Changeons les règles du jeu - Social Watch

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qui accroît les connaissances et la participation despetits actionnaires et du public en général vis-à-visdes questions financières. Être actionnaire ne signifiepas rechercher simplement les bénéfices et lesdividendes les plus élevés dans les délais les plusbrefs. La crise actuelle a mis en exergue les menacesd’un système financier fondé sur la maximisation desbénéfices à court terme. Être actionnaire impliquedes droits et des devoirs, tels que la participationactive dans la vie de l’entreprise, ce qui est considéréfondamental dans tout processus de développementaussi bien au nord qu’au sud, étant donné le rôle dechoix que remplit le secteur privé dans la plupart dessociétés.Pour terminer, du point de vue des investisseurs,la participation actionnaire critique renforce lareprésentation des petits actionnaires dans la vie del’entreprise. Un rapport de 2009 de l’OCDE signalequ’un des motifs principaux de la crise est dû à lamauvaise planification de la gouvernance corporativede nombreuses compagnies 1 . Ce même rapportde l’OCDE s’engage à augmenter la participation despetits actionnaires dans la vie et dans les prises dedécisions des entreprises. La participation actionnairecritique va précisément dans ce sens et peutcontribuer à l’augmentation de la démocratisation etde la reddition de comptes du secteur privé.Réseaux internationaux et résultats initiauxDans différents pays européens, de même qu’auxÉtats-Unis, l’engagement actif des actionnaires estdevenu une pratique habituelle. Les interventionset les propositions des petits actionnaires actifs ontaidé dans bien des cas à optimiser la responsabilitéenvironnementale et sociale, la gouvernance, lareddition des comptes et la durabilité à long termedes entreprises. Cette stratégie a déjà été utiliséelors de campagnes orientées vers la responsabilitédes corporations du nord, en solidarité envers lescommunautés affectées dans le Sud du globe, afin depromouvoir leur droit au développement.Le pionnier dans les pratiques de participationactionnaire est indubitablement l’Interfaith Center onCorporate Responsibility (Conseil Interreligieux pourla Responsabilité des Entreprises, ou ICCR (sigle enanglais) siégeant à New York 2 . En tant que coalitionde 275 ordres religieux, catholiques, évangéliques etjuifs, l’ICCR implique des compagnies des États-Unisdans lesquelles elle investit, présentant et votant desrésolutions dans les Assemblées générales annuelles(AGA) des entreprises et tenant des réunions avecles directeurs et les administrateurs de ces mêmesentreprises. La première de ces résolutions a été pré-1 Kirkpatrick, Grant, The corporate governance lessons fromthe financial crise. OCDE, 2009. Disponible sur : .2 Pour plus de renseignements voir : .sentée au début des années 70 : elle demandait auxentreprises telles que la General Motors de retirerleur soutien financier et commercial à l’Afrique duSud de l’apartheid. Les résolutions de l’ICCR concernantl’Afrique du Sud, présentées par l’Église épiscopale,n’ont jamais obtenu plus de 20 % des voixdes actionnaires, mais elles ont cependant contribuéà peser sur l’opinion publique et à mettre en gardeles marchés financiers sur l’apartheid. Pendant lesannées précédant la fin de l’apartheid (1994), lesinvestissements directs des entreprises des États-Unis en Afrique du Sud ont diminué de 50 % et, pourreprendre les mots de Timothy Smith, l’un des premiersdirecteurs de l’ICCR :« Sans les initiatives de participation actionnaireresponsables la lutte contre l’apartheid aurait étébien moins efficace ».La mission d’entreprise de l’ICCR énonce que :« Nous pensons que les investissements devraientoffrir autre chose qu’un retour financier acceptable…au lieu de vendre les actions des entreprisesqui ne respectent ni l’environnement, ni les droits humains,ni la bonne gouvernance, nous préférons agiren tant qu’actionnaires et faire pression pour obtenirun changement ». À partir de 2010 l´ICCR a présentéplus de 200 résolutions différentes dans les AGAdes compagnies américaines concernant des questionstelles que les compensations excessives pourles directeurs, les substances chimiques toxiquescomposant les produits, l’expérimentation animale,l’utilisation de l’espace à des fins militaires ou lesventes d’armement à l’étranger. De nombreuses résolutionsont été retirées avant même la célébrationdes assemblées générales parce que les compagniesont accepté de