JOURNAL OFFICIEL - Débats parlementaires de la 4e République

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1678 ASSEMBLEE NATIONALE — i*« ~ SEANCE DU 22 MARS 4349r« Abdotilaye N'Daw, l'autre camarade,;ente à l'administrateur la circulaireministre au sujet de la neutralité administrativeen matière électorale (copiejointe). Ce dernier crie qu'il s'en moque,{parce qu'il a lu et vu plusieurs circulaires.»Je iprécise qu'il déclara qu'apiès unecirculaire il en venait d'autres et qu'ilm'avait pas à tenir compte de celle quim trouvait dans la poche d'un hommedu R. D. A.!Je poursuis ma lecture:« Sounkalo Djibo, mandataire de l'unionindépendante i». D. A., arriva à Sourouvers onze heures, après l'arrestation deMamadou Cissé, pour constater les irrégularitésdu bureau de vote.« Il trouva le bureau vide. Tous les électeuis,apeurés par le geste de l'administrateur,ont vidé les lieux pour se rendreau marché, jour de foire hebdomadaire àfïassan. Ces électeurs, pour la plupart ancienscombattants, étaient acquis auR D. A. et voulaient voter ¡pour l'unionindépendante Mais, devant l'attitude del'administrateur Touze ils résolu!ent dene pas voter, car leur liberté de voteétait contrecarrée par l'arrestation d'unreprésentant de l'union indépendante.D'autre part, avant la conférence de noscamarades à Gassan, les propagandistesMie l'Union pour la défense de la ÏÏaute-Volta avaient distribué les bulletins deleurs candidats.« Après la conférence, les électeurs demandèrentles nôtres, qu'ils conservèrentjusqu'au jour du vote. L'administrateurétait sans doute renseigné sur cette nouvelleposition des électeurs, et l'arrestationde Mamadou Sissé, le jour du vote,ïie peut avoir d'autre explication que celledo frapper l'esprit dos électeurs et d'entraverla liberté du vote.« Vers deux heures, comme les électeursapeurés ne venaient pas, un mandatairedemanda la camionnette de Djibo et serendit au marché de Gassan pour dire auxélecteurs "de venir voter. Il était de retourune demi-heure après son départ.« Djibo vient d'être poursûivi par lejuge de Tougan inouï* :« 1° Avoir distribué des bulletins avantle jour du vole;« 2° Avoir été soupçonné de faire transporterles électeurs dans la camionnette duR. D. A. ».Il est maintenant accusé de leur avoirdistribué des bulletins dans la nuit précédantle vote. Bien qu'il ait été condamnépar le juge Pleven, nous ne voyons pasquel mal il y a à avoir donné dans la nuitdu 26 des bulletins pour le 27.« Nous savons que chaque électeur areçu sa carte de vote avec un bulletindedans. Ce bulletin était celui de l'unionpour la défense de la Haute-Volta ».Mais la justice n'inquiète ni Touze, nile père Chansauiier ! L'administrateur etl'administration oui délivrent les cariesne peuvent pas ignorer que les bulletinsde Mamadou Ouédraogo étaient dans lescartes. Qui les y a mis ? »Le jour du vote, j'ai fait constater àM. Chansauiier, le prêtre qui présidait lebureau de vote, que des bulletins se trouvaientdans las enveloppes. 11 m'a réponduque c'était par'mégarde.Les élections furent plus que dirigées:elles furent conduites ouvertement parl'administration. On procéda à des expulsionsarbitraires de nos représentants, muniscependant de procurations légales. Cefut le cas à Dédougou, à Boromo, à Tougan,à Toma. à Gassan, à Didyr, à Po, àZam, et en bien d'autres lieux encore.Des hommes, munis de procuration légale,qui devaient nous représenter dansdes bureaux de vote ont été ainsi expulséspar la force militaire. Le vote s estalors déroulé sans qu'aucun camarade denotre liste eût la possibilité d'en contrôlerla régularité.A Didyr, à Conkistinga, des hommesfurent placés à