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Lettre <strong>de</strong>l’Aca<strong>de</strong>mie <strong><strong>de</strong>s</strong>Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong>institut<strong>de</strong> <strong>France</strong>déci<strong>de</strong>urs&Artistesnuméro 65été 2011| 1


Lettre <strong>de</strong>l’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong>Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong>i n s t i t u td e F r a n c esommaire* page 2Editorial* page 3Actualités :Voyage en ChineActualitésDéci<strong>de</strong>ur, le nom a place dans la vieéconomique <strong><strong>de</strong>s</strong> arts. Dans l’histoire,le premier connu est sans douteEditorial Périclès qui gouvernera Athènes<strong>au</strong> V e siècle avant J.C. ; il avait fait<strong><strong>de</strong>s</strong> arts un objectif majeur <strong>de</strong> sa politique. D’emblée, il avait situéles relations exceptionnelles <strong>de</strong> l’artiste dans la société : les poètestragiques, Eschyle, Sophocle, Euripi<strong>de</strong>, le poète comique Aristophane,toujours présents sur les scènes du mon<strong>de</strong>, et le sculpteur Phidias,<strong>au</strong>teur <strong>de</strong> la frise <strong><strong>de</strong>s</strong> Panathénées <strong>au</strong> Parthénon, ont illustré « le siècle<strong>de</strong> Périclès ».Au long <strong><strong>de</strong>s</strong> siècles, les pouvoirs ont perpétué, à leur manière, la tradition.On lui a accolé les termes <strong>de</strong> mécénat, <strong>de</strong> mécène, en souvenir<strong><strong>de</strong>s</strong> libéralités pour les lettres et les arts d’un chevalier romain, ami <strong>de</strong>l’empereur Auguste, Caïus Clinius Maecenas.En 1945, <strong>de</strong>vant les ruines <strong>de</strong> la Secon<strong>de</strong> Guerre mondiale, le gouvernementfrançais estima <strong>de</strong>voir lier la reconstruction matérielle ethumaine à l’établissement d’une politique culturelle. Des effets heureux,l’amorce d’une décentralisation, la rénovation <strong><strong>de</strong>s</strong> musées et <strong><strong>de</strong>s</strong>opéras, l'installation d’orchestres, l’institution <strong>de</strong> centres dramatiqueset chorégraphiques, et l’ai<strong>de</strong> à la création. Surgirent Audiberti, Ionesco,Adamov, Beckett, Duras. Mécénat d’état.Cependant, l’expansion économique et les richesses générées par lasociété <strong>de</strong> consommation ont incité les chefs d’entreprises à soutenirles manifestations artistiques, conscients que leur éclat rejaillirait surla marque <strong>de</strong> leur maison. Mécénat privé.Les médias enfin, presse, radio, télévision, offraient leurs cages <strong>de</strong>résonance. Troisième pouvoir.Mais <strong><strong>de</strong>s</strong> crises financières ont peu à peu contraint ces déci<strong>de</strong>urs àréduire leur ai<strong>de</strong>. Dans ce contexte, quelle vision les artistes ont-ils<strong>de</strong> leur art, <strong>de</strong> son évolution, dans quelle démarche sont-ils engagés ?La commission <strong><strong>de</strong>s</strong> trav<strong>au</strong>x et débats <strong>de</strong> l’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong>a interrogé les représentants, en son sein, <strong><strong>de</strong>s</strong> différentes disciplinesartistiques. Dans la liberté <strong>de</strong> leur recherche, ils ont témoigné du sensprofond d’une <strong>au</strong>thentique création dans la société d’<strong>au</strong>jourd’hui.* pages 4, 5Actualités :La rénovation du salon-atelierà la Fondation Cl<strong>au</strong><strong>de</strong> Monetà Giverny* pages 6, 7Exposition :« Dessin vs photographie ?Johann-Jacob Meyer etDominique L<strong>au</strong>gé,<strong>de</strong>ux visions <strong>au</strong> sommet »à la Bibliothèque Marmottan* pages 8 à 27Dossier :« Artistes & déci<strong>de</strong>urs »* page 28Expositions :« Sculptures en mouvement <strong>au</strong>châte<strong>au</strong> <strong>de</strong> Lacoste »“ Sculpture'Elles »* page 29Actualités :NominationsPrixHommage :Seiichiro Ujiié* pages 30, 31Communications :« Culte <strong>de</strong> l’avant-gar<strong>de</strong>et culture <strong>de</strong> mort »par Jean Clair« Art et phénoméne sectaire »par Georges Fenech* page 32Calendrier<strong><strong>de</strong>s</strong> académiciensVoyage en ChineLa délégation <strong>de</strong> l’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong>, conduite par son Secrétaire perpétuel,a effectué un déplacement en Chinedu 14 <strong>au</strong> 23 mai, sur invitation <strong>de</strong> la China<strong>Arts</strong> Foundation. Durant son séjour, ponctuéd’échanges culturels et artistiques, ladélégation a rencontré à Pékin, Nantonget Hangzhou, <strong>de</strong> nombreuses personnalitésreprésentant les plus prestigieusesinstitutions chinoises vouées à l’enseignementet à la pratique <strong><strong>de</strong>s</strong> arts. Photos DRSi ce voyage fut assurément riche <strong>de</strong> rencontres, nousretiendrons particulièrement celles <strong><strong>de</strong>s</strong> 19, 21 et 22mai. Intitulé « Dialogues sur les arts <strong>au</strong> bord du lac<strong>de</strong> l’ouest », le séminaire du jeudi 19 mai a permis d’inst<strong>au</strong>rerun échange <strong>de</strong> vues sur l’art et la culture chinois et français,débat mené par l’éminent artiste chinois Fan Zeng etpar les membres <strong>de</strong> la délégation <strong>de</strong> l’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong>. Dans la soirée, la délégation a assisté à une représentationd’Opéra Yue, par la troupe « Cent petites fleurs ».Le spectacle, intitulé La Romance <strong>de</strong> Liang Shanbo et ZhuYingtai - parfois traduit par Les amants papillons -, était inspiréd’une légen<strong>de</strong> chinoise qui raconte l'histoire d'amantsdésespérés, préférant mourir que d'être séparés, à l'instar<strong>de</strong> Roméo et Juliette. Véritable monument <strong>de</strong> la mythologieet <strong>de</strong> la culture chinoise, cette légen<strong>de</strong> a été présentée en2006 <strong>au</strong> classement <strong>de</strong> l' UNESCO en vue d'entrer à sonrépertoire du patrimoine oral et immatériel.Le samedi 21 mai, la délégation <strong>de</strong> l’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong>Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong> a rencontré les dirigeants et les enseignants <strong>de</strong>théâtre, danse, be<strong>au</strong>x-arts et création artistique (y comprisl’architecture). Lors <strong>de</strong> la réunion, <strong>de</strong> nombreux projets<strong>de</strong> coopération entre les <strong>de</strong>ux institutions ont été évoqués.Dans la soirée, la délégation était invitée à la rési<strong>de</strong>nce<strong>de</strong> l’Ambassa<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> <strong>France</strong> en Chine, Madame SylvieBermann, qui s’est enquis <strong><strong>de</strong>s</strong> projets <strong>de</strong> coopération artistiqueet culturelle envisagés par l’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong>avec les institutions chinoises.Les membres <strong>de</strong> l’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong> se sont rendusle dimanche 22 mai <strong>au</strong> siège <strong>de</strong> la China <strong>Arts</strong> Foundation,situé dans la Cité interdite, où ils ont été accueillis par lePrési<strong>de</strong>nt, Xia Sijun, les vice-prési<strong>de</strong>nts, Tian Jianping etDuan Yong, ainsi que l’ensemble <strong>de</strong> l’équipe. Xia Sijun a réitéréle souhait <strong>de</strong> la CAF d’inst<strong>au</strong>rer une coopération durableavec l’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong>. Les échanges <strong>de</strong> vues ontporté sur <strong><strong>de</strong>s</strong> projets concrets qui pourraient à l’avenir voir lejour entre les <strong>de</strong>ux institutions, à savoir l’accueil d’artistes enrési<strong>de</strong>nce, l’organisation d’expositions d’artistes et l’invitation<strong>de</strong> conférenciers français en Chine, l'échange d’experts, ainsique la participation d’artistes et d’étudiants chinois <strong>au</strong>x prixet concours <strong>de</strong> l’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong>. u2 | Lettre <strong>de</strong> l’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> be<strong>au</strong>x-arts • Directeur <strong>de</strong> la publication : Arn<strong>au</strong>d d’H<strong>au</strong>terives • Comité <strong>de</strong> rédaction : délégué P<strong>au</strong>l-Louis Mignon ;l’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>Arts</strong> <strong>de</strong> Chine. Cette institution nationale,| 3membres : Louis-René Berge, Yves Boiret, Edith Canat <strong>de</strong> Chizy, Gérard Lanvin, François-Bernard Michel, Lucien Clergue Conceptionqui couvre à la fois l’enseignement et la recherche artistiques,réunit les disciplines suivantes : cinéma,générale, rédaction et coordination : Nadine Eghels • Conception graphique, réalisation : www.cmpezon.fr • Impression : Belzica - ImprimerieFrazier • ISSN 1265-3810 • Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong> 23, quai <strong>de</strong> Conti 75006 Paris • http://www.aca<strong>de</strong>mie-<strong><strong>de</strong>s</strong>-be<strong>au</strong>x-arts.fr<strong>au</strong>diovisuel,


ActualitésFon d a t i o n Cl a u d e Mo n e t à Gi v e r n yLa rénovation du salon-atelierPar Sylvie Patin, Conservateur général du patrimoine <strong>au</strong> musée d’Orsay, correspondant <strong>de</strong> l'Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong>4 |Initiée par Hugues R. Gall, membre <strong>de</strong> l’Institut, directeur<strong>de</strong> la Fondation Cl<strong>au</strong><strong>de</strong> Monet à Giverny, la rénovationdu salon-atelier a bénéficié du généreux mécénat <strong>de</strong> TheVersailles Foundation, Inc/Cl<strong>au</strong><strong>de</strong> Monet-Giverny présidéepar Barbara <strong>de</strong> Portago, fille <strong>de</strong> Florence Van <strong>de</strong>r Kemp.Depuis le 1 er avril 2011, la disposition du salon-atelierse rapproche <strong>de</strong> celle du temps <strong>de</strong> Monet. L'analyse <strong>de</strong>plusieurs photographies datant <strong>de</strong> 1920 et l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’historique<strong><strong>de</strong>s</strong> toiles du maître ont guidé ce travail <strong>de</strong> reconstitutionen permettant d’i<strong>de</strong>ntifier celles qui étaient alorsprésentes à Giverny. Une soixantaine <strong>de</strong> table<strong>au</strong>x ont étérépliqués par la galerie Troubetzkoy pour être désormaisprésentés <strong>au</strong>x cimaises du salon-atelier selon un accrochage<strong>de</strong>nse afin <strong>de</strong> retrouver l'atmosphère d'antan, dans le soucidu grand respect <strong>de</strong> la vérité historique. Chaque répliquea été exécutée avec une technique qui assure la fidélité parrapport à l'œuvre originale : les pigments photographiques<strong>de</strong> cette <strong>de</strong>rnière ont été imprégnés sur une toile, peinteEn h<strong>au</strong>t : Monet dans son salon-atelier vers 1915-1920.Photo Collection Philippe Piguet.Ci-contre : le salon-atelier dans l'état <strong>de</strong> 1980.Photo Fondation Cl<strong>au</strong><strong>de</strong> Monet.À droite : le même lieu, dont la rénovation (2011)restitue l'atmosphère chère <strong>au</strong> peintre <strong>de</strong> Giverny.Photo Fondation Cl<strong>au</strong><strong>de</strong> Monet.Dans son salon-atelier à Giverny, le peintreaimait à accueillir amis, collectionneurs etmarchands. Les photographies d'œuvres <strong>de</strong>Monet que Gérald van <strong>de</strong>r Kemp y avait placéeslorsqu'il avait réveillé Giverny en 1980avaient vieilli et s'étaient oxydées… Ce lieuchargé d'âme, à présent rénové, nous replongedans l’atmosphère que Monet avait créée.ensuite selon cette empreinte pour faire « revivre » cepremier atelier <strong>de</strong> Monet à Giverny davantage qu'avec <strong><strong>de</strong>s</strong>reproductions photographiques dénuées <strong>de</strong> matière picturale.La localisation actuelle <strong><strong>de</strong>s</strong> œuvres originales est préciséesur <strong><strong>de</strong>s</strong> fiches explicatives à la disposition <strong><strong>de</strong>s</strong> visiteursafin <strong>de</strong> les inciter à aller voir et revoir les toiles originales <strong>de</strong>Monet <strong>au</strong>jourd'hui dispersées dans les collections publiqueset privées du mon<strong>de</strong> entier ; plus d'une vingtaine <strong>de</strong> toilesprovenant <strong>de</strong> l'important legs en 1966 <strong>de</strong> Michel Monet,second fils <strong>de</strong> l'artiste, conservé <strong>au</strong> Musée MarmottanMonet ont été répliquées, invitant les visiteurs à se rendredans ce musée.Monet manifestait son attachement à certaines esquissesou à <strong><strong>de</strong>s</strong> toiles <strong>de</strong> jeunesse, dans le souvenir <strong>de</strong> Camille, sapremière épouse prématurément disparue qu'il avait représentéesur son lit <strong>de</strong> mort. Apparaissent <strong>au</strong>ssi les portraits<strong><strong>de</strong>s</strong> fils du peintre, Jean et Michel, et ses « essais <strong>de</strong> figure enplein air » d'après Suzanne, une <strong><strong>de</strong>s</strong> filles d'Alice Hoschedé(Alice <strong>de</strong>viendrait la secon<strong>de</strong> épouse <strong>de</strong> Monet). Monet avaittenu à gar<strong>de</strong>r <strong><strong>de</strong>s</strong> témoins <strong>de</strong> ses campagnes <strong>de</strong> peinture :champs <strong>de</strong> tulipes en Hollan<strong>de</strong>, jardins <strong>de</strong> Bordighera,motifs enneigés rapportés <strong>de</strong> Norvège, vues <strong>de</strong> Venise ou <strong>de</strong>la Tamise, ou encore une version <strong>de</strong> chacune <strong>de</strong> ses ''séries''(Meules, Peupliers, Cathédrales …), sans oublier <strong><strong>de</strong>s</strong> paysages<strong>de</strong> Normandie (Honfleur, Pourville...).Confiée à Hubert Le Gall, scénographe <strong>de</strong> la récente exposition« Cl<strong>au</strong><strong>de</strong> Monet » <strong>au</strong>x Galeries nationales du GrandPalais, la rénovation du salon-atelier, loin d'être une créationex nihilo, réutilise quatre-vingt pour cent du mobilier restésur place. En détaillant les photographies <strong>de</strong> 1920, HubertLe Gall a pu faire réaliser à l'i<strong>de</strong>ntique les éléments <strong>de</strong>mobilier disparus : notamment une méridienne qu'il a faitrecouvrir d'un tissu, édité par la maison Le Manach, <strong>au</strong>xmotifs <strong>de</strong> bleuets et <strong>de</strong> roses faisant écho à l’iconographie<strong>de</strong> Monet et à son jardin tout en rappelant le tissu d’ameublementfleuri <strong><strong>de</strong>s</strong> photographies <strong>de</strong> 1920. Des cadres <strong>de</strong>cette époque, <strong>au</strong> cuivre terni, ont été recherchés chez lesantiquaires. Hubert Le Gall a conçu son intervention commeun « coup d’éclat et <strong>de</strong> fraîcheur » apporté à ce salon-atelier,lieu d’une intimité retrouvée avec Cl<strong>au</strong><strong>de</strong> Monet. uwww.fondation-monet.fr| 5


