38/ LE MAG / MémoireIl était une fois... Lucie AubracBerthe, Thorez, Giono-Malraux et à présent Lucie Aubrac,autant de noms pour une seule école. Le 28 mai dernier,le groupe scolaire était inauguré sous la dénominationde la célèbre résistante. Cette journée de festivités apermis de rassembler autour de plusieurs générationsanciens professeurs et anciens élèves dans une écolechargée d’histoire.Partir avec les gosses et allervoir les moutons ». Les souvenirsse bousculent dansl’esprit de l’ancien directeur del’école. Alfred Guglielmi, dit “Freddy”,a vu en quelques années lequartier rural de Berthe se métamorphoseren Zone Urbaine Prioritaire(ZUP). Construite en 1946,l’école Berthe se situe alors aucœur de la campagne. Mais laconstruction de la ZUP, à partir de1960, voit les tours remplacer lesbastides. Le désir de créer une écoledans Berthe s’était fait ressentiravant la Seconde Guerre mondiale.Il est vrai que ce quartier abritaitde nombreux cheminots et cultivateursdont les enfants devaientparcourir plusieurs kilomètres àLes années 80 marquent un changement des méthodes pédagogiques. L’école, lieu de vie, s’ouvre <strong>sur</strong> l’extérieur
Mémoire / LE MAG /391976. <strong>La</strong> kermesse de fin d’année est l’occasion de rassembler le quartier autour de son écolepied jusqu’au centre-ville pourrallier l’école Martini. Cependant,le projet ne se réalisera qu’en 1946,en pleine période de reconstructionaprès les ravages de la guerre.Au départ composée de simplespréfabriqués, l’école sera construiteen dur en 1966. <strong>La</strong> création de laZUP dope les effectifs et rend nécessairela construction de nouvellesclasses. Les agrandissementsapportent également à l’école desbureaux, un préau, une cantine etun gymnase.<strong>La</strong> mixité <strong>sur</strong>vient en 1971Sous la mandature de PhilippeGiovannini, l’école est renomméeen 1973 groupe scolaire MauriceThorez, en mémoire du premiersecrétaire général du Parti CommunisteFrançais (1930-1964).En 1990, sous la municipalité deCharles Scaglia, elle devient l’écoleAndré Malraux, en référence aurésistant et ancien ministre de laculture (1959-1969). En 1995, avecMaurice Paul, l’école Malraux IIdevient l’école Jean Giono en hommageau célèbre écrivain provençal.Ce n’est qu’en 2010, lorsque ladécision de donner le nom de LucieAubrac est prise, que les deuxécoles sont fusionnées.A partir des années 80, un grandchangement va avoir lieu au seinde l’équipe pédagogique. Pour lapremière fois, les professeurs vontéchanger et faire part de leurs difficultés.« Il devenait très difficiled’enseigner avec 40 élèves par classeet une population très mélangée »,relève Alfred Guglielmi. Les maîtresvont alors adopter de nouvellesmanières de travailler.Les artistes Serge Plagnol, SolangeTriger ou encore Michel Breilouvrent l’école <strong>sur</strong> le monde. Unéchange naît entre élèves, professeurset intervenants. « Michel(Breil) a toujours été contre les coursmagistraux », rapporte Freddy. « <strong>La</strong>volonté de progresser, d’avoir uneautre approche du métier, de mieuxconnaître l’enfant » est née. Et avecelle de nombreuses nouveautéspédagogiques : de la reconstitutionde la grotte Cosquer aux sortiesà vélo en passant par la plantationd’arbres, tout est bon pourapprendre en s’amusant. Dès 1973,Joseph Seghi, ancien directeur del’association des parents d’élèves,parle « d’une grande kermesse réunissantplus de 3 000 personnes ».Les enfants proposent un spectacleavec danses et chants alors queles parents et professeurs animentdes stands de jeux. Des personnalitésdu monde de la musique sejoignent à cet événement : DanielDaumas, Miquèu Montanaro ouencore Gaston Beltrame. Les parentsd’élèves participent pourleur part à la construction de lapremière bibliothèque de l’école,et les relations avec les autres établissementsde la région se renforcent.Alfred Guglielmi rappellepar exemple « qu’on est passé dedeux à une quarantaine d’échangespar an » avec l’école de Sélestat(Bas-Rhin). Autre illustration decet élan, le journal de l’école : « Lesgosses sortaient des textes. On a décidéde les relier », raconte Freddy.Ainsi naît “Le Petit Malraux”. Dansun premier temps vendu aux parents,il devient gratuit et populariselongtemps les activités des élèves.Aujourd’hui, cette école a faitpeau neuve : entièrement réhabilitéependant l’été 2010, ce “laboratoire”,comme l’appelle Freddy,a été officiellement renommé LucieAubrac le 28 mai dernier. Unenouvelle page d’histoire s’écritaujourd’hui avec les petits Seynoisdu XXI e siècle...<strong>La</strong>ura PentagrossaUNE FEMME DE CONVICTION« Le verbe résister doit toujours se conjuguer au présent », connuepour son courage et son dynamisme, Lucie Aubrac, avec cettecitation, nous dévoilait sa vision du monde : la Résistance. Née en1912 à Paris sous le nom de Lucie Bernard, elle épousera RaymondSamuel en 1939 à la veille de la Seconde Guerre mondiale. Le coupleutilisera divers pseudonymes dont le plus connu reste Aubrac.Résistante à l’Occupation allemande et au régime de Vichy pendantla Seconde Guerre mondiale, elle avait intégré les Jeunessescommunistes dès ses 20 ans. Elle est décédée le 14 mars 2007. Sontransfert au Panthéon a rapidement été demandé par de nombreuxpolitiques de l’époque.