la porte des isoloirs et indiquentle « bon bulletin ». A Ouagadougou,au deuxième bureau, Le Larlé, ministredu Moro Naba, imposa des bulletins.Et nous avons assisté à ce fait paradoxal:le président du bureau acceptant de placerdans les isoloirs des hommes qui indiquaientles bulletins qu'il fallait prendreet qui, lorsque l'électeur choisissait d'autresbulletins, lui disaient que ce n'étaientpas les bons !A Zam, un électeur reçoit séance tenanteune magistrale correction pour s'êtretrompé et avoir pris le bulletin R. D. A.Le bureau comprenait le chef de cantonprésident ;son secrétaire et trois autreschefs relevant de lui étaient les assesseursA Combissiri, en jrésencc de l'instituteur,le seul intellectuel du lieu, le bureaucomprenai quatre chefs de canton sous laprésidence de l'interprète envoy ; par l'administrate ur.Je regrette que vous ne connaissiez pasla position sociale de ces hommes les unspar rapport aux autres. Vous pourriez entirer des conclusions sur la liberté et lesecret du vote lorsqu'un bureau de voteest présidé par un interprète dont les assesseurssont les chefs de canton qui relèventde l'administrateur et lorsque cet interprètese présente avec toute l'autoritéde l'administrateur lui-même.Dans de nombreux bureaux, il n'y avaitpas d'isoloir. A Poa, notre tête de liste,qui assistait au voto, fit dresser un procèsverbalpour être joint au dossier. Cettepièce ne figure pas, cependant, au dossierque nous avons examiné au dixième bureau.Ce n'est pas la seule, d'ailleurs, puisqueplusieurs autres manquent également.Le conseiller de l'Union française M. Nignan,qui est à Versailles, formula plusieurscontestations qui furent incluses, ensa présence, au procès-verbal.A Ouagadougou, notre camarade Paraiso,greffier, qui assistait au vote rédigea uneprotestation écrite, acceptée par le présidentdu bureau, l'administrateur Gauthier.Aucune de ces pièces n'est parvenue au10 e bureau.A Combisslri, le procès-verbal mentionnaitque quatorze enfants, avaient été admisà voler sans carte d'électeur, sanscontrôle de leurs noms. Cette mention,comme toutes les autres, ne figure pas audossier.Ainsi, outre la fraude, on relève des fai-^iheations du dossier. Je vais vous citer unfait qui a été enregistré, devant témoins,au procès-verbal des opérations de vote deOuagadougou.J'ai sous les yeux une attestation duju^e de paix. En effet, un électeur fut irailuit par notre représentant devant la justicede paix, porteur de la carte n° 668.Cette attestation est ainsi rédigée:« Ce jeune homme s'appelle"Nabayouré.Il a été condamné, le 5 janvier 19(8. parjugeine.it contradictoire n° 2 du tribunalde paix de Ouagadougou pour vol d'unesomme de 1.350 francs, à quatre mois deprison et 600 francs d'amende. A voté àIMge de dix-neuf ans, le 27 juin 1948, sousune fausse identité. »Voilà ce papier 1Des faits de ce genre, je pourrais vousen citer des quantités dans cette tragicomédieque furent les élections en llaute-Volta.Des gardes conduits par l'illustre Garatse ruèrent sur un paysan qui avait commisle crime d'aider un camionneur à passerpar une dérivation, car le pont avait étédémoli à dessein pour interdire le pas*6age. Le pauvre paysan eut la tête tailla*dée à coutps de baïonnettes. Il a été photographiétout sanglant avec des traces d

