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JOURNAL OFFICIEL - Débats parlementaires de la 4e République

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106 ASSEMBLEE NATIONALE — 2* SEANCE DU 69 JANVIER 1968Aujourd'hui, M. Félix Gail<strong>la</strong>rd semble lui aussi <strong>la</strong>ncer undéfi à l'Assemblée nationale.M. le prési<strong>de</strong>nt du conseil. Yous <strong>de</strong>venez romantique! (Soutires..)M. Jacques Duclos. D'après ce que nous apprennent les journaux,il est autorisé à poser <strong>la</strong> question <strong>de</strong> confiance sur <strong>la</strong>réforme constitutionnelle en dépit <strong>de</strong>s protestations que ceprojet suscite et <strong>de</strong>s reserves qu'il inspire.Ce<strong>la</strong> signifie que le prési<strong>de</strong>nt du conseil est résolu à empêchertoute discussion <strong>de</strong> tous amen<strong>de</strong>ments. En définitive, son attitu<strong>de</strong>à l'égard <strong>de</strong> l'Assemblée nationale pourrait s'exprimerdans <strong>de</strong>ux comman<strong>de</strong>ments militaires très précis : « Silence dansles rangs », « A droite, alignement ». (Vifs app<strong>la</strong>udissements àl'extrême gauche. — Sourires syr divers bancs.)M. Jean Di<strong>de</strong>s. Vous êtes orfèvre !M. Raymond Montfon (Moselle). Vous vous y connaissez!A l'Est alignement!M. Jacques Duclos. C'est aussi à <strong>la</strong> dégradation <strong>de</strong>s institutionsdémocratiques que ten<strong>de</strong>nt les p<strong>la</strong>ns <strong>de</strong> réforme électoralevisant à instituer l'inégalité <strong>de</strong>s suffrages pour réduire arbitrairement<strong>la</strong> représentation communiste au profit <strong>de</strong> <strong>la</strong> réaction etrendre, par là même, difficile ou impossible l'élection d'unemajorité <strong>de</strong> gauche.Ce débat, mesdames, messieurs, nous donne un avant goût durôle inférieur auquel les députés seraient réduits si <strong>la</strong> perte<strong>de</strong> l'initiative <strong>de</strong>s dépenses, déjà réalisée du fait <strong>de</strong> l'adoption<strong>de</strong>s pouvoirs économiques et financiers, <strong>de</strong>venait permanenteet constitutionnelle.Le maintien <strong>de</strong> mesures réactionnaires <strong>de</strong> cet ordre ne pourraitque contribuer au développement <strong>de</strong> courants anti<strong>parlementaires</strong>et elles menaceraient dangereusement les libertés démocratiquesqu'il est du <strong>de</strong>voir du peuple <strong>de</strong> défendre contre leschercheurs d'aventures. (App<strong>la</strong>udissements à l'extrême gauche.)Les chefs <strong>de</strong> file du capitalisme redoutent avant tout ce quenous ne cessons <strong>de</strong> préconiser: le rassemblement <strong>de</strong>s forces <strong>de</strong>gauche, tant au Parlement que dans le pays, pour promouvoirune politique d'indépendance nationale, <strong>de</strong> paix et <strong>de</strong> désarmement,une politique tendant à <strong>la</strong> solution pacifique du problèmealgérien en faveur <strong>de</strong> <strong>la</strong>quelle notre parti a proposé <strong>la</strong>recherche d'un compromis aux autres partis <strong>de</strong> gauche, unepolitique <strong>de</strong> gauche conforme à <strong>la</strong> volonté du pays.A ce point <strong>de</strong> mon exposé, je veux dire qu'à notre sens lesrevendications <strong>de</strong>s anciens combattants et <strong>de</strong>s prisonniers <strong>de</strong>guerre doivent être satisfaites.Quant aux <strong>de</strong>mi-mesures qui ont été préconisées parM. Darou, nous allons voir dans quelques instants si elles ont4té avancées <strong>de</strong> connivence avec le Gouvernement...M. Marcel Darou. Pas du tout !M. Jacques Duclos. Nous allons voir, vous ai-je dit. Je nepréjuge pas.M. Marcel Darou. Je vous renseigne tout <strong>de</strong> suite sur ce pointpour éc<strong>la</strong>irer votre <strong>la</strong>nterne.M. Jacques Duclos. En tout état <strong>de</strong> cause, il faut craindre que<strong>de</strong> telles propositions n'aboutissent à créer certaines illusionset à mettre en avant