ExpositionBib l i o t h è q u e Ma r m o t ta nDessin vs photographie ?Johann-Jacob Meyer et Dominique L<strong>au</strong>gé, <strong>de</strong>ux visions <strong>au</strong> sommet6 |Durant tout l’été, la Bibliothèque P<strong>au</strong>l-Marmottan à Boulogne présente uneexposition originale mettant en perspectivele regard d’hier et d’<strong>au</strong>jourd’hui.Cette étonnante exposition met en parallèle <strong><strong>de</strong>s</strong> paysagessuisses et italiens <strong><strong>de</strong>s</strong>sinés <strong>au</strong> XIX e siècle parJohann Jacob Meyer et peints par Lancelot ThéodoreTurpin <strong>de</strong> Crissé, avec <strong><strong>de</strong>s</strong> photographies <strong>de</strong> ces mêmes sites,prises récemment par le photographe Dominique L<strong>au</strong>gé (néen 1958). Johann Jacob Meyer (1787-1858) a publié ses <strong><strong>de</strong>s</strong>sinsdans Voyage pittoresque dans le Canton <strong><strong>de</strong>s</strong> Grisons enSuisse (1826) et Voyage pittoresque en Valteline (1831). Dansce type <strong>de</strong> récits, genre littéraire né <strong>au</strong> siècle <strong><strong>de</strong>s</strong> Lumières,chaque lieu visité – sites et points <strong>de</strong> vue remarquables – faitl’objet d’une étu<strong>de</strong> savante, illustrée par <strong><strong>de</strong>s</strong> gravures. Àpartir <strong>de</strong> ces publications, fameuses tout <strong>au</strong> long du XIXesiècle, la Fondation Valteline, basée à Sondrio près <strong>de</strong> Milan,a commandé, en 2007, <strong>au</strong> photographe Dominique L<strong>au</strong>géune série <strong>de</strong> clichés inspirés <strong><strong>de</strong>s</strong> sites pittoresques illustréspar Johann Jacob Meyer. L’artiste a suivi à la trace le peintresuisse sur les anciennes routes du passage <strong><strong>de</strong>s</strong> Alpes, réalisantainsi plus <strong>de</strong> 70 grands tirages photographiques d’aprèsnature. En 2010, Dominique L<strong>au</strong>gé exécute dans le mêmeesprit, pour la Ville <strong>de</strong> Boulogne-Billancourt, une série <strong>de</strong>photographies <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> Sion, située dans le canton duValais en Suisse. Il choisit cette fois comme point <strong>de</strong> confrontationla peinture <strong>de</strong> Lancelot Théodore Turpin <strong>de</strong> Crissé(1782-1859), Vue <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> Sion dans le Valais (1806)conservée à la Bibliothèque P<strong>au</strong>l-Marmottan. Au total, plus <strong>de</strong>90 photographies <strong>de</strong> Dominique L<strong>au</strong>gé tirées sur un papierfait à la main sont mises en regard du table<strong>au</strong> et <strong><strong>de</strong>s</strong> gravuresqui les ont inspirées. Unique en son genre, cette expositionpropose une comparaison et une méditation sur la continuitéet les évolutions du paysage à travers les siècles. uDu jusqu'<strong>au</strong> 23 octobre 2011www.boulognebillancourt.com,wrubrique « culture », « les musées »“Meyer et L<strong>au</strong>gé dans leurs passages comparés <strong><strong>de</strong>s</strong>Alpes s’imposent comme <strong><strong>de</strong>s</strong> témoins privilégiés <strong>de</strong>l’état et <strong>de</strong> la vie <strong><strong>de</strong>s</strong> paysages […] Le dialogue Meyer / L<strong>au</strong>gédoit être entendu avec le plus grand respect tant il relève<strong>de</strong> l’essentiel : notre perception <strong>de</strong> la durée du mon<strong>de</strong> et <strong><strong>de</strong>s</strong>es péripéties. Dominique L<strong>au</strong>gé a bien compris quel étaitl’enjeu et n’a pas voulu troubler l’expérience par l’impositiond’une sensibilité trop personnelle. Il a respecté à la lettre lecontrat et tenu à mettre ses pieds dans les marques <strong>de</strong> Meyer.Retrouver, se mettre <strong>au</strong> même endroit, photographier d’oùMeyer <strong><strong>de</strong>s</strong>sinait sa vue, tel était le propos.Il est déjà admirable que Dominique L<strong>au</strong>gé ait su et pupratiquement chaque fois retrouver le point sensible <strong>de</strong> lavue adoptée par Meyer, comme si l’être-là d’un paysagedéfiait les métamorphoses <strong>de</strong> la durée et la brutalité <strong><strong>de</strong>s</strong>hommes, <strong>au</strong>x côtés <strong><strong>de</strong>s</strong> bouleversements climatiques quel’on connaît, et cette permanence rassérène. Ces passagescomparés <strong><strong>de</strong>s</strong> Alpes suisses racontent <strong>au</strong>tant la continuitéque la rupture et plus celle-là que celle-ci. […]Les paysages <strong>de</strong> Meyer sont calmes, bucoliques, loin <strong><strong>de</strong>s</strong>tourments <strong>de</strong> la montagne sublime <strong><strong>de</strong>s</strong> romantiques P<strong>au</strong>lHuet (1803-1869) ou Alexandre Calame (1810-1864), ou<strong><strong>de</strong>s</strong> visions d’un William Turner (1775- 1851) ou d’un JohnMartin (1789-1854), loin <strong>de</strong> la montagne philosophique <strong><strong>de</strong>s</strong>Allemands Caspar David Friedrich (1774-1840) et Carl-Gustav Carus (1789-1869) ou même <strong><strong>de</strong>s</strong> lithographies <strong><strong>de</strong>s</strong>Voyages pittoresques et romantiques <strong>de</strong> l’ancienne <strong>France</strong>qui donneront une image plus tourmentée <strong><strong>de</strong>s</strong> paysages <strong>de</strong>montagnes françaises <strong><strong>de</strong>s</strong> Pyrénées ou <strong>de</strong> l’Auvergne. Lamontagne reste donc pour quelque temps encore un motif<strong>de</strong> décor dans le lointain attendant l’heure <strong><strong>de</strong>s</strong> ThéodoreRousse<strong>au</strong>, Gustave Doré et Eugène Viollet-le-Duc. […]Finalement, ne sont-ce pas ces fameuses routes qui sontle véritable sujet <strong>de</strong> ses illustrations ? Ces routes quidésenclavent <strong><strong>de</strong>s</strong> régions longtemps rendues inaccessiblespar une nature hostile et indomptée, traversent cespaysages <strong>de</strong> montagne et <strong>de</strong>viennent le fil conducteur duvoyageur qui se doit alors d’en connaître tous les méandreset les curiosités. […]Curieusement, les photographies <strong>de</strong> Dominique L<strong>au</strong>gé,prises <strong>au</strong> même endroit que les <strong><strong>de</strong>s</strong>sins <strong>de</strong> Meyer, donnent<strong>au</strong> motif <strong>de</strong> la montagne une importance qu’il n’a pas dansles gravures <strong>de</strong> l’artiste suisse. Les routes <strong>de</strong> Meyer sont<strong>de</strong>venues les montagnes <strong>de</strong> L<strong>au</strong>gé ».Bruno Foucart, directeur scientifique <strong>de</strong> la BibliothèqueP<strong>au</strong>l-Marmottan, extrait du catalogue La montagne,le peintre et le photographe)En h<strong>au</strong>t : D’après Johann Jacob Meyer (1787-1858), Le grand glacier <strong>de</strong> Madatsch,fac-similé tiré <strong>de</strong> Voyage pittoresque sur la nouvelle route <strong>de</strong>puis Glurns en Tyrol, Zurich, J. J. Meyer, 1831, 21 x 17 cm.© Sondrio, Credito Valtellinese Art CollectionCi-<strong><strong>de</strong>s</strong>sus : Dominique L<strong>au</strong>gé, Le grand glacier <strong>de</strong> Madatsch, 2007, photographie, pigments giclés sur papier fait à la main, 47,5 x 75 cm.© Sondrio, Credito Valtellinese Art Collection| 7


Dossierdéci<strong>de</strong>urs&ArtistesLe choix d’un tel thème <strong>de</strong> réflexion par la Commission <strong><strong>de</strong>s</strong> Débats <strong>de</strong> l’Académie<strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong>, ne va pas sans risque et ceux <strong>de</strong> ses membres qui ont bien voulucontribuer à ce numéro <strong>de</strong> La Lettre - et qui n’engagent que leur responsabilité -, ensont parfaitement conscients.Car son intitulé pose implicitement cette question : qui et quoi, s’interpose entre lesARTISTES, créateurs, et ceux qui ont pouvoir <strong>de</strong> DéCIDER, que telle œuvre serareconnue, médiatisée, achetée, ou ne le sera pas ?Voilà une interrogation <strong>au</strong>ssi ancienne que la pratique <strong><strong>de</strong>s</strong> arts, mais plus actuelle quejamais peut-être en ce temps où face <strong>au</strong>x artistes, se dressent les déci<strong>de</strong>urs.Mille réponses sont possibles, avec leur part <strong>de</strong> recevable et <strong>de</strong> contestable, maisle triumvirat que constituent l’Etat, les mécènes et les médias est plus que jamaisdéci<strong>de</strong>ur, non pas en traçant une frontière entre ce qui serait <strong>de</strong> l’art et ce qui ne leserait pas, mais en élisant les artistes qui ont droit à l’existence et à la reconnaissancedu grand public. Redoutable pouvoir…Les créations fondées sur le rien, et se revendiquant <strong>de</strong> la perte ou <strong>de</strong> l’absence<strong>de</strong> sens, sont souvent décrétées « œuvres d’art » à coup <strong>de</strong> battage médiatique. Letemps <strong>de</strong> réalisation, qui fut longtemps un critère sûr, est <strong>au</strong>jourd’hui délégitimé parla préférence donnée <strong>au</strong> provisoire, alors que l’art fut un acte <strong>de</strong> résistance contrel’éphémère et la mort !Les opinions formulées dans ce numéro <strong>de</strong> La Lettre encourent le risque <strong>de</strong> passerpour <strong><strong>de</strong>s</strong> « jugements », exposant à toutes critiques. Si inversement, l’institution académique<strong>de</strong>meurait silencieuse sur l’évolution esthétique <strong>de</strong> son temps, elle laisseraitcroire qu’elle souffre simultanément <strong>de</strong> cécité et surdi-mutité.L’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong> ne se sent <strong>au</strong>cune prétention à juger, mais ses artistes,qui œuvrent et observent les œuvres, sont absolument légitimes pour dire et écrirecomment ils voient les œuvres <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>au</strong>tres. Voilà le point <strong>de</strong> départ.Au final, le plus artistiquement correct - et le plus décevant <strong>au</strong>ssi - serait <strong>de</strong> conclure<strong><strong>de</strong>s</strong> avis extrêmes par un « consensus mou » qui ne fâcherait personne.Chacun <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>au</strong>teurs <strong>de</strong> ce numéro <strong>de</strong> La Lettre a spontanément et librement expriméici son point <strong>de</strong> vue, sans arrière pensée <strong>de</strong> plaire ou déplaire, car les critères <strong>de</strong> cequi fait <strong>au</strong>jourd’hui « œuvre d’art » sont discutables à l’infini. Selon les alternatives :le be<strong>au</strong> et le conceptuel, émotion artistique et qualité esthétique, travail élaboré etimprovisé, l’événementiel et l’éphémérité, galeries et « industrie culturelle ».Les <strong>au</strong>teurs <strong><strong>de</strong>s</strong> articles <strong>de</strong> ce numéro <strong>de</strong> La Lettre évoquent ces alternatives avec leursensibilité et leur expérience, <strong>de</strong> façon argumentée mais avec une certaine véhémence,parfois violente. Pourquoi pas ?8 |Jean Dewasne (1921-1999),Fresque monumentale,Gran<strong>de</strong> Arche <strong>de</strong> la Défense (1989), Paris.Photo Defacto - Les PictographistesPar François-Bernard Michel, Membre libre,Vice-prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> l'Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong>| 9