négocier avec les membres de l’ICCR.Le pourcentage d’actionnaires qui ont soutenu parleur vote les résolutions de l’ICCR varie de presque40 %–dans les résolutions présentées dans les AGAde la Bank of America, du Citigroup et de la GoldmanSachs, demandant plus de transparence dansles transactions sur les dérivés financiers – au tauxrecord de 97,9 % pour les résolutions concernantle VIH/SIDA présentées lors de l’AGA de Coca Colaen 2004 demandant à la multinationale de divulguerun rapport sur les répercussions économiquespossibles du VIH/SIDA et autres pandémies sur lebilan et les stratégies commerciales de la compagniedans les pays en développement. À la suite dela résolution, destinée à conscientiser Coca Cola àl’émergence du VIH/SIDA dans l’Est de l’Afrique, lacompagnie a commencé à publier un rapport détaillé,comme l’avaient demandé les actionnaires actifs, et àinvestir dans la prévention et dans les soins de santépour ses employés dans les pays pauvres.Des résolutions similaires de l’ICCR ont convaincule géant de l’habillement des États-Unis, The Gap,de dévoiler la liste complète de ses sous-traitantsdans les pays en développement et d’effectuer uneévaluation des risques sociaux et environnementauxpour chacun d’eux.Mais les investisseurs religieux ne sont pas lesseuls à mettre sous les projecteurs les entrepriseslors des assemblées des actionnaires. Au cours desdix dernières années les grands fonds de pensionsont aussi commencé à élever leur voix. Aux États-Unis le plus connu est Calpers (Caisse de retraite desemployés publics de Californie). Calpers, qui a plusde 1,4 million de membres et pratiquement USD 200milliards en administration, a commencé à utiliserses investissements en actions comme moyen depression pour que les corporations des États-Uniss’engagent. Les campagnes de Calpers, destinéesprincipalement à condamner les mauvaises pratiquesde gouvernance (par exemple, des compensationsexcessives versées aux directeurs) ont remportéun succès énorme et inespéré, à tel point queSean Harrigan, président de Calpers jusqu’en 2004, adû démissionner en raison de la pression croissantedes multinationales des États-Unis. En septembre2006, le gouverneur de Californie, Arnold Schwarzenegger,qui soutenait le Groupe de travail pour le désinvestissementau Soudan, a adopté une politiquede désinvestissement dans les compagnies opérantau sud du Soudan (où la guerre civile se poursuitau Darfour) pour la Caisse de retraite des employéspublics de Californie (Calpers) et pour la caisse de retraitedes maîtres de l’État de Californie (Calstrs) et ila décidé de compenser pour cette action les conseilsd’ administration de ces deux fonds.En plus de Calpers et Calstrs, bien d’autres fondsde pension pour les employés publics ont commencéà exercer une pression sur les entreprises des États-Unis dans les AGA, y compris le Fonds de retraitecommunautaire de l’État de New York, les Plans deretraite et de fidéicommis du Connecticut et le Bureaudu contrôleur de la ville de New York. D’après uneenquête menée par le Forum d’investissement socialdes États-Unis, « ces dernières années ces fonds ontprésenté des dizaines de résolutions sociales fondéessur les Conventions de l’Organisation internationaledu travail (OIT), sur des questions liées au changementclimatique ou à l’égalité des chances ».Au Canada la prise en charge des fonds de pensionpour les affaires sociales et environnementalesest stimulée par Batîrente, les fonds de pension dela Caisse d’économie Desjardins dont le siège estau Québec (une banque créée et totalement contrôléepar les syndicats) 3 . Batîrente administre près deEUR 350 millions, elle compte sur plus de 20 000membres et choisit les actions dans lesquelles elleinvestit conformément aux critères environnementaux,sociaux et de gouvernance. « Au début noussoutenions les résolutions présentées par d’autresfonds ou d’autres organisations », dit Daniel Simard,3 Voir: .Rapports thématiques 26 Social Watch

