12.07.2015 Views

JOURNAL OFFICIEL - Débats parlementaires de la 4e République

JOURNAL OFFICIEL - Débats parlementaires de la 4e République

JOURNAL OFFICIEL - Débats parlementaires de la 4e République

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

64 SEANCE DU 16 JANVIER 1958C'est également là, <strong>de</strong> votre part, monsieur le prési<strong>de</strong>nt duconseil, une singulière façon <strong>de</strong> nous éc<strong>la</strong>irer sur vos intentionsà l'égard du Parlement et sur votre volonté <strong>de</strong> réduire ànéant les quelques pouvoirs qui restent encore aux représentantsdu pays.Mais il n'est plus possible aujourd'hui <strong>de</strong> ruser avec <strong>la</strong>vérité : ou bien <strong>de</strong>s mesures seront prises pour répondre à l'attente<strong>de</strong>s anciens combattants et <strong>de</strong>s prisonniers <strong>de</strong> guerre,ou bien un vote interviendra en faveur du Gouvernement, etceux <strong>de</strong> nos collègues qui lui auront apporté leur appui aurontainsi fait <strong>la</strong> démonstration qu'ils <strong>de</strong>meurent sourds à <strong>la</strong> colèreet aux légitimes revendications <strong>de</strong>s victimes <strong>de</strong> <strong>la</strong> guerre.A travers le vote hostile que mes amis progressistes et moimêmenous émettrons tout à l'heure, ne retenez pas, monsieurle prési<strong>de</strong>nt du conseil, l'aspect politique qu'il est habituel <strong>de</strong>donner ici à <strong>la</strong> plupart <strong>de</strong> nos manifestations. Nous pensons,en effet, qu'il est simplement <strong>de</strong> votre <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> répondre <strong>de</strong><strong>la</strong> seule manière positive qui puisse se concevoir, mais <strong>de</strong>notre <strong>de</strong>voir le plus élémentaire <strong>de</strong> soutenir les droits légitimes<strong>de</strong>s anciens combattants et <strong>de</strong>s anciens prisonniers <strong>de</strong> guerre, ilest <strong>de</strong> notre <strong>de</strong>voir le plus sacré d'être contre le défi que vousportez à ces victimes <strong>de</strong> <strong>la</strong> guerre, dont <strong>la</strong> patience, <strong>de</strong>puislongtemps mise à l'épreuve, est à juste titre à bout et dontles Immenses sacrifices méritent, avec <strong>la</strong> solidarité <strong>de</strong> <strong>la</strong> nation,celle <strong>de</strong> tous ceux qui n'ont pas oublié. (App<strong>la</strong>udissements àl'extrême gauche.)M. le prési<strong>de</strong>nt. La parole est à M. Mutter.M. André Mutter. Mesdames, messieurs, je voudrais en quelquesmots expliquer <strong>la</strong> position <strong>de</strong> mes amis indépendantspaysans dans ce grave débat. Je regrette d'avoir seulementen'face <strong>de</strong> moi pour l'instant non pas M. le prési<strong>de</strong>nt du conseil,mais M. le ministre <strong>de</strong>s anciens combattants, qui sur ce pointn'a certainement pas personnellement <strong>la</strong> même opinion que lechef du Gouvernement. Mais heureusement il est assisté <strong>de</strong>M. le secrétaire d'Etat aux finances, ce qui me permettra <strong>de</strong>mettre en cause le ministre responsable.Quelle est exactement <strong>la</strong> situation du mon<strong>de</strong> ancien combattant-à l'heure où nous parlons ? Les anciens combattantsavaient déposé <strong>de</strong>vant vous, monsieur le ministre, <strong>de</strong>s revendicationspour compléter ce qu'on appelle ici le p<strong>la</strong>n quadriennalvoté par l'unanimité <strong>de</strong> cette Assemblée en décembre1953. Il s'agissait d'augmenter <strong>la</strong> pension <strong>de</strong>s veuves <strong>de</strong> guerrepour <strong>la</strong> porter à l'indice 500, <strong>la</strong> pension <strong>de</strong>s orphelins et celle<strong>de</strong> certains grands invali<strong>de</strong>s.Ces majorations, monsieur le ministre, ne pesaient pas d'ungros poids dans l'augmentation <strong>de</strong> ce budget. Le ministère <strong>de</strong>sfinances a refusé toute augmentation. Il est bon, mes cherscollègues, <strong>de</strong> dire ici, pour l'opinion publique et pour <strong>la</strong> presse,que <strong>de</strong>puis 1956 les anciens combattants et les victimes <strong>de</strong> <strong>la</strong>guerre n'ont bénéficié d'aucune mesure positive nouvelle ; lesgouvernements successifs ont opposé un veto à toute <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nouvelle. Voilà le premier point, qui est important.En second lieu, vous avez appliqué loyalement le rapportconstant puisque, en vertu <strong>de</strong> cette loi <strong>de</strong>" 1953, heureusementpour les anciens combattants et les victimes <strong>de</strong> guerre, ces pensionsne eont plus calculées for<strong>la</strong>itairement, mais sont calculéesen points, le ipoint représentant le millième du traitementd'un fonctionnaire <strong>de</strong> l'Etat, si bien que, lorsque vous augmentezle traitement <strong>de</strong>s fonctionnaires <strong>de</strong> l'Etat, vous êtesobligé d'augmenter automatiquement les pensions <strong>de</strong>s ancienscombattants.Ce n'est donc pas une satisfaction que vous avez accordéeaux anciens combattants, mais <strong>la</strong> stricte application <strong>de</strong> <strong>la</strong> loi.M. Henry Bergasse. Très bien !M. Camille Dé<strong>la</strong>bré. Aucun gouvernement ne l'a jamais faitavant 1957.M. André Mutter. Je vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pardon, mon cher ami.Ne prenez pas uniquement pour vous le bénéfice <strong>de</strong> <strong>la</strong> loi <strong>de</strong>.1953, que j'ai eu l'honneur <strong>de</strong> faire voter par l'Assembléeunanime et c'est moi qui le premier l'ai fait appliquer.(App<strong>la</strong>udissements à droite.)Dans cette affaire, je tiens à dire que l'Assemblée unanimea été <strong>de</strong>rrière tous les ministres <strong>de</strong>s anciens combattants, etil ne faut pas revendiquer pour tel ou tel parti l'avantage duvote <strong>de</strong> cette loi. Nous avons été unanimes, restons-le toute<strong>la</strong> journée, c'est important, d'autant plus, monsieur Dé<strong>la</strong>bré,que je dirai tout à l'heure mon complet accord avec les propoeitions<strong>de</strong> M. Darou; alors ne mettons pas <strong>de</strong> passion danscette affaire dont l'enjeu me paraît suffisamment important.C'est pour un certain nombre <strong>de</strong> mes collègues et pour l'opinionpublique que je voudrais situer le problème.Depuis 1954, les gouvernements ont légalement appliqué lerapport constant, et aujourd'hui, ce qui est grave, c'est quele Gouvernement non seulement refuse tout, mnis qu'il prendtrois mesures Tle distorsion: il retire ce qui a été donné.Je vous dirai brièvement mon opinion sur ces mesures. Laretraite du combattant esi une mesure déjà appliquée .et vousn'avez pas le droit <strong>de</strong> comparer <strong>la</strong> situation <strong>de</strong>s anciens combattantsavec certaines autres revendications, par exemplecelles <strong>de</strong>s fonctionnaires <strong>de</strong> l'Etat, qui sont peut-être justifiéesdans leur principe, mais qui sont encore à l'état <strong>de</strong> revendication,tandis que <strong>la</strong> retraite du combattant est en vigueur<strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s années. Par conséquent, vous retirez en 1958 auxanciens combattants le bénéfice <strong>de</strong> leur retraite.En second lieu, n'oubliez pas, messieurs les ministres, quele pécule <strong>de</strong>s prisonniers <strong>de</strong> guerre est matérialisé par un titreque nous leur avons remis, qui est comme un bon du Trésoret comporte trois cases correspondant à trois payements partiers. Les <strong>de</strong>ux premiers tiers ont été payés, et vous, vous déci<strong>de</strong>z<strong>de</strong> votre propre autorité qu'à partir du 1 er janvier 1958 letroisième tiers, le <strong>de</strong>rnier, ne sera pas payé. C'est là une<strong>de</strong>uxième mesure <strong>de</strong> rétorsion.La troisième mesure vise les « imp<strong>la</strong>çables » auxquels nousnous étions tous particulièrement intéressés, anciens combattantsmutilés à 80 p. 100 ne bénéficiant pas <strong>de</strong> l'in<strong>de</strong>mnitéaccordée aux grands invali<strong>de</strong>s, mais qui socialement ne peuventpas se rec<strong>la</strong>sser. Il s'agit, par exemple, <strong>de</strong>s blessés crâniens qui,sujets à <strong>de</strong>s crises, ne peuvent trouver sur p<strong>la</strong>ce un emploileur permettant <strong>de</strong> compléter leur pension.On a donc voté cette loi en leur faveur et essayé <strong>de</strong> l'appliquer.Mais, par un décret paru le 31 décembre <strong>de</strong>rnier, vouavenez <strong>de</strong> revenir sur l'application <strong>de</strong> cette loi et d'en restreindre<strong>la</strong> portée.En effet — je