DossierQuelques propos surl’œuvre d’art <strong>au</strong>jourd’hui10 |Par François-Bernard Mâche, membre <strong>de</strong> la section <strong>de</strong> Composition musicaleLa constante contradiction qui consiste à revendiquer<strong>au</strong> lieu d’une œuvre un acte éphémère, un geste, uncri, tout en se souciant <strong>de</strong> sa signature, <strong>de</strong> son entréedans une collection, et <strong>de</strong> la vente <strong>de</strong> produits dérivés, illustrebien l’emprise du marché sur la création. Elle illustre <strong>au</strong>ssiun renoncement à <strong><strong>de</strong>s</strong> symbolisations partagées : puisquel’époque ne s’accor<strong>de</strong> plus sur rien, contentons-nous <strong>de</strong> faire<strong>de</strong> la décoration, <strong>de</strong> « l’événementiel », du divertissement, dupapillonnement multimedia. C’est souvent un nihilisme <strong>de</strong>faça<strong>de</strong> qui l’emporte mais l’on ne perd quand même pas <strong>de</strong>vue l’intérêt financier ! On n’a presque rien à dire, et il n’y apresque rien à voir, mais si quelqu’un achète, tant mieux ! Laspéculation est favorisée par la complicité ou la soumission<strong>de</strong> ceux qui exposent et espèrent gagner eux <strong>au</strong>ssi.La marchandisation <strong>de</strong> ce qui, à l’origine, se définit souventcomme un art spontané pose évi<strong>de</strong>mment problème.Cependant, la situation que nous évoquons n’est pas nouvelle.Les déci<strong>de</strong>urs ont toujours effectué <strong><strong>de</strong>s</strong> choix sans tenirgrand compte <strong><strong>de</strong>s</strong> créateurs. Louis XIV dialoguait peut-êtreavec les artistes mais surtout il leur imposait ses programmesesthétiques. Il est vrai que lui, <strong>au</strong> moins, connaissait le <strong><strong>de</strong>s</strong>sin,le théâtre, la danse et la musique.Il nous f<strong>au</strong>t distinguer le rôle <strong><strong>de</strong>s</strong> mécènes à travers certainesexpositions affligeantes à Versailles par exemple, et celui<strong><strong>de</strong>s</strong> fonctionnaires <strong>de</strong> la culture. Ce sont en effet <strong>de</strong>ux catégories<strong>de</strong> partenaires artistiques qui n’ont pas nécessairementles mêmes intérêts !Cette préc<strong>au</strong>tion prise, nous <strong>de</strong>vons regretter un conformismeartistique qui s’explique en partie parce que les inspecteursont plus volontiers <strong><strong>de</strong>s</strong> contacts avec ceux <strong><strong>de</strong>s</strong> galeristesdont l’influence est la plus gran<strong>de</strong>. Et ceux-ci préfèrent misersur <strong><strong>de</strong>s</strong> valeurs sûres, et pour c<strong>au</strong>se : ce sont eux qui créent enpartie cette assurance. Mais il f<strong>au</strong>t distinguer les déci<strong>de</strong>urs etle public qui, heureusement, adhère parfois à ce que l’on n’apas pris la peine <strong>de</strong> lui présenter !En musique, les enjeux financiers sont presque insignifiantssi on les compare avec ce qui se passe pour les artsvisuels. Mais il y a <strong><strong>de</strong>s</strong> conformismes assez puissants etsouvent antagonistes. En caricaturant un peu, on a : unclan formaliste <strong><strong>de</strong>s</strong> héritiers <strong>de</strong> l’avant-1968, un clan <strong>de</strong>nostalgiques <strong>de</strong> l’expression tonale, et celui <strong><strong>de</strong>s</strong> historienspour qui tout ce qui s’est passé en musique <strong>de</strong>puis 150 ansne compte guère. Ils défen<strong>de</strong>nt leurs cita<strong>de</strong>lles et pensentleur action plus en termes <strong>de</strong> pouvoir que <strong>de</strong> rêves esthétiques.Les médias, quant à eux, ont le plus souvent abdiquéleur fonction <strong>de</strong> tribune critique. Ils ont substitué <strong><strong>de</strong>s</strong>publicités déguisées <strong>au</strong> rôle <strong>de</strong> médiateurs indépendants quejouaient <strong>au</strong>trefois <strong><strong>de</strong>s</strong> gens à la fois ouverts et compétentscomme un Jacques Longchampt ou un M<strong>au</strong>rice Fleuret. Lestélévisions ne connaissent que les valeurs commerciales dushow-business, et la presse leur emboîte le pas, en essayant<strong>de</strong> survivre grâce à <strong><strong>de</strong>s</strong> concessions <strong>au</strong> goût supposé – ouimposé - du grand public. Mais on peut dire <strong>au</strong>ssi que lafaiblesse <strong><strong>de</strong>s</strong> enjeux commerci<strong>au</strong>x pour la musique la plusélaborée a justement permis la survie d’un art savant, quitouche malgré tout plus <strong>de</strong> public qu’il ne l’a jamais fait <strong>au</strong>cours <strong><strong>de</strong>s</strong> siècles précé<strong>de</strong>nts. Seulement cette survie estfragile, et <strong>de</strong> surcroît elle agace certaines ve<strong>de</strong>ttes qu’onvoit volontiers revendiquer leur ignorance – réelle ou parfoisaffectée - pour faire croire à leur génie spontané.Sur la définition <strong>de</strong> l’œuvre d’artIl f<strong>au</strong>t insister sur l’héritage tout en soulignant que lepassé prend parfois trop <strong>de</strong> place et bloque l’innovation.On défend le patrimoine parce que celui-ci ne s’enrichitpas ; on se crispe sur le passé parce que l’on ne sait plus ceque l’on pourrait vouloir dire ! Les contradictions que nousobservons dépassent, je pense, le simple marché<strong>de</strong> l’art. L’absence <strong>de</strong> croyances partagées laisseun vi<strong>de</strong> dans lequel s’installe l’arbitraire sans quela marchandisation ne soit nécessairement enc<strong>au</strong>se. La réception <strong><strong>de</strong>s</strong> œuvres, conformisme <strong>de</strong>la critique mise à part, est <strong>de</strong>venue difficile f<strong>au</strong>ted’un langage commun pour l’ensemble <strong><strong>de</strong>s</strong> arts.Ainsi près du Palais Royal on trouve d’un côté les colonnes<strong>de</strong> Buren et <strong>de</strong> l’<strong>au</strong>tre une bouche <strong>de</strong> métro décorée parJean-Michel Othoniel.L’œuvre d’art se définit entre <strong>au</strong>tres par sa réception. Sil’apprentissage artistique dans les écoles n’est plus celui d’unepratique mais celui d’un discours sur l’œuvre, c’est sans douteparce que ce que dit l’œuvre n’est plus assez clair : un langagedoit être partagé. Comme dans le Chef-d’œuvre inconnu <strong>de</strong>Balzac, le commentaire se substitue en somme à l’œuvre invisible<strong>de</strong> Frenhofer. L’art « conceptuel » est malheureusement,dans la plupart <strong><strong>de</strong>s</strong> cas, <strong>au</strong>ssi dépourvu d’idées profon<strong><strong>de</strong>s</strong> qued’imagerie suggestive, dans ses œuvres « désœuvrées ».J’ai reçu récemment un DVD d’une <strong>de</strong> mes œuvres pourpercussion seule accompagnée par une vague oscillationélectronique. Les <strong>au</strong>teurs allemands souhaitaient avoir monavis et pensaient en toute bonne foi me rendre hommage.Pour be<strong>au</strong>coup, l’idée d’œuvre n’existe plus. On parle plusvolontiers <strong>de</strong> « produits culturels », qu’on peut démonter etdénaturer sans scrupules, dans une pratique d’ « artisanatfurieux », si j’ose ainsi détourner l’expression <strong>de</strong> René Char.Loussier déjà pensait faire be<strong>au</strong>coup pour l’<strong>au</strong>dience <strong>de</strong> Bachlorsqu’il le déguisait en jazzman.L’artiste effectue un travail commun à d’<strong>au</strong>tres corps <strong>de</strong>métiers comme celui <strong><strong>de</strong>s</strong> artisans. Si cette distinction s’est peuà peu établie dans notre culture, il f<strong>au</strong>drait en réexaminer lesc<strong>au</strong>ses, <strong>au</strong> moment où elle est souvent contestée. Le travail neme paraît pas un critère très fiable. Grâce à l’in<strong>format</strong>ique, cequi prenait <strong><strong>de</strong>s</strong> heures se fait souvent en quelques minutes.Cela n’efface pas forcément la valeur artistique <strong>de</strong> l’œuvreproduite, mais cela bouleverse la notion <strong>de</strong> travail. Certainsartistes travaillent be<strong>au</strong>coup, d’<strong>au</strong>tres se vantent d’improviserà toute allure. La quantité <strong>de</strong> travail n’est pas un critèresuffisant <strong>de</strong> définition, ni esthétiquement ni moralement. Sanature intervient <strong>au</strong>ssi. Il m’arrive <strong>de</strong> travailler à l’ancienne,sans piano, sans ordinateur, pour élaborer ou restituer uneintuition sonore. Le public n’a pas à se soucier <strong>de</strong> ce qui sepasse dans l’atelier, c’est le résultat qui compte.Quant <strong>au</strong> critère du matéri<strong>au</strong>, il ne convient pas pourtous les arts. En musique on ne peut pas le prendre encompte puisque le musicien crée en gran<strong>de</strong> partie à la fois levocabulaire et la syntaxe. Aujourd’hui très peu <strong>de</strong> matéri<strong>au</strong>xs’imposent d’avance à son action.Faire œuvre artistique c’est surmonter une résistance,externe ou intérieure, et en général les <strong>de</strong>ux à la fois. C’estseulement en ce sens que l’on peut parler <strong>de</strong> matéri<strong>au</strong>x, ouencore d’ascèse (mais le terme est un peu emphatique). Dans“L’œuvre d’artse définit entre<strong>au</strong>tres par saréception.le travail il f<strong>au</strong>t <strong>au</strong>ssi prendre en compte la valeur d’échange,et l’ascèse se situe en-<strong>de</strong>hors <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sociale. Une<strong>au</strong>tre dimension n’est pas moins importante : celle du risqueet du doute. Celle-là n’appartient à l’artisan ou à l’ingénieurqu’à propos d’obstacles pratiques à vaincre. La distinctionentre artiste et artisan n’est pas un problème <strong>de</strong> hiérarchie<strong><strong>de</strong>s</strong> valeurs, mai <strong>de</strong> finalité dans l’action.L’art est une façon d’interpréter la vie et si”possible <strong>de</strong> l’améliorer. C’est en ce sens qu’ilest une transcendance et non une convention.Pensons à ce qu’en dit l’<strong>au</strong>teur <strong>de</strong> L’Intemporel.« la valeur énigmatique <strong>de</strong> l’art » <strong>de</strong>meure, mêmesi Malr<strong>au</strong>x souligne et dépasse la contradictionqui existe désormais entre une définition <strong>de</strong>l’art universaliste léguée par la philosophie classique etcelle, contingente, fonctionnaliste, qu’impose le mon<strong>de</strong>industriel. Cependant, lorsqu’il souligne qu’ « il y <strong>au</strong>ra lieu <strong><strong>de</strong>s</strong>uivre attentivement l’affaiblissement progressif <strong>de</strong> la notiond’œuvre d’art et l’affirmation correspondante <strong>de</strong> celle d’objet», c’est paradoxalement pour mieux affirmer la permanence<strong>de</strong> quelque chose qui dépasse le lieu et le temps. L’art esttoujours, selon lui, un défi à la mort et <strong>au</strong>x dieux.Définir l’art comme une transcendance reste cependantencore insuffisant. Cette définition ne prend en compte ni ladimension sociale,ø ni la dimension économique si souvent àla fois inéluctable et pernicieuse. En fait, ce que l’on reproche<strong>au</strong> marché <strong>de</strong> l’art c’est surtout son caractère arbitraire, le faitque l’on ven<strong>de</strong> <strong>de</strong> pures conventions sans contenu, commeune sorte d’émission <strong>de</strong> f<strong>au</strong>sse monnaie sans garanties.L’œuvre d’art a vocation à révéler <strong><strong>de</strong>s</strong> vérités inscrites dansle psychisme humain. Elle a un ancrage anthropologique, sanslequel les conventions arbitraires ne vont pas plus loin que <strong><strong>de</strong>s</strong>effets <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>. On a en effet sans doute exagéré l’<strong>au</strong>tonomie<strong>de</strong> la culture. La séparation entre l’œuvre d’art et l’objetfonctionnel ou folklorique, par exemple, est parfois difficileà déterminer. Il existe probablement un certain nombred’archétypes universels que l’homme ranime et renouvellepour raconter le mon<strong>de</strong> dans lequel il vit. Ni la mo<strong>de</strong>rnitémilitante, ni la nostalgie néo-classique, ni la superficialité <strong><strong>de</strong>s</strong>mo<strong><strong>de</strong>s</strong> commerciales ne répon<strong>de</strong>nt <strong>au</strong>thentiquement à cefait universel. On ne croit plus que la musique et les arts <strong>de</strong>l’Europe soient <strong><strong>de</strong>s</strong> étalons universels. La relativité culturelleest une prise <strong>de</strong> conscience soli<strong>de</strong>ment installée. Mais ce n’estpas sur le terrain <strong><strong>de</strong>s</strong> rivalités culturelles et politiques que<strong>de</strong>vraient se poser les enjeux artistiques. Depuis Malr<strong>au</strong>x -encore lui - trop peu <strong>de</strong> voix s’élèvent pour rappeler le poidsfondamental <strong>de</strong> ce qu’il appelait les « formes primordiales »,que l’être humain porte en lui, et qui transcen<strong>de</strong>nt les civilisations.J’ai pour ma part écrit <strong>de</strong>ux livres et be<strong>au</strong>coup <strong>de</strong>partitions pour explorer leur puissance en musique. uà g<strong>au</strong>che : Daniel Buren, Les Colonnes, 1986,cour d’honneur du Palais Royal, à Paris.Photo Frédéric Val<strong><strong>de</strong>s</strong> et Pierre-Emmanuel Malissin| 11


DossierArchitecture,chute ou marécage ?Vers une disparition possibledu milieu professionnelPar Cl<strong>au</strong><strong>de</strong> Parent, membre <strong>de</strong> la section d’Architecture“le tour <strong>de</strong> Paris, on trouveraUn milieu professionnel quel qu’il soit est fondé sur grands ensembles, nos banlieues inhabitables, nos transports<strong><strong>de</strong>s</strong> jeunes architectes souffre et30.000 architectes un champ <strong>de</strong> ruines dont personnen’ose plus parler et queune nécessité <strong>de</strong> protection et, par voie <strong>de</strong> conséquence,est obligé <strong>de</strong> pratiquer l’entrai<strong>de</strong>. Mais, Il y a désormais pour la population une véritable souftendreà survivre dans la dignité. Les signifiantes et <strong>de</strong> l’on détruira en douceur dansdéficients etc.)s’étouffe, personne ne peut pré-privés d’actionsface <strong>au</strong>x circonstances d’<strong>au</strong>jourd’hui, il doit avant tout sortir<strong>de</strong> ce cadre pour, selon Rudy Ricciotti, s’agiter, afin <strong>de</strong> vers l’architecte, même s’il a été complice <strong>de</strong> ces erreursjamais à corriger cette lacune.france du vécu que personne ne met en doute. Se retournercahiers <strong>de</strong> la jeune architecture ne suffirontles années à venir en attendantque récidive, hélas, une<strong>de</strong>man<strong><strong>de</strong>s</strong> à unnive<strong>au</strong> correct.faire naître le besoin d’architecture ainsi que les conditions (volontairement ou non) est impossible, voire injurieux,La conclusion <strong>de</strong> cette hiérarchie extrêmement discontinueentre les très grands architectes (cabinets <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong>nouvelle monstruosité architecturale<strong>de</strong> l’administration.”favorables à son exercice (R. Ricciotti, HQE Les renards du parce qu’il ne dispose plus d’<strong>au</strong>cun pouvoir, ni sur l’aménagementurbain, ni sur l’organisation du territoire. Il en a été100 à 300 collaborateurs et <strong>au</strong>-<strong>de</strong>là… ) et les petits (<strong>de</strong> dixtemple, éditions Al Dante/clash).Aujourd’hui <strong>de</strong>vant le grand gâte<strong>au</strong> du Grand Paris, oùIl f<strong>au</strong>t donc exalter l’architecture, la parer d’armes et <strong>de</strong> totalement <strong><strong>de</strong>s</strong>saisi, ce qui fait que l’Etat et le Privé règnentà vingt employés… ) est <strong>de</strong> détruire à terme l’ensemble duseront les petits, les doux, les timi<strong><strong>de</strong>s</strong>, les sensibles, ceuxqualités aptes à agir sur :en maîtres sur le milieu professionnel. L’Ordre et le Syndicatmilieu professionnel en se calquant ainsi sur la société civilequi vivent en symbiose avec la pensée, ceux qui travaillent1)Les pouvoirs distributeurs <strong>de</strong> projets, qu’ils soient font ce qu’ils peuvent, c’est-à-dire rien <strong>de</strong> décisionnaire.où les inégalités entre les riches et les p<strong>au</strong>vres n’ont jamaisdans la vision et non dans la solution technocratique, ilsd’ordre public ou privé.L’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong> n'a pas davantage <strong>de</strong> pouvoirsété <strong>au</strong>ssi monstrueuses.sont absents du débat ? Or, la vérité politique du Grand2) La population qui, in fine, reçoit l’architecture proposée décisionnels. Elle exerce ce qu'elle estime être l'une <strong>de</strong> sesOn assiste <strong>au</strong>jourd’hui à la faillite progressive <strong><strong>de</strong>s</strong> agencesParis est l’exemplarité. Cette vérité ne peut en <strong>au</strong>cun cas seà son usage et à ses suffrages.missions, à savoir observer et rappeler les fondament<strong>au</strong>x.intermédiaires qui, elles, sont be<strong>au</strong>coup plus aptes à lapriver <strong>de</strong> ces cerve<strong>au</strong>x débridés et <strong>de</strong> leur folie contrôlée.3) Les architectes qui inventent et proposent <strong><strong>de</strong>s</strong> solutions Elle contribue à l'épanouissement <strong><strong>de</strong>s</strong> jeunes talents par sesrecherche fondamentale en continuité, alors que les grossesNotre Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la République nous a affirmé qu’il ne<strong><strong>de</strong>s</strong>tinées à combler les <strong>de</strong>man<strong><strong>de</strong>s</strong> et les souhaits <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong>ux prix annuels et, plus récemment, son « Grand Prix d’Architecture». Le milieu est inopérant, l’état, lui, se réfugie danslieu à l’occasion <strong><strong>de</strong>s</strong> concours. Notre erreur du moment sestructures, quelles que soient leurs qualités, le font en premiernous fera pas le coup du Baron H<strong>au</strong>ssmann, ni non pluscatégories précitées.celui <strong>de</strong> notre après-guerre. Il veut du futur, il chercheOr, force est <strong>de</strong> reconnaître que le pouvoir et la population la politique du concours permanent.niche dans la rupture <strong>de</strong> continuité du tissu architectural <strong>de</strong>à donner du sens à Paris, et il doit déjà se rendre comptene sont pas en phase et que <strong>de</strong> ce fait l’architecte se situe Cela lui permet :base. Il s’agit bien <strong>de</strong> 30.000 architectes privés d’actions signifianteset <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong><strong>de</strong>s</strong> à un nive<strong>au</strong> correct. À la longue, on<strong>de</strong> la platitu<strong>de</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> réponses. Nous n’avons pas besoin <strong>de</strong>dans une situation très inconfortable, celle du doute <strong><strong>de</strong>s</strong>tructeur.Cependant, il ne peut opposer le moindre refus à cet résultat lui-même est souvent sujet à c<strong>au</strong>tion.peut craindre que, si ce système <strong>de</strong> précarité se prolonge, le1° D’attirer l’attention sur quelques projets phares dont leprojets mais <strong>de</strong> visions, <strong>de</strong> frénésie urbaine, <strong>de</strong> sacrifice dutissu actuel, <strong>de</strong> révolution.imbroglio et se doit <strong>de</strong> répondre en son âme et conscience. 2° De contribuer <strong>de</strong> ce fait à masquer la sinistre réalité dumilieu français soit si mal structuré, qu’il dépérisse lentementEn conclusion, si notre milieu professionnel refuse <strong>de</strong>Les architectes doivent proposer <strong><strong>de</strong>s</strong> hypothèses pl<strong>au</strong>sibles. milieu professionnel <strong>de</strong> l’architecture dans son ensemble.mais sûrement jusqu’à envisager à terme sa disparition totale,répondre, si nos écoles elles-mêmes se révèlent incapables,Le pouvoir, ayant lui-même <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong>voirs envers la population,<strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong>voirs d’évi<strong>de</strong>nce comme l’économie ou le Le Déclin (éditions <strong>de</strong> l’œil d’Or), le système <strong>de</strong> caste <strong><strong>de</strong>s</strong>que sur le sensationnel. Plus grave encore, cette situation àCar, comme je l’ai écrit dans un livre <strong>au</strong> titre évocateur,disparition camouflée par la presse qui ne porte son intérêtbloquées par l’intégrisme vert, <strong>de</strong> faire face <strong>au</strong> futur et <strong>au</strong>xbouleversements nécessaires, alors il ne nous restera plus qu’àconfort, est conscient <strong>de</strong> la difficulté <strong>de</strong> sa réponse, mais grands architectes internation<strong>au</strong>x, s’il est certes incitatif etterme risque <strong>de</strong> transformer les stars en simples i<strong>de</strong>ntifiantsnous exiler dans <strong><strong>de</strong>s</strong> territoires plus accueillants. Les architectesfrançais <strong>de</strong> qualité n’existeront plus qu’à l’étranger. us’efforce <strong>de</strong> proposer <strong><strong>de</strong>s</strong> plans, une philosophie du vécu, peut avoir valeur d’exemple, détruit par réaction les <strong>de</strong>ux<strong><strong>de</strong>s</strong> groupes dominants où se situe le vrai pouvoir !12 |etc. qui malheureusement échouent f<strong>au</strong>te <strong>de</strong> consulter sur générations à venir dans lesquelles on <strong>de</strong>vrait découvrir lesSi l’on ne croit pas en cette menace, on peut rappeler que| 13le fond et préalablement les architectes. Ainsi l’Etat, malgréses efforts, est tombé souvent dans le contre-exemple <strong>au</strong>point d’indisposer la population. (Inutile <strong>de</strong> rappeler nosjeunes aptes à être les constructeurs émérites <strong>de</strong> <strong>de</strong>main.Cette relève naturelle est <strong>de</strong>venue impossible, tant le bloc <strong><strong>de</strong>s</strong>stars est étanche et <strong>de</strong> ce fait inaccessible. Or, quand le vivierla <strong>France</strong> est frian<strong>de</strong> <strong>de</strong> cette manière <strong>de</strong> faire et que déjà,dans les années 60 à 70, la théorie <strong>de</strong> l’Administration <strong>de</strong>tutelle <strong>de</strong> l’Architecture, acoquinée avec les gran<strong><strong>de</strong>s</strong> entreprisesdu bâtiment, avait pour projet <strong>de</strong> répartir l’ensemble <strong>de</strong> lacomman<strong>de</strong> architecturale du pays sur 6 à 7 agences énormesqui <strong>au</strong>raient suffi à couvrir le territoire. La Caisse <strong><strong>de</strong>s</strong> Dépôtss’agitait avec sa SIC. Derrière ce complot, l’histoire a faitla preuve que cette attitu<strong>de</strong> a mené le pays <strong>au</strong> désastrearchitectural. Avec comme slogan, le modèle industrialisé,la comman<strong>de</strong> groupée, <strong><strong>de</strong>s</strong> prix (soi-disant) contrôlés, unerapidité <strong>de</strong> construction (discutable), une seule et uniquedécision administrative, etc. On est sûr <strong>de</strong> l’échec. Si on faitIllustrations <strong>de</strong> Cl<strong>au</strong><strong>de</strong> Parent extraites <strong>de</strong> son livre Portraits(impressionnistes et véridiques) d'architectes, 2005, Norma Editions.