coordinateur de Batîrente, « mais ces dernières annéesnous avons commencé à présenter nos propresrésolutions ». Conjointement à Oxfam, Batîrente aconvaincu Metro, un magasin dans lequel le fondsinvestit, pour qu’il vende du café de commerce équitable,tout en convainquant Sears, une autre chaînede vente au détail, de publier un rapport social s’alignantsur les préceptes de la GRI (Initiative mondialepour l’élaboration de rapports).Hormis la Grande Bretagne, où certaines institutionsfinancières comme la Banque coopérative,Hermès ou F&C Asset Management ont encouragéla participation actionnaire, en Europe cette pratiqueest encore marginale et fait rarement la une desjournaux. Sur le continent du capitalisme familial etbancaire, les bourses des valeurs n’ont jamais jouéun rôle important. Et par conséquent, les activistesont préféré d’autres moyens de pression envers lesentreprises. Mais quelque chose est en train de changeren Europe continentale aussi. La nouvelle la plusintéressante nous parvient de Suisse. Elle a pour nomEthos. Née en 1997 sur l’initiative de deux fonds depensions publiques, la Fondation Ethos pour l’investissementdurable administre actuellement EUR500 millions au nom d’environ 90 fonds de pensionpubliques en Suisse. Les fonds de pension délèguentà Ethos l’exercice du droit de vote (relié aux actionsdans lesquelles le fonds investit) dans les AGA descompagnies suisses. Les rémunérations excessivesdes gérants, la réputation et la mauvaise gestion desdirecteurs, et la rare transparence au moment de négocieravec des produits financiers « toxiques », sontles principaux problèmes présentés par Ethos. Lesobjectifs sont pour la plupart des sociétés financièresou pharmaceutiques, comme UBS ou Roche. Danscertains cas les propositions d’Ethos sont secondéesaussi par d’autres investisseurs ou par des actionnairesordinaires et elles arrivent à obtenir plus de50 % des votes des actionnaires, comme cela a étéle cas cette année à l’Assemblée générale annuelle del’UBS, où le directoire a proposé que les membres dudirectoire précédent soient absous de toute responsabilitédans le collapsus financier de l’entreprise.Ethos a voté contre, et la plupart des actionnaires ontfait de même ; ceux-ci envisagent aujourd’hui d’entreprendredes poursuites contre l’entreprise pour samauvaise gestion et les dommages financiers infligésà leurs clients. Ethos vote dans plus de 100 assembléesgénérales de compagnies suisses tous les ans.Pour les entreprises non suisses, elle délègue auprèsde ses partenaires internationaux qui appartiennentà l’European Corporate Governance Service (ECGS,Service européen de gouvernance corporative).Dans certains cas la participation des actionnairesest associée aux stratégies traditionnellesde campagne. En mars 2010, une coalition de syndicatsdu Royaume-Uni, d’ONG et d’investisseursont essayé d’obtenir que des milliers de membresdes plans de pension s’unissent à une campagne debombardement de courriers électroniques destinéeà forcer les géants du pétrole BP et Royal Dutch Shellà reconsidérer leurs investissements dans l’exploitation,polémique du point de vue environnemental,des sables bitumeux dans la province d’Alberta, auCanada. La coalition comprenait UNISON, le syndicatdu secteur public le plus grand du Royaume-Uni et d’Europe, qui compte sur plus de 1,3 millionde membres et le Public and Commercial ServicesUnion (PCS, Syndicat des Services publics et commerciaux),le cinquième syndicat par ordre de grandeurdu Royaume-Uni. Au cours de ce qu’elle a qualifiéde « mobilisation publique sans précédents », lacoalition a demandé aux épargnants d’envoyer descourriers électroniques aux gérants de leurs fonds depension pour les obliger à seconder les résolutionsdes actionnaires contre les projets des sables bitumeuxqui devaient être votés pendant les AGA de BPet de Shell en mai. D’autres membres de la coalitionincluaient Greenpeace, la World Wildlife Foundationet le groupe de la banque coopérative. Plus de 140plans de pensions, d’administrateurs des fonds etd’investisseurs privés ont uni leurs forces à celles deFairPensions, un groupe de pression siégeant à Londres,pour présenter une résolution des actionnaireslors de l’assemblée générale de Shell le 18 mai.En Italie, la Fondazione Culturale ResponsabilitàEtica (Fondation culturelle de responsabilité éthique,FCRE), contrôlée par la banque éthico-écologiqueBanca Etica, a elle aussi décidé de combiner lesoutils traditionnels des campagnes des ONG à unenouvelle forme de participation à travers l’investissementdans de grandes compagnies 4 . Déjà en 2008,FCRE avait acheté quelques actions d’entreprisespétrolières et de services publics italiennes (Eni etEnel, respectivement) dans le but de participer auxAssemblées générales annuelles, et de donner ledroit de parole aux ONG environnementales et sociales,comme Greenpeace Italie et CRBM, dont le siègeest en Italie et dans des pays en développement.Ces trois dernières années, la Fondation a remis enquestion les comportements d’ordre social et environnementalde ces