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L'eau, sa purification et les micropolluants - Mediachimie.org

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L’eau, <strong>sa</strong><strong>purification</strong><strong>et</strong> <strong>les</strong> <strong>micropolluants</strong>Marina Coquery est directrice de recherche en chimie des eaux auLaboratoire d’analyses physico-chimiques des milieux aquatiquesà l’Institut de recherche pour l’ingénierie de l’agriculture <strong>et</strong> del’environnement (Irstea 1 ). Elle aborde, en première partie de cechapitre, la caractéri<strong>sa</strong>tion de la pollution des milieux aquatiquesen vue de leur <strong>purification</strong>.Samuel Martin Ruel est respon<strong>sa</strong>ble du département recherche<strong>et</strong> développement As<strong>sa</strong>inissement <strong>et</strong> Environnement au Centreinternational de recherche sur l’eau <strong>et</strong> l’environnement (Cirsee)de Suez Environnement 2 . Il travaille sur le traitement des eauxusées <strong>et</strong> sur la réduction des impacts des rej<strong>et</strong>s sur <strong>les</strong> milieuxaquatiques, suj<strong>et</strong> abordé dans la seconde partie de ce chapitre.Ici, la question de l’eau potable ne sera pas abordée.Marina Coquery <strong>et</strong> Samuel Martin Ruel L’eau, <strong>sa</strong> <strong>purification</strong> <strong>et</strong> <strong>les</strong> <strong>micropolluants</strong>1La chimie pourmieux caractériserla pollution1.1. Quel<strong>les</strong> substancestrouve-t-on dans <strong>les</strong> eauxusées ?Les eaux usées dans <strong>les</strong> milieuxaquatiques contiennentdivers types de polluants(Tableau 1), dont un premiergroupe est constitué des1. www.irstea.fr2. www.suez-environnement.frmacropolluants. Il peut s’agirde matières en suspension, dematière <strong>org</strong>anique ou des nutrimentstels que <strong>les</strong> nitrates,qui vont être présents dans <strong>les</strong>eaux à des concentrations del’ordre du milligramme parlitre.On trouve d’autre part des<strong>micropolluants</strong>, qui sontproblématiques car ils sontencore présents dans <strong>les</strong> eauxtraitées, <strong>et</strong> se r<strong>et</strong>rouvent ensuitedans <strong>les</strong> milieux naturelsoù el<strong>les</strong> sont déversées. Produitsindustriels, plastifiants,


La chimie <strong>et</strong> la naturedétergents, hydrocarbures,pesticides, cosmétiques,médicaments, de nombreuxpolluants issus des activitéshumaines sont ainsi présentsà l’état de trace dans <strong>les</strong> milieuxnaturels (eaux de surface,eaux souterraines oueaux dédiées à la consommation).Pour ces <strong>micropolluants</strong>,on descend à deséchel<strong>les</strong> de concentration del’ordre du microgramme voiredu nanogramme par litre.Ils peuvent être de naturein<strong>org</strong>anique comme <strong>les</strong>métaux (cadmium, plomb,cuivre, <strong>et</strong>c.), ou des métalloïdestels que l’arsenic oule mercure. On trouve parailleurs des composés <strong>org</strong>aniquestels que des hydrocarbure<strong>sa</strong>romatiquespolycycliques, qui sont produitsprincipalement par <strong>les</strong>procédés de combustion aucours d’activités humaines.Ils sont envoyés dans l’atmosphère,avant de se redéposersur <strong>les</strong> sols, puisse r<strong>et</strong>rouvent dans <strong>les</strong> systèmesd’épuration. Parmi<strong>les</strong> composés <strong>org</strong>aniques, ontrouve également des composésd’u<strong>sa</strong>ges très courantscomme <strong>les</strong> détergents (u<strong>sa</strong>gedomestique ou industriel) ou<strong>les</strong> pesticides (utilisés entraitement des voiries ou desjardins notamment).Tous ces <strong>micropolluants</strong> vontse r<strong>et</strong>rouver dans <strong>les</strong> eauxnaturel<strong>les</strong>, soit sous formedissoute, soit associés auxparticu<strong>les</strong> en suspension.Comme nous allons le voir,la séparation entre ces deuxphases est importante àconsidérer, car elle impacterala façon dont on va mesurer <strong>et</strong>analyser ces micropolluant<strong>sa</strong>fin d’obtenir des mesures deconcentration dans <strong>les</strong> eauxqui soient fiab<strong>les</strong>, répondantaux questions que l’on sepose : <strong>les</strong> niveaux de concentrationsdans chacune desphases vont en eff<strong>et</strong> dépendrede la nature du micropolluantconsidéré.1.2. Le cadre réglementaireLe cadre règlementairede ces rej<strong>et</strong>s de stationsd’épuration est importanten Europe avec la DirectiveTableau 1Types de substances qui peuvent être présentes dans des eaux usées.80MacropolluantsMatières en suspension,matière <strong>org</strong>anique, nitrates,phosphatesOrganiquesHydrocarbures aromatiquespolycycliques (HAP), phénols,plastifiants, solvants<strong>org</strong>anochlorés, phtalates,détergents, pesticides,polychlorobiphény<strong>les</strong>,substances pharmaceutiques,hormones, nouveauxcomposés émergents, …MicropolluantsIn<strong>org</strong>aniquesMétaux <strong>et</strong> métalloïdes : Pb,Hg, Cd, Ni, Cu, Zn, As, Cr, Co,Fe, …