ésenter au bureau. Le nombre de suf-dans la plupart des bureaux, cor-Prages,respond là-bas au nombre d'inscrits.On peut prendre, au hasard, les résultatsdes bureaux de vote de Ouahigouya àZitinga; là, sur 901 votants, 901 suffragesen faveur de la liste Guissou. aucun pour lalis.te du R. D. A. ; à Samsé, sur 855 votants.855 pour la liste Guissou, aucun pour laliste du R. D. A., et ainsi de suite.Dans trente-neuf bureaux de vote, aucunsuffrage en faveur de notre liste.L'administrateur a refusé de faire parvenir ces bulletins lui-même. Il a eu lafranchise de me le dire, mais je voudraisfaire constater la façon dont cet administrateur est intervenu directement, de tellemanière que, faute de bulletins, dans cettecirconscription qui comporte 26.000 inscrits,seuls cinq électeurs ont pu voterpour notre liste.Dans les bureaux de vote de certainscercles, on peut dire en toute certitude,que le vote était fait à l'avance : nos représentantsayant été expulsés trois joursauparavant sous l'inculpation facile devagabondage, on vota entre amis, dansces bureaux, en se substituant aux électeurs.C'est ainsi que l'on trouve des localitésoù, sur plus de mille inscrits, il n'ya pas un seul absent.Je vous affirme que dans les territoiresd'outre-mer, il est difficile de convoqueret de réunir effectivement mille électeursle jour même du vote. Ce sent des chosesqui arrivent rarement dans la métropoleoù l'on est cependant averti des opérationsélectorales ; à plus forte raison, nepeuvent-elles se produire dans les territoiresd'outre-mer.Or, à Kouka, sur 1.101 votants, le procèsverbalattribue 1.101 votes à la liste Guissou et zéro à la liste Barrami.A Tougan, »sur 1.107 inscrits, 1.107 voixsont attribuées à la liste Guissou et zéroà la liste Barraud.A Souret, 857 inscrits ; 857 votants pourla liste Guissou, zéro pour la liste Barraud.A Zitega, sur 1,284 votants 1.284 voixsont attribuées à la liste Guidon, zéro àla liste Barraud. Il en est de même à Tougoumayan: sur 482 votants et 482 suffragesexprimés, 482 voix vont à la listeGuissou et zéro à la liste Barraud. (Exclamationsà Vextrême gauche.)M. Fernand Grenier. Ce qui n'empêchepas le rapporteur de conclure à la validationd'une telle élection iM. le rapporteur. Le rapporteur a donnéà la tribune des explications que vousn'étiez sans doute pas là pour entendre.{Très bien! très bien! au centre.)M. Fernand Grenier. Expliquez - nouspourquoi il y avait, dans les bureaux devote, autant de votants que d'inscrits ?On a rarement constaté cela en France etil y a beaucoup de chance qu'il en soitde même dans les territoires d'outre-mer.M. Marcel Poimboeuf. Et de l'autre côtédu rideau de fer ?M. Maurice Lucas. On vous a dit quefous les bulletins de vote n'avaient pasété distribués.M. Jean Felix-Tchicaya. Raison de plus,mon cher collègue, pour annuler les électionspuisque tous les bulletins de voten'ont pas été distribués.M. André-François Monteil. On a vu exactementla même chose lors de l'électionde M. VergésM. Ouezzin Coulibaly. Notre rapporteura donné son opinion à cette tribune.ASSEMBLEE NATIONALE — 1" SEANCE Dû 22 MARS 1049 1679M. le rapporteur. Non, l'opinion de lamajorité de la commission, mon cher collègue.M. Ouezzïn Coulibaly. Je dis bien « sonopinion », car le commentaire qu'il a fait,à la fin de son exposé, n'a pas été entendupar la commission.M. le rapporteur. Je vous demande pardon1 II a été fait et j'oppose à vos allégationsle démenti le plus formel.M. Ouezzïn Coulibaly. Vous avez fait allusionà certaines considérations quin'émanent que de vous et qui n'ont pasété évoquées en commission.M. le rapporteur. Je vous oppose un démentiformel, mon cher collègue, et jeregrette que le doyen d'âge, président dela commission, ne soit pas présent.M. Ouezzïn Coulibaly. Le jour du vote, à16 heures, arrivait un Mossi portant sur satête l'urne contenant les bulletins du bureaude vote de Godin. Ce bureau de voteest situé à 104 kilométrés de Ouagadougou.L'administrateur Gauthier ayant constatésa provenance