LA DEPORTATION DE LA FAMILLE DRIAY
LA DEPORTATION DE LA FAMILLE DRIAY LA DEPORTATION DE LA FAMILLE DRIAY
28Peu de gens croyaient au pire, rien dans l’histoire dumonde ne pouvait constituer une référence fidèle à ceque les nazis avaient décidé de mettre en œuvre.L’homme normal ne sait pas que tout est possible,comme l’écrivit, après la guerre, l’écrivain DavidROUSSET.En ce mois de Mai 1944, il est donc dans tous les esprits, quel’armée allemande n’est plus invincible. Le 4 Mars 1942, DeGaulle avait déjà clamé que « l’heure de Clémenceau » allaitadvenir, rappelant ainsi la fin de la première guerre mondialequi donna la victoire à la France et à ses alliés. Alors Victorgarde confiance, surmonte sa peur, et s’exhorte à trouver en luiles forces pour affronter toute situation, conscient, d’unecertaine manière, de vivre un moment unique de l’Histoire del’Humanité 2 . Certains s’affaiblissent dans la nervosité, etd’autres dans la folie. D’autres encore restent totalement naïfset ignorent tout de la Question Juive. Parmi les déportés de sonconvoi, certains croient qu’il ne s’agit uniquement de transportsde prisonniers destinés à travailler en Allemagne ; d’autres, àleur arrivée à Auschwitz, demanderont où se situe le parc pourenfants dont ils avaient entendu parler.Revenons donc à cette matinée du 10 Mai 1944, dans le campde Marseille. Vers neuf heures, deux civils de la Gestapo avecquelques SS, ainsi que le représentant des Formations deTravailleurs étrangers, arrivent. Quatre-vingt six hommes sontmis dans deux camions, avec les bagages. Les prisonniers sontensuite conduits à la prison des Baumettes. A l’ouverture desgrilles, un peloton de gardes allemands se présente, et faitaligner les détenus au mur. Cris et gestes théâtraux desgardiens. Puis, les détenus sont envoyés en cellule, à raison detrois par cellule. L’un des compagnons de Victor affiche unepeur de tous les instants, et provoque même, par ses excès, uncertain amusement contenu de ses codétenus. La nourriture estdistribuée aux détenus, pain et margarine. Les détenus2 Selon les propres termes de mon père, lorsqu’il me racontait son histoire.
29disposent toujours de leurs papiers d’identité, et peuventencore croire à un statut de simple prisonnier de guerre.A la matinée du troisième jour, se présente le garde, avec lafiche signalétique de Victor, et demande à celui-ci de sortir dela cellule. Victor descend dans la grande cour et passe à lafouille. On lui enlève tout ce qu’il détient jusqu’au moindregrand de tabac, mais il réussit à planquer mille francs. Avecenviron 75 autres détenus, il est conduit dans une grandecellule. Ici, que des Juifs. La réalité du système commence à sedévoiler d’elle-même. Les rations sont maigres, et tous lesdétenus sont affaiblis par le manque d’air. Dans l’après-midi, ungarde se présente pour prendre des détenus en vue de lesaffecter à une corvée à l’extérieur. Victor se porte volontaire,dans l’objectif d’être à l’air frais. Une équipe de détenus estconstituée, avec sauts et pelles. Vers 18 heures, de son groupede 15 personnes, l’un d’entre eux manque à l’appel. Le soirmême, suite à cette évasion (dont on ne sait si elle fut réussie),un officier punit un ensemble de détenus, dont Victor, à courir,à traîner sur le sol, toute la nuit, enchaînés, sous les coups et lefroid. A huit heures du matin, les prisonniers retrouvent leurcellule, en reprenant leurs forces tant bien que mal.Le 17 Mai 1944, les Allemands viennent chercher unecinquantaine de détenus, dont Victor, et les remettent dans descellules individuelles. Les papiers d’identité, ainsi que le linge,sont restitués aux détenus. Vers 23 heures, chaque détenureçoit un paquet Croix Rouge. Les détenus sont ensuiteconduits dans un hall, où Victor retrouve trois amis, Simon,Maurice et Fechter. Il y a ici, environ 1200 personnes, hommesde tous âges, femmes, enfants, bébés. Certains sont malades,d’autres blessés. Les détenus montent dans les autocars àgrand renfort de coups, puis conduits à la gare de Marseille, surla voie spéciale, avec un service d’ordre fait par la milice.Empilés par 80 dans des wagons à bestiaux, sans cuvette, nipaille. Victor est avec Fechter. Il fait la connaissance des deuxfrères Palombo, qui habitent Avignon et qui sont décidés às’enfuir avant la fin du voyage. A minuit, le train démarre. Vers
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29disposent toujours de leurs papiers d’identité, et peuventencore croire à un statut de simple prisonnier de guerre.A la matinée du troisième jour, se présente le garde, avec lafiche signalétique de Victor, et demande à celui-ci de sortir dela cellule. Victor descend dans la grande cour et passe à lafouille. On lui enlève tout ce qu’il détient jusqu’au moindregrand de tabac, mais il réussit à planquer mille francs. Avecenviron 75 autres détenus, il est conduit dans une grandecellule. Ici, que des Juifs. La réalité du système commence à sedévoiler d’elle-même. Les rations sont maigres, et tous lesdétenus sont affaiblis par le manque d’air. Dans l’après-midi, ungarde se présente pour prendre des détenus en vue de lesaffecter à une corvée à l’extérieur. Victor se porte volontaire,dans l’objectif d’être à l’air frais. Une équipe de détenus estconstituée, avec sauts et pelles. Vers 18 heures, de son groupede 15 personnes, l’un d’entre eux manque à l’appel. Le soirmême, suite à cette évasion (dont on ne sait si elle fut réussie),un officier punit un ensemble de détenus, dont Victor, à courir,à traîner sur le sol, toute la nuit, enchaînés, sous les coups et lefroid. A huit heures du matin, les prisonniers retrouvent leurcellule, en reprenant leurs forces tant bien que mal.Le 17 Mai 1944, les Allemands viennent chercher unecinquantaine de détenus, dont Victor, et les remettent dans descellules individuelles. Les papiers d’identité, ainsi que le linge,sont restitués aux détenus. Vers 23 heures, chaque détenureçoit un paquet Croix Rouge. Les détenus sont ensuiteconduits dans un hall, où Victor retrouve trois amis, Simon,Maurice et Fechter. Il y a ici, environ 1200 personnes, hommesde tous âges, femmes, enfants, bébés. Certains sont malades,d’autres blessés. Les détenus montent dans les autocars àgrand renfort de coups, puis conduits à la gare de Marseille, surla voie spéciale, avec un service d’ordre fait par la milice.Empilés par 80 dans des wagons à bestiaux, sans cuvette, nipaille. Victor est avec Fechter. Il fait la connaissance des deuxfrères Palombo, qui habitent Avignon et qui sont décidés às’enfuir avant la fin du voyage. A minuit, le train démarre. Vers