ArménieÉgalité des sexes : l’Histoire doit être honoréeContrairement à d’autres parties <strong>du</strong> monde, <strong>les</strong> droits de la femme ont été concédés très tôt en Arménie.Avec l’avènement de la République moderne, ils ont à nouveau été consacrés et ont été élargis <strong>du</strong>rantl’ère soviétique. Cependant, la transition vers la démocratie et l’économie de marché ont détérioré lasituation des arméniennes qui souffrent aujourd’hui de discrimination dans tous <strong>les</strong> aspects de leurvie. Le Gouvernement n’a pas saisi l’ampleur <strong>du</strong> problème, et toute tentative pour se conformer à sesengagements internationaux en la matière a été faible et insuffisamment prise en charge.Center for the Development of Civil SocietySvetlana A. Aslanyan 1100En Arménie, contrairement à presque tous <strong>les</strong> pays,le souci de l’égalité des sexes est 56enraciné dans uneIndice des Capacités de Base (ICB) 2010 Indice d’Equité de Genre (IEG) 2009100ICB = 94 IEG = 58Enfants atteignantla cinquième année86 d’écoleAutonomisationlongue histoire, ancienne et récente, et se reflète dans<strong>les</strong> législations adoptées dans différents contextes50politiques. Compte tenu de cette tradition, il ne devrait00pas être trop difficile pour l’Arménie de corriger7198991009897<strong>les</strong> inégalités existantes. Cependant, la situation des100 100 62100100 100100 100femmes s’est détériorée au cours des vingt dernières Accouchements assurés par <strong>du</strong> Survivance jusqu’àannées. Les raisons en sont le manque de vision et personnel médical spécialisél’âge de 5 ans Activité économiqueÉ<strong>du</strong>cationd’un engagement fort de la part de l’État, le manqueIEG of Argentina = 72qui que ce soit,BCIet laofmainArmeniad’œuvre= 94devra être rémunéréepour son travail, comme la législation arméniennel’exige » 3 .La première République d’Arménie (1918-1920), a été l’une des premières à concéder auxfemmes le droit de vote 100et à être élues. Aussi, 8 %des membres de son Parlement 95 étaient des femmeset le Dr Diana Abgar a été désignée ambassadrice <strong>du</strong>Japon, ce qui l’a transformée en la première femmede l’histoire à occuper ce poste, puisque la russeIEG of Armenia = 5810043de coordination entre <strong>les</strong> acteurs concernés et lefaible niveau de sensibilisation parmi la population.Il ne peut y avoir de développement <strong>du</strong>rablepour l’Arménie que si elle intègre dans sa politique<strong>les</strong> questions relatives à l’égalité des chances entrefemmes et hommes. La société 100 civile, soutenue parl’action de certaines institutions internationa<strong>les</strong>, plaidepour un changement de politique pour permettrede rétablir <strong>les</strong> femmes à la place qu’el<strong>les</strong> ont toujoursoccupée dans la société arménienne.d’infrastructure de soutien et <strong>du</strong> manque de technologiepour aider à rendre <strong>les</strong> tâches ménagèresmoins consommatrices de temps.Durant cette période, aucune femme n’a accédéà des postes hiérarchiques, ni au sein <strong>du</strong> Gouvernement,ni au Parlement. Bien qu’il eût été stipulé que<strong>les</strong> deux genres devaient être à égalité de salaire,<strong>les</strong> femmes ont été employées pour <strong>les</strong> tâches <strong>les</strong>moins rémunérées. L’idée que <strong>les</strong> femmes ont étéutilisées comme main d’œuvre bon marché par le83Alexandra Kollontai, habituellement reconnue commela première ambassadrice, a été nommée pléni-vieille chanson folklorique de l’époque qui disait :pouvoir soviétique se reflète dans le refrain d’uneUne tradition d’égalité 0 1100L’égalité des droits des femmes ont une 56 longue histoireen Arménie : <strong>les</strong> anciens codes et normes léga-Durant l’ère soviétique, l’État a garanti 9997potentiaire pour la Norvège seulement en 1923. « la femme laboure, la femme récolte et l’homme100l’enseignementcontrôle et dirige ». 