Cadre sur l’Eau (DCE) depuis2000, dont l’objectif est depréserver le milieu naturelen maîtri<strong>sa</strong>nt <strong>les</strong> eff<strong>et</strong>s causéspar <strong>les</strong> activités industriel<strong>les</strong><strong>et</strong> urbaines. C<strong>et</strong>te directivedéfinit des substanceschimiques prioritaires, quisont cel<strong>les</strong> définies comme<strong>les</strong> plus toxiques, autant pourl’environnement que pourl’homme. El<strong>les</strong> sont aussi <strong>les</strong>plus présentes dans nos milieuxaquatiques, <strong>et</strong> la directiveimpose de surveiller <strong>et</strong> deréduire leurs rej<strong>et</strong>s. La DCEdéfinit également des normesde qualités environnementa<strong>les</strong>,désignées sous le siglede NQE, qui sont des objectifsde concentration maxima<strong>les</strong>dans <strong>les</strong> milieux naturels àatteindre d’ici 2015.1.3. Origines des<strong>micropolluants</strong>Où va-t-on chercher <strong>les</strong> <strong>micropolluants</strong>pour <strong>les</strong> mesurer,quel<strong>les</strong> en sont <strong>les</strong> origines? Une partie provient dutransfert depuis <strong>les</strong> systèmesd’as<strong>sa</strong>inissement : ils sont audépart issus des effluents del’eau domestique par tempssec, c’est-à-dire ce que nousproduisons tous <strong>les</strong> jours entant que consommateurs.Outre <strong>les</strong> détergents <strong>et</strong> autresproduits que nous rej<strong>et</strong>ons,il faut aussi mentionner <strong>les</strong>excrétions via l’urine, paroù sont évacués nombre decomposés tels que <strong>les</strong> médicaments,dont la France esttrès consommatrice. À ce suj<strong>et</strong>d’ailleurs, des campagnesimportantes sont menéespour diminuer la consommationen antibiotiques, dont <strong>les</strong>français sont <strong>les</strong> plus grosconsommateurs.L’autre source de pollution s<strong>et</strong>rouve du côté des activitésindustriel<strong>les</strong>.Et enfin, par temps de pluienotamment, le ruissellementde l’eau sur <strong>les</strong> surfaces urbanisée<strong>sa</strong>pporte par exempledes HAP <strong>et</strong> des métaux, quel’on va r<strong>et</strong>rouver dans <strong>les</strong> systèmesd’as<strong>sa</strong>inissement.Ces polluants arrivent vers <strong>les</strong>stations d’épuration avec deuxsorties possib<strong>les</strong> : l’une partvers <strong>les</strong> effluents <strong>et</strong> l’autrevers <strong>les</strong> boues (Figures 1 <strong>et</strong> 2).L’eau, <strong>sa</strong> <strong>purification</strong> <strong>et</strong> <strong>les</strong> <strong>micropolluants</strong>Figure 1Origines des apports en<strong>micropolluants</strong> dans <strong>les</strong> systèmesd’as<strong>sa</strong>inissement des eaux.81


La chimie <strong>et</strong> la natureFigure 2Station d’épuration de typebiologique. Elle éliminepartiellement <strong>les</strong> <strong>micropolluants</strong>dont une partie reste contenuedans <strong>les</strong> effluents ou dans <strong>les</strong>boues.82Figure 3La mesure des substanceschimiques dans <strong>les</strong> eaux dépenddu compartiment considéréde l’eau.Compartiment eau = dissous(phase aqueuse) + particulaire(phase solide). Les méthodesd’analyse doivent donc êtredéfinies en fonction de ce qui estrecherché : la substance totale,dissoute ou en phase solide.1.4. Où mesurer<strong>les</strong> <strong>micropolluants</strong> ?On va chercher à mesurer cessubstances en entrée <strong>et</strong> ensortie des systèmes d’as<strong>sa</strong>inissementafin de comprendreleur devenir <strong>et</strong> l’efficacité destraitements effectués. Lechoix de la méthode d’analysedépendra beaucoup dumilieu étudié. En eff<strong>et</strong>, l’eaucomporte plusieurs phases :une phase dissoute avecdes colloïdes <strong>et</strong> une phaseparticulaire constituée departicu<strong>les</strong> en suspension (Figure3). Aussi il est primordialde déterminer précisément ceque l’on cherche à mesurer :recherche-t-on la substanc<strong>et</strong>otale dans l’eau, ou uniquementce qu’elle contient enphase dissoute, ou encoreen phase particulaire (Encart: « À chaque phase <strong>sa</strong>méthode pour mesurer <strong>les</strong>concentrations des contaminants<strong>org</strong>aniques dans <strong>les</strong>eaux usées ») ? Ces mesuresvont aussi dépendre des propriétésphysico-chimiquesdes substances recherchées.Par exemple, dans le cas desHAP, ces substances hydrophobe<strong>sa</strong>uront tendance à secoller sur <strong>les</strong> particu<strong>les</strong>. Onaura alors intérêt à <strong>les</strong> recherchernon pas dans la phasedissoute, mais plutôt dans lecompartiment des matièresparticulaires en suspension,où l’on pourra plus facilement<strong>les</strong> trouver, car constituant levecteur de transfert principalde ces substances.1.5. Les défis de la chimieanalytique pour mesurer<strong>les</strong> polluantsDans toute mesure, il ne fautpas oublier ce qui se trouveen amont : on trouve des