DossierY a-t-il un«état <strong>de</strong>l’architecture » ?Cl<strong>au</strong><strong>de</strong> Abeille, Rixe (<strong>de</strong>ux personnages se battentpour avoir une «tête habitable», René Char,Le marte<strong>au</strong> sans maître), 1986.Par P<strong>au</strong>l Andreu, membre <strong>de</strong> la section d’ArchitectureLe bon genrePar Cl<strong>au</strong><strong>de</strong> Abeille, membre <strong>de</strong> la section <strong>de</strong> SculptureJamais on n’a <strong>au</strong>tant construit, les matéri<strong>au</strong>x <strong>de</strong> constructionsont toujours plus nombreux et plus performants,leurs métho<strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong> mise en œuvre ne cessent <strong>de</strong> progresser,les architectes et les ingénieurs ont à leur disposition<strong><strong>de</strong>s</strong> outils <strong>de</strong> représentation et <strong>de</strong> calcul sans communemesure avec ceux dont ils disposaient il y atrente ans : les possibilités <strong>de</strong> création sontdonc immenses. C’est très bien.à cela s’ajoute un indéniable engouementparmi les riches et les puissants pourconstruire, et la conviction que la « communication» d’un état ou d’une ville passevolontiers par la construction <strong>de</strong> bâtiments « iconiques »capables <strong>de</strong> changer son image et même son économie.Qu’espérer <strong>de</strong> plus favorable ?À l’<strong>au</strong>tre extrême, jamais <strong>au</strong>tant <strong>de</strong> populations p<strong>au</strong>vresne se sont concentrées dans les villes, avec l’espoir <strong>de</strong> plus<strong>de</strong> travail, <strong>de</strong> confort et <strong>de</strong> bonheur. Ceux <strong><strong>de</strong>s</strong> créateursqui poursuivent le rêve – ou le <strong>de</strong>voir – d’une architecturesociale économe et ambitieuse n’ont jamais eu tant à faire etbe<strong>au</strong>coup font. Parfait.Le table<strong>au</strong> ne serait pas complet si j’omettais <strong>de</strong> soulignerque bon nombre d’architectes sont connus, que certainsmême sont <strong><strong>de</strong>s</strong> stars, loin <strong><strong>de</strong>s</strong> footballeurs, certes, mais àl’égal <strong><strong>de</strong>s</strong> écrivains, <strong><strong>de</strong>s</strong> artistes ou <strong><strong>de</strong>s</strong> couturiers. Maintenirce statut exige bien sûr <strong><strong>de</strong>s</strong> sacrifices <strong>de</strong> temps et parfoisd’amour-propre, mais quelle <strong>au</strong>torité gagnéeet, chose plus que toute <strong>au</strong>tre nécessaire à lacréation, quelle liberté !Bien sûr, il y a bien quelques problèmes.Si Hamlet vivait <strong>de</strong> nos jours et pratiquaitl’architecture, il ne manquerait pas d’évoquerà nouve<strong>au</strong> :The insolence of office and the spurnsThat patient merit of the unworthy takesn’est en définitive qu’un « genre » comme un <strong>au</strong>tre.Mais est-ce si important? L’architecte, comme les <strong>au</strong>tresOn a souvent vu dans l’histoire <strong>de</strong> l’art une hiérarchie <strong><strong>de</strong>s</strong>créateurs, ne peut-il pas faire son affaire <strong>de</strong> l’insolence et dugenres qui avait ses justifications mais <strong>au</strong>ssi ses conséquencesmépris ? Ne sont-ils pas l’<strong>au</strong>tre face <strong>de</strong> la reconnaissance ?: on a imposé, un moment, par exemple, la priorité <strong>de</strong> laDonc, tout va bien et presque <strong>au</strong> mieux.peinture d’histoire sur toutes les <strong>au</strong>tres expressions, ce qui aReste une question : quel nombre, ou quelle proportionfini par susciter la réaction <strong><strong>de</strong>s</strong> peintres impressionnistes.plutôt, <strong><strong>de</strong>s</strong> constructions faites dans cette pério<strong>de</strong> siDe ce point <strong>de</strong> vue, on peut affirmer que les artistes qui, àfavorable sont-elles belles, utiles et durables ? C’étaitl’écart <strong><strong>de</strong>s</strong> démarches conceptuelles, ont voulu approfondirpeut-être celle qui, insidieusement, était posée. Elleles conquêtes du XX e siècle et les mener vers <strong>de</strong> nouve<strong>au</strong>xn’a pas <strong>de</strong> réponse. Plus tard, bien plus tard, on jugeraterritoires, ont été contrecarrés et empêchés <strong>de</strong> trouversereinement ce qui <strong>au</strong>ra été fait, on fera le tri <strong><strong>de</strong>s</strong> vraies etun public. Public <strong>de</strong>venu, par compensation, si avi<strong>de</strong> <strong>de</strong><strong><strong>de</strong>s</strong> f<strong>au</strong>sses <strong>au</strong>daces, <strong><strong>de</strong>s</strong> découvertes et <strong><strong>de</strong>s</strong> rabâchements,l’art équilibré du passé comme on peut le constater par la14 |<strong>de</strong> ce qui a permis à <strong><strong>de</strong>s</strong> habitants <strong>de</strong> grandir et <strong>de</strong> ce qui<strong>de</strong> bataille, une femme nue ou une quelconque anecdote. fréquentation <strong>de</strong> nos musées.| 15En h<strong>au</strong>t : Musée <strong>de</strong> la Mer, Osaka - Japon, 1993-2000,architecte : P<strong>au</strong>l Andreu. Photo DR.“Plus tard, bienplus tard, on jugerasereinement ce qui<strong>au</strong>ra été fait...”n’<strong>au</strong>ra fait que du bruit. Ne nous précipitons pas à le faire.Suivons simplement ce que la conscience nous dicte ettravaillons. uCe qu’on appelle l’art contemporain ne m’intéresse pasvraiment, mais il est tellement présent dans la pressespécialisée et dans les salles d’exposition publiquesque l’on est bien forcé <strong>de</strong> le voir. L’émergence d’un tel mouvement,obsédé par le concept, par l’idée, <strong>au</strong> détriment, etjusqu’à sa suppression, <strong>de</strong> la forme, ne s’est certainementpas produite par hasard.On sait que les « écoles » artistiques se succè<strong>de</strong>ntsouvent dans l’histoire <strong>de</strong> l’art selon unmouvement <strong>de</strong> balancier – telle fut l’histoire <strong>de</strong>la querelle entre les partisans du <strong><strong>de</strong>s</strong>sin et ceux<strong>de</strong> la couleur <strong>au</strong> XVII e siècle.Au XX e siècle, on a assisté à la promotion<strong>de</strong> l’art dit mo<strong>de</strong>rne qui privilégiait la forme, le <strong><strong>de</strong>s</strong>sin, lacouleur, la gestuelle sans se soucier souvent du sujet, conçuplutôt comme un prétexte implicite ou négligeable. C’est cequ’exprime si bien M<strong>au</strong>rice Denis par sa célèbre formuleselon laquelle seule compte : « ... la surface plane recouverte<strong>de</strong> couleurs en un certain ordre assemblées... »L’art contemporain semble s’être construit comme unealternative à cette prim<strong>au</strong>té du jeu <strong><strong>de</strong>s</strong> formes et <strong><strong>de</strong>s</strong> couleurs.En effet, selon cet art, la définition <strong>de</strong> la peinture <strong>de</strong>M<strong>au</strong>rice Denis pourrait être retournée en affirmant qu’avantd’être une surface plane recouverte <strong>de</strong> couleurs en un certainordre assemblées, se rappeler qu’un table<strong>au</strong> est un chevalS’ajouterait l’idée que l’on peut se passer <strong>de</strong> ces formes et<strong>de</strong> ces couleurs ou choisir un objet usuel et l’affubler d’unsens par le discours.“La surfaceplane recouverte<strong>de</strong> couleurs enun certain ordreassemblées...C’est bien ce que nous voyons, jusqu’à l’ennui et la saturation,<strong>de</strong>puis maintenant plus <strong>de</strong> cinquante ans. L’Etats’est emparé <strong>de</strong> ce mouvement qui n’hésite pas à utiliser lesvieilleries romantiques du « sublime » et même les référencesplus proches <strong>de</strong> nous <strong>de</strong> « l’off limit », et cherche à l’imposer”avec toute sa puissance et tous ses rése<strong>au</strong>x <strong>de</strong>pouvoir. Cela n’est pas sans équivoque si l’onpense à la Deuxième Guerre mondiale qui futl’occasion <strong>de</strong> bien réelles « tables rases ».Cette idée qui privilégie le concept n’est passeulement française, mais c’est en <strong>France</strong> qu’ellea pris ce tour envahissant et exclusif et il seraittemps que l’on comprenne que ce mouvementIl serait temps que le « concept » <strong>de</strong>venu un « genre » etmême un « bon genre » trouve une place plus mo<strong><strong>de</strong>s</strong>te dansles préoccupations du Ministère <strong>de</strong> la Culture. u