s'étonna, en présencede plusieurs personnes, dont notre représentant,M Paraiso, greffier au parquet deBassam, et demanda par quel moyen ceMossi était venu à Ouagadougou. Il répondit:« A pied ».Et l'administrateur de lui demander encore: « Quand les opérations électoralesse sont-elles terminées » ? Réponse : « Asix heures ».Cela se passe de commentaires. Etait-cesix heures du matin ou six heures du soir,la veille ?M. Paraiso, voyant l'administrateurétonné, qui regardait son entourage stupéfait,demanda qu'on portât cette constatationau procès-verbal. Une note fut rédigéeet remise au bureau de vote. Elledevait se trouver dans le dossier, mais ellea certainement disparu. Je demande aurapporteur s'il l'a trouvée dans le dossier.Je me suis livré à un petit cal cu i quisera peut-être plus clair que des paroles.Il y a en Haute-Vol ta quatre grands cerclesinossi et quatre cercles non mossi.L'action de l'administration s'est exercéedifféremment selon qu'il s'agissait dela partie mossi ou de la partie non mossi.Autant il fallait tout faire pour amenerles uns à voter, autant il fallait s'employerà écarter les autres.Dans de nombreux bureaux, le vote aconsisté à mettre dans l'urne le nombrede bulletins correspondant aux électeurs.Je l'ai démontré tout à l'heure. Dans certainsbureaux, pour donner le change, etpour faire croire à un vote effectif, on adiminué le nombre des suffrages de quelquesvoix seulement. Par exemple, àRema, 909 inscrits, 900 suffrages; à Tikaré,493 inscrits, 497 suffrages; deux électeursseulement ne se seraient pas présentés. Aqui voudraH-on faire croire cela ?M. Jean-Marie Louve! Mais c'est trèsbien! C'est un bel exemple de consciencecivique, tSourires.)M. Ouezzin Coulibaly. A Boussou, 889inscrits, 877 votants.Il est facile de faire voter tous les inscritslorsqu'on n'exige pas leur présence.M. Jean-Marie Louve!. Comme dans lespays totalitaires.M. Louis-Paul Aujoulat. Voulez-vous mepermettre de vous interrompre ?M. Ouezzin Coulibaly. Je vous en prie.M. Louis-Paul Aujoulat. Si les faits quevous venez de rapporter sont exacts, vousme permettrez de m'étonner que vous ayeztout mis en œuvre, jusqu'à présent, pourretarder la discussion des opérations électoralesde la Haute-Vol ta.Les déiputés de la Haute-Volta ont étéélus le 27 juin. Si des faits aussi gravesse sont passés à l'occasion des opérationsélectorales, il eût été opportun de saisirl'Assemblée nationale beaucoup plus tôt.Vous n'ignorez pas que si l'examen desopérations électorales de la Haute-Voltan a pu être appelé plus tôt, c'est parceque le 10° bureau ne pouvait pas, en votreabsence, se prononcer.1 Je regrette que, pour des questions aussiI graves, vous n'ayez pas jugé nécessaire deuitt^r vos territoires dès le lendemaines élections, afin de saisir l'Assemblée.11 est dommage que tant de nos collèguesd'outre iner estiment plus opportun deprendre leurs quartiers d'hiver, de printempset même d'automne dans leur circonscription,que d'accomplir leur tâcheà l'Assemblée nationale.M. Ouezzin Coulibaly. Mon cher collègue,vous êtes un élu du premier collège»C'est sans doute pourquoi vous »pensez quelorsque les élus des territoires d'outremersont dans leur circonscription, ils sereposent.M. Louis-Paul Aujoulat. Je ne dis pas cruevous vous reposez, mais je pense que uesquestions aussi graves méritaient votreprésence ici en temps utile.M. Mamadou Konate. Me permettez-vousde vous interrompre, mon cher collègue ?M. Ouezzin Coulibaly. Je vous en prie.M. Mamadou Konate. Monsieur Aujoulat,si certains élus restent dans leur territoire,c'est uniquement pour éviter que ne secréent, dans ces territoires, des situationsaussi