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Organisation et contrôle de l'espace dans l'aire ... - Casa das Áfricas

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<strong>Organisation</strong> <strong>et</strong> contrôle <strong>de</strong> l’espace <strong>dans</strong> l’aire culturelle aja-fon(Sud-Togo <strong>et</strong> Bénin – XVII e -XIX e siècle)The organization and control of territory in the aja-foncultural zone (southern Togo and Benin, 17 th -19 th centuries)Dominique Juhé-BeaulatonRésumé | In<strong>de</strong>x | Plan | Texte | Bibliographie | Notes | Illustrations | Citation | AuteurRésumésFrançaisEnglishLes migrations <strong>de</strong>s populations, la fondation <strong>de</strong> nouveaux villages conduisent les hommes à appréhen<strong>de</strong>rleur environnement, leur nouveau territoire <strong>et</strong> leurs occupants en s’appuyant sur <strong>de</strong>s principes religieux àla base du fonctionnement <strong>de</strong>s sociétés <strong>de</strong> l’aire culturelle aja-fon, ou aja-tado. Les traditions orales, latoponymie, les sources écrites européennes montrent comment l’espace s’est structuré à partir <strong>de</strong> laperception <strong>de</strong> l’environnement. Le contrôle du milieu naturel par l’organisation sociale aboutit à saterritorialisation. Les migrants ou les conquérants (selon les contextes) déploient <strong>de</strong>s stratégies pourmaîtriser l’espace <strong>et</strong> les hommes qui l’occupent par le biais concomitant <strong>de</strong>s alliances matrimoniales <strong>et</strong> <strong>de</strong>sdéplacements <strong>de</strong> divinités. Dans le cadre <strong>de</strong>s royaumes <strong>de</strong> la côte <strong>de</strong>s Esclaves (Ouidah, Allada, Dahomey),un réseau d’implantations royales, toujours associées à <strong>de</strong>s divinités installées <strong>dans</strong> l’objectif <strong>de</strong> contrôlerles mouvements <strong>de</strong>s hommes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s biens, perm<strong>et</strong>tait d’assurer la domination politique sur l’ensemble duterritoire dominé.Haut <strong>de</strong> pageEntrées d'in<strong>de</strong>xIn<strong>de</strong>x <strong>de</strong> mots-clés :territoire, espace, environnement, religionKeyword in<strong>de</strong>x :territory, Togo, Benin, Dahomey, space, environment, religionIn<strong>de</strong>x géographique :Togo, Bénin, DahomeyHaut <strong>de</strong> pagePlanIntroduction<strong>Organisation</strong> <strong>de</strong> l’espace : matérialisation physique <strong>et</strong> contrôle spirituelReconnaissances <strong>et</strong> installations<strong>Organisation</strong> <strong>et</strong> structuration <strong>de</strong> l’espaceLes espaces dits « naturels » : bois, forêt, brousseLes espaces habitésLes espaces cultivésContrôle politique <strong>et</strong> religieux <strong>de</strong> l’espaceRépartition <strong>et</strong> délimitation <strong>de</strong>s terresContrôle <strong>de</strong>s sources


Postes <strong>de</strong> douane <strong>et</strong> fondations royalesAlliances politiques, matrimoniales <strong>et</strong> religieusesConclusionHaut <strong>de</strong> pageTexte intégralPDFSignaler ce documentIntroduction1L’organisation <strong>de</strong> l’espace <strong>dans</strong> l’aire culturelle aja-fon (également connue comme étantl’aire aja-tado) est liée à l’histoire <strong>de</strong> son peuplement. C<strong>et</strong>te région, localisée <strong>dans</strong> le Sud duBénin <strong>et</strong> du Togo actuels, est connue sous différentes appellations selon les sources ou latemporalité considérées : côte <strong>de</strong>s Esclaves <strong>dans</strong> les écrits européens à partir du XVI e siècle,aire culturelle aja-tado, définie par les historiens sur la base <strong>de</strong> caractéristiques culturellescommunes à c<strong>et</strong> ensemble <strong>de</strong> populations1 : elles sont originaires d’Oyo au Nigeria,disposent d’une intercompréhension linguistique <strong>et</strong> pratiquent le culte <strong>de</strong>s vodous. Cespopulations se sont progressivement installées au sud du Bénin <strong>et</strong> du Togo actuels à partirduXV e siècle, <strong>et</strong> leur histoire perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> r<strong>et</strong>racer les itinéraires <strong>de</strong> migrations <strong>et</strong> l’émergence<strong>de</strong> cités-royaumes : Kétou (Bénin), Tado <strong>et</strong> Notse (Togo). Des Yoruba s’installèrent sur leplateau d’Abomey <strong>et</strong> <strong>dans</strong> la vallée <strong>de</strong> l’Ouémé, peuplant le Sud-Est du Bénin, <strong>et</strong> ceux quiallaient <strong>de</strong>venir les Aja poursuivirent leur migration vers l’ouest, vers Tado. Une partied’entre eux s’installèrent entre la Volta <strong>et</strong> le Mono <strong>et</strong> s’organisèrent en communautésindépendantes, les Ewe. De Tado, <strong>de</strong>s migrants aja partirent également vers Allada (Bénin)où ils arrivèrent au début du XV e siècle <strong>et</strong> fondèrent le royaume d’Allada. Vers 1600, <strong>de</strong>squerelles <strong>de</strong> succession entraînèrent leur dispersion : au nord fut fondé le royaume Fond’Abomey <strong>et</strong> au sud le royaume Gun <strong>de</strong> Xogbonou (Porto Novo). En 1724 <strong>et</strong> 1727, le roid’Abomey conquit les royaumes d’Allada <strong>et</strong> Ouidah, provoquant le départ <strong>de</strong> nombreuxhabitants qui se réfugièrent <strong>dans</strong> la vallée du Mono. Enfin, les Gâ d’Accra (Ghana) arrivèrentà la fin du XVII e siècle sur le littoral togolais où ils établirent le royaume Guen <strong>de</strong> Glidji, aunord d’Aneho.1 Voir les travaux <strong>de</strong>N. GAYIBOR, 1985.2 Paul Claval, revenant sur la notion <strong>de</strong>s aires culturelles, précise que « [l’espace] doit être appr (...)3 Les géographes considèrent les ressources naturelles comme un facteur clé <strong>de</strong> la relation <strong>de</strong>s socié(...)4 S. DUFOIX, 2003, p. 43.2La définition <strong>de</strong> l’aire culturelle aja-fon implique la création d’un espace, culturel <strong>et</strong> social,dissocié du politique <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’économique, transcendant non seulement les frontières héritées<strong>de</strong> la colonisation mais aussi celles <strong>de</strong>s États précoloniaux qui les ont précédées2. C<strong>et</strong>tedéfinition est le fruit d’une construction intellectuelle récente qui repose sur <strong>de</strong>s donnéessociohistoriques <strong>et</strong> perm<strong>et</strong> d’établir <strong>de</strong>s « limites » spatiales à c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong>. Celle-cis’intéressera à l’organisation <strong>de</strong> l’espace en lien avec l’exploitation <strong>de</strong>s ressources naturelles,tant ces <strong>de</strong>ux notions, espace <strong>et</strong> environnement, paraissent liées à la structuration duterritoire3. Les déplacements <strong>de</strong>s individus s’inscrivent <strong>dans</strong> c<strong>et</strong> espace, qui est celui <strong>de</strong> ladiaspora <strong>de</strong>puis Oyo, combinant, selon Stéphane Dufoix, « le lieu <strong>de</strong> l’origine <strong>et</strong> l’espace <strong>de</strong>la dispersion en une géographie originale4 », géographie <strong>de</strong> lieux où s’exerce une mémoirecommune liant <strong>de</strong>s groupes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s personnes. C<strong>et</strong>te mémoire s’exprime particulièrement lors<strong>de</strong>s cérémonies religieuses qui ordonnent la vie sociale, comme les prémices <strong>de</strong>s récoltes, lesinitiations, les mariages, les naissances, les funérailles, <strong>et</strong> qui donnent lieu à <strong>de</strong>s rituelsparticuliers en <strong>de</strong>s lieux spécifiques souvent représentés par <strong>de</strong>s arbres, <strong>de</strong>s formationsvégétales ou <strong>de</strong>s particularités du milieu naturel.


3En application <strong>de</strong> ces principes, la structuration <strong>et</strong> l’organisation <strong>de</strong> l’espace <strong>dans</strong> l’aire ajatadoseront étudiées <strong>dans</strong> un premier temps en examinant la perception <strong>et</strong> la mise enexploitation <strong>de</strong> l’environnement <strong>de</strong>puis l’arrivée <strong>de</strong>s habitants. Ces premières considérationsgénérales sur l’aire étudiée perm<strong>et</strong>tront ensuite <strong>de</strong> comprendre le contrôle politique <strong>et</strong>religieux exercé sur le territoire, particulièrement le royaume du Dahomey. Si les marqueursvégétaux contribuent à la codification symbolique <strong>de</strong> l’espace, ils ne représentent cependantpas les seuls éléments structurants – même si une attention particulière leur est ici accordée–, les stratégies sociales sont tout aussi révélatrices <strong>de</strong> l’organisation <strong>et</strong> du contrôle <strong>de</strong> c<strong>et</strong>espace.Lieux <strong>et</strong> noms cités <strong>dans</strong> le texteAgrandir Original (png, 349k)Dominique Juhé-Beaulaton (2010)<strong>Organisation</strong> <strong>de</strong> l’espace : matérialisation physique <strong>et</strong>contrôle spirituelReconnaissances <strong>et</strong> installations4Les sources historiques, orales <strong>et</strong> écrites, perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> comprendre comment l’espace aété perçu <strong>et</strong> appréhendé par les migrants, le transformant en territoire5. Les traditions oralesrecueillies <strong>dans</strong> le Sud du Togo <strong>et</strong> du Bénin r<strong>et</strong>racent les mouvements migratoires <strong>de</strong>spopulations <strong>et</strong> les circonstances <strong>de</strong> fondation <strong>de</strong>s villages <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te région. Ces récits noustransm<strong>et</strong>tent les critères d’implantation <strong>dans</strong> un nouvel espace <strong>de</strong> vie, inconnu auparavant<strong>de</strong>s migrants, plus ou moins éloigné <strong>de</strong> leur région d’« origine », celle-ci pouvant varier entreles principaux lieux <strong>de</strong> dispersion, comme Tado ou Allada, <strong>et</strong> l’une <strong>de</strong>s étapes <strong>de</strong> migrationd’un segment <strong>de</strong> lignage jusqu’à son emplacement actuel. Ce nouvel espace ne signifiait pasobligatoirement un nouvel environnement naturel, <strong>et</strong> la connaissance du milieu qu’avaientles migrants a pu les ai<strong>de</strong>r à s’installer <strong>et</strong> dénommer les lieux. De nombreux récits m<strong>et</strong>tenten valeur le rôle joué par les chasseurs <strong>dans</strong> la reconnaissance du pays <strong>et</strong> <strong>de</strong> nouveauxterritoires avant le déplacement <strong>de</strong>s populations6. Chaque communauté familiale avait sonou ses chasseurs, <strong>de</strong>s hommes reconnus comme forts <strong>et</strong> puissants, dotés <strong>de</strong> pouvoirs


