26 I RENCONTRE AVEC ISerge Durinfacteur d’instruments à vent“J’ai d’abord commencé ce métier en autodidacte. C’est<strong>la</strong> passion <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique qui m’a amené à réparer puis àfabriquer <strong>de</strong>s instruments à vent, en bois. Des cornemuses<strong>de</strong> préférence”. Sous sa longue barbe b<strong>la</strong>nche, et sesyeux bleus qui s’illuminent dès qu’il parle <strong>de</strong> musique, sapassion, Serge Durin est ce que l’on appelle un facteur d’instrumentsà vent. Derrière cette appel<strong>la</strong>tion, se cachent <strong>de</strong>s gens quifabriquent <strong>de</strong>s instruments <strong>de</strong> musique. Serge, lui, est un spécialiste<strong>de</strong>s cornemuses. “J’ai d’abord été musicien. Dans ma régiond’origine, l’Auvergne, <strong>la</strong> musique folklorique s’est développée, etavec elle, les instruments qui vont avec. La cornemuse du centre,qui comprend <strong>de</strong>ux bourdons, le premier accordé à une octave etle second à <strong>de</strong>ux octaves en <strong>de</strong>ssous du hautbois, a été l’instrumentavec lequel j’ai commencé à jouer. Ensuite, je les ai collectionnés,j’en ai trouvé en pièces détachées, et au final, j’ai décidé <strong>de</strong> lesréparer, puis <strong>de</strong> les créer moi-même. Je me suis installé à titre professionnelen 1984 dans l’Allier. J’ai ensuite suivi une formation <strong>de</strong>facture instrumentale et en 1992, j’ai ouvert un atelier <strong>de</strong> restaurationd’instruments à vents (bois et cuivres) à Clermont-Ferrand”.Si j’ai changé <strong>de</strong> boutique à plusieursreprises, c’est qu’à chaque fois, monapprenti m’a racheté mon atelier. Alorsje suis parti en monter un autre, formerun nouvel apprenti et ainsi <strong>de</strong> suite.C’est <strong>de</strong> cette façon que j’ai atterri àAg<strong>de</strong>, sur les conseils <strong>de</strong> Bruno Priez”(facteur d’accordéon installé sur le site<strong>de</strong>s Métiers d’Arts).L’activité <strong>de</strong> Serge Durin comporte troisaspects bien différents les uns <strong>de</strong>sautres : <strong>la</strong> restauration d’instruments, <strong>la</strong>création <strong>de</strong> cornemuses et les activitésautour <strong>de</strong>s objets sonores.Le p<strong>la</strong>isir <strong>de</strong> formerDepuis, Serge a voyagé dans toute <strong>la</strong> France. “A chaquefois que je montais un atelier, je prenais un apprentipour le former, et ainsi perpétuer <strong>la</strong> tradition <strong>de</strong>ce métier. Nous sommes seulement 15 facteurs<strong>de</strong> cornemuses en France, alors <strong>la</strong> formation esttrès importante. Je prends un réel p<strong>la</strong>isir àapprendre le métier à <strong>de</strong> jeunes passionnés. Enparallèle <strong>de</strong> mon activité, j’ai d’ailleurs créé uneécole <strong>de</strong> musique traditionnelle dans l’Allier et je suisformateur agréé pour <strong>la</strong> Société d’Encouragement auxMétiers d’Art.
