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duVoyage - Fondation Groupama Gan pour le Cinéma

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au cinéma, en particulier <strong>le</strong> collage. Il s’agit d’une opération spécifiquement cinématographique qui va permettre<br />

de raccorder deux bouts de pellicu<strong>le</strong> séparés par un arrêt de la caméra. C’est ainsi que nous verrons tous<br />

<strong>le</strong>s exemp<strong>le</strong>s d’apparition-disparition ou apparition-transformation de comédiens ou d’accessoires. L’un des cas<br />

bien connu est celui des Sélénites qui explosent dès que <strong>le</strong>s explorateurs <strong>le</strong>ur assène un coup de parapluie dans<br />

<strong>le</strong> Voyage dans la lune. À ces trucages dont <strong>le</strong>s effets étaient immédiats, Méliès ajoute aussi des trucages à effets<br />

durab<strong>le</strong>s, notamment la surimpression. Comme l’explique Jacques Malthête dans la revue 1895 n°27, page 26 :<br />

« Ce trucage qui se prolonge dans <strong>le</strong> temps nécessite un rebobinage de la pellicu<strong>le</strong> <strong>pour</strong> une seconde impression,<br />

généra<strong>le</strong>ment sur une réserve noire ». Cette réserve était obtenue grâce à l’application d’un cache noir (ou un<br />

tissu noir) sur une portion du décor, ou parfois même sur l’objectif. Méliès a parfois multiplié <strong>le</strong>s surimpressions<br />

jusqu’à six parfois, <strong>pour</strong> obtenir l’effet qu’il souhaitait : c’est <strong>le</strong> cas dans Le Mélomane (1903) où un musicien<br />

utilise des fils télégraphiques comme portée musica<strong>le</strong> et y accroche plusieurs fois sa tête en guise de notes. Tous<br />

ces trucs nécessitent une intervention sur la pellicu<strong>le</strong> avec <strong>le</strong> collage.<br />

Grâce à son studio, Méliès peut aussi créer des effets avec une caméra qui plonge à 90 degrés. Et surtout, agissant<br />

toujours avant tout comme un homme de théâtre, Méliès multiplie et mélange <strong>le</strong>s trucages cinématographies<br />

et <strong>le</strong>s trucages scéniques qui <strong>pour</strong>raient être tout aussi bien exécutés sur la scène du théâtre Robert-Houdin.<br />

La mise en scène<br />

« Un jour de 1931, laissant <strong>pour</strong> un soir sa boutique de jouets, Georges Méliès, vieilli et ruiné, mit sa plus bel<strong>le</strong><br />

redingote <strong>pour</strong> participer à un banquet de trois cents couverts. Au dessert, M. Louis Lumière, industriel et<br />

membre de l’Institut, lui donna l’accolade et lui accrocha sur la poitrine une Légion d’honneur (…) en disant :<br />

« Je salue en vous <strong>le</strong> créateur du spectac<strong>le</strong> cinématographique ». Ce qui revient à dire que si Louis Lumière inventa<br />

un excel<strong>le</strong>nt type d’appareil <strong>pour</strong> photographies animés, et <strong>le</strong> baptisa cinématographe, Georges Méliès,<br />

lui, créa <strong>le</strong> cinéma, qui n’est pas l’abréviation familière d’une marque de fabrique, mais un nouveau genre de<br />

spectac<strong>le</strong>, fondé avant tout sur la mise en scène. »<br />

Chez Méliès, la mise en scène de chaque bande se retrouve autant dans l’utilisation nouvel<strong>le</strong> des outils (scénario,<br />

décors, acteurs, maquillage…) que dans <strong>le</strong> montage (à l’intérieur de l’image)<br />

Georges Méliès, par Georges Sadoul – Seghers – 3e editon<br />

Là encore, Georges Méliès pense et agit comme un homme de théâtre et de magie.<br />

Quand il passe au cinéma, il retranscrit la scène.<br />

De l’illustration à l’illusion<br />

Méliès tourne depuis 1896. Il démarre avec des sujets courts qui plaisent au public de l’époque : <strong>le</strong>s actualités<br />

ou des scènes comiques. Ce qui <strong>le</strong> caractérise avant tout, c’est la mise en scène. Il vient de l’univers du théâtre<br />

et <strong>le</strong> lien sera toujours présent.<br />

De plus en plus, il s’oriente vers des sujets féeriques, riches en “illusions fantasmagoriques”.<br />

Ce qui ne l’empêche pas de tourner, en 1899, un film sur l’affaire Dreyfus, en reconstituant décors et personnages<br />

à partir d’illustrations publiées dans la presse. Ou <strong>le</strong> Sacre d’Edouard VII, un film de commande (hors catalogue)<br />

qui met en scène <strong>le</strong> couronnement du roi d’Ang<strong>le</strong>terre qui n’a pas encore eu lieu.<br />

Au début du sièc<strong>le</strong>, <strong>le</strong> cinéma commença à s’instal<strong>le</strong>r dans des sal<strong>le</strong>s fixes, délaissant <strong>le</strong>ntement <strong>le</strong>s champs de<br />

foire. Méliès s’efforça de produire des films plus longs et plus comp<strong>le</strong>xes, à l’opposé des petits films conçus <strong>pour</strong><br />