magico-religieux. Deux types <strong>de</strong> situation se distinguent <strong>de</strong>s traditions recueillies : un ou <strong>de</strong>schasseurs étaient envoyés en éclaireurs avant chaque déplacement <strong>de</strong> population afin <strong>de</strong>rechercher <strong>de</strong>s terres disponibles <strong>et</strong> fertiles pouvant perm<strong>et</strong>tre l’installation d’unecommunauté ; ou bien, au cours d’une chasse, un chasseur repérait <strong>de</strong>s terres fertiles <strong>et</strong>décidait <strong>de</strong> s’y installer. Pour estimer la fertilité <strong>de</strong> la terre, les chasseurs se fiaient àl’apparence <strong>de</strong> la végétation <strong>et</strong> utilisaient la divination <strong>et</strong> <strong>de</strong>s charmes pour confirmer leurchoix. La présence <strong>de</strong> certaines plantes, l’association d’un iroko <strong>et</strong> d’une termitière, larapidité <strong>de</strong> germination <strong>de</strong> certaines graines étaient interprétées comme <strong>de</strong>s signes <strong>de</strong>fertilité, confirmés ensuite par la divination. Une fois l’emplacement déterminé, le chasseurr<strong>et</strong>ournait auprès <strong>de</strong>s siens leur rendre compte. Ces critères biologiques, fertilité <strong>de</strong>s terres,présence d’eau, abondance <strong>de</strong> gibier <strong>et</strong>/ou <strong>de</strong> poisson, se r<strong>et</strong>rouvent <strong>dans</strong> un grand nombre<strong>de</strong> traditions orales <strong>et</strong> ils apparaissent complémentaires encore aujourd’hui.5 Les sources orales comprennent les récits <strong>de</strong> migrations <strong>et</strong> <strong>de</strong> fondations <strong>de</strong> nouveaux établissement (...)6 Ce qui n’est pas particulier à c<strong>et</strong>te aire culturelle.7 A. MONDJANNAGNI, 1977, p. 105 ; F.A. IROKO, 1996, p. 182.5Une fois l’emplacement du nouvel établissement arrêté, les divinités <strong>de</strong>vaient êtreconsultées car rien ne pouvait se faire sans leur accord. Le premier occupant d’un lieu nouaitun pacte avec la divinité <strong>de</strong> la terre, Sakpata, après l’avoir consultée par la divination. Sur leplateau d’Allada, l’usage voulait que ce pacte soit matérialisé par la mise en terre d’unmorceau <strong>de</strong> termitière contenant ou non la reine <strong>de</strong>s termites. Si, au bout <strong>de</strong> quelque temps,la termitière se reconstituait, cela signifiait que le pacte n’était pas accepté par la divinité <strong>de</strong>la terre, les migrants repartaient alors à la recherche <strong>de</strong> nouvelles terres7. Ce pacte pouvaitaussi être matérialisé par la plantation d’une bouture d’arbre. Si celui-ci prenait racine,c’était un gage <strong>de</strong> réussite <strong>et</strong> <strong>de</strong> prospérité pour la nouvelle communauté. Le lieu <strong>de</strong> ce pacte<strong>de</strong>venait ensuite un lieu <strong>de</strong> culte rappelant aux habitants les circonstances <strong>de</strong> la fondation.Ces pactes entre la terre, les ancêtres, les entités surnaturelles, les « déjà là » <strong>et</strong> les« nouveaux venus » garantissaient l’harmonie <strong>de</strong>s relations <strong>de</strong>s hommes à leurenvironnement : les récoltes, les bonnes conditions météorologiques, la santé dépendaient<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te harmonie conditionnée par le renouvellement régulier <strong>de</strong> ces pactes chaque année.Si l’accord <strong>de</strong>s divinités telluriques était obtenu, alors les nouveaux occupants installaientleurs propres vodous. En eff<strong>et</strong>, les hommes emportaient au cours <strong>de</strong> leurs déplacements lareprésentation <strong>de</strong> leurs divinités <strong>et</strong> <strong>de</strong> leurs ancêtres, <strong>et</strong> toute fondation était suivie <strong>de</strong> leurinstallation qui représentait un acte symbolique <strong>et</strong> rituel, ancré <strong>dans</strong> le sol <strong>et</strong> <strong>dans</strong> l’espacepar la création <strong>de</strong> nouveaux lieux <strong>de</strong> culte. C’est ainsi que les Guen venus d’Accra se sontinstallés à Glidji où ils ont placé leurs vodous <strong>dans</strong> un îlot forestier qui est <strong>de</strong>venu sacré. LesEwé ont fait <strong>de</strong> même à leur arrivée à Togoville. Les vodous présidaient à l’installation <strong>de</strong>shommes <strong>et</strong> étaient les garants <strong>de</strong> l’avenir <strong>de</strong> la nouvelle communauté.<strong>Organisation</strong> <strong>et</strong> structuration <strong>de</strong> l’espace6C<strong>et</strong> espace semble s’être structuré selon la nature <strong>de</strong>s activités humaines qui y ont étépratiquées. Celles-ci ont fait naître <strong>de</strong>s « limites », souvent immatérielles, invisibles,fluctuantes, qui perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> juxtaposer différentes catégories d’espaces, catégories quicependant ne sont pas étanches. En eff<strong>et</strong>, l’espace, selon les activités économiques maisaussi les pratiques religieuses, peut être divisé en plusieurs zones où l’intervention <strong>de</strong>shommes est plus ou moins effective. La tentation est gran<strong>de</strong> <strong>de</strong> classer l’espace selon lesactivités <strong>et</strong> le type d’exploitation, perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> distinguer l’espace parcouru <strong>de</strong> la brousse,territoire <strong>de</strong>s chasseurs, les espaces exclus <strong>de</strong>s activités ordinaires <strong>de</strong>s hommes représentéspar les sites sacrés (lieux <strong>de</strong> culte, cim<strong>et</strong>ières <strong>de</strong>s mauvaises morts…), l’espace exploité parl’agriculture <strong>et</strong> l’élevage, <strong>et</strong> enfin les espaces habités. C<strong>et</strong>te classification se révèlecependant arbitraire, tant les limites entre ces différentes catégories sont ténues, fluctuantes<strong>dans</strong> le temps <strong>et</strong> mouvantes aussi <strong>dans</strong> l’espace, un champ cultivé r<strong>et</strong>ournant à la nature, unlieu cultivé <strong>de</strong>venant un lieu redouté, une habitation, un lieu d’inhumation, un villageabandonné, une forêt… Gardons à l’esprit que ces catégories spatiales sont le résultat d’unedouble construction : celle <strong>de</strong> ceux qui fréquentent ces espaces <strong>et</strong> celle <strong>de</strong> ceux qui lesétudient8.


8 P. CLAVAL, 2001, p. 35.9 D’après les photographies aériennes consultées, ceci est particulièrement frappant <strong>dans</strong> la région(...)7Quel que soit le type <strong>de</strong> milieu naturel, entre la forêt <strong>et</strong> la savane, l’organisation <strong>de</strong> l’espaceprésentait une certaine homogénéité, même si, a priori les zones habitées <strong>et</strong> exploitées n’yétaient pas perçues <strong>de</strong> la même façon. L’espace s’était organisé en auréoles concentriquesautour du village : celui-ci apparaissait comme un îlot <strong>de</strong> verdure, dissimulé au cœur d’unevégétation arborée, cerné par <strong>de</strong>s champs cultivés, eux-mêmes entourés par la « brousse »ou la « forêt ». En savane, les paysages ouverts montraient avec plus d’évi<strong>de</strong>nce laluxuriante verdure <strong>de</strong>s établissements humains. Les photographies aériennes révèlent encoreles ceintures <strong>de</strong> végétation entourant les villages, qui se distinguent ainsi plus n<strong>et</strong>tement dupaysage environnant9.Les espaces dits « naturels » : bois, forêt, brousse8Au XIX e siècle, les voyageurs ont observé qu’entre les villages, auréolés <strong>de</strong> champs cultivés,se rencontraient <strong>de</strong>s zones « désertes », inhabitées, en apparence inexploitées10. Lelieutenant <strong>de</strong> vaisseau Guillevin note que « autour <strong>de</strong>s villages, la culture s’étendait à uneassez gran<strong>de</strong> distance ; il semble que les Dahoméens se sont réunis par groupes, car entreces points vous ne voyez ni une habitation, ni une terre cultivée11... ». C’est l’espace <strong>de</strong> labrousse ou la forêt, domaine <strong>de</strong>s génies <strong>et</strong> <strong>de</strong>s chasseurs12. Au sens commun, « brousse »est un espace peu anthropisé en regard <strong>de</strong>s villages <strong>et</strong> <strong>de</strong>s champs, ce qui semblecorrespondre à la perception qu’en ont aujourd’hui les habitants13. C<strong>et</strong>te brousse peutcomprendre <strong>de</strong>s espaces caractérisés par la présence <strong>de</strong> graminées, zones qui ne sont pascultivées mais qui sont cependant exploitées. Chez les Ewé du Sud-Togo, il a souvent étéquestion <strong>de</strong> zogbe qui peut se traduire littéralement par « feu.herbe », terres recouvertesd’herbes, parcourues par les feux <strong>de</strong> brousse, lieu où les habitants vont couper <strong>de</strong>s herbes(généralementAndropogon sp.) pour couvrir leurs maisons14. Dans l’aire fon, les locuteursmentionnent fankan, où « les herbes recouvrent le sol que l’on ne voit pas ».10 Abbé Ph. E. COURDIOUX, 1878, p. 609.11 M. GUILLEVIN, 1862, p. 281.12 Il n’est pas toujours aisé d’interpréter les termes vernaculaires. Les récits <strong>de</strong> migrations font s (...)13 G. MÉTAILIÉ, A. DALAGE, 2005.14 Le zogbe peut également désigner un lieu où sont enterrés les êtres humains décédés <strong>de</strong> façon « ano (...)15 Les informations orales obtenues sur la chasse situent aujourd’hui les activités <strong>de</strong>s chasseurs ess (...)16 C’est ainsi que ces espaces sont perçus à la fois par les observateurs étrangers (R. NORRIS, 1790, (...)17 R.F. BURTON, 1864, p. 329 ; A.B. ELLIS, 1894, p. 79.18 Aujourd’hui son rôle paraît marginal <strong>et</strong> le vodou fa semble accaparer ses fonctions. Ceci est peut- (...)9Pour les habitants, que ce soit la forêt, la brousse ou la savane, il s’agissait avant toutd’espaces inoccupés, essentiellement parcourus par les chasseurs dont les activitéss’étendaient à toute région inhabitée où le gibier se trouvait en abondance15. Eux seulspouvaient affronter les dangers <strong>de</strong> ces régions non fréquentées, lieux <strong>de</strong> refuge <strong>de</strong>s animauxsauvages <strong>et</strong> rési<strong>de</strong>nce d’un génie appelé Aziza16. Celui-ci est présenté comme un être <strong>de</strong>


p<strong>et</strong>ite taille, unijambiste. C’est le vodou <strong>de</strong> la forêt (ou <strong>de</strong> la brousse) qui donne laconnaissance <strong>de</strong>s plantes <strong>et</strong> <strong>de</strong> leurs usages. Certains auteurs du XIX e siècle ont écrit qu’ilapprenait la magie <strong>et</strong> la mé<strong>de</strong>cine aux hommes, <strong>et</strong> représentait à ce titre le « dieu <strong>de</strong> lamé<strong>de</strong>cine17 ». Encore aujourd’hui, il est connu <strong>et</strong> craint <strong>dans</strong> toute la zone aja-fon18.19 Yveline Déverin mentionne également chez les Mossi du Burkina Faso la complémentarité <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux (...)10Ces espaces « naturels », s’ils n’ont pas subi d’exploitation intensive, ont néanmoins faitl’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> cueill<strong>et</strong>tes <strong>et</strong> <strong>de</strong> transferts <strong>de</strong> plantes, sous le contrôle spirituel <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te entitésurnaturelle, Aziza. Certaines plantes cultivées comme l’igname ont probablement étédomestiquées <strong>dans</strong> ces zones. Ces espaces ont également été soumis à une formed’appropriation par les chasseurs en fonction <strong>de</strong> leur territoire <strong>de</strong> chasse. Il est donc difficile<strong>de</strong> les qualifier à proprement parler <strong>de</strong> « sauvages » <strong>et</strong> <strong>de</strong> « naturels », si ce n’est paropposition aux espaces directement exploités par l’agriculture. L’opposition entre espace <strong>de</strong>la brousse <strong>et</strong> espace humanisé ne peut être r<strong>et</strong>enue. La complémentarité <strong>de</strong> ces espaces nemontre pas toute la complexité <strong>de</strong> leurs relations ainsi que les transitions possibles d’unespace à l’autre19.Les espaces habités11Les auteurs anciens ont observé que les villages (to) étaient souvent dissimulés par uneceinture végétale qui se caractérisait soit par son aspect défensif, soit par sa luxuriance <strong>et</strong> laprésence d’arbres utiles ou matérialisant <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> culte, les bois sacrés.20 D. JUHÉ-BEAULATON, 2010, p. 27.21 A. VALLON, 1861, p. 353.12Ces bois sacrés (vodou zun en fon, littéralement « forêt vodou ») occupaient la plupart dutemps une surface restreinte <strong>et</strong> étaient situés à proximité <strong>de</strong>s villes ou <strong>de</strong>s villages. C<strong>et</strong>telocalisation particulière <strong>de</strong> ces bois au voisinage <strong>de</strong>s lieux habités a été remarquée par lespremiers voyageurs qui les ont décrits au XVII e siècle20, <strong>de</strong> même que la hiérarchie <strong>de</strong> ceslieux <strong>de</strong> culte, dont certains avaient une aire d’influence plus gran<strong>de</strong> que le village <strong>et</strong> où ser<strong>et</strong>rouvaient les a<strong>de</strong>ptes lors <strong>de</strong> certaines cérémonies. Une géographie religieuse se <strong>de</strong>ssineainsi avec <strong>de</strong>s relations <strong>et</strong> <strong>de</strong>s filiations entre les sites selon les divinités qui y résidaient. Lesvillages se signalaient donc aux voyageurs par ces bois sacrés, comme le note le lieutenant<strong>de</strong> vaisseau Vallon : « Les villages sont reconnus <strong>de</strong> loin par <strong>de</strong>s groupes d’arbres nonabattus fétichisés21. » Sur le plateau d’Abomey, un grand nombre <strong>de</strong> noms <strong>de</strong> villagescomprennent le suffixe zun, désignant les bois sacrés situés au voisinage <strong>de</strong>s localités, ce quia été parfaitement observé par un administrateur colonial, Le Hérissé, au débutdu XX e siècle :22 A. LE HÉRISSÉ, 1911, p. 104.Les tôvodoun sont nombreux ; chaque région du cercle d’Abomey, <strong>et</strong> souvent chaque village d’unemême région, a le sien : Nakisè à Cana ; Tindji, Adjokan, Avokanzoun, Gnidjazoun, Pozoun,Sozoun, tous <strong>dans</strong> la région <strong>de</strong> Tindji, <strong>et</strong>c., sont autant <strong>de</strong> villages qui portent les noms d<strong>et</strong>ôvodoun. Ceux-ci sont situés au milieu d’un bois(zoun) que forment <strong>de</strong>s sensitivesou <strong>de</strong>s hautesfutaies ; c’est pourquoi on les désigne communément sous le vocable <strong>de</strong> « fétiches <strong>dans</strong> lesarbres » (atinmê-vodoun)22.13Le Hérissédéfinit les tôvodoun comme <strong>de</strong>s « vodoun <strong>de</strong>s pays (tô) », toétant un terme fonqui désigne à la fois le village comme espace habité <strong>et</strong> le territoire <strong>de</strong> ce village. Il peutégalement désigner un ensemble plus large traduit par pays. Le tovodou, divinité tutélaire <strong>de</strong>chaque village, était souvent situé <strong>dans</strong> un bois sacré à côté du village auquel il donne sonnom. Il était lié aux circonstances <strong>de</strong> la fondation ou simplement installé par les premiersoccupants.


