faire ceréférendum simultanément à celui d’autodétermination,mais il a fallu le reporter à plus tard en raison desgraves différends sur le processus à suivre et depuisla violence s’est accrue.La sécession aura des retombées négatives surl’économie du Nord-Soudan, très dépendante desrecettes du pétrole, tandis que le Sud devra surmonterde graves obstacles pour s’établir comme unÉtat viable. Par exemple, bien que le territoire dusud abrite les trois quarts des sites de production depétrole, quasiment toutes les raffineries et les oléoducsse trouvent dans le nord. De plus, la questionde la nationalité et de l’intégration n’a toujours pasété résolue. Le Gouvernement du Sud-Soudan réussira-t-ilà se forger une identité nationale qui unisseles peuples habitant son territoire, l’un des raresau monde à réunir une telle diversité linguistique etculturelle ? Et il y aura d’autres défis plus importantsencore, tels que la pauvreté, le manque d’accès auxservices de santé et une mortalité maternelle et infantilesurabondante 9 .Inégalité des sexesLe pourcentage de filles inscrites à l’école primaireest passé de 64,4 % en 2006-2007 à 69,9 % en 2009,quant à celui des filles inscrites en secondaire il estTABLEAU 1Résumé de l’éducation générale au SoudanNiveauInstitutionsÉlèvesHommes Femmes TotalProfesseursTout le Soudan 3.4301 3.174.809 2.641.668 5.816.477 194.800École maternelle 8.648 228.944 221.188 450.132 14.964Enseignement primaire 14.071 2.332.612 1.967.125 4.299.737 141.315Enseignement secondaire académique 2.268 306.184 305.395 611.579 32.917Enseignement secondaire technique 114 18.230 8.003 26.233 1.143Enseignement privé 48 6.821 184Enseignement pour adolescents 570 10.111 9.330 19.441 159Enseignement pour adultes 8.582 49.784 130.627 180.411 4.118Source : Sudanese Studies Center, “Strategic Report on the Sudan, 2007–2008” (Khartoum).passé de 30 % en 2005 à 35,5 % en 2009 10 . Qui plusest, les femmes soudanaises ont fait des avancées entermes de représentation et de participation politique: aux élections de 2010 les femmes ont remporté 28% des sièges parlementaires.Malgré ces données encourageantes, la disparitéest profonde en ce qui concerne les chancespour les femmes d’accéder aux postes de responsabilitéet de suivre une formation professionnelle,et la plupart des activités menées par les femmessoudanaises concernent l’agriculture ou le secteurinformel. De plus, principalement en raison desconflits armés et des guerres civiles, les femmessoudanaises ont souffert du manque de servicesélémentaires, en particulier dans le domaine sanitaire.Par exemple, la mortalité maternelle est de 509pour 100.000 naissances vivantes 11 . Sans oublierles règles sociales et culturelles, les croyances et lespratiques traditionnelles qui continuent à entraverla pleine participation de la femme dans toutes lesprofessions et activités.Le rôle de la société civileLa signature de l’APG en 2005 a déblayé le terrain pourque les organisations de la société civile (OSC) participentactivement à l’approche des problèmes fondamentauxet nombreuses sont celles qui ont participéau contrôle des élections du pays et des référendumssur le Sud-Soudan, en tant qu’observatrices des campagnesélectorales et de tout le processus visant l’instructionet l’enregistrement des électeurs, et commeconseillères dans la formation des observateurs nationaux.Certaines OSC ont établi aussi des groupes decontrôle parlementaire pour faire le suivi du parlementtant au niveau de l’État qu’au niveau fédéral.Néanmoins, les OSC n’ont pas eu de part activedans les prises de décisions et dans les principalesquestions politiques. Ceci vient essentiellement desrapports difficiles avec le Gouvernement, suite auxrestrictions imposées à leurs activités.ConclusionLe Soudan est à la croisée des chemins. La déclarationd’indépendance du Soudan du Sud aura lieu enjuillet, mais la situation d’Abyei reste au cœur de ladiscorde et la violence augmente. Le nord comme lesud sont confrontés à de graves problèmes touchantle développement et l’environnement qui ne peuventqu’empirer si le conflit persiste, et doivent encoreparvenir à un accord sur des sujets fondamentauxtels que les droits sur le pétrole, les droits sur l’eauet la citoyenneté. Les pays donneurs ont enjoint lesdeux pays à réduire leur dépendance vis-à-vis du pétrole,à renforcer leur sécurité alimentaire à travers ledéveloppement agricole et à accroître leurs servicesde santé, d’éducation, d’eau et d’assainissement 12 .La stabilité et la croissance des échanges commerciauxentre le nord et le sud et aussi avec les paysvoisins offriraient des débouchés économiques auxjeunes, qui représentent la moitié de la population, etpour les femmes et les filles qui avaient jusque là deschances très réduites de s’instruire et de travailler 13 . n7 UNEP, op. cit.8 R. Hamilton, “Oil-rich Abyei: Time to Update the Shorthandfor Sudan’s Flashpoint Border Town?”, Christian ScienceMonitor, (3 novembre 2010), .9 A. Thurston, “Five Challenges South Sudan Will FaceAfter Referendum”, Christian Science Monitor, (27janvier 2011), .10 Trading Economics, Sudan World Bank Data, (2010), .11 UNICEF, Sudan Statistics, 12 E. Solheim, A. Mitchell y R. Shah, “Sudan at a Crossroads”,The Guardian, (7 mai 2011), .13 Ibid.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 177 Soudan


sri lankaLes personnes et l’environnement avant toutLe Gouvernement met en œuvre actuellement un modèle de développement néo-libéral et non durable, qui adéplacé et appauvri sa population et passe sous silence les besoins de l’environnement. Le pays, dévasté par laguerre civile la plus longue d’Asie et par des catastrophes naturelles telles que le tsunami de 2004, fait face en cemoment à de graves problèmes environnementaux dont la déforestation et la perte de la biodiversité. La défaitedes Tigres de libération de l’Eelam Tamil (TLET), a provoqué une grande insatisfaction dans les communautésethniques minoritaires qui sentent qu’elles ont perdu le contrôle de leurs terres. Cette victoire militaire duGouvernement a annulé les attentes politiques de la société civile.Movement for National Land and AgriculturalReform (MONLAR)Sarath FernandoLe modèle néo-libéral actuellement en vigueur auSri Lanka éloigne sans cesse les personnes de leursmoyens de subsistance. Il détruit la cohésion socialeet bouleverse le rapport de collaboration entrela nature et les êtres humains de par sa volontéd’extraire de plus en plus de ressources d’origineenvironnementale avec une approche agressive etdestructrice.Par exemple, en 1996 le Gouvernement a eul’idée de transformer l’agriculture en milieu rural enfaisant passer les cultures de faible valeur (culturede produits alimentaires à usage domestique) à descultures de haute valeur (destinées à l’exportation).On a suggéré d’inciter les fermiers à vendre leursparcelles et à quitter leurs villages pour aller chercherdes emplois non liés au secteur agricole. Un documentpolitique ultérieur a mentionné que le Gouvernementattendait une migration des campagnes versles villes pour parvenir ainsi à une proportion rurale/urbaine de 50/50 en 2010 1 .Le tsunami qui a frappé l’île en décembre 2004a fait 35 322 morts et a obligé 516 150 autres personnesà se déplacer. En 2005, les plans de reconstructiondu pays ont proposé l’expulsion de tous lespêcheurs côtiers 2 . Il était prévu d’utiliser leurs terrespour développer des zones touristiques et des villesmodernes destinées à une élite aisée. L’autre objectifétait de passer à une technique de pêche industrielleà grande échelle remplaçant ainsi les petits pêcheursqui sortent en mer pour se procurer leur nourriture.Les lois du travail devaient être réformées afin depermettre une libre embauche et le licenciement destravailleurs, car on pensait que les investisseurs seraientdavantage attirés par un pays à la législation dutravail très flexible.Les partisans du modèle de croissance économiquenéo-libéral supposent que, pour que celafonctionne, il convient d’augmenter les exportationsIndice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9699100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansmoyennant la captation d’investissements étrangerset la promotion du secteur prívé en misant sur davantaged’infrastructrures telles que des autoroutes,des aéroports internationaux, des ports, le développementde méga-villes, de grandes exonérationsd’impôts et de la main-d’œuvre bon marché. Il estclair cependant que, lors de ces 33 dernières années,ce modèle n’a pas atteint ses objectifs. Le Sri Lanka abesoin d’une stratégie différente, qui aborde les problèmesd’envergure comme la pauvreté, le chômage,la faim et la dénutrition.Problèmes environnementauxLe Sri Lanka figure sur plusieurs listes de zones critiquespour la biodiversité – c’est-à-dire les régionsde grande richesse biologique qui sont menacées– dans le pays et dans les Ghats occidentaux del’Inde qui abritent, par exemple, jusqu’à 140 espècesendémiques d’amphibiens 3 . Mais le pays fait faceactuellement à des problèmes environnementauximportants, parmi lesquels on trouve précisément laperte de la biodiversité. Un rapport de ConservationInternational indique en fait, que seulement 1,5 %des forêts originales de l’île demeure 4 .Une bonne part de ces forêts ont été détruitespendant le Gouvernement britannique puisqu’ellesont été abattues pour faire de l’espace aux plantationsde caoutchouc, de café et de thé mais il y aégalement eu une déforestation importante pendant87100 10099Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 62Éducation100031L'autonomisation58100 10097Activité économiqueles années 80 et au début des années 90 lorsqueles soldats du Gouvernement ont rasé les forêtstropicales car elles servaient de refuge aux forcesrebelles, entraînant de ce fait le déplacement de petitsagriculteurs. Entre 1990 et 2005 donc, le pays aatteint l’un des plus hauts taux mondiaux de déforestationde forêts primaires, perdant ainsi plus de 18 %de la couverture forestière restante 5 . Par exemple,le secteur de la construction a détruit plus de 2,5millions de palmiers typiques de cette région. Lesefforts de reconstruction du pays après le passagedu tsunami en 2004 ont également fait monter lapression sur les forêts.L’impact du changement climatique est encoreune autre inquiétude majeure au Sri Lanka. Parexemple, les fortes pluies qui se sont prolongées de2010 jusqu’au début 2011 ont provoqué de grossesinondations dans de nombreuses régions entraînantd’énormes pertes de cultures agricoles. Ceci va augmenterla pénurie d’aliments en 2011 6 . De nombreuxbarrages et voies navigables ont été endommagéset leur réparation demandera des sommes d’argentimportantes. L’érosion réduit peu à peu la fertilité desterres et par conséquent les producteurs devront invertirdavantage en fertilisants. Tous ces problèmesont conduit à une augmentation des prix des produitsalimentaires qui sont devenus pratiquementinaccessibles pour les secteurs les plus défavorisésde la société.1 Government of Sri Lanka, “Connecting to Growth: Sri Lanka’sPoverty Reduction Strategy”, en Regaining Sri Lanka: Visionand Strategy for Accelerated Development, (2002), p. 83.2 Amnesty International, “Sri Lanka – Waiting to go home, theplight of the internally displaced”, (2006), .3 Conservation international, Western Ghats and Sri Lanka,.4 Ibid.5 Mongabay.com, Sri Lanka, .6 S. Patranobis, “Flood situation worsens, impending foodshortage”, Hindustan Times, (13 de enero de 2011), .Rapports nationaux 178 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