deux compagnies secondéepar une série d’associations au Nigeria, au Chili, auCongo-Brazzaville, au Kazakhstan et dans d’autrespays où l’Eni et l’Enel maintiennent une activité, ainsique leurs opérations subsidiaires dans des pays signaléscomme étant des paradis fiscaux.La participation actionnaire critique en tantqu’outil de campagneBien que la participation active des petits actionnairesait porté ses fruits, on ne peut sous-estimer certainsaspects critiques. Tout d’abord, force est de reconnaîtreque le dialogue avec une entreprise ne passe4 Voir : .pas exclusivement par la possession d’actions. Ceprincipe renforcerait précisément l’idée que les actionnairesgagnent de plus en plus de poids face aureste des parties prenantes. Être investisseur permetde garantir des droits, certes, mais cela ne doit enaucun cas se substituer à d’autres voies de dialogueou à d’autres moyens de pression sur les entreprises.C’est d’autant plus vrai quand le dialogue ou laconfrontation avec l’entreprise porte sur un thèmeaussi fondamental que celui des droits humains.Au contraire, la participation actionnaire critiquedoit être considérée comme un outil qui s’ajouteà toute une série d’autres instruments à mettre enmarche pendant une compagne, et bons à utiliserdans leur ensemble pour renforcer l’action desautres outils de la campagne.Qui plus est, ce n’est pas parce qu’ils participentà certaines assemblées que les petits actionnairesdoivent s’attendre à des résultats fabuleux et à deschangements dans le comportement des entreprises.La participation actionnaire critique est un instrumentqui pourrait porter ses fruits à long terme,à force de s’obstiner à soutenir d’année en annéeun dialogue difficile avec l’entreprise et les autresinvestisseurs.Un autre aspect critique important réside dansla difficulté de réunir l’information juste sur des entreprisesou des projets spécifiques, d’autant plusque l’affluence des informations à traiter est considérable.La majeure partie de l’information recueilliesur la compagnie, et qui est remise aux investisseurset aux médias spécialisés, provient habituellementde l’entreprise elle-même.Presque toutes les entreprises qui cotisent enbourse ont développé de fortes politiques de responsabilitésociale corporative afin de démontrerleur comportement irréprochable et se définissentsouvent elles-mêmes comme étant « vertes » et« durables ». En outre, le rôle important et croissantjoué par les agences spécialisées dans la qualificationdes entreprises en fonction de leurs politiquessociale et environnementale historiques ne devraitpas être sous-estimé. Le fait d’être définitivementinclus dans certains indicateurs, comme l’indicateurde durabilité Dow Jones ou le FTSE, est souventbrandi comme un argument transcendental pour« démontrer » l’engagement pris envers la durabilité.De fait, bien que différents indicateurs et plusieurs deces agences qualificatives aient été critiqués pour nepas offrir d’analyse sérieuse entre les compagnieset pour ne pas enquêter à fond le comportementgénéral, ils représentent une source importante derenseignements pour la communauté financière.Pour venir à bout de ce flux d’information, lesactivités devraient donc être menées en étroite collaborationavec les communautés affectées. En termesgénéraux, un travail d’enquête sérieux est nécessairepour obtenir des résultats.Social Watch27Participation actionnaire critique

qui accroît <strong>les</strong> connaissances et la participation despetits actionnaires et <strong>du</strong> public en général vis-à-visdes questions financières. Être actionnaire ne signifiepas rechercher simplement <strong>les</strong> bénéfices et <strong>les</strong>dividendes <strong>les</strong> plus élevés dans <strong>les</strong> délais <strong>les</strong> plusbrefs. La crise actuelle a mis en exergue <strong>les</strong> menacesd’un système financier fondé sur la maximisation desbénéfices à court terme. Être actionnaire impliquedes droits et des devoirs, tels que la participationactive dans la vie de l’entreprise, ce qui est considéréfondamental dans tout processus de développementaussi bien au nord qu’au sud, étant donné le rôle dechoix que remplit le secteur privé dans la plupart dessociétés.Pour terminer, <strong>du</strong> point de vue des investisseurs,la participation actionnaire critique renforce lareprésentation des petits actionnaires dans la vie del’entreprise. Un rapport de 2009 de l’OCDE signalequ’un des motifs principaux de la crise est dû à lamauvaise planification