<strong>le</strong>s espaces forains. Les années 1901 à 1904 furent <strong>le</strong>s plus bel<strong>le</strong>s <strong>pour</strong> Méliès qui savoure alors p<strong>le</strong>inement <strong>le</strong><br />

succès artistique et financier. Sa production se diversifie : grands spectac<strong>le</strong>s (Jeanne d’Arc, Le royaume des<br />

fées), actualités reconstituées (L’éruption du mont Pelé, Le sacre d’Edouard VII), adaptation de “classiques”<br />

(Les aventures de Robinson Crusoë, La damnation de Faust). Un gag tel que celui de L’homme à la tête de caoutchouc<br />

surprend aujourd’hui encore. Son génie décoratif évoque Robida ou Gustave Doré, sa fantaisie anticipatrice<br />

en fait un précurseur de la science-fiction moderne. Il tourne aussi sur <strong>le</strong> thème du voyage : Voyage dans<br />

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la lune (1902), Voyage à travers l’impossib<strong>le</strong> (1904), Les quatre cents farces du diab<strong>le</strong> (1906), Deux cent mil<strong>le</strong><br />

lieues sous <strong>le</strong>s mers (1907).<br />

La Manufacture de films<br />

<strong>pour</strong> <strong>Cinéma</strong>tographes et une marque: La Star Film<br />

Dès 1896, Georges Méliès s’associe d’abord avec Lucien Reulos qui se charge de déposer <strong>le</strong>s brevets des équipements<br />

qu’ils ont conçus avec Lucien Korsten.<br />

Il crée aussi à ce moment-là, ensemb<strong>le</strong>, la marque Star Film (20 novembre). Mais cette association ne dure pas<br />

et Lucien Reulos quitte Georges Méliès fin 1897.<br />

Georges Méliès devient l’unique propriétaire de la Manufacture de films <strong>pour</strong> cinématographes laquel<strong>le</strong> n’a jamais<br />

été constituée en société commercia<strong>le</strong>. Ses bureaux sont situés, dans un premier temps, au 13 passage de<br />

l’Opéra, tout près de son domici<strong>le</strong> rue Chauchat.<br />

Méliès ouvre plusieurs agences. À Londres, Char<strong>le</strong>s Urban est chargé de vendre <strong>le</strong>s vues de la Star Film. Oscar<br />

Richeux (puis Baltazar Abadal) prend en charge une agence à Barcelone et Théophi<strong>le</strong> Pathé, <strong>le</strong> frère de Char<strong>le</strong>s<br />

et Émi<strong>le</strong> Pathé, représente la Star Film à Berlin. Mais surtout, <strong>le</strong> frère de Méliès, Gaston, fonde une succursa<strong>le</strong><br />

aux États-Unis qui se dotera rapidement d’un laboratoire.<br />

La marque Star Films se retrouve <strong>pour</strong> la première fois dans Le Manoir du diab<strong>le</strong> (n°78-80) qui atteste de la présence<br />

dans <strong>le</strong> décor de la marque « MR » (Pour Méliès et Reulos) inscrite dans une étoi<strong>le</strong> à cinq branches. On<br />

retrouve cette marque dans <strong>le</strong>s films tournés en<br />

1897, date à laquel<strong>le</strong> disparaît éga<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> nom<br />

de Reulos.<br />

La marque a été modifiée près de 15 fois par<br />

Georges Méliès entre sa création en 1896 et 1911 :<br />

<strong>le</strong> libellé du carton portant sa marque dans <strong>le</strong><br />

décor de ses films peut ainsi souvent s’avérer<br />

précieux <strong>pour</strong> dater <strong>le</strong>s films.<br />

Expansion et piratage aux Etats-Unis<br />

Dans ce contexte d’expansion au début du sièc<strong>le</strong>, Georges Méliès ouvrit en 1903 une succursa<strong>le</strong> à New-York, au<br />

204 East 38th Street, dirigée par <strong>le</strong> frère de Méliès, Gaston. Ce nouveau bureau avait été installé <strong>pour</strong> protéger<br />

ses films du piratage, grâce au système du copyright américain, et <strong>pour</strong> la vente directe de copies sans passer<br />

par d’indélicats intermédiaires. Le Voyage dans la lune, qui sort en ocotbre 1902 est immédiatement piraté à<br />

très grande échel<strong>le</strong>. Méliès réagit immédiatement et à partir de fin 1902, il prend simultanément deux négatifs,<br />

à l’aide de deux caméras Lumière qu’il coup<strong>le</strong> <strong>pour</strong> n’avoir à faire qu’une seu<strong>le</strong> prise. L’un des négatifs est<br />

envoyé à New-York <strong>pour</strong> <strong>le</strong> marché américain où il sera tiré dans <strong>le</strong> laboratoire de New-York. Il peut ainsi<br />

contourner <strong>le</strong>s barrières douanières conçues par Edison.<br />

Deuxième démarche systématiquement appliquée à partir du 25 juin 1903, <strong>le</strong>s films de Georges Méliès sont déposés<br />

à la Library of Congress à Washington et ce jusqu’en 1909. (En 1909, <strong>le</strong>s films de Georges Méliès sont distribués<br />

par Gaumont. Et <strong>le</strong>s six derniers films de Georges Méliès, tournés entre 1911 et 1912 sont commandités<br />

par Pathé et dé<strong>pour</strong>vus de la marque Star Film).<br />

En 1908, Gaston Méliès quitta New York et ouvrit à Chicago une nouvel<strong>le</strong> société de production, la Méliès Manufacturing<br />

Company, afin de produire davantage de films <strong>pour</strong> permettre à la Star Film d’atteindre <strong>le</strong>s quotas<br />

de production exigés par la Motion Picture Patents Company (MPPC).<br />

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