La guerre civile la plus longue d’AsieLa guerre civile du Sri Lanka s’est déroulée entre1983 et 2009. Les parties belligérantes étaientreprésentées par le Gouvernement d’une part,et d’autre part les Tigres de libération de l’EelamTamil (TLET), une organisation militaire séparatiste.Le peuple tamoul, un groupe ethnique originairedes régions méridionales du sous-continentindien, a occupé historiquement les régionsnord et orientale de l’île de Sri Lanka. Il partage lalangue tamoul et une vaste tradition culturelle quicomprend la poésie, la sculpture et l’architecture; l’un des exemples les plus célèbres est l’art de ladynastie Chola qui a gouverné le sud de l’Inde de848 à 1249 apr. J.-C.Les racines du conflit remontent au Gouvernementcolonial britannique, lorsque le paysse nommait Ceylan. Au début du XXe siècle estapparu un mouvement de libération nationale dupeuple cinghalais (le groupe ethnique majoritairedans l’île) qui réclamait l’indépendance politique ;à la suite de négociations pacifiques, les autoritésimpériales britanniques l’ont concédée. L’une desdécisions politiques approuvées par le nouvelétat fut de décréter le cinghalais comme langueofficielle en 1956, connue comme “Loi du Cinghalaisseulement”, ce qui a entraîné des troublesethniques qui se sont intensifiés et se sont terminéspar une guerre civile.En 1963 les premiers documents sur l’établissementd’un état Eelam Tamil indépendant ontcommencé à circuler, et en 1972 sont apparus lesNouveaux tigres tamouls (TNT), résultat d’uneunion de plusieurs groupes qui avaient adoptél’emblème du tigre de l’empire Chola pour enfaire son icône. Quatre ans plus tard, le Front unide libération tamoul (TULF) a été fondé en tantqu’organisation politique soutenant les actionsarmées des TNT et qui, après les élections de1977, est devenu le principal parti d’opposition.En 1976 les TNT ont changé d’appellationpour devenir les Tigres de libération de l’EelamTamil (TLET) et ont commencé une campagned’assassinats, y compris contre des membresdu parlement. Le début de la guerre civile s’estdéclenchée à la suite d’une embuscade des TLETcontre une patrouille de l’armée du Sri Lanka,suivie de représailles contre le peuple tamoulavec plusieurs assassinats de civils.La guerre a été officiellement terminée en2009 lorsque les TLET ont accepté la défaite. Leconflit a eu de graves conséquences sur la population,l’environnement et l’économie : on adénombré 100 000 morts, dont plus de 27 000étaient des militants tamouls 1 . Pendant la dernièrepériode de la guerre, plus de 300 000 personnesont été déplacées depuis leur foyer versdes camps de réfugiés 2 . Les crimes de guerre1 ABC News, Up to 100,000 killed in Sri Lanka’s civil war:UN, (20 de mayo de 2009), .2 Amnesty International, Unlock the camps in Sri Lanka:safety and dignity for the displaced now. A briefingpaper, London, (2009), .imputés aux deux factions pendant le conflitfont état d’agressions sur des personnes civiles,d’exécution de combattants et de prisionniers,de disparitions forcées, de manque de nourriture,de médicaments et d’eau potable pour lespersonnes civiles qui se trouvaient prises dansles zones de guerre et également le recrutementd’enfants 3 .Le groupe «Les Tamouls contre le génocide»,qui a son siège aux États-Unis, a présentédes preuves de discrimination, persécution etmême de génocide sur les tamouls au Sri Lankaavant, pendant et après la guerre, dont un embargosur les aliments et les médicaments, desdisparitions, des adoptions de lois de citoyennetéà caractère racial, des massacres organisés(en 1956, 1958, 1977 et 1983) 4 et le génocideculturel comme la destruction de livres et detemples 5 .3 Human Rights <strong>Watch</strong>, Sri Lanka: US war crimes reportdetails extensive abuses, (22 de octubre de 2009),.4 Tamil Mirror Canada,“Anti-Tamil pograms in SriLanka – M. K. Eelaventhan”, (15 de enero de 2011),.5 Tamils Against Genocide, “Genocide in Sri Lanka 101:Sheet 2”, .Malaise politiqueLa victoire militaire dans le nord sur les Tigres delibération de l’Eelam Tamil (voir encadré) a créé uneapparence de paix, cependant les communautésethniques minoritaires sont tout à fait insatisfaitescar elles ont perdu une partie du contrôle sur leurspropres terres. On craint que le prolongement de laprésence militaire dans la région ouvre la voie pourque des entreprises, y compris des investisseursétrangers, s’approprient les terres et d’autres ressourcesnaturelles.Les attentes politiques de la population (transparencedes élections et améliorations dans le fonctionnementdu système judiciaire et du service civil)ont été annulées par la victoire militaire du Gouvernementqui a permis à la présidence d’étendre sespouvoirs et la durée de son mandat.ConclusionLe modèle actuel de croissance est basé sur l’améliorationde l’économie par le biais de la compétencesur le marché international. Cependant, ces 33 dernièresannées montrent que cette approche n’estpas parvenue à réduire la pauvreté au Sri Lanka. Leschiffres du Gouvernement ont indiqué que 15 % dela population vivait en dessous du seuil de pauvretéofficiel en 2010, mais la Banque mondiale a revu cechiffre à la hausse en calculant 23 % 7 . De plus lesdisparités économiques ont augmenté ; 10 % despersonnes ayant les revenus les plus élevés détiennentpresque 40 % des richesses tandis que 10 %des personnes les plus pauvres détiennent seulement1 % 8 , et alors que le coefficient Gini en 1985était d’environ 0,32, il est arrivé à presque 0,36 en1995 et à 0,41 en 2005 9 .Les problèmes sociaux que ce modèle économiquea entraîné pourraient être résolus moyennantl’adoption d’une agriculture écologique durablepar les petits fermiers. La stratégie, fondéesur la vision générale du développement d’unerelation respectueuse entre la nature et la sociétéhumaine, se servirait du potentiel créatif des individuspour améliorer leurs moyens et conditions7 M. Hardy, “Poverty in Sri Lanka”, The Sunday Leader, (4de abril de 2010), .8 Ibid.9 Trading Economies, Gini index in Sri Lanka, (2009), .de vie tout en protégeant et favorisant l’environnement.Ceci pourrait favoriser une régénérationde la nature et de ses ressources et permettre aupays d’atténuer les problèmes du changementclimatique et de s’y adapter.Cette approche se fonde également sur le faitde pouvoir comprendre de quelle manière on pourraitappliquer des principes écologiques visant àaugmenter la fertilité du sol, maximiser l’absorptionde la lumière solaire par les plantes, permettreet encourager le contrôle biologique naturel desravageurs au moyen des principes de gestion intégréedes ravageurs, améliorer la récupération del’activité microbienne et le recyclage de la matièreorganique, empêcher l’érosion et programmer lescultures en fonction d’une plus grande compréhensiondes cycles naturels des précipitations ausol. Cette approche pourrait être très efficace pouraméliorer la productivité de la terre, même surdes parcelles de seulement 500 m 2 . Elle pourraitégalement réduire la pauvreté en zones rurales etaborder, dans le même temps, des problèmes environnementauximportants et aussi terminer parêtre un modèle bien plus durable que celui qui a étéappliqué jusqu’à présent. n<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 179 Sri Lanka


tanzanieEmbourbée dans la pauvretéLes principaux défis du pays sont actuellement l’insécurité alimentaire et la pauvreté. Le Gouvernement ne se préoccupepas suffisamment des problèmes environnementaux tels que la déforestation, la désertification, l’érosion des sols etla pollution de l’air, alors que les entreprises étrangères continuent de déplacer les petits agriculteurs. Les politiquesinadéquates et non durables, les technologies peu appropriées et le manque d’infrastructure dans le secteur rural ajoutésà la désertification, à la déforestation et à la forte incidence des ravageurs et des maladies des plantes ont conduit àl’augmentation de la pauvreté, de l’insécurité alimentaire et à la stagnation du développement. Si les politiques actuellesne sont pas revues, les tanzaniens seront condamnés à davantage de pauvreté et à souffrir encore plus de la faim.SAHRiNGON TanzanieArmando SwenyaMartina M. KabisamaLEDECOClarence KipobotaL’économie de la Tanzanie dépend fortement del’agriculture. Celle-ci emploie 80 % de la maind’œuvre, représente 40 % du produit intérieur brut(PIB) et génère 85 % des exportations 1 . En 2010, 74% de la population habitait en zone rurale alors que26 % habitait des régions urbaines 2 . Cependant lamigration de la campagne vers les villes est en traind’augmenter, surtout à cause de l’inégalité de l’offredes services sociaux. L’agriculture et l’élevage, quisont les principaux facteurs d’allègement de la pauvreté,se trouvent alors dans une situation de plus enplus délicate. Le Gouvernement ne s’occupe que trèspeu de la pauvreté, de la sécurité alimentaire et du développement,en dépit de ses différentes politiques etstratégies, comme par exemple la Stratégie nationalepour la croissance et la réduction de la pauvreté (quel’on connaît localement par son acronyme en swahiliMKUKUTA) et la Vision 2025 pour le développementnational.La pauvreté s’étendLa Tanzanie fait partie des pays les plus reculés dumonde, elle occupe la 128 ème place sur un total de 169pays en ce qui concerne l’Indice de développementhumain en 2010 3 . Le Produit national brut (PNB) réela augmenté de 6 % en 2009 par rapport à 7,4% en2008 ; le Gouvernement a attribué ce ralentissementà l’impact de la crise financière mondiale et aussi à lasécheresse de 2008-2009, qui a touché la productionagricole, la génération d’énergie hydraulique et la productionindustrielle 4 . De plus, bien que l’agricultureemploie une très grande quantité de main d’œuvre,cela fait au moins six ans que la dotation du secteur1 CIA, The World Factbook: Tanzania, (mai 2011), .2 Ibid.3 PNUD, Rapports sur le Développement Humain 2010 – TheReal Wealth of Nations: Pathways to Human Development,(New York, 2010), .4 Ministère des finances et des affaires économiques,The Economic Survey 2009, (Dar es Salam: juin 2010),.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 7651100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansne dépasse pas 7 % du budget national. D’après l’Enquêtede 2007 sur les revenus des foyers, environ 33,5% des tanzaniens continentaux vivent en-dessous duseuil de pauvreté (besoins essentiels), alors que 16,6% vivent en-dessous du seuil d’indigence (besoinsalimentaires) 5 . Le nombre de pauvres a augmenté de1,3 million pendant les dernières années 6 et le tauxde chômage est en train d’augmenter : quelque 11,7millions de personnes potentiellement actives manquentd’emploi 7 . De plus, l’écart entre les riches et lespauvres s’accentue 8 .Bien que la Tanzanie possède des lois sur lesinvestissements, il existe de nombreux problèmesen ce qui concerne les investissements étrangersdirects, par exemple la passation de contrats minierssuspects (Buzwagi, Richmond et Dowans et IPTL)entre le Gouvernement et des investisseurs étrangers9 . D’autre part il y a chaque fois plus d’appropriationsde terres par les organismes appartenantà l’État qui favorisent les investisseurs étrangers.5 Legal and Human Rights Centre (LHRC), Tanzania HumanRights Report 2009, (Dar es Salam: 2009), .6 Banque Mondiale, Tanzania: Country Brief, .7 Jamhuri ya Muungano wa Tanzania, Maoni ya WatanzaniaKuhusu Ukuaji wa Uchumi na upunguzaji Umaskini naKipato, Hali yao ya Maisha na Ustawi wa jamii na UtawalaBora na Uwajibikaji, (2007).8 Trading Economics, Gini Index in Tanzania, .9 Parlement de la République Unie de Tanzanie, transcriptiondu débat de la 44 ème session, (le 14 août 2007), .76100 10089Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 60Éducation100042L'autonomisation100 7168 100Activité économiqueLa politique de la porte ouverte du Centre tanzaniend’investissements (TIC, pour son sigle en anglais),destinée à attirer des investisseurs étrangers, a nuià la population locale. Les petites et moyennes entreprisesne peuvent pas faire jouer la concurrencecar elles manquent de capitaux suffisants et d’expériencecommerciale. Les habitants des villagessont alors déplacés de force pour laisser la place auxentreprises étrangères.Défis environnementaux et pour la santéLa déforestation est l’un des principaux problèmesdu pays. En dépit du fait que 40 % du territoire estcomposé de parcs protégés, il existe une forte réductiondes forêts dans certaines régions. En généralla couverture forestière a diminué de 15 % entre1990 et 2005, mais les taux de déforestation ontbeaucoup augmenté depuis 2000 10 . La dégradationdes sols (conséquence de la sécheresse récente), ladésertification et la perte de biodiversité (en 2001,22 espèces de mammifères de Tanzanie, 30 espècesd’oiseaux et 326 espèces de plantes étaient en voied’extinction) sont aussi inquiétantes 11 . Les habitatsmarins sont également menacés par les dégâts quesubissent les récifs coralliens, principalement àcause de la pêche à la dynamite 12 .Dans les sites miniers, l’érosion de la terre etla pollution sont spécialement préoccupantes. Parexemple, en janvier 2009 North Mara Gold Mines a10 Mongabay.com, Tanzania, .11 Encyclopedia of the Nations, Tanzania – Environment, .12 Ibid.Rapports nationaux 180 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