4696100 100 70100<strong>les</strong> démontrent qu’auparavant, <strong>les</strong> femmes étaienttraitées de manière égalitaire dans la société concernantscolaire gratuit et obligatoire, l’enseigne-100 100ment universitaire et <strong>les</strong> services médicaux gratuits100 100Même si cette situation fût contemplée dans laConstitution postsoviétique de 1995, selon laquelle100<strong>les</strong> héritages, la propriété, etc. Ainsi, par exem-et accessib<strong>les</strong>, 24 jours de congés payés, et des <strong>les</strong> hommes et <strong>les</strong> femmes jouissaient des mêmesepublic = 65 ple, le code de Shahapivan (443 av. JC) disposait que congés payés pré BCI et of postnatal, Chile = etc. 98IEG of Chile = 62En 1920, le droit droits en politique, au travail et au sein de la famille,IEG of Central African Republic = 46« la femme a le droit de posséder une propriété dans à l’avortement a été légalisé et l’attention médicale et que dans la plupart des cas ces dispositions étaientle cas où son mari l’ait abandonné sans raison apparente». Il mentionnait également qu’« une femme ale droit d’amener un nouveau mari au foyer ».afférente à celui-ci à été garantie. Cependant, il fautsouligner que la législation sur l’avortement étaitfortement liée au rôle changeant de la femme dansconformes aux lois internationa<strong>les</strong>, ses principes nes’appliquent pas dans la vie quotidienne.Plus récemment, la transition vers la démocratieShahamir Shahamirian, un écrivain et philosophe<strong>du</strong> XVIII e siècle, auteur de la première Constitutrationsoviétique était d’intégrer <strong>les</strong> femmes aux tion de la situation des arméniennes dans la société,la société puisque l’objectif principal de l’adminis-et l’économie de marché ont provoqué une dégrada-100100100tion arménienne 2 , avait établi: « 73Chaque personne, forces de travail.81y compris leur situation économique. Aujourd’hui, lequ’elle soit arménienne ou pas, homme ou femme,pays ne dispose pas d’une politique nationale pournée en Arménie ou arrivée en Arménie depuis l’étranger,Discrimination : théorie et pratiquefaire face aux inégalités que <strong>les</strong> femmes doivent af-vivra dans l’égalité et exercera ses occupationsen toute liberté. Personne n’aura 0 le droit d ‘asservirEn dépit de ces progrès, <strong>les</strong> femmes en Arméniesoviétique devaient porter 0 un double fardeau etsouffraient de discrimination structurelle. El<strong>les</strong>10094 travaillaient à la fois au sein et à l’extérieur 92 de leurfronter dans leur vie quotidienne.Le Gouvernement n’a 0 11fait que de faib<strong>les</strong> tentativespour changer cette situation car il considère que831 Chercheuse principale, chef <strong>du</strong> Groupe de recherche dela problématique de l’égalité des sexes a été 79 résolue100 l’Institut 100 de linguistique 68 de l’Académie nationale des sciences 100d’Arménie. Une version de cet article a déjà été publiée par<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>, Cuadernos Ocasiona<strong>les</strong> 06, La hora de laeconomía de género (mars 2010). Disponible sur : .BCI of Ghana = 77IEG of Ghana = 582 Ce fut le premier projet connu pour une démocratieconstitutionnelle.3 Shahamir Shahamirian, Vorogayt parats (Les pièges de lagloire), Madras, Inde, 1773, réédité à Tiflis en 1919, Article 3.100femmes sont victimes de discrimination dans tous<strong>les</strong> aspects de leur vie y compris la participation àla vie politique.Rapports nationaux 64 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>100 10010096
Les femmes qui se voient exclues des processuséconomiques et politiques, continuent avec leursrô<strong>les</strong> traditionnels dans la société et reçoivent deplein fouet l’impact pro<strong>du</strong>it par l’irréfléchie et hasardeusetransition d’une société totalitaire (avec uneplanification centralisée et une économie rigide) àune économie de marché basée sur la démocratie.Il n’existe aucun organe représentatif de lafemme, ni groupe parlementaire, ni de conseillers enquestions liées au genre en Arménie. De manière exceptionnelle,une vice-ministre a été nommée au ministèrede la Sécurité sociale en 2002 pour coordonner<strong>les</strong> activités destinées à aborder <strong>les</strong> questions dela femme. Cependant, elle a été rapidement évincéede son poste et une autre femme a été nommée à saplace puis remerciée à son tour. De nos jours, <strong>les</strong> problèmesde la femme sont traités par le Départementde la femme et de l’enfance créé en 1997 au sein <strong>du</strong>ministère de la Sécurité sociale, ainsi que dans laDivision <strong>du</strong> ministère de la Santé pour la protectionde la santé de la mère et de ses enfants.Cette absence d’entités efficaces pour traiter <strong>les</strong>questions de genre se reflète dans <strong>les</strong> rapports <strong>du</strong>pays à propos de ses engagements internationaux.L’Arménie a été l’un des 191 pays à avoir signé laDéclaration <strong>du</strong> Millénaire. Le respect et l’engagementpour l’égalité des sexes ainsi que l’autonomisationde la femme sont reconnus comme des Objectifs <strong>du</strong>millénaire pour le développement (OMD) : « Objectif3 : Promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisationde la femme. Éliminer <strong>les</strong> inégalités entre <strong>les</strong>sexes dans l’enseignement primaire et secondaire,de préférence pour 2005 et à tous <strong>les</strong> niveaux del’enseignement pour 2015 » .En 2005, l’Arménie a publié son premier rapportintermédiaire sur l’accomplissement des OMD. Ilétait clair que <strong>les</strong> politiques étaient étroitement adaptéesà la situation <strong>du</strong> pays, fixant des objectifs plussoup<strong>les</strong> que ceux accordés au niveau mondial.Ce rapport a été réalisé grâce au travail conjoint<strong>du</strong> Gouvernement, de la société civile, des organisationsinternationa<strong>les</strong> et des organisations des NationsUnies en Arménie.Le rôle de la société civileSuite à la Conférence de Pékin en septembre 1995,<strong>les</strong> organisations de femmes déjà présentes en Arméniesont devenues plus actives et de nouvel<strong>les</strong> sesont formées depuis. De plus, plusieurs organisationsinternationa<strong>les</strong>, dont le PNUD, Programme desNations Unies pour le développement et l’Organisationpour la sécurité et la coopération européenne,ont commencé des enquêtes sur l’équité de genre.Ces organisations, conjointement avec trois autresdonateurs internationaux, ont octroyé de nombreusesbourses à des ONG de femmes, permettant de <strong>les</strong>encourager et de <strong>les</strong> renforcer.Un des principaux objectifs de ces groupes a étél’autonomisation des femmes, qui constitue l’idéeunificatrice au-delà de la diversité des champs d’activitésspécifiques de chacun. Depuis le début, cesgroupes ont promu <strong>les</strong> droits civils des femmes ouse sont organisés pour aborder <strong>les</strong> problèmes sociauxqui <strong>les</strong> affectent. Ils ont déployé de gros effortsen faveur des droits de la femme, <strong>du</strong> leadership et<strong>du</strong> combat contre la violence de genre et de la traitedes femmes.Réussites et échecsLe Gouvernement a élaboré des plans et a créé desorganismes pour promouvoir l’équité de genre. Cependant,le manque de ressources financières, quia déterminé quelques erreurs d’implémentation, etle manque de conscientisation de la population ontempêché l’obtention des résultats atten<strong>du</strong>s.Dans le cadre de l’implémentation <strong>du</strong> Plan d’Actionde Pékin en 1997, le Premier ministre a émis undécret pour la création d’un Comité mettant en œuvre leProgramme de développement des politiques de genre1998-2000. Ce programme sur trois ans était destiné àaméliorer la situation de la femme mais il n’a jamais étémis en pratique par manque de financement. En 2000,le Conseil de la Femme, un organe consultatif volontairea été créé sous le mandat <strong>du</strong> Premier ministre. Ila été ensuite aboli par son successeur.La réussite la plus importante a été l’adoption<strong>du</strong> “Plan national d’action 2004-2010 de la Républiqued’Arménie pour améliorer la situation de laFemme et renforcer son rôle dans la société”. Ce plandéfinit <strong>les</strong> principes, priorités et objectifs clés de lapolitique publique pour s’attaquer aux sujets liés à lafemme. Il se base sur <strong>les</strong> dispositions pertinentes dela Constitution et il est orienté vers la mise en œuvrede la Convention des Nations Unies sur l’Éliminationde toute forme de violence à l’égard des femmes et<strong>les</strong> recommandations de la 4 ème Conférence de Pékin.Son mandat couvre également <strong>les</strong> documents <strong>du</strong>Comité directif <strong>du</strong> Conseil de l’europe pour l’égalitéentre femmes et hommes, <strong>les</strong> ODM et <strong>les</strong> compromisde la République arménienne avec d’autres instrumentsinternationaux.Le plan d’action comprend sept sections relativesà :• Garantir l’égalité des droits et opportunités entrefemmes et hommes pour la prise de décisionset dans la sphère politique et sociale.• Améliorer la condition sociale et économiquede la femme.