DossierCourtcircuitPar Caroline Lee, sculpteur,correspondante <strong>de</strong> l'Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong>Marcel Duchamp a in<strong>au</strong>guré l’idée que l’appropriationd’un objet <strong>de</strong> production industrielle équivalaità un acte <strong>de</strong> création. En <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> touteconsidération sur les mobiles <strong>de</strong> Duchamp, ce geste a <strong>au</strong>torisésa répétition sans limites <strong>de</strong>puis son acte, conséquencedéterminante pour tout l’art contemporain.Par un geste magistral, le tas <strong>de</strong> briques, l’arrangement<strong>de</strong> quelques pavés, les compressions d’épaves <strong>de</strong> voituresmême, accédaient à un titre <strong>de</strong> noblesse : œuvre d’art ! Avecune arrogance calculée afin d'échapper <strong>au</strong>x ricanementsoutragés, les faiseurs <strong>de</strong> ces gestes roy<strong>au</strong>x proclamaient quel’art était mort. En tout cas, ils se sont consacrés à la production<strong>de</strong> textes écrits pour distraire l’attention <strong>de</strong> ceux quipouvaient encore vouloir se référer à la notion d’œuvre d’art,cherchant et réussissant à classer ces gêneurs dans une vastecatégorie qu’ils disaient « dépassée » et, finalement, f<strong>au</strong>te <strong>de</strong>dominer entièrement l’attention <strong><strong>de</strong>s</strong> foules, « ringar<strong>de</strong> ».La conséquence <strong>de</strong> cette « appropriation » est qu’elleélimine la main <strong>de</strong> l’artiste, et substitue un simple choix,essentiellement un geste poétique, à l’acte majeur <strong>de</strong> lacréation. Avec le bannissement <strong>de</strong> ceteffort personnel, effort qui s’effectuedans les sueurs froi<strong><strong>de</strong>s</strong>, accompagné <strong>de</strong>la quasi-probabilité <strong>de</strong> son échec, doncforcément <strong>de</strong> l’humiliation potentiellequi est toujours là en tan<strong>de</strong>m, commeun fantôme ineffaçable, l’homme quis’appelle artiste se trouve libéré. N’existeplus que son orgueil, assisté, si possible,par la plus gran<strong>de</strong> quantité d’argentpossible pour assurer la réalité <strong>de</strong> sonexistence d’artiste.L’exemple frappant entre tous est celui<strong><strong>de</strong>s</strong> requins et <strong>au</strong>tres anim<strong>au</strong>x conservésdans d’énormes bacs <strong>de</strong> formol, quiillustrent la capacité inouïe <strong>de</strong> dépenser<strong>de</strong> l’argent <strong>de</strong> la manière la plus fantasquepour capter notre attention. Ilest impossible <strong>de</strong> dire qu’un requin estinintéressant. Il est impossible <strong>de</strong> ne pasêtre fasciné par une tranche <strong>de</strong> ve<strong>au</strong>,animal emprisonné et privé <strong>de</strong> son <strong><strong>de</strong>s</strong>tinnaturel <strong>de</strong> chose morte. Nous sommesdans un musée d’histoire naturelle quequelqu’un a osé affubler <strong>de</strong> son nompropre, utilisant la gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> la natureet <strong><strong>de</strong>s</strong> sommes astronomiques pour lecommun <strong><strong>de</strong>s</strong> mortels, afin que nousgardions son nom en mémoire. Exempled’orgueil infantile dévoyé, miroir <strong>de</strong> notrepropre prison.De cette personne, <strong>de</strong>ce qu’elle peut nous dire<strong>de</strong> son existence, et, parlà, <strong>de</strong> la nôtre, il n’y a pastrace. Il nous a donné àvoir, comme le fait unconservateur <strong>de</strong> muséed’histoire naturelle. Mais ilUne histoire qui commence avec celle <strong>de</strong> l’humanité,lorsque l’homme à peine dépouillé <strong>de</strong> son animalité,en inversant la mort dans une représentation<strong>de</strong> la vie, invente l’art, lequel, <strong>de</strong> générations en générations,<strong>de</strong> renaissances en renaissances, quels que soient lesbouleversements, poursuit le cours <strong>de</strong> son évolution.Comme le phénix renaissant <strong>de</strong> ses cendres, à partird’une logique qui lui est propre, l’art puise en lui-même lesressources nécessaires à son développement, libérant <strong>de</strong> sonpassé les avenirs qu’il contient suivant un processus et <strong><strong>de</strong>s</strong>modalités ancestrales sans cesse réinterprétées, réinventées,mais jamais pour <strong>au</strong>tant abandonnées. Hier encore, l’atelier,l’école, le musée, étaient les lieux privilégiés <strong>de</strong> l’apprentissage; « l’expérience <strong>de</strong> l’œuvre » faisait entrer le postulant<strong>de</strong> plein pied dans les arcanes du métier, le mettant ensituation <strong>de</strong> poursuivre, <strong>de</strong> s’inscrire dans une lignée, <strong>de</strong>prendre le relais <strong>de</strong> ses prédécesseurs lointains ou immédiats: une conception fondée sur l’héritage, la mémoire,la transmission, opposée à celle qui s’impose <strong>au</strong>jourd’hui ànous donne ce spectacle sans gran<strong>de</strong>ur, signé <strong>de</strong> son proprenom, lui qui n’est qu’une personne inconnue comme levoisin <strong>de</strong> l’étage en <strong><strong>de</strong>s</strong>sous à qui nous n’avons jamais parlé.Le message reçu concerne surtout sa puissance financière.S’i<strong>de</strong>ntifier avec les bêtes mortes et/ou captives est la seulemalheureuse proposition qu’il nous offre. Son seul réconfortest sa splen<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> riche fabricant. Il s’accroche à son imagepour échapper <strong>au</strong> désespoir qu’il nous révèle.Nous nous souvenons <strong>de</strong> la main, <strong>de</strong> toutes les belleschoses utiles et bonnes qu’elle peut faire. Mais par cecourt-circuit nous sommes privés <strong><strong>de</strong>s</strong> créations dont elle estcapable et par lesquelles elle nous rappelle que la noblessed’âme est en nous, et que nous pouvons y accé<strong>de</strong>r. Si la vie,telle qu’elle est organisée <strong>au</strong>jourd’hui, tend à nous décourager<strong>de</strong> croire que ces miracles peuvent encore avoir lieu, lesvisiteurs qui atten<strong>de</strong>nt infatigablement pour entrer dans lesexpositions prouvent que l’espérance refuse <strong>de</strong> s’éteindre.16 |C’est dans leur quête que nous <strong>de</strong>vons puiser du courage| 17Caroline Lee, Hommage à la Résistance, 1982, acier inoxydable etgranit noir, h<strong>au</strong>teur 12,50 m, Place <strong>de</strong> la Croix-<strong>de</strong>-chav<strong>au</strong>x,Montreuil-sous-Bois (93). Photo DR“L’exemple frappantentre tous est celui<strong><strong>de</strong>s</strong> requins et <strong>au</strong>tresanim<strong>au</strong>x conservésdans d’énormes bacs<strong>de</strong> formol.”pour continuer <strong>de</strong> risquer l’échec, pour essayer d’offrir lebe<strong>au</strong> et l’espérance <strong>de</strong> vivre dans la lumière éclatante d’unesculpture réussie. u«L’Air du Temps »Par Pierre Carron, membre <strong>de</strong> la section <strong>de</strong> Peinture,enseignant pendant 25 ans à l'Ecole nationale supérieure<strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong> <strong>de</strong> Paris“Comme le phénixrenaissant <strong><strong>de</strong>s</strong>es cendres, l’artpuise en lui-mêmeles ressourcesnécessaires à sondéveloppement.”notre temps frappé d’amnésie,où l’on a substitué <strong>au</strong> culteancien rendu à la be<strong>au</strong>té celui<strong>de</strong> l’ex nihilo.L’art « d’<strong>au</strong>trefois » peut-ondéjà dire est remplacé par« <strong>au</strong>tre chose » qui, tout en engardant l’intitulé et le cérémonial,<strong>de</strong>vient son simulacre.Sous le nom s<strong>au</strong>grenu d’ « ArtContemporain », ce simulacre envahit l’ensemble <strong>de</strong> l’espaceculturel et l’air du temps : un label <strong>de</strong> qualité supérieurréservé <strong>au</strong>x créateurs labellisés ; l’absence même d’art dansl’œuvre <strong>de</strong>vient l’un <strong>de</strong> ses critères majeurs <strong>de</strong> qualité.Comme le confirme la sacralisation <strong><strong>de</strong>s</strong> détritus <strong><strong>de</strong>s</strong>tinés àla poubelle, <strong><strong>de</strong>s</strong> rebus, <strong><strong>de</strong>s</strong> riens qui résultent <strong><strong>de</strong>s</strong> relents duvieil urinoir, les élucubrations et le discours <strong>de</strong> ceux qui sonttrop intelligents pour être honnêtes, une production allantdu châssis nu enduit ou pas, lacéré, unicolore, ou tartiné <strong>de</strong>lugubre en passant par la grosse peinture scatologique <strong>au</strong>service du nouve<strong>au</strong> concept : « du dégueulasse », jusqu’<strong>au</strong>montage sophistiqué d'installations : plumes et tas <strong>de</strong> sable,pansements, reliques <strong>de</strong> tous genres, etc. Une adhésion<strong>au</strong> tout et son contraire dans le plus parfait éclectisme <strong>de</strong>rigueur. La règle d’or <strong>de</strong> la subjectivité <strong><strong>de</strong>s</strong> goûts et <strong><strong>de</strong>s</strong>couleurs rend caduque la définition platonicienne « labe<strong>au</strong>té splen<strong>de</strong>ur du vrai », bien embarrassante dans lecontexte contemporain. Enfin, le musée qui organise lajuxtaposition du « pas grand-chose » avec les chefs-d'œuvredont il dispose, justifiant ainsi le rien par le tout : ce qui neressemble « à rien » avec le « tout à voir ».Une nouvelle conception <strong>de</strong> l’art ? Un nouvel ordre ?Celui du désordre mental ? Une situation sans précé<strong>de</strong>nt !Une absence ! En tout cas, <strong><strong>de</strong>s</strong> manifestations qui se voudraientlisibles par tous et qui restent toutefois réservéesà un « <strong><strong>de</strong>s</strong>sus <strong>de</strong> panier » composé <strong>de</strong> bien-pensants. Iln’en reste pas moins qu’un certain nombre d’égarés (comment<strong>au</strong>raient-ils pu se perdre ?), non labellisés bien quecontemporains, n’ont pas cédé <strong>au</strong> dictat et poursuiventinlassablement, en dépit <strong>de</strong> leur tare, l’aventure. uPierre Carron, vitrail (détail <strong>de</strong> la baie 11) <strong>de</strong> la chapelle Saint-Charles-Borromée <strong>de</strong> la cathédrale d'Orléans, 1995.


DossierLa porte étroitePar Brigitte Terziev, membre <strong>de</strong> la section <strong>de</strong> SculpturePeut-on encore parler <strong>de</strong> diversité <strong><strong>de</strong>s</strong> mouvementsartistiques dans la <strong>France</strong> <strong>de</strong> 2011 ? Que nous proposemaintenant l’exception culturelle si chère ànotre pays ?L’idée <strong>au</strong> départ était excellente, elle donnait be<strong>au</strong>coup <strong>de</strong>possibilités à l’artiste <strong>de</strong> pouvoir s’épanouir dans ses recherches.Mais est-ce maintenant <strong>au</strong> créateur que l’on donne cepouvoir ? N’est-ce pas plutôt à certains déci<strong>de</strong>urs ?Alors cette fameuse exception, n’est-elle pas <strong>de</strong>venue <strong>au</strong>contraire un exceptionnel enfermement pour le créateur ?Quel regard pose l’individu sur l’œuvre d’art qui ne soit<strong>au</strong>tre que publicitaire ?Quel est le rôle <strong>de</strong> l’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong> si elle n’apas droit <strong>de</strong> parole ?Ce ne sont même pas les affaires culturelles qui ont droit<strong>au</strong> chapitre, mais les hommes d’affaires qui se présententBrigitte Terziev, Passage. Photo Gui Brig<strong>au</strong>diotcomme amateurs d’art. En fait ils spéculent et“L’art <strong>de</strong> notre temps ne doit pas être constammentphagocyté par quelques vieilles lunestiennent en prédation les objets d’art.Ce ne sont pasComment se comportent les artistes face à les artistes qui qui s’octroient le <strong>de</strong>vant <strong>de</strong> la scène <strong>de</strong>puiscette mascara<strong>de</strong>, <strong>de</strong>vant le climat d’<strong>au</strong>tocensurequarante ans.imposent leurentretenu par la frilosité ambiante ?Ne baissons pas les bras. La médiocrité aQui est académique <strong>de</strong> nos jours ?différence avec <strong>de</strong>ux ennemis profonds : l’originalité et laAllons voir du côté <strong>de</strong> la finance et <strong><strong>de</strong>s</strong> pouvoirsparallèles ; sous une posture altruiste, ” Cela v<strong>au</strong>t bien la peine <strong>de</strong> se battre.le passé. recherche <strong>de</strong> l’exigence.ils sont là les donneurs <strong>de</strong> médaille, à même la rue, les D’abord reprendre le chemin <strong><strong>de</strong>s</strong> écoles d’art, revoirbien-pensants <strong>au</strong>x discours abscons et creux, les bigots la base <strong>de</strong> l’enseignement, saccagée par ces vandales : lespropres sur eux, les faiseurs d’artistes clef en main, mais <strong>de</strong> ateliers sont encore <strong>au</strong>jourd’hui vi<strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong> réels trav<strong>au</strong>x sur laqui parle-t-on ?connaissance <strong><strong>de</strong>s</strong> métiers d’art.Des déci<strong>de</strong>urs sans vrai visage qui en <strong>de</strong>hors <strong><strong>de</strong>s</strong> gouvernementsAvoir du respect pour l’étudiant qui s’engage dans cettesuccessifs, et <strong>de</strong>puis <strong><strong>de</strong>s</strong> années déjà, ont forgé voie et ne pas lui supprimer son <strong>au</strong>tonomie, lui permettreun pouvoir souterrain d’une force stratégique tentaculaire, <strong>de</strong> penser qu’il est singulier et peut apporter à l’<strong>au</strong>treinvisible pour le quidam, et qui avec le temps est <strong>de</strong>venu l’offran<strong>de</strong> <strong>de</strong> sa démarche personnelle, sans avoir besoin duquasi monarchique. Ils déci<strong>de</strong>nt en vase clos <strong>de</strong> la valeur troupe<strong>au</strong> car il y a dans chaque être, et pas seulement chezd’un artiste en mettant la plupart <strong>au</strong> cachot. Pour cela un les artistes, un inconnu qui nous observe, mange à notremoyen infaillible : la critique contestataire dans certains table et nous dérange ; le mettre à la porte, c’est prendre lejourn<strong>au</strong>x est exclue, c’est normal, qui les finance? On pourraitrisque du confort… À l’opposé, cette présence intérieurese croire dans une république bananière. Rien <strong>de</strong> plus qui sème le doute permet <strong>de</strong> rentrer dans l’univers s<strong>au</strong>vageperformant que les oubliettes…<strong>de</strong> la création. On dit souvent que la richesse d’un pays seMais ces profiteurs ont un projet grandiose : la glorification reconnaît par sa gran<strong>de</strong> ouverture pour les arts, la diversitéd’un seul mouvement artistique (sous quelques variantes), et la curiosité <strong>de</strong> ses choix. Paris avait ce profil, mais c’étaitavec la volonté <strong>de</strong> se joindre à la tendance planétaire vers sans compter sur cette caste pseudo-culturelle à la penséeun « art global ».unique et médiocre qui s’est insinuée en secret, dans tous18 |À chaque époque la rupture dans les mouvements artisti-les postes du pouvoir.| 19ques est salutaire, apportant un sang neuf à l’art.Mais ce que nous subissons <strong>au</strong>jourd’hui est plutôt l’opposé.Ce ne sont pas les artistes qui imposent leur différence avecle passé. Ce sont <strong>de</strong> petits universitaires qui désignent ceque doivent suivre les artistes-valets.Cette « machinerie culturelle » a un pape : MarcelDuchamp, qui n’en <strong>de</strong>mandait pas tant, l’avant-gardiste d’ily a un siècle, mais qu’importe on fait du neuf avec du vieux ;un peu <strong>de</strong> peinture fraîche avec label « art contemporain »et c’est bon…Mais petit à petit, les artistes et les intellectuels se mobilisentet <strong>de</strong>viennent moins peureux. Ils ouvrent une brèchedans ce totalitarisme qui empêche toute liberté et démarchesincère. Il serait temps.Il n’y a pas que Jean Clair maintenant pour fendre ce murd’intolérance.Lire le <strong>de</strong>rnier numéro <strong>de</strong> la revue courageuse artension :Christophe Averty, Jean Digne, Jean Philippe Domecq,Cl<strong>au</strong><strong>de</strong> Mollard et bien d’<strong>au</strong>tres s’expriment sur ce sujet.Un peu <strong>de</strong> mo<strong><strong>de</strong>s</strong>tie, messieurs les donneurs « <strong>de</strong> bonspoints », et laissez parler les artistes, c’est eux finalement quitriompheront <strong>de</strong> votre obscurantisme. u