entassé quelque 2000 tonnes de déchets toxiquessans aucune précaution et sans faire une évaluationde l’impact sur les communautés environnantes. À lasaison des pluies, ces déchets ont été emportés versle fleuve Tighite, qui arrose les villes de Nyakunsuru,Nyamone et Weigita dans la région de Mara entraînantainsi la mort de poissons et d’arbres 13 .Agriculture et sécurité alimentaireLes problèmes dans le secteur agricole sont lemanque de politiques et de pratiques agricoles adéquateset la pénurie d’un fonds de budget agricoleainsi que la mauvaise utilisation de ce qui existe. Deplus, les techniciens agricoles sont peu motivés etmanquent d’expérience.Un autre obstacle pour la durabilité de l’agricultureest la dépendance de partenaires pour ledéveloppement, puisque la plus grande partie dubudget pour le développement est issue de donateurs.En fait, dans le budget 2010 la totalité desfonds attribués provenaient de partenaires pour ledéveloppement 14 . Avec ce faible budget, les agriculteurset les éleveurs ne peuvent pas faire face àl’insécurité alimentaire, et leurs maigres revenus nesont pas suffisants pour leur assurer un niveau devie minimum.Le pays possède différentes politiques et loisen matière de sécurité alimentaire. Par exemple, laLoi de sécurité alimentaire de 1991 a mis en place leBureau de sécurité alimentaire chargé de surveillerla création et la gestion d’une réserve stratégiquede graines. D’autres mécanismes institutionnelsà cet effet sont l’Agence pour la réserve nationaled’aliments (NFRA, pour son sigle en anglais) et la Divisionnationale de sécurité alimentaire. L’objectif dece premier organisme est de maintenir une réservede nourriture optimale au niveau national pour faireface au désapprovisionnement local et de pouvoircouvrir les besoins urgents en nourriture ainsi qued’assurer la sécurité alimentaire nationale en s’occupantefficacement et de façon économe de l’achat etde l’approvisionnement en aliments.Cependant, en dépit de tous ces efforts, le dangerpersiste. Par exemple, en juin 2009 le ministèrede l’Agriculture a annoncé une grave pénurie d’alimentsdans le district de Chamwino dans la région deDodoma, empêchant 17 080 foyers de se procurerles aliments nécessaires au quotidien. 63,5 millionsde kilos d’aliments sont nécessaires pour pouvoircouvrir leurs besoins essentiels, mais la productionobtenue en 2008-2009 n’a été que de seulement12,17 millions de kilos 15 .Cela est dû en partie au fait que les institutionsmises en place par la loi de Sécurité alimentaire ontpris des mesures inadéquates, que l’on a utilisé destechnologies peu appropriées, qu’il existe une avancéede la désertification, de la déforestation et uneforte incidence des ravageurs et des maladies desplantes ainsi qu’une infrastructure rurale et des institutionsrurales faibles manquant de financement.Les défis de la durabilitéDepuis 1990 la Tanzanie a mis en place une stratégiede développement durable qui tient particulièrementcompte des questions environnementales. En 1994un Plan d’action national pour l’environnement aété établi, ce qui a conduit à approuver la Politiquenationale pour l’environnement en 1997 et à rédigerla Stratégie nationale pour le développement durableen 2000 16 .Cependant, en dépit de ces politiques, le paysn’a pas réussi à faire face aux défis environnementaux.Cela est dû principalement à l’insuffisance desmécanismes institutionnels de coordination, à lacapacité limitée du Gouvernement en matière degestion environnementale et à la faible participationdes autorités et des communautés locales dans lagestion et la conservation de l’environnement. Lapauvreté est aussi un élément clé : elle augmentela dégradation de l’environnement, par exemplel’utilisation de bois comme source d’énergie, ce quicontribue à la déforestation et à l’érosion des sols ;en même temps, la dégradation de l’environnementcontribue à intensifier et perpétuer la pauvreté. L’utilisationd’énergie est caractérisée dans tout le payspar la grande consommation de sources d’énergietraditionnelles telles que le bois pour la cuisson desaliments et le kérosène pour l’éclairage. En plus, lesprix élevés des dérivés du pétrole (le kérosène particulièrement)et l’augmentation du prix de l’électricitépourraient faire que la demande urbaine et ruraled’énergie retourne à l’utilisation des carburants traditionnels17 .ConclusionAfin d’atteindre un développement économiquedurable, le Gouvernement devra, par exemple, seconcentrer sur le développement rural, l’améliorationagricole et le renforcement économique dela population rurale. Le Gouvernement doit aussiaméliorer la transparence des contrats établis avecles investisseurs étrangers et également renforcerl’autonomisation juridique et économique des producteurset des commerçants locaux. De même, ilest nécessaire d’aborder les problèmes tels que lechômage et la fracture de plus en plus grande entreles pauvres et les riches. Tant que des sujets telsque l’enveloppe budgétaire pour l’agriculture etla sécurité alimentaire restent au second plan, lestanzaniens continueront de souffrir de la faim et dela pauvreté. n13 LHRC, op. cit., págs. 134–35.14 Policy Forum, The Citizens’ Budget: A Simplified Version ofthe National Budget 2010/11, (Dar es Salam: 2010), .15 LHRC, op. cit., p. 121.16 B. Makiya Lyimo, Energy and Sustainable Development inTanzania, Helio International/ Sustainable Energy <strong>Watch</strong>, (2006),.17 Ibid.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 181 Tanzanie


THAÏLANDERessources côtières en dangerDans son désir d’atteindre une croissance économique, le pays a vécu d’énormes changements au cours des 40dernières années. Les principaux défis auxquels est confronté actuellement le pays sont la rapide dégradationdes ressources marines et côtières et les diverses conséquences de l’urbanisation et du développementde l’industrie et du tourisme. On est en train d’appliquer des modèles de développement non durable quireprésentent une énorme pression sur les ressources marines et côtières. En même temps, les politiques et lescadres législatifs, institutionnels et opérationnels ne fournissent pas de soutien aux communautés locales pourque celles-ci puissent faire valoir leurs droits constitutionnels.Sustainable Development Foundation (SDF)(Fondation pour le développement durable)<strong>Social</strong> Agenda Working GroupJonathan ShottLes vies et le soutien de quelque 13 millions dethaïlandais dépendent directement de l’exploitation desressources marines et côtières. Les eaux de la Thaïlandecouvrent une superficie d’environ 350.000 km 2 et lepays dispose de quelque 35.000 km 2 de zones côtières 1 .Les habitats et les ressources naturelles importantesincluent des forêts longeant les rivages, des fonds sousmarins,des minéraux, des minerais métalliques, dupétrole et du gaz naturel. On estime que le pays compteaussi 12.000 km 2 de récifs coralliens ayant une biodiversitéd’au moins 240 espèces différentes et 1.964 km 2de mangroves ayant 35 espèces différentes 2 .Les principales industries dépendent des ressourcesmarines et côtières incluent la pêche decapture, l’aquaculture, le tourisme, le transport deproduits et de marchandises, l’industrie lourde etla production d’énergie électrique. On estime quela Thaïlande obtient tous les deux ans environ 7,5milliards (près de 250 millions d’USD) de bénéficesde leurs ressources marines et côtières 3 .Les eaux côtières de la Thaïlande ont toujoursété riches et productrices ; elles ont une grande biodiversitéet des populations nombreuses et en bonnesanté. Cette abondance de ressources a contribué audéveloppement d’un secteur de la pêche qui est fort.La pêche de capture de même que l’aquaculture sontimportantes pour l’économie du pays : en 2003 laThaïlande a représenté 3 % de la capture de pêche totaleet presque 2 % du total de la production aquicolede la planète, le premier secteur étant estimé à plusde 120 milliards de THB (environ 4 milliards d’USD).Pêcheurs à petite échelleLa constitution de la Thaïlande de 2007 consacre lesdroits de participation des communautés locales outraditionnelles pour préserver, prendre soin, gérer1 Thailand Reform Office, Reforming the Structure of Marineand Coastal Resource Management, (Bangkok : mars 2011),pages. 1–2.2 Ibid, p. 13 C. Cheung, et al. (comp.), Marine Protected Areas inSoutheast Asia (Los Baños, Filipinas: ASEAN Regional Centerfor Biodiversity Conservation – Department of Environmentand Natural Resources, 2002), p. 86.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9699100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 anset utiliser de manière équilibrée et durable les ressourcesnaturelles et de l’environnement. Cependant,la mise en œuvre et l’exécution effectuées parles organismes du gouvernement au niveau localconcernant le progrès, le soutien et l’approvisionnementdes communautés locales pour qu’ellesexercent leurs droits constitutionnels, n’aboutissentpas en général aux résultats escomptés ; dans denombreux cas les approches de ces organismes sontcontradictoires par rapport à ces droits.C’est le cas, par exemple, pour les pêcheurs àpetite échelle. Plus de 60.000 ménages vivant dans4.000 petits villages de pêcheurs, dont 93 % sontdes pêcheurs à petite échelle qui représentent environ9 % de la capture annuelle du pays 4 . Ils utilisentdes bateaux et du matériel de pêche traditionnels,fabriqués à la main, qui les obligent à pêcher à unedistance ne dépassant pas 3 à 5 km du rivage. Celales rend spécialement vulnérables aux changementslocaux en ce qui concerne l’état des ressources marineset côtières 5 .Défis pour la durabilitéLes populations d’animaux marins existantes dansles eaux du pays ont été dégradées car la pêche excèdela capacité de charge de la mer. Le Golfe de4 M. Unkulvasapaul, et al., Thailand Environment Monitor2006: Marine and Coastal Resources (Washington, DC:International Bank for Reconstruction and Development,2007), pages. 8–10.5 R. Prasertcharoensuk et J. Shott, Samudra Mongraph:Time for a Sea Change – A Study of the Effectiveness ofBiodiversity Conservation Measures and Marine ProtectedAreas Along Southern Thailand’s Andaman Sea Coastline,(Chennai, India: International Collective in Support ofFishworkers, 2010), .88100 10099Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 71ÉducationL'autonomisation100 77 10097Activité économiqueThaïlande a été spécialement touché par ce phénomèneet depuis 1972 le pays a dépassé la capturemaximale durable par an (1,4 million de tonnes) 6 .D’autres défis incluent la non-éradication de l’utilisationde filets dérivants, l’absence de contrôle pourl’utilisation des chaluts, les subventions aux combustibleset la main d’œuvre à bas prix des migrantsqui permettent au secteur de la pêche commercialede maintenir des coûts artificiellement bas.L’aquaculture a touché aussi dans une grandemesure l’état des ressources marines et côtières.Le Département des Ressources marines et côtièressignale que presque 74 640 hectares de forêts demangrove ont été utilisées pour l’aquaculture, enparticulier dans des fermes à crevettes 7 .Dans la province de Trang (sur la côte de la merd’Andaman) les gros bateaux destinés à la pêchecommerciale qui utilisent du matériel de pêche destructeurcomme les filets dérivants et des chaluts quiont ravagé les ressources marines locales réduisantconsidérablement les populations de poissons, enun laps de temps très court, et qui ont nui ou détruitles écosystèmes marins d’une valeur incalculabletels que les récifs coralliens et les fonds sous-marins.On a découvert que quelques grands navirescommerciaux opéraient dans la zone côtière des 3milles, réservée en particulier pour la pêche à petiteéchelle, et même dans les zones marines protégées.Dans la province de Nakorn Sri Thammaratsur la côte du Golfe de Thaïlande, le dragage illégalpour la pêche de la palourde blanche a provoquéune dégradation rapide du milieu marin 8 . Ceux qui6 Ibid.7 Ibid.8 Ibid.100039Rapports nationaux 182 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