• Améliorer le secteur é<strong>du</strong>catif.• Améliorer la santé de la femme.• Eliminer la violence à l’encontre des femmes.• Examiner le rôle des médias et des institutionsculturel<strong>les</strong> dans la présentation des rapportssur <strong>les</strong> sujets liés à la femme et la constructiond‘un modèle de la féminité• Réformer <strong>les</strong> institutions.Plusieurs brochures d’information ont été publiéesafin de clarifier certains de ces points. Une des brochurescontenait <strong>les</strong> conclusions et <strong>les</strong> recommandationsd’une étude sur la violence de genre, y comprisdes données statistiques ventilées par genre. Durantla dernière décennie, plusieurs organismes ont étécréés pour aborder des sujets sociaux, de santéet d’emploi, y compris l’Institut de l’ombudsmaninauguré en 2004. Toutefois, ils ont manqué d’unfinancement adéquat ou ils n’avaient pas le pouvoirde développer ou de soutenir des politiques efficacespour pouvoir surmonter <strong>les</strong> inégalités entre <strong>les</strong> sexeset établir des droits et des opportunités égaux pour<strong>les</strong> femmes et <strong>les</strong> hommes. D’autres obstac<strong>les</strong> sesont présentés en raison <strong>du</strong> manque de coordinationdes différents indivi<strong>du</strong>s et organismes impliqués. Lefaible niveau de sensibilisation <strong>du</strong> public face à cesquestions doit également être pris en compte.En 2006, le PNUD a publié une brochure surl’Égalité des sexes et un Bulletin électronique sur legenre et le changement (BEGC). La brochure avaitpour objectif de fournir une information généra<strong>les</strong>ur <strong>les</strong> sujets liés au genre, <strong>les</strong> cadres nationaux etinternationaux et <strong>les</strong> mécanismes de protection et depromotion des droits de la femme. Elle était destinéeaux décideurs <strong>du</strong> Gouvernement aux niveaux centralet local, aux organisations de la société civile, auxdéfenseurs des droits de la femme, aux chercheursainsi qu’à toute personne cherchant une informationbasique sur l’égalité des droits.Trafic de femmesDes femmes et des fil<strong>les</strong> sont victimes de la traite depersonnes vers <strong>les</strong> Émirats arabes et la Turquie pourêtre soumises à l’exploitation sexuelle commercialeet des arméniens, hommes ou femmes, sont envoyésen Russie aux travaux forcés 4 .En octobre 2002, une Commission sur la Traitedes femmes a été créée, à laquelle ont participé <strong>les</strong>représentants de tous <strong>les</strong> ministères et organismesintéressés ainsi que <strong>les</strong> ONG.La Commission a élaboré le concept de luttecontre la traite des personnes et a créé un Pland’action national pour la période 2004-2006 et unautre pour 2007-2009. Ces plans couvrent tous<strong>les</strong> aspects relatifs à la traite de personnes, telsque l’amélioration de la législation s’y afférant, larecherche et la portée de ces sujets, l’adoption demesures préventives, la diffusion de l’information etl’assistance aux victimes. Cependant, tout comme<strong>les</strong> autres organismes déjà mentionnés, la Commissionn’a pas compté avec l’autorité et le financementnécessaire pour mettre en place ces politiques demanière efficace. La Police Nationale a égalementétabli en juin 2005, un Département de lutte contre latraite des personnes.ConclusionsL’utilisation de la libération féminine comme outil depropagande politique <strong>du</strong>rant l’ère communiste a ététrès effective. De nos jours, il est habituel en Arméniede considérer que l’équité était instaurée depuis longtemps.C’est uniquement à partir de l’enseignementdes femmes à propos de l’importance de la démocratiequ’el<strong>les</strong> ont commencé à comprendre l’importancede l’activisme pour combattre la « discriminationocculte » et le manque de mécanismes pour mettre<strong>les</strong> lois en vigueur. Les académiques féministes et <strong>les</strong>activistes devraient s’unir pour orienter leurs actionsvers la situation des femmes arméniennes et établirune véritable équité de genre. n4 Voir, par exemple, Département d’État des États-Unis,Trafficking in Persons Report, Washington, DC, 2009. Deplus, selon des chiffres officiels, en 2009, 60 trafiquants depersonnes ont été officiellement identifiés, ce qui représentele double par rapport à l’année précédente.<strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>65Arménie