Intervention de Catherine Giraud, Psychologue à AgroParisTech

Le système de défense psychique privilégié des bons élèves contre les pulsionsc’est la sublimation, qui soutient le narcissisme par les bonnes notes,peut fixer le développement psychique sur la phase de latence, et « geler » untemps le processus d’adolescence :Par la sublimation, l’investissement sur un objet érotique est déplacé sur unobjet non sexuel, la création artistique et/ou les apprentissages, permettant ainsiune satisfaction d’ordre non sexuelle.De fait l’enfant de la période de latence, quand il va bien, est curieux, intéressépar tout ce qu’on lui propose, il a envie d’apprendre et de découvrir ;ce faisant, il nourrit son narcissisme des satisfactions tirées de ses réalisations, etde la reconnaissance qu’il retire auprès des adultes (parents et enseignants) de sacapacité à se conformer à leurs attentes, et matérialisées par les bonnes notes.Or, la construction d’un narcissisme tout entier basé sur la réussite scolaire a seslimites et ses effets pervers…Les apprentissages peuvent devenir le lieu quasi unique d’une séduction tournéevers les adultes, parents et enseignants, et de la satisfaction personnelle :ces enfants puis adolescents deviennent des experts dans le « métier d’élève »,méticuleux, conformes aux attentes de leurs maîtres, « sur – adaptés » auxexigences du système, sous peine de culpabilité, du sentiment insatiable de« n’en faire jamais assez…Mais à force de réussir, ils captent de moins en moins l’attention, puisque le faitqu’ils soient des « enfants sages et conformes » rassure les adultes :Parole d’élèves : « cela fait longtemps qu’on en me félicite pas, qu’on nem’encourage plus, et je ne suis donc jamais vraiment rassuré sur ma valeur »Et une fois passée la barrière des concours, lorsque les enjeux se déplacent surd’autres terrains,comme la créativité,l’initiative,le sens relationnelou l’affectivité (temps des rencontres, parmi lesquelles la rencontre amoureuse)On voit un retour brutal du pulsionnel, avec les « débordements » queconnaissent toutes les gdes écoles, notamment alcooliques…Ou bien à l’inverse un blocage du psychisme, car l’estime de soi devientincertaine, l’individu se sent « à côté », inadapté…9