déplorables que celles que l'on connaîtà Madagascar et que l'on déplore enIndochine.On fait tout, dans nos territoires, pourcréer des situations de ce genre. C'estpourquoi, en notre qualité de citoyens,nous sommes obJgés de parcourir ce pays,de porter la bonne parole partout et deprêcher le calme. Partout, on tente deprovoquer des incidents et nous sommesobligés d'intervenir.Par conséquent, il ne faut pas croire quesi nous restons dans nos territoires, auprintemps ou en hiver, c'est pour nousreposer. Nous sommes là-bas pour éviterque les Français ne soient obligés d'y envoyerleurs enfants mettre fin à des incidentsregrettables et dangereux. (Applaudissementsà Vfxtrême gauche^)M. Ouezzin Coulibaly. Au surplus, jevoudrais faire remarquer à M. Aujoulatque, dès le lendemain d s élections, j'aienvoyé à l'Assemblée nationale une protestationquant à la val'dité le ces élections.Vous n'ignorez pas la situation actuelle! dans la partie de la Haute-Volta qui n'estpas mossi, où des gens on! été emprisonnés.11 y avait, dans ia prison deBobo-Dioulasso, plus de cent personnesaccusées d'avoir opposé à l'administrationune certaine résistance. Certains sontmaintenus en prison dix-huit mois, d'autresquinze mois.Vous connaissez ces populations. Si nousn'étions pas restés sur place pour lesapaiser, il y a longtemps que vous auriezeu. ce que vous recherchez peut-être,c'est-à-dire des troubles et des désordresdans les territoires d'outre-merM. Louis-Paul Aujoulat. C'est une affirmationtoute gratuite.

1678 ASSEMBLEE NATIONALE — i*« ~ SEANCE DU 22 MARS 4349r« Abdoti<strong>la</strong>ye N'Daw, l'autre camara<strong>de</strong>,;ente à l'administrateur <strong>la</strong> circu<strong>la</strong>ireministre au sujet <strong>de</strong> <strong>la</strong> neutralité administrativeen matière électorale (copiejointe). Ce <strong>de</strong>rnier crie qu'il s'en moque,{parce qu'il a lu et vu plusieurs circu<strong>la</strong>ires.»Je iprécise qu'il déc<strong>la</strong>ra qu'apiès unecircu<strong>la</strong>ire il en venait d'autres et qu'ilm'avait pas à tenir compte <strong>de</strong> celle quim trouvait dans <strong>la</strong> poche d'un hommedu R. D. A.!Je poursuis ma lecture:« Sounkalo Djibo, mandataire <strong>de</strong> l'unionindépendante i». D. A., arriva à Sourouvers onze heures, après l'arrestation <strong>de</strong>Mamadou Cissé, pour constater les irrégu<strong>la</strong>ritésdu bureau <strong>de</strong> vote.« Il trouva le bureau vi<strong>de</strong>. Tous les électeuis,apeurés par le geste <strong>de</strong> l'administrateur,ont vidé les lieux pour se rendreau marché, jour <strong>de</strong> foire hebdomadaire àfïassan. Ces électeurs, pour <strong>la</strong> plupart ancienscombattants, étaient acquis auR D. A. et vou<strong>la</strong>ient voter ¡pour l'unionindépendante Mais, <strong>de</strong>vant l'attitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>l'administrateur Touze ils résolu!ent <strong>de</strong>ne pas voter, car leur liberté <strong>de</strong> voteétait contrecarrée par l'arrestation d'unreprésentant <strong>de</strong> l'union indépendante.D'autre part, avant <strong>la</strong> conférence <strong>de</strong> noscamara<strong>de</strong>s à Gassan, les propagandistesMie l'Union pour <strong>la</strong> défense <strong>de</strong> <strong>la</strong> ÏÏaute-Volta avaient distribué les bulletins <strong>de</strong>leurs candidats.