pratiquent le dragage illégal travaillent habituellementpendant la période des moussons, quand lespêcheurs à petite échelle ne peuvent pas sortir enmer, et ils draguent du matériel du fond sous-marinjusqu’à une profondeur d’un mètre ou plus. Unezone qui est draguée de cette manière peut tarderde cinq à six ans pour récupérer son état d’abondanceantérieur. Par ailleurs, le dragage illégal peutendommager et détruire le matériel de pêche despêcheurs locaux 9 .Lorsque les ressources marines et côtières sedégradent, la pêche à petite échelle souffre normalementplus que la pêche commerciale. Contrairementaux pêcheurs commerciaux, les pêcheurs à petiteéchelle ne peuvent pas s’aventurer dans les eauxprofondes loin de la côte. S’il est vrai qu’en théorieils auraient le choix d’aller tous les jours dansdes zones proches du rivage où les ressources sontmoins dégradées, dans la pratique leurs revenussont si faibles que le coût du carburant supplémentairemettrait en danger leur propre subsistance.Urbanisation, développement industrielet tourismeL’urbanisation, l’industrialisation et le développementdu tourisme, ont transformé les provincescôtières de la Thaïlande ce qui s’est répercuté négativementsur les ressources marines et côtières ainsique sur les moyens de subsistance des pêcheurs àpetite échelle. La demande et la concurrence pour laterre est de plus en plus grande et certaines terres eteaux côtières ont été privatisées, limitant l’accès à lamer. En outre, les changements environnementauxet la pollution ont eu une influence sur la disponibilitéet l’état des ressources marines et côtières et ontaggravé des problèmes comme celui de l’érosionde la côte.Les petites communautés de pêcheurs doiventse placer nécessairement près de la côte carils amarrent leurs bateaux sur des plages sablonneusesou dans les anses. Même les projets relativementpetits qui concernent la navigation dans leseaux adjacentes à la côte tels que la constructionde ports sportifs privés, peuvent avoir un impacténorme en raison de l’achat de carburant supplémentaire– et par conséquent la dépense additionnelle– nécessaire pour naviguer de l’autre côté deces structures.Les mangroves se sont vues menacées par lesbidonvilles et par l’industrie ; leur bois a d’ailleurs différentesdestinations : brûlis, charbon végétal, mobilieret constructions. Les (presque) 10 400 hectaresde fonds sous-marins thaïlandais ont été endommagéspar les sédiments résultant des constructionssur la côte, du déboisement et de l’agriculture, du déversementd’eaux usées et de l’utilisation de matérielde pêche illégal tel que les filets dérivants. La forteérosion côtière provoque chaque année en Thaïlandela perte de 3 km 2 de terre qui borde la mer, une perteévaluée à 6 milliards de THB (environ 200 millionsd’USD). L’érosion côtière se doit à une combinaisond’éléments naturels et humains de sédiments maisle développement côtier comporte des activités quialtèrent l’accumulation naturelle de sédiments tellesque : la construction de barrages, l’extraction desable et le dragage de canaux profonds permettantde faciliter le transport maritime 10 .Le Plan de Développement du littoral sud a désignéles zones côtières du pays pour le développementde systèmes de transport public et l’industrielourde. Il y a 37 projets programmés dont les portsd’eaux profondes, les plateformes pétrolières, lesentrepôts de carburants, les tuyauteries de carburants,l’industrie lourde et les centrales électriques.Le plan a mis en valeur le développement de l’industrielourde sans tenir compte de formes alternativesde développement qui pourraient être plus adéquatespour les circonstances socioéconomiqueset l’écologie culturelle des zones choisies dont leséconomies sont basées sur la pêche, l’agriculture, letourisme, l’éducation et l’industrie légère 11 .La Thaïlande a eu de nombreux exemples dedéveloppements techniques inefficaces et non durableset aussi des activités touristiques qui touchentdirectement les ressources marines et côtières tellesque les « randonnées sur le corail » qui supposentde marcher en s’appuyant sur les récifs coralliens.Cependant, pour de nombreuses communautésde petits pêcheurs qui vivent dans les principaleszones touristiques du pays, les problèmes et lesconflits concernant la terre et les droits sur la terrereprésentent un souci majeur. Des conflits ont surgientre les communautés locales et les opérateurstouristiques qui ont bénéficié de titres de propriétésur ces terres ou bien qui ont envahi des terres sansavoir aucun droit de propriété sur elles, dans deszones qui se jouxtent des forêts terrestres ou lesmangroves des communautés, des bidonvilles oudes voies publiques 12 .La réalité socio-économique changeante, àl’échelle planétaire, au niveau national et au niveaulocal, fait de plus en plus pression sur les ressourcesmarines et côtières limitées. Dans son désir d’atteindrela croissance économique au niveau national,la Thaïlande a subi d’énormes changements aucours des 40 dernières années et au niveau local, lesexpectatives concernant les standards et qualités devie transforment les moyens d’existence dans uneperspective plutôt centrée sur les revenus monétaires.Malgré les grands progrès obtenus, généralementsur le plan des politiques mises en place 13 ,les pêcheurs à petite échelle n’ont pas encore uneidentité formellement reconnue dans le cadre politiqueet législatif, ce qui veut dire qu’on omet souventd’identifier et d’aborder les problèmes qui touchentleurs moyens de vie et leur bien-être.Nouvelles politiques, toujoursles mêmes pratiquesIl y a un clivage important entre les politiques et lalégislation au niveau national et son application auniveau local. Des changements prometteurs en cequi concerne l’orientation des politiques 14 ne suffisentpas à produire des changements tangibles, généraliséset durables au niveau local en raison de la résistancemanifestée par la législation, la bureaucratieet l’administration. Il y a également un manque decoordination, de coopération et d’intégration entre lesdiverses organisations et organismes liés directementou indirectement à la gestion des ressources marineset côtières, entraînant de ce fait une mise en œuvre etun système opérationnel au niveau local inefficaces etsans cohérence sinon contradictoires et contre-productifs.Ce manque de cohérence entre les approcheset les pratiques des différentes organisations et organismesmet en relief le besoin de rationnaliser lecadre législatif complexe et applicable à la gestion desressources naturelles et de l’environnement.Dans de nombreux cas la législation permettantde refléter les changements positifs des politiques auniveau national n’a pas été mise à jour. Dans d’autrescas la législation existante, qui pourrait être bénéfiquepour les ressources marines et côtières et aussipour les pêcheurs à petite échelle ne fournit pas lesavantages escomptés soit parce qu’elle est mal appliquée,et donc les individus peuvent ignorer la loi, soitparce qu’elle est arbitraire et différents paramètressont appliqués dans différentes circonstances. Leslacunes légales, qui permettent aux contrevenantsd’éviter la poursuite judiciaire, les peines trop légèrespour dissuader et les ressources insuffisantes oules barrières administratives qui empêchent la surveillancesystématique et complète : voilà quelquesunsdes problèmes concrets 15 .ConclusionLes pratiques de développement non durables ontun impact négatif sur les ressources marines etcôtières et les moyens d’existence des pêcheurs àpetite échelle. Si la réalité socio-économique toujourschangeante, à l’échelle planétaire, au niveaunational et local, fait de plus en plus pression sur lesressources marines et côtières limitées, la responsabilitéen revient à d’autres problèmes sous-jacents.Ceux-ci sont liés aux responsables politiques,législatifs, institutionnels et opérationnels qui nefournissent pas de soutien aux communautés localespour que celles-ci puissent exercer leurs droitsconstitutionnels. Ces responsables ne contrôlent nine répriment les pratiques illégales, inadéquates etnon durables. n9 S. Jitpiromsri et la Sustainable Development Foundation,Strengthening the Capacity of Vulnerable Coastal Communitiesto Address the Risks of Climate Change and Extreme WeatherEvents: Community Study Report, (document de référencepour le développement du projet Global Environment Facility /Special Climate Change Fund, Prince of Songkhla University,campus de Pattani), 2009, p.16.10 Thailand Reform Office, op. cit., pages. 3–4.11 Ibid, p. 6.12 Ibid, pp. 5–6.13 Par exemple la politique pour contrôler le nombre de naviresde pêche. Voir :.14 Pour voir les changements des politiques en matière de santé :; ou des politiquesmonétaires, voir, Subhanji, Tientip, Household sector andmonetary policy implications: Thailand’s recent experience,(Economic Research Department, Bank of Thailand, 2010),.15 Prasertcharoensuk et Shott, op. cit.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 183 Thaïlande


VENEZUELALes calamités de l’extractivismeLe modèle mis en œuvre par l’administration Chávez est une continuation et un élargissement de l’extractivisme,aux fortes retombées environnementales, empreint d’un caractère instrumental et néo-libéral. Qui plus est, il s’avèreinsuffisant au moment de faire face aux urgences de la société. Malgré certaines améliorations au niveau éducatif,d’autres domaines des droits élémentaires, comme la santé et le logement, ont marqué un recul. Les programmesde développement social sont annulés ou négligés, tandis que le Gouvernement, qui dédaigne le dialogue avecl’opposition et la société civile, porte atteinte à la démocratie en introduisant des changements substantiels à laConstitution approuvée en 1999. Le pays doit élaborer un modèle de développement véritablement durable.Programa Venezolano de Educación-Acción en DerechosHumanosRafael UzcáteguiDepuis le début du XXe siècle, les modèles de développementappliqués au Venezuela ont reposé surl’économie extractive et exportatrice des ressourcesénergétiques. Bien que le président Hugo Chávez, aupouvoir depuis 1998, ait remis en question les gouvernementsdu passé en affirmant que son modèleest, en comparaison, « durable » et « endogène », il arésumé son projet comme étant un « <strong>Social</strong>isme pétrolier» : « Compter sur cette richesse, voilà notre modèle,[…] le <strong>Social</strong>isme pétrolier ne peut se concevoirsans l’activité pétrolière… [cette ressource] imprime ànotre modèle économique son caractère particulier » 1 .Or, différentes organisations sociales et de défensedes Droits de l’Homme ont alerté sur le fait quela durabilité des politiques destinées aux secteurs populaires,nommées « missions », dépend des recettessupplémentaires obtenues des prix élevés du pétrolesur le marché mondial. Selon la Loi budgétaire 2011 2les recettes énergétiques représenteraient 27,6 % dela somme totale allouée aux dépenses, le prix du barilde pétrole étant fixé à 40 USD (comme celui du budgetde l’année précédente). Cependant, des experts telsque l’ex-président de la banque centrale José Guerrasignalent que cette estimation n’était pas conforme àla réalité, car les prix tournaient autour de 100 USD, leGouvernement national disposant ainsi d’une sommed’argent additionnelle considérable, utilisable à discrétionet difficilement contrôlable par la société civile.La remontée actuelle des prix internationaux dubrut a lieu après une période de crise économique pendantlaquelle le Venezuela a vécu, selon les chiffres officiels,18 mois consécutifs de récession économique.Sauf pour le système éducatif, la contraction économiquea entraîné la réduction du budget destiné aux politiquessociales, favorisant ainsi la stagnation des missionset la multiplication des situations conflictuellesdans le pays. D’après les données recueillies par deuxorganisations vénézuéliennes de défense des Droits del’Homme, Espacio Público et Provea, au moins 31141 Ministerio del Poder Popular para la Comunicación eInformación, Programa Aló Presidente 288.2 Ministerio del Poder Popular de Planificación y Finanzas,Ley de Presupuesto para el Ejercicio Fiscal 2011, (Ministèredu Pouvoir populaire de planification et des finances, Loibudgétaire pour l’exercice fiscal 2011) Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9595100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansmouvements de contestation ont vu le jour au cours del’année 2010 au Venezuela, confirmant ainsi la tendanceà la croissance continue du nombre de manifestations 3 .Développement fondé sur le pétroleLe modèle de développement mis en œuvre par le Gouvernementse fonde sur de grands projets d’essor pétrolier,gazier, minier et d’infrastructures. Les préceptesextractifs sur lesquels ils se fondent causent de sérieuximpacts socio-environnementaux et ne sont donc pasdurables à long terme. La possibilité d’exploiter les richessesénergétiques présentes dans le sol vénézuéliena également interféré dans des politiques qui bénéficieraientdivers secteurs sociaux du pays. La démarcationdes territoires indigènes établie dans l’article 119 de laConstitution en est un bel exemple : elle aurait dû êtreterminée en 2002, mais en est toujours au même point.Pour García Gaudilla, bien qu’au niveau discursifle président Chávez et autre rapporteur institutionnelrenient le capitalisme et le néo-libéralisme, le modèlede développement bolivarien envisagé demeure unecontinuation et un élargissement de l’extractivisme,ce qui se traduit par des impacts environnementauxet suppose une tendance développementiste, instrumentaleet néo-libérale 4 . L’intention très nette derompre tout dialogue avec la société civile et l’oppositionne fait qu’aggraver la situation ; il ne peut y avoir dedéveloppement durable sans qu’il soit possible de faireentendre et de prendre en compte les voix des citoyens3 Manifestaciones públicas Informe 2010 (Manifestationspubliques, Rapport 2010).4 García-Gaudilla, M.P., 2009. “Ecosocialismo del siglo XXI ymodelo de desarrollo bolivariano: los mitos de la sustentabilidadambiental y de la democracia participativa en Venezuela”.Revista venezolana Économia y Ciencias <strong>Social</strong>es (Revuevénézuélienne Économie et Sciences sociales) 15 (1): 187-223.91100 10098Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 64Éducation100028L'autonomisation100 65 100100Activité économiquequi alertent sur les conséquences sociales et environnementalesde l’exploitation des hydrocarbures.Contrairement aux autres pays pétroliers de la région,aucune organisation écologiste du pays ne s’occupede la pollution pétrolière qui affecte différentes zonesdu pays. Parmi les autres enjeux auxquels doit faireface le Venezuela se trouvent la déforestation 5 et l’extrêmepollution du Lac de Valencia 6Inquiétude socialeEn 2010, 36 % des protestations avaient pour motifd’exiger du respect des droits des travailleurs. Certainescritiques à l’égard du Gouvernement ont signalé que l’administrationChávez avait essayé de faire retomber sur ledos des travailleurs le poids de la récession liée à la criseéconomique mondiale, et obstruait encore une fois toutdialogue sur l’embauche collective dans le secteur publicet dans les entreprises d’État. C’est la deuxième annéeconsécutive que l’augmentation du salaire minimum– actuellement autour de 462 USD – n’a pas réussi àcouvrir le coût du panier alimentaire de la ménagère, nila perte du pouvoir d’achat, en raison du taux d’inflationqui reste le plus élevé de la région, soit 30,9 % pour l’année2010 selon les données officielles 7 . De même, aprèsplusieurs années consécutives de baisse du nombre depersonnes sans emploi, une tendance à la hausse a lieudepuis fin 2009. Le taux de chômage, qui plafonnait en2009 à 6,8 %, a grimpé en août 2010 à 9,6 %. 85 Informe21.com, “Denuncian que la deforestación en nuestropays es la segunda en América”, (22 avril 2010).6 Infociudadano.com, “Situación del Lago de Valencia”(Situation du Lac de Valencia), (16 août 2010).7 .8 .Rapports nationaux 184 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