À CHAQUE PHASE SA MÉTHODE POUR MESURER LESCONCENTRATIONS DES CONTAMINANTS ORGANIQUESDANS LES EAUX USÉESSans séparation des phases (eaux non filtrées)– risque d’obtention de résultats de mauvaise qualité,difficilement comparab<strong>les</strong> entre <strong>les</strong> laboratoires ;– risque certain de sous-estimation des concentrationsmesurées dans <strong>les</strong> eaux chargées en matières en suspension(MES), en particulier pour <strong>les</strong> substances hydrophobes.Avec séparation des phasesDes méthodes spécifiques ont été développées <strong>et</strong> leurpratique est généralisée dans <strong>les</strong> laboratoires de recherche.Par exemple, dans le domaine de l’étude de lacontamination des eaux fluvia<strong>les</strong> <strong>et</strong> marines par <strong>les</strong> HAP<strong>et</strong> <strong>les</strong> polychlorobenzènes (PCB) : filtration de grands volumesd’eau suivie de l’analyse séparée des contaminantsprésents en phases dissoute <strong>et</strong> particulaire.L’eau, <strong>sa</strong> <strong>purification</strong> <strong>et</strong> <strong>les</strong> <strong>micropolluants</strong><strong>micropolluants</strong> partout, y comprisdans l’atmosphère (voir leChapitre d’É. Villenave). Que cesoit dans <strong>les</strong> boues ou dans <strong>les</strong>eaux usées de stations d’épuration,il faut s’assurer de lavalidité de la chaîne de prélèvement<strong>et</strong> d’analyse, puisqu’onse trouve à des concentrationstrès faib<strong>les</strong>.C’est principalement dû àun <strong>sa</strong>ut technologique dansl’analyse chimique (techniquestrès sensib<strong>les</strong> issuesde couplage de la chromatographieen phase gazeuse ouliquide <strong>et</strong> de la spectrométriede masse) que la mesure desconcentrations en <strong>micropolluants</strong>à des concentrationstrès faib<strong>les</strong> dans des matricescomplexes tel<strong>les</strong> que <strong>les</strong> eauxusées est devenue possible.L’analyse des <strong>micropolluants</strong>dans <strong>les</strong> eaux usées <strong>et</strong> <strong>les</strong>boues nécessite de développerdes méthodes d’analysesrobustes <strong>et</strong> validées pour cessubstances dans des matricestrès complexes : on a souventdes fortes quantités de matières<strong>org</strong>aniques que l’on neveut pas mesurer <strong>et</strong> qui interfèrent,empêchant la mesureprécise de très faib<strong>les</strong> teneursen <strong>micropolluants</strong> (Encart :« Les défis pour la mesure des<strong>micropolluants</strong> dans <strong>les</strong> eauxusées <strong>et</strong> <strong>les</strong> boues d’épuration»).1.6. Les protoco<strong>les</strong>d’échantillonnage<strong>et</strong> d’analyseLorsqu’on effectue des mesuresdans <strong>les</strong> eaux uséespar exemple, on dispose généralementde préleveur<strong>sa</strong>utomatisés <strong>et</strong> réfrigérés(Figure 4) pour effectuerdes échantillonnages sur24 heures, en vue d’une bonnereprésentation du fonctionnementde la station d’épuration.Les échantillons obtenussont conditionnés sur83


La chimie <strong>et</strong> la natureLES DÉFIS POUR LA MESURE DES MICROPOLLUANTS DANS LES EAUX USÉESET LES BOUES D’ÉPURATION- S’assurer de la validité de la chaîne de prélèvement <strong>et</strong> d’analyse pour <strong>les</strong> eaux usées :blancs de préleveurs (adsorption/désorption) ; expériences de conservation des échantillons;- développer des méthodes d’analyse robustes <strong>et</strong> validées pour <strong>les</strong> <strong>micropolluants</strong> prioritaires<strong>et</strong> émergents dans <strong>les</strong> eaux usées <strong>et</strong> <strong>les</strong> boues ;- mesurer <strong>les</strong> concentrations en phase dissoute <strong>et</strong> particulaire <strong>et</strong> évaluer <strong>les</strong> flux de <strong>micropolluants</strong>générés par <strong>les</strong> rej<strong>et</strong>s de station d’épuration domestiques (eaux <strong>et</strong> boues).pour prélever de l’eau d’unerivière.S’agis<strong>sa</strong>nt des protocole<strong>sa</strong>nalytiques, par exemple pourmesurer <strong>les</strong> contaminants <strong>org</strong>aniques,on utilise de façongénérale des techniques chromatographiquescouplées àde la spectrométrie de masse(Figure 5 <strong>et</strong> Encart : « La chromatographie,la spectrométriede masse <strong>et</strong> leur couplage »),ce qui perm<strong>et</strong> d’obtenir desspectres où l’on visualise précisémentun pic par molécule.L’étape la plus difficile <strong>et</strong> pointuede l’analyse intervient à ceniveau, où il faut développer<strong>et</strong> valider un type de protocolepar type de matrice <strong>et</strong>par famille de molécu<strong>les</strong>. Eneff<strong>et</strong>, le protocole pour l’analysed’eaux de rivières relativementpropres sera différentde celui pour des boues destations d’épuration.Examinons un exemple deschéma analytique pour descomposés <strong>org</strong>aniques semivolatils(Figure 7). On trouvece type de protocole pourl’ensemble des famil<strong>les</strong> decontaminants. Les analysessont menées sur la phase dissoute<strong>et</strong> <strong>les</strong> MES séparémentde façon à améliorer la qualité84Figure 4Échantillonneur automatiqueréfrigéré <strong>et</strong> choix de la nature dumatériel de prélèvement. Poursupporter <strong>les</strong> dépressions, il estnéces<strong>sa</strong>ire d’utiliser des bols enverre. Pour la pompe péristaltique(pour véhiculer l’eau), on utilise untuyau d’écrasement en silicone.site, conservés au froid <strong>et</strong>acheminés vers <strong>les</strong> laboratoiresdans un délai inférieurà 24 heures. La spécificité desprotoco<strong>les</strong> développés (oumis en œuvre) réside dansl’utili<strong>sa</strong>tion de matériels spécifiquesen verre <strong>et</strong> en Téflonayant préalablement subi uneétape de n<strong>et</strong>toyage spécifique(détergent, acide, acétone,rinçage à l’eau) en vue de limiterle risque de contamination.Après plusieurs testsconcr<strong>et</strong>s, on dédiera tel matérielà tel site étudié ; tout lematériel sera bien séparé. Onn’utilisera effectivement pasle même matériel pour préleverdes échantillons d’eauusée brute ou traitée que


