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TM78.pdf - Ville de Montreuil

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TOUS MONTREUIL / N O 78 / DU 12 AU 25 JUIN 2012michto*! 25*« bien » en montreuillois.Mémoires d’AlgériensÀ l’occasion du 50 e anniversaire <strong>de</strong> l’indépendance <strong>de</strong> l’Algérie, Tous <strong>Montreuil</strong> a recueilli les souvenirs<strong>de</strong>s Algériens <strong>de</strong> <strong>Montreuil</strong>. Un feuilleton en <strong>de</strong>ux épiso<strong>de</strong>s : les Trente Glorieuses et la vie montreuilloise,puis la guerre d’Algérie.© D.R.Amar BoukirÉpiso<strong>de</strong> 1© D.R.8 ans,je me souviens<strong>de</strong>s affiches qui«J’avaispromettaient dutravail en France. En ce temps-là,il n’y avait pas besoin <strong>de</strong> passeport.Tu venais en France comme tuvoulais. C’était le même territoire.Je l’ai vécu, je suis arrivé commeça à 11 ans », se souvient AmarBoukir, 73 ans. Ce professeur <strong>de</strong>maths à la retraite a fait une partie<strong>de</strong> ses étu<strong>de</strong>s à <strong>Montreuil</strong>.Marié à une Française, il revientrégulièrement voir ses enfants etpetits-enfants qui vivent enFrance.Après la fin <strong>de</strong> la Secon<strong>de</strong> Guerremondiale et jusqu’en 1962, date<strong>de</strong> l’indépendance <strong>de</strong> l’Algérie,plus <strong>de</strong> 300 000 hommes ontcomme lui traversé la Méditerranéepour rejoindre la métropole.Il fallait reconstruire laFrance ! Beaucoup ont atterri à<strong>Montreuil</strong>, attirés par la multitu<strong>de</strong>d’entreprises qui y étaient installées.« C’était la seule immigrationqui n’en était pas vraiment une,puisqu’on était français, poursuitil.Les Algériens avaient commencéà venir au moment <strong>de</strong> la constructiondu métro en 1890. Mais lavague principale arrive en 1948,après la guerre, pour la reconstruction<strong>de</strong> l’industrie française. »La France a besoin d’eux. Celatombe bien : eux doivent nourrirleurs familles et cherchent à fuirla misère <strong>de</strong> leurs villages. Mêmes’ils savent à l’avance – malgré la« réclame » qui les y invite – quece ne sera pas pour l’eldorado. Àleur arrivée en métropole, beaucoupse retrouvent parqués dans<strong>de</strong>s taudis. « J’habitais au 145,rue <strong>de</strong>s Néfliers. C’étaient <strong>de</strong>sbaraques en bois. On se chauffaitau charbon », raconte El HocineBrahimi, 70 ans, ouvrier du bâtiment,aujourd’hui pensionnairedu foyer <strong>de</strong>s Ruffins. Il est un peupressé, dit-il, car <strong>de</strong>main, commetous les ans, il part au bled et sesvalises ne sont pas encore faites.Hôtels meublésD’autres s’installent dans l’un <strong>de</strong>ces hôtels meublés qui étaientnombreux à <strong>Montreuil</strong>, commepresque partout ailleurs, et souventinsalubres. Avec l’incontournablebistrot au rez-<strong>de</strong>chaussée<strong>de</strong> l’immeuble. Le soir,c’est là que les hommes seretrouvent pour échanger lesnouvelles, taper le carton oujouer aux dominos, tout en écoutantles chansons du pays quisortent du juke-box. MomentsMouloud Aourtilane<strong>de</strong> détente après <strong>de</strong>s journéesharassantes <strong>de</strong> travail.