certaines promesses qui pourront n'êtrepas suivies d'actes, ce qui ne manquerait pas <strong>de</strong> provoquer <strong>de</strong>nouvelles déceptions.C'est pourquoi nous disons que ce qui est dû aux ancienscombattants et aux prisonniers <strong>de</strong> guerre doit être payé dans<strong>de</strong>s conditions normales. (App<strong>la</strong>udissements à l'extrême gauche.)C'est dans le <strong>de</strong>ssein très net <strong>de</strong> défendre, d'une part, lesrevendications légitimes <strong>de</strong>s anciens combattants et <strong>de</strong>s prisonniers<strong>de</strong> guerre et d'exprimer, d'autre part, son oppositionà <strong>la</strong> politique du gouvernement Gail<strong>la</strong>rd que le groupe communistelui refusera sa confiance.M. le prési<strong>de</strong>nt du conseil. Merci.M. Jacques Duclos. Nous sommes convaincus qu'en agissantainsi nous servons les intérêts <strong>de</strong>s anciens combattants et <strong>de</strong>sTisonniers <strong>de</strong> guerre, les intérêts <strong>de</strong> <strong>la</strong> c<strong>la</strong>sse ouvrière et <strong>de</strong>Fensemble <strong>de</strong>s masses <strong>la</strong>borieuses, les intérêts <strong>de</strong> <strong>la</strong> démocratieet <strong>de</strong> <strong>la</strong> nation. (Vifs app<strong>la</strong>udissements à l'extrêmegauche.)M. le prési<strong>de</strong>nt. La parole est à M. Pierre Cot. (App<strong>la</strong>udissementsà l'extrême gauche.)M. Pierre Bot. Mesdames, messieurs, je n'avais pas l'intention<strong>de</strong> prendre <strong>la</strong> parole dans ce débat, mais je voudrais répondreà l'objection que m'a adressée tout à l'heure M. le prési<strong>de</strong>ntdu conseil avec, peut-être, un peu d'impru<strong>de</strong>nce.D'après lui, les progressistes n'auraient pas le droit <strong>de</strong> semêler <strong>de</strong> <strong>la</strong> défense <strong>de</strong>s anciens combattants parce qu'ils n'ontpas voté les impôts qui nous ont été <strong>de</strong>mandés.Si cette thèse était admise, mesdames, messieurs, lesmembres <strong>de</strong> l'opposition ne pourraient plus jamais prendre <strong>la</strong>parolesur <strong>de</strong>s problèmes ayant <strong>de</strong>s répercussions financières.Quant aux membres <strong>de</strong> <strong>la</strong> majorité, après avoir voté le budget,ils n'auraient plus que le droit <strong>de</strong> se taire et <strong>de</strong> s'incliner.C'est peut-êtie le résultat que recherche <strong>la</strong> jeune ambition<strong>de</strong> M. le prési<strong>de</strong>nt du conseil. Laissez-moi vous dire qu'il estpermis d'avoir une autre conception du régime parlementaire.(App<strong>la</strong>udissements à -l'extrême gauche et sur quelques bancs àgauche.)Nous estimons, quant à nous, que le rôle du Gouvernementest d'abord d'appliquer les décisions que nous avons prises,ces décisions <strong>de</strong>vant être exécutées sous le contrôle permanent<strong>de</strong> <strong>la</strong> représentation nationale et <strong>de</strong> tous les députés, qu'ilsappartiennent à <strong>la</strong> majorité ou à l'opposition.Les quelques paroles que vous avez prononcées ce matin,monsieur le prési<strong>de</strong>nt du conseil, nous donnent beaucoup àréfléchir sur vos projets <strong>de</strong> réforme constitutionnelle et sur lespensées ou les arrière-pensées que vous avez.M. le prési<strong>de</strong>nt du conseil. Voilà!M. Pierre Cot. A l'avenir, nous serons, non seulement sur cesbancs, mais également sur les bancs <strong>de</strong> <strong>la</strong> majorité, beaucoupplus pru<strong>de</strong>nts, car vous nous aurez vous-même avertis.Vous savez fort bien pourquoi nous n'avons pas voté lesimpôts que vous nous <strong>de</strong>mandiez. Ce n'est pas du tout parceque ces impôts vous auraient permis <strong>de</strong> payer les <strong>de</strong>ttes quevous avez, que nous avons tous envers les anciens combattants,c'est pour <strong>de</strong>s raisons <strong>de</strong> politique générale. Tout d'abord,nous les pensions inutiles. Ensuite, nous n'admettons pas <strong>la</strong>source principale <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ttes, parce que nous désapprouvonsvotre politique sur les affaires d'Algérie.Nous avons le droit d'avoir ces conceptions et <strong>de</strong> les exprimeret nous avons le <strong>de</strong>voir — je vais revenir à votre interruption— <strong>de</strong> prétendre que, lorsqu'il s'agit <strong>de</strong>s anciens combattants,ce n'est pas seulement par <strong>de</strong>s arguments <strong>de</strong> comptabilitéque vous <strong>de</strong>vez répondre.Je ne voudrais pas, monsieur le prési<strong>de</strong>nt du conseil, donnerà cette réponse un caractère trop vif. Je vous dirai simplementque si je raisonnais comme vous qui préten<strong>de</strong>z que, n'ayantpas voté les impôts, je n'ai pas le droit <strong>de</strong> prendre <strong>la</strong> paroleau sujet <strong>de</strong>s anciens combattants.M. le prési<strong>de</strong>nt du conseil. Ce n'est pas ce que j'ai dit.Permettez-moi <strong>de</strong> vous interrompre.M. Pierre Cot. Je préférerais poursuivre.M. le prési<strong>de</strong>nt du conseil. Je n'ai jamais dit ce<strong>la</strong>. Je constateque vous ne souhaitez pas que je vous interrompe.M. Pierre Cot. Vous m'interromprez à <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> ma phrase.Je me permets <strong>de</strong> vous rappeler, sous l'autorité <strong>de</strong> M. le prési<strong>de</strong>nt,que le règlement et <strong>la</strong> loi sont faits ici pour le prési<strong>de</strong>ntdu conseil comme pour tous les députés. (Vifs app<strong>la</strong>udissementsà l'extrême gauche.)Vous interromprez donc dans un instant, lorsque, en ayantreçu <strong>la</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, je pourrai vous permettre <strong>de</strong> le faire sanscouper mon raisonnement. (Mouvements divers.)M. François Bénard. Quelle prétention !M. Pierre Cot. Vous avez raison, c'est une prétention inadmissible<strong>de</strong> <strong>la</strong> part <strong>de</strong> M. le prési<strong>de</strong>nt du conseil <strong>de</strong> vouloir nepas permettre aux autres <strong>de</strong> respecter ici Je règlement.Vous avez prétendu ce matin, monsieur le prési<strong>de</strong>nt duconseil, que, n'ayant pas voté les impôts, nous ne pouvions pasvous opposer cet argument.Je voudrais vous dire — et c'est ensuite que je vous permettraibien volontiers <strong>de</strong> m'interrompre (Exc<strong>la</strong>mations aucentre et à droite) — que, si nous raisonnions comme vous,je vous répondrais pour ma part que, n'ayant pas fait l.iguerre, vous <strong>de</strong>vriez avoir à l'égard <strong>de</strong>s anciens combattantsplus <strong>de</strong> scrupules et plus <strong>de</strong> déférence que n'importe qui.(Vifs app<strong>la</strong>udissements à l'extrême gauche. — Exc<strong>la</strong>mations aucentre et à droite.)M. Fernand Bouxom. Les amis <strong>de</strong> M. Thorez app<strong>la</strong>udissent!(Exc<strong>la</strong>mations à l'extrême gauche.)M. Roger Roucaute. Ce n'est pas vous qui nous donnerez<strong>de</strong>s leçons.M. le prési<strong>de</strong>nt du conseil. Monsieur Pierre Cot, je vousremercie <strong>de</strong> me permettre <strong>de</strong> vous interrompre au momentque vous pouvez, en effet, choisir selon le règlement, pourvous dire que vous interprétez d'une curieuse manière lesquelques paroles que j'ai échangées avec vous tout à l'heure.Je n'ai jamais contesté, ni à vous-même ni à personne— d'ailleurs je n'en ai ni le droit, ni <strong>la</strong> possibilité, ni ledésir — Je droit <strong>de</strong> chaque parlementaire <strong>de</strong> faire valoir sonopinion. Et Je procès <strong>de</strong> tendance que vous voulez faire sur lesprojets constitutionnels — qui ne sont d'ailleurs pas les miensmais ceux du Gouvernement tout entier — s'applique bien malà <strong>la</strong> petite question actuellement en discussion entre nous.Je ne vous conteste pas plus qu'à quiconque le droit <strong>de</strong> fairevaloir votre opinion, mais vous ne pouvez pas non plus mecontester le droit d'exprimer <strong>la</strong> mienne et <strong>de</strong> vous dire no tara-

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