je m’aperçois que les élèves font pasmal tous la même chose chez eux,à l’ordinateur; ils s’y connaissentdans certains domaines seulement. »Puis, Ahmed Bensaada précise qu’àl’université, on ne forme pas lesenseignants à la gestion <strong>de</strong> labosd’informatique. Il faut surmonter lapeur d’être ridicule, savoir utiliserles connaissances <strong>de</strong>s élèves, prévoirun plan B. « Il ne faut pas oublierqu’il y a une différence entre savoir« pitonner » <strong>et</strong> faire un proj<strong>et</strong>. J’ai<strong>de</strong>s exemples d’élèves qui, audépart, connaissent peu l’outil,mais qui réussissent <strong>de</strong> très bonsproj<strong>et</strong>s intégrant les TIC. »QUELS SONT LES EFFETSDE L’INTÉGRATION DES TICSUR VOS PRATIQUES?Les réponses jaillissent <strong>de</strong> toutesparts. D’abord, Nathalie Frigon préciseque lorsqu’on a un ordinateur,on peut avoir <strong>de</strong> nouveaux objectifsqu’on n’avait pas auparavant. « Parexemple, maintenant les élèvescréent un conte multimédia; cecim’amène alors à me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rcomment je vais organiser maclasse. C’est le fait <strong>de</strong> vouloir travaillerà l’ordinateur qui m’a faitmodifier mon approche : j’ai inclusle travail en sous-groupe, les ateliers,j’ai ouvert ma porte à d’autresa<strong>du</strong>ltes, divisé ma classe pour faireparticiper au même proj<strong>et</strong> <strong>de</strong>sécrivains, <strong>de</strong>s artistes, <strong>de</strong>s photographes,<strong>et</strong>c. Des parents sontvenus m’ai<strong>de</strong>r <strong>et</strong> là, j’ai eu àréfléchir à ce que je faisais avecceux qui ne travaillaient pas à l’ordinateur…J’ai formé <strong>de</strong>s équipesd’experts, certains enfants en corrigentd’autres, <strong>et</strong>c. » Nathalie aconstaté que les jeunes se découvrent<strong>de</strong>s forces <strong>et</strong> i<strong>de</strong>ntifient aussi leursfaiblesses. « Le proj<strong>et</strong>, c’est bien différent,mon rapport à l’autorité achangé. Au proj<strong>et</strong> suivant, les élèvesse sont organisés beaucoup pluspar eux-mêmes <strong>et</strong> ils venaient mefaire part <strong>de</strong> leurs besoins. Pour cequi est <strong>de</strong>s apprentissages <strong>de</strong> base(écriture, lecture, arithmétique),je passe une gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong> l’annéeà enseigner ces matières puisqueje travaille en première année <strong>et</strong> jene crois pas qu’il soit nécessaired’utiliser l’ordinateur pour cesMichelle Fournier :Enseignante <strong>de</strong> sixièmeannée au primaire,Michèle fait partie <strong>du</strong>groupe GRISE (Grouperessource en informatiquepour soutien auxenseignants) <strong>de</strong> sacommission scolaire.Elle a reçu une formationpour pouvoir ai<strong>de</strong>rd’autres enseignants àacquérir quelques connaissances<strong>de</strong> base <strong>et</strong>ne pas toujours avoirà dépendre <strong>du</strong> technicien.Michelle estune a<strong>de</strong>pte. Il est rarequ’une journée sepasse sans que l’ordinateuren classe ne soitutilisé.Photo : Denis Garonapprentissages; je suis plus traditionnellesur ce plan, je me sersplutôt <strong>de</strong> l’ordinateur quand lesélèves intègrent leurs apprentissagesdans leurs proj<strong>et</strong>s. »Pour plusieurs, intégrer les TICperm<strong>et</strong> <strong>de</strong> « raccrocher plusieursjeunes ». Patrice Prud’homme croitqu’il y a un « alignement favorable<strong>de</strong> planètes » actuellement : le travailpar proj<strong>et</strong>s, la coopération,les TIC… « Avec les élèves, on colleune réalité à <strong>de</strong>s grands termes, <strong>de</strong>stermes autrement tellement abstraitspour eux. Pour moi, ça se fait bienen exploitant les TIC. On gar<strong>de</strong> aussi<strong>de</strong>s traces <strong>de</strong> travaux d’élèves surCD, puis tes pairs vont te voir(comme le réparateur Maytag…)pour avoir <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong>, <strong>de</strong>s conseils;cela crée <strong>de</strong> nouvelles interactions. »Pour sa part, Ahmed Bensaada aremarqué que sa relation d’autoritéest différente lorsqu’il est au laboratoireavec ses élèves. « Je suisplus souvent assis à discuter aveceux, on va chercher <strong>de</strong>s infos, <strong>de</strong>scourriels. Quand on développe c<strong>et</strong>ype <strong>de</strong> relation, ça perm<strong>et</strong> d’allerplus loin ensuite, dans d’autrescontextes. Les