DossierL'estampe en 2011,état <strong><strong>de</strong>s</strong> lieuxPar Erik Desmazières, membre <strong>de</strong> la section <strong>de</strong> Gravure20 |Dans le paysage artistique contemporain, c'est le moinsque l'on puisse dire, l'estampe manque <strong>de</strong> visibilité.Il y a diverses raisons à cela.Il y a 30 ans, on a pris subitement conscience, dans lesbibliothèques patrimoniales, <strong>de</strong> l'existence <strong>de</strong> fonds documentairesphotographiques qui, en trois décennies, ontchangé <strong>de</strong> statut : les photographies sont <strong>de</strong>venues objets <strong>de</strong>musée, <strong><strong>de</strong>s</strong> œuvres d'art. Ce poids institutionnel pèse sur leschoix et les goûts du public chez qui on a créé une attente.Par exemple, lors <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière expositionCourbet <strong>au</strong> Grand Palais, on a montré <strong><strong>de</strong>s</strong>photographies (comme celles <strong>de</strong> Le Gray) et<strong>au</strong>cune gravure... Cet engouement pour laphotographie nuit indéniablement à la visibilité<strong>de</strong> l'estampe.Historiquement, c'est la <strong>de</strong>uxième fois qu'ily a conflit entre photographie et estampe... Lapremière fois, à l'apparition <strong>de</strong> la photographieelle-même <strong>au</strong> milieu du XIX e siècle, on s'est enthousiasmépour ce nouve<strong>au</strong> médium dans lequel on voyait la possibilité<strong>de</strong> dépasser les limites <strong>de</strong> l'estampe d'interprétation : saisieinstantanée du réel, rapidité <strong>de</strong> l'exécution à moindre coût,possibilité <strong>de</strong> la multiplication aisée après l'invention dunégatif. On entrevoyait la possibilité <strong>de</strong> mettre enfin enimage et <strong>de</strong> rassembler en catalogue l'ensemble <strong><strong>de</strong>s</strong> œuvresd'art, <strong><strong>de</strong>s</strong> monuments, <strong><strong>de</strong>s</strong> paysages urbains... Il <strong>de</strong>venaitpossible, en quelque sorte, d'appréhen<strong>de</strong>r la « totalité » dumon<strong>de</strong> pour le mettre à disposition du plus grand nombreet, à terme, <strong>de</strong> réaliser le grand rêve mythique du XIX esiècle : éduquer les masses.La photographie s'emparait du terrain occupé jusqu'alorspar la gravure d'interprétation. À cette usurpation, lesgraveurs ont réagi <strong>de</strong> manière positive en abandonnant cechamp documentaire et pédagogique <strong>de</strong>venu obsolète pourse consacrer à l'estampe originale, l'estampe <strong>de</strong> peintre, <strong>de</strong>peintre-graveur... Pour ne pas disparaître, ils ont su créerles conditions d'un renouve<strong>au</strong> dans lequel les imprimeurséditeurs et <strong>au</strong>ssi certains critiques ont pris une gran<strong>de</strong> part,Cadart, Lemercier, Delâtre, les frères Gih<strong>au</strong>t, Delpech,Philippe Burty et bien d'<strong>au</strong>tres.De la même façon, à l'époque actuelle, les graveursdoivent prendre en charge les conditions d'un renouve<strong>au</strong>.Mais il est vrai que la tâche est ru<strong>de</strong> face <strong>au</strong> changementd'attitu<strong>de</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> institutions qui ont privilégié la photographie“Certaines écolesd'art fermentles ateliers oùs'enseignaientles différentestechniques...et favorisé l'intérêt du public pour cet art <strong>au</strong> détriment <strong>de</strong>la gravure. La BnF qui, grâce <strong>au</strong> Dépôt légal, est l'institutionla plus riche en estampes expose désormais <strong>de</strong> manièrebe<strong>au</strong>coup plus systématique la photographie ancienneet contemporaine en lui consacrant d'ailleurs une salled'exposition permanente (la Galerie Mansart sur le siteRichelieu).Soulignons la disparition symptomatique <strong><strong>de</strong>s</strong> pensionnairesen gravure à la Villa Médicis. Mentionnons que la <strong>format</strong>ion”<strong><strong>de</strong>s</strong> graveurs est assurée par un nombre <strong>de</strong> plusen plus restreint d'ateliers. Certaines écolesd'art ferment les ateliers où s'enseignaient lesdifférentes techniques, taille douce, lithographie,sérigraphie.Quant à la gravure sur boiselle est <strong>de</strong>puis longtemps oubliée.L'enseignement <strong>de</strong> la gravure reste néanmoinsd'actualité à l'Ecole <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong> <strong>de</strong>Paris, à l'Ecole <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>Arts</strong> décoratifs, à l'EcoleEstienne. Sans parler <strong>de</strong> la possibilité qu'offrent par exemple<strong>au</strong>ssi les cours du soir <strong>de</strong> la Ville <strong>de</strong> Paris.En aval <strong>de</strong> ce rétrécissement dans la pédagogie, on a <strong>au</strong>ssipu déplorer ces <strong>de</strong>rnières années la disparition d'ateliersd'imprimeurs très importants : les frères Crommelynck,Lacourière et Frél<strong>au</strong>t, l'Atelier Leblanc qui était situé 187rue Saint-Jacques, le quartier traditionnel <strong><strong>de</strong>s</strong> imprimeurs.Ces ateliers étaient <strong>au</strong>ssi éditeurs. De même ont disparusbon nombre d'éditeurs d'estampes qui étaient d'ailleurs lesgrands pourvoyeurs <strong>de</strong> ces ateliers.Et pourtant toutes ces raisons sont périphériques etexternes <strong>au</strong>x possibilités qu'offre l'art <strong>de</strong> l'estampe qui,loin d'être archaïque, suit le courant <strong>de</strong> l'art contemporain.Les plus importants artistes du XX e siècle ont produit <strong><strong>de</strong>s</strong>chefs-d'œuvre et quand ces artistes font <strong>de</strong> la gravureils sont graveurs <strong>au</strong>tant que peintres : G<strong>au</strong>guin fait <strong>de</strong> lagravure parce qu'il ne peut pas s'exprimer <strong>au</strong>trement pourarriver où il veut, c'est un choix d'artiste. Il en est <strong>de</strong> mêmepour Munch, pour les expressionnistes allemands commeKirchner ou Nol<strong>de</strong> qui ont pratiqué la gravure sur bois,l'e<strong>au</strong>-forte, la lithographie. Picasso fut graveur et sculpteur<strong>au</strong>tant que peintre. Plus près <strong>de</strong> nous, pensons <strong>au</strong>x estampes<strong>de</strong> Jasper Johns, Baselitz, Anselm Kiefer, Hockney etégalement à celles d'artistes français tels qu'Alberola, Titus-Carmel, Jean-Baptiste Sécheret.Même si l'on constate que les gravures les plus créativessont l'œuvre d'artistes connus en tant que peintres, il n'empêcheque lorsqu'ils se mettent à la gravure, ils sont graveurset non plus peintres. L'estampe est loin d'être un art mineuret elle sait répondre <strong>au</strong>x attentes <strong>de</strong> l'artiste, entité entièrequi ne se morcelle pas.De même qu'il n'y a plus <strong>de</strong> hiérarchie <strong><strong>de</strong>s</strong> genres àl'époque contemporaine entre les différentes formes d'artet à l'intérieur <strong>de</strong> chacune d'elle, <strong>de</strong> même il est importantqu'il n'y en ait plus <strong>au</strong> sein du mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> l'estampe : un burinn'est pas plus artistique qu'une e<strong>au</strong>-forte ou une sérigraphie,un linoléum est <strong>au</strong>ssi prometteur que le bois : le problèmese situe en amont, c'est le choix <strong>de</strong> l'artiste qui le conduit entoute liberté vers tel ou tel moyen d'expression Face à ces constats, l'Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong> peut-elleêtre utile à quelque chose ?Oui, en tout cas tel doit être notre souhait.Elle doit donner envie <strong>de</strong> voir (susciter un public) et <strong>de</strong>faire (susciter les artistes).Elle œuvre déjà en ce sens avec l'attribution <strong>de</strong> nombreuxprix. Citons à ce sujet le prix Nahed Ojjeh, prix <strong>de</strong> consécration,et le prix Jean et Simone Lurçat qui récompensechaque année un ouvrage <strong>de</strong> bibliophilie. Elle envoie <strong><strong>de</strong>s</strong>artistes pratiquant la gravure à la Casa Velasquez. Elle publierégulièrement sa Lettre <strong>de</strong> l'Académie, les conférences publiquesqu'elle organise et réalise <strong><strong>de</strong>s</strong> expositions incluant <strong><strong>de</strong>s</strong>graveurs contemporains. Citons celle initiée par Louis-RenéBerge à l'Espace Pierre Cardin <strong>au</strong> printemps 2008. De tellesactions donnent à la gravure le moyen d'exister davantage<strong>au</strong>x yeux du public et donc d'exister tout court.Le débat est ouvert... uErik Desmazières, Atelier René Tazé IV, I992, e<strong>au</strong>-forte,aquatinte et roulette. 65,6 x 50,3 cm. Photo DR| 21


DossierOn ne peut sans doute nier l’influence <strong><strong>de</strong>s</strong> « inspecteurs» sur la programmation <strong><strong>de</strong>s</strong> musées, galeries,espaces culturels. Bien heureusement, plus d’unconservateur sait préserver son indépendance en projetantun regard libre et éclectique sur toutes les orientations <strong>de</strong> lacréation contemporaine. Dans le domaine <strong>de</strong> la gravure quim’est le plus familier, je peux témoigner <strong>de</strong> l’accueil favorablefait à d’<strong>au</strong>thentiques artistes en marge <strong><strong>de</strong>s</strong> « gadgets » à lamo<strong>de</strong>. Ainsi, lors <strong><strong>de</strong>s</strong> 28 expositions « Le Signe et la Marge »programmés avec succès <strong>de</strong> 1988 à 2010 dans 21 espaces différentslargement ouverts <strong>au</strong> grand et vrai public : GalerieNichido et Fondation Taylor, Paris ; Galeries Hollar etMozart, Prague ; Galerie Dielo centrum, Bratislava ; Muséed’Art Mo<strong>de</strong>rne Richard Anacréon, Grandville ; Musée d’Artet d’Histoire <strong>de</strong> la Ville <strong>de</strong> Meudon ; Musée Jean <strong>de</strong> laFontaine, Châte<strong>au</strong>-Thierry ; Musée Vivant Denon, Châlonsur-Saône; Musée du Noyonnais ; Médiathèque Valéry-Larb<strong>au</strong>d, Vichy… Chaque exposition met en lumière unecomparaison entre différentes esthétiques <strong>de</strong> la gravure surmétal dans chacune <strong>de</strong> ses principales orientations techniques<strong>au</strong>x multiples variantes, interférences et complémentarités- burin, pointe sèche et manière noire, e<strong>au</strong>-fortelinéaire et <strong>de</strong> teinte -, un même instrument pouvant modulerses résonances <strong>au</strong> gré“<strong>de</strong> la sensibilité <strong>de</strong> chaque Certaines planchesartiste. Grands <strong>format</strong>s <strong>de</strong>«Déci<strong>de</strong>urs patentés»et «Inspecteurs»sont-ils seulsmaîtres à bord ?Par Cl<strong>au</strong><strong>de</strong>-Jean Darmon, graveur,correspondant <strong>de</strong> l’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong>sement construites <strong>de</strong> Martin Müller-Reinhart, les manièresavouent même leurnoires à forte charge émotionnelle <strong>de</strong> Roncerel et sans douteconception résolument<strong>au</strong>ssi dans plusieurs <strong>de</strong> mes propres gravures. Autant <strong>de</strong>picturale, <strong>au</strong>x vastes espaceschromatiques, altersculptural».« univox », décèle un potentiel d’on<strong><strong>de</strong>s</strong>. Dans cet ensemblecaractère « semi-témoignages <strong>de</strong> la vitalité d’une tendance qui, loin d’êtrenent avec <strong><strong>de</strong>s</strong> pages plus ”où prév<strong>au</strong>t la forme libre <strong>de</strong> tout « contenu idéologique », lesconfi<strong>de</strong>ntielles, exigeant un regard prolongé, souvent méditatif,pointes sèches <strong>de</strong> Moreh affirment leur différence dans uneparfois analytique. Connotations abstraites, approchesthématique intemporelle dont l’axe majeur est à l’évi<strong>de</strong>ncefiguratives ou narratives, suggestions oniriques attestent <strong>de</strong>« la souffrance <strong>de</strong> l’être humain et <strong>de</strong> l’animal ».l’étendue <strong><strong>de</strong>s</strong> registres expressifs du métal gravé et <strong>de</strong> sonD’<strong>au</strong>tres fortes personnalités - George Ball, Devorahprolongement naturel : l’impression sur papier. CertainesBoxer, Louis-René Berge, Yves Doaré, Béalu, Jean-Pierreplanches avouent même leur caractère « semi-sculptural ».Ting<strong>au</strong>d, Jean-Michel Matthieu-Marie, Jacques Houplain,Le papier se métamorphose en trois dimensions lorsque leNathalie Grall, Eric Robert-Aymé, Daniel Estra<strong>de</strong>, ainsicuivre <strong>de</strong> Paolo Boni y imprime ses découpes et trouéesque Roger Vieillard (1907-1989)… - accentuent l’éclectismemartelées. De la symbiose du faire artisanal et <strong>de</strong> la sensibilitéd’expositions qui trouvent leur résultante dans le choixtactile naissent entre les mains <strong>de</strong> Piza ces reliefsd’un unique matéri<strong>au</strong> créatif, le métal, et dont l’intituléconstellés, ces signes cunéiformes évocateurs <strong><strong>de</strong>s</strong> ancienspeut être diversement interprété. Concrètement, « signe »textes proche-orient<strong>au</strong>x. Plus discrètes, plus rares, les incisionsdans son contenu, une gravure sur cuivre, zinc ou acier esttrouant l’acier cernent la forme et s’intègrent naturel-également « marge » une fois imprimée (c’est-à-dire espacelement à la composition <strong><strong>de</strong>s</strong> e<strong>au</strong>x-fortes d’Assadour.immaculé <strong>de</strong> l’épreuve <strong>au</strong>tour <strong>de</strong> la cuvette). Mot à motDans un espace géométral mathématiquement quadrillé,tangible faisant <strong>au</strong>ssi allusion à une « poétique du signe »ponctué <strong>de</strong> triangles insolites, d’arcs et <strong>de</strong> cercles <strong>au</strong> compas,inscrite sous différentes formes et à différents moments <strong>de</strong>l’artiste projette un univers énigmatique <strong>de</strong> mini-personnagesl’évolution occi<strong>de</strong>ntale <strong>de</strong> cet art du XV e siècle à nos jours.découpés, chiffres symboliques et signes à décrypter quiLa présence du livre valorise le propos en raison même <strong>de</strong>interrogent et captivent <strong>au</strong>x approches <strong>de</strong> l’irréalité. Un artl’osmose « signe - mot » / « signe - image » particulièrementparadoxalement cérébral et ludique que d’<strong>au</strong>cuns situent,évi<strong>de</strong>nte lorsque la composition typographique rompt avec<strong>de</strong> par l’esprit <strong>de</strong> la composition et malgré la présencela traditionnelle mise en page pour <strong>de</strong>venir « <strong><strong>de</strong>s</strong>sin ».d’éléments figuratifs, dans le prolongement immédiat <strong>de</strong>« Le Signe et la Marge » n’est pas un exemple unique.l’abstraction. Souveraine, l’abstraction l’est dans les libresLes calendriers <strong>de</strong> nos musées <strong>de</strong> province sont ponctuésaquatintes <strong>de</strong> Vielle et Boisgallays, les e<strong>au</strong>x-fortes rigoureu-<strong>de</strong> programmations sur la gravure contemporaine conçuesavec amour et compétence. On peut seulement regretterque ces expositions ne soient pas soutenues financièrement24 | et médiatiquement par les <strong>au</strong>torités <strong>de</strong> tutelle dont les | 25Cl<strong>au</strong><strong>de</strong>-Jean Darmon, Les soleils, 2010,pointe sèche sur cuivre, 37 x 22 cm.choix, sans doute dans plus d’un cas justifiés, ne concernentcependant, la plupart du temps, qu’un aspect très limité <strong>de</strong>la création d’<strong>au</strong>jourd’hui. u


