4-260-B-10 <strong>Infections</strong> à <strong>pneumocoque</strong> Pédiatriedu liquide céphalorachidien (LCR) par voie hématogène avecfranchissement secondaire des plexus choroïdes par des mécanismesencore inconnus. [74]Dans le LCR, les moyens de défense sont limités et le <strong>pneumocoque</strong>va pouvoir entraîner une méningite, essentiellement par uneréaction inflammatoire polynucléaire dépendante. La présence de<strong>pneumocoque</strong>s vivants ou d’éléments de sa paroi déclenche laproduction in situ de cytokines. L’action synergique du facteur denécrose tumorale alpha et de l’interleukine 1 entraîne un afflux depolynucléaires neutrophiles et un relâchement des jonctions serréesde l’endothélium des capillaires cérébraux avec baisse de l’étanchéitéde la barrière hématoencéphalique. L’altération de la barrièreentraîne un œdème cérébral qui persiste même après stérilisationdu LCR et l’afflux de polynucléaires neutrophiles. L’hypertensionintracrânienne secondaire à l’œdème cérébral et une possiblevascularite avec thrombose contribuent à l’anoxie cérébrale. [98]CliniqueFigure 2Pneumopathie franche lobaire aiguë sur un scanner thoracique.INFECTIONS DES VOIES RESPIRATOIRES INFÉRIEURESParmi les infections respiratoires, S. pneumoniae est essentiellementresponsable de pneumopathies aiguës et de surinfection debronchite chronique. PneumopathiesLe <strong>pneumocoque</strong> est responsable de 30 à 50 % des pneumopathiesaiguës communautaires chez l’adulte et d’environ 25 % chezl’enfant. [68] Ces pneumopathies sont parmi les plus graves et cellesles plus fréquemment hospitalisées. [70] Chez l’enfant, lespneumopathies à <strong>pneumocoque</strong> concernent un faible nombre deterrains à risque. En revanche, une infection virale et surtoutgrippale dans le mois précédant, même cliniquement guérie,favorise la survenue d’une pneumopathie grave. [37]Pneumonie franche lobaire aiguëLa pneumonie franche lobaire aiguë n’est pas pathognomonique du<strong>pneumocoque</strong>. Cette forme est assez rare en pédiatrie et s’observeplus volontiers après l’âge de 2 ans. Elle est caractérisée dans saforme typique par un début brutal (horaire), associant frisson intenseet prolongé (solennel), fièvre rapidement à 40 °C, malaise généralintense, point de côté bloquant la respiration, toux sèche et dyspnéeprogressive.L’examen clinique, pauvre dans les premières heures, est riche audeuxième ou troisième jour. Le malade est couché sur le côtédouloureux, le souffle court, un faciès vultueux, les conjonctivesbistres, avec un bouquet d’herpès nasolabial. La fièvre est enplateau. La toux ramène une expectoration rouillée, puis purulente.L’examen pulmonaire objective un syndrome de condensation.La radiographie thoracique met en évidence une opacité dense ethomogène avec bronchogramme aérien d’un lobe ou d’un segmentà limite nette non rétractile, caractéristique du syndrome alvéolaire(Fig. 2).Les signes biologiques non spécifiques montrent une leucocytose àpolynucléaires et des signes d’inflammation.L’évolution dans les pays développés est souvent rapidementfavorable, ne se concevant que sous antibiothérapie adaptée.L’évolution spontanée se fait selon un mode cyclique, avec un étatstationnaire pendant 7 à 9 jours, puis une majoration des signesgénéraux (précrise) suivie d’une défervescence avec apyrexie,euphorie, crise sudorale et polyurique précédant une brève postcrisemarquée par un accès fébrile avant la guérison ; les signes d’examense normalisent en une huitaine de jours et la radiographie en 1 mois.Les complications sont fréquentes. Un épanchement pleural estassocié dans 20 à 40 % des cas, surtout dans les formesFigure 3Figure 4Pneumopathie lobaire bilatérale sur scanner thoracique.Pneumopathie bilatérale sur cliché thoracique de face.bactériémiques, un empyème dans 2 à 3 % des cas. [93]L’épanchement pleural se caractérise par la constitution rapide d’uncloisonnement fibrineux et d’une pachypleurite. L’atteintemultilobaire ou bilatérale est possible (Fig. 3, 4).Le pronostic est d’autant plus sombre qu’il existe une ou plusieurspathologies sous-jacentes, un retard au diagnostic ou au traitement,une atteinte de plusieurs lobes, des hémocultures positives, uneleucocytose basse (inférieure à 1 000/mm 3 ) ou très élevée(supérieure à 25 000/mm 3 ).6