vous l'indique mes chers collègues — on vaiobliger ces anciens combattants blessés, âgés aujourd'hui <strong>de</strong>soixante à soixante-cinq ans, à subir une rééducation. Us<strong>de</strong>vront passer par <strong>de</strong>s centres <strong>de</strong> rééducation professionnelle.S'ils sont reconnus physiquement aptes à occuper une fonction,l'in<strong>de</strong>mnité <strong>de</strong>s imp<strong>la</strong>çables leur sera supprimée sans queleur soit pour autant assurée une rétribution complémentaire.Sur ce point, vous reprenez d'une autre façon ce qui a étéaccordé en matière d'in<strong>de</strong>mnité <strong>de</strong>s imp<strong>la</strong>çables.Telles sont les trois mesures <strong>de</strong> rétorsion prises par le Gouvernementet qui ont soulevé l'émotion <strong>de</strong>s anciens Combattants.Je veux, très rapi<strong>de</strong>ment, répondre à l'objection d'ordregénéral exposées par M. le prési<strong>de</strong>nt du conseil et rappeléestout à l'heure par notre collègue, M. Ferrand : vous n'avez plusle droit <strong>de</strong> revenir sur le voie <strong>de</strong> <strong>la</strong> loi <strong>de</strong> finances intervenuà <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> l'année.Mes chers collègues, mes amis du groupe <strong>de</strong>s indépendantset paysans d'action sociale, dans leur gran<strong>de</strong> majorité, ont votécette loi <strong>de</strong> finances. Ils l'ont fait pour permettre le fonctionnement<strong>de</strong> tous les services <strong>de</strong> l'Etat. Mais ils se sont incontestablementréservé le droit, à l'intérieur même <strong>de</strong> cette massebudgétaire énorme, d'apporter leurs suggestions sur tel ou telproblème. Si, au cours <strong>de</strong> chaque débat, le Gouvernementdéc<strong>la</strong>re poser <strong>la</strong> question <strong>de</strong> confiance et interdire toute discussion,nous n'avons plus <strong>de</strong> raison <strong>de</strong> siéger ici et vous n'avezqu'à nous renvoyer. (App<strong>la</strong>udissements à droite, sur plusieursbancs à l'extrême gauche et à l'extrême droite et sur quelquesbancs à gauche.)Notre mission est finie.Ce qui m'effraie aussi — et c'est votre <strong>de</strong>uxième argument —c'est votre intention, je crois, <strong>de</strong> créer aujourd'hui un précé<strong>de</strong>nt,<strong>de</strong> faire un test.Le chef du Gouvernement pourra dire : j'ai posé <strong>la</strong> question<strong>de</strong> confiance contre les anciens combattants et je <strong>la</strong> poserai<strong>de</strong>main contre tous. Par conséquent, je vais appliquer cettemesure rigoureuse d'abord aux anciens combattants,J'ai le droit <strong>de</strong> dire, messieurs les ministres, qu'il est grave<strong>de</strong> commencer l'application <strong>de</strong> votre test par les ancienscombattants et les victimes <strong>de</strong> <strong>la</strong> guerre.M. Henry Bergasse. Voilà!A l'extrême gauche. Il n'ira pas loin avec une telle métho<strong>de</strong>!M. André Mutter. Ce qui crée une profon<strong>de</strong> émotion parmiles anciens combattants et parmi mes amis indépendantspaysans, c'est que votre raisonnement est faux.Vous n'avez pas le droit — et j'en ai dit un mot tout àl'heure — <strong>de</strong> comparer <strong>la</strong> situation <strong>de</strong>s anciens combattants icelle d'autres catégories auxquelles vous serez peut-être obligé,d'opposer <strong>de</strong>main votre veto.Je le répète <strong>de</strong>vant vous et <strong>de</strong>vant l'opinion publique, car,ce<strong>la</strong> me paraît important.Les fonctionnaires vont peut-être dire : en vertu du statut d®<strong>la</strong> fonction publique, nous avions bénéficié <strong>de</strong> certaines promesses.Nous en <strong>de</strong>mandons l'application.Vous leur répondrez peut-être, <strong>de</strong>main: nous ne pouvonspas le faire maintenant.Mais <strong>la</strong> retraite du combattant, le pécule <strong>de</strong>s prisonniers déguerre sont une réalité, sont déjà en application. Par conséquent,vous retirez aux anciens combattants leur titre, alorsqu'il n'y a, en faveur <strong>de</strong>s fonctionnaires, que <strong>de</strong>s promesse*et <strong>de</strong>s possibilités.Vous n'avez pas le droit <strong>de</strong> comparer les <strong>de</strong>ux situations et<strong>4e</strong> (iirej Je commencé pax refuser aux anciens combattrait

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!