23 Le territoire <strong>de</strong>s morts est lié à celui <strong>de</strong>s vivants, il est même en continuité lorsque les personn(...)24 Seuls les bois dédiés à Oro, sièges <strong>de</strong> confréries masculines secrètes, sont interdits d’accès aux (...)14Ces bois sacrés sont encore trop souvent considérés comme <strong>de</strong>s lieux naturels, protégés<strong>et</strong> conservés à <strong>de</strong>s fins religieuses <strong>et</strong> donc préservés <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong>s hommes. En réalité, leuranthropisation est importante, comme l’attestent les aménagements intérieurs dont ils ontfait l’obj<strong>et</strong> <strong>et</strong> la présence d’un grand nombre d’espèces introduites <strong>dans</strong> ces formationsvégétales. Des clairières ont été aménagées pour les cérémonies, <strong>de</strong>s bâtiments construitspour accueillir les a<strong>de</strong>ptes, <strong>de</strong>s sentiers <strong>de</strong>ssinés pour faciliter les accès, <strong>et</strong> la périphérie <strong>de</strong>ces bois a souvent été délimitée par un sentier pare-feu redéfini en principe chaque année.C’étaient donc <strong>de</strong>s espaces également habités, contrôlés, réservés aux a<strong>de</strong>ptes <strong>et</strong> initiés <strong>de</strong>sdivinités abritées en ces lieux, où seuls les vodounon pouvaient aller chercher les plantesliturgiques <strong>et</strong> médicinales dont ils avaient besoin. Certains bois abritaient <strong>de</strong>s cim<strong>et</strong>ières : <strong>de</strong>hauts dignitaires pouvaient s’y faire inhumer, ou bien <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s morts <strong>de</strong> la variole (quiest une manifestation du vodou <strong>de</strong> la terre, Sakpata), ou encore <strong>de</strong>s enfants drépanocytairesmorts en bas âge (les abikou)23. Ces sanctuaires boisés apparaissent comme <strong>de</strong>s espacesréservés à la communication avec le mon<strong>de</strong> surnaturel <strong>de</strong>s divinités <strong>et</strong> <strong>de</strong>s ancêtres, <strong>de</strong>slieux « hors du commun », mis à l’écart <strong>de</strong> l’exploitation ordinaire ; ils étaient régis par <strong>de</strong>sinterdits rituels sous le contrôle <strong>de</strong> certains membres <strong>de</strong> la communauté, hommes <strong>et</strong>femmes, seuls habilités à les fréquenter24. Ils s’inscrivaient totalement <strong>dans</strong> l’espace social,étroitement associés aux villages.25 Les bois sacrés eux-mêmes ont pu servir <strong>de</strong> zone <strong>de</strong> refuge <strong>et</strong> <strong>de</strong> défense, sous la protection <strong>de</strong> la(...)26 M. GUILLEVIN, 1862, p. 261.27 A.L. D'ALBÉCA, 1895, p. 169.28 H. HUBERT, 1908, p. 549.15À côté <strong>de</strong>s bois sacrés, certains textes anciens m<strong>et</strong>tent en valeur le rôle défensif <strong>de</strong> lavégétation périvillageoise25. Des défenses ou fortifications végétales formaient une véritableceinture protectrice autour <strong>de</strong>s zones habitées. C<strong>et</strong>te ceinture semble avoir disparuaujourd’hui, car elle ne s’observe <strong>dans</strong> aucun <strong>de</strong>s villages visités. Le lieutenant <strong>de</strong> vaisseauGuillevin signale qu’une épaisse végétation dissimulait les villages26. Alexandre L. d’Albécamentionne même la présence <strong>de</strong> « fortification naturelle » assurée par la <strong>de</strong>nsité <strong>de</strong> lavégétation qui avait l’apparence d’un « taillis27 ». Les chemins étroits aboutissaient à <strong>de</strong>sportes faites <strong>de</strong> troncs d’arbres. Lorsque c’était possible, les habitants auraient accru lesmoyens <strong>de</strong> défense soit en plantant <strong>de</strong>s buissons épineux, soit en préservant les abordsimmédiats <strong>de</strong> leur village <strong>de</strong>s incendies <strong>de</strong> brousse, perm<strong>et</strong>tant ainsi à une végétation très<strong>de</strong>nse <strong>de</strong> se développer28.29 F.E. FORBES, 1851, vol. 1, p. 68.30 R.F. BURTON, 1864, p. 172. Bush en anglais.31 J. LAFFITE, 1876, p. 41.32 P. BARRET, 1888, vol. 1, p. 155 ; H. ZÖLLER, 1884, p. 59.16Dans un contexte d’insécurité liée aux guerres <strong>de</strong> domination <strong>et</strong> aux razzias, les autoritéspolitiques – les togan, littéralement « village-grand », ou les rois, axolu – ont renforcé laprotection <strong>de</strong>s villages <strong>et</strong> <strong>de</strong>s villes. Les fortifications <strong>de</strong> la ville d’Abomey, capitale duDahomey, sont bien connues, notamment en ce qui concerne l’édification du rempart doubléd’un fossé. Mais elles étaient <strong>de</strong> plus renforcées d’une barrière végétale. En eff<strong>et</strong>, Fre<strong>de</strong>rickE. Forbes29 précise que le fossé était occupé par <strong>de</strong>s « acacias épineux », végétation que


Richard F. Burton30 dénomme « brousse d’acacia » <strong>et</strong> dont il donne le nom endahoméen, zun. La plantation d’espèces épineuses n’est certainement pas à exclure. Elle estmême certaine <strong>dans</strong> le cas <strong>de</strong>s fortifications d’Agoué décrites par Laffite, car les « cactus »dont il est question sont en réalité <strong>de</strong>s opuntia, plante d’origine américaine31. Paul Barr<strong>et</strong>précise que « les cases sont ceintes <strong>de</strong> cactus épineux », ce que Hugo Zöller observeégalement pour les champs d’un village situé à proximité d’Aného32. Ces haies serventaujourd’hui à limiter la divagation du bétail. Elles avaient certainement autrefois une doublefonction protectrice, contre les étrangers <strong>et</strong> contre les animaux, bétail <strong>et</strong> faune sauvage. Siles grands fauves <strong>et</strong> les éléphants ont aujourd’hui disparu <strong>dans</strong> c<strong>et</strong>te région, ilsreprésentaient encore au XVIII e siècle une menace pour les hommes.33 J. BERN, 1893, p. 106 ; H. ZÖLLER, 1884, p. 44.34 Nombre <strong>de</strong> toponymes se sont inspirés du nom du baobab. Sa présence en grand nombre sur un site éta (...)35 H. HUBERT, 1908, p. 130.36 CHAUDOIN, 1891, p. 43.37 C t TOUTÉE, 1895, p. 76-77.17Les villages apparaissaient au voyageur comme perdus au sein d’une végétation luxuriantequi se composait aussi très souvent d’espèces utiles : palmiers, cocotiers <strong>et</strong> bananiersentouraient les villages ou se trouvaient à proximité33. Certaines espèces végétales, commele baobab ou le fromager ou encore le palmier à huile, semblaient dominer à proximité <strong>de</strong>svillages34. Le géographe Henry Hubert l’explique par la protection dont les abords <strong>de</strong> villagesont l’obj<strong>et</strong>, particulièrement contre les feux <strong>de</strong> brousse35. Edmond Chaudoin observe avantd’arriver à Ouidah « une ravissante p<strong>et</strong>ite forêt <strong>de</strong> ces palmiers, très touffue ; [...] c’estJombodji. C’est un village <strong>dans</strong> une forêt <strong>de</strong> palmiers36 ». Le commandant Toutee expliqueque les villages se distinguaient au milieu <strong>de</strong>s champs « par les frondaisons <strong>de</strong>s vergers ou<strong>de</strong>s arbres d’agrément conservés ou plantés pour l’ombrage37 ». Ces arbres <strong>de</strong> village sontcomposés <strong>de</strong> fruitiers, citronniers, papayers, manguiers, cocotiers, bananiers <strong>et</strong> baobabs.38 Les espaces cultivés à proximité <strong>de</strong>s habitations étaient le lieu privilégié <strong>de</strong>s essais agricoles, (...)39 F.E. FORBES, 1851, vol. 1, p. 70 ; A. BOUËT, 1851, p. 93.40 A.L. D'ALBÉCA, 1895, p. 153 ; H. ZÖLLER, 1885, p. 25.18À l’époque précoloniale, l’espace habité <strong>de</strong>s villes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s villages paraissait relativementdispersé, <strong>et</strong> les espaces libres étaient occupés par <strong>de</strong>s arbres fruitiers, <strong>de</strong>s arbres d’ombrage,<strong>de</strong>s cultures, remplissant le tissu urbain38. Forbes, décrivant la ville d’Abomey, précise qu’àl’intérieur même <strong>de</strong> la cité se trouvaient <strong>de</strong>s terres cultivées, <strong>et</strong> Auguste Bouët mentionne<strong>de</strong>s jardins39. Toutes les maisons étaient entourées d’un mur <strong>de</strong> terre qui renfermait <strong>de</strong>sarbres forestiers <strong>et</strong> fruitiers. La composition floristique <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te végétation arborée, d’aprèsles auteurs anciens, accordait une place prépondérante aux espèces fruitières <strong>et</strong> auxpalmiers, cocotier ou palmier à huile. Dans la zone littorale (Grand Popo <strong>et</strong> côte togolaise),certains auteurs établissent une relation directe entre la fondation <strong>de</strong> nouveauxétablissements <strong>et</strong> la plantation <strong>de</strong> cocotiers40. Si les enclos <strong>de</strong>s maisons comprenaient <strong>de</strong>sarbres <strong>et</strong> arbustes, il en était <strong>de</strong> même <strong>de</strong>s espaces entre les concessions familiales, <strong>et</strong> lesjardins-vergers ne semblaient pas clairement définis <strong>dans</strong> l’espace par <strong>de</strong>s haies ou <strong>de</strong>sclôtures. De nos jours, les villages <strong>et</strong> certaines villes comportent encore une végétationarborée relativement <strong>de</strong>nse, où les arbres fruitiers occupent toujours une place importante.Ces « vergers » ou « jardins » signalent donc encore aux observateurs étrangers l’existenced’une zone habitée.41 H. ZÖLLER, 1885, p. 86.


