Numéro 34 - Le libraire

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Littérature étrangèrele libraire CRAQUEInsecteClaire Castillon, Fayard,161 p., 22,95 $Claire Castillon, inspirée par lacomplexité des rapports familiaux,met sur la lame du microscope lesrelations mère-fille. Vacillant entrehaine et amour, ce lien avec nos origines, aussi tendresoit-il, est inévitablement conflictuel. Même disséqué,il est difficile d’en voir les limites! Ces portraits demères et de filles, totalement givrées mais ô combienattachantes, sont plus croustillants les uns que lesautres. Ce recueil se dévore! Dès les premières lignes,on a la piqûre pour le style direct et ardent de cettejeune auteure dont les mots, tel un dard, touchent lavive cicatrice laissée par cette séparation affectivenous rappelant que nous sommes toujours la fille dequelqu’un! Annie Mercier le libraireLa Rumeur descortègesJean Grosjean, Gallimard, coll.Blanche, 119 p., 19,95 $Avec des poèmes à la fois en proseet en vers, Jean Grosjean (dontj’apprécie infiniment le nom) étale son Dieu sur toutesles pages dans La Rumeur des cortèges. Les amateursde poésie seront comblés dès les premiers vers, quitirent leur inspiration à même la beauté de la nature :« le vent ridait le soleil dans les flaques / mais la moitiédu ciel était plombée / le vent couchait les fumées surles toits / et tout à coup la grêle a crépité ». Puis, le tonet la forme se transforment pour laisser place à uneprose imbibée d’une intense dévotion (« Dieu, je chuchoteà ta gloire / comme les trembles quand tu lesfrôles »), où se côtoient quelques figures bibliques(« les rapports personnels avec Dieu / on en a vu apparaîtrela profondeur chez Abraham / mais avec Job onen a mesuré le déséquilibre »). Qu’ils parlent des merveillesdu monde qui nous entoure ou qu’ils relatentles derniers instants du Christ, ces poèmes font partied’une seule et même profession de foi.Charles Quimper PantouteRossinantereprend la routeJohn Dos Passos, Grasset,255 p., 24,95 $Très jeune, John Dos Passos a écumél’Espagne tout juste après laPremière Guerre mondiale. À traversle personnage de Télémaque,Dos Passos décrit la beauté des paysages poussiéreux,les interminables routes de sable, les artistes et les habitantsqui jalonnent ce pays qui l’a visiblement remué.Empruntant à Homère et à Cervantès, l’auteur plongeavec grand enthousiasme au cœur de la culture espagnole: la poésie, le théâtre, la peinture, la culture, lalangue : tout en ce pays est source de fascination pourlui. Un émerveillement présent dans chaque phrase, etqui parvient lentement à nous contaminer au fil de lalecture. Récit de voyage naïf et pur, Rossinante reprendla route est l’?uvre d’un jeune auteur de talent, d’unjeune homme qui ne sait pas encore qu’il va devenir uneimmense bête d’écriture. Charles Quimper PantouteLes Charmesdiscrets de la vieconjugaleDouglas Kennedy, Belfond,525 p., 34,95 $Quel bonheur de retrouver DouglasKennedy! Encore une fois, il réussit à nous accrocherdès la première page. Il a sa façon bien à lui de nousconter une histoire et de nous faire entrer dans la viede ses personnages. Ici, Kennedy nous dresse un portraitde la pensée conservatrice américaine actuelle.Hannah Buchan, jeune étudiante universitaire,n’aspire qu’à une chose : vivre une vie plus stable quecelle de ses parents. Son père était un activiste dans lesannées 70, et sa mère, une artiste au caractèreimprévisible. Le projet d’Hannah est d’enseigner etd’épouser un étudiant en médecine afin de vivre uneexistence tranquille. Mais voilà, dans les romans deKennedy, rien n’est jamais simple. Notre héroïne devrase battre avec la mentalité américaine de l’après-11septembre, à cause de