« Après <strong>la</strong> conférence, les électeurs <strong>de</strong>mandèrentles nôtres, qu'ils conservèrentjusqu'au jour du vote. L'administrateurétait sans doute renseigné sur cette nouvelleposition <strong>de</strong>s électeurs, et l'arrestation<strong>de</strong> Mamadou Sissé, le jour du vote,ïie peut avoir d'autre explication que celledo frapper l'esprit dos électeurs et d'entraver<strong>la</strong> liberté du vote.« Vers <strong>de</strong>ux heures, comme les électeursapeurés ne venaient pas, un mandataire<strong>de</strong>manda <strong>la</strong> camionnette <strong>de</strong> Djibo et serendit au marché <strong>de</strong> Gassan pour dire auxélecteurs "<strong>de</strong> venir voter. Il était <strong>de</strong> retourune <strong>de</strong>mi-heure après son départ.« Djibo vient d'être poursûivi par lejuge <strong>de</strong> Tougan inouï* :« 1° Avoir distribué <strong>de</strong>s bulletins avantle jour du vole;« 2° Avoir été soupçonné <strong>de</strong> faire transporterles électeurs dans <strong>la</strong> camionnette duR. D. A. ».Il est maintenant accusé <strong>de</strong> leur avoirdistribué <strong>de</strong>s bulletins dans <strong>la</strong> nuit précédantle vote. Bien qu'il ait été condamnépar le juge Pleven, nous ne voyons pasquel mal il y a à avoir donné dans <strong>la</strong> nuitdu 26 <strong>de</strong>s bulletins pour le 27.« Nous savons que chaque électeur areçu sa carte <strong>de</strong> vote avec un bulletin<strong>de</strong>dans. Ce bulletin était celui <strong>de</strong> l'unionpour <strong>la</strong> défense <strong>de</strong> <strong>la</strong> Haute-Volta ».Mais <strong>la</strong> justice n'inquiète ni Touze, nile père Chansauiier ! L'administrateur etl'administration oui délivrent les cariesne peuvent pas ignorer que les bulletins<strong>de</strong> Mamadou Ouédraogo étaient dans lescartes. Qui les y a mis ? »Le jour du vote, j'ai fait constater àM. Chansauiier, le prêtre qui présidait lebureau <strong>de</strong> vote, que <strong>de</strong>s bulletins se trouvaientdans <strong>la</strong>s enveloppes. 11 m'a réponduque c'était par'mégar<strong>de</strong>.Les élections furent plus que dirigées:elles furent conduites ouvertement parl'administration. On procéda à <strong>de</strong>s expulsionsarbitraires <strong>de</strong> nos représentants, muniscependant <strong>de</strong> procurations légales. Cefut le cas à Dédougou, à Boromo, à Tougan,à Toma. à Gassan, à Didyr, à Po, àZam, et en bien d'autres lieux encore.Des hommes, munis <strong>de</strong> procuration légale,qui <strong>de</strong>vaient nous représenter dans<strong>de</strong>s bureaux <strong>de</strong> vote ont été ainsi expulséspar <strong>la</strong> force militaire. Le vote s estalors déroulé sans qu'aucun camara<strong>de</strong> <strong>de</strong>notre liste eût <strong>la</strong> possibilité d'en contrôler<strong>la</strong> régu<strong>la</strong>rité.A Didyr, à Conkistinga, <strong>de</strong>s hommesfurent p<strong>la</strong>cés à <strong>la</strong> porte <strong>de</strong>s isoloirs et indiquentle « bon bulletin ». A Ouagadougou,au <strong>de</strong>uxième bureau, Le Larlé, ministredu Moro Naba, imposa <strong>de</strong>s bulletins.Et nous avons assisté à ce fait paradoxal:le prési<strong>de</strong>nt du bureau acceptant <strong>de</strong> p<strong>la</strong>cerdans les isoloirs <strong>de</strong>s hommes qui indiquaientles bulletins qu'il fal<strong>la</strong>it prendreet qui, lorsque l'électeur choisissait d'autresbulletins, lui disaient que ce n'étaientpas les bons !A Zam, un électeur reçoit séance tenanteune magistrale correction pour s'êtretrompé et avoir pris le bulletin R. D. A.Le bureau comprenait le chef <strong>de</strong> cantonprési<strong>de</strong>nt ;son secrétaire et trois autreschefs relevant <strong>de</strong> lui étaient les assesseursA Combissiri, en jrésencc <strong>de</strong> l'instituteur,le seul intellectuel du lieu, le bureaucomprenai quatre chefs <strong>de</strong> canton sous <strong>la</strong>prési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> l'interprète envoy ; par l'administrate ur.Je regrette que vous ne connaissiez pas<strong>la</strong> position sociale <strong>de</strong> ces hommes les unspar rapport aux autres. Vous pourriez entirer <strong>de</strong>s conclusions sur <strong>la</strong> liberté et lesecret du vote lorsqu'un bureau <strong>de</strong> voteest présidé par un interprète dont les assesseurssont les chefs <strong>de</strong> canton qui relèvent<strong>de</strong> l'administrateur et lorsque cet interprètese présente avec toute l'autorité<strong>de</strong> l'administrateur lui-même.Dans <strong>de</strong> nombreux bureaux, il n'y avaitpas d'isoloir. A Poa, notre tête <strong>de</strong> liste,qui assistait au voto, fit dresser un procèsverbalpour être joint au dossier. Cettepièce ne figure pas, cependant, au dossierque nous avons examiné au dixième bureau.Ce n'est pas <strong>la</strong> seule, d'ailleurs, puisqueplusieurs autres manquent également.Le conseiller <strong>de</strong> l'Union française M. Nignan,qui est à Versailles, formu<strong>la</strong> plusieurscontestations qui furent incluses, ensa présence, au procès-verbal.A Ouagadougou, notre camara<strong>de</strong> Paraiso,greffier, qui assistait au vote rédigea uneprotestation écrite, acceptée par le prési<strong>de</strong>ntdu bureau, l'administrateur Gauthier.Aucune <strong>de</strong> ces pièces n'est parvenue au10 e bureau.A Combisslri, le procès-verbal mentionnaitque quatorze enfants, avaient été admisà voler sans carte d'électeur, sanscontrôle <strong>de</strong> leurs noms. Cette mention,comme toutes les autres, ne figure pas audossier.Ainsi, outre <strong>la</strong> frau<strong>de</strong>, on relève <strong>de</strong>s fai-^iheations du dossier. Je vais vous citer unfait qui a été enregistré, <strong>de</strong>vant témoins,au procès-verbal <strong>de</strong>s opérations <strong>de</strong> vote <strong>de</strong>Ouagadougou.J'ai sous les yeux une attestation duju^e <strong>de</strong> paix. En effet, un électeur fut irailuit par notre représentant <strong>de</strong>vant <strong>la</strong> justice<strong>de</strong> paix, porteur <strong>de</strong> <strong>la</strong> carte n° 668.Cette attestation est ainsi rédigée:« Ce jeune homme s'appelle"Nabayouré.Il a été condamné, le 5 janvier 19(8. parjugeine.it contradictoire n° 2 du tribunal<strong>de</strong> paix <strong>de</strong> Ouagadougou pour vol d'unesomme <strong>de</strong> 1.350 francs, à quatre mois <strong>de</strong>prison et 600 francs d'amen<strong>de</strong>. A voté àIMge <strong>de</strong> dix-neuf ans, le 27 juin 1948, sousune fausse i<strong>de</strong>ntité. »Voilà ce papier 1Des faits <strong>de</strong> ce genre, je pourrais vousen citer <strong>de</strong>s quantités dans cette tragicomédieque furent les élections en l<strong>la</strong>ute-Volta.Des gar<strong>de</strong>s conduits par l'illustre Garatse ruèrent sur un paysan qui avait commisle crime d'ai<strong>de</strong>r un camionneur à passerpar une dérivation, car le pont avait étédémoli à <strong>de</strong>ssein pour interdire le pas*6age. Le pauvre paysan eut <strong>la</strong> tête tail<strong>la</strong>*dée à coutps <strong>de</strong> baïonnettes. Il a été photographiétout sang<strong>la</strong>nt avec <strong>de</strong>s traces d

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