42 É. FOA, 1895, p. 412.19À côté <strong>de</strong> ces jardins-vergers villageois, sans inscription territoriale clairementmatérialisée, les auteurs <strong>de</strong>s XVIII e <strong>et</strong> XIX e siècles ont également remarqué la présenced’arbres en <strong>de</strong>s lieux spécifiques, particuliers <strong>de</strong> l’espace habité. Ces arbres étaient trèsgénéralement <strong>de</strong>s « arbres-mémoires » ou <strong>de</strong>s arbres « sacrés » <strong>et</strong> leur localisation servaittrès souvent à définir <strong>de</strong>s places publiques, lieux <strong>de</strong> réunion <strong>de</strong> la communauté villageoise.Zöller relate que « chaque village possè<strong>de</strong> au moins une place à palabre, au centre <strong>de</strong>laquelle se dresse, la plupart du temps, un grand arbre41 ». Édouard Foa explique que lesgrands arbres ont été généralement respectés <strong>et</strong> « toutes les places ou espaces sansmaisons jouissent <strong>de</strong> leur ombrage bienfaisant. [...] Sur ces places, ont souvent lieu <strong>de</strong>scérémonies religieuses selon les divinités incarnées <strong>dans</strong> ces arbres42 ». Lors <strong>de</strong> la fondationd’un village, les divinités lignagères, comme les ancêtres, étaient installés à proximité <strong>de</strong>certains arbres, iroko, fromager, baobab scellant ainsi l’acte fondateur. Leur installationpouvait même s’accompagner <strong>de</strong> la plantation rituelle <strong>de</strong> certaines espèces. Ces arbres s<strong>et</strong>rouvaient alors protégés par <strong>de</strong>s interdits religieux. Il y avait cependant différents <strong>de</strong>grés<strong>dans</strong> la sacralité <strong>de</strong> ces arbres. Certains abritaient un vodou, d’autres n’étaient respectés queparce qu’ils se trouvaient sur une place publique (sato) où les a<strong>de</strong>ptes venaient <strong>dans</strong>er <strong>et</strong> s<strong>et</strong>rouvaient ainsi « possédés » par l’esprit du vodou.43 E. CHAUDOIN, 1890, p. 47.44 R.F. BURTON, 1864, p. 169.20L’aspect culturel <strong>de</strong> ces arbres l’emportait sur l’agrément <strong>et</strong> l’ombrage, bien que ces <strong>de</strong>uxfacteurs ne soient pas à négliger. En réalité, certains avaient été plantés. C’était le résultatd’une action communautaire (ou lignagère) dont l’évocation au cours <strong>de</strong>s cérémonies servaità consoli<strong>de</strong>r <strong>et</strong> pérenniser la cohésion du groupe social. Dans l’espace villageois, la plupart<strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> culte étaient « marqués » par une espèce végétale, soit plantée, soit spontanée.Ainsi, à titre d’exemple, Chaudoin mentionne la présence <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux grands arbres situés justeà l’entrée <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> Ouidah : « Ces <strong>de</strong>ux monstres végétaux servent <strong>de</strong> <strong>de</strong>meure aufétiche bienveillant Dag-oli-ja-da, celui qui veille à l’entrée <strong>de</strong> la ville, qui éloigne les mauvaisesprits <strong>et</strong> souhaite la bienvenue aux voyageurs43. » Burton cite également un certainnombre <strong>de</strong> lieux <strong>de</strong> culte <strong>de</strong> la ville d’Abomey signalés par <strong>de</strong>s arbres44.45 A.B. ELLIS, 1890, p. 50.46 Dans un dossier duJournal <strong>de</strong>s Africanistesconsacré à l’espace, Françoise Ugoshukwu mentionne éga (...)21Pour terminer sur les lieux publics, la place du marché avait une importance capitale <strong>dans</strong>l’organisation <strong>de</strong> l’espace social. Les marchés, associés à nombre <strong>de</strong> villes <strong>et</strong> <strong>de</strong> villages,étaient généralement placés sous le contrôle d’un vodou particulier, Ayizan, qui était selonAlfred Burdon Ellis la « divinité protectrice <strong>de</strong>s marchés, <strong>de</strong>s places publiques <strong>et</strong> <strong>de</strong>s portes<strong>de</strong>s habitations45 ». Si <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> chasse sont <strong>de</strong>venus <strong>de</strong>s villages, certains ont aussidonné naissance à <strong>de</strong>s marchés dont les circonstances <strong>de</strong> création sont relatées <strong>dans</strong> lesrécits <strong>de</strong> fondation. Ces marchés ont contribué à structurer l’espace par le développementd’un réseau <strong>de</strong> communication46. Ils lui ont conféré également une dimension temporelle parleur périodicité, en général tous les quatre ou cinq jours, elle-même associée à l’organisationdu travail aux champs <strong>et</strong> à la vénération d’une divinité dont le jour d’offran<strong>de</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> prièreétait chômé, perm<strong>et</strong>tant alors aux cultivateurs <strong>de</strong> se rendre au marché. Il n’était parfoispossible <strong>de</strong> se rendre <strong>dans</strong> certains lieux sacrés que les jours <strong>de</strong> marché. Les marchésreprésentaient ainsi <strong>de</strong>s repères spatio-temporels renforcés par leur géographie, certainsmarchés se tenant le même jour que d’autres, le tout étant fondé sur une hiérarchie selonl’importance locale ou régionale <strong>de</strong>s marchés. Ainsi le marché Hunjro d’Abomey tenait uneplace toute particulière. C’est là qu’était annoncée en premier lieu la cérémonie <strong>de</strong>s prémices<strong>de</strong>s nouvelles récoltes organisée par le roi en l’honneur <strong>de</strong> ses ancêtres, qui <strong>de</strong>vait avoir lieuavant toute consommation. La fréquentation <strong>de</strong>s marchés, parfois spécialisés selon lesressources (bois <strong>de</strong> feu, ignames, poteries…), par les habitants d’un village correspondait àune géographie historique <strong>et</strong> religieuse <strong>de</strong> ces lieux d’échanges <strong>et</strong> <strong>de</strong> communication quin’était pas uniquement fondée sur les produits mais aussi sur <strong>de</strong>s réseaux <strong>de</strong> sociabilité <strong>et</strong> <strong>de</strong>


clientèle dont les origines pouvaient être liées aux mouvements migratoires ou auxinstitutions royales. Une hiérarchisation <strong>de</strong>s établissements humains s’était ainsi instaurée,en relation avec le développement <strong>de</strong> ces marchés associés au réseau <strong>de</strong> communication,véritables centres politiques, économiques <strong>et</strong> religieux.Les espaces cultivés22Aujourd’hui, les habitants <strong>de</strong> l’aire culturelle aja-fon distinguent plusieurs types <strong>de</strong> champsselon leur localisation par rapport au village. Ils citent tout d’abord les champs situés àproximité immédiate du village, <strong>et</strong> dont l’exploitation était, semble-t-il, réservée auxpersonnes âgées47. Ces champs sont alors appelés adagbleme ou abomè. Ce <strong>de</strong>rnier termepeut également désigner les jardins jouxtant les habitations ou situés aux abords même duvillage. Puis viennent les champs « ordinaires », dénommés agble en éwé ou gle en fon. Parchamp, il faut comprendre l’espace cultivé en plantes récoltées annuellement, comme lescéréales ou les tubercules.47 Ce que John Igué a également observé chez les Yoruba (O.J. IGUÉ, 1970, p. 158).48 La limite entre une protoculture fruitière ou une réelle arboriculture n’est cependant pas toujour (...)49 Les toponymes sont à la fois le refl<strong>et</strong> <strong>de</strong> la perception <strong>de</strong> l’environnement à l’arrivée <strong>de</strong>s hommes(...)50 Des sources écrites <strong>et</strong> orales du XIX e siècle perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> suivre le développement <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te cultur (...)23Lors <strong>de</strong>s défrichements agricoles, certains arbres utiles étaient conservés – <strong>et</strong> ils le sontencore –, participant à la formation <strong>de</strong> paysages spécialisés, appelés par les agronomesparcs agroforestiers à karité, à néré ou à palmier à huile, selon l’espèce dominant la stratearborée48. Des toponymes combinant <strong>de</strong>s noms d’espèces végétales au suffixe kanmè, quisignifie « <strong>dans</strong> une étendue », indiquent ainsi un espace dominé par uneespèce49. Dekanmè, qui peut être traduit par « <strong>dans</strong> une étendue couverte <strong>de</strong> palmiers àhuile », est le terme employé pour une palmeraie50. C<strong>et</strong> espace cultivé pouvait ainsi associerdifférentes formes d’exploitation en juxtaposant plantes cultivées <strong>et</strong> plantes conservées lors<strong>de</strong>s défrichements, ce qui montre bien la difficulté à établir <strong>de</strong>s catégories spatiales.51 L’agriculture sur brûlis, fondée sur la rotation <strong>de</strong>s terres <strong>et</strong> <strong>de</strong>s jachères <strong>de</strong> longue durée, génér (...)52 Abbé COURDIOUX, 1878, p. 609.24De plus, le type d’agriculture pratiquée impliquait une mise en jachère <strong>et</strong> une rotation <strong>de</strong>sterres plus ou moins longues selon la fertilité <strong>de</strong>s sols51. Les exploitants <strong>de</strong>vaient parfoisparcourir <strong>de</strong>s distances assez considérables <strong>et</strong> aux pério<strong>de</strong>s les plus intenses <strong>de</strong>s activitésagricoles, ils <strong>de</strong>meuraient souvent <strong>dans</strong> <strong>de</strong>s « fermes <strong>de</strong> cultures » appelées maisons <strong>de</strong>schamps, glexwe (litt. « gle.xwe » : « champ.maison »), les champs étant trop éloignés duvillage, même si celui-ci constituait la rési<strong>de</strong>nce principale <strong>et</strong> permanente <strong>de</strong>s populations <strong>de</strong>la région. Certains auteurs n’ont pas manqué d’observer c<strong>et</strong>te organisation : l’abbéCourdioux note que « les habitants <strong>de</strong> la côte <strong>de</strong>s Esclaves sont réunis <strong>dans</strong> <strong>de</strong>s villes <strong>et</strong> <strong>de</strong>svillages <strong>et</strong> tirent leurs subsistance <strong>de</strong> fermes peu éloignées. Des esclaves gar<strong>de</strong>nt <strong>et</strong> cultiventces fermes. Au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> ces portions <strong>de</strong> sol cultivées avec soin, on parcourt <strong>de</strong> vastescontrées désertes52 ».53 Lieutenant-colonelGUYON, 1902, p. 52.25Le lieutenant Guyon donne le nom <strong>de</strong> gl<strong>et</strong>as à ces zones cultivées éloignées <strong>de</strong>s villages :« [Les cultivateurs] possè<strong>de</strong>nt tous une ou plusieurs p<strong>et</strong>ites cases <strong>dans</strong> lesquelles lespropriétaires viennent habiter pendant la récolte53. » De nos jours, c<strong>et</strong>te organisation sepratique encore <strong>et</strong> <strong>de</strong>s migrations saisonnières se produisent du village vers ces fermes,


généralement appelées « campements <strong>de</strong> culture ». Ces campements agricoles formaient<strong>de</strong>s rési<strong>de</strong>nces saisonnières <strong>et</strong> caractérisaient une organisation <strong>de</strong> l’espace liée àl’exploitation <strong>de</strong> la terre <strong>et</strong> à la temporalité <strong>de</strong> celle-ci, culture sur brûlis associée à unerotation <strong>de</strong>s terres, fondée sur une alternance entre espace exploitable <strong>et</strong> exploité, cultivé ouau repos.54 Capitaine J. ADAMS, 1823, p. 61 ; A. BOUËT, 1851, p. 122 ; A. VALLON, 1861, p. 333.55 A.J. SKERTCHLY, 1874, p. 82.56 H. ZÖLLER, 1885, p. 59.57 Aujourd’hui la pratique <strong>de</strong> la jachère a quasiment disparu <strong>dans</strong> c<strong>et</strong>te région <strong>de</strong>nsément peuplée.(...)26À côté <strong>de</strong>s zones cultivées, <strong>de</strong>s champs étaient laissés au repos. Ces jachères entraientaussi <strong>dans</strong> les classifications populaires <strong>de</strong> l’espace. Les techniques agraires pratiquées <strong>dans</strong>c<strong>et</strong>te zone – tout au moins tant que la <strong>de</strong>nsité <strong>de</strong> la population le perm<strong>et</strong>tait – étaientfondées sur la pratique <strong>de</strong> la mise en jachère <strong>de</strong>s terres après un certain nombre d’annéesd’exploitation. Ce temps <strong>de</strong> repos relativement long, jusqu’à plusieurs années, laissait l<strong>et</strong>emps à la végétation originelle <strong>et</strong> à la fertilité <strong>de</strong>s sols <strong>de</strong> se reconstituer. Les auteurs<strong>de</strong>s XVIII e <strong>et</strong> XIX e siècles ont parfois observé ces jachères, sans toujours faire <strong>de</strong> relation avecle système cultural54. Cependant certains ont distingué, <strong>dans</strong> la région d’Allada, les champscultivés, les jachères <strong>et</strong> la forêt. Ainsi Alfred J. Skertchly note : « Une heure <strong>de</strong> voyage àtravers ce pays boisé nous conduisit à une savane couverte d’herbes courtes <strong>et</strong> portantd’abondantes évi<strong>de</strong>nces montrant qu’elle avait été auparavant une plantation55. » Zöllerprécise que les terres au nord du lac Togo sont occupées à 90 % par <strong>de</strong>s broussailles <strong>et</strong> <strong>de</strong>sherbes dominées par <strong>de</strong>s baobabs. Il note également la présence <strong>de</strong> « quelques champslaissés à l’état <strong>de</strong> <strong>de</strong>mi-abandon56 ». La terminologie locale distingue plusieurs types <strong>de</strong>jachère selon la physionomie <strong>de</strong> la végétation qui dépend du temps écoulé <strong>de</strong>puis l’arrêt <strong>de</strong>scultures. Le <strong>de</strong>rnier sta<strong>de</strong> est appelé zungbo, « forêt.gran<strong>de</strong> » <strong>et</strong> correspond à un champabandonné <strong>de</strong>puis quinze à vingt ans, r<strong>et</strong>ourné à la nature. Le cycle est alors terminé <strong>et</strong> c<strong>et</strong>espace autrefois cultivé peut l’être à nouveau57.58 P. CLAVAL, 1978, p. 85-86.27C<strong>et</strong>te organisation saisonnière du terroir agricole villageois montrait une certaineinstabilité, selon les conditions climatiques, la nature <strong>de</strong>s sols, les plantes mises en culture,auxquelles s’ajoutaient <strong>de</strong>s facteurs humains imprévisibles (cérémonies, migrations, conflits,épidémies, phénomènes surnaturels conduisant à l’abandon <strong>de</strong> terres). Paul Claval parled’organisation instable <strong>de</strong> l’espace tout en indiquant que tout ne fluctue pas58. Lesressources stratégiques attribuées à certains lignages, comme les points d’eau <strong>et</strong> lespratiques religieuses, jouent un rôle stabilisant selon c<strong>et</strong> auteur, même si, nous l’avons vu,les divinités accompagnaient les hommes <strong>dans</strong> leurs déplacements. L’espace était cependantsoumis à un contrôle religieux qui s’accompagnait parfois d’un contrôle politique.Contrôle politique <strong>et</strong> religieux <strong>de</strong> l’espaceRépartition <strong>et</strong> délimitation <strong>de</strong>s terres28Lors <strong>de</strong> leur installation, les premiers défricheurs avaient toutes les terres à leurdisposition. Puis, à l’arrivée <strong>de</strong> nouveaux venus, le premier occupant ou ses <strong>de</strong>scendantsdélimitaient les terres qui leur étaient confiées (<strong>de</strong>lipo : tracer.limite). Une espèce végétaleparticulière, anyati (dracaena sp.), était couramment utilisée <strong>dans</strong> le bornage <strong>de</strong>s espacesappropriés par les hommes <strong>et</strong> par les divinités. Elle était utilisée <strong>dans</strong> toute l’aire culturelleaja-fon, ainsi que <strong>de</strong>ux autres : kpatin (newbouldia laevis) <strong>et</strong> akikontin(spondias mombin).Ces plantes servaient, <strong>et</strong> servent toujours, à délimiter les champs souvent bordés par <strong>de</strong>ssentiers : <strong>de</strong>s boutures étaient disposées <strong>de</strong> place en place le long du périmètre <strong>de</strong>s