de la gouvernance corporativede nombreuses compagnies 1 . Ce même rapportde l’OCDE s’engage à augmenter la participation despetits actionnaires dans la vie et dans <strong>les</strong> prises dedécisions des entreprises. La participation actionnairecritique va précisément dans ce sens et peutcontribuer à l’augmentation de la démocratisation etde la reddition de comptes <strong>du</strong> secteur privé.Réseaux internationaux et résultats initiauxDans différents pays européens, de même qu’auxÉtats-Unis, l’engagement actif des actionnaires estdevenu une pratique habituelle. Les interventionset <strong>les</strong> propositions des petits actionnaires actifs ontaidé dans bien des cas à optimiser la responsabilitéenvironnementale et sociale, la gouvernance, lareddition des comptes et la <strong>du</strong>rabilité à long termedes entreprises. Cette stratégie a déjà été utiliséelors de campagnes orientées vers la responsabilitédes corporations <strong>du</strong> nord, en solidarité envers <strong>les</strong>communautés affectées dans le Sud <strong>du</strong> globe, afin depromouvoir leur droit au développement.Le pionnier dans <strong>les</strong> pratiques de participationactionnaire est in<strong>du</strong>bitablement l’Interfaith Center onCorporate Responsibility (Conseil Interreligieux pourla Responsabilité des Entreprises, ou ICCR (sigle enanglais) siégeant à New York 2 . En tant que coalitionde 275 ordres religieux, catholiques, évangéliques etjuifs, l’ICCR implique des compagnies des États-Unisdans <strong>les</strong>quel<strong>les</strong> elle investit, présentant et votant desrésolutions dans <strong>les</strong> Assemblées généra<strong>les</strong> annuel<strong>les</strong>(AGA) des entreprises et tenant des réunions avec<strong>les</strong> directeurs et <strong>les</strong> administrateurs de ces mêmesentreprises. La première de ces résolutions a été pré-1 Kirkpatrick, Grant, The corporate governance <strong>les</strong>sons fromthe financial crise. OCDE, 2009. Disponible sur : .2 Pour plus de renseignements voir : .sentée au début des années 70 : elle demandait auxentreprises tel<strong>les</strong> que la General Motors de retirerleur soutien financier et commercial à l’Afrique <strong>du</strong>Sud de l’apartheid. Les résolutions de l’ICCR concernantl’Afrique <strong>du</strong> Sud, présentées par l’Église épiscopale,n’ont jamais obtenu plus de 20 % des voixdes actionnaires, mais el<strong>les</strong> ont cependant contribuéà peser sur l’opinion publique et à mettre en garde<strong>les</strong> marchés financiers sur l’apartheid. Pendant <strong>les</strong>années précédant la fin de l’apartheid (1994), <strong>les</strong>investissements directs des entreprises des États-Unis en Afrique <strong>du</strong> Sud ont diminué de 50 % et, pourreprendre <strong>les</strong> mots de Timothy Smith, l’un des premiersdirecteurs de l’ICCR :« Sans <strong>les</strong> initiatives de participation actionnaireresponsab<strong>les</strong> la lutte contre l’apartheid aurait étébien moins efficace ».La mission d’entreprise de l’ICCR énonce que :« Nous pensons que <strong>les</strong> investissements devraientoffrir autre chose qu’un retour financier acceptable…au lieu de vendre <strong>les</strong> actions des entreprisesqui ne respectent ni l’environnement, ni <strong>les</strong> droits humains,ni la bonne gouvernance, nous préférons agiren tant qu’actionnaires et faire pression pour obtenirun changement ». À partir de 2010 l´ICCR a présentéplus de 200 résolutions différentes dans <strong>les</strong> AGAdes compagnies américaines concernant des questionstel<strong>les</strong> que <strong>les</strong> compensations excessives pour<strong>les</strong> directeurs, <strong>les</strong> substances chimiques toxiquescomposant <strong>les</strong> pro<strong>du</strong>its, l’expérimentation animale,l’utilisation de l’espace à des fins militaires ou <strong>les</strong>ventes d’armement à l’étranger. De nombreuses résolutionsont été retirées avant même la célébrationdes assemblées généra<strong>les</strong> parce que <strong>les</strong> compagniesont accepté de négocier avec <strong>les</strong> membres de l’ICCR.Le pourcentage d’actionnaires qui ont soutenu parleur vote <strong>les</strong> résolutions de l’ICCR varie de presque40 %–dans <strong>les</strong> résolutions présentées dans <strong>les</strong> AGAde la Bank of America, <strong>du</strong> Citigroup et de la GoldmanSachs, demandant plus de transparence