Cette situation devrait susciter la révision et larelance de la Mission Che Guevara – créée au départen 2004 sous le nom de “Misión Vuelvan Caracas” –destinée à faciliter le retour sur le marché du travail despersonnes qui en avaient été exclues et réduire le tauxde chômage à 5 %. Cependant, bien que le but n’ait pasencore été atteint six ans après son lancement, cettemission a subi une coupe budgétaire brutale pour 2011,passant de 59 millions d’USD à 7 millions d’USD 9 .Reculs en matière de santé et de logementEn 2006, la mise en marche de la Misión Barrio Adentroa suscité des attentes vis-à-vis de la garantie dudroit à la santé pour de larges secteurs de la population.La présence de 13 000 médecins d’originecubaine et la construction de 8 573 centres de santéprimaire dans tout le pays ont pesé positivement surles indicateurs de soins de santé primaire dans lessecteurs défavorisés. Cependant, des problèmes ontété signalés au niveau de ces centres, et 2000 ontété fermés en 2009, à tel point qu’en septembre del’année 2010, Hugo Chávez a reconnu l’existence dela crise en matière de santé et décrété l’urgence sanitaire10 . Pour 2011, le Gouvernement a annoncé un“Plan de relance pour la Mission Barrio Adentro”, et luia alloué un apport budgétaire de 195 millions d’USD ;néanmoins la politique n’est pas coordonnée par leministère du Pouvoir populaire pour la Santé commeil se devrait étant donné la nature de la mission, maispar le ministère du Pouvoir populaire du bureau de laprésidence, ce qui met en relief un manque de coordinationinstitutionnel en matière de santé.Dans le réseau hospitalier traditionnel, composéde 299 centres dans l’ensemble du pays, des problèmesstructuraux persistent, entre autres l’absencede biens et de services médicaux, le manque de professionnelset de graves déficiences dans l’infrastructurequi entravent la pleine satisfaction du droit à lasanté. La Constitution ordonnait en 1999 que, dans undélai non supérieur à un an, une Loi organique relativeà la Santé soit adoptée afin de réduire la dispersion etl’improvisation en la matière, or le pouvoir législatif aonze ans de retard dans sa promulgation.Un autre secteur qualifié de « problème d’État» par le pouvoir exécutif, c’est le logement. Au coursde l’année 2009 le Gouvernement a bâti 23 649 logements,et en 11 ans de gestion un total de 324 588unités ; la moyenne annuelle se situe donc clairementen-deçà des 150 000 logements par an prévus, stratégiequi visait à réduire le manque de logements (estiméà 3.000.000 de maisons) en dix ans 11 . Parmi lescauses de ce retard dans les politiques de logement onpeut souligner la fragilité institutionnelle du ministèrecréé en 2005, le roulement constant des responsablesdes postes de direction, le peu de supervision et decontrôle des projets exécutés et de l’argent investiet, pour finir, l’absence d’un plan de construction delogements et d’urbanisation des sols comptant sur9 Montants calculés sur la base du change officiel de 4.3bolivars pour un dollar10 La Cl@ase.info, “Chávez admite cierre de módulos de BarrioAdentro y declara en emergencia la salud”, (20 septembre 2009).11 Dernier chiffre officiel connu du ministère du Logement et del’habitat, année 2007des objectifs bien définis et des règlements clairs pourles projets à court, moyen et long terme.Malgré ce qui précède et bien qu’il ait récidivédans des politiques qui ont montré leurs déficiences,Hugo Chávez a annoncé son intention de faire bâtir 2millions de logements en 6 ans 12 .Progrès en matière d’éducationD’après l’évaluation internationale effectuée par l’Organisationdes Nations Unies pour l’éducation, lascience et la culture (Unesco), le Venezuela est passédu 64 e au 59 e rang 13 , avec un Indice du développementde l’éducation pour tous (IDE) de 0,956 alorsqu’il était de 0,910 en 1999 14 .La qualité de l’éducation reste un défi que personnene relève. Le principal problème est l’absenced’un système national d’évaluation des apprentissages,ce qui fait qu’il n’existe pas de paramètres decomparaison pour procéder aux améliorations. En2010, qui plus est, 44 % des enseignants n’étaient pastitulaires mais des contractuels ou des remplaçants 15 .Cette situation s’aggrave dans les états les moins favorisésde l’intérieur du pays, tel que l’État d’Amazonas,où la moitié de l’effectif enseignant ne possède aucundiplôme pour exercer cette profession.Criminalisation de la contestation socialeParallèlement à l’augmentation des conflits sociauxdérivés de l’absence de réponse aux revendications dupeuple, le Gouvernement a instauré comme politiqued’État la criminalisation des manifestants. Ce modèleest passé par les phases suivantes : la fermeture desfilières institutionnelles de négociation, la réalisationde campagnes de démolissage contre les manifestantset les leaders sociaux, la répression et la judiciarisationdes personnes mobilisées et, finalement, l’incitationaux accusations sans preuves à l’appui. En 2010,135 manifestations ont été réprimées par les forcesde police et de l’armée, elles se sont soldées par 438personnes détenues et 386 blessés 16 . Cependant, lessituations les plus inquiétantes concernent l’ouvertured’actions judiciaires contre les manifestants. PROVEAa comptabilisé plus de 2400 personnes condamnéesà se présenter périodiquement devant le juge, dont 125syndicalistes et 1200 paysans. Cette judiciarisation estdevenue possible grâce à la création d’une série de règlementspénalisant la contestation sociale dans le pays: l’article 357 de la réforme du Code pénal ; les articles 47et 56 de la Loi organique visant la sécurité de la nation;les articles 139 et 141 de la Loi pour la défense despersonnes à l’accès des biens et des services et, enfin,les articles 24 et 25 de la Loi spéciale pour la défense12 Disponible sur .13 Ministerio del Poder Popular para Relaciones Exteriores,“Venezuela es la nación que más ha disminuido ladesigualdad social y éconómica en América Latina y elCaribe”, (15 octobre 2010).14 Abrebrecha.com, “UNESCO: Venezuela a punto de lograrmetas educativas”, (13 avril 2010).15 Provea, Informe Anual 2010 Derechos Humanos en Venezuela,.16 Provea et Espacio Público, Informe de Protestas en Venezuelaaño 2010 (Rapport sur les contestations au Venezuela 2010),.populaire contre la séquestration, le boycott et touteautre conduite qui affecte la consommation d’alimentsou de produits soumis au contrôle des prix.Ces réglementations pénalisent une des stratégieshistoriques du mouvement populaire vénézuéliendestinée à faire valoir ses droits : le blocage des rues.De plus, elles établissent différents «périmètres desécurité» où toute perturbation de l’ordre public estinterdite. Le symbole de la judiciarisation des leaderssociaux a été le syndicaliste Rubén González qui a étéprivé de liberté – de septembre 2009 à mars 2011– après avoir soutenu une grève menée au sein del’entreprise nationale Ferrominera de l’État de Bolívarpour faire entendre une série de demandes et de revendicationsconcernant les conditions de travail. Le28 février dernier, González a été condamné à 7 ans et6 mois de prison, accusé de conspiration, incitation àcommettre un délit, violation du périmètre de sécuritéet atteinte à la liberté de travail. Suite à une vaste mobilisationde rejet, organisée depuis différents secteurs,la Cour suprême de Justice annule la sentence cinqjours plus tard et ordonne l’ouverture d’un nouveauprocès qui se déroule dans la ville de Caracas, offrantau syndicaliste l’avantage d’être jugé en liberté 17 .Affaiblissement de la démocratieEn décembre 2010 une loi a été votée conférant au présidentdes facultés extraordinaires pour une période de18 mois. De même, 24 lois ont été promulguées, venantconfirmer la tendance dénoncée par les organisationsdes Droits de l’Homme au sujet de l’imposition nondémocratique du projet nommé «<strong>Social</strong>isme du XXIesiècle». Les coalitions «Foro por la Vida y Sinergia» ontassuré que ces initiatives « portent gravement atteinteà l’existence de l’État de Droit et la pleine vigueur desDroits de l’Homme dans la République bolivariennedu Venezuela » 18 . Dans ce paquet législatif, qui dansla pratique est en train de glisser vers une Constitutionautre que celle que les Vénézuéliens avaient approuvéeen 1999, se trouvent des règlements qui entravent ledroit d’association et déclarent illégale la réception defonds de la part de la coopération internationale.Le 22 décembre 2010 la Loi sur la Souverainetépolitique et l’auto-détermination nationale 19 a été votéede façon expéditive, interdisant explicitement laréception de fonds en provenance de l’étranger pourdes organisations « ayant des fins politiques ». Sur lestrois activités qui selon la loi définissent une initiativede nature politique, deux sont liées aux façons d’agirqui définissent pratiquement toutes les initiatives populaireset sociales du pays, puisqu’elles incluent dansleur description le fait de promouvoir la participationdes citoyens dans des espaces publics et d’exercer uncontrôle sur les décisions de la vie politique. D’autrepart, un deuxième règlement, la Loi sur la Coopérationinternationale – qui centralise au sein du Gouvernementles ressources destinées aux ONG – a été ajoutée auxprérogatives du président de la République. n17 .18 Foro por la Vida y Sinergia, Ley habilitante coloca en serioriesgo los Derechos Humanos, .19 .<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 185 Venezuela