parcelles, à <strong>de</strong>s intervalles plus ou moins réguliers. Parfois, seuls les angles étaient marqués.Ces délimitations, perdues <strong>dans</strong> la luxuriance ambiante, ne sont pas toujours clairementvisibles à l’observateur étranger. Le kpatin servait également à délimiter les enclos <strong>de</strong>sconcessions à l’intérieur <strong>de</strong>s villages ou <strong>de</strong>s jardins à proximité <strong>de</strong>s habitations. Laplante anyati se rencontrait fréquemment à côté <strong>de</strong>s sanctuaires ; elle servait à marquerleurs lieux <strong>de</strong> culte <strong>et</strong> sa plantation relevait du rituel <strong>de</strong> fondation59.59 Roland Portères signale c<strong>et</strong>te utilisation du dracaena <strong>dans</strong> toute l’Afrique occi<strong>de</strong>ntale (R. PORTÈRE (...)29Dans le royaume du Dahomey, les opérations <strong>de</strong> délimitation se faisaient sous le contrôled’un dignitaire du roi, le tokpo. Le Hérissé nous apprend :60 A. LE HÉRISSÉ, 1911, p. 43-44. Le rôle <strong>de</strong> ces géomètres n’est cité <strong>dans</strong> aucune autre source étudié (...)[Celui-ci] avait sous sa direction un véritable service <strong>de</strong> géomètres, dont le nom houmèkponto,ceux qui regar<strong>de</strong>nt <strong>dans</strong> le patrimoine, désigne fort bien les attributions. Chacun d’eux opérait<strong>dans</strong> une région déterminée. Il y <strong>de</strong>vait connaître entièrement, prétend-on, la répartition <strong>de</strong>sterrains <strong>de</strong> culture <strong>et</strong> s’y occupait <strong>de</strong> toute délimitation sur le sol. [...] C’étaient les houmêkponto,par suite, qui bornaient les concessions, dont les rois dotaient leurs frères ou leurs chefs les plusvaleureux, ainsi que l’emplacement <strong>de</strong>s palais que chaque règne voyait élever en différents pointsdu royaume. Après le bornage qui se faisait à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> boutures d’une plante grasse très vivace,les « géomètres » lançaient <strong>de</strong>s graines <strong>de</strong> palmiers <strong>et</strong> <strong>de</strong> nétés, pour bien montrer l’intérêt queportaient les rois du Dahomey à la propagation <strong>de</strong> ces arbres60.30L’espace humanisé (habité <strong>et</strong> cultivé) était donc un espace structuré, délimité, codifiéselon <strong>de</strong>s principes sociaux édictés principalement par le culte <strong>de</strong>s vodous. Les plantesutilisées <strong>dans</strong> les délimitations parcellaires avaient un caractère magico-religieux affirmé,reconnu <strong>de</strong> tous, <strong>et</strong> concouraient au respect <strong>de</strong> la répartition <strong>de</strong>s terres <strong>et</strong> <strong>de</strong>s cultures qui ypoussaient. Ce caractère religieux était renforcé par la disposition <strong>dans</strong> les champs d’uncertain nombre <strong>de</strong> signes qui faisaient référence à <strong>de</strong>s vodous. Parmi les auteurs, le chevalier<strong>de</strong>s Marchais en 1724 avait parfaitement observé c<strong>et</strong>te organisation <strong>de</strong> l’espace du royaume<strong>de</strong> Ouidah :61 Chevalier DESMARCHAIS, 1724, p. 100.Ils ont un nombre infini <strong>de</strong> divinités [...] les chemins en sont remplis parce que chaque particulieren m<strong>et</strong> à la tête <strong>et</strong> à la queue <strong>de</strong> son champ <strong>de</strong> mil pour le conserver <strong>et</strong> comme ils sont tousdifférents les uns <strong>de</strong>s autres <strong>et</strong> que chacun les figure à sa fantaisie cela sert aussi <strong>de</strong> bornes pourles propriétaires <strong>de</strong> terre61.31Ces pratiques sont toujours en usage <strong>de</strong> nos jours, <strong>de</strong>s vodous <strong>et</strong> <strong>de</strong>s charmes sontencore installés <strong>dans</strong> les champs. Ce contrôle religieux <strong>de</strong> l’espace servait également àprévenir tout acte illicite <strong>et</strong> il s’exerçait aussi sur les chemins <strong>et</strong> surtout les carrefours où l’onvoyait très souvent s’élever la représentation d’un vodou. Ellis décrit ainsi les sacrificesofferts aux carrefours :62 A.B. ELLIS, 1893, p. 103. Par leur fonction même, les carrefours représentent <strong>de</strong>s lieux particulie (...)[...] Sacrifice is ma<strong>de</strong> at cross-roads, or at a point where several roads me<strong>et</strong>, in or<strong>de</strong>r to avert animpending calamity. In this case the sacrifice is probably ma<strong>de</strong> to the legion of spirits, mostly evil,who are supposed to haunt the forest and uninhabited tracts of country; and the general belief isthat the approaching danger is diverted from the proper road, and turned away from thecommunity which it threatened. In reference to this practice a proverb says the cross-roads do notdread sacrifices62.63 Les maisons, les lieux <strong>de</strong> culte <strong>et</strong> même les individus ont aussi leur legba.32Le vodou legba occupait une place particulière <strong>dans</strong> l’espace villageois. En eff<strong>et</strong>, à l’entrée<strong>de</strong> tous les villages se trouvait la représentation <strong>de</strong> ce vodou, appelé to legba ou legba duvillage, qui était à la fois le gardien <strong>de</strong> celui-ci <strong>et</strong> le régulateur <strong>de</strong>s relations sociales. Il avait


une dimension collective. La représentation matérielle <strong>de</strong> ce vodou, sous la forme d’unestatue anthropomorphe, annonçait au voyageur étranger la proximité d’un lieu habité63.33L’espace <strong>dans</strong> sa globalité se trouvait donc soumis à un contrôle religieux, que ce soit parun marquage symbolique <strong>de</strong>s carrefours, <strong>de</strong>s champs, <strong>de</strong>s bois sacrés, <strong>de</strong> l’espace habité, oupar l’existence supposée d’êtres surnaturels invisibles qui veillent aux actions <strong>de</strong>s hommes.Ce contrôle religieux s’accompagnait <strong>dans</strong> certains cas <strong>de</strong> stratégies <strong>de</strong> domination politiquedu territoire, <strong>de</strong>s hommes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s ressources par le biais d’alliances politiques <strong>et</strong>matrimoniales, <strong>de</strong> placements <strong>et</strong> déplacements d’hommes <strong>et</strong> <strong>de</strong> divinités participant audéveloppement d’aires d’influence <strong>et</strong> à la construction du territoire <strong>de</strong>s États centralisés.Contrôle <strong>de</strong>s sources34Dans ce dispositif, l’accès à l’eau représentait un enjeu majeur <strong>dans</strong> la dominationpolitique <strong>et</strong> le contrôle d’un territoire. Dans c<strong>et</strong>te région, les sources ont, par essence, unstatut particulier : elles sont sacralisées car elles sont censées être habitées par <strong>de</strong>sdivinités, les Tɔvodous ou Tɔxosu. À leur arrivée sur le plateau d’Abomey au XVII e siècle,les Alladaxonu ont établi <strong>dans</strong> un premier temps <strong>de</strong>s relations pacifiques avec les premiersoccupants, les Ayinon, dont ils ont reconnu le droit sur la terre64. L’alimentation en eau surce plateau posa un problème majeur, les sources étant peu nombreuses. Elles étaient alorssous le contrôle <strong>de</strong>s Ayinon. Lorsque les Alladaxonu imposèrent leur domination surl’ensemble <strong>de</strong> la population, les sources représentèrent un enjeu stratégique pour contrôlerl’espace <strong>et</strong> ses habitants. Les traditions orales « officielles », recueillies auprès <strong>de</strong>sdignitaires ou <strong>de</strong>s responsables religieux placés à l’origine par le roi, rapportent lesévénements qui ont amené les rois d’Abomey à contrôler par la force les sources détenuespar les Ayinon d’origine yorouba. Le Hérissé attribue ces faits au roi Xwegbaja (1645-1685)d’après une tradition recueillie lors <strong>de</strong> son séjour à Abomey expliquant la prise <strong>de</strong> contrôle <strong>de</strong>la source la plus proche <strong>de</strong> la ville, située à Didonu :64 Sont appelésAlladaxonu ceux qui sont venus d’Allada. Le terme Ayinon qui sert à désigner les prem (...)65 La toil<strong>et</strong>te du nouveau-né est un acte rituel primordial <strong>et</strong> qui nécessite une eau pure, consacrée. (...)66 A. LE HÉRISSÉ, 1911, p. 284. Nagot est une autre appellation pour désigner les Yorouba.Sous le règne <strong>de</strong> Ouégbaja (<strong>de</strong> 1650 à 1680) il y avait autour d’Agrigomé beaucoup d’autresroitel<strong>et</strong>s ; [...] ils étaient indépendants les uns <strong>de</strong>s autres <strong>et</strong> tous exigeaient <strong>de</strong>s droits <strong>de</strong> passagesur leurs territoires. [...] Ceux, entre autres que percevait le Nagot Di étaient particulièrementodieux <strong>et</strong> vexatoires, car il les recouvrait en sus <strong>de</strong> ce qu’on lui payait pour puiser <strong>de</strong> l’eau à lasource qui porte son nom (di-dô) <strong>et</strong> près <strong>de</strong> laquelle il habitait. Comme, pour arriver chez lui, ilfallait traverser plusieurs villages, on conçoit à quel prix revenait une jarre d’eau en saison sèche.Aussi beaucoup <strong>de</strong> nouveau-nés mouraient-ils, faute <strong>de</strong> recevoir les premiers soins <strong>de</strong> toil<strong>et</strong>te65.Ouêgbaja s’émut <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te situation. Il tua le Nagot Di, installa à sa place un individu <strong>de</strong> Dokpanommé Djagba, <strong>et</strong> lui confia la gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> la source, qu’il surnomma to-kpo, « la source n’a plus <strong>de</strong>valeur ». Puis comme les gens du pays s’inquiétaient <strong>de</strong> savoir s’ils <strong>de</strong>vaient continuer à lui verserle tribut qu’ils versaient à Di, Ouêgbaja leur répondit : « Ne payez rien ; mais si quelqu’un vous<strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’eau, ne lui en refusez jamais. L’homme vit <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux choses, le boire <strong>et</strong> lemanger »66.67 Le Hérissé relate aussi la prise <strong>de</strong> contrôle d’une autre source, Amodi, <strong>dans</strong> <strong>de</strong>s circonstances sim(...)35C<strong>et</strong>te tradition établit qu’avant Xwegbaja les Ayinon contrôlaient l’accès à l’eau. Ce seraitpour c<strong>et</strong>te raison que ce roi en aurait pris possession, chargeant un dignitaire d’en contrôlerl’accès. Ce serait l’origine <strong>de</strong> la charge du tokpo, qui signifie « eau.gratuite ». Il est en eff<strong>et</strong>concevable que les Ayinon prélevaient une taxe sur l’eau ; ceci est probablement à l’originedu conflit qui les opposa au roi d’Abomey67. Celui-ci ne pouvait dominer politiquement <strong>et</strong>payer <strong>de</strong>s droits à ceux qui les détenaient <strong>de</strong> par leur antériorité <strong>dans</strong> le pays.