« Je suis arrivé à <strong>Montreuil</strong> en1949, j’avais 24 ans. J’habitaisau 209, rue Étienne-Marcel. Lepropriétaire <strong>de</strong> l’hôtel était unAlsacien. Si tu étais propre, il tegardait, sinon, c’était la porte »,explique Mouloud Aourtilane.Droit comme un i à 88 ans,visage <strong>de</strong> vieux lion que rien nesemble pouvoir abattre, il reçoitsans façons dans sa chambre dufoyer Rapatel. « Je suis resté troismois sans travailler, puis unpatron est arrivé dans le café pourembaucher. Dans le bâtiment.J’étais venu pour un an ou <strong>de</strong>ux.Soixante ans après, je suis toujoursà <strong>Montreuil</strong> ! »« Je connaissais déjàtout le mon<strong>de</strong> »Beaucoup d’entre eux n’atterrissentpas à <strong>Montreuil</strong> par hasard.Le nom <strong>de</strong> la ville a fait le tour<strong>de</strong> nombreux villages, notammenten Kabylie. Chacun yconnaît un parent, un ami, unancien voisin. « Je suis venu à<strong>Montreuil</strong> parce qu’il y avait <strong>de</strong>sgens <strong>de</strong> chez moi. Je connaissaisdéjà tout le mon<strong>de</strong> », dit MouloudAourtilane.Jusqu’au milieu <strong>de</strong>s années1950, une vie presque normales’installe pour ces hommesvenus <strong>de</strong> loin. Tout le mon<strong>de</strong> ytrouve son compte. Du travail etles moyens d’envoyer <strong>de</strong>s mandatsau pays, pour les exilés. Unemain-d’œuvre bon marché à disposition,pour les entreprises.« Ils ne gênent pas. Ils sont entreeux. Ils vont à l’usine avec leurgamelle. Ils reviennent le soir. Ils© D.R.El Hocine Brahimijouent un peu aux cartes. Ils secouchent et repartent au boulot lelen<strong>de</strong>main. C’étaient <strong>de</strong>s gensnécessaires pour l’économie, et ilsétaient français », affirme AmarBoukir, une pointe d’ironie dansla voix.Sur les chantiersD’ailleurs, peu à peu, ils ne secontentent plus <strong>de</strong> rester entreeux. Ils se rapprochent <strong>de</strong> leurscollègues <strong>de</strong> travail, font <strong>de</strong>sconnaissances, se lient d’amitié.El Hocine Brahimi est formel :« Les <strong>Montreuil</strong>lois, ils étaientbien. Malgré les événements qui semultipliaient <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux côtés <strong>de</strong> laMéditerranée, il n’y avait presquejamais <strong>de</strong> problème entre Françaiset Algériens. Sur les chantiers, il yavait une camara<strong>de</strong>rie, une ententeformidable. Le midi, on mangeaittous ensemble. »Le bal <strong>de</strong> la salle <strong>de</strong>s fêtesÀ <strong>Montreuil</strong>, Algériens etFrançais partagent aussi lesmêmes loisirs : cinémas, bals,clubs sportifs. « J’avais 20 ans.J’allais au bal à la salle <strong>de</strong>s fêtes<strong>de</strong> la mairie. Il y avait toujours lesmêmes copains. Tous <strong>de</strong>s Français.J’avais même une copine françaiseque je raccompagnais tous lesjours. Il n’y avait pas <strong>de</strong> racisme.Ni dans les colonies <strong>de</strong> vacancesoù j’ai été moniteur pendant troisans, ni au club du Red Star où j’aijoué au handball au sta<strong>de</strong> <strong>de</strong>sGrands-Pêchers », tient à préciserAmar Boukir.Les merguez <strong>de</strong> Saint-PaulLa mention « Français d’originemusulmane » était inscrite surleur carte d’i<strong>de</strong>ntité. Seule différenceavec celle d’un métropolitain.Même si la religion musulmaneétait presque absente <strong>de</strong>leur vie quotidienne. Aucun lieu<strong>de</strong> culte. Pas <strong>de</strong> nourriture hallal.Pas <strong>de</strong> célébrations religieuses.« On était jeunes et on ne priaitpas. Il n’y avait que les anciens quile faisaient. On respectait la religionparce qu’on était musulmans.Je ne mangeais pas <strong>de</strong> cochon. Je nebuvais pas trop d’alcool. Je faisaisle ramadan chaque année. Maisd’autres ne le faisaient pas. Parfois,on allait acheter <strong>de</strong> la vian<strong>de</strong> chezles juifs dans le quartier Saint-Paulà Paris. Leurs merguez étaientexcellentes », se souvient ElHocine Brahimi.Mais, déjà, la guerre plane. LesAlgériens <strong>de</strong> <strong>Montreuil</strong> vont <strong>de</strong>venir« les ennemis <strong>de</strong> l’intérieur ».À lire dans le prochain Tous<strong>Montreuil</strong>. • Patrice Noïa

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