DossierUne prési<strong>de</strong>nte <strong>de</strong> région interrogée sur sa politique<strong>de</strong> 1% artistique, répondait il y a quelques années :« Je vous informe que les lois <strong>de</strong> décentralisationn’ont pas transféré <strong>au</strong>x collectivités territoriales l’obligationdu 1% décoration. L’assemblée régionale, comme une largemajorité <strong>de</strong> collectivités, a décidé <strong>de</strong> favoriser le parti architecturalet l’équipement bien souvent <strong>au</strong>-<strong>de</strong>là du 1% plutôtque d’appliquer ce pourcentage sur une œuvre artistique ».C’est peu dire que le 1% artistique se heurte à la réticence<strong>de</strong> nombreux élus loc<strong>au</strong>x et il serait excessif <strong>de</strong> dire que tousles architectes y sont favorables.Vingt ans après la Loi <strong>de</strong> décentralisation, les nouvellesdispositions réglementaires (1) <strong>de</strong>vaient permettre la miseen vigueur <strong>de</strong> l’obligation pour les communes, les départementset les régions, <strong>de</strong> consacrer 1% du montant <strong>de</strong>l'investissement à l'insertion d'œuvres d'art dans toutes lesconstructions qui faisaient l'objet <strong>au</strong> 23 juillet 1983 <strong>de</strong> lamême obligation à la charge <strong>de</strong> l'Etat. Il semble bien que legouvernement ait choisi un texte <strong>de</strong> compromis. Plutôt uneapplication partielle que pas d’application du tout.Depuis 1983, le 1% était régi par divers arrêtés ministérielsqui ont tous été abrogés. Le principal d’entre eux,parce qu’il concernait le plus grand nombre <strong>de</strong> projets, étaitl’arrêté du Ministère <strong>de</strong> l’Education nationale signé parJack Lang en 1993. Les nouve<strong>au</strong>x décrets (1) reprennentglobalement les principales dispositions <strong>de</strong> cet arrêté, àquelques nuances près.“C’est peu direque le 1% artistiquese heurte à laréticence <strong>de</strong>nombreux élusloc<strong>au</strong>x.”L’arrêté Lang affirmait lanécessité <strong>de</strong> « contribuer àla qualité <strong><strong>de</strong>s</strong> constructionspubliques en associant les artsplastiques à l'architecture eten permettant <strong>au</strong>x utilisateurs<strong>de</strong> ces bâtiments un contactavec <strong><strong>de</strong>s</strong> œuvres originalesd'artistes vivants, sans exclusive<strong>de</strong> discipline artistique ». Mais déjà, il incluait danscette définition « l'intervention d'un artiste pour l'aménagementd'espaces paysagers, d'un stylicien pour la conceptiond'un mobilier ou celle d'un graphiste pour la mise <strong>au</strong>point d'une signalétique spécifique ». Les artistes se sontsouvent plaints <strong>de</strong> voir utiliser le 1% pour l’aménagement<strong><strong>de</strong>s</strong> espaces verts. Cela reste possible mais il y a plus.Désormais l’architecture entre dans le domaine du 1%. Eneffet, pour définir les « œuvres d’art » prévues par la Loi, ledécret se réfère <strong>au</strong> co<strong>de</strong> <strong>de</strong> la propriété intellectuelle. Etprécisément <strong>au</strong>x 7° à 10° <strong>de</strong> l’article L. 112-2 du co<strong>de</strong> <strong>de</strong> lapropriété intellectuelle, c'est-à-dire : « Les œuvres <strong>de</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong>sin,<strong>de</strong> peinture, d'architecture, <strong>de</strong> sculpture, <strong>de</strong> gravure,<strong>de</strong> lithographie, les œuvres graphiques et typographiques,les œuvres photographiques et celles réalisées à l'ai<strong>de</strong> <strong>de</strong>techniques analogues à la photographie, les œuvres <strong><strong>de</strong>s</strong> artsappliqués ». La circulaire ministérielle du 30 septembre2006 reprend cette liste sans citer l’architecture mais sansl’exclure et en y ajoutant « les œuvres utilisant la lumièreet les œuvres utilisant les nouvelles technologies ou faisant« 1% » ou vendues par un intermédiaire, tel qu’un fabricant<strong>de</strong> meubles ». Les œuvres éphémères sont déconseillées.Mais qui déci<strong>de</strong> ? Rappelons que le maître d’ouvrageconstitue un comité artistique dont il fait partie, qu’il prési<strong>de</strong>et qui comprend : le maître d’œuvre, le directeur régional<strong><strong>de</strong>s</strong> affaires culturelles ou son représentant, un représentant<strong><strong>de</strong>s</strong> utilisateurs du bâtiment, trois personnalités qualifiéesdans le domaine <strong><strong>de</strong>s</strong> arts plastiques désignées l’une parle maître <strong>de</strong> l’ouvrage et les <strong>de</strong>ux <strong>au</strong>tres par le directeurrégional <strong><strong>de</strong>s</strong> affaires culturelles, dont une choisie sur uneliste établie par les organisations professionnelles d’artistes.En résumé trois représentants du côté du maître d’ouvrage,y compris l’architecte (le maître d’œuvre), et trois représentantsdu côté <strong>de</strong> la culture. Entre eux le représentant <strong><strong>de</strong>s</strong>utilisateurs ; dans <strong>de</strong> nombreux cas, un fonctionnaire.Les modifications intervenues entre le décret du 29 avril2002 et celui du 4 février 2005, avec notamment la suppression<strong><strong>de</strong>s</strong> commissions artistiques régionales, vont dans lesens d’une simplification <strong><strong>de</strong>s</strong> procédures et du renforcementdu contrôle du Ministère <strong>de</strong> la Culture, ce qui peut êtreune garantie que le 1% artistique ne soit pas détourné <strong><strong>de</strong>s</strong>on objet. La composition <strong>de</strong> la commission nationale vaégalement dans ce sens, mais c’est le maître d’ouvrage qui ale pouvoir <strong>de</strong> la saisir.Compte tenu <strong><strong>de</strong>s</strong> règles <strong>de</strong> fonctionnement <strong>de</strong> l’Etat, onpeut penser que lorsque le maître d’ouvrage sera l’Etat,c’est plutôt le Ministère <strong>de</strong> la Culture qui emportera ladécision, à la fois sur la définition du projet artistique et sur26 |appel à d’<strong>au</strong>tres disciplines artistiques… S’agissant du le choix <strong>de</strong> l’artiste. Lorsque le Maître d’ouvrage sera uneet plastiques ». En clair, les syndicats <strong>de</strong> plasticiens.(1) décret du 29 avril 2002 modifié par le décret du 4 février 2005,circulaire du 16 août 2006.| 27mobilier, il est précisé que seules les créations artistiquesoriginales entrent dans le champ d’application du décret,qu’elles soient réalisées à l’issue d’une comman<strong>de</strong> via leLe 1%, vingt ans après...Par Didier Bernheim, avocat à la Cour, corresponda nt <strong>de</strong> l’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong>collectivité locale, la personnalité, l’importance politique dumaître d’ouvrage seront prépondérantes. La personnalité<strong>de</strong> l’architecte pourra également jouer un rôle qui ne serapas nécessairement en faveur <strong><strong>de</strong>s</strong> artistes. Sans oublier lereprésentant <strong><strong>de</strong>s</strong> usagers.Quel sera le rôle <strong>de</strong> l’architecte ? Dans le passé il étaitimportant. C’est souvent lui qui amenait le projet artistique.Avec les nouve<strong>au</strong>x textes ce ne sera plus le cas en théorie,mais n’oublions pas que l’architecte est titulaire du droitmoral sur son œuvre, ce qui lui donne un certain pouvoir, ycompris celui <strong>de</strong> refuser un projet artistique. La circulaireministérielle insiste à juste titre, sur la nécessaire concertationentre le maître d’œuvre et l’artiste retenu, tout <strong>au</strong> longdu projet.Le texte n’interdit pas qu’une partie du 1% soit consacréeà une œuvre d’artiste et une <strong>au</strong>tre partie à l’architecture ou<strong>au</strong>x espaces verts. Une partie <strong>de</strong> 1% c’est toujours mieuxque rien.L’introduction <strong><strong>de</strong>s</strong> organisations professionnelles d’artistesdans le comité artistique pose quelques questions.Qu’est-ce qu’une organisation professionnelle d’artistes ?Celles qui se déclarent comme telles ou celles qui sontcomposées d’artistes professionnels ? Et quels artistes ?Les œuvres visées dépassent le cadre <strong>de</strong> la Maison <strong><strong>de</strong>s</strong>Artistes et <strong>de</strong> l’AGESSA en incluant les arts appliqués.F<strong>au</strong>t-il tenir compte <strong>de</strong> leur représentativité réelle ? Laquestion se complique encore lorsque le texte évoque« une » liste établie par « les » organisations professionnelles.La circulaire du 30 septembre 2006 répond que « parorganisations professionnelles on entend les structuresdont le seul objet est la défense <strong><strong>de</strong>s</strong> intérêts matériels etmor<strong>au</strong>x <strong><strong>de</strong>s</strong> artistes relevant du champ <strong><strong>de</strong>s</strong> arts graphiquesEn tout état <strong>de</strong> c<strong>au</strong>se, l’existence d’une liste nationale <strong>au</strong>lieu <strong><strong>de</strong>s</strong> listes régionales permettra une meilleure maîtrisedu choix du dit représentant qui reste à la discrétion duFrançois Stahly (1911-2006),Fontaine pour le Parc Floral<strong>de</strong> Vincennes. Photo SiefkinDRAC, c'est-à-dire du Ministère <strong>de</strong> la Culture. Dans ledispositif <strong><strong>de</strong>s</strong> comités artistiques, ce représentant pourraêtre différent pour chaque projet. Ainsi il est probableque les représentants <strong><strong>de</strong>s</strong> organisations professionnelles unpeu trop critiques sur les choix du ministère ne seront passouvent désignés. Encore que leur singularité <strong>au</strong> sein <strong>de</strong>la commission permette d’y introduire une saine critique,sans inconvénients.Plus sérieusement, une question qui n’a toujours pas étéréglée et qui pose en pratique <strong>de</strong> nombreuses difficultés,notamment dans l’organisation <strong><strong>de</strong>s</strong> concours, est celle<strong>de</strong> la mise <strong>au</strong> point d’un modèle type <strong>de</strong> marché pour lesœuvres d’art intégrées dans les ouvrages publics, car lesmodèles <strong><strong>de</strong>s</strong>tinés <strong>au</strong>x entreprises qui servent <strong>de</strong> référence àl’administration sont inadaptés. Rappelons que la règle <strong>de</strong> lagarantie décennale ne s’applique pas <strong>au</strong>x décorations ayantun rôle purement esthétique, s<strong>au</strong>f si elles constituent ellesmêmesun ouvrage ou un élément constitutif <strong>de</strong> l’ouvrage,ce qui est très rare (2). Que l’on cesse donc <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>au</strong>xartistes <strong>de</strong> justifier d’une assurance garantie décennale !En conclusion, l’application <strong>de</strong> la Loi dans un sens favorable<strong>au</strong>x artistes par les collectivités locales passe par untravail <strong>de</strong> persuasion <strong><strong>de</strong>s</strong> élus <strong>de</strong> la nécessité d’intégrerleurs œuvres dans les constructions publiques, mais <strong>au</strong>ssi<strong>de</strong> la nécessité sociale <strong>de</strong> leur accor<strong>de</strong>r la part <strong><strong>de</strong>s</strong> dépensespubliques à laquelle ils ont droit. u(2) Arrêts <strong>de</strong> la cour <strong>de</strong> cassation 3ème chambre civile 27 avril 2000,pourvoi n°99-15970 et 16 mai 2001, pourvoi n°99-15062).


ExpositionsActualitésHommageL’ère <strong>de</strong> lasculpturePrixSculptures en mouvement<strong>au</strong> châte<strong>au</strong> <strong>de</strong> LacosteSculptures en mouvement et sculptures <strong>au</strong>féminin, une pluralité d’expressions pour unart sur lequel le temps n’a <strong>au</strong>cune prise et quipactise avec l’éternité.Prix <strong>de</strong> chant choral Liliane BettencourtLe lundi 6 juin, le Prix <strong>de</strong> chant choral a été attribuéà l'ensemble vocal Sequenza 9.3, dirigé parCatherine Simonpietri.Prix <strong>de</strong> la Fondation Simone et Cino <strong>de</strong>l DucaL'Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong> a décerné les Prixartistiques <strong>de</strong> la Fondation Simone et Cino <strong>de</strong>l Ducaa Erró (peintre), Jean-P<strong>au</strong>l Philippe (sculpteur) etPhilippe Boesmans (compositeur).Les Prix <strong>de</strong> musique, prix d'encouragement, ontété attribués à Emmanuel Ceysson (harpiste),Romain Leleu (trompettiste), Maxime Pascal (chefd'orchestre) et Debora Waldman (chef d'orchestre).Grand Prix d'Orgue Jean-Louis FlorentzLe dimanche 15 mai, lors <strong>de</strong> la 10 e édition du GrandPrix d'Orgue Jean-Louis Florentz, le Grand Prix a étéremporté par le jeune organiste Virgile Monin.28 |Pour le <strong>de</strong>uxième été consécutif, Pierre Cardinouvre le châte<strong>au</strong> <strong>de</strong> Lacoste à la sculpture.Cette année, ren<strong>de</strong>z-vous est pris avec les pionniers<strong>de</strong> l’art cinétique et cybernétique qui dans les annéescinquante à Paris ont expérimenté l’espace-temps, lemouvement, la lumière, la couleur, pour une notiond’imprévisibilité et une participation active duspectateur <strong>de</strong> leur œuvre. Yaacov Agam (né en 1928en Israël) et ses sculptures en acier inoxydables, ditestransformables par la réflexion et le déplacement <strong>de</strong>celui qui regar<strong>de</strong>, acteur <strong>de</strong> métamorphoses inattenduespour une multitu<strong><strong>de</strong>s</strong> d’espaces. Carlos Cruz-Diez(né en 1923 à Caracas) qui suggère l’espace coloré nonplus par la forme mais par le jeu vibratoire <strong>de</strong> la couleuret <strong>de</strong> sa persistance rétinienne avec ses trois Douchesd’Inductions chromatiques (1968). Les sculptures <strong><strong>de</strong>s</strong>on compatriote vénézuelien Jesús-Rafael Soto (1923-2005) sont <strong><strong>de</strong>s</strong> volumes virtuels installés dans l’espacepour une interaction entre la lumière et les couleurs :son spectaculaire Pénétrable Bleu (1999) appartient àune série in<strong>au</strong>gurée en 1967. De Philippe Hiquily (né en1925 en <strong>France</strong>) trois girouettes monumentales en ferpeint epoxy noir pour dialoguer avec le mistral. NicolasSchöffer (1912-1992) est l’inventeur <strong>de</strong> l’art cybernétique,le pionnier <strong>de</strong> l’art vidéo (1961) et <strong>de</strong> l’art numérique(1986). Artiste-plasticien poète ingénieur, il est le premierà réaliser <strong><strong>de</strong>s</strong> œuvres d’art dans le temps réel. Il est éluà l’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong> en 1982. Ses sculptures,lumineuses, en mouvement, sonores, cinétiques, puisprogrammées, s’installent dans l’espace urbain en osmosetotale avec la vie et l’art. Cinq créateurs qui partagent unedimension ludique et poétique <strong>de</strong> l’espace et se retrouventpour un dialogue exceptionnel dans ce lieu mythique.L.H. u Commissaire Lydia HarambourgNicolas Schöffer, LUX 11, 1960, sculpture spatioluminodynamique,100 x 120 x 125 cm, acier inox poli miroir sur plate<strong>au</strong> tournant.Collection Eléonore <strong>de</strong> L. SchöfferChâte<strong>au</strong> <strong>de</strong> Lacoste (84) | 8 juillet - 2 octobreSculpture'EllesSur le thème inédit <strong><strong>de</strong>s</strong> femmes sculpteurs, le musée <strong><strong>de</strong>s</strong>Années Trente à Boulogne-Billancourt propose une expositionconsacrée <strong>au</strong>x sculpteurs femmes du XVIII e siècle à nosjours. À la présupposée question : y <strong>au</strong>rait-il une sculptureféminine ?, la réponse serait la réalité d’une sculpture <strong>au</strong>féminin. La pertinence du sujet porte sa complexité avecses découvertes, ses rencontres <strong>au</strong>-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> tout dogmatisme.Démonstration faite <strong>de</strong> la présence permanente <strong>de</strong> femmessculpteurs sur <strong>de</strong>ux siècles, pionnières, indépendantes, engagéesdans un langage aguerri et distinctif. Plus méconnues que leursconsœurs peintres, elles sortent <strong>de</strong> l’ombre avec une centained’œuvres qui n’est pas exh<strong>au</strong>stive. L.H. uBrigitte Terziev, En défense, 2008, terre cuite et plomb. Photo Henri DelageMusée <strong><strong>de</strong>s</strong> Années trente - Espace LandowskiBoulogne-Billancourt (92) | Jusqu’<strong>au</strong> 2 octobreDe g<strong>au</strong>che à droite :Le peintre Erró, Photo DR.Catherine Simonpietri dirigeantl'ensemble vocal Sequenza 9.3,Photo Julien Tack.Ci-contre : Le jeune organisteVirgile Monin. Photo DR.NominationsPatrick <strong>de</strong> Carolis a reçu la médaille <strong>de</strong> l’Académied’Architecture, pour son travail <strong>de</strong> valorisation dupatrimoine avec son émission Des Racines et <strong><strong>de</strong>s</strong> Ailes.Léonard Gianadda, a reçu, le 17 juin, les insignes<strong>de</strong> Comman<strong>de</strong>ur dans l'Ordre national <strong>de</strong> la Légiond'Honneur par Bernard Accoyer, Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>l'Assemblée nationale.Seiichiro UjiiéNous avons appris avec tristesse le décès <strong>de</strong> SeiichiroUjiié, Prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> Nippon Television NetworkCorporation (NTV), survenu en avril <strong>de</strong>rnier.Il avait été élu membre associé étranger <strong>de</strong> l’Académie<strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong> <strong>de</strong> l’Institut <strong>de</strong> <strong>France</strong> en 2004. Sonattention pour notre Institution le porta à subventionnerpar <strong><strong>de</strong>s</strong> dons généreux la rest<strong>au</strong>ration du jardin japonais<strong>de</strong> la Villa Ephrussi <strong>de</strong> Rothschild à St Jean Cap Ferrat.Splendi<strong>de</strong>ment rest<strong>au</strong>ré, tant dans son esprit que dans saforme, ce jardin <strong>de</strong>meurera comme un <strong><strong>de</strong>s</strong> fleurons <strong>de</strong>notre patrimoine.Tout <strong>au</strong> long <strong>de</strong> sa vie, Seiichiro Ujiié sut allier lesfonctions exceptionnelles d’un grand manager à un belélan du cœur, le portant à soutenir tout ce qui émanait<strong>de</strong> l’art et <strong>de</strong> la culture. C’est pourquoi Seiichiro Ujiiéoccupera une place exceptionnelle dans notre mémoire.Photos Brigitte Eymann u| 29