36Un certain nombre <strong>de</strong> ces sources (Dido, Agbobo), situées à proximité d’Abomey, capitaledu royaume, jouaient un rôle <strong>dans</strong> les cérémonies royales, lors <strong>de</strong> l’intronisation du roi, ouen relation avec <strong>de</strong>s événements militaires. Aujourd’hui encore, les femmes se ren<strong>de</strong>nt enprocession <strong>de</strong>puis le palais d’Abomey jusqu’à la source Dido pour aller chercher <strong>de</strong> l’eauutilisée lors <strong>de</strong>s cérémonies. La forêt <strong>et</strong> l’eau, source <strong>de</strong> fraîcheur donc <strong>de</strong> paix,représentaient <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> purification <strong>et</strong> <strong>de</strong> renouvellement <strong>de</strong> l’autorité royale ; leurrespect garantissait l’équilibre social.Postes <strong>de</strong> douane <strong>et</strong> fondations royales37La circulation n’était pas libre sur le territoire <strong>de</strong>s anciens royaumes <strong>de</strong> la côte <strong>de</strong>sEsclaves qui se trouvaient sous le contrôle <strong>de</strong> « douaniers » (<strong>de</strong>nugan en fon) établis <strong>dans</strong>certains villages. C<strong>et</strong>te organisation territoriale a, semble-t-il, existé <strong>dans</strong> l’ensemble <strong>de</strong> l’aired’étu<strong>de</strong>. En eff<strong>et</strong>, en 1724, le chevalier <strong>de</strong>s Marchais observe <strong>dans</strong> le royaume <strong>de</strong> Ouidah,avant sa conquête par le Dahomey, que, « outre les <strong>de</strong>ux péages qui sont <strong>dans</strong> le milieu [<strong>de</strong>]<strong>de</strong>ux rivières, il y en a encore un à chaque borne du royaume pour ceux qui entrent ousortent pour aller <strong>dans</strong> les royaumes voisins68 ». Son texte est illustré d’une carte montrantla distribution géographique <strong>de</strong> ces postes sur tout le territoire du royaume. A. Le Hérissé,nous l’avons vu plus haut, fait également allusion à l’existence <strong>de</strong> postes <strong>de</strong> contrôle sur leplateau d’Abomey, sur le territoire <strong>de</strong> chaque « roitel<strong>et</strong> indépendant » avant l’arrivée <strong>de</strong>sAgasuvi69. H. Zöller pour sa part signale l’existence <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> ces postes à Grand Popo <strong>et</strong>Agbanakin (Sud-Est-Togo) « levés […] à l’arbitraire <strong>de</strong> l’homme qui y détient précisément leplus grand pouvoir70 ». En 1911, Le Hérissé toujours remarque que « <strong>de</strong>s postes <strong>de</strong> douane(dénou) étaient installés en plusieurs endroits du royaume du Dahomey. Ils jalonnaient <strong>de</strong>sroutes suivies par <strong>de</strong>s caravanes <strong>de</strong> porteurs, mais ne marquaient nullement, semble-t-il,<strong>de</strong>s points frontières71 ». L’auteur voit <strong>dans</strong> c<strong>et</strong>te institution un héritage <strong>de</strong>s coutumespratiquées par les premiers occupants. Ceci expliquerait d’ailleurs la dispersion <strong>de</strong> ces postes<strong>de</strong> douane sur toute l’étendue du royaume. Il suppose que leur situation « ne marquerait endéfinitive que les étapes <strong>de</strong>s conquêtes dahoméennes ». C<strong>et</strong>te hypothèse ne manque pasd’une certaine logique. Leur dispersion servait <strong>de</strong> plus la défense <strong>de</strong>s territoires. L’historienbéninois Joseph A. Djivo suppose quant à lui que les postes <strong>de</strong> douane situés sur les rivières,les fleuves <strong>et</strong> les lacs marquaient <strong>de</strong>s frontières naturelles <strong>et</strong> constituaient <strong>de</strong>s repères <strong>de</strong>démarcation entre les territoires. Il pense également que la multiplication <strong>de</strong> ces postesmontre les différentes étapes <strong>de</strong> l'extension territoriale du royaume72.68 Chevalier DESMARCHAIS, 1724, p. 40.69 A. LE HÉRISSÉ, 1911, p. 284.70 H. ZÖLLER, 1884, p 45.71 A. LE HÉRISSÉ, 1911, p. 87-88.72 J.A. DJIVO, 1979, vol. 1, p. 39.73 F.E. FORBES, 1851, p. 35.74 R.F. BURTON, 1864, p. 46.75 Littéralement « blanc.chef » en langue fon. Dignitaire chargé par le roi <strong>de</strong>s relations avec les Eu(...)38Quelques auteurs ont fait <strong>de</strong>s observations sur les fonctions <strong>de</strong> ces postes. Fre<strong>de</strong>rick E.Forbes explique leur rôle <strong>dans</strong> le prélèvement <strong>de</strong>s taxes effectué sur tous les produits faisantl’obj<strong>et</strong> d’un commerce, notamment sur l’huile <strong>de</strong> palme, l’un <strong>de</strong>s principaux revenus duroi73. Burton les appelle <strong>de</strong>s custom-house ou <strong>de</strong>nu, <strong>de</strong> leur nom fon74. Dans le cadre duDahomey, un représentant du roi à Ouidah, le yovogan75, était chargé <strong>de</strong>s relations avec les


Européens. Il leur « ouvrait les chemins » pour se rendre à la capitale du royaume, Abomey.Les Européens résidant à Ouidah auXVIII e siècle y étaient invités chaque année pour assisterà la « fête <strong>de</strong>s coutumes » en l’honneur <strong>de</strong>s ancêtres défunts. Ce n’est qu’à c<strong>et</strong>te occasionqu’ils étaient autorisés à se rendre <strong>dans</strong> l’intérieur du pays, avant que ne soient établies <strong>de</strong>srelations commerciales <strong>et</strong> diplomatiques suivies auXIX e siècle. Ils empruntaient toujours lemême itinéraire, accompagnés d’une escorte <strong>et</strong> d’un récadère, messager du roi portant unecanne ou « réca<strong>de</strong> », emblème royal reconnaissable <strong>de</strong> tous <strong>et</strong> faisant office <strong>de</strong> « laissezpasser».39Le capitaine Bertin <strong>de</strong> son côté précise :76 Capitaine BERTIN, 1890, p. 390.La lagune [<strong>de</strong> Godomey] est fréquemment obstruée par <strong>de</strong>s barrages faits avec <strong>de</strong>s pieux [...] ;ces barrages ne présentent qu’une p<strong>et</strong>ite ouverture près <strong>de</strong> l’une <strong>de</strong>s rives, c<strong>et</strong>te ouverture estgardée par <strong>de</strong>s gens du roi qui prélèvent <strong>de</strong>s ca<strong>de</strong>aux sur les pirogues qui passent <strong>et</strong> qui (lorsquesur l’ordre du roi les chemins sont fermés) s’opposent par la force au passage <strong>de</strong> quiconque n’estpas muni d’un laissez-passer. Ce passage s’appelle Décimer. Deman<strong>de</strong>r un laissez-passer s’appelle« prendre les chemins » [...]. Le laissez-passer a beaucoup plus <strong>de</strong> valeur lorsqu’il estaccompagné du bâton du chef (yevogan) qui vous fait ouvrir les chemins76.77 J. BAYOL, 1892, p. 520.78 A. LE HÉRISSÉ, 1911, p. 89-90.79 A. BOUËT, 1851, p. 99.40Ce texte complète les renseignements sur le rôle <strong>de</strong> ces postes pour le contrôle royal <strong>de</strong> lacirculation à l’intérieur <strong>de</strong> l’État. Tout le mon<strong>de</strong> était astreint à ces contrôles où, commel’indique Jean Bayol, « <strong>de</strong>s gens du roi veillent à ce que personne ne puisse s’enfuir, <strong>et</strong> toutsuj<strong>et</strong> dahoméen en état <strong>de</strong> porter les armes est dirigé sur Abomey77 ». Ces hommes du roicomprenaient les responsables <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>nu <strong>et</strong> <strong>de</strong>s chasseurs qui, d’après Le Hérissé,« remplissaient en même temps l’office <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>s-sentiers. Ils signalaient ce qui leurparaissait anormal <strong>et</strong> arrêtaient tout esclave ou criminel évadé <strong>de</strong>s terrains <strong>de</strong> cultures où ilavait été parqué78 ». Le rôle <strong>de</strong>s chasseurs du roi ne se limitait pas à celui d’éclaireur <strong>et</strong> <strong>de</strong>pourvoyeur <strong>de</strong> vian<strong>de</strong>, ils assuraient également une surveillance du territoire qui garantissaitune certaine sécurité sur l’espace dominé ; certains auteurs ont observé que les habitants duroyaume circulaient sans crainte d’être agressés ou dépouillés, même <strong>de</strong> nuit79. C<strong>et</strong>tesécurité cependant était limitée à ceux qui respectaient les règles établies, car ceux quis’opposaient aux levées d’hommes pour l’armée dahoméenne risquaient d’être asservis,vendus ou sacrifiés.80 D’après la carte <strong>de</strong> Francesco Borghero (F. BORGHERO, 1866).41Ces postes avaient donc plusieurs fonctions économiques <strong>et</strong> politiques : prélèvement <strong>de</strong>staxes, surveillance du territoire, contrôle <strong>de</strong>s individus <strong>et</strong> levée <strong>de</strong> l’armée. Si les « cheminsétaient fermés », la circulation était interdite. Certaines routes, comme celle allant d’Allada àPorto Novo, semblent même avoir été interdites en permanence aux Européens80. Ceux-cine pouvaient voyager <strong>dans</strong> l’intérieur sans l’autorisation duyovogan. Il est certain que c<strong>et</strong>teorganisation centralisée d’une administration territoriale a limité la circulation <strong>de</strong>s étrangers<strong>dans</strong> le royaume, <strong>et</strong> par conséquent leurs connaissances concernant son territoire.42Dans le contexte du royaume d’Abomey, un certain nombre d’envoyés royaux ont étéchargés <strong>de</strong> créer <strong>de</strong>s fermes <strong>de</strong> cultures qui sont <strong>de</strong>venues <strong>de</strong>s villages ou <strong>de</strong>s postes <strong>de</strong>contrôle <strong>de</strong> la circulation <strong>de</strong>s biens <strong>et</strong> <strong>de</strong>s personnes sur le territoire dahoméen. Laresponsabilité <strong>de</strong> ces postes, selon Le Hérissé, était confiée :81 A. LE HÉRISSÉ, 1911, p. 87.


à <strong>de</strong>s fermiers qui percevaient un droit d’environ <strong>de</strong>ux centimes (80 cauris) sur toute sortie ouentrée <strong>de</strong> produits <strong>et</strong> <strong>de</strong> marchandises, y compris les esclaves. Après avoir prélevé pour euxmêmesune part très minime, les fermiers faisaient porter le reste <strong>de</strong>s sommes perçues à <strong>de</strong>sgrands dignitaires désignés à c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong> par le roi81.82 F. BORGHERO, 1866, p. 73.43Ces postes institués par les autorités politiques étaient fixes ; l’espace entre les villages,hameaux, fermes était quadrillé par un réseau <strong>de</strong> sentiers qui pouvait fluctuer selon lessaisons, particulièrement <strong>dans</strong> les zones marécageuses. L’abbé Borghero voit là uneexplication aux divergences observées entre les cartes établies par les Européens82. Lesprincipaux axes étaient parcourus par les marchands <strong>et</strong> les commerçants se rendant sur lesmarchés. Un certain nombre <strong>de</strong> « postes <strong>de</strong> douane » ou <strong>de</strong> villages dépendants du roi ontainsi été établis sur le territoire dominé.Alliances politiques, matrimoniales <strong>et</strong> religieuses44Les conquêtes militaires dahoméennes s’accompagnèrent d’une volonté <strong>de</strong> contrôler lesterritoires conquis <strong>et</strong> leurs habitants. Pour cela, ils eurent recours à plusieurs types <strong>de</strong>stratégies fondées sur les alliances politiques <strong>et</strong> matrimoniales associées aux pratiquesreligieuses. Les responsables <strong>de</strong>s postes <strong>de</strong> contrôle, les <strong>de</strong>nugan ou « douaniers »,pouvaient être soit <strong>de</strong>s hommes placés par le roi, soit <strong>de</strong>s alliés choisis sur place, l’alliance s<strong>et</strong>rouvant renforcée par <strong>de</strong>s mariages avec <strong>de</strong>s filles ou <strong>de</strong>s sœurs du roi <strong>et</strong> <strong>de</strong>s installations<strong>de</strong> divinités. Des exemples présentés à partir d’informations orales perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> suivre cesstratégies.83 Enquête à Sèdjè Denu, juill<strong>et</strong> 1992.45À Sèdjè Denu, le fondateur Alisu, au moment <strong>de</strong> la conquête du royaume d’Allada en1724, choisit <strong>de</strong> s’allier à Agaja qui lui confia alors la responsabilité du <strong>de</strong>nu <strong>de</strong> Sèdjè ; c’estainsi qu’Alisu <strong>de</strong>vint un homme fort, chargé <strong>de</strong> contrôler la circulation <strong>de</strong>s biens <strong>et</strong> <strong>de</strong>spersonnes. Sèdjè était alors un carrefour important vers Xogbonu (Porto Novo) <strong>et</strong> le paysyoruba, à l’est. Alisu n’a donc pas été placé par le roi, mais celui-ci l’aurait choisi sur placepour « fermer le carrefour (<strong>de</strong>nu). Alisu récupérait les esclaves qui fuyaient Danxomè pourles y renvoyer ou saisir leurs biens. Quelle que soit la force <strong>de</strong> ceux qui voulait traverser, illes arrêtait83 ».46À Koto Ayivedji, à Djija, ce sont les rois – Tegbessou (1732-1774) à Djija, Glèlè (1858-1889) à Koto – qui placèrent <strong>de</strong>s hommes pour contrôler les passants mais aussi pourcultiver <strong>et</strong> fournir le palais en produits artisanaux <strong>et</strong> matières premières. À Djija, peuplée àl’origine <strong>de</strong> Yorouba, <strong>de</strong>s envoyés royaux étaient ainsi chargés d’un poste <strong>de</strong> contrôle (<strong>de</strong>nu),<strong>de</strong> l’administration locale <strong>et</strong> <strong>de</strong>s productions agricoles <strong>de</strong>stinées au palais. Ce postereprésente un exemple <strong>de</strong>s stratégies <strong>de</strong> contrôle politique <strong>dans</strong> une zone dominée autrefoispar les Yorouba.84 Enquête à Attogon en juill<strong>et</strong> 1991.47Les conquérants installèrent leurs propres vodous <strong>et</strong> se concilièrent également les divinitésrencontrées en les adoptant. Ils tenaient compte <strong>de</strong>s conditions religieuses préexistantes àleur arrivée. Ces fondations royales avaient donc une assise religieuse, sous les hospicesd’un vodou installé par la volonté du roi. La tradition historique relatant la fondationd’Attogon rapporte que c’est le vodou Dan qui est allé trouver le roi Tegbessou pour lui<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r d’envoyer <strong>de</strong>s hommes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s femmes pour fon<strong>de</strong>r un village84. Le roi alorsinstalla le vodou Agasu, qui est l’ancêtre mythique déifié (toxwyo) <strong>de</strong> la famille royale, ainsique tous les vodous qui relevaient <strong>de</strong> lui. Le texte <strong>de</strong> A. Le Hérissé est à ce titre significatif :Quand fut créée la puissance dahoméenne, les peuples placés sous sa domination virent construirechez eux <strong>de</strong>s temples dédiés à Agasou, le fétiche <strong>de</strong> la famille royale. Mais le conquérant, enr<strong>et</strong>our, comme pour mieux sceller son union avec eux, admit les cultes <strong>de</strong> leurs plus grands