Figure 5Des techniques chromatographiques couplées à la spectrométrie de masse sont utilisées pour mesurer <strong>les</strong>contaminants <strong>org</strong>aniques. Un protocole différent est développé par famille de polluants <strong>et</strong> par type de matrice :eaux de surface, eaux usées d’entrée/sortie, matières en suspension, boues.L’eau, <strong>sa</strong> <strong>purification</strong> <strong>et</strong> <strong>les</strong> <strong>micropolluants</strong>LA CHROMATOGRAPHIE, LA SPECTROMÉTRIE DE MASSE ET LEUR COUPLAGELES PROGRÈS DE LA CHIMIE ANALYTIQUE POUR TRAQUER LE POLLUANTLa chromatographie est une technique analytique perm<strong>et</strong>tant de séparer <strong>les</strong> constituantsd’un mélange en jouant sur leur différence de vitesse de migration de long d’une colonnede phase dite stationnaire, entraînés par la phase mobile (liquide ou gaz). Ces vitesses dépendentde leurs interactions avec phase stationnaire <strong>et</strong> phase mobile. La chromatographieen phase gazeuse (CPG) s’applique aux composés gazeux ou qui peuvent être vaporiséspar chauffage.La spectrométrie de masse (SM) est une technique d’analyse qui perm<strong>et</strong> de détecter <strong>et</strong>d’identifier des molécu<strong>les</strong> ou fragments de molécu<strong>les</strong> par mesure de leur masse, <strong>et</strong> decaractériser ainsi leur structure chimique par reconstitution des fragments. Son principeréside dans la séparation en phase gazeuse de molécu<strong>les</strong> chargées (ions) en fonction deleur rapport masse/charge (m/z).Couplés à la chromatographie, <strong>les</strong> spectromètres de masse perm<strong>et</strong>tent des analyses finesde mélanges complexes (Figure 6).Injecteurd’échantillonRégulation dela températuredu fourGazHe, N 2, H 2ColonneDétecteurspectromètrede masseFigure 6Schéma de principe ducouplage chromatographie enphase gazeuse/spectrométriede masse.Voir aussi La Chimie <strong>et</strong> le sport, Chapitre de J.-L. Veuthey, coordonné par M.-T. Dinh-Audouin, R.A. Jacquesy,D. Olivier <strong>et</strong> P. Rigny, EDP Sciences, 2011.85


La chimie <strong>et</strong> la nature86Figure 7Exemple de schéma analytiquepour <strong>les</strong> composés <strong>org</strong>aniquessemi-volatils.de l’analyse pour <strong>les</strong> composéshydrophobes (difficultésd’extraction lors de l’analysedirecte du total). Pour uneeau usée, on procède d’abordà une filtration pour séparerla phase dissoute <strong>et</strong> <strong>les</strong> matièresen suspension, puisla phase dissoute subit uneopération d’extraction avecun solvant perm<strong>et</strong>tant d’extrairele contaminant <strong>et</strong> dele concentrer très fortementpour réussir à le doser, surtoutquand il était sous formede traces dans l’eau. Suiventdes étapes de <strong>purification</strong>,qui ne sont pas néces<strong>sa</strong>irespour une eau potable, maisdeviennent essentiel<strong>les</strong> pourdes eaux usées brutes (entréede STEP) ou des boues.Un protocole bien précis estsuivi (Encart : « Validation desméthodes d’analyse <strong>et</strong> assurancequalité ») : la chimieanalytique induit une rigueur<strong>et</strong> des étapes essentiel<strong>les</strong>pour être certain d’obtenirune mesure bien réelle de lasub stance que l’on a quantifiéedans le milieu, <strong>et</strong> qu’ellene dépende pas d’artefacts demesure ou d’étalonnages malréalisés.Les performances des méthodesdéveloppées sont établiesen termes de limite dequantification, rendementd’extraction, répétabilité <strong>et</strong>reproductibilité. Cependant,chargés en matière <strong>org</strong>anique,<strong>les</strong> échantillons issus de l’as<strong>sa</strong>inissementrestent diffici<strong>les</strong>à analyser, <strong>et</strong> pour se prémunirdes eff<strong>et</strong>s matrice, il est néces<strong>sa</strong>ired’utiliser des indicateursde performances de manièrepréventive (par exemple : étalonsinternes, dopages enconcentration connue) en vued’appliquer une correction ultérieure.1.7. Résultats des mesures.Exemple du proj<strong>et</strong> AMPERESUne fois le protocole d’échantillonnage<strong>et</strong> d’analyse rigoureusementmené, on aboutit àune série de résultats. La Figure8 représente un exemplede résultats d’un proj<strong>et</strong> de recherchequi s’appelait « AM-PERES », dont une synthèsea été récemment publiée enfrançais dans la revue TechniquesSciences <strong>et</strong> Méthodes.Grâce aux très faib<strong>les</strong> limitesde quantification des méthodesdéveloppées, de l’ordre du microgrammeou nanogrammepar litre selon <strong>les</strong> substances,une majorité des substancesrecherchées a été quantifiée.Plus spécifiquement, dans<strong>les</strong> eaux traitées de STEP, onr<strong>et</strong>rouve fréquemment <strong>les</strong>métaux (Zn, Cu, Pb, As, Ni,Cr) <strong>et</strong> <strong>les</strong> substances <strong>org</strong>aniques(diuron, atrazine, tributylphosphate,naphtalène,fluoranthène, DEHP, tributylétain,4-tert-butyl, nonyl- <strong>et</strong>octyl-phénol, chloroforme,


tétra chloroéthylène). Le proj<strong>et</strong>AMPERES a démontré quel’on mesurait également demanière systématique unevingtaine de substances pharmaceutiques,dont trois avaientune concentration supérieure à0,1 μg/L (diclofénac, sotalol <strong>et</strong>carbamazépine).1.8. Des progrès en chimieanalytique pour améliorer lacaractéri<strong>sa</strong>tion de l’eauComme il a été décrit, <strong>les</strong>étapes de prélèvements <strong>et</strong> depréparation des échantillonspour <strong>les</strong> analyses ont une importanceprimordiale pour obtenirdes données fiab<strong>les</strong> sur<strong>les</strong> concentrations <strong>et</strong> <strong>les</strong> fluxVALIDATION DES MÉTHODES D’ANALYSE ET ASSURANCEQUALITÉ (POUR LES MOLÉCULES ORGANIQUES)Échantillonnage« blancs préleveurs »Préparation des échantillons– blanc d’analyse (1 par campagne) ;– triplicats d’analyse (mesure de la répétabilité) ;– traceurs deutérés (mesure des rendements d’extraction) ;– dopage de chaque matrice.Analyse– blanc de phase mobile ;– contrôle étalons (mesure de la justesse) ;– 2 transitions (quantification, confirmation de l’identitédes composés) ;– traceur d’injection.Il faut ensuite vérifier <strong>les</strong> rendements (extraction) <strong>et</strong> <strong>les</strong>limites de quantification.L’eau, <strong>sa</strong> <strong>purification</strong> <strong>et</strong> <strong>les</strong> <strong>micropolluants</strong>Figure 8Les 45 substances réglementées dans <strong>les</strong> eaux traitées secondaires. Mesure de très faib<strong>les</strong> concentrations en<strong>micropolluants</strong> dans <strong>les</strong> eaux traitées (proj<strong>et</strong> AMPERES). Coquery M. <strong>et</strong> coll. (2011). Techniques Sciences <strong>et</strong> Méthodes, 1-2.Fréquence de quantification (%)< 30 % 30-70 % > 70 %MercureCadmiumAtrazineSimazineIsoproturonFluoranthèneTrichlorobenzènePentachlorophénolBenzo(b)fluoranthèneChlorpyrifosIsodrineTributylétainBenzo(k)fluoranthène1,2-dichloroéthaneTétrachlorure de carboneHexachlorobenzènePentabromodiphénylétherDieldrineEndosulfanHexachlorocyclohexaneBenzèneAldrine4t-NP , 4t-OPPlombDiuronAnthracèneNaphtalèneDichlorométhaneTrichlorométhaneTrichloroéthylèneTétrachloroéthylèneDEHPNickelJamais quantifié :Benzo(g,h,i)pérylèneIndéno(1,2,3-cd)pyrèneBenzo(a)pyrèneC 10-13ChloroalcanesHexachlorobutadiènePentachlorobenzèneAlachloreChlorfenvinphosTrifluralineDDTEndrineConcentration(μg/l)0,01 0,1 1 10 10087


