"Les causes et les conséquences du naufrage du pétrolier L'Erika"

Normalisation, certification et contrôle effectif des navires decommerce de transport de marchandises dangereusesLe 12 décembre 1999, l’Erika, pétrolier battant pavillon maltais, affrété par la sociétéTotalFina, transportant trente mille tonnes de fioul lourd, s’est cassé en deux au largedes côtes sud ouest de la Bretagne, entraînant une marée noire portant gravementatteinte à l’intégrité du littoral atlantique français.Ce naufrage a suscité colère et émotion parmi nos concitoyens.Le Conseil économique et social a décidé de confier à quatre de ses sectionsl’examen des causes et des conséquences de ce naufrage, selon des anglesd’approche multiples.Ce naufrage présentera sans doute un seul mérite : celui d’avoir accéléré la prise deconscience qu’un certain nombre de dérives du transport maritime ne peuvent plusdurer.Le trafic maritime international a considérablement crû depuis 25 ans, en raison desnombreux atouts qu’il présente. Il en va ainsi notamment du transport deshydrocarbures. Parallèlement, l’âge de la flotte mondiale ne cesse de croître. Il estcouramment admis qu’un navire coulerait tous les deux jours : lorsqu’on sait quecertains produits transportés sont hautement dangereux, les risques de catastropheapparaissent ainsi multipliés.Certaines zones peuvent être, à bon droit, réputées dangereuses. En raison del’intensité du trafic (300 000 navires par an), la Manche qui s’apparente, de fait, à undétroit constitue une zone particulièrement critique.Le transport maritime est aujourd’hui régi par une réglementation internationalefoisonnante mais dont l’application est exclusivement à la charge des Etats –essentiellement, du reste, à celle de l’Etat dit du pavillon, qui peut la déléguer auxsociétés de classification. Il existe là une confusion de rôles qui, s’additionnant àl’opacité de la chaîne logistique poussée à la caricature dans le cas de l’Erika,favorise l’irresponsabilité et le laxisme.Des causes essentielles de dysfonctionnement tiennent aux évolutions de la périodeécoulée. De nombreux nouveaux Etats ont voulu créer une flotte marchande aux finsde s’assurer une source de revenus sans disposer des moyens et parfois sans lavolonté de faire respecter des règles saines et sûres de navigation. Dans le mêmetemps, les chargeurs les plus importants – en particulier, ceux du secteur pétrolierconfrontés aux exigences des pays producteurs – ont cherché à réduire leurs coûts ;la concurrence s’est exacerbée. Souvent, le taux de fret constitue la variable surlaquelle on agit de préférence à tout autre. Trop souvent le marché " spot " l’emportesur les contrats à terme. Ces tendances se sont développées aux dépens de lasécurité maritime.Tout cela a conduit à renforcer le rôle de l’Etat dit du port qui peut effectuer la sériedes contrôles dévolue aux autorités du pavillon, voire adopter une législationunilatérale : les Etats-Unis en fournissent un exemple à méditer.