vodouns. Ainsi furent importés au Dahomey le « bon serpent » (dangbé), par Agadja après laconquête <strong>de</strong> Savi ; le « tonnerre » (hévyosô) <strong>de</strong> Hèviè, par Tégbésou.85 A. LE HÉRISSÉ, 1911, p. 102.C<strong>et</strong>te adoption <strong>de</strong> fétiches étrangers fut surtout due, croyons-nous, au désir <strong>de</strong> fléchir le courrouxd’une puissance occulte, à laquelle on pouvait avoir porté préjudice en détruisant soit un pays, oùles honneurs lui étaient rendus, soit une famille qu’elle protégeait. Les Dahoméens ach<strong>et</strong>aientalors – c’est l’expression consacrée – les fétiches du sol, ainsi que les grands fétiches <strong>de</strong> tribus <strong>de</strong>svaincus, afin <strong>de</strong> se les rendre favorables85.86 R. MICHOZOUNNOU, 1992, p. 266.48Selon Romuald Michozounnou, qui a étudié le peuplement du plateau d’Abomey, toutes lesnouvelles acquisitions territoriales étaient suivies immédiatement <strong>de</strong> l’implantation du culte<strong>de</strong> Zomadonu86. Celui-ci contribuait à une prise <strong>de</strong> contrôle réel <strong>de</strong> l’espace. Ce fut le cas àAllada, Savi, Ouidah, où il est présenté comme un véritable culte « national » au service dupouvoir central. De plus, les Agasuvi, pour accroître leur pouvoir dominateur, s’appropriaientles vodous <strong>de</strong>s vaincus <strong>et</strong> les installaient <strong>dans</strong> leur royaume. Rappelons que la fondationd’Attogon a été suivie <strong>de</strong> l’installation du vodou Agasu par le roi. À Lissèzun, les informateursrencontrés ont expliqué :87 Enquête à Lissèzun, novembre 1991.Les vodous du royaume étaient installés <strong>dans</strong> les villages conquis. Il n’y avait personne poursurveiller ou contrôler, car les vodous y suffisaient. L’occupation pouvait être effective <strong>et</strong> le roienvoyait <strong>de</strong>s hommes qui <strong>de</strong>vaient s’établir <strong>et</strong> s’accor<strong>de</strong>r avec les chefs <strong>de</strong> lignages <strong>et</strong> <strong>de</strong> villages<strong>de</strong> la population locale87.49Ces exemples montrent que ces implantations royales étaient toujours associées à <strong>de</strong>sinstallations <strong>de</strong> divinités. La domination politique sur l’ensemble du territoire était assuréepar le contrôle religieux <strong>de</strong>s mouvements <strong>de</strong>s hommes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s biens.88 R. MICHOZOUNNOU, 1992, p. 185.50Des alliances matrimoniales venaient renforcer les liens nouvellement établis entre les« nouveaux venus » (migrants) <strong>et</strong> les « déjà là », entre les peuples soumis <strong>et</strong> lesvainqueurs, <strong>dans</strong> un contexte <strong>de</strong> conquête territoriale. Ceux-ci s’assuraient ainsi le soutien<strong>de</strong>s habitants. À Djija, leouémenou Xwelala envoyé par le roi Tègbessou épousa la fille duYorouba Agahun. R. Michozounnou assure que les relations entre les Agasuvi <strong>et</strong> les Za sesont détendues à la fin du XVIII e siècle après l’établissement <strong>de</strong> relations matrimoniales ; ellesont été suivies du r<strong>et</strong>our <strong>de</strong>s Za au sud du plateau où ils dominent actuellement. Les Za sontalors <strong>de</strong>venus <strong>de</strong>s éléments actifs <strong>de</strong> la colonisation fon au nord du plateau d’Abomey88. Un<strong>de</strong>rnier exemple illustre le rôle <strong>de</strong>s alliances matrimoniales : l’installation du vodou Ge<strong>de</strong>. ÀKotokpa, lorsque les chasseurs ont trouvé le vodou Ge<strong>de</strong> <strong>et</strong> en ont informé le roi, celui-cichargea l’ancêtre <strong>de</strong>s Ge<strong>de</strong>vi qui était déjà installé en ces lieux d’être responsable <strong>de</strong> cevodou. Pour consoli<strong>de</strong>r les liens, le roi donna une <strong>de</strong> ses filles en mariage à ce nouveauresponsable <strong>de</strong> Ge<strong>de</strong>. La religion, par le biais <strong>de</strong>s déplacements ou <strong>de</strong>s adoptions <strong>de</strong>divinités, <strong>et</strong> les mariages exogames étaient donc <strong>de</strong>s vecteurs d’intégration <strong>de</strong>s peuplessoumis <strong>et</strong> contribuaient ainsi à unifier le territoire dahoméen.Conclusion51L’espace <strong>de</strong> la région aja-fon s’est progressivement structuré à partir <strong>de</strong>s axes <strong>de</strong>migrations, <strong>de</strong>s réseaux <strong>de</strong> communication <strong>et</strong> <strong>de</strong>s itinéraires commerciaux qui dépendaient<strong>de</strong>s conditions écologiques (relief, hydrologie, sols, ressources) <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’émergence <strong>de</strong> pôleséconomiques, politiques <strong>et</strong> religieux. La perception <strong>de</strong> c<strong>et</strong> espace, telle qu’elle nous esttransmise par les différentes catégories <strong>de</strong> sources à notre disposition, était liée à celle <strong>de</strong>l’environnement naturel. La socialisation <strong>de</strong> l’espace, associée à celle <strong>de</strong> l’environnement, a


conduit à leur aménagement réciproque <strong>et</strong> donc à une organisation territoriale, en lien avecles activités économiques (agriculture, chasse, cueill<strong>et</strong>te, commerce) pouvant fluctuer à lafois <strong>dans</strong> le temps <strong>et</strong> <strong>dans</strong> l’espace. L’installation <strong>de</strong>s divinités, qui accompagnait celle <strong>de</strong>shommes, participait à la codification <strong>de</strong>s territoires par la mise en place <strong>de</strong> symbolesreligieux sur l’ensemble <strong>de</strong> l’espace contrôlé ou exploité (carrefours, champs, bois sacrés,places publiques <strong>et</strong> maisons). La plantation d’espèces végétales liturgiques en <strong>de</strong>s pointsparticuliers non seulement délimitait les terres mais participait aussi à c<strong>et</strong>te codificationterritoriale. Si ces symboles représentaient un marquage directement observable <strong>dans</strong>l’espace, les alliances matrimoniales, les déplacements <strong>de</strong> divinités <strong>et</strong> le contrôle spirituel <strong>de</strong>svodous <strong>de</strong>s ennemis représentaient autant <strong>de</strong> stratégies sociales visant à l’appropriation <strong>de</strong>nouveaux territoires, lors <strong>de</strong>s migrations ou <strong>de</strong>s guerres <strong>de</strong> conquêtes <strong>dans</strong> le cadre <strong>de</strong>sroyaumes.52Ces stratégies ont facilité <strong>de</strong>s recompositions i<strong>de</strong>ntitaires autour <strong>de</strong> lieux symboles,souvent marqués par <strong>de</strong>s plantes, arbres, formations végétales ou tout autre siteremarquable. La fréquentation <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> culte lors <strong>de</strong>s cérémonies participait à lareconnaissance <strong>de</strong> territoires <strong>et</strong> d’i<strong>de</strong>ntités souvent imbriqués, <strong>et</strong> dont la hiérarchie pouvaitêtre d’une gran<strong>de</strong> complexité. C<strong>et</strong>te hiérarchie pouvait aussi faire apparaître <strong>de</strong>s itinérairesreligieux, notamment lors <strong>de</strong>s intronisations <strong>de</strong>s grands dignitaires, qui reprenaient <strong>de</strong>s axes<strong>de</strong> migrations. Les pratiques religieuses perm<strong>et</strong>taient le renouvellement <strong>de</strong>s différents typesd’alliances, passées entre les hommes <strong>et</strong> les puissances surnaturelles, les premiersoccupants maîtres <strong>de</strong> la terre ou les ancêtres royaux divinisés. Le renouvellement périodique<strong>de</strong> ces pactes ajoutait une dimension temporelle au contrôle <strong>de</strong> l’espace. La renommée <strong>de</strong>certaines divinités ou la domination politique <strong>de</strong> certains États amenaient à définir <strong>de</strong>s airesd’influence(s) plus que <strong>de</strong>s territoires délimités géographiquement, influences oudominations reconnues par les dons <strong>et</strong> offran<strong>de</strong>s aux vodous, aux ancêtres royaux ou lestaxes payées aux lieux <strong>de</strong> contrôle comme les <strong>de</strong>nou. Ces postes <strong>de</strong> contrôle encorefacilement i<strong>de</strong>ntifiables grâce à la toponymie se rencontraient en divers points du territoire<strong>de</strong> l’ex-Dahomey <strong>et</strong> pas seulement aux limites ; ils montrent l’expansion spatio-temporelle<strong>de</strong> l’influence du pouvoir dahoméen qui s’exerçait avant tout sur la circulation <strong>de</strong>s hommes<strong>dans</strong> c<strong>et</strong> espace. Une géographie historique <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> culte <strong>et</strong> <strong>de</strong>s divinités, qui reste àfaire, apporterait <strong>de</strong>s éléments nouveaux pour la connaissance <strong>de</strong> l’histoire du peuplement <strong>et</strong>la compréhension <strong>de</strong>s relations entre les différentes populations qui occupent c<strong>et</strong> espace.Haut <strong>de</strong> pageBibliographieSourcesADAMS, J., capitaine, 1823, Remarks on the Country Extending from Cape Palmas to the RiverCongo, Londres, G. and W.B. Whittaker.ALBECA, A.L. 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12 Il n’est pas toujours aisé d’interpréter les termes vernaculaires. Les récits <strong>de</strong> migrationsfont souvent référence à la « forêt » existant à l’arrivée <strong>de</strong>s premiers occupants, traductiondu terme zun en fon. Or c<strong>et</strong>te référence peut être interprétée comme une volonté d’affirmerun droit sur la terre. Dans le droit coutumier, les premiers occupants sont les premiersdéfricheurs d’une végétation <strong>de</strong>nse, refuge <strong>de</strong>s animaux sauvages. Hypothèse déjà émisepar A. MIGNOT, 1985.13 G. MÉTAILIÉ, A. DA LAGE, 2005.14 Le zogbe peut également désigner un lieu où sont enterrés les êtres humains décédés <strong>de</strong>façon « anormale », suspecte, comme les noyés, les suicidés, les foudroyés, les acci<strong>de</strong>ntés.C’est un endroit chaud, zo, situé en <strong>de</strong>hors du territoire <strong>de</strong>s hommes. Ces cim<strong>et</strong>ières <strong>de</strong>smauvais morts sont <strong>de</strong>s lieux particuliers soustraits aux activités humaines. KlausHamberger a particulièrement étudié c<strong>et</strong>te catégorie d’espace qui doit être compris encomplémentarité avec une autre catégorie, les bois sacrés, perçus comme <strong>de</strong>s endroits frais<strong>et</strong> paisibles (K. HAMBERGER, 2010, p. 149).15 Les informations orales obtenues sur la chasse situent aujourd’hui les activités <strong>de</strong>schasseurs essentiellement pendant la saison sèche, pério<strong>de</strong> <strong>de</strong>s feux <strong>de</strong> brousse. Au cours <strong>de</strong>c<strong>et</strong>te saison, les animaux fuient les régions parcourues par les incendies pour se réfugier<strong>dans</strong> les zones où la végétation est plus <strong>de</strong>nse car le feu n’en atteint que les lisières. Demême, les migrations avaient probablement lieu pendant la saison sèche, pour faciliter ledéplacement <strong>et</strong> arriver avant les pluies afin <strong>de</strong> défricher <strong>et</strong> préparer les terres à cultiver.16 C’est ainsi que ces espaces sont perçus à la fois par les observateurs étrangers(R. NORRIS, 1790, p. 96 ; BULLET <strong>et</strong> CHENEVERT, 1776, p. 18) <strong>et</strong> les habitants.17 R.F. BURTON, 1864, p. 329 ; A.B. ELLIS, 1894, p. 79.18 Aujourd’hui son rôle paraît marginal <strong>et</strong> le vodou fa semble accaparer ses fonctions. Ceciest peut-être en rapport avec l’extension <strong>de</strong>s zones cultivées <strong>et</strong> l’interdiction <strong>de</strong> la chasse.19 Yveline Déverin mentionne également chez les Mossi du Burkina Faso lacomplémentarité <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux espaces qu’elle oppose même si la brousse y est perçuecomme une réserve (Y. DÉVERIN, 2004, p. 17).20 D. JUHÉ-BEAULATON, 2010, p. 27.21 A. VALLON, 1861, p. 353.22 A. LE HÉRISSÉ, 1911, p. 104.23 Le territoire <strong>de</strong>s morts est lié à celui <strong>de</strong>s vivants, il est même en continuité lorsque lespersonnes décédées sont enterrées <strong>dans</strong> le sol même <strong>de</strong> la maison, ou bien il est« parallèle » lorsqu’il accueille les morts « anormaux » <strong>dans</strong> <strong>de</strong>s espaces réservés en <strong>de</strong>hors