laquelle on lui remettra sous lenez une erreur de jeunesse. À lire absolument : unroman captivant! Jean Moreau Clément MorinUn sentimentd’abandonChristopher Coake, AlbinMichel, coll. Terresd’Amérique, 304 p., 29,95 $L’abandon chez Coake, c’est uneatroce angoisse, amalgame dedétresse et d’amour, cause de cette insoutenable solitude,révélatrice de notre vérité propre. Chaque nouvellenous amène hors champ, au centre de cemoment fragile qui déclenche tout, le meilleur ou lepire. Bouleversants d’authenticité, les personnagessont incarnés dans leurs moindres détails avec la simplicitéet l’intensité requises pour nous les rendrefamiliers ; que ce soit une femme confrontée auxlimites de son affection, un homme malade choisissantde mettre fin à son combat ou un autre, à la mémoirehantée par sa jeunesse. La plume maîtrisée, l’écrituresans fioritures, la narration peu ponctuée, tel un jet,ramènent toujours à l’essentiel. Un grand écrivain!Annie Mercier le libraireTokyo décibelsHitonari Tsuji, Naïve,211 p., 36,75 $Si vous aimez l’univers de YôkoOgawa, vous aimerez celuid’Hitonari Tsuji. On retrouve dans ses romans (surtoutdans celui-ci) la même acuité sensitive et la même profondeur,avec juste ce qu’il faut d’étrangeté. DansTokyo décibels, on suit les mouvements intérieursd’Arata, dont le cœur bat au rythme des sons environnants.D’ailleurs, son travail consiste à évaluer le degréde décibels d’un quartier de Tokyo. Sa démarche vaau-delà de sa profession et devient vite une extensionde lui-même. Entre un vieil ami retrouvé et une vie decouple qui ne va nulle part, on suit avec beaucoup d’intensitéle parcours singulier de ce personnageattachant. Un livre plein d’ambiance qui doit se lirelentement si on veut en apprécier toute la musicalité.Éric Simard PantouteM A I - J U I N 2 0 0 614

Littérature étrangèrele <strong>libraire</strong> CRAQUEInsecteClaire Castillon, Fayard,161 p., 22,95 $Claire Castillon, inspirée par lacomplexité des rapports familiaux,met sur la lame du microscope lesrelations mère-fille. Vacillant entrehaine et amour, ce lien avec nos origines, aussi tendresoit-il, est inévitablement conflictuel. Même disséqué,il est difficile d’en voir les limites! Ces portraits demères et de filles, totalement givrées mais ô combienattachantes, sont plus croustillants les uns que lesautres. Ce recueil se dévore! Dès les premières lignes,on a la piqûre pour le style direct et ardent de cettejeune auteure dont les mots, tel un dard, touchent lavive cicatrice laissée par cette séparation affectivenous rappelant que nous sommes toujours la fille dequelqu’un! Annie Mercier le <strong>libraire</strong>La Rumeur descortègesJean Grosjean, Gallimard, coll.Blanche, 119 p., 19,95 $Avec des poèmes à la fois en proseet en vers, Jean Grosjean (dontj’apprécie infiniment le nom) étale son Dieu sur toutesles pages dans La Rumeur des cortèges. <strong>Le</strong>s amateursde poésie seront comblés dès les premiers vers, quitirent leur inspiration à même la beauté de la nature :« le vent ridait le soleil dans les flaques / mais la moitiédu ciel était plombée / le vent couchait les fumées surles toits / et tout à coup la grêle a crépité ». Puis, le tonet la forme se transforment pour laisser place à uneprose imbibée d’une intense dévotion (« Dieu, je chuchoteà ta gloire / comme les trembles quand tu lesfrôles »), où se côtoient quelques figures bibliques(« les rapports personnels avec Dieu / on en a vu apparaîtrela profondeur chez Abraham / mais avec Job onen a mesuré le déséquilibre »). Qu’ils parlent des merveillesdu monde qui nous entoure ou qu’ils relatentles derniers instants du Christ, ces poèmes font partied’une seule et même profession de foi.Charles