CommunicationCommunicationArt et phénoméne sectairePar Georges Fenech, prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la Mission interministérielle <strong>de</strong> vigilanceet <strong>de</strong> lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES)30 |Culte <strong>de</strong> l’avant-gar<strong>de</strong>et culture <strong>de</strong> mortPar Jean Clair, conservateur général du patrimoine,historien <strong>de</strong> l'art, membre <strong>de</strong> l'Académie françaiseUne petite église <strong>de</strong> campagne, avec son toit d’ardoise,ses murs passés à la ch<strong>au</strong>x. La messe, ledimanche. une sorte d’opéra total où, comme dansle texte <strong>de</strong> Saint Augustin, les cinq sens étaient tout à toursollicités ; la vue avec les habits chatoyants du curé, l’ouïeavec les chants <strong><strong>de</strong>s</strong> enfants et l’harmonium, l’odorat avec lesparfums mélangés <strong><strong>de</strong>s</strong> bougies et <strong>de</strong> la cire <strong><strong>de</strong>s</strong> prie-Dieu,qui trouvait son point d’orgue dans les fumées d’encens, letoucher dans le contact rugueux aves les vieux missels <strong>de</strong>cuir, le goût dans le contact fa<strong>de</strong> avec l’hostie et peut-êtrele pressentiment d’<strong>au</strong>tre chose dans ces corps quasimentimmatériels, les corps <strong>de</strong> lumière <strong><strong>de</strong>s</strong> saints<strong><strong>de</strong>s</strong>sinés sur les vitr<strong>au</strong>x et plus immatérielencore, le corps blanc et lumineux, qui s’élevaitsur l’<strong>au</strong>tel, présence d’un Dieu <strong>au</strong>quelce petit opéra était, et à lui seul, <strong><strong>de</strong>s</strong>tiné. J’yai goûté l’émotion qu’éprouvait Proust dansses transvertébrations. Et peut-être <strong>au</strong>ssim’étais-je approché, sans le savoir encore, <strong>de</strong> certains mystères.Un chant bien mo<strong><strong>de</strong>s</strong>te comparé <strong>au</strong>x grands éclatsdu mon<strong>de</strong> que Saint Augustin écoutait pour s’enquérir <strong>de</strong>l’existence <strong>de</strong> Dieu. Un chant cependant.“J’y ai goûtél’émotion qu’éprouvaitProust dans sestransvertébrations.Extrait d’une conférence dans laquellenotre confrère Jean Clair interroge lesrapports complexes entre l'art contemporainet les traditions religieuses. Photo Nérac”Un jour, j’avais treize ans, une Parisienne en villégiaturedans ce petit village, entichée d’avant-gar<strong>de</strong>, <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>rnité et<strong>de</strong> musique électronique, voulut offrir un spectacle d’avantgar<strong>de</strong><strong>au</strong>x petits paysans qui venaient là àla messe. Ce fut, pendant une heure, <strong><strong>de</strong>s</strong>bruits assourdissants et dissonants, la projection<strong>de</strong> spots lumineux stri<strong>de</strong>nts, la récitation<strong>de</strong> poèmes futuristes. Je fus non pasépouvanté, mais à dire le mot juste, écœuré.En un instant, le sacré avait déserté ce lieusi p<strong>au</strong>vre, et la vulgarité sans espoir du mon<strong>de</strong> contemporains’y était installée. Je n’ai, <strong>de</strong>puis cette profanation arroganteet insensée, jamais franchi le seuil d’une église. Ou plutôtsi : chaque fois qu’à Venise je veux revoir les mosaïques <strong>de</strong>la Basilique Saint-Marc, je me présente le dimanche à 11heures <strong>au</strong> portail nord, en prétextant que je viens assisterà la messe. C’est le seul subterfuge capable désormais <strong>de</strong>me donner accès à ce lieu, dans lequel, par <strong><strong>de</strong>s</strong> queuesinterminables, pénètrent par milliers, par le portail ouest, lestouristes. C’est un curieux retournement <strong><strong>de</strong>s</strong> choses, mais ilme semble qu’il est pervers. uGran<strong>de</strong> salle <strong><strong>de</strong>s</strong> séances, le 4 mai 2011Devant la montée du phénomène sectaire,les pouvoirs publics se mobilisentpour juguler les aspects inacceptables <strong>de</strong>ce mal endémique, qui s’insinue à tousles nive<strong>au</strong>x <strong>de</strong> la vie sociale. Qu’en est-il<strong><strong>de</strong>s</strong> rapports entre l’art et cette tentationsectaire dont les dérives se révèlent<strong>au</strong>jourd’hui mais qui ne date pas d’hier ?Le déclin <strong><strong>de</strong>s</strong> religions traditionnelles, le bouleversement<strong><strong>de</strong>s</strong> structures familiales, la crise <strong><strong>de</strong>s</strong> valeursocci<strong>de</strong>ntales, les peurs climatiques, environnementales,pandémiques sont <strong>au</strong>tant d’explications à cette expansiondu phénomène sectaire : quelques 500.000 <strong>de</strong> nosconcitoyens happés par les sectes dont 80.000 enfants, etd’après un récent sondage environ 13 millions <strong>de</strong> nos concitoyensconnaissent dans leur entourage (amical, social ouprofessionnel) quelqu’un qui a été victime d’une dérive sectaire.L’homme, cet animal religieux, angoissé par l’avenir,<strong>de</strong>vient une proie idéale pour <strong><strong>de</strong>s</strong> groupements pseudo-religieux,capables d’offrir sur mesure toutes sortes <strong>de</strong> solutions<strong>de</strong> rechange bien exposées dans ce nouve<strong>au</strong> supermarchédu religieux. […]Dans ce système totalisant et totalitaire où tout élémentdu réel se trouve interprété à l’<strong>au</strong>ne <strong>de</strong> la doctrine, l’espritcritique est entravé car <strong>au</strong>cun démenti ne peut plus êtreentendu, <strong>au</strong>cun élément du réel ne peut plus apparaîtrecomme contradictoire. Et à cette interprétation du mon<strong>de</strong><strong>de</strong>venue aveugle s’ajoute la pression du groupe : constituépar l’adhésion à ce type <strong>de</strong> doctrine, il <strong>de</strong>vient très vite <strong>au</strong>toréférentiel,chacun dans le groupe renforçant sa croyancepar la confirmation qu’il trouve chez les <strong>au</strong>tres a<strong>de</strong>ptes. Uneemprise mentale est donc possible, emprise du gourou seulou du groupe tout entier : l’individu, croyant n’obéir qu’àlui-même, obéit à un <strong>au</strong>tre, il <strong>de</strong>vient incapable <strong>de</strong> modifierson comportement ou son opinion, et ce quand bien mêmeceux-ci iraient à l’encontre <strong>de</strong> son intérêt. Tout se passecomme si l’individu qui adhère à un groupement sectaire<strong>de</strong>venait prisonnier d’un rêve éveillé et même, pourrait-ondire : rêvait le rêve d’un <strong>au</strong>tre. […]En réfléchissant sur la relation entre art et phénomènesectaire, ce qui m’a frappé d’emblée, c’est le fait que j’étaisbien incapable <strong>de</strong> désigner <strong><strong>de</strong>s</strong> artistes, <strong><strong>de</strong>s</strong> œuvres, voire<strong><strong>de</strong>s</strong> styles propres <strong>au</strong>x groupements sectaires que j’ai pu“L’art dansles sectes est unart abusé, un artdévoyé.”rencontrer. C’est cette incapacité qui est le point <strong>de</strong> départ<strong>de</strong> ma réflexion pour la raison évi<strong>de</strong>nte que l’art dans lessectes est un art abusé, un art dévoyé.Il y a bien une spiritualité à l’œuvre à l’origine <strong>de</strong> toutphénomène sectaire, non qu’il s’agisse toujours <strong>de</strong> religion,dans l’acception courante du terme, mais il y a spiritualité <strong>au</strong>sens où l’ensemble <strong><strong>de</strong>s</strong> convictions qui sou<strong>de</strong>nt cette commun<strong>au</strong>térepose sur le refus dumatérialisme et l’affirmation d’uneperception holistique <strong>de</strong> l’esprit etdu corps qui se caractérise par unequête <strong>de</strong> sens, <strong>de</strong> libération ouencore d’union avec <strong><strong>de</strong>s</strong> principestranscendants ou invisibles <strong>au</strong> profane.C’est pourquoi on pourrait s’attendre à ce que ces mouvementssectaires soient les plus à même, <strong>de</strong> par leurnouve<strong>au</strong>té et leur marginalité, d’être un creuset pour lacréation artistique. Jouant sur le suprasensible et la quête <strong><strong>de</strong>s</strong>ens, on s’attendrait à ce qu’ils soient à l’origine d’un nouvelélan esthétique. Or, il semble qu’il n’en est rien.On pourrait facilement m’objecter qu’il y a bel et bienune production esthétique <strong>au</strong> sein <strong>de</strong> ces mouvements :ils produisent <strong><strong>de</strong>s</strong> images, <strong><strong>de</strong>s</strong> musiques, construisent <strong><strong>de</strong>s</strong>bâtiments ou participent <strong>de</strong> l’industrie cinématographique.Pourquoi ne pas y voir <strong><strong>de</strong>s</strong> œuvres d’art ? Mon jugementn’est-il pas partial ? Si je ne reconnais pas comme œuvred’art la production esthétique <strong>de</strong> ces groupes, n’est-ce pasdéjà parce que je les considère comme étant coercitifs etaliénants, donc impropres à la création artistique ?L’ancien juge d’instruction que je suis tentera donc uneexpertise à charge et à décharge pour tenter <strong>de</strong> tracer unefrontière entre ce que l’on juge acceptable et ce que l’onrefuse, entre l’artefact esthétique et l’œuvre d’art, entre unespiritualité dévoyée et une spiritualité <strong>au</strong>thentique, entreune emprise mentale et une adhésion libre et éclairée. uGran<strong>de</strong> salle <strong><strong>de</strong>s</strong> séances, le 1 er juin 2011En h<strong>au</strong>t : Le nouve<strong>au</strong> « Centre <strong>de</strong> dissémination et <strong>de</strong> distribution »(17 000 m 2 ), où sera produit une gran<strong>de</strong> partie du matériel <strong>de</strong>propagan<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Église <strong>de</strong> Scientologie internationale,installé à Los Angeles, Etats-Unis.| 31


32 |Calendrier <strong><strong>de</strong>s</strong> AcadémiciensYann Arthus-BertrandParticipe, en tant que Prési<strong>de</strong>nt<strong>de</strong> la Fondation Good Planet,à l’exposition « Des Forêts et<strong><strong>de</strong>s</strong> Hommes » qui réunit 40photographes pour célébrer en 70images l’Année Internationale <strong><strong>de</strong>s</strong>Forêts, Place du Palais Royal à Paris,du 25 juin <strong>au</strong> 24 juillet.Cl<strong>au</strong><strong>de</strong> AbeilleExposition regroupant <strong><strong>de</strong>s</strong>sculptures, <strong><strong>de</strong>s</strong>sins et gravures,<strong>au</strong> Crédit Mutuel ARKEA, <strong>au</strong>Relecq-Herhuon, près <strong>de</strong> Brest,jusqu'<strong>au</strong> 12 septembre.Exposition <strong>de</strong> sculptures récentesavec le Groupe 109, à la Citéinternationale <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>Arts</strong>, à Paris,du 22 septembre <strong>au</strong> 2 octobre.Louis-René BergeExposition, à l'initiative <strong>de</strong>l'Estampe D'Aquitaine, d'unecinquantaine <strong>de</strong> gravures à la SalleCapitulaire <strong>de</strong> Mably, à Bor<strong>de</strong><strong>au</strong>x,du 20 septembre <strong>au</strong> 5 octobre.Erik DesmazièresExposition « Livres & suitesgravées », à la galerie ArsèneBonafous-Murat, à Paris,du 17 juin <strong>au</strong> 13 juillet.François-Bernard MichelDonne une conférence sur son<strong>de</strong>rnier ouvrage Proust et Beckett,<strong>de</strong>ux corps éloquents, Ed. Actes Sud,<strong>au</strong> musée Fabre <strong>de</strong> Montpellier,en partenariat avec la librairieS<strong>au</strong>ramps, le 16 juin.L<strong>au</strong>rent PetitgirardDirige l'Orchestre Philharmonique<strong>de</strong> Strasbourg, dans <strong><strong>de</strong>s</strong> œuvres<strong>de</strong> Bizet, Schumann, Brahms,Rachmaninov, concert retransmissur Arte TV Internet, <strong>au</strong> Jardin <strong><strong>de</strong>s</strong>Deux Rives <strong>de</strong> Strasbourg, le 10 juin.Dirige l'Orchestre Philharmonique<strong>de</strong> Nice, Emmanuel Ceysson, harpe,dans <strong><strong>de</strong>s</strong> œuvres <strong>de</strong> Roussel, Saint-Saëns, Pierné, Bizet, <strong>au</strong> Cloître <strong>de</strong>Cimez à Nice, le 28 juillet.Brigitte TerzievParticipe à l'exposition« Sculpture'Elles, les sculpteursfemmes du XVIII e siècle à nosjours » <strong>au</strong> musée <strong><strong>de</strong>s</strong> Années Trenteà Boulogne-Billancourt (voir page28), jusqu'<strong>au</strong> 2 octobre.Vladimir VelickovicExposition personnelle <strong>de</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong>sins etcollages <strong>au</strong> Salon d'art à Bruxelles,jusqu'<strong>au</strong> 16 juillet.Exposition personnelle à la galerieAnna Tschopp, à Marseille,jusqu'<strong>au</strong> 30 juillet.La pyrami<strong>de</strong> du musée du Louvre, 1988,Ieoh Ming Pei, architecte. Comman<strong>de</strong> du Prési<strong>de</strong>ntFrançois Mitterand. Photo Talke PhotographyL’Académie<strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong>Secrétaire perpétuel : Arn<strong>au</strong>d d’H<strong>au</strong>terivesBUREAU 2011Prési<strong>de</strong>nt : L<strong>au</strong>rent PetitgirardVice-prési<strong>de</strong>nt : François-Bernard MichelSection I - PEINTUREGeorges MATHIEU • 1975Arn<strong>au</strong>d d’HAUTERIVES • 1984Pierre CARRON • 1990Guy <strong>de</strong> Rougemont • 1997Chu Teh-Chun • 1997Yves MILLECAMPS • 2001Jean Cortot • 2001Zao Wou-Ki • 2002Vladimir Velickovic • 2005Section II - SCULPTUREJean CARDOT • 1983Gérard LANVIN • 1990Cl<strong>au</strong><strong>de</strong> ABEILLE • 1992Antoine PONCET • 1993Eugène Do<strong>de</strong>igne • 1999Brigitte Terziev • 2007Pierre-Edouard • 2008Section III - ARCHITECTURERoger TAILLIBERT • 1983P<strong>au</strong>l Andreu • 1996Michel FOLLIASSON • 1998Yves Boiret • 2002Cl<strong>au</strong><strong>de</strong> Parent • 2005Jacques Rougerie • 2008Aymeric Zublena • 2008Section IV - GRAVUREPierre-Yves TRÉMOIS • 1978René Quillivic • 1994Louis-René Berge • 2005Erik Desmazières • 2008Section V - COMPOSITION MUSICALEJean PRODROMIDÈS • 1990L<strong>au</strong>rent Petitgirard • 2000Jacques Tad<strong>de</strong>i • 2001François-Bernard MÂche • 2002Edith Canat <strong>de</strong> Chizy • 2005Charles Chaynes • 2005Michaël Levinas • 2009Section VI - MEMBRES LIBRESMichel DAVID-WEILL • 1982Pierre CARDIN • 1992Henri Loyrette • 1997François-Bernard Michel • 2000Hugues R. Gall • 2002Marc Ladreit <strong>de</strong> LAcharrière • 2005William Christie • 2008Patrick <strong>de</strong> carolis • 2010S e c t i o n V I ICRéATIONS ARTISTIQUES DANSLE CINÉMA ET L’AUDIOVISUELPierre SCHŒNDŒRFFER • 1988Roman POLANSKI • 1998Jeanne More<strong>au</strong> • 2000Régis Wargnier • 2007Jean-Jacques Ann<strong>au</strong>d • 2007Section VII - PhotographieLucien Clergue • 2006Yann Arthus-Bertrand • 2006ASSOCIÉS ÉTRANGERSS.M.I. Farah PAHLAVI • 1974Ieoh Ming PEI • 1983Philippe ROBERTS-JONES • 1986Ilias LALAOUNIS • 1990Andrzej Wajda • 1994Antoni Tapiés • 1994Leonard Gianadda • 2001Seiji Ozawa • 2001William Chattaway • 2004Woody Allen • 2004SA Karim Aga Khan IV • 2007SA Sheikha Mozah • 2007Sir Norman Foster • 2007L’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong> est l’une <strong><strong>de</strong>s</strong> cinq académies qui constituentl’Institut <strong>de</strong> <strong>France</strong> : l’Académie française, l’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Inscriptions etBelles-Lettres, l’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Sciences, l’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Be<strong>au</strong>x-<strong>Arts</strong>,l’Académie <strong><strong>de</strong>s</strong> Sciences Morales et Politiques.

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