élèves m’envoient <strong>de</strong>sfilms qu’ils ne peuvent pas m<strong>et</strong>tredans leur proj<strong>et</strong> parce qu’ils sonttrop lourds, ils me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>les transformer en GIF animé <strong>et</strong> jeleur montre comment le faire…L’informatique amène <strong>de</strong> nouveauxtypes d’interaction. Les élèves ontune évaluation par les pairs jumeléeà la mienne pour choisir quelstravaux seront mis en ligne à la fin<strong>du</strong> proj<strong>et</strong>; la moitié <strong>de</strong> la noteaccordée l’est par <strong>de</strong>s élèves…puis, une publication sur le Web,c’est la meilleure motivation. »En ce qui concerne le développement<strong>de</strong> compétences, AhmedBensaada précise que les proj<strong>et</strong>s<strong>de</strong> sciences incitent à intégrerl’anglais, parce que la plupart <strong>de</strong>sVie pédagogique 132, septembre-octobre2004Sophie Hamel : Enseignante<strong>de</strong> quatrièmeannée au primaire,Sophie s’est impliqué<strong>et</strong>out <strong>de</strong> suite quand leGroupe GRISE a étéformé. Elle a cinq ordinateursen classe <strong>et</strong> aaccès à trois portables.Les enfants sont trèsmotivés <strong>et</strong> veulent s’enservir; ils sont souvent« en proj<strong>et</strong> » <strong>et</strong> travaillentmieux qu’avant.étu<strong>de</strong>s scientifiques sont rédigésdans c<strong>et</strong>te langue. « On tra<strong>du</strong>it, onreçoit l’ai<strong>de</strong> <strong>du</strong> prof d’anglais, puis<strong>de</strong> l’enseignant <strong>de</strong> français, on ouvrevers d’autres disciplines <strong>et</strong> on toucheà toutes les compétences transversales,sauf une. »Pour sa part, Stéphane Côté est convaincuque l’un <strong>de</strong>s inconvénients<strong>du</strong> système même avec la réformeest que le jeune passe toutes sesclasses même s’il est en difficulté.« En sixième, j’ai <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong>niveau troisième à sixième… Cesélèves vivent l’échec avec succès! Enétant promu à chaque année, ils ontPhoto : Denis Garon<strong>DOSSIER</strong>PÉDAGOGIQUE 15
<strong>DOSSIER</strong><strong>de</strong> l’expérience dans l’échec! Quatreprofs leur ont déjà dit : t’es capable,tu vas l’avoir, <strong>et</strong> ça ne marchejamais... L’informatique m’ai<strong>de</strong> àleur faire vivre l’apprentissage sousune autre forme, je m<strong>et</strong>s moins l’accentsur l’aspect scolaire avec cesélèves <strong>et</strong> je trouve que j’arrive à leurfaire apprendre un peu plus. JeAhmed Bensaada :Enseignant <strong>de</strong> sciencephysique au secondaire,Ahmed est, à l’école,considéré comme MonsieurInformatique. Latechnologie est complètementintégrée à savie. Véritable technophile(doté d’un senscritique bien aiguisé <strong>et</strong><strong>de</strong> cinq adresses <strong>de</strong>courriel pour répondreà différents besoins!),il est responsable <strong>du</strong>site Web ainsi que<strong>du</strong> comité <strong>de</strong>s TIC <strong>de</strong>son école <strong>et</strong> fait partie<strong>de</strong> l’équipe Cyberscol,dans le proj<strong>et</strong> Sciencesanimées.Photo : Denis Garontente d’enseigner à partir <strong>de</strong>s vraieschoses, <strong>de</strong>s choses qui les touchentplutôt que d’enseigner pour passerà la classe suivante. Les élèves quivivent <strong>de</strong>s échecs à répétition commencentà vivre <strong>du</strong> succès véritable. »Stéphane constate que ses meilleureséquipes sont celles qui sontcomposées d’un élève fort en informatique,d’un autre fort en français,<strong>et</strong>c., car un proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> coopérationvéritable nécessite <strong>de</strong>s experts dansdivers domaines. Beaucoup d’apprentissagespersonnels se fontautour <strong>du</strong> proj<strong>et</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’intégration<strong>de</strong> l’informatique <strong>et</strong> les élèves<strong>de</strong>viennent plus efficaces.Andrée Turcotte précise que plusieursvol<strong>et</strong>s <strong>de</strong> la réforme appellent<strong>de</strong>s changements <strong>de</strong> pratiques <strong>et</strong>non pas seulement l’informatique.Les participants sont tous <strong>de</strong> c<strong>et</strong>avis. Michelle Fournier mentionneaussi l’écoute <strong>de</strong>s enfants commeun facteur important <strong>de</strong> réussitepour m<strong>et</strong>tre