dans<strong>les</strong> transactions sur <strong>les</strong> dérivés financiers – au tauxrecord de 97,9 % pour <strong>les</strong> résolutions concernantle VIH/SIDA présentées lors de l’AGA de Coca Colaen 2004 demandant à la multinationale de divulguerun rapport sur <strong>les</strong> répercussions économiquespossib<strong>les</strong> <strong>du</strong> VIH/SIDA et autres pandémies sur lebilan et <strong>les</strong> stratégies commercia<strong>les</strong> de la compagniedans <strong>les</strong> pays en développement. À la suite dela résolution, destinée à conscientiser Coca Cola àl’émergence <strong>du</strong> VIH/SIDA dans l’Est de l’Afrique, lacompagnie a commencé à publier un rapport détaillé,comme l’avaient demandé <strong>les</strong> actionnaires actifs, et àinvestir dans la prévention et dans <strong>les</strong> soins de santépour ses employés dans <strong>les</strong> pays pauvres.Des résolutions similaires de l’ICCR ont convaincule géant de l’habillement des États-Unis, The Gap,de dévoiler la liste complète de ses sous-traitantsdans <strong>les</strong> pays en développement et d’effectuer uneévaluation des risques sociaux et environnementauxpour chacun d’eux.Mais <strong>les</strong> investisseurs religieux ne sont pas <strong>les</strong>seuls à mettre sous <strong>les</strong> projecteurs <strong>les</strong> entrepriseslors des assemblées des actionnaires. Au cours desdix dernières années <strong>les</strong> grands fonds de pensionsont aussi commencé à élever leur voix. Aux États-Unis le plus connu est Calpers (Caisse de retraite desemployés publics de Californie). Calpers, qui a plusde 1,4 million de membres et pratiquement USD 200milliards en administration, a commencé à utiliserses investissements en actions comme moyen depression pour que <strong>les</strong> corporations des États-Uniss’engagent. Les campagnes de Calpers, destinéesprincipalement à condamner <strong>les</strong> mauvaises pratiquesde gouvernance (par exemple, des compensationsexcessives versées aux directeurs) ont remportéun succès énorme et inespéré, à tel point queSean Harrigan, président de Calpers jusqu’en 2004, adû démissionner en raison de la pression croissantedes multinationa<strong>les</strong> des États-Unis. En septembre2006, le gouverneur de Californie, Arnold Schwarzenegger,qui soutenait le Groupe de travail pour le désinvestissementau Soudan, a adopté une politiquede désinvestissement dans <strong>les</strong> compagnies opérantau sud <strong>du</strong> Soudan (où la guerre civile se poursuitau Darfour) pour la Caisse de retraite des employéspublics de Californie (Calpers) et pour la caisse de retraitedes maîtres de l’État de Californie (Calstrs) et ila décidé de compenser pour cette action <strong>les</strong> conseilsd’ administration de ces deux fonds.En plus de Calpers et Calstrs, bien d’autres fondsde pension pour <strong>les</strong> employés publics ont commencéà exercer une pression sur <strong>les</strong> entreprises des États-Unis dans <strong>les</strong> AGA, y compris le Fonds de retraitecommunautaire de l’État de New York, <strong>les</strong> Plans deretraite et de fidéicommis <strong>du</strong> Connecticut et le Bureau<strong>du</strong> contrôleur de la ville de New York. D’après uneenquête menée par le Forum d’investissement socialdes États-Unis, « ces dernières années ces fonds ontprésenté des dizaines de résolutions socia<strong>les</strong> fondéessur <strong>les</strong> Conventions de l’Organisation internationale<strong>du</strong> travail (OIT), sur des questions liées au changementclimatique ou à l’égalité des chances ».Au Canada la prise en charge des fonds de pensionpour <strong>les</strong> affaires socia<strong>les</strong> et environnementa<strong>les</strong>est stimulée par Batîrente, <strong>les</strong> fonds de pension dela Caisse d’économie Desjardins dont le siège estau Québec (une banque créée et totalement contrôléepar <strong>les</strong> syndicats) 3 . Batîrente administre près deEUR 350 millions, elle compte sur plus de 20 000membres et choisit <strong>les</strong> actions dans <strong>les</strong>quel<strong>les</strong> elleinvestit conformément aux critères environnementaux,sociaux et de gouvernance. « Au début noussoutenions <strong>les</strong> résolutions présentées par d’autresfonds ou d’autres organisations », dit Daniel Simard,3 Voir: .Rapports thématiques 26 <strong>Social</strong> <strong>Watch</strong>

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