viEt namLa société civile doit être consultéeLe Vietnam est parvenu à la condition de pays à revenus moyens grâce à une importante croissance économiquemais le Gouvernement doit s’efforcer de prendre en compte les besoins de la population à long terme. Il fautaffronter la pauvreté et les défis environnementaux comme la pollution, l’élévation du niveau de la mer etl’érosion des sols qui ne cesse de progresser ainsi que les facteurs de risques concernant la corruption tels quel’accès inégal à l’information. Il faudra permettre à la société civile et aux experts indépendants de participer àla recherche de stratégies pour aborder les défis du développement durable.VUFO-NGO Resource CentreCes 15 dernières années, le Vietnam a atteint untaux de croissance économique impressionnant.Le Produit national brut (PNB) réel a augmenté enmoyenne de 7,3 % entre 1995 et 2005 1 . En 2009,après la crise financière mondiale, le PNB réel a égalementaugmenté de 5,3 % et depuis lors c’est unedes économies dont la croissance est parmi les plusrapides du Sud-est asiatique et de la zone Pacifique 2 .Il est essentiel que la nation se demande si ce typede développement s’inscrit dans la durabilité et quelest l’impact de ce développement sur les moyens desubsistance de la génération actuelle et des générationsfutures.Le soutien à la croissance économique sensibleà la pauvreté s’est étendu. La croissance a apportéune prospérité relative à la population après les annéesde privation de la guerre et de l’après-guerre.Néanmoins, alors que le développement traditionnela fait diminuer la pauvreté, il a aussi dégradé l’environnementdont est tributaire une grande majoritéde la population 3 .En 2010, Le Vietnam a atteint la condition depays à revenus moyens. En 2009, le Produit intérieurbrut (PIB) par habitant était de 1010 USD, classant lepays à la limite inférieure de la fourchette des revenusmoyens décidé par la Banque mondiale. Malgré cetteavancée importante, des préoccupations subsistentdu fait que le Gouvernement n’engage pas les réformesnécessaires au développement durable maisaussi du fait que cette croissance crée de nouveauxdéfis y compris une augmentation des inégalitéssociales, des services inadaptés, davantage de pollutionet la perte de terres destinées à l’agricultureen raison de l’industrialisation 4 . En outre, les politiquesactuelles ne soutiennent pas la modernisation1 Banque mondiale, Vietnam Country Overview, (juin 2008),.2 D. Mishra, et al., “Taking Stock: An Update on Vietnam’s RecentEconomic Developments”, préparé par la Banque mondiale àl’occasion de la réunion annuelle du Groupe consultatif pour leVietnam, (Hanoï : 8 décembre 2010), .3 S.Bas, et al, Integrating environment and development inVietnam: achievements, challenges and next steps, (London:IIED, and Hanoi: UNDP, March 2009).4 VUFO-NGO Resource Centre, International Non-GovernmentalOrganisations’ Statement for the Consultative Group Meeting,(8 de diciembre de 2010), .Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 9388100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé0Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 ansde l’économie rurale. L’infrastructure et les autresservices ruraux sont très en retard par rapport auxprogrès que connaissent les villes 5 .Impacts sur l’environnementet le changement climatiqueLa croissance économique rapide qu’a connue leVietnam a un effet certain sur l’environnement, malgréune législation forte visant à protéger l’environnement,son application est souvent faible. À mesureque l’économie, la population et l’urbanisation se développent,les principales menaces pour l’environnementsont entre autres la surexploitation des forêts,la perte des terres cultivables, la pollution de l’eauet de l’air, l’érosion des sols due à des conditionsd’utilisation non durables, la perte de la biodiversitépar l’action des braconniers dans les parcs nationauxet autres facteurs comme la dégradation du littoral etl’impact environnemental des mines 6 .L’extraction de bauxite dans les hautes terresdu centre s’est heurtée à une forte opposition enraison d’éventuels dégâts environnementaux.Les réservoirs de résidus alcalins de deux minessont aussi source de préoccupation, ils sont enconstruction dans les provinces de Lam Dong etDak Nong et des inondations ou un tremblementde terre pourrait causer des fuites toxiques. Cesinquiétudes se sont encore aggravées en 2010lorsqu’une brèche dans le réservoir d’une mine defer de la province de Cao Bang a laissé échapper desrésidus sur les terres de 50 familles. Scientifiqueset intellectuels ont signé ensemble une pétition5 C. Kirkpatrick, N. J. Freeman et K. N.B. Ninh, Managing Risk andAttaining Equitable Growth, (Hanoi: UNDP, 2010).6 VUFO-NGO Resource Centre, op.cit.89100 10098Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 70Éducation100041L'autonomisation100 75 10095Activité économiquepour demander au Gouvernement de stopper lesprojets et d’exiger une enquête 7 .Entre 1958 et 2007 la température moyenne duVietnam a augmenté de 0,5 à 0,7 °C et le niveau de lamer est monté de 20 cm 8 . Sa longue bande littoralerend ce pays très vulnérable à l’impact du changementclimatique et à l’augmentation du niveau de lamer, ayant de ce fait une incidence probable sur lestrois piliers du développement durable : l’économie,la société et l’environnement. Les progrès réalisésdans le cadre de la réduction de la pauvreté – celle-ciconcernait 58 % de la population en 1993 et 12,3 %en 2009 9 – pourraient faire machine arrière.Le Vietnam est un pays essentiellement agricole: 75 % de la population vit en milieu rural, la majoritésurvit grâce à une agriculture à petite échelle requérantpeu de technologie et donc avec une forte dépendancevis-à-vis du climat 10 . Chaque augmentation de températureaura un impact négatif énorme sur la productionagricole. Les communautés rurales pauvres ontpeu d’infrastructure et des finances réduites et il leurest donc très difficile de s’adapter au changementclimatique. Le réchauffement global peut également7 Thanh Nien, Bauxite Mining Projects Cost-effective: Official,(7 novembre 2010); Thanh Nien, Lawmakers Inspect BauxiteSites, Call for Further Measures, (12 novembre 2010),.8 Vietnam Aujourd’hui, Vietnam Makes Active Contribution toFight Climate Change, (5 septembre 2009), .9 AusAID, Australia’s Strategic Approach to Aid in Vietnam,(décembre 2010), .10 Banque mondiale, Rural Development and Agriculture inVietnam, (février 2007), .Rapports nationaux 186 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


produire des phénomènes climatiques extrêmes etdes catastrophes naturelles plus fréquentes et plusgraves comme les typhons, les inondations, les épisodesde sécheresse et les infiltrations d’eau salée.Le Gouvernement a développé de vastes politiqueset programmes sur le changement climatiquemais celles-ci manquent du soutien juridique qui permettraitde les appliquer. Il n’existe pas d’organismecoordonnant l’activité des ministères, des gouvernementslocaux et autres organismes publics et privés, iln’existe pas non plus de protocoles efficaces permettantde garantir que toutes les communautés et segmentsde population puissent prendre part à ces programmes.Par ailleurs, les mécanismes de mise en place des politiquesne sont pas suffisamment clairs ou solides pourassurer la coordination entre les différents secteurs etentre le pouvoir central et les locaux 11 .Au vu de son impact sur le réchauffement climatique,le Vietnam produit relativement peu d’émissionsde CO2. Il est important de les maintenir à ce niveaupendant le développement du pays plutôt que d’essayerde les réduire une fois qu’elles auront atteint des niveauxtrès élevés. Néanmoins, le développement économiquerapide fait augmenter la demande en énergie et le Vietnamcontinue à construire des centrales électriques aucharbon qui génèrent une forte pollution.Les centrales hydroélectriques qui produisent déjà20 % de l’énergie consommée, démontrent quelquesunesdes difficultés du pays pour parvenir à un développementdurable. Dans les régions centrales du pays,on sacrifie des forêts pour construire ces centrales etles experts ont signalé que les conséquences environnementaleset sociales seront graves 12 . Les moyens decommunication locaux ont signalé à plusieurs reprisesque les habitants contraints de se déplacer en raison de laconstruction des centrales électriques luttent aujourd’huipour survivre dans des zones d’habitat construites à lalégère et où ils n’ont pas de terres cultivables 13 . Le Gouvernementa mis en place des procédures strictes en vuede la construction de barrages incluant des évaluationsde l’impact sur l’environnement, néanmoins certainesadministrations au niveau des provinces, en charge del’homologation de petites et moyennes centrales hydroélectriques,ont fait l’impasse sur ces normes 14 .Transparence et corruptionLe manque de transparence du Gouvernement constitueun obstacle fondamental au développement durable. Pourciter un exemple, la nature des lois sur la terre – y comprisle fait de savoir si elles sont perçues comme étant prévisibleset sûres –, joue un rôle-clé dans la formation desopinions sur l’économie et sur les stratégies des moyensde subsistance. Le pays a franchi quelques étapes vers uncadre légal solide pour éradiquer la corruption, mais lesprincipaux facteurs de risque systémique restent intacts.L’information est incomplète et difficile à comprendrequant aux droits d’utilisation de la terre et les certificats de11 Act!onAid Vietnam, Losses and Damages: Research onClimate Impacts on Poor Communities in Vietnam and TheirResponses, (Hanoi: 29 novembre 2010).12 Thanh Nien, Dammed and Damned, (3 novembre 2009). .13 Ibid.14 Ibid.propriété des biens, le processus de demande est compliquéet les recours contre des irrégularités présuméessont inadaptés, lents et manquent de transparence. Dansle processus d’acquisition et d’attribution des terres, lerisque de corruption concerne l’accès inégal à l’informationet la possibilité que les fonctionnaires puissent abuserde leur pouvoir d’appréciation sur les compensationspour la terre et les registres fonciers 15 .Peu d’espace pour la société civileL’influence de la société civile au niveau des politiquesdu Gouvernement est limitée. Pour les milliers d’organisationsofficielles et non officielles, le Gouvernementautorise en général, voire même encourage, les activitésquotidiennes tout en imposant un système de régulationminutieux et un contrôle sur le rythme et l’orientation dudéveloppement des activités 16 . Les Organisations nongouvernementales (ONG) locales et internationales sontinvitées à faire des suggestions pour le développementde politiques, on note néanmoins peu d’activité de lobbyingsur le changement des politiques et la législationen vigueur mais aussi peu d’opportunité pour influersur les politiques sans y avoir été invité auparavant parle Gouvernement.Autre restriction imposée aux ONG locales, la réglementationdétaillée sur l’utilisation de fonds étrangersen vertu du décret 93/2009. Il existe des règlesquant à l’utilisation de ces fonds, des informations etsur les organismes gouvernementaux contrôlant et régulantces utilisations. Le but de ces directives consisteà limiter les fonds que les donateurs étrangers apportentaux ONG locales, car en effet nombre de celles-ci ne sontpas en mesure de respecter cette réglementation. Lesentreprises vietnamiennes n’ont pas encore assuméune responsabilité sociale corporative, elles ne constituentdonc pas une alternative de financement. Les ONGlocales manquent par conséquent de ressources et peud’opportunités s’offrent à elles pour prendre part auxpolitiques liées au développement durable.Les experts sont aussi tenus au silence. La Décision97/2009 du Gouvernement limite les domainesde travail des organisations scientifiques, technologiques,de recherche et de service, cette décision établitles domaines « légitimes » d’action. Sont exclues lespolitiques économiques, les politiques publiques, lagouvernance et les politiques environnementales.Toutes ces restrictions étouffent les soutiens émanantde la société civile envers les politiques de développementdurable. Dans une économie toujours pluscomplexe, un processus d’élaboration des politiquessi encadré ne peut aborder les défis et les solutionsimposés pour un développement équitable et durable.Le débat public qui permettrait de s’approcher de cessolutions fait face à une forte répression, même si lesgens tentent de se faire entendre, ils se heurtent parfoisà une opposition verbale aux projets qui mettent endanger l’environnement et le bien-être des personnes.Les médias font également leur possible pour mettre en15 Banque mondiale, Recognizing and Reducing CorruptionRisks in Land Management in Vietnam, (Hanoi: NationalPolitical Publishing House – Su That, 2011).16 M. Sidel, “Maintaining Firm Control: Recent Developments inNonprofit Law and Regulation in Vietnam”, en The InternationalJournal of Not-for-Profit Law, Volume 12(3), (mayo de 2010),.évidence les actions – et l’inaction – du Gouvernementet informer sur l’opposition de la communauté aux menacespesant sur l’environnement.Les donateurs bilatéraux, les organisations del’ONU et les ONG internationales sont responsables dusoutien apporté au Vietnam pour parvenir à une relationplus ouverte entre le Gouvernement et la société civile.Celles-ci se sont malgré tout davantage orientées versle développement des capacités du Gouvernement quevers un soutien aux ONG locales et à la société civile, ilfaudra donc encore une grande aide pour que le paysapplique des réformes institutionnelles et renouvelle sespolitiques et pour que la remise des comptes des organismespublics soit encadrée par plus de transparence.Le Vietnam ayant réussi à se classer parmi les pays àrevenus moyens, certains donateurs se sont éloignésmalgré les programmes en cours 17 .ConclusionAfin de trouver des solutions pour un développementéquitable et durable de l’économie et de la société vietnamiennede plus en plus complexe, il faudra beaucoupde discussions et de mises au point. Le Gouvernementdevra laisser la société civile et les experts prendre touteleur place et leur donner la possibilité de faire des apports.Les autorités locales et la société civile devrontdisposer de plus de pouvoir et les institutions techniqueset de recherche devront avoir plus de liberté pourcommenter publiquement les affaires d’intérêt public.Les communautés connaissent les problèmes de leurrégion mais elles ignorent très fréquemment commentfaire passer l’information ; il faudra donc améliorer lacapacité de surveillance de la pollution ou de tout autreobstacle au développement durable.Il convient de mettre en place des procédurespratiques pour intégrer l’adaptation au changement climatiquedans les plans de développement aux niveauxprovincial et local. Les autorités locales et les OSC devrontprendre part au développement, à l’applicationet au suivi des plans d’atténuation et d’adaptation. Ilfaudra aussi apporter un soutien technique local auxagences provinciales pour qu’elles puissent analyser lavulnérabilité face au changement climatique et planifierles mesures d’adaptation et d’atténuation. De plus, lescommunautés devront recevoir une formation sur lesquestions du changement climatique pour qu’elles puissentprocéder aux modifications nécessaires. L’accèsaux prêts bancaires devrait être facilité en particulierpour ceux qui se rapprochent du seuil de pauvreté. Cecirendrait la situation économique des personnes plussupportable et les rendrait donc moins vulnérables faceau changement climatique 18 .Le pays a aussi besoin de mécanismes et de procéduresjuridiques qui garantissent la transparence. Il faudraitrenforcer le ministère des Ressources naturelleset de l’environnement pour qu’il puisse faire respecterles lois existantes sur l’environnement. Certaines ONGtravaillent déjà avec des organisations locales, des étudiantset des jeunes pour surveiller les systèmes administratifsau niveau local et attirer l’attention des médiassur les problèmes de pauvreté et d’environnement, ellesdevraient bénéficier de plus de soutien. n17 VUFO-NGO Resource Centre, op.cit.18 ActionAid Vietnam, op. cit.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 187 Viêt Nam