La chimie <strong>et</strong> la nature88de nombreux <strong>micropolluants</strong>dans <strong>les</strong> eaux usées.Les techniques avancées dela chimie analytique perm<strong>et</strong>tentaujourd’hui de développer<strong>et</strong> valider des protoco<strong>les</strong>innovants pour quantifier desconcentrations de plus en plusfaib<strong>les</strong> en polluants, dans deséchantillons de plus en pluscomplexes (par exemple dansdes phases particulaires). Ils’agit-là d’un vrai défi, qui peutêtre relevé grâce aux progrèsde la science <strong>et</strong> des appareillage<strong>sa</strong>nalytiques qui évoluenttrès vite ces dernière<strong>sa</strong>nnées.Comment ces progrès perm<strong>et</strong>tent-ilsmaintenant dediagnostiquer l’efficacitédes traitements des stationsd’épuration <strong>et</strong> de <strong>les</strong> compléterpour aller plus loin dans la<strong>purification</strong> des eaux ?2La chimiepour compléterle traitement des eauxFace à la problématique environnementaleliée en particulieraux <strong>micropolluants</strong> quipersistent dans <strong>les</strong> eaux ensorties de stations d’épuration,la chimie se révèle de nouveauindispen<strong>sa</strong>ble pour trouver dessolutions de traitements adaptées.Rappelons en premier lieule principe de fonctionnementd’une station d’épuration.2.1. Principe defonctionnement d’une stationd’épuration conventionnelleDans une station d’épurationconventionnelle, comme onen trouve dans la plupart dessites dans le monde, une premièreétape de décantationen entrée de station consiste àéliminer <strong>les</strong> particu<strong>les</strong> grossièresou qui peuvent sédimenter,avant de passer àl’étape biologique qui a lieudans un bassin de traitementbiologique. La pollution dissoutey est traitée par unebiomasse épuratrice constituéede bactéries spécifiques,puis l’eau qui en sort passedans un clarificateur pourêtre séparée de la biomasseépuratrice, avant d’être rej<strong>et</strong>éeen dernier lieu dans lemilieu naturel, tandis que labiomasse épuratrice est recycléevers le bassin biologique(Figure 9).Ce traitement biologiqueconduit à la génération d’unsous-produit qu’il convient d<strong>et</strong>raiter également à la stationd’épuration. Il s’agit des bouesd’épuration qui proviennentà la fois du premier étage dedécantation, mais aussi del’étage biologique : ce sont <strong>les</strong>boues en excès, constituéesentre autres de la biomasseépuratrice en excès.Il existe ainsi toute une filièreadaptée aux stations d’épurationpour à la fois réduire leurvolume, leur teneur en eau,pour <strong>les</strong> stabiliser, mais aussipour produire de l’énergie <strong>et</strong>de la matière valori<strong>sa</strong>ble.Ces stations d’épurationconventionnel<strong>les</strong> ont étéconçues pour traiter une pollutiondéfinie avec des paramètresmacroscopiques, c’està-diredes macropolluants(définis au paragraphe 1.1). À ceniveau, le génie des procédés<strong>et</strong> la biologie développés actuellementsont largement suffi<strong>sa</strong>ntspour exploiter correctementces ouvrages tels quepeut faire un groupe comme


L’eau, <strong>sa</strong> <strong>purification</strong> <strong>et</strong> <strong>les</strong> <strong>micropolluants</strong>Figure 9Les filières de traitement en station d’épuration conventionnelle.Suez Environnement sur denombreux mètres cubes.Par contre, quand on s’intéressemaintenant à la problématiquedes <strong>micropolluants</strong>, ilfaut faire appel à des notionsde chimie plus pointues, <strong>et</strong> enparticulier de physico-chimie<strong>et</strong> de biochimie, comme nou<strong>sa</strong>llons le voir.comme le coefficient de partageentre l’octanol <strong>et</strong> l’eau.C<strong>et</strong>te adsorption dépend ausside la concentration en boue ;− la biodégradation : chaquemolécule possède uneconstante de biodégrada-Figure 10Mécanismes d’élimination des<strong>micropolluants</strong> dans <strong>les</strong> procédésbiologiques (physico-chimie <strong>et</strong>biochimie).2.2. Le devenirdes <strong>micropolluants</strong>Trois mécanismes perm<strong>et</strong>tentd’expliquer le devenir des <strong>micropolluants</strong>dans un étagebiologique (Figure 10) :− le mécanisme d’adsorption: un paramètre a été définipour l’as<strong>sa</strong>inissement, quiest le KdMES, ou coefficientde partition entre l’eau <strong>et</strong> <strong>les</strong>matières en suspension, <strong>et</strong>qui est en fait dérivé de paramètresplus connus en chimie89