Quimper PantouteRossinantereprend la routeJohn Dos Passos, Grasset,255 p., 24,95 $Très jeune, John Dos Passos a écumél’Espagne tout juste après laPremière Guerre mondiale. À traversle personnage de Télémaque,Dos Passos décrit la beauté des paysages poussiéreux,les interminables routes de sable, les artistes et les habitantsqui jalonnent ce pays qui l’a visiblement remué.Empruntant à Homère et à Cervantès, l’auteur plongeavec grand enthousiasme au cœur de la culture espagnole: la poésie, le théâtre, la peinture, la culture, lalangue : tout en ce pays est source de fascination pourlui. Un émerveillement présent dans chaque phrase, etqui parvient lentement à nous contaminer au fil de lalecture. Récit de voyage naïf et pur, Rossinante reprendla route est l’?uvre d’un jeune auteur de talent, d’unjeune homme qui ne sait pas encore qu’il va devenir uneimmense bête d’écriture. Charles Quimper Pantoute<strong>Le</strong>s Charmesdiscrets de la vieconjugaleDouglas Kennedy, Belfond,525 p., <strong>34</strong>,95 $Quel bonheur de retrouver DouglasKennedy! Encore une fois, il réussit à nous accrocherdès la première page. Il a sa façon bien à lui de nousconter une histoire et de nous faire entrer dans la viede ses personnages. Ici, Kennedy nous dresse un portraitde la pensée conservatrice américaine actuelle.Hannah Buchan, jeune étudiante universitaire,n’aspire qu’à une chose : vivre une vie plus stable quecelle de ses parents. Son père était un activiste dans lesannées 70, et sa mère, une artiste au caractèreimprévisible. <strong>Le</strong> projet d’Hannah est d’enseigner etd’épouser un étudiant en médecine afin de vivre uneexistence tranquille. Mais voilà, dans les romans deKennedy, rien n’est jamais simple. Notre héroïne devrase battre avec la mentalité américaine de l’après-11septembre, à cause de laquelle on lui remettra sous lenez une erreur de jeunesse. À lire absolument : unroman captivant! Jean Moreau Clément MorinUn sentimentd’abandonChristopher Coake, AlbinMichel, coll. Terresd’Amérique, 304 p., 29,95 $L’abandon chez Coake, c’est uneatroce angoisse, amalgame dedétresse et d’amour, cause de cette insoutenable solitude,révélatrice de notre vérité propre. Chaque nouvellenous amène hors champ, au centre de cemoment fragile qui déclenche tout, le meilleur ou lepire. Bouleversants d’authenticité, les personnagessont incarnés dans leurs moindres détails avec la simplicitéet l’intensité requises pour nous les rendrefamiliers ; que ce soit une femme confrontée auxlimites de son affection, un homme malade choisissantde mettre fin à son combat ou un autre, à la mémoirehantée par sa jeunesse. La plume maîtrisée, l’écrituresans fioritures, la narration peu ponctuée, tel un jet,ramènent toujours à l’essentiel. Un grand écrivain!Annie Mercier le <strong>libraire</strong>Tokyo décibelsHitonari Tsuji, Naïve,211 p., 36,75 $Si vous aimez l’univers de YôkoOgawa, vous aimerez celuid’Hitonari Tsuji. On retrouve dans ses romans (surtoutdans celui-ci) la même acuité sensitive et la même profondeur,avec juste ce qu’il faut d’étrangeté. DansTokyo décibels, on suit les mouvements intérieursd’Arata, dont le cœur bat au rythme des sons environnants.D’ailleurs, son travail consiste à évaluer le degréde décibels d’un quartier de Tokyo. Sa démarche vaau-delà de sa profession et devient vite une extensionde lui-même. Entre un vieil ami retrouvé et une vie decouple qui ne va nulle part, on suit avec beaucoup d’intensitéle parcours singulier de ce personnageattachant. Un livre plein d’ambiance qui doit se lirelentement si on veut en apprécier toute la musicalité.Éric Simard PantouteM A I - J U I N 2 0 0 614

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