YÉMENUn État quasiment en failliteLe pays pourra difficilement avancer vers un développement durable tant que sa situation actuelle - menacede guerre civile, de famine ou de catastrophe sociale- continuera. Ses problèmes endémiques liés à la fois à lapaupérisation de la population, la corruption politique, la faiblesse de son système agricole et de sa productionalimentaire, sa dépendance envers la production de pétrole et le peu de ressources en eau, ont été exacerbéspar une situation générale d’insécurité dérivant de protestations populaires et par la menace d’anomie. Si onne parvient pas à un équilibre entre les attentes des citoyens et les besoins structurels, le pays sera en passede devenir un État failli.Centre d’information et de formation aux droits humainsArafat AlroufaidLes mois de turbulence lors des manifestations de laRévolte populaire de la jeunesse contre le présidentAli Abdallah Saleh ont débuté en janvier 2011 et ontébranlé les fondements d’un éventuel développementdurable au Yémen. En août 2011, le Conseil desécurité de l’ONU a sonné l’alarme en exprimant sa «profonde inquiétude » à propos de la dégradation dutissu humanitaire et économique entraînant de ce faitune catastrophe économique et humanitaire. En octobredernier, l’UNICEF et le Programme alimentairemondial (PAM) ont prévenu que le Yémen pourrait seretrouver face à une catastrophe semblable à celle dela Somalie, c’est-à-dire, qu’il pourrait devenir un Étatirrémédiablement fragmenté et failli 1 .L’économie est paralysée, la pauvreté augmenteet le chômage a doublé, les services se dégradentalors que les prix des matières premièresont triplé depuis le début de l’année et environ 60% des habitants du pays, qui compte près de 24millions d’individus, vivent sous le seuil de pauvretéavec un revenu journalier par personne de moinsd’un dollar. Le taux d’inflation dépasse 35 %. Si lasituation se poursuit, nous assisterons à un effondrementéconomique et à une famine inévitable,surtout dans les zones rurales.Les protestations populaires veulent mettre finà plus de trois décennies avec le président Salehau pouvoir, celui-ci, en dépit d’une exploitation permanentedes gisements de pétrole du pays, ayantplongé une grande partie de la population dans lapauvreté, jusqu’à la convertir en la nation la pluspauvre du monde arabe. La mauvaise gestion et lacorruption généralisée sont les causes évidentes decette décadence. Le pays se trouve au 146 ème rang(sur un total de 178 pays) selon l’Indice de perceptionde la corruption 2010 de Transparency International2 .1 Centre d’actualités de l’ONU, l’UNICEF et le PMA alertent surle danger d’un désastre humanitaire au Yémen, (24 octobre2011), .2 Transparency International, Indice de perception de lacorruption 2010, .Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 7236100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé053Enfants atteignantla cinquième annéed’école100 100Survivance jusqu’àl’âge de 5 ansPlus d’habitants, plus de pauvretéLe problème démographique au Yémen est l’un desobstacles les plus notoires pour l’adoption d’unmodèle de développement durable. Si le taux decroissance de la population se maintient à 3,2 %par an, les difficultés et les problèmes sociaux etéconomiques vont s’intensifier, car l’écart entre ledéveloppement démographique et le taux de développementva se creuser. Il est prévu que la populationdu Yémen atteigne 43 millions d’individus en2025. La pauvreté dans le pays augmente à mesureque la crise économique s’aggrave. La mendicité aaugmenté et des centaines de milliers de famillessont confrontées à l’impossibilité d’assurer leursbesoins alimentaires de base.Le Projet de la Stratégie nationale pour la sécuritéalimentaire, élaboré par le Gouvernement en coopérationavec l’International Food Policy ResearchInstitute (IFPRI) 3 a montré que 32 % de la populationdu Yémen ne bénéficie pas de protection alimentaire.Cela signifie que presque un tiers des Yéménites, soit7,5 millions de personnes, souffre de la faim et n’apas accès à suffisamment de nourriture dont 57 %des enfants qui souffrent de malnutrition.Le taux de pauvreté selon des recensementsofficiels s’est élevé à 42,8 % en 2010 par rapport à33,8 % en 2009. La pauvreté avance surtout dans leszones rurales où, selon les données du Gouvernement,elle a atteint 47,6 % de la population en 2010contre 38,5 % en 2009. Dans les zones urbaines,le taux de pauvreté s’élève à 29,9 % contre 19,7 %en 2009.3 Voir : en anglais .93Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 24Éducation1000 2L'autonomisation3040100 100Activité économiqueLe Yémen est classé parmi les pays où la croissanceest la plus faible. Il se trouve au 133 ème rangsur un total de 169 pays étudíés dans le Rapport2010 sur le développement humain du Programmede développement des Nations Unies 4 . 15,7 % desYéménites vivent avec moins d’un dollar par jour et45,2 % avec moins de deux dollars par jour.Le pays produit moins de 20 % des alimentsconsommés par la population et en importe environ75 %, dont 2,1 millions de tonnes de céréales par an.La plupart des terres et des ressources hydriquesdu pays sont utilisées pour la culture du khat (Cathaedulis), une drogue stimulante, populaire en Afriquede l’Est et au sud de la péninsule arabique.La production de pétrole, qui a atteint environ300 000 barils par jour en 2010, assurait 60 % desrevenus de l’État. Cette production a diminué en raisonde la Révolte populaire de la jeunesse. Le tauxde croissance économique, qui avait atteint 4,5 %en 2010, est retombé à 3 % durant la première partiede 2011, puis à 1,5 % en juin. L’activité dans les secteursde la construction et du commerce a baissé de80 à 90 %, tandis que le tourisme est quasiment paralysé.Les bénéfices attendus dans le secteur privé,estimés à 17 milliards de dollars depuis le début del’année, ne se sont jamais matérialisés.Le tourisme intérieur et étranger est en baissede 95 %. Les transports ainsi que de nombreuxprojets de développement et d’investissement, lesentreprises et les ventes dans divers secteurs économiquesimportants, sont fortement paralysés, tandisque les secteurs de la construction, de l’immobilieret le secteur des importations sont à l’arrêt complet.4 Voir : .Rapports nationaux 188 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


L’eau commence à manquerLe développement du secteur agricole est freiné parde nombreux obstacles dont une pénurie en terres fertiles,qui ne représentent que 3 % de la superficie totaledu pays, l’épuisement des ressources hydriques,le faible accès au crédit et les maigres investissementsdans les infrastructures de production et de commercialisation.L’agriculture ne représente à peine qu’1,25% du total des investissements. La subvention financièrede l’État à l’agriculture est axée sur l’alimentationdu bétail, les engrais et le carburant diesel pour le fonctionnementdes tracteurs et des pompes d’irrigation.Le Rapport sur le rendement du Gouvernement révèleque la faible croissance du secteur agricole, de 3 % àpeine, est le résultat de l’épuisement des ressourcesen eau, du retard dans la réalisation des objectifs duplan pour réduire les plantations de khat à 10 % dutotal des terres arables (actuellement, elles représentent25 % des terres arables et consomment 30 %des ressources hydriques), et s’explique aussi par lasurface limitée de terres agricoles.Un nouveau document officiel révèle que lesecteur de l’eau aura besoin d’environ 4,43 milliardsde dollars au cours des 10 prochaines années, selonles besoins évalués par la Stratégie nationale del’eau. Pour répondre à ces besoins, le Gouvernementcherche à lever des fonds auprès des donateurs telsque les pays du Conseil de coopération du Golfe. Celaexige, entre autres choses, d’améliorer la capacitéadministrative de l’aide, l’attention portée sur lespratiques fiables adéquates et la gestion de l’eau.Selon le quatrième Plan de développementéconomique et social pour la réduction de la pauvreté2011-2015, cité dans le projet de document duprogramme pour le Yémen (2012-2015) de l’ONU(septembre 2011) 5 , le secteur de l’eau doit faire faceà de graves difficultés qui trouvent leur origine dansle manque de financement du secteur, celui-ci ayantbesoin d’énormes ressources pour atteindre sesobjectifs. Les principaux problèmes recensés sont,d’un côté, la pénurie en eau douce et le danger d’augmentationdu taux de pollution et des inondations,La minuscule place de la femmePlusieurs études indiquent que les femmes yéménites représentent plus de 50 % de la population dupays, alors que leur taux d’occupation ne dépasse pas 20 %, dans le secteur agricole pour moitié, etne dépassant pas 0,9 % dans le secteur de l’administration publique et des services.Dans d’autres secteurs, la participation des femmes est très faible en raison de plusieursfacteurs, parmi lesquels les traditions sociales qui n’acceptent toujours pas, dans une certainemesure, le travail des femmes mais aussi à cause d’un taux d’analphabétisme très important chezles femmes qui atteint 79,2 % contre 36 % chez les hommes.La participation des femmes dans l’enseignement primaire ne dépasse pas 17,3 %contre 82,7 % chez les hommes. Dans l’enseignement secondaire, 22,8 % des femmesy participent, comparativement à 77,2 % chez les hommes. Dans le secteur administratifde l’éducation, les femmes ne représentent que 11,5 % des fonctionnaires et éducateurs.Le taux de participation des femmes dans le secteur judiciaire ne dépasse pas 0,06 %, tandis quedans le secteur des communications, tous secteurs confondus, elles ne représentent que 16,7 %.l’augmentation de la période de sécheresse accompagnéed’une extension de la zone géographique affectéeainsi que la concurrence régnante concernantles différentes utilisations de l’eau et l’accès limitéà l’eau potable et à l’assainissement et, d’un autrecôté, l’insuffisance de l’organisation administrativeet institutionnelle qui souffre de la fragmentationet, dans une large mesure, d’un chevauchement decompétences. L’insuffisance dans la coordination etla coopération entre les divers intervenants dans ledomaine de la gestion de l’eau 6 contribue égalementà aggraver la situation.Ce même rapport indique que les taux de couvertureen eau potable et en assainissement ont atteintfin 2010 environ 60 % et 30 % des habitants dela ville respectivement. La quantité d’eau produitedans les villes principales et secondaires en 2010est estimée à 148 millions de mètres cubes, avecune croissance estimée à 21 millions de mètrescubes par rapport à 2005. Le montant de la consommationd’eau a été évalué à 104 millions de mètrescubes avec une augmentation estimée à 20 millionsde mètres cubes. La différence entre production etconsommation représente une perte atteignant 30% de la production 7 .Dans les zones rurales, les taux de couverturedes services d’eau et d’assainissement ont atteintrespectivement fin 2010, 50 % et 25 % de la populationtotale.On estime que les ressources hydriques renouveléeschaque année s’élèvent à 2,5 milliardsde mètres cubes, dont 1,5 milliard de mètres cubesproviennent des eaux profondes et 1 milliard deseaux de surface. On estime que la quantité d’eauutilisée est d’environ 3,4 milliards de mètres cubes,ce qui signifie qu’il y a un écart d’environ 900 millionsde mètres cubes entre ce qui est offert et ce qui esteffectivement utilisé . Le pompage excessif en eauprofonde est considéré comme l’un des facteursd’épuisement, mais à différents niveaux selon lesbassins aquifères. Certains de ces bassins sont soumisà un pompage excessif évalué de 250 à 400 %environ. Il ya quelque 45 000 puits privés dans lepays et quelque 200 plateformes de forage. n5 Voir : .6 Ibid.7 Ibid.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 189 Yémen


ZAMBIEDéforestation et développement durableL’économie du pays est en croissance depuis l’an 2000, cependant la pauvreté est toujours un problème pressant etl’espérance de vie est encore très faible. Bien que le Gouvernement ait fait preuve d’une certaine inquiétude face auxdéfis environnementaux, les plans mis en œuvre manquent de coordination et n’ont pas réussi à sensibiliser le publicsur l’érosion des sols, la perte de la biomasse, le changement climatique et la déforestation. Les niveaux élevésde pauvreté et le manque de ressources de subsistance alternatives aggravent la dégradation environnementaledu fait de la dépendance des pauvres aux ressources naturelles. Il est temps que le Gouvernement envisage despolitiques plus adéquates et renforce la coordination dans le secteur de l’environnement.Women for ChangeLumba SiyangaLucy MuyoyetaLa Zambie, à partir de 2000, a eu une forte croissanceéconomique avec un taux moyen de 5 % par an 1 . Lesniveaux de pauvreté sont passés de 68 % en 2004 à64 % en 2006, cependant 53 % de la population s’estmaintenue dans l’extrême pauvreté, plus répanduedans les foyers où les femmes sont chefs de famille.La population rurale est majoritairement pauvre,avec un taux général de pauvreté de 78 % 2 . Les niveauxd’extrême pauvreté sont également élevésdans les régions rurales (où se trouvent les deux tiersdes personnes vivant dans l’extrême pauvreté) etdans les foyers les moins scolarisés. En fait, dans lesfoyers dirigés par des personnes sans éducation formelle,l’incidence de la pauvreté est de 81 % et 70 %de ces foyers se trouvent dans l’extrême pauvreté 3 .Le pays a encore des difficultés pour offrir à tousl’accès à l’enseignement, particulièrement de niveausupérieur et tertiaire. En 2004 seulement 11 % de lapopulation avait terminé l’enseignement secondairesupérieur. Ce problème est plus grave pour les femmeset les filles : en 2006 seulement 8,6 % des femmes avaitterminé l’enseignement secondaire supérieur 4 . De plus,bien que l’éducation tertiaire soit fondamentale pour ledéveloppement économique à long terme ainsi quepour renforcer la démocratie et parvenir à la cohésionsociale, seulement 2 % de la population avait obtenu lebaccalauréat ou un niveau supérieur 5 .En dépit de plusieurs mesures et programmesdu Gouvernement visant à améliorer la qualité de vie,la santé de la population — facteur essentiel pour lebien-être social et économique — le pays fait faceà des difficultés. Il existe une forte prévalence demaladies infectieuses, avec un taux de VIH de 13,5 %1 Imani Development International Ltd, 2007 Update Surveyof Non Tariff Barriers to Trade: Zambia, Regional TradeFacilitation Programme, (juillet 2007).2 allAfrica.com, Zambia: Poverty Levels Go Down, (20 novembre2009), .3 Ibid.4 R. Siaciwena y F. Lubinda, The Role of Open and DistanceLearning in the Implementation of the Right to Education inZambia, The International Review of Research in Open andDistance Learning, (février 2008), .5 Ibid.Indice des Capacités de Base (ICB)ICB = 7046100Accouchements assurés par dupersonnel médical spécialisé067Enfants atteignantla cinquième annéed’écoleSurvivance jusqu’àl’âge de 5 anschez les adultes, et l’espérance de vie à la naissanceest de 52,36 ans 6 .Le développement durable et les problèmesenvironnementauxDepuis 2006 le Gouvernement a eu comme objectif d’assurerla durabilité environnementale : réparer les dégâtsenvironnementaux, préserver les processus biologiquesfondamentaux et assurer l’utilisation durable des ressourcesnaturelles. Cependant une série de facteurslimitent la possibilité d’atteindre cet objectif, parmi eux :• Les problèmes de coordination.• Le manque de politiques intégrales pour les affairesenvironnementales.• La faible sensibilité publique pour les affairesenvironnementales.• Un cadre légal inadéquat et la non application dela Loi des Forêts de 1999.• Les dotations budgétaires et les investissementsinsuffisants.• La faible conservation de la biodiversité et uneparticipation régionale limitée.• La mauvaise coordination transversale desquestions de l’environnement et du changementclimatique dans les politiques et les programmesdes autres secteurs.• Le retard dans la mise en place de la Politiquenationale pour l’environnement visant à réduireles conflits liés à l’utilisation de la terre (y comprisceux qui se produisent entre les hommes etles animaux).6 CIA, The World Factbook, Zambia, (mai 2011), .86100 100Indice d'Equité de Genre (IEG)IEG = 49Éducation100180L'autonomisation49100 78100Activité économiqueIl faut aussi aborder le problème du changementclimatique. La modification des tendances des températureset des précipitations est le principal indicateurlocal. Il y a une tendance constante à l’augmentationdes températures qui peut s’apprécier avec les recordsmoyens concernant la période 1961-2000, parexemple, et ayant eu plusieurs effets négatifs, parmilesquels la diminution du rendement des cultures etl’augmentation du risque de transmission de la malariadans des régions de plus haute altitude. Ceci estparticulièrement important en Zambie, où la malariareprésente 47 % du nombre de décès par an 7 .Il n’est pas simple de faire une évaluation del’impact des températures plus élevées sur les précipitations,surtout depuis que le pays subit périodiquementle phénomène El Niño, dont la complexitéva au-delà des approches des modèles climatiquesactuels. Cependant, le Programme national d’actionpour l’adaptation (PNAA) a informé que lorsdes deux dernières décennies la sécheresse et lesinondations ont été plus fréquentes, plus intenses etde plus grande envergure 8 .En ce qui concerne la biodiversité, selon lesdonnées du Centre mondial de surveillance de laconservation, la Zambie possède 1 234 espècesconnues d’amphibiens, d’oiseaux, de mammifères et7 IRIN, “Zambia: Decreasing Cases Cause for Optimism”, enIn Depth: Killer Number One – The Fight Against Malaria,(janvier 2006), .8 Ministère du Tourisme, de l’environnement et des ressourcesnaturelles, “Formulation of the National AdaptationProgramme of Action on Climate Change”, Gouvernementde Zambie, UNDP Zambia et Global Environment Facility,(septembre 2007), .Rapports nationaux 190 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>


de reptiles. Parmi celles-ci, 1,5 % sont endémiqueset 1,9 % se trouvent en danger. Le pays possèdeaussi 4 747 espèces de plantes vasculaires, parmilesquelles 4,4 % sont endémiques 9 .La biomasse du pays (au-dessus et au-dessousdu sol) est calculée à 5,6 milliards de tonnes, avecquelque 434 millions de tonnes supplémentairesde bois mort, ce qui permet de faire une estimationtotale de la biomasse de 6 milliards de tonnes. Surcette quantité, quelque 2,8 milliards de tonnes decarbone se trouvent stockées dans les forêts. Lesforêts renferment alors une importante quantité (90%) de la biomasse aérienne totale du pays.La déforestation et ses impactsPendant les 40 dernières années les forêts se sontréduites en raison de l’augmentation de la population,des impératifs économiques, de la productionde charbon végétal, de la demande plus importantede terres pour l’agriculture, et des incendies incontrôlés.Le taux de déforestation qui pendantdes décennies était de quelque 300 000 hectarespar an a atteint en 2008 800 000 hectares par an 10 .Entre 1990 et 2010, la Zambie a perdu environ 6,3% de sa couverture forestière, soit quelque 3 332000 hectares 11 .L’exploitation commerciale des bois autochtonesa commencé pendant la troisième décenniedu XXe siècle. L’augmentation de l’industrie minièreet de la construction a aussi beaucoup contribué àla déforestation. Afin de nourrir une population enpleine croissance, l’agriculture sur brûlis s’est généralisée.L’exploitation forestière est aussi en train des’étendre. Les forêts à bois dur des prairies occidentales,qui étaient relativement bien conservées, ontété soumises à beaucoup de pression au cours desdernières années 12 .Les familles et les industries sont de grandsconsommateurs de ressources forestières. Le principalproduit commercial des forêts autochtonesest le charbon de bois, utilisé pour la cuisson desaliments : 27 % des foyers en Zambie utilisent lecharbon de bois comme principale source d’énergie,alors que 54 % utilisent du bois bûche. 16 % desfoyers utilisent l’électricité pour cuisiner et 19,3 %l’utilisent en tant que principale source d’éclairage.L’industrie du charbon de bois emploie quelque 50000 personnes dans les régions rurales et urbaines 13 .Les forêts représentent une source de subsistanceimportante pour les communautés rurales. Enparticulier, les foyers les plus pauvres montrent uneplus grande dépendance (44 %) au bois bûche parrapport aux foyers à plus hauts revenus. La demandede bois bûche augmente de manière exponentielle9 Mongabay.com, Zambia Forest Information and Data, (2010),.10 Comission Européenne, “Governance Profile – Zambia”,(2008), .11 Mongabay.com, op. cit.12 Ibid.13 Banque Mondiale, Delivering Modern Energy Services for UrbanAfrica - Status, Trends and Opportunities for CommerciallySustainable Interventions, (2003), .alors que dans certaines régions le manque est évident.Les foyers les plus pauvres ont également uneplus grande dépendance aux plantes sauvages à desfins médicinales et alimentaires. Les produits desforêts servent aussi de pâtures et de matériaux deconstruction, comme les poteaux et le chaume destoitures. La plupart des forêts sont gérées selon lesméthodes traditionnelles, sans plans formels : 41% ont une gestion traditionnelle ; 36 % n’ont pas deplan de gestion établi ; et seulement 23 % possèdentde plans de gestion formels (parcs nationaux et réservesforestières).Aussi bien les hommes que les femmes ont unrôle clé dans la gestion des ressources naturelles dupays, mais le rapport des femmes à l’environnementest essentiel pour leur vie quotidienne puisque cesont elles qui sont chargées de trouver l’eau nécessaireau foyer ainsi que le combustible pour cuisiner.C’est en tant que cueilleuses et utilisatrices de diversproduits de la forêt, parmi lesquels on trouvele chaume des toitures, que les femmes ont un rôlefondamental dans la gestion des ressources forestières.Les niveaux élevés de pauvreté et le manquede sources de subsistance alternatives, spécialementdans les régions rurales, aggravent la dégradationde l’environnement du fait de la dépendancedes pauvres aux ressources naturelles nécessairesà leur survie.La destruction des forêts est en train deconduire à l’érosion du sol, la perte de la biodiversitéet de la biomasse, la diminution des réserves d’eau,la réduction de la productivité agricole et la dégradationde l’environnement. Il y a aussi des effetsnégatifs généralisés portant atteinte à la sécuritéalimentaire, à la provision de sources d’énergie et aubien-être social. Les terres des communautés indigènesadministrées selon leurs coutumes sont progressivementdégradées et souffrent de plus en plusde la déforestation puisqu’elles sont soumises à laforte pression des utilisations alternatives des sols.L’utilisation du charbon de bois et du bois bûchen’est pas seulement nuisible à l’environnement maisaussi à la santé humaine 14 .Le pays ne peut pas se permettre de continuerà perdre sa forêt au rythme où il le fait actuellement,notamment en raison de l’importance de la captationde carbone qui contribue à atténuer le changementclimatique.Politiques et programmes clésEn 1991 le ministère de l’Environnement et des ressourcesnaturelles a été créé devenant ainsi la principaleinstitution responsable de la gestion environnementale.Plus tard, pour faire face aux défis de ce secteur,il a adopté la Stratégie nationale de conservation,la Politique nationale pour l’environnement (2007), lePlan national d’action pour l’environnement, le Plannational d’action de la Zambie pour la biodiversité, laPolitique forestière de 1998, le Plan d’action forestièrede la Zambie et la Loi forestière de 1999.14 Civil Society for Poverty Reduction (CSPR), The Path Awayfrom Poverty: An Easy Look at Zambia’s Poverty ReductionStrategy Paper 2002–2004, .Pour faire face à la destruction de la couched’ozone, le Gouvernement a promulgué la Loi n o27/2001 et le pays a signé et ratifié la Convention desNations Unies de lutte contre la désertification, afin depréparer ensuite un plan national d’action en 2002.Entre 2006 et 2010 la Zambie a aussi mis enplace son Cinquième plan national pour le développement(FNDP, pour son sigle en anglais), dont l’undes objectifs principaux était la promotion de la gestiondurable des forêts par le biais de la participationdu secteur privé et de la société civile dans la gestiondes ressources forestières. A cette époque-là, plusieursactivités en rapport avec les affaires forestièresont été lancées, mais lors d’une analyse finaleil a été difficile d’en constater les progrès en raisondu manque de données et d’informations. Le seulindicateur disponible — le taux de déforestation — amontré que les objectifs du FNDP à ce sujet n’ont pasété complètement atteints. En fait, il est évident quele rythme de la destruction des forêts s’est accéléré.De plus, les stimulations macroéconomiques pourrelancer la gestion durable des ressources naturelles etles actions de dissuasion visant à décourager les modèlesde consommation non durables sont inadaptés.Conclusions et recommandationsLe développement durable ne peu pas être maintenusi l’environnement se détériore, et on ne peutpas protéger l’environnement lorsque la croissanceéconomique ne tient pas compte du coût de la destructionenvironnementale. Les niveaux élevés depauvreté, l’accès limité aux droits fondamentaux telsque l’éducation et la santé, ainsi que la dégradationpersistante des forêts montrent que le développementdurable est en danger en Zambie en dépit de lagrande croissance économique.C’est pourquoi la Coalition nationale de <strong>Social</strong><strong>Watch</strong> en Zambie recommande ce qui suit :• Afin d’assurer une gestion durable des forêts,l’atténuation du changement climatique ou sonadaptation, la Zambie doit reconnaître l’importancede la possession et de la propriété de laterre, particulièrement en ce qui concerne lesterres occupées par les communautés indigènes,qui représentent presque deux tiers des forêts.• Le Gouvernement doit approuver au plus vite lenouveau texte de la politique forestière et l’amendementultérieur de la Loi forestière de 1999.• Lors de la révision des politiques, des lois, oudes programmes existants ou bien lors du développementde nouveaux programmes, de politiquesou de lois, il est nécessaire de renforcerles politiques transversales de genre afin de garantirque ni les hommes ni les femmes ne soienttouchés de façon négative et qu’ils puissent enbénéficier équitablement.• Il est nécessaire de renforcer la coordinationdans le secteur de l’environnement et que lesaffaires environnementales soient transversalesdans tous les secteurs.• Le Gouvernement et d’autres acteurs clés doiventlancer des campagnes massives d’éducationpublique sur l’environnement. n<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong> 191 Zambie

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