La chimie <strong>et</strong> la nature90tion, qui mesure <strong>sa</strong> facilité dedégradation par <strong>les</strong> bactéries.De plus en plus de recherchesmontrent en fait que ce n’estpas vraiment de la biodégradationqui se produit, mais plutôtde la biotransformation : bienque tous <strong>les</strong> mécanismes réactionnelsn’aient pas encore étécomplètement élucidés, enrevanche on <strong>sa</strong>it maintenantpour certaines molécu<strong>les</strong> pharmaceutiquesqu’il s’agit en faitde transformations de groupesfonctionnels des molécu<strong>les</strong> ;−le « stripping », ou pas<strong>sa</strong>gedes molécu<strong>les</strong> en atmosphère :on considère ici des constantesbien connues en chimie, tel<strong>les</strong>que la constante d’Henri desmolécu<strong>les</strong> qui est utilisée avecle flux d’air appliqué dans <strong>les</strong>bassins.2.3. Les traitementstertiaires pour éliminer<strong>les</strong> <strong>micropolluants</strong>Une fois que l’on a identifiéle devenir de ces substances<strong>et</strong> dressé leur bilanen station d’épuration avecdes notions bien connues dugénie chimique, on constateque même si 20 % du fluxde <strong>micropolluants</strong> en entréede station d’épuration estr<strong>et</strong>rouvé dans l’eau traitée,tout n’est malheureusementpas dégradé ou transformé,mais il reste environ 60 % deces <strong>micropolluants</strong> qui sonttransférés vers <strong>les</strong> boues paradsorption (Figure 11A).C’est une problématique surlaquelle de nombreuses recherchessont menées actuellement,en vue de réduire lateneur de ces <strong>micropolluants</strong>dans <strong>les</strong> boues <strong>et</strong> d’envi<strong>sa</strong>gerdes filières de valori<strong>sa</strong>tionplus durab<strong>les</strong>.Qu’en est-il des 20 % dans <strong>les</strong>eaux qui peuvent à l’heure actuelleêtre traités ? Ce chiffreest déjà très significatif <strong>et</strong> peutmême conduire à des dépassementsdes normes de qualitéenvironnementale dans <strong>les</strong>milieux aquatiques (évoquée<strong>sa</strong>u paragraphe 1.2). Il s’agitde substances qui sont trèsréfractaires au traitement,du fait qu’el<strong>les</strong> ne sont pa<strong>sa</strong>dsorbab<strong>les</strong>, <strong>et</strong> en outre peubiodégradab<strong>les</strong>. Cela peutconcerner quelques pesticidescomme le diuron ou leglypho<strong>sa</strong>te, qui sont r<strong>et</strong>rouvéspratiquement dans tous<strong>les</strong> échantillons d’eaux usées,voire dans <strong>les</strong> milieux naturels.C’est aussi le cas de quelquespharmaceutiques comme lacarbamazépine, qui est un antiépileptique<strong>et</strong> qui a même étéutilisé comme traceur d’activitéhumaine dans certains cas(voir le Chapitre d’É. Blin). Onr<strong>et</strong>rouve également d’autressubstances qui, bien que r<strong>et</strong>enuesen grande partie parla station d’épuration, se r<strong>et</strong>rouventtout de même à desniveaux significatifs en sortie; c’est le cas de détergentscomme <strong>les</strong> alkylphénols, ouencore de plastifiants tels quele di(2-éthylhexyl)phthalate(DEHP).Pour aller plus loin dans l<strong>et</strong>raitement de l’eau, il est possibled’appliquer des traitementscomplémentaires ditstertiaires (Figure 11B), dontla plupart sont utilisés pourla production d’eau potable,<strong>et</strong> qui font appel à une variétéde mécanismes beaucoupplus importante. On fait appelc<strong>et</strong>te fois à des mécanismesd’oxydation, d’adsorption, defiltration, <strong>et</strong> même de phytoabsorptiondans le cas de


L’eau, <strong>sa</strong> <strong>purification</strong> <strong>et</strong> <strong>les</strong> <strong>micropolluants</strong>traitements extensifs naturels(abordés dans <strong>les</strong> Chapitresd’É. Blin <strong>et</strong> J.-L. Morel).Nous évoquerons deux d’entreeux qui sont actuellement <strong>les</strong>meilleures solutions, avec lemeilleur compromis technicoéconomiquepour améliorer l<strong>et</strong>raitement des <strong>micropolluants</strong>en stations d’épuration : l<strong>et</strong>raitement sur charbon actif<strong>et</strong> l’ozonolyse.2.3.1. Adsorption sur charbonactifOn utilise des charbons quiont la particularité de développerde très grandes surfacesspécifiques, de l’ordrede mille mètres carrés pargramme grâce à leurs poresperm<strong>et</strong>tant d’adsorber untrès grand nombre de composés(Figure 12). Les composésqui sont adsorbab<strong>les</strong> comportentgénéralement desdoub<strong>les</strong> liaisons, ou possèdentun poids moléculaireimportant, <strong>sa</strong>ns pour autantexcéder la taille des poresdu charbon.Les propriétés d’adsorptionsont régies par l’isothermede Freudlinch, équation bienconnue en chimie des surfaces,donnant la concentrationde la partie adsorbée enfonction de la concentrationde la partie dissoute :1/nC liée= K · C dissoute, avec K <strong>et</strong>n des constantes propre<strong>sa</strong>u système considéré. Lecharbon actif peut être misen œuvre de deux manières,soit sous forme de poudre quiest appliquée en continu, soitsous forme de charbon d<strong>et</strong>aille plus importante fixé surune colonne à travers laquellepasse l’eau usée qui est ainsitraitée par simple filtration(Tableau 2).Figure 11Bilan de <strong>micropolluants</strong> en stationd’épuration. A) Traitementsconventionnels ; B) traitementstertiaires.91