Pédiatrie <strong>Infections</strong> à <strong>pneumocoque</strong> 4-260-B-10Tableau 6. – Signes évocateurs d’une pneumonie à <strong>pneumocoque</strong>Tableau 7. – Circonstances justifiant une confirmation radiologiqueAssociation discriminante de signesen faveur d’une infectionrespiratoire basseTempérature > 38°5Fréquence respiratoire > 60/minGeignement expiratoireRefus ou difficultés à boire, surtout chezle nourrisson de moins de 1 anSignes en faveur d’une originepneumococciqueFièvre élevée avec frissonsToux sèche et signes en foyerAltérationdel’état généralDouleurs abdominalesMéningismeOtiteMauvaise tolérance du syndromeinfectieuxCirconstancesSignes cliniques évocateurs de pneumonieSignes cliniques insuffisants pour éliminerune pneumonieToux fébrile persistante avec ou sans signesde gravitéFièvre isolée persistanteEnfant de moins de 2 mois et souvent mêmede moins de 2 ansSuspicion de corps étranger inhaléPneumonies récidivantesConfirmation radiologiqueToujoursSurtout si facteurs de risque associésToujoursToujoursToujoursFormes cliniquesLa forme typique classiquement décrite comme survenant chez unsujet en bonne santé apparente n’est pas la plus fréquente. D’unepart, cette symptomatologie peut être décapitée par uneantibiothérapie précoce et des antipyrétiques. D’autre part, laplupart des pneumonies à <strong>pneumocoque</strong> surviennent aux âgesextrêmes de la vie et en cas de comorbidité associée. Sur ces terrains,l’aspect clinique souvent trompeur peut entraîner un retard audiagnostic et à la mise en route du traitement. L’ensemble de cesfacteurs explique la gravité de cette affection et le fort taux demortalité. En revanche, il ne semble pas exister de corrélation entrela résistance microbiologique et la gravité clinique, [26, 61] saufexception. [97]Chez l’enfant, l’infection à <strong>pneumocoque</strong> se voit de préférence avantl’âge de 5 ans. Le tableau clinique est volontiers trompeur etatypique, cependant la fièvre ne manque jamais. Il faut donc savoirévoquer une pneumonie devant toute fièvre élevée, d’apparitionbrutale ou associée à des manifestations abdominales (tableaupseudoappendiculaire avec notamment des vomissements) ouneurologiques (céphalées, convulsions, agitation ou raideur de lanuque), même en l’absence de tout signe respiratoire. [83] Leséléments en faveur d’une atteinte des voies aériennes basses sont lafièvre, l’augmentation de la fréquence respiratoire, l’existence designes de lutte et la présence d’anomalies à l’auscultationpulmonaire, diffuses ou localisées. Certains signes associés sontparticulièrement en faveur d’une infection respiratoire basse, [14]d’autres orientent vers le <strong>pneumocoque</strong> (Tableau 6).La radiographie pulmonaire montre une pneumonie franche lobaireaiguë dans seulement 40 à 50 % des cas et une pneumonie bilatéralechez 10 % des patients avec hémoculture positive à<strong>pneumocoque</strong>. [37] Les examens biologiques non spécifiques,élévation de la protéine C réactive, hyperleucocytose àpolynucléaires neutrophiles, sont manquants dans un tiers descas. [96] Seul, le taux plasmatique de procalcitonine supérieur à 2 µg/lsemble être un indicateur pertinent de l’origine bactérienne de lapneumonie chez un patient n’ayant reçu aucune antibiothérapiepréalable. [38] Sous traitement adapté, le meilleur signe d’orientationvers une origine pneumococcique reste la chute rapide de latempérature. La persistance d’une fièvre au-delà de 48 heurescorrespond alors