sur pied <strong>de</strong> nouvellesfaçons <strong>de</strong> faire; par exemple, à certainsmoments <strong>de</strong> l’année, les jeunesn’en peuvent plus d’être placés enîlots ou en dya<strong>de</strong>s. Il faut aussi êtrecritique par rapport à la réforme<strong>et</strong> savoir ce qui convient le mieuxà chacun. C<strong>et</strong>te question amènePatrice Pich<strong>et</strong> à souligner « que noussommes avant tout <strong>de</strong>s pédagogues<strong>et</strong> notre mission est d’amener lesélèves à se dépasser, à aller plusloin… à faire faire <strong>de</strong>s p<strong>et</strong>its pasaux plus faibles <strong>et</strong> <strong>de</strong>s plus grandspas à d’autres. Les TIC ai<strong>de</strong>nt, ellesmodifient nos pratiques, cela faitpartie <strong>de</strong> notre quotidien, mais ilfaut savoir regar<strong>de</strong>r intelligemmenttous les moyens que nous avons ».Guy Boucher a aussi changé sesfaçons <strong>de</strong> faire dans ses activitésparascolaires. « J’ai intégré plus <strong>de</strong>TIC au parascolaire <strong>et</strong> on a raccrochéd’autres types <strong>de</strong> jeunes qui,même en classe avec l’ordinateur,n’accrochent pas. J’ajouterais que,personnellement, le fait <strong>de</strong> rencontrerd’autres enseignants lors <strong>de</strong>c<strong>et</strong>te table ron<strong>de</strong> aujourd’hui vaAndrée Turcotte :Après avoir enseignépendant vingt ans,Andrée est maintenantconseillère pédagogiquepour l’intégration <strong>de</strong>sTIC au primaire. Elle estresponsable <strong>du</strong> proj<strong>et</strong>conventionné RESCOLSCIENTIC, qui génèrela rédaction d’articlesen sciences <strong>et</strong> technologie.m’amener à modifier égalementmes pratiques. Primaire <strong>et</strong> secondaireensemble, parler <strong>de</strong> nos bonscoups, c’est très énergisant. »QUELS LIENS FAITES-VOUSENTRE L’EXPLOITATION DESTIC ET LA DIFFÉRENCIATION?Ahmed Bensaada fait remarquerque c’est la pédagogie par proj<strong>et</strong>sPhoto : Denis Garonqui perm<strong>et</strong> la différenciation <strong>et</strong>, parricoch<strong>et</strong>, les TIC. Les participantss’enten<strong>de</strong>nt sur ce point. AndréeTurcotte précise que la différenciation,c’est pouvoir aller chercherailleurs ce qu’on n’a pas; il fautdonc se connaître, connaître sesforces, voir l’aspect positif <strong>de</strong> larelation avec les autres. SophieHamel a mis sur pied toutes sortes<strong>de</strong> façons d’organiser le temps <strong>et</strong>l’espace. Les TIC lui perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong>travailler avec le portfolio électronique,une belle voie <strong>de</strong> différenciationqu’elle explore <strong>de</strong> plus en plusavec sa classe. Andrée ajoute quel’enseignant veut que ses élèvesaiment aller à l’école. « Il fautsavoir à quoi rêvent nos élèves <strong>et</strong>tenter <strong>de</strong> les amener vers leursrêves. Si l’informatique répond àcela pour certains, tant mieux.La différenciation est essentielle,parce qu’il y a trop <strong>de</strong> décrochage<strong>et</strong> d’élèves en difficulté dans nosclasses <strong>et</strong> que nous voulons que lejeune ait le goût <strong>de</strong> continuer. » Unconsensus s’établit autour <strong>du</strong> faitque les TIC poussent en tout cas àréfléchir <strong>et</strong> à revoir ses pratiques.Clau<strong>de</strong> Gagnon remarque que lesélèves en difficulté qui voient leurscopies claires <strong>et</strong> propres à l’ordinateursont fiers d’eux. « Les TICpeuvent ai<strong>de</strong>r à faire faire <strong>de</strong>s p<strong>et</strong>itspas à certains… <strong>et</strong> donnent aussi legoût d’apprendre aux a<strong>du</strong>ltes ».C<strong>et</strong>te réflexion amène Stéphane àparler <strong>de</strong> la façon dont cela se passeavec son groupe-classe. « J’enseigneplusieurs pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> façon traditionnelle<strong>et</strong> une pério<strong>de</strong> par jour àl’ordinateur; j’essaie <strong>de</strong> rendre l’enfantautonome – c’est un <strong>de</strong>s objectifsimportants <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te réforme –je l’ai<strong>de</strong> à développer <strong>de</strong>s compétencesen français, oui… mais sije ne lui montre que ça, ce n’est passuffisant pour vivre dans la sociétéVIE 16 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004
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