La chimie <strong>et</strong> la natureFigure 12Images au microscopeélectronique de charbon actif avecdes pores aux surfaces spécifiquesimportantes (500 à 1 500 m 2 /g).Tableau 2Traitements tertiaires par adsorption sur charbon actif.Type de charbon Charbon actif en poudre Charbon actif en grainsDiamètre 5-50 μm > 0,1 mmMise en œuvre En suspension FiltreGestion du matériau Procédé de rétention néces<strong>sa</strong>ire Lavages néces<strong>sa</strong>ires922.3.2. L’oxydation à l’ozoneUn deuxième type de traitementqui perm<strong>et</strong> un très boncompromis coût/efficacité estl’oxydation à l’ozone (O 3). Ones<strong>sa</strong>ye de m<strong>et</strong>tre en œuvrel’action conjointe d’une oxydationdirecte de l’ozone, quiest l’un des oxydants <strong>les</strong> pluspuis<strong>sa</strong>nts, avec le radical hydroxyle• OH, qui est généré lorsdu pas<strong>sa</strong>ge de l’ozone dansl’eau (Figure 13). C<strong>et</strong>te actionest efficace surtout vis-à-visdes composés aromatiques(cyc<strong>les</strong> qui comportent des alternancesde doub<strong>les</strong> liaisons),dont <strong>les</strong> électrons sont disponib<strong>les</strong>pour subir l’action desoxydants. L’efficacité dépenddu temps de séjour ou tempsde contact de l’eau usée dansle réacteur d’ozonation. L’ozonequi est appliqué est décomposéen oxygène <strong>et</strong> radical hydroxyledans l’eau, <strong>et</strong> le résiduel estdétruit thermiquement avant derejoindre l’atmosphère.On r<strong>et</strong>rouve actuellementl’ensemble de ces traitementstertiaires sur certaines stationsd’épuration, mais plutôtpour un but de désinfectiondes eaux dans certainscontextes, lorsque l’eau doitêtre réutilisée.


QIT O3 /O 2Chaleur dégagéeenvir. 18 kWPSU & PLCPCVapprox.175 kVAOxygèneliquideOzonolyseurEau derefroidissementSortie CW25 °CInstallationextérieurePSU & PLCQIT O3approx.5 kVASortie de vapeurCat. VOD1,0 bar abs,approx. 50 °CBQIT O3AL’eau, <strong>sa</strong> <strong>purification</strong> <strong>et</strong> <strong>les</strong> <strong>micropolluants</strong>H 2OQIT O3DFCVFITRéservoir Évaporateurd’oxygène liquideEntréePWSortiePWC = CompresseurB = Blower Process& AmbientD = DemisterLOX = Oxygène liquidePLC = Contrôleur logiqueprogrammableCat. VOD = Destructeur d’ozonecatalytiquePW = Eau potablePSU = AlimentationélectriqueCW = Eau derefroidissementQIT = Moniteur d’ozone<strong>et</strong> oxygèneFCV = Régulateur de débitautomatiqueFIT = Indicateur de débitBFigure 13A) Traitements tertiaires paroxydation avec action conjointe del’ozone O 3(spécifique) <strong>et</strong> du radicalhydroxyle • OH (non spécifique) dansun ozonolyseur (B).En France, l’ozonation a déjàété utilisée pour traiter <strong>les</strong><strong>micropolluants</strong> dans la stationde Sophia Antipolis. Lorsde la réhabilitation de c<strong>et</strong>testation, elle devait doubler sescapacités, <strong>et</strong> <strong>sa</strong> particularitéétait que le cours d’eau quirecevait ces eaux usées étaittrès sensible, très p<strong>et</strong>it <strong>et</strong> parfoisétait à sec en été. On avaitdonc une sensibilité extrême à93


La chimie <strong>et</strong> la nature94Figure 14Station d’épuration de SophiaAntipolis : une première enFrance pour le traitement des<strong>micropolluants</strong> à l’ozone.l’impact de la pollution. C’estpourquoi un traitement complémentairea été demandéincluant une ozonation <strong>et</strong> avecdes garanties demandées surces <strong>micropolluants</strong> à la foisen concentration <strong>et</strong> en rendementd’élimination (Figure 14).Le Tableau 3 donne une idéedes rendements que l’on peutatteindre avec c<strong>et</strong>te technologie,<strong>sa</strong>chant que l’on estimequ’une ozonolyse est efficaceau-delà de 70 % d’élimination.Dans la plupart des cas,elle est de l’ordre de 90 % <strong>et</strong>concerne essentiellement <strong>les</strong>composés qui étaient très peudégradés en station d’épuration(pesticides, pharmaceutiques),mais aussi le DEHP <strong>et</strong><strong>les</strong> alkylphénols, qui sont deuxdes composés po<strong>sa</strong>nt le plusde problèmes actuellement dufait qu’on <strong>les</strong> r<strong>et</strong>rouve dans denombreux milieux. Vis-à-visde la Directive Cadre sur l’Eau,l’ozonolyse est pour cela unesolution intéres<strong>sa</strong>nte.Les résultats sont moins bonspour <strong>les</strong> composés in<strong>org</strong>aniquescomme <strong>les</strong> métaux oùl’on n’observe aucun eff<strong>et</strong>. Pourd’autres molécu<strong>les</strong> présentantdes configurations tel<strong>les</strong> que<strong>les</strong> électrons ne soient pas disponib<strong>les</strong>,l’ozonolyse conduit àde mauvais rendements.2.3.3. L’oxydation avancéeActuellement, une rechercheimportante est menée pouraller plus loin dans la dégradationpar oxydation, en développantdes procédés d’oxydationavancée. Le doubleobjectif est de pousser plusloin la dégradation, mais aussiréduire <strong>les</strong> doses appliquéesen combinant un oxydantpuis<strong>sa</strong>nt tel que l’ozone ou leperoxyde d’hydrogène (H 2O 2),avec de l’énergie sous formed’UV, d’ultrasons ou encoreélectrique. Si l’on veut favoriserla réaction d’oxydation (quiest une réaction radicalaire),on peut ajouter un catalyseur.La gamme de possibilités estdonc très étendue (Figure 15).2.4. Bilan sur <strong>les</strong> capacitésde traitement de l’eauAujourd’hui, on est arrivé à uncertain consensus sur <strong>les</strong> possibilitésde dégradation des <strong>micropolluants</strong>dans <strong>les</strong> stationsd’épuration, bien que toutes<strong>les</strong> technologies ne soient pasencore totalement maîtrisées(au contraire de la productionde l’eau potable, que l’on maîtrisebeaucoup mieux). C’estparticulièrement le cas pour lecharbon actif, qui est efficacepour 70 à 80 % des substances,mais dont on ne maîtrise pasla durée de vie dans un milieuaussi chargé qu’une eau usée,même traitée (problèmes decolmatage, régénération…).Quant à l’ozonation, qui estefficace pour 70 à 80 % dessubstances, elle est néanmoinsénergivore <strong>et</strong> conduità la formation potentielle de