souvent à des complications. [96]Conduite pratiqueDevant une suspicion de pneumopathie communautaire aiguë, troiséléments vont guider l’attitude thérapeutique : la radiographie quiseule apporte le diagnostic de certitude de pneumopathie, les signesde gravité qui vont ou non décider de l’hospitalisation et lesexamens à visée étiologique qui permettent d’adapter le traitement.Le diagnostic de pneumopathie doit être un diagnostic de certitude.La clinique est rarement spécifique et les pneumopathies nereprésentent qu’environ 1 % des infections respiratoires aiguës. Il estdonc impératif de recourir à la radiographie thoracique pourconfirmer le diagnostic de pneumonie devant des signes cliniquesévocateurs. Il est cependant recommandé d’élargir la prescriptionde cet examen en présence d’un contexte particulier pouvant évoluervers les complications (Tableau 7).Tableau 8. – Critères de gravité justifiant une hospitalisation.Hospitalisation d’embléeCritères cliniques de gravitéCritères radiologiquesde gravitéLe seul cliché recommandé est la radiographie thoracique de face,en inspiration et en position debout. Une opacité parenchymateuseà la radiographie confirme le diagnostic. Ces aspects radiologiquespeuvent apparaîtredefaçon retardée, vers la soixante-douzièmeheure, et être difficiles à interpréter. La radiographie thoraciquepermet en outre de visualiser une complication (épanchementpleural, excavation …) et/ou une comorbidité (néoplasie).La recherche d’un <strong>pneumocoque</strong> dans l’expectoration peut parfoisse justifier chez l’adulte, pas chez l’enfant. [10]Devant une pneumonie communautaire confirmée, la décisiond’hospitaliser ou non un patient repose sur un ensemble de critères,des signes de gravité, mais aussi d’autres facteurs tels que l’âge oules conditions socio-économiques (Tableau 8), [1] auxquels on peutajouter les vomissements avec ou sans signes de déshydratation etla mauvaise réponse à une antibiothérapie orale.Enfin, la recherche de l’étiologie est systématique en milieuhospitalier et facultative en ambulatoire.En ambulatoire, c’est-à-dire devant une forme bénigne ou de gravitémoyenne, aucun examen microbiologique n’est recommandé.Le prélèvement a priori le plus simple à effectuer est l’expectoration.Cependant, malgré un strict respect d’un protocole établi pourlimiter la contamination par la flore endogène, cette technique restecontroversée, notamment en raison de la faible reproductibilité deses résultats. Les hémocultures ne sont positives au mieux que dans10 % des cas et la sérologie ne donne que des résultats a posteriori.En milieu hospitalier, c’est-à-dire devant une forme sévère, lesexamens à visée étiologique doivent au moins associer hémocultureset analyse bactériologique d’une expectoration. Si le contexte lepermet, il faut privilégier les prélèvements bronchiques protégésdont les résultats sont plus spécifiques et reproductibles. Autres localisations respiratoiresPneumonie survenant chez un nourrisson de moinsde 6 moisAspect généraldel’enfant (aspect toxique)Tolérance respiratoire (fréquence respiratoire, signesde lutte …)Hypoxie (si possible par détection de la saturationen oxygène ou par oxymétrie de pouls)Difficulté à s’alimenter (dyspnée à la prise debiberon chez le jeune nourrisson)Aggravation rapide de la maladieConditions socio-économiques précairesExistence d’un épanchement pleuralPrésence d’une pneumonie très étendue (plus dedeux lobes)Image d’abcèsLa surinfection d’une bronchite chronique obstructive est fréquente.L’abcès du poumon est rare, compliquant une pneumonie nontraitée ou une septicémie. Le pneumothorax et la pleurésie primitiverestent exceptionnels.INFECTIONS NEUROMÉNINGÉESEn France, la méningite à <strong>pneumocoque</strong> est la plus fréquente desméningites bactériennes. Elle représente 48 % des étiologies tousâges confondus. C’est la première étiologie chez l’enfant avant 2 ans7