<strong>de</strong> l’espace habité. Des villages décimés par <strong>de</strong>s maladies ont été abandonnés par lessurvivants qui cependant ont gardé la mémoire <strong>de</strong>s lieux.24 Seuls les bois dédiés à Oro, sièges <strong>de</strong> confréries masculines secrètes, sont interditsd’accès aux femmes.25 Les bois sacrés eux-mêmes ont pu servir <strong>de</strong> zone <strong>de</strong> refuge <strong>et</strong> <strong>de</strong> défense, sous laprotection <strong>de</strong> la ou <strong>de</strong>s divinités présentes.26 M. GUILLEVIN, 1862, p. 261.27 A.L. D'ALBÉCA, 1895, p. 169.28 H. HUBERT, 1908, p. 549.29 F.E. FORBES, 1851, vol. 1, p. 68.30 R.F. BURTON, 1864, p. 172. Bush en anglais.31 J. LAFFITE, 1876, p. 41.32 P. BARRET, 1888, vol. 1, p. 155 ; H. ZÖLLER, 1884, p. 59.33 J. BERN, 1893, p. 106 ; H. ZÖLLER, 1884, p. 44.34 Nombre <strong>de</strong> toponymes se sont inspirés du nom du baobab. Sa présence en grandnombre sur un site était-elle considérée comme un indice favorable à l’installation <strong>de</strong>shommes, les pourvoyant abondamment en produits <strong>de</strong> cueill<strong>et</strong>te, fruits <strong>et</strong> feuilles étantconsommés ? À l’arrivée d’un groupe <strong>dans</strong> un nouveau lieu, les ressources immédiatementdisponibles <strong>de</strong>vaient représenter un facteur déterminant <strong>dans</strong> le choix final, au même titreque la fertilité <strong>de</strong>s terres. Les habitants expliquent la fréquence du baobab en certains lieuxpar l’occupation humaine.35 H. HUBERT, 1908, p. 130.36 CHAUDOIN, 1891, p. 43.37 C t TOUTÉE, 1895, p. 76-77.38 Les espaces cultivés à proximité <strong>de</strong>s habitations étaient le lieu privilégié <strong>de</strong>s essaisagricoles, particulièrement <strong>de</strong>s espèces introduites en cours d’acclimatation voir <strong>de</strong>domestication.39 F.E. FORBES, 1851, vol. 1, p. 70 ; A. BOUËT, 1851, p. 93.


40 A.L. D'ALBÉCA, 1895, p. 153 ; H. ZÖLLER, 1885, p. 25.41 H. ZÖLLER, 1885, p. 86.42 É. FOA, 1895, p. 412.43 E. CHAUDOIN, 1890, p. 47.44 R.F. BURTON, 1864, p. 169.45 A.B. ELLIS, 1890, p. 50.46 Dans un dossier du Journal <strong>de</strong>s Africanistes consacré à l’espace, Françoise Ugoshukwumentionne également le rôle <strong>de</strong>s marchés <strong>dans</strong> l’organisation <strong>de</strong> l’espace chez les Igbo duNigeria (F. UGOSHUKWU, 2009, p. 55).47 Ce que John Igué a également observé chez les Yoruba (O.J. IGUÉ, 1970, p. 158).48 La limite entre une protoculture fruitière ou une réelle arboriculture n’est cependant pastoujours facile à définir car ces arbres ne sont pas à proprement parler plantés mais ils fontl’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> protections <strong>et</strong> d’entr<strong>et</strong>iens qui s’apparentent aux techniques d’arboriculture. Seul lepalmier à huile fait l’obj<strong>et</strong> d’une culture.49 Les toponymes sont à la fois le refl<strong>et</strong> <strong>de</strong> la perception <strong>de</strong> l’environnement à l’arrivée <strong>de</strong>shommes <strong>et</strong> celui <strong>de</strong> leur aménagement <strong>de</strong> l’espace par la création <strong>de</strong> lieux <strong>de</strong> culte <strong>et</strong> lasélection <strong>de</strong> certaines espèces végétales comme le palmier à huile.50 Des sources écrites <strong>et</strong> orales du XIX e siècle perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> suivre le développement <strong>de</strong>c<strong>et</strong>te culture, particulièrement sur le plateau d’Abomey, aux dépens d’autres espèces commele karité, montrant un aménagement <strong>de</strong> l’espace en fonction <strong>de</strong>s intérêts économiques. VoirM. GUTTIEREZ, D. JUHÉ-BEAULATON, 2002.51 L’agriculture sur brûlis, fondée sur la rotation <strong>de</strong>s terres <strong>et</strong> <strong>de</strong>s jachères <strong>de</strong> longuedurée, générait <strong>de</strong>s déplacements quand les sols étaient épuisés. La baisse <strong>de</strong> fertilité <strong>et</strong> lasurexploitation <strong>de</strong>s terres, parfois associées à la croissance démographique, sont souventévoquées <strong>dans</strong> les traditions orales comme cause <strong>de</strong> départ.52 Abbé COURDIOUX, 1878, p. 609.53 Lieutenant-colonel GUYON, 1902, p. 52.54 Capitaine J. ADAMS, 1823, p. 61 ; A. BOUËT, 1851, p. 122 ; A. VALLON, 1861, p. 333.55 A.J. SKERTCHLY, 1874, p. 82.


56 H. ZÖLLER, 1885, p. 59.57 Aujourd’hui la pratique <strong>de</strong> la jachère a quasiment disparu <strong>dans</strong> c<strong>et</strong>te région <strong>de</strong>nsémentpeuplée.58 P. CLAVAL, 1978, p. 85-86.59 Roland Portères signale c<strong>et</strong>te utilisation du dracaena <strong>dans</strong> toute l’Afrique occi<strong>de</strong>ntale(R. PORTÈRES, 1965) <strong>et</strong> Michael Sheridan, <strong>dans</strong> un article récent, élargit son aire <strong>de</strong> diffusion àl’Afrique orientale (M. SHERIDAN, 2008).60 A. LE HÉRISSÉ, 1911, p. 43-44. Le rôle <strong>de</strong> ces géomètres n’est cité <strong>dans</strong> aucune autresource étudiée. La plante grasse citée est le Dracaena sp.61 Chevalier DES MARCHAIS, 1724, p. 100.62 A.B. ELLIS, 1893, p. 103. Par leur fonction même, les carrefours représentent <strong>de</strong>s lieuxparticuliers, au croisement <strong>de</strong> plusieurs routes, lieux <strong>de</strong> croisements, <strong>de</strong> rencontres,d’interrogations.63 Les maisons, les lieux <strong>de</strong> culte <strong>et</strong> même les individus ont aussi leur legba.64 Sont appelés Alladaxonu ceux qui sont venus d’Allada. Le terme Ayinonqui sert àdésigner les premiers arrivés signifie « terre.mère », traduit par « maître <strong>de</strong> la terre ». Dansle cadre <strong>de</strong>s royaumes <strong>et</strong> tout particulièrement celui du Dahomey, la référence au premieroccupant s’efface cependant au profit du roi qui <strong>de</strong>vient le maître <strong>de</strong> toutes les terres <strong>et</strong> <strong>de</strong>shommes qui y rési<strong>de</strong>nt. Le territoire <strong>de</strong>vient politique. Les Ayinon, dominés politiquement,ont gardé cependant une prééminence religieuse.65 La toil<strong>et</strong>te du nouveau-né est un acte rituel primordial <strong>et</strong> qui nécessite une eau pure,consacrée. Ce détail recueilli par Le Hérissé n’est pas anodin : la source est non seulementun lieu stratégique pour la domination du territoire mais c’est aussi un lieu fondamental pourla reproduction sociale.66 A. LE HÉRISSÉ, 1911, p. 284. Nagot est une autre appellation pour désigner les Yorouba.67 Le Hérissé relate aussi la prise <strong>de</strong> contrôle d’une autre source, Amodi, <strong>dans</strong> <strong>de</strong>scirconstances similaires (A. LE HÉRISSÉ, 1911, p. 284). La tradition orale que j’ai obtenueauprès <strong>de</strong> la famille Tokpo va <strong>dans</strong> le même sens que celle transmise à c<strong>et</strong> auteur.68 Chevalier DES MARCHAIS, 1724, p. 40.69 A. LE HÉRISSÉ, 1911, p. 284.70 H. ZÖLLER, 1884, p 45.


71 A. LE HÉRISSÉ, 1911, p. 87-88.72 J.A. DJIVO, 1979, vol. 1, p. 39.73 F.E. FORBES, 1851, p. 35.74 R.F. BURTON, 1864, p. 46.75 Littéralement « blanc.chef » en langue fon. Dignitaire chargé par le roi <strong>de</strong>s relations avecles Européens.76 Capitaine BERTIN, 1890, p. 390.77 J. BAYOL, 1892, p. 520.78 A. LE HÉRISSÉ, 1911, p. 89-90.79 A. BOUËT, 1851, p. 99.80 D’après la carte <strong>de</strong> Francesco Borghero (F. BORGHERO, 1866).81 A. LE HÉRISSÉ, 1911, p. 87.82 F. BORGHERO, 1866, p. 73.83 Enquête à Sèdjè Denu, juill<strong>et</strong> 1992.84 Enquête à Attogon en juill<strong>et</strong> 1991.85 A. LE HÉRISSÉ, 1911, p. 102.86 R. MICHOZOUNNOU, 1992, p. 266.87 Enquête à Lissèzun, novembre 1991.88 R. MICHOZOUNNOU, 1992, p. 185.Haut <strong>de</strong> pageTable <strong>de</strong>s illustrations


TitreLieux <strong>et</strong> noms cités <strong>dans</strong> le texteCrédits Dominique Juhé-Beaulaton (2010)URLFichierhttp://afriques.revues.org/docannexe/image/738/img-1.pngimage/png, 349kHaut <strong>de</strong> pagePour citer c<strong>et</strong> articleRéférence électroniqueDominique Juhé-Beaulaton, « <strong>Organisation</strong> <strong>et</strong> contrôle <strong>de</strong> l’espace <strong>dans</strong> l’aire culturelle aja-fon(Sud-Togo <strong>et</strong> Bénin – XVII e -XIX e siècle) », Afriques [En ligne], 02 | 2010, mis en ligne le 02février 2011, consulté le 08 août 2011. URL : http://afriques.revues.org/738Haut <strong>de</strong> pageAuteurDominique Juhé-BeaulatonChargée <strong>de</strong> recherche CNRS, Centre d’étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s mon<strong>de</strong>s africains (CEMAf)Haut <strong>de</strong> pageDroits d'auteur© Tous droits réservés

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