Tableau 3Rendements d’ozonolyse de <strong>micropolluants</strong>.Rendementdel’éliminationSubstancesClasse> 70 % Glypho<strong>sa</strong>te, diuron, isoproturon PesticidesDEHPPhtalatesNPE1EO, alkylphénol carboxylatesAlkylphénolsEstrone, éthinyl estradiolHormonesOxyprénolol, bisoprolol, atenolol, sotalol, paracétamol, diclofénac,germfibrozil, timolol, nadolol, propanolol, carbamazépine,diazepam, nordiazepam, alprazolam, fluox<strong>et</strong>ine,acébutolol, ibuprofène, naproxène, terbutaline, amitriptilyne,métoprolol, roxythromicine, kétoprofène, <strong>sa</strong>lbutamol,sulfaméthoxazole, bromazépanPharmaceutiques30-70 % Atrazine, simazine Pesticides< 30 % AMPA PesticidesNonylphénols, octylphénols, NP2EOAlkylphénolsAspirinePharmaceutiquesLi, Ti, V, Se, Ba, As, Cu, Sn, B, Fe, Cr, Zn, Ni, Co, Rb, Mo, Sb, U MétauxL’eau, <strong>sa</strong> <strong>purification</strong> <strong>et</strong> <strong>les</strong> <strong>micropolluants</strong>Figure 15Procédés d’oxydation avancée. L’objectif est de créer des radicaux libres pour dégrader <strong>les</strong> polluants <strong>et</strong> deréduire <strong>les</strong> doses appliquées.95


La chimie <strong>et</strong> la naturesous-produits. Comme dans lecas des procédés biologiques,il reste encore à mieux comprendre<strong>les</strong> mécanismes réactionnelsintervenant au coursde l’ozonolyse.Ces considérations nous rappellentqu’il faut toujours garderune approche environnementaleglobale, afin de peser<strong>les</strong> avantages <strong>et</strong> inconvénientslorsqu’on veut implanter tel outel type de traitement dans unmilieu.Enfin, comme nous l’avons vu,<strong>les</strong> procédés biologiques actuelssont capab<strong>les</strong> d’éliminerenviron 80 % du flux de <strong>micropolluants</strong>,dont environ deuxtiers sont transférés vers <strong>les</strong>boues. Ce problème des bouesest en cours d’études, <strong>et</strong> lachimie se révèle encore unefois néces<strong>sa</strong>ire pour caractérisertous <strong>les</strong> flux de pollution<strong>et</strong> augmenter <strong>les</strong> potentialitésde traitement des stationsd’épuration.La chimie, science environnementalepour purifier l’eau ?96Nous mesurons à quel point la chimie est indispen<strong>sa</strong>bleà différents niveaux, à la fois pour caractériser<strong>les</strong> flux de pollution, définir des normespertinentes, de même que pour augmenter <strong>les</strong>potentialités de traitement des stations d’épuration.Aux traitements tertiaires qui ont étéprésentés, <strong>et</strong> qui font intervenir des procédéschimiques, nous pouvons ajouter <strong>les</strong> solutionsde traitement biologique par la phytoremédiation,abordée dans le Chapitre de J.-L. Morel.Mais il est clair que ces actions doivent êtreaccompagnées par d’autres actions à différentsniveaux du bassin ver<strong>sa</strong>nt. On pense enparticulier aux pollutions pluvia<strong>les</strong>, qui ontun impact très important en termes de fluxsur certains polluants tels que <strong>les</strong> HAP, <strong>les</strong>métaux ou certains pesticides (voir le Chapitred’É. Villenave). Une meilleure gestion des pollutionsest donc à rechercher dans ce sens.D’autre part, une action doit aussi être menéeen vue de réduire des rej<strong>et</strong>s industriels, notammentau niveau des industries de la chimie : uneffort collaboratif est à mener pour réduire dès


L’eau, <strong>sa</strong> <strong>purification</strong> <strong>et</strong> <strong>les</strong> <strong>micropolluants</strong>Figure 16La chimie en tant que science environnementale : des actions sont possib<strong>les</strong> <strong>et</strong> néces<strong>sa</strong>ires à tous niveaux dubassin ver<strong>sa</strong>nt.le départ l’émission des substances en modifiantd’une part <strong>les</strong> procédés industriels, mai<strong>sa</strong>ussi en m<strong>et</strong>tant en place des traitementslocalisés sur ces industries qui peuvent êtreconnectés au réseau d’as<strong>sa</strong>inissement.Citons également <strong>les</strong> actions menées au niveaudes pollutions diffuses, en particulier cel<strong>les</strong>provenant d’activités agrico<strong>les</strong>, en modifiant soit<strong>les</strong> molécu<strong>les</strong> ajoutées, soit <strong>les</strong> pratiques el<strong>les</strong>mêmes.Dans ce cadre, on a par ailleurs besoindes connais<strong>sa</strong>nces en chimie pour adapter lasurveillance des milieux aux nouveaux critèresde qualités liés aux <strong>micropolluants</strong>.Pour toutes ces raisons, nous pouvons vraimentdire que la chimie est devenue une scienceenvironnementale indispen<strong>sa</strong>ble à la préservationde l’environnement aquatique (Figure 16).97


La chimie <strong>et</strong> la natureCréditsphotographiquesFig. 2 <strong>et</strong> 3 : Istrea.Fig. 5B : Licence CC-BY-SA-3.0-2.5-2.0-1.0, Polimerek.Fig. 12 : Ozonia - DegrémontTechnologies.Fig. 14 : Poyatos J. M., MuñioM.M., Almecija M.C., Torres J.C.,Hontoria E., Osorio F. (2010).Advanced Oxidation Processesfor Wastewater Treatment: Stateof the Art. Water Air Soil Pollution,205 : 187-204.

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