I RENCONTRE AVEC I 27Refaire vivre un instrument“La restauration fait partie intégrante du métier <strong>de</strong> facteurd’instruments. Elle constitue le commerce <strong>de</strong> proximité”affirme Serge Durin. Ce <strong>de</strong>rnier est donc à même <strong>de</strong> réparertous les instruments à vents <strong>de</strong> type bois, soit : les flutes, leshautbois, les bassons, les c<strong>la</strong>rinettes et les saxophones. “Aucontraire, les cuivres sont <strong>de</strong>s instruments où l’on trouve <strong>de</strong>sembouchures”. La restauration permet <strong>de</strong> remettre à neufun instrument. Un aspect important car, comme le souligneSerge Durin, “les musiciens sont attachés à leur instrument.La plupart du temps, ils ont une histoire avec lui. La restaurationleur permet donc, à moindre coût, d’offrir unesecon<strong>de</strong> jeunesse à leur instrument. Mais restauration nesignifie pas forcément réparation. Parfois, mes interventionsse concentrent uniquement sur une harmonisation <strong>de</strong> <strong>la</strong>tessiture <strong>de</strong> l’instrument, afin <strong>de</strong> l’adapter au jeu du musicien”.La clientèle <strong>de</strong> Serge est variée, composée aussi bien d’amateurs,<strong>de</strong> professionnels, que <strong>de</strong> professeurs <strong>de</strong> musique, d’élèveset d’individus passionnés. Ici, à Ag<strong>de</strong>, il espère attirer ce mêmetype <strong>de</strong> personnes.“Tout au long <strong>de</strong> ma carrière, j’ai vu différents gens venirfaire réparer leurs instruments, que ce soit <strong>de</strong>s Roumainsitinérants ou <strong>de</strong>s fanfares pendant <strong>de</strong>s manifestations. J’aimême eu à faire à un moine tibétain, cloîtré en retraite,qui, par le biais <strong>de</strong> son apprenti, m’a amené son instrumentpour divers rég<strong>la</strong>ges”.Des creations uniquesLa spécialité <strong>de</strong> Serge Durin, c’est <strong>la</strong> cornemuse du Centre.Il en a d’ailleurs “fabriqué plus <strong>de</strong> 600. A ce niveau-là, maclientèle est à 50 % française. Pour le reste, les acheteursviennent <strong>de</strong> 16 pays différents. Dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s facteurs<strong>de</strong> cornemuses, il existe <strong>de</strong>s réseaux, souvent sur internet.Du coup, même quelqu’un habitant dans un pays lointainpeut me comman<strong>de</strong>r une cornemuse. Je ne fabrique quesur mesure et sur comman<strong>de</strong>, et je m’adapte à <strong>la</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>du client”. Serge ajoute toujours sa signature sur les instrumentsqu’il fabrique, et sur chaque hautbois qui compose <strong>la</strong>cornemuse, il travaille le bois pour y rajouter <strong>de</strong>s motifs, oufait <strong>de</strong>s gravures en étain, afin <strong>de</strong> rendre <strong>la</strong> pièce unique. Enplus <strong>de</strong> <strong>la</strong> cornemuse, Serge Durin fabrique égalementquelques flutes ir<strong>la</strong>ndaises, également appelées “whistle”.La recherchesur les objets sonoresL’autre passion qui anime Serge Durin, c’est <strong>la</strong>recherche autour <strong>de</strong>s objets sonores. “Cet aspect<strong>de</strong> mon métier et <strong>de</strong> ma personnalité comprend unfort attachement à <strong>la</strong> pédagogie. Les objets sonores,ce sont <strong>de</strong>s objets récupérés, <strong>de</strong> matières végétalesou mécaniques, qui, après travail, permettentd’émettre <strong>de</strong>s sons. Pour le côté pédagogique,je me rends dans les écoles primaires. Avec lesenfants, nous collectons <strong>de</strong>s objets qui les entourent,<strong>de</strong>s gobelets, <strong>de</strong>s feuilles, une branche, puisje mets en p<strong>la</strong>ce <strong>de</strong>s ateliers qui leur permettent<strong>de</strong> créer un jouet sonore qu’ils pourront ensuiteutiliser. J’aimerai vraiment développer cet aspectà Ag<strong>de</strong>”. Serge a d’ailleurs écrit un livre en 1996sur les jouets sonores.Installé <strong>de</strong>puis peu <strong>de</strong> temps à Ag<strong>de</strong>, Serge n’estpourtant pas en manque d’idées. “Premièrement,j’envisage <strong>de</strong> prendre un apprenti pour le formerà <strong>la</strong> facture d’instruments à vent en bois. Ensuite,dans le domaine <strong>de</strong>s objets sonores, j’aimeraiscréer une fanfare pour les enfants, qui, avec l’ai<strong>de</strong>d’un compositeur, joueraient <strong>de</strong>s mélodies à l’ai<strong>de</strong><strong>de</strong>s